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Definitive Report - Report No 122, 1971

Case No 619 (Honduras) - Complaint date: 19-NOV-69 - Closed

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  1. 84. La plainte de la Confédération mondiale du travail a fait l'objet d'une communication, en date du 19 novembre 1969, adressée directement au BIT, et elle consiste en une copie d'un mémorandum rédigé par la Federación Auténtica Sindical de Honduras (FASH). Cette plainte ayant été transmise au gouvernement, celui-ci a envoyé ses observations dans des communications datées du 25 septembre et du 1er octobre 1970.
  2. 85. Le Honduras a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 86. D'après le contenu de la plainte et de la première communication du gouvernement, ainsi que sur la base de l'abondante documentation qui a été soumise par ce dernier et par les plaignants, les faits peuvent être résumés de la façon suivante.
  2. 87. Le 10 juin 1969, un groupe d'employés de la banque appelée Banco del Ahorro Hondureño S.A. a constitué un syndicat et, le 25 du même mois, le comité provisoire de ce syndicat en a avisé les autorités compétentes en matière de travail, afin d'obtenir la protection de la loi, qui a été accordée par décision du 26 juin et communiquée aussi bien aux intéressés qu'à la banque elle-même.
  3. 88. Le même jour, la direction de la banque a tenu une réunion avec plusieurs de ses employés affiliés au syndicat venant d'être constitué. Selon les plaignants, le directeur de la banque a obligé ces employés à signer un document dans lequel ils déclaraient renoncer à leur intention de s'organiser. D'après la version du directeur en question, les participants à ladite réunion ont examiné, en complète harmonie, la question de savoir s'il était ou non indiqué de disposer d'un syndicat au sein de la banque, ainsi que les risques de voir les employés de celle-ci, en cas de conflit du travail, « recourir, par solidarité avec un autre syndicat, à des mesures extrêmes au détriment du public, telles que la fermeture de l'établissement, alors que, dans les banques étrangères, aucun mouvement syndical de ce genre-là ne se dessine ». En outre, il a été rappelé aux employés que les avantages dont ils jouissaient leur avaient été accordés par l'établissement, non pas à la suite de revendications syndicales, mais de façon spontanée. Après cet échange de vues, les employés auraient signé volontairement des documents dans lesquels ils déclaraient renoncer à leur participation au syndicat, documents qui ont été communiqués aux autorités compétentes en matière de travail.
  4. 89. Toutefois, trois jours après cette réunion, les employés en question ont écrit au directeur de la banque pour l'informer qu'ils avaient décidé de considérer ladite renonciation comme nulle et non avenue, alléguant que la direction de l'établissement avait usé de contrainte à leur égard. De son côté, le comité directeur du syndicat a adressé au directeur en question une lettre dans laquelle il était dit que, pour détruire l'organisation, « on avait utilisé des moyens, assimilables aux méthodes pénitentiaires, qui ont abouti à des actes illégaux relevant de la menace et de la coercition... »; il ajoutait qu'il s'agissait là de « procédés honteux ».
  5. 90. A la suite de la renonciation communiquée aux autorités compétentes et d'une démarche, dénonçant la coercition exercée, de la Fédération centrale des syndicats de travailleurs libres du Honduras (FECESITLIH), les autorités en question décidèrent l'ouverture d'une enquête. Divers fonctionnaires du secrétariat d'Etat au Travail et à la Prévoyance sociale ont interrogé les employés qui avaient participé à la réunion en cause et, ainsi que cela est longuement exposé dans un procès-verbal, du 11 juillet 1969, qui a été soumis au comité, tous ces employés, sauf un ont déclaré avoir renoncé au syndicat parce qu'ils avaient été menacés de congédiement. Sur la base de l'enquête faite par son personnel, l'Inspection générale du travail a, le 2 septembre 1969, infligé une amende au directeur de la banque pour avoir porté atteinte au droit de libre association. Cette décision a été confirmée par le secrétariat d'Etat au Travail et à la Prévoyance sociale, et un recours d'amparo, formé par la banque devant la Cour suprême de justice, a été rejeté.
  6. 91. Entre-temps, la banque avait engagé une procédure sommaire devant la juridiction du travail en vue d'obtenir l'autorisation de congédier les membres du comité directeur du syndicat, en invoquant à cet effet l'alinéa b) de l'article 112 du Code du travail (« tous actes de violence, injures, voies de fait ou actes d'indiscipline graves dont le travailleur se rend coupable, pendant les heures de travail, envers l'employeur, les membres de sa famille, le personnel de direction ou ses compagnons de travail »). Le tribunal accéda à la requête de la banque en faisant valoir que les propos contenus dans la lettre du comité au directeur de la banque (voir plus haut, paragr. 89) justifiaient l'application de la disposition législative invoquée, et en estimant que les employés avaient renoncé volontairement au syndicat. Pour sa part, le ministère public auprès de la juridiction du travail, qui dépend du secrétariat d'Etat au Travail et à la Prévoyance sociale, s'était prononcé contre la requête de la banque, en estimant que les employés avaient renoncé à former un syndicat du fait de la pression exercée sur eux par la direction de cet établissement, ce qui était contraire aux prescriptions en matière d'ordre public, qui protègent l'organisation syndicale.
  7. 92. Dans le même temps où elle engageait une procédure devant la juridiction du travail, la banque poursuivait pour injures les membres du comité directeur du syndicat et, pour calomnie, les employés qui avaient participé à la réunion mentionnée précédemment. L'accusation contre le comité directeur se fondait sur les propos dont il a été question plus haut (paragr. 89). Quant à l'accusation contre les autres employés, elle reposait sur l'allégation selon laquelle ceux-ci avaient renoncé volontairement au syndicat, alors qu'ils déclarèrent ensuite au directeur de la banque que celle-ci les y avait forcés, ce qui revenait à lui imputer à tort un délit et, partant, à la calomnier. Ces poursuites aboutirent, dans le premier cas, à l'inculpation des accusés et, dans le second, à la délivrance d'un mandat d'arrêt contre les inculpés; les uns et les autres se trouvaient en liberté sous caution.
  8. 93. Pour ce qui est du syndicat, la personnalité juridique lui fut accordée le 13 août 1969 et il fut enregistré, le 18 septembre, auprès du secrétariat d'Etat au Travail et à la Prévoyance sociale. D'après le directeur de la banque, celle-ci n'a pas procédé au congédiement, autorisé par le tribunal du travail, des membres du comité directeur. Toutefois, plusieurs des personnes qui faisaient partie de ce comité quittèrent la banque et renoncèrent à leur affiliation au syndicat; d'autres membres du syndicat l'abandonnèrent aussi. Finalement, les neuf membres qui restaient se réunirent le 6 novembre 1969 et décidèrent d'entreprendre des démarches afin d'obtenir la dissolution et la liquidation du syndicat, du fait que son effectif était désormais inférieur au minimum de dix fixé par le Code du travail. Le directeur a commenté ce fait en disant que « la bonne volonté de l'établissement, manifestée dans tous ses actes, fut finalement comprise par le petit nombre d'employés qui, mal inspirés et obéissant naïvement à des consignes étrangères, prétendaient lui causer du tort...; ces quelques employés... décidèrent que le syndicat ne pouvait pas subsister en raison de la réduction du nombre de ses affiliés... ».
  9. 94. De l'exposé des faits, il ressort que le directeur de la banque a été d'emblée hostile à la création d'un syndicat et que celui-ci, peu de mois après sa constitution, a cessé d'exister légalement du fait que le nombre de ses membres était insuffisant. Une importance capitale doit être attribuée, en l'occurrence, à la réunion qui a eu lieu entre la direction de la banque et un groupe de membres du syndicat venant d'être constitué. Il existe, au sujet de cette réunion, deux versions contradictoires. Selon la première, les employés ont été contraints de renoncer au syndicat, tandis que, d'après la seconde, cette renonciation a été volontaire et est intervenue à la suite d'un échange de vues sur l'opportunité de disposer d'un syndicat dans l'établissement. La documentation remise au comité par les plaignants et par le gouvernement, mais plus particulièrement le texte de la décision de l'Inspection générale du travail infligeant une amende au directeur de la banque (après avoir fait procéder aux investigations nécessaires) pour atteinte au droit de libre association, et aussi le document du 11 juin 1969, qui contient les déclarations des employés ayant participé à la réunion convoquée par la direction, donnent à penser au comité que certains actes antisyndicaux, contraires à la convention no 98, paraissent effectivement avoir été commis. Ni le jugement du tribunal du travail ni les décisions prises à la suite des poursuites intentées pour injures et calomnie ne contiennent d'éléments suffisants pour permettre au comité d'aboutir à une nette conclusion; il ne ressort pas non plus de ces textes que les déclarations des employés, où ils font état de la contrainte exercée à leur égard, soient dénuées de fondement. En réalité, aucune des décisions judiciaires mentionnées ne porte spécifiquement sur les faits qui, selon les indications des employés intéressés, les auraient incités à renoncer au syndicat et, par la suite, à déclarer cette renonciation nulle et non avenue.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 95. Le comité fait observer que, d'un côté, les autorités compétentes en matière d'administration du travail ont infligé une sanction au directeur de la banque pour avoir commis des actes portant atteinte au droit d'association et que, de l'autre, la dénonciation de ces actes par les employés intéressés a été considérée, par le juge pénal, comme constituant le délit de calomnie. Le comité recommande au Conseil d'administration d'informer le gouvernement de la préoccupation que lui cause cet état de choses, tout en lui faisant part des considérations exposées au paragraphe précédent.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 96. En ce qui concerne le jugement autorisant le congédiement des membres du comité directeur du syndicat et les poursuites engagées contre ceux-ci pour injures, il convient de faire remarquer ce qui suit: d'une part, les propos tenus par les membres en question, selon lesquels la direction de la banque « aurait utilisé des moyens, assimilables aux méthodes pénitentiaires, qui ont abouti à des actes illégaux relevant de la menace et de la coercition... » et qu'il s'agissait là de « procédés honteux », s'appuient sur des déclarations d'employés qui ont motivé, par la suite, l'application d'une sanction au directeur de la banque; d'autre part, ces propos ont été tenus par certains employés, en leur qualité de dirigeants syndicaux, à l'occasion d'un conflit du travail (c'est-à-dire à une occasion où il n'est pas rare que les parties se laissent aller à des violences de langage) et non envers l'employeur pendant les heures de travail, comme le prévoit l'article 112 du Code du travail. Aussi le comité recommande-t-il au Conseil d'administration de faire également part de ces considérations au gouvernement.
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