National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note du rapport du gouvernement, de la discussion qui a eu lieu en juin 2005 à la Commission de la Conférence, des commentaires sur l’application de la convention présentés par le Conseil national des travailleurs organisés (CONATO) et le Conseil national de l’entreprise privée du Panama (CONEP), et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 10 août 2006, qui se réfèrent pour l’essentiel à des questions déjà soulevées par la commission. La commission par ailleurs prend note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1931 qui porte sur une plainte présentée par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) (voir le 318e rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 493 à 507), et du rapport de la mission d’assistance technique qui a séjourné au Panama du 6 au 9 février 2006.
1. La commission prend note des principales conclusions de la mission d’assistance technique et note en particulier que le gouvernement exprime sa volonté d’adapter la législation aux exigences des conventions nos 87 et 98 mais affirme qu’il ne peut pas lancer une réforme du Code du travail sans un consensus entre les syndicats et les organisations patronales. De plus, le gouvernement est convaincu que, au moins dans l’immédiat, ce consensus entre travailleurs et employeurs est très improbable. Il est disposé à lancer diverses initiatives pour atteindre progressivement l’objectif de la révision des normes en question, c’est‑à‑dire des mesures qui permettent de rapprocher les points de vue des parties et de créer le consensus.
2. La commission rappelle que ses commentaires précédents se réfèrent aux questions suivantes qu’elle avait précédemment soulevées et aux vues du gouvernement et des partenaires sociaux. Ces vues figurent en annexe du rapport de la mission d’assistance technique:
a) Faculté de la Direction régionale ou générale du travail de soumettre les conflits collectifs à l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à une grève dans une entreprise du service public, même s’il ne s’agit pas de services essentiels au sens strict du terme puisqu’il s’agit dans ce cas des transports (art. 452(3) et 486 du Code du travail).
b) Articles 174 et 178, dernier paragraphe, de la loi no 9 de 1994 portant création et réglementation de la carrière administrative, qui prévoient, respectivement, qu’il ne peut pas y avoir plus d’une association par établissement et que ces associations peuvent avoir des sections provinciales ou régionales, mais au maximum une section par province.
c) Article 41 de la loi no 44 de 1995, qui modifie l’article 344 du Code du travail et qui prescrit un nombre trop élevé de membres pour constituer une organisation professionnelle d’employeurs (10) et un nombre encore plus élevé pour constituer une organisation de travailleurs au niveau de l’entreprise (40).
d) Article 64 de la Constitution, qui exige d’être Panaméen pour pouvoir constituer le comité directeur d’un syndicat.
e) Obligation d’assurer un service minimum avec 50 pour cent des effectifs lorsqu’il s’agit d’entités qui fournissent des services publics essentiels, qui vont au-delà des services essentiels au sens strict et qui incluent les transports; toute infraction à cette disposition est passible de sanctions, en particulier le licenciement immédiat des fonctionnaires qui n’auraient pas accompli le service minimum requis en cas de grève (art. 152(14) et 185 de la loi no 9 de 1994).
f) Intervention législative dans les activités des organisations d’employeurs et de travailleurs (art. 452(2), 493(1) et 497 du Code du travail) (fermeture de l’entreprise en cas de grève et arbitrage obligatoire à la demande de l’une des parties). Le gouvernement a fourni à la mission d’assistance technique copie du décret exécutif no 32 de 1994 qui prévoit des services minimums visant à garantir la sécurité de l’entreprise et de ses biens, ainsi que les services d’entretien.
g) Nombre minimum de 50 fonctionnaires pour constituer une organisation de fonctionnaires en vertu de la loi sur la carrière administrative. Le gouvernement avait reconnu que ce nombre est élevé mais il avait indiqué que l’article 176 de la loi no 9 permet aux fonctionnaires de s’organiser par classe (catégorie) ou par secteur d’activité; la commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures afin de modifier la législation et de diminuer le nombre minimum de fonctionnaires requis pour constituer des organisations.
h) Déni du droit de grève des travailleurs du secteur maritime et des voies navigables (loi no 8 de 1998) et des zones franches d’exportation (loi no 25). Le gouvernement avait indiqué que l’article 49-A, paragraphe B, alinéa 15, de la loi no 25 de 1992 consacre le droit de grève des travailleurs des zones franches pour l’exportation, et qu’en ce qui concerne le droit de grève des travailleurs du secteur maritime qui relèvent du décret no 8 de 1998 une action en inconstitutionnalité a été intentée devant la Cour suprême de justice. La commission avait demandé au gouvernement ces deux textes ainsi que copie de la décision qu’adoptera la Cour suprême.
i) Interdiction aux fédérations et confédérations de déclarer la grève (interdiction des grèves d’opposition aux politiques économiques et sociales et illégalité des grèves qui ne sont pas liées à une convention collective d’entreprise). La commission avait souligné que les fédérations et confédérations devraient jouir du droit de grève et que les organisations chargées de défendre les intérêts socio-économiques et professionnels des travailleurs devraient en principe pouvoir utiliser la grève pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique et sociale qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres, et plus généralement pour les travailleurs, notamment en matière d’emploi, de protection sociale et de niveau de vie (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 165). La commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation afin de la rendre conforme aux principes susmentionnés.
j) Désaffiliation de la FENASEP, en vertu d’une décision des autorités, de la Confédération de la convergence syndicale. Le gouvernement avait indiqué que les fonctionnaires relèvent de la loi sur la carrière administrative. Il avait estimé qu’ils doivent s’affilier aux organisations correspondantes de fonctionnaires. La commission avait souligné que, si l’on peut admettre que les organisations de base des agents de la fonction publique soient limitées à cette catégorie de travailleurs, elles devraient cependant pouvoir s’affilier librement aux fédérations et confédérations de leur choix, y compris celles regroupant également des organisations du secteur privé [voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 193]. La commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation afin de la rendre conforme aux principes susmentionnés. Elle lui avait demandé de ne pas entraver l’affiliation de la FENASEP à la Confédération de la convergence syndicale.
k) Déni aux fonctionnaires du droit de constituer des syndicats. Le gouvernement avait indiqué que l’interprétation du CONATO n’est pas conforme à la réalité; le droit d’association des fonctionnaires est reconnu par la loi no 9 du 20 juin 1994 et, dans la pratique, la Fédération nationale des associations et organisations de fonctionnaires (FENASEP) fonctionne comme n’importe quelle organisation du secteur privé. Elle participe au CONATO et à la Conférence internationale du Travail. La commission avait souligné que, au‑delà de la terminologie, l’important est que les associations en question jouissent des droits consacrés par la convention. La commission note que la Fédération nationale des associations et organisations de fonctionnaires (FENASEP) a indiqué à la mission d’assistance technique qu’elle négociait avec le gouvernement le texte du projet de réforme partielle de la loi sur la carrière administrative.
l) Déni du droit de grève des fonctionnaires. Le gouvernement avait indiqué que la Constitution autorise des restrictions dans les cas prévus par la loi. La commission rappelle que l’interdiction du droit de grève dans la fonction publique devrait se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat [voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 158].
m) Déni du droit de grève dans les entreprises créées il y a moins de deux ans en vertu de la loi no 8 de 1981. Le CONATO avait signalé que l’article 12 de la loi établit qu’un employeur n’est pas tenu de conclure une convention collective au cours des deux premières années d’activité d’une entreprise. Par ailleurs, la législation générale ne permet la grève que dans le cadre de la négociation collective ou dans d’autres cas restrictifs. La commission avait demandé au gouvernement de transmettre ses commentaires à ce sujet.
n) Obligation de réunir la majorité des travailleurs de l’entreprise, du commerce ou de l’établissement pour déclarer la grève (art. 476, paragr. 2, du code). Le gouvernement avait estimé que cette restriction se justifie, étant donné les effets qu’a la grève en vertu de la législation nationale (fermeture de l’entreprise, interdiction de conclure de nouveaux contrats de travail, etc.). La commission prend bonne note des indications fournies à la mission par le gouvernement et les partenaires sociaux, à savoir que, si le pourcentage en question n’est pas atteint lors de la troisième assemblée syndicale, la majorité simple des votants est requise.
3. En ce qui concerne les questions susmentionnées, la commission note les positions suivantes communiquées par les partenaires sociaux à la mission d’assistance technique.
– A cet égard, le CONEP a indiqué que: a) il faut maintenir les transports dans la liste des services publics, étant donné que l’interruption des transports en cas de grève paralyserait les services essentiels, y compris les services qu’assurent les fonctionnaires. Selon lui, l’arbitrage à la demande d’une seule des parties n’est pas compatible avec la convention; b) il préfère ne pas se prononcer sur cette question; c) le nombre minimum de 40 travailleurs nécessaire pour constituer un syndicat est raisonnable; le nombre minimum d’employeurs nécessaire pour constituer un syndicat d’employeurs devrait être quatre; d) le moment n’est pas venu de procéder à une réforme constitutionnelle: le CONEP préfère ne pas se prononcer tant qu’il n’aura pas analysé la valeur de la convention de l’OIT par rapport à la Constitution. Dans la pratique, les employeurs constituent des chambres régies par le droit civil et non des syndicats, même si le Code du travail prévoit les syndicats d’employeurs; e) il préfère ne pas se prononcer sur cette question; f) il faut garantir en cas de grève le droit du personnel de direction d’accéder aux locaux de l’entreprise ainsi que la liberté de travailler des personnes qui ne font pas grève; g) il préfère ne pas se prononcer sur cette question; h) une action judiciaire en inconstitutionnalité a été intentée et une nouvelle législation sur le travail maritime est en cours d’élaboration; i) il préfère que soit maintenue la disposition qui interdit ce type de grève; j), k), l) il préfère ne pas se prononcer sur cette question; m) il est raisonnable de donner aux entreprises créées depuis moins de deux ans de l’oxygène pour qu’elles puissent stabiliser leur situation. Cette interdiction de la négociation collective, et indirectement de la grève, est donc raisonnable.
– Le CONATO a indiqué que: a) il faut supprimer aux fins de cet article les transports de la liste des services publics. De plus, il ne partage pas le point de vue de l’OIT, qui s’oppose à l’arbitrage obligatoire à la demande des travailleurs; b) il préfère que l’on maintienne l’unité syndicale dans un établissement public; c) le nombre minimum de travailleurs nécessaire pour constituer un syndicat devrait être 20. Le CONATO est d’accord avec la proposition qui vise à ce que les employeurs puissent former un syndicat avec quatre membres; d) le mouvement syndical ne souhaite pas modifier cette norme; e) il faut supprimer les transports de la liste des services publics essentiels; f) il ne faut pas modifier ces dispositions. Il faut continuer d’interdire aux employeurs d’entrer dans les locaux de l’entreprise pendant la grève; g) trente devrait être remplacé par 40, mais il faudrait supprimer l’expression «mais au maximum une section par province», car elle constitue une restriction; h) secteur maritime: étant donné que l’article 75 du décret-loi no 8 de 1998, contrairement au Code du travail, ne prévoit pas l’obligation de conclure des conventions collectives, mais dispose que les entreprises peuvent en conclure, cette disposition s’est traduite dans la pratique par le refus des cahiers de revendications qui portent notamment sur ce point, et donc par l’impossibilité dans les faits de déclarer une grève visant à rendre obligatoire la conclusion d’une convention collective; i) les organisations syndicales de niveaux différents devraient jouir du droit de grève dans leurs domaines respectifs de compétence, y compris les grèves d’opposition à la politique économique et sociale du gouvernement; j) il faudrait supprimer toute restriction à la possibilité pour les fédérations et confédérations de s’affilier à d’autres organisations de leur choix; k), l) secteur public: étant donné que les fonctionnaires sont exclus du champ d’application du Code du travail en vertu de l’article 2 du code, ils ne jouissent pas du droit de conclure des conventions collectives, droit qui n’est pas prévu dans la loi sur la carrière administrative. Même si l’article 135 de cette loi reconnaît aux associations le droit de négocier collectivement les différends, cette disposition n’est pas spécifiquement reliée à d’autres de façon à ce qu’elle soit opérationnelle, pas plus que n’est reconnu le droit de conclure des conventions collectives. Par ailleurs, les restrictions que prévoit l’article 183 empêchent d’exercer le droit de grève en cas de différends collectifs; m) l’article 12 de la loi no 8 de 1981 ne rend pas obligatoire la négociation de la convention collective pour les entreprises qui ont moins de deux ans. La conséquence dans la pratique de cette disposition est le refus des cahiers de revendications qui portent entre autres sur la négociation de la convention collective. Ainsi, le droit de négociation collective des travailleurs est restreint et, de plus, cette disposition empêche l’exercice du droit de grève lorsque les travailleurs demandent qu’une convention collective soit conclue.
– S’agissant des zones franches d’exportation, la commission note que, selon le CONEP, les travailleurs des zones franches d’exportation peuvent faire grève s’ils disposent de syndicats d’industrie. Le CONATO indique que, en ce qui concerne l’article 49, paragraphe B, alinéa 9, de la loi no 25 de 1992, étant donné qu’il établit aussi que les entreprises ne peuvent pas conclure des conventions collectives, la situation est la même que dans le secteur maritime, à savoir que les travailleurs ne peuvent pas déclarer une grève visant à obtenir qu’une convention collective soit conclue. Le gouvernement signale qu’il existe un nouveau projet de loi sur les zones franches d’exportation. La commission prie le gouvernement d’envoyer une copie du texte de loi dès qu’il sera adopté.
4. La commission note que le gouvernement déclare que: l) à plusieurs reprises, il s’est dit disposé à harmoniser la législation et la pratique nationales avec ces conventions mais, pour cela, il faut réformer le Code du travail, et le gouvernement ne pourrait promouvoir ces réformes que s’il y a un consensus entre les organisations d’employeurs et de travailleurs; 2) le rapport final de la mission d’assistance technique n’a pas encore été reçu, mais le gouvernement indique que, pendant les réunions que la mission a tenues avec les partenaires sociaux, les divergences entre le CONEP et le CONATO étaient notoires en ce qui concerne la réforme du Code du travail sur les points ayant trait aux conventions nos 87 et 98; 3) le gouvernement attend le rapport final de la mission.
5. La commission note que certaines dispositions juridiques pourraient faire très prochainement l’objet de réformes puisque le gouvernement, le CONATO et le CONEP ne s’y opposent pas. Il s’agit en particulier des questions suivantes: l) fixer à quatre le nombre d’employeurs nécessaires pour former un syndicat d’employeurs; 2) supprimer les restrictions en vigueur à la libre affiliation des associations de fonctionnaires à d’autres organisations syndicales, en particulier des organisations de niveau supérieur qui réunissent des fonctionnaires et d’autres catégories de travailleurs; et 3) permettre que les associations de fonctionnaires aient plus d’une section par province.
La commission constate avec regret que les divergences entre la législation et la pratique nationales, d’une part, et la convention, d’autre part, existent depuis de nombreuses années. Elle constate aussi qu’il y a des restrictions graves parmi celles que le gouvernement ne souhaite pas modifier, par exemple l’imposition de l’unicité syndicale dans les établissements publics, l’obligation d’être panaméen pour pouvoir être dirigeant syndical, ou l’interdiction de faire grève contre la politique économique et sociale du gouvernement. La commission demande au gouvernement, comme il s’y est engagé, de tenir des réunions avec les partenaires sociaux sous la forme de séminaires ou d’ateliers, avec l’aide du BIT, et de promouvoir activement le dialogue tripartite sur l’ensemble des questions en suspens. La commission espère pouvoir constater prochainement des améliorations dans la législation. Elle demande au gouvernement de la tenir informée à ce sujet et de veiller, comme il s’y est engagé devant la mission d’assistance technique, à ce que les projets de réforme de la législation sur les syndicats ne servent pas à réglementer ou à inclure d’autres points.
La commission adresse au gouvernement une demande directe sur l’action en inconstitutionnalité qui a trait au décret-loi no 8 de 1998 concernant le droit de grève des travailleurs du secteur maritime et des voies navigables, sur le projet de réforme de la loi relative aux zones franches d’exportation (projet de loi sur les zones de commerce mondial) et sur le projet de loi de réforme partielle de la loi sur la carrière administrative.