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Interim Report - Report No 17, 1956

Case No 97 (India) - Complaint date: 12-FEB-54 - Closed

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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 120. La plainte, qui figure dans une lettre et un mémorandum en date du 12 février 1954 et qui est précisée dans une autre communication datée du 20 mai 1954 - ces trois communications ayant été adressées directement au B.I.T par l'Association des employés des compagnies d'assurance de la province de Bihar -, contient les allégations suivantes:
    • Allégations relatives au licenciement de M. N. N. Bhattacharya
  2. 121. M. Nagendra Nath Bhattacharya, employé de la New India Assurance Company à Patna, tenta d'amener ses collègues à constituer avec lui un syndicat. Il est allégué que les employeurs s'efforcèrent de faire échouer ses efforts en le mettant personnellement dans une situation difficile ; par exemple, ils lui adressèrent à intervalles réguliers des réprimandes pour son travail, ils licencièrent cinq employés de bureau pour que le nombre total des employés soit inférieur à sept, chiffre minimum requis par la loi pour que puisse se constituer un syndicat, ils n'engagèrent des employés qu'à court terme, en licenciant et en transférant constamment. M. Bhattacharya a été licencié en 1949 en raison de son activité syndicale, sans qu'il lui soit donné de préavis et sans que son renvoi ait été motivé.
  3. 122. L'affaire ayant été portée devant lui, le conciliateur de Patna constata que la compagnie n'était pas en mesure de donner des raisons valables pour le licenciement de M. Bhattacharya et engagea celle-ci à réintégrer cet employé; la compagnie refusa de procéder à une réintégration.
  4. 123. En 1951, l'organisation plaignante reprit l'affaire Bhattacharya à son compte. Le 3 mai 1951, le gouvernement renvoya l'affaire devant le tribunal du travail de Dhanbad, mais, sur un appel de la compagnie, la Haute Cour de Patna arrêta l'action engagée par ce tribunal en invoquant le fait qu'à son avis, il ne s'agissait pas d'un différend du travail au sens de la loi de 1947 sur les conflits du travail, le cas n'ayant pas été présenté comme tel par le syndicat de M. Bhattacharya. Le gouvernement refusa d'interjeter appel contre cette décision auprès de la Cour suprême.
  5. 124. Le plaignant demande à l'O.I.T de faire des démarches en faveur de M. Bhattacharya auprès de la compagnie et, au cas où celles-ci resteraient sans effet, de demander au gouvernement de soumettre à nouveau le cas au tribunal du travail. Le plaignant ne considère pas cette affaire comme un cas individuel, mais comme une atteinte aux droits démocratiques et syndicaux de la classe laborieuse.
    • Allégations relatives à la législation indienne en matière de relations professionnelles
  6. 125. De l'avis du plaignant, le cas de M. Bhattacharya illustre le fait que la législation indienne en matière de relations professionnelles est déficiente à beaucoup d'égards: a) il n'existe pas de législation uniforme et complète qui régisse l'ensemble des relations professionnelles ; b) il n'existe pas de législation qui régisse les relations professionnelles dans les assurances ; c) il n'existe pas de disposition qui oblige les employeurs à reconnaître les syndicats et à négocier avec eux ; d) les conciliateurs officiels ne sont pas investis du pouvoir de faire respecter leurs décisions et de nombreux syndicats ne sont pas en mesure de supporter les dépenses que comporte la procédure des tribunaux du travail ; e) les employeurs peuvent retarder ou annuler les sentences arbitrales en invoquant des vices techniques ou juridiques; f) bien que la section 33 de la loi de 1947 sur les conflits du travail dispose que l'employeur ne pourra modifier le statut d'un travailleur ni lui infliger par ailleurs de sanction pendant une instance de conciliation ou d'arbitrage, le travailleur ne peut saisir les tribunaux en cas de violation de cette disposition s'il n'a pas obtenu du gouvernement l'autorisation de le faire, autorisation qui est rarement accordée.
  7. 126. En conséquence, allègue le plaignant, les employeurs sont entièrement libres d'agir à l'égard des travailleurs comme bon leur semble. Ils embauchent les travailleurs sans leur délivrer de contrat, briment et menacent de renvoyer ceux qui tentent de constituer un syndicat ou déploient une activité syndicale.
    • Allégations relatives à l'interdiction d'un défilé organisé par des employés de banque
  8. 127. En février 1954, les autorités auraient demandé au Tribunal supérieur du travail de l'Inde d'exclure les employés de banque travaillant dans des localités de moins de 30.000 habitants du champ d'application des décisions judiciaires et de tous autres règlements définissant les conditions d'emploi. L'Association panindienne des employés de banque et l'Union centrale des travailleurs de banque ont alors invité les travailleurs à organiser le 27 février 1954 une journée de protestation. L'Association des employés de banque de Patna a demandé au juge de district d'autoriser les employés de banque à organiser au jour prévu un défilé pacifique; cette autorisation ne fut pas accordée.
    • Allégations relatives à des atteintes aux droits syndicaux des employés de la Banque de Bihar (Patna)
  9. 128. La Banque pratique une politique de discrimination antisyndicale à l'égard de ses employés ; le gouvernement refuse cependant d'intervenir. Dans les vingt-quatre heures qui ont suivi son élection comme secrétaire général du syndicat, M. K. B. Lal a été transféré à une succursale située à 100 miles du bureau central ; cette mesure visait à empêcher M. Lal d'exercer ses fonctions syndicales. Une plainte a été adressée au Département du travail du gouvernement de l'Inde et les fonctionnaires de ce département ont acquis la conviction que la Banque se livrait à une politique de discrimination antisyndicale ; le gouvernement n'a pris toutefois aucune mesure. Il en a été de même d'une plainte présentée sur le cas de Deonath Sinha, qui, ayant organisé une association des employés de la succursale de Motihari, fut immédiatement transféré à Bénarès. M. K. P. Narayan, employé à la succursale de Buxar, était secrétaire du syndicat local. Il a protesté contre le fait que la direction falsifiait les registres et ne laissait apparaître qu'un nombre d'heures de travail inférieur au nombre réel. Il fut alors transféré à une autre succursale, bien que le fonctionnaire du gouvernement chargé de la conciliation eût écrit à la direction pour l'inviter à maintenir M. Narayan dans le poste qu'il occupait jusqu'alors.
    • ANALYSE DE LA PREMIERE REPONSE DU GOUVERNEMENT
  10. 129. Dans sa première réponse, datée du 24 novembre 1954, le gouvernement a présenté les observations suivantes:
    • Allégations relatives au licenciement de M. N. N. Bhattacharya
  11. 130. Aucune accusation n'a été portée contre M. Bhattacharya et il n'a été procédé à aucune enquête par la compagnie avant qu'elle ne le congédie. Le fonctionnaire chargé de la conciliation (Patna) ayant essayé sans succès de régler le différend, le gouvernement a renvoyé la question devant le tribunal du travail, renvoi qui a été annulé par la Haute Cour de Patna. Le gouvernement a laissé à M. Bhattacharya le soin d'interjeter appel contre cette décision, mais celui-ci a laissé expirer les délais. Par la suite, l'Association des employés d'assurance de la province de Bihar endossa le conflit. En décembre 1953, une nouvelle conciliation fut tentée qui aboutit de nouveau au renvoi de l'affaire devant le tribunal du travail par le gouvernement. Le gouvernement a veillé à ce que M. Bhattacharya soit traité équitablement ; si l'affaire est restée si longtemps en suspens, c'est essentiellement parce que le syndicat ne l'a reprise que fort tardivement à son compte. Le tribunal du travail étudiera l'ensemble du cas et, s'il juge que le licenciement n'était pas justifié, il pourra ordonner, soit la réintégration de M. Bhattacharya, soit le paiement d'un dédommagement, soit les deux.
    • Allégations relatives à la législation indienne en matière de relations professionnelles
  12. 131. En Inde, les relations professionnelles sont régies par les lois suivantes: loi de 1947 sur les conflits du travail, loi de 1926 sur les syndicats et loi de 1946 sur l'emploi dans l'industrie (règlement). Le gouvernement les réexamine de temps à autre pour les modifier si l'expérience en montre la nécessité. Les deux premières lois s'appliquent également aux banques et aux compagnies d'assurance. La loi sur l'emploi dans l'industrie (règlement) ne s'applique pas aux banques et aux compagnies d'assurance ; cependant, les sentences des tribunaux ont, dans une certaine mesure, donné des garanties aux employés de ces entreprises. Cette loi ne s'applique actuellement qu'aux entreprises qui comptent plus de 100 travailleurs ; toutefois, on envisage dès à présent d'en étendre la portée, tant il est vrai que le gouvernement souhaite que la loi protège le plus grand nombre possible de salariés dans le plus grand nombre possible de branches d'activité.
  13. 132. A l'origine, la loi de 1926 sur les syndicats ne prévoyait pas la reconnaissance obligatoire des syndicats. Un amendement dans ce sens avait été adopté en 1947, qui ne fut pas mis en vigueur ; en effet, le projet de loi sur les syndicats de 1950 se trouvait alors en préparation et était destiné à remplacer la loi de 1926 ; ce projet prévoyait la reconnaissance obligatoire des syndicats. Il tomba dans l'oubli au moment de la dissolution du Parlement. Le gouvernement ne considère pas qu'il soit urgent ou nécessaire à l'heure actuelle de rendre obligatoire la reconnaissance des syndicats. La loi offre aux syndicats une entière protection et ceux-ci jouissent de tous leurs droits, qu'ils aient été reconnus par les employeurs ou qu'ils ne l'aient pas été.
  14. 133. La conciliation est essentiellement volontaire et les décisions ne sauraient être imposées aux parties ; toutefois, les règlements obtenus à la suite d'une conciliation ont force de loi.
  15. 134. En ce qui concerne les principes à suivre en cas de conflit, le gouvernement estime qu'il n'est pas possible d'établir un réseau de règles rigides susceptibles de s'appliquer à toutes les situations qui pourront surgir de l'application du système mis en oeuvre en vue d'améliorer les relations professionnelles.
  16. 135. Toute plainte au tribunal pouvant entraîner des sanctions pénales est subordonnée à une autorisation préalable du gouvernement ; il est cependant toujours loisible au travailleur qui s'estime lésé de déposer une plainte devant le tribunal du travail.
    • Allégations relatives à des atteintes portées aux droits syndicaux des employés de la Banque de Bihar et à l'interdiction d'un défilé organisé par des employés de banque
  17. 136. Le gouvernement ne présente aucune observation sur ces allégations dans sa première réponse.
    • DEMANDE D'INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
  18. 137. Lorsqu'il a examiné le cas à sa lime session (Genève, février 1955), le Comité a pris note de la déclaration du gouvernement concernant les allégations relatives au licenciement de M. Bhattacharya, déclaration selon laquelle le cas de M. Bhattacharya se trouvait encore en instance devant le tribunal du travail. Estimant que les délibérations du tribunal étaient susceptibles de lui fournir d'utiles éléments d'information tant sur le point de savoir si ces allégations particulières sont fondées que lors de l'examen des autres allégations se rapportant à la législation qui régit, en Inde, les relations professionnelles, il a décidé de surseoir à l'examen du cas en attendant que soient connus les résultats de l'instance engagée et de demander au gouvernement de l'informer de ces résultats en lui faisant tenir une copie du jugement. Le Comité a décidé en outre de demander au gouvernement de bien vouloir lui faire parvenir ses observations sur les allégations relatives aux droits syndicaux des employés de la Banque de Bihar et à l'interdiction d'un défilé organisé par ces employés de banque, allégations à propos desquelles le gouvernement s'est abstenu de faire des commentaires dans sa communication du 24 novembre 1954.
  19. 138. Par une lettre en date du 11 mars 1955, le Directeur général a porté la décision du Comité à la connaissance du gouvernement de l'Inde. Le gouvernement, par une communication en date du 18 avril 1955, a fait savoir que son enquête sur la question n'était pas encore terminée. Aucune autre observation n'étant parvenue au Bureau lorsque s'est réunie la 12ème session du Comité (Genève, mai 1955), ce dernier a décidé à nouveau d'ajourner l'examen du cas.
  20. 139. Cette décision du Comité a été portée à la connaissance du gouvernement de l'Inde par une lettre du Directeur général en date du 15 juin 1955, dans laquelle le Directeur général demandait au gouvernement de lui faire parvenir les observations demandées le plus rapidement possible. Le gouvernement a répondu par une lettre en date du 21 juin 1955 et a présenté des informations complémentaires dans une communication en date du 14 octobre 1955.
    • ANALYSE DES DERNIERES REPONSES DU GOUVERNEMENT
    • Allégations relatives au licenciement de M. N. N. Bhattacharya
  21. 140. Dans sa communication du 21 juin 1955, le gouvernement déclarait que le cas était toujours en instance et qu'il lui était impossible d'intervenir pour accélérer la procédure. Dans sa communication du 14 octobre 1955, il déclare que l'affaire a été réglée et la plainte retirée par accord mutuel, M. Bhattacharya ayant obtenu un dédommagement de la part de ses employeurs.
    • Allégations relatives à l'interdiction d'un défilé d'employés
  22. 141. Le gouvernement, dans sa communication du 21 juin 1955, déclare que l'Association des employés de banque de Patna, conformément aux dispositions de la loi de 1949 sur le maintien de l'ordre public (Bihar), loi dont il joint un exemplaire à sa communication, a demandé l'autorisation d'organiser un défilé à Patna le 27 février 1954. Le magistrat compétent, investi des pouvoirs nécessaires pour refuser ou accorder semblable autorisation, a refusé cette autorisation. Aux termes de la législation indienne, le juge de district est responsable du maintien de l'ordre. Dans le cas particulier, il a estimé qu'un défilé organisé pendant les heures de travail serait indésirable, car, bien que la demande eût été présentée pour 500 personnes, il était à craindre que des milliers de personnes viennent se joindre à la manifestation, celle-ci devant se dérouler dans les quartiers les plus animés de la ville et risquant ainsi d'engendrer du désordre et un encombrement de la circulation. C'est donc pour des raisons ayant trait au maintien de l'ordre que la manifestation a été interdite.
    • Allégations relatives à la violation des droits syndicaux des employés de la Banque de Bihar (Patna)
  23. 142. Les dernières réponses du gouvernement ne contiennent aucune observation sur ces allégations, qui, on se le rappellera, n'avaient pas non plus fait l'objet d'observations dans la première réponse du gouvernement.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Allégations relatives au licenciement de M. N. N. Bhattacharya
    1. 143 Il est allégué que les employeurs de M. Bhattacharya, la New India Assurance Company, après avoir mis tout en oeuvre pour faire obstacle aux efforts déployés par M. Bhattacharya en vue d'organiser ses camarades, auraient renvoyé celui-ci en 1949 en raison de ses activités syndicales. La première tentative en vue de saisir du cas le tribunal du travail avait échoué à la suite d'un vice de forme. Le plaignant demandait notamment à l'O.I.T d'intervenir auprès de la compagnie en faveur de M. Bhattacharya. Cependant que le tribunal se trouvait saisi du cas pour la seconde fois, les parties arrivèrent à une solution amiable. Le gouvernement indique qu'aux termes de l'accord intervenu, toute contestation disparaît et le tribunal est dessaisi du cas. M. Bhattacharya ne sera pas réintégré, mais touchera une indemnité de compensation se montant à 10.000 roupies ; de plus, les parties sont convenues de décider qu'il ne subsiste entre elles aucune contestation.
    2. 144 Dans ces conditions, le Comité estime, les parties ayant abouti à un accord amiable incorporé dans un arrêt du tribunal du travail compétent, que cet aspect du cas est devenu sans objet. Tout en prenant la précaution - comme il l'a fait dans le cas no 66 relatif à la Grèce - de s'assurer qu'une plainte déposée n'a pas été retirée à la suite de pressions quelconques, le Comité considère qu'un accord mutuel entre la compagnie et le syndicat directement intéressé, accord qui par surcroît a été incorporé dans un arrêt judiciaire du tribunal compétent, offre toutes les garanties nécessaires. Le Comité, tout en insistant sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale en matière d'emploi, en particulier contre le licenciement d'un travailleur ou tout autre acte tendant à lui porter préjudice en raison de son appartenance ou de son activité syndicale, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect de la plainte n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
  • Allégations relatives à la législation indienne en matière de relations professionnelles
    1. 145 Les plaignants relèvent un certain nombre de vices dans la législation indienne en matière de relations de travail et prétendent que l'affaire Bhattacharya est une conséquence des lacunes qu'ils déplorent.
    2. 146 Les plaignants allèguent tout d'abord qu'il n'existe pas de législation complète couvrant l'ensemble du domaine des relations professionnelles. Le gouvernement cite trois lois : loi de 1947 sur les différends du travail, loi de 1926 sur les syndicats, loi de 1946 sur l'emploi dans l'industrie (règlement) ; il déclare qu'elles font l'objet d'un réexamen de temps à autre en vue d'être modifiées si l'expérience en montre la nécessité, mais précise qu'il est impossible d'élaborer des textes qui couvriraient tous les cas susceptibles de se produire. Le Comité estime qu'en l'absence d'une plainte spécifique alléguant des atteintes aux droits syndicaux, il ne lui appartient pas de se prononcer sur le point de savoir si un pays doit ou ne doit pas élaborer une législation couvrant tous les aspects des relations professionnelles.
    3. 147 Les plaignants allèguent par ailleurs qu'aucune législation ne s'applique aux relations professionnelles dans les assurances. Le gouvernement fait remarquer que la loi de 1926 sur les syndicats et la loi de 1947 sur les différends du travail s'appliquent aux entreprises d'assurance ; le fait que le cas de M. Bhattacharya, employé d'assurance, ait été soumis au tribunal conformément aux dispositions de la loi de 1947 tend à confirmer cette assertion. Le Comité considère donc que cet aspect de la plainte n'est pas justifié par les faits.
    4. 148 En troisième lieu, les plaignants allèguent que la législation existante ne fait pas une obligation aux employeurs de reconnaître les syndicats et de négocier avec eux. Le gouvernement n'estime pas qu'il soit nécessaire de pré voir dans la loi la reconnaissance obligatoire des syndicats ; il déclare cependant que les syndicats bénéficient d'une protection légale et ont le droit d'exercer leurs droits syndicaux. Dans deux cas antérieurs, le Comité avait considéré que lorsqu'un gouvernement a, dans sa législation, reconnu les syndicats comme étant habilités à réglementer les relations nées du travail, il n'est pas obligé de rendre obligatoires les négociations collectives. Dans le cas particulier, le Comité estime que le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes que la législation indienne sur ce point porterait atteinte aux droits syndicaux.
    5. 149 Les plaignants allèguent que les conciliateurs officiels n'ont pas le pouvoir de faire respecter leurs décisions et que de nombreux syndicats ne sont pas en mesure de supporter les frais que comporte la procédure des tribunaux du travail. Le gouvernement déclare que la conciliation est essentiellement volontaire et que les décisions ne sauraient être imposées aux parties, mais que, toutefois, les règlements obtenus à la suite d'une conciliation ont force de loi. Le Comité estime que la conciliation constitue essentiellement un effort tendant à amener les parties à conclure un accord et que, si un accord librement conclu a force de loi, le fait qu'un conciliateur officiel ne puisse imposer son opinion quant au contenu d'un accord ne constitue pas une infraction aux droits syndicaux.
    6. 150 Les plaignants allèguent que les employeurs peuvent retarder ou annuler les sentences arbitrales en invoquant des vices techniques ou juridiques. Le seul argument apporté à l'appui de cette thèse est que la Haute Cour a arrêté l'action engagée devant le tribunal dans l'affaire Bhattacharya. Le Comité estime que le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes à l'appui de cette allégation.
    7. 151 Enfin, il est allégué que, si un employeur modifie le statut d'un travailleur ou lui inflige une sanction pendant l'instance de conciliation ou d'arbitrage, en violation de l'article 33 de la loi de 1947 sur les conflits du travail, le travailleur ne peut saisir les tribunaux de cette violation de la loi s'il n'a pas obtenu l'autorisation du gouvernement. Toutefois, le gouvernement signale qu'il est toujours loisible au travailleur qui s'estime lésé de déposer une plainte devant le tribunal du travail, bien que toute plainte au tribunal pouvant entraîner des sanctions pénales soit subordonnée à une autorisation préalable du gouvernement. Le Comité considère que puisqu'un recours devant le tribunal du travail est possible, le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes établissant qu'il y a sur ce point violation des droits syndicaux par le régime en vigueur en ce qu'il ne permet pas une action pénale.
    8. 152 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations n'appellent pas un nouvel examen.
  • Allégations relatives à l'interdiction d'un défilé organisé par des employés de banque
    1. 153 Il est allégué qu'au moment où les autorités ont demandé au Tribunal supérieur du travail de l'Inde d'exclure les employés de banque travaillant dans des localités de moins de 30.000 habitants du champ d'application des décisions judiciaires et de tous autres règlements définissant les conditions d'emploi, l'Association des employés de banque de Patna a demandé au juge de district d'autoriser les employés de banque à organiser un défilé pacifique le 27 février 1954, date à laquelle l'Union centrale des travailleurs de la banque avait invité ceux-ci à observer une journée de protestation ; cette demande n'a pas été agréée. Le gouvernement déclare que l'autorisation a été refusée par le juge de district auquel elle avait été demandée, conformément aux dispositions de la loi de 1949 sur le maintien de l'ordre public (Bihar), parce que ce fonctionnaire, responsable du maintien de l'ordre public, estimait qu'un défilé organisé pendant les heures de travail dans le quartier le plus animé de la ville risquerait d'encombrer la circulation et d'engendrer des désordres.
    2. 154 Le Comité a souligné à plusieurs reprises que le droit d'organiser des réunions publiques constitue un des aspects importants de l'exercice des droits syndicaux. Il semble toutefois, d'après la réponse du gouvernement, que l'interdiction qui fait l'objet de la plainte n'affectait pas une réunion publique, ni même une manifestation publique considérée comme telle, mais que le passage des manifestants formés en cortège sur la voie publique dans les quartiers les plus animés de la ville de Patna pendant les heures de travail pouvait normalement faire craindre qu'il n'y eût des désordres et un encombrement de la circulation. Dans ces conditions, le Comité, suivant le précédent déjà établi pour le cas no 99 relatif à la France, considère que le plaignant n'a pas apporté la preuve que la mesure prise constituait une infraction à l'exercice des droits syndicaux ; aussi le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations n'appellent pas un nouvel examen.
  • Allégations relatives à des atteintes aux droits syndicaux des employés de la banque de Bihar (Patna)
    1. 155 Comme preuve de l'allégation selon laquelle la banque pratique une politique de discrimination antisyndicale à l'égard de ses employés, le plaignant mentionne trois cas particuliers où certaines personnes auraient fait l'objet de mesures discriminatoires ; il donne des renseignements détaillés sur les mesures qui auraient été appliquées aux personnes en question. Les renseignements paraissant suffisamment précis et détaillés, et le gouvernement ne s'y étant référé dans aucune de ses réponses, le Comité considère qu'avant de formuler ses recommandations sur cet aspect du cas, il devrait demander à nouveau au gouvernement de présenter sur ce point les observations qu'il jugerait utile de faire ; le Comité pourrait ajourner à sa prochaine session l'examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 156. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider que, sous réserve des observations qui figurent dans le paragraphe 144, les allégations relatives au licenciement de M. N. N. Bhattacharya n'appellent pas un nouvel examen ;
    • b) de décider que les allégations relatives à la législation indienne en matière de relations professionnelles et celles qui concernent l'interdiction d'un défilé organisé par des employés de banque n'appellent pas un nouvel examen ;
    • c) de prendre note du rapport intérimaire soumis par le Comité sur les allégations relatives à des atteintes aux droits syndicaux des employés de la Banque de Bihar (Patna), étant entendu que le Comité fera un nouveau rapport au Conseil d'administration sur la question quand il aura reçu les observations du gouvernement de l'Inde sur le sujet.
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