National Legislation on Labour and Social Rights
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Suite à son observation précédente, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement à la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2002 ainsi que des débats qui s’en sont suivis. Elle prend note également du rapport soumis par le gouvernement sur l’application de la convention en réponse à son observation précédente.
1. Dans sa précédente observation, la commission a pris note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), transmis au gouvernement en octobre 2001, faisant état de la persistance de certaines formes d’esclavage en Mauritanie. La CISL alléguait, notamment, qu’aux yeux de certaines personnes la naissance continuait à imposer un statut inférieur aux descendants d’esclaves. Ces personnes de statut inférieur, qui travaillent comme paysans, bergers de troupeaux ou serviteurs, dépendent entièrement de leur maître à qui elles donnent l’argent qu’elles gagnent ou pour lequel elles travaillent directement en échange de nourriture et d’un logement. La commission a noté que, selon la CISL, «le problème central ne relève pas du statut légal de l’esclavage en Mauritanie, mais de l’abolition en pratique de l’esclavage et de la servitude involontaire (ce que le gouvernement nomme «les séquelles de l’esclavage»)».
La commission note que, dans sa déclaration à la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2002, le représentant gouvernemental a indiqué que la Mauritanie a l’intention de réviser son Code du travail afin de renforcer l’interdiction du travail forcé, mais «a tenu à rappeler que le gouvernement n’a pas reconnu l’existence de pratiques de travail forcé, fussent-elles isolées, dans le pays».
La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que l’ordonnance de 1980 n’était nécessaire ni sur le plan juridique, car la Constitution du 20 mai 1961 et les lois du pays, en particulier la loi no 63-023 du 23 janvier 1963 portant Code du travail, avaient aboli l’esclavage, ni dans les faits car l’esclavage avait déjà disparu de la société mauritanienne. Selon le gouvernement, les descendants des anciens esclaves ne sont plus aujourd’hui considérés comme des esclaves et le rattachement d’une personne à telle ou telle ancienne catégorie sociale n’a aujourd’hui aucune répercussion sur ses droits. Le gouvernement indique de plus que cette stratification sociale n’a plus d’impact dans la vie réelle car il n’existe plus de métiers réservés à une catégorie de la population ni de privilèges inhérents à d’autres. Le gouvernement indique que des séquelles de l’ancien système social peuvent subsister au niveau des attitudes et mentalités dans certaines zones reculées, malgré les mesures prises et les transformations socio-économiques. Le gouvernement observe par ailleurs que de telles attitudes ne disparaîtront qu’avec le temps mais, pour autant, leur existence ne saurait être assimilée à l’esclavage.
La commission note qu’en ce qui concerne le cas cité dans le rapport de la CISL concernant un jeune homme et une jeune fille de 13 ans forcés par leur maître à travailler respectivement comme berger et gardienne de chameau avant de fuir et d’être rattrapés avec l’aide de la police le gouvernement indique qu’il s’agissait en réalité d’une femme mariée et mère de deux enfants, au sujet de laquelle un responsable politique local avait déclaré au Wali de l’Adrar qu’elle était réduite à l’esclavage, allégation démentie suite à l’ouverture de deux enquêtes par les Walis de l’Adrar et du Tagant. Selon le gouvernement, l’audition de l’intéressée, dans le cadre de la première enquête, aurait révélé qu’elle travaillait dans le cadre d’une relation d’emploi à laquelle elle avait ensuite décidé de mettre fin.
La commission note par ailleurs que la mission technique du BIT, acceptée par le gouvernement, n’a finalement pas pu se rendre dans le pays pour examiner la situation du travail forcé et du travail des enfants. Elle espère que cette mission pourra se rendre prochainement dans le pays afin de rechercher les éléments qui permettront à la commission d’évaluer la réalité de la situation dans les faits et d’assurer la pleine conformité de la législation et de la pratique nationales avec la convention.
2. Article 25 de la convention. Dans sa précédente observation, la commission a noté qu’il n’existe pas dans la législation nationale de disposition juridique imposant des sanctions légales selon l’article 25 de la convention. Elle avait constaté, dans ses précédents rapports, que le travail forcé est interdit par le Code du travail, mais que ce dernier ne s’applique qu’aux relations entre employeurs et travailleurs. Elle avait invité le gouvernement à prendre des mesures pour élargir l’interdiction de toute forme de travail forcéà des relations de travail telles que celles qui pourraient résulter de survivances anciennes. La commission note que le gouvernement se réfère, dans son dernier rapport, à l’article 56 du livre V du Code du travail qui punit d’une peine d’emprisonnement et/ou d’amende les auteurs d’infractions aux dispositions de l’article 3 du livre I du Code du travail, lequel interdit le travail forcé ou obligatoire, défini comme tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré. Elle note l’information contenue dans le rapport du gouvernement selon laquelle l’article 5 du Code du travail en voie d’adoption étendra effectivement l’interdiction du travail forcéà toute relation de travail, même si elle ne résulte pas d’un contrat. Elle note que cet article prévoit également que toute infraction à ses dispositions est passible des sanctions prévues par la réglementation en vigueur. La commission note que, selon le gouvernement, ces sanctions sont prévues par le projet de Code du travail. La commission prie le gouvernement de préciser quelles sanctions sont applicables en cas d’infraction aux dispositions de l’article 5 du projet de Code du travail. La commission note que ce projet a été adopté par le Conseil national du travail en mai 2002 et qu’il sera présenté au gouvernement en vue de son adoption lors de la prochaine session du Parlement en novembre-décembre 2002. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur le processus législatif en cours et de fournir une copie du Code du travail dès son adoption.
3. Dans ses commentaires précédents, qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission a demandé au gouvernement, à la suite de l’adoption de la loi no 71-059 du 25 février 1971 portant organisation générale de la protection civile, qui limite le pouvoir de réquisitionner de la main-d’œuvre à des circonstances exceptionnelles spécifiées, correspondant à la définition des cas de force majeure de l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention, de prendre des mesures pour abroger l’ordonnance de 1962 (conférant aux chefs de circonscriptions de très larges pouvoirs de réquisitionner des personnes). La commission a noté l’intention du gouvernement, exprimée dans son précédent rapport, d’abroger formellement l’ordonnance de 1962 et prié le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises à cet effet. Aucune information n’ayant été communiquée par le gouvernement sur ce point dans son dernier rapport, la commission se voit contrainte de réitérer sa demande. Elle prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires dans les plus brefs délais.
4. La commission avait relevé qu’aux termes des articles 1 et 2 de la loi no 70-029 du 23 janvier 1970 diverses catégories de personnes, aussi bien publiques que privées, peuvent être requises d’assurer leurs fonctions lorsque les circonstances l’exigent, notamment pour assurer le fonctionnement d’un service considéré comme indispensable pour la satisfaction d’un besoin essentiel du pays ou de la population. En vertu de l’article 5 de cette loi, quiconque n’aura pas déféréà un ordre de réquisition pris par l’autorité publique sera puni d’un emprisonnement d’un mois à un an ainsi que d’une amende. Dans son précédent rapport, le gouvernement a indiqué qu’il estime que les formes de réquisition prévues par la loi susmentionnée sont conformes à la convention et notamment que les termes «un service considéré comme indispensable pour la satisfaction d’un besoin essentiel du pays ou de la population» désignent les cas de force majeure prévus par l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. La commission avait prié le gouvernement de communiquer la liste complète des établissements considérés comme des services essentiels pour la population et qui sont concernés par une éventuelle réquisition selon la loi no 70-029. La commission note que le dernier rapport du gouvernement ne répond pas à ses commentaires sur ce point. Elle prie instamment le gouvernement de fournir les informations demandées dans son prochain rapport.
5. Dans ses précédents commentaires, qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission avait noté que le décret no 70-153 du 23 mai 1970 fixant le régime intérieur des établissements pénitentiaires contenait des dispositions permettant de concéder de la main-d’œuvre pénitentiaire à des particuliers et avait prié le gouvernement de mettre sa législation en conformité avec la convention. Dans son précédent rapport, le gouvernement a indiqué son intention de modifier ce décret. Le gouvernement n’ayant fourni aucune information à cet égard dans son dernier rapport, la commission réitère le ferme espoir que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.
6. La commission prend note des commentaires de la CISL datés du 9 septembre 2002, reçus au Bureau le 10 septembre 2002 et transmis au gouvernement le 31 octobre 2002, contenant des observations sur l’application de la convention no 29 en Mauritanie. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur la communication de la CISL.