ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Interim Report - Report No 256, June 1988

Case No 1168 (El Salvador) - Complaint date: 26-OCT-82 - Closed

Display in: English - Spanish

  1. 238. Le comité a déjà examiné le cas no 1168 à ses sessions de mai 1983 et 1984, de février-mars 1986 et de mai 1987 (voir 226e, 234e, 243e et 251e rapports du comité) et le cas no 1273 à ses sessions de novembre 1984, février-mars 1986 et mai 1987 (voir 236e, 243e et 251e rapports du comité).
  2. 239. A sa session de novembre 1987, le comité avait noté que le gouvernement avait indiqué qu'il transmettrait ses observations sur les cas nos 1168 et 1273 dans un avenir proche (voir 253e rapport, paragr. 8). Depuis lors, de nouvelles allégations avaient été formulées par la CISL le 14 juillet 1987, par la Fédération unitaire syndicale d'El Salvador (FUSS) le 11 avril 1988 et par la FSM le 27 avril 1988. Le gouvernement avait envoyé certaines observations le 2 septembre 1987 au sujet des allégations présentées par la CISL.
  3. 240. Toutefois, n'ayant pas d'informations sur nombre d'allégations en instance, le comité, à sa session de février-mars 1988, avait appelé l'attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport approuvé par le Conseil d'administration, il pourrait présenter un rapport sur le fond des affaires en instance à sa prochaine session, même si les observations du gouvernement n'étaient pas reçues à temps. En conséquence, le comité avait prié instamment le gouvernement de transmettre d'urgence ses observations (voir 254e rapport, paragr. 13). A ce jour, aucune information nouvelle n'a été reçue du gouvernement.
  4. 241. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur des cas

A. Examen antérieur des cas
  1. 242. Lors du dernier examen des cas nos 1168 et 1273 quant au fond en mai 1987 (251e rapport), le Comité de la liberté syndicale avait demandé en particulier au sujet du cas no 1168:
    • - de faire procéder à une enquête judiciaire sur la disparition des dirigeants syndicaux Elsy Márquez et José Sánchez Gallegos;
    • - de fournir des informations supplémentaires sur certains syndicalistes encore détenus et/ou faisant l'objet d'un procès, en précisant en particulier les faits concrets qui leur étaient reprochés. Le gouvernement avait signalé que ces personnes ne se trouvaient pas dans les centres de détention du pays mais qu'il allait vérifier si elles avaient été à un moment ou à un autre détenues dans les centres de sécurité de la police.
      • De même, le comité avait demandé au sujet du cas no 1273:
    • - de procéder à une enquête judiciaire sur l'assassinat allégué des syndicalistes Francisco Méndez et Marco Antonio Orantes (au sujet de ce dernier, le gouvernement ayant signalé qu'il avait disparu et qu'aucun organisme de la sécurité publique n'avait connaissance de la disparition);
    • - de fournir des informations sur l'issue de l'instruction concernant l'assassinat du dirigeant syndical José Arístides Mejía;
    • - de fournir des informations supplémentaires sur la détention de Adalberto Martínez (23 juin 1986), membre du Syndicat des travailleurs d'ANDA; d'Andrés Miranda (27 juin 1986), affilié à la FUSS, de Gregorio Aguillón Ventura (1er février 1986), qui aurait été arrêté par la police et accusé de délits politiques et connexes par un tribunal militaire; et de José Antonio Rodríguez (18 août 1986), affilié au Syndicat des ouvriers de l'industrie de la construction, arrêté par des hommes armés en civil alors qu'il se rendait à l'entreprise de construction Bruno Tonza où il travaillait. Au sujet de ces arrestations, il convenait d'indiquer les faits concrets les ayant motivées et de préciser si les intéressés avaient été libérés;
    • - de communiquer des observations sur la perquisition des locaux de l'Association nationale des éducateurs d'El Salvador (ANDES) par les forces armées, qui auraient emporté des documents et une partie des archives de cette organisation, notamment la liste des membres;
    • - et enfin de communiquer des observations sur le licenciement de six dirigeants syndicaux du secteur des télécommunications à la suite de la grève du 15 avril 1986.

B. Nouvelles allégations

B. Nouvelles allégations
  1. 243. Dans une communication du 14 juillet 1987, la CISL avait allégué que le 8 juillet 1987, lors d'un rassemblement organisé par le Syndicat des travailleurs de l'Institut de la sécurité sociale, qui était en grève pour des motifs socio-économiques, ces travailleurs auraient fait l'objet de violences de la part de forces militaires massées à l'intérieur du bâtiment de l'institut. Les forces militaires auraient tiré sur les manifestants, faisant de nombreux blessés, plus ou moins graves, après quoi l'Institut de la sécurité sociale aurait été occupé par les forces militaires (cas no 1273).
  2. 244. Dans une communication ultérieure du 11 avril 1988, la Fédération unitaire syndicale d'El Salvador (FUSS) a allégué que le 10 avril 1988, à 2 heures du matin, la maison de Mme Marta Castaneda, affiliée au Syndicat du café (SICAFE) et dirigeante du comité des femmes de ce syndicat, a été dynamitée. L'immeuble, situé à Santa Ana, Cité Lamatepec, passage F, zone D, no 21, a été entièrement détruit, de même que les bâtiments annexes. La FUSS a signalé également dans sa communication que cinq minutes après l'attentat contre la syndicaliste Castaneda et son fils, qui fort heureusement ne se trouvaient pas chez eux, un contingent de la deuxième brigade d'infanterie de la ville, accompagné de policiers serait arrivé sur les lieux. Les 7 et 8 avril, cette cité aurait été encerclée et perquisitionnée par des éléments de la deuxième brigade d'infanterie, qui auraient encerclé les lieux jusqu'au 8 avril à 14 heures, heure à laquelle la syndicaliste Castaneda aurait pu quitter la localité. La FUSS a dénoncé enfin la persécution dont aurait fait l'objet la syndicaliste Marta Alicia Sigüenza, membre du Conseil directeur de SICAFE, qui n'avait pas pu se présenter à son lieu de travail, la coopérative San Ignacio, et qui avait dû se cacher pour ne pas être tuée par les forces gouvernementales (cas no 1273).
  3. 245. Dans une communication du 27 avril 1988, la FSM dénonce les persécutions dont sont l'objet les membres du Syndicat des travailleurs salvadoriens des télécommunications (ASTTEL), notamment le licenciement du secrétaire général Raphael Sánchez et la détention assortie de coups et blessures dont a été victime le secrétaire général actuel Humberto Centeno. La communication dénonce également la détention et les tortures dont ont été l'objet les deux fils de M. Centeno pour faire pression sur le syndicat et le décès des syndicalistes Victor Manuel Hernández Vázquez, Medardo Ceferino Ayala et José Herbert Guardado.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 246. Le gouvernement, dans une communication du 2 septembre 1987, avait expliqué à propos des incidents survenus à l'Institut de la sécurité sociale et dénoncés par la CISL que le 8 juillet 1987, dans la matinée, un groupe de syndicalistes avait manifesté devant les bureaux administratifs de l'Institut de la sécurité sociale. Sur les ordres de leurs supérieurs, des agents de la police nationale assuraient la protection des locaux et des 85 pour cent du personnel qui y travaillaient à ce moment-là. Le gouvernement avait signalé que les manifestants s'étaient introduits dans les lieux par la force, rompant le cordon de sécurité mis en place et, malgré les appels au calme et à la modération lancés par les officiers, lesdits manifestants s'étaient jetés sur les agents, les bousculant et les agressant avec des batons cloutés et en avaient blessé plusieurs. Après ces actions violentes des manifestants, des coups de feu avaient été tirés, ce qui avait entraîné un repli des forces de sécurité afin de se couvrir et de déterminer la provenance des tirs. Deux agents de police avaient été blessés par balles, ainsi que deux journalistes de la télévision nationale. Le gouvernement avait ajouté qu'il condamnait ce type d'action, dont l'organisation avait été dénoncée à plusieurs reprises du fait qu'elle s'inscrivait dans le plan stratégique politico-militaire du FMLN-FDR destiné à dresser ces associations professionnelles contre les autorités afin de déstabiliser le processus démocratique et de le discréditer auprès de l'opinion publique nationale et internationale.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 247. Avant de procéder à l'examen de ces affaires quant au fond, le comité estime nécessaire de rappeler les considérations qu'il a exposées dans son premier rapport (paragr.31) et qu'il a eu l'occasion de réitérer en diverses circonstances, à savoir que le but de l'ensemble de la procédure instituée à l'OIT pour l'examen des allégations en violation de la liberté syndicale est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait. Si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, elle exige qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. Le comité tient à souligner que, dans tous les cas dont il a été saisi depuis sa création, il a toujours été d'avis que les réponses des gouvernements contre lesquels des plaintes étaient présentées ne devaient pas se limiter à des observations de caractère général (voir premier rapport du comité, paragr. 31).
  2. 248. Le comité déplore vivement de ne pas avoir reçu du gouvernement toutes les informations qu'il lui avait demandées au sujet de ces cas et de se (voir obligé, en raison du temps écoulé, d'examiner ces cas sans pouvoir tenir compte des éléments d'information nécessaires de la part du gouvernement.
  3. 249. Le comité note que les allégations en instance portent sur la disparition des dirigeants syndicaux Elsy Márquez et José Sánchez Gallegos, sur l'arrestation de certains syndicalistes et/ou les poursuites dont ils font l'objet, en particulier Raúl Baires, Francisco Gómez Calles, José Vidal Cortez, Luis Adalberto Díaz, Héctor Fernández, Héctor Hernández, Jorge Hernández, Carlos Bonilla Ortiz, Silvestre Ortiz, Maximiliano Montoya Pineda, Raúl Alfaro Pleitez, Roberto Portillo, Antonio Quintanilla et sa femme, Santos Cerrano, Auricio Alejandro Valenzuela, René Pompillo Vásquez, Manuel de la Paz Villalta et José Alfredo Cruz Vivas (cas no 1168).
  4. 250. Le comité note aussi que les allégations encore en instance ont trait également à l'assassinat prétendu des syndicalistes Francisco Méndez et Marco Antonio Orantes; au cours de l'instruction concernant l'assassinat du dirigeant syndical José Arístides Mejía; à des informations supplémentaires sur la détention d'Adalberto Martínez (23 juin 1986), affilié au Syndicat des travailleurs d'ANDA, d'Andrés Miranda (27 juin 1986), affilié à la FUSS, de Gregorio Aguillón Ventura (1er février 1986), qui aurait été arrêté par la police et, sous l'accusation de délits politiques et connexes, serait à la disposition d'un tribunal militaire, et de José Antonio Rodríguez (18 août 1986), affilié au Syndicat des ouvriers de l'industrie de la construction. D'autres allégations en instance portent sur la perquisition des locaux d'ANDES le 29 avril 1986 par les forces armées, qui ont emporté une partie des archives et des documents de l'organisation, ainsi que la liste des membres, et sur le licenciement de six dirigeants syndicaux du secteur des télécommunications, à l'origine de la grève du 15 avril 1986 (cas no 1273).
  5. 251. Le comité tient à exprimer sa profonde préoccupation devant la gravité et la persistance des allégations qui concernent la disparition, l'assassinat, la détention et l'intimidation de nombreux syndicalistes en El Salvador. Il déplore également l'absence d'informations supplémentaires sur ces faits allégués qui portent atteinte aux droits fondamentaux de l'homme et à la liberté syndicale des intéressés. Par conséquent, le comité souhaite mettre l'accent sur le principe selon lequel l'article 8 de la convention no 87 dispose que les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité, et que la législation nationale ne doit pas porter atteinte aux garanties prévues par la convention. Le comité a exprimé à plusieurs reprises l'opinion selon laquelle un mouvement syndical libre ne peut se développer que dans un régime qui respecte les droits fondamentaux et, en particulier, la liberté d'opinion et d'expression, le droit des travailleurs syndiqués de se réunir dans les locaux de leur syndicat, et leur droit de bénéficier, en cas de détention, des garanties d'une procédure judiciaire régulière dans les plus brefs délais. De même, le comité rappelle que tout climat de violence donnant lieu à l'assassinat ou à la disparition de dirigeants syndicaux constitue un grave obstacle à l'exercice des droits syndicaux; de pareils actes exigent des mesures sévères de la part des autorités. Pour ce qui est de la perquisition des locaux syndicaux, la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 54e session (1970), dispose que le droit à une protection appropriée des biens syndicaux constitue l'une des libertés civiles qui sont essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux.
  6. 252. En ce qui concerne l'allégation de la CISL relative aux incidents survenus le 8 juillet 1987, lors d'un rassemblement organisé par le Syndicat des travailleurs de l'Institut de la sécurité sociale, le comité note que le gouvernement condamne les actions de cette nature et considère qu'elles font partie des plans politico-militaires d'une organisation visant à déstabiliser le gouvernement. Notant que les allégations de l'organisation plaignante et les observations du gouvernement donnent des versions contradictoires de ces incidents, le comité souhaite rappeler à cet égard que, lorsque des troubles ayant causé la perte de vies humaines et/ou des blessés graves ont éclaté, le comité avait signalé qu'une enquête judiciaire indépendante, à laquelle le gouvernement intéressé devait faire procéder, serait une méthode particulièrement appropriée pour élucider totalement les faits, déterminer les responsabilités, punir les coupables et empêcher le renouvellement de tels actes.
  7. 253. Enfin, le comité relève que le gouvernement n'a pas fourni d'observations sur l'allégation présentée par la FUSS le 11 avril 1988 concernant l'attentat à la dynamite contre la dirigeante Marta Castaneda et son fils, et sur l'allégation relative à la persécution dont fait l'objet la syndicaliste Marta Alicia Sigüenza.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 254. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité doit à nouveau déplorer vivement que le gouvernement n'ait pas communiqué toutes les informations demandées sur les allégations encore en instance.
    • b) Le comité demande une fois de plus au gouvernement de faire procéder à une enquête judiciaire sur la disparition d'Elsy Márquez et de José Sánchez Gallegos et il exprime l'espoir qu'il sera possible de déterminer dans un proche avenir le sort de ces dirigeants syndicaux (cas no 1168).
    • c) En ce qui concerne les syndicalistes Raúl Baires, Francisco Gómez Calles, José Vidal Cortez, Luis Adalberto Díaz, Héctor Fernández, Héctor Hernández, Jorge Hernández, Carlos Bonilla Ortiz, Silvestre Ortiz, Maximiliano Montoya Pineda, Raúl Alfaro Pleitez, Roberto Portillo, Antonio Quintanilla, Santos Serrano, Auricio Aljandro Valenzuela, René Pompillo Vazquez, Manuel de la Paz Villalta et José Alfredo Cruz Vivas qui sont détenus et/ou font l'objet de poursuites (cas no 1168), le comité demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur ces détentions, en précisant les faits concrets qui les ont motivées et l'état de la procédure, et en indiquant si lesdits syndicalistes sont actuellement détenus (cas no 1168).
    • d) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur les allégations relatives à l'assassinat des syndicalistes Francisco Méndez et Marco Antonio Orantes, et de faire procéder à une enquête judiciaire à ce sujet; le comité demande également des informations sur l'instruction en cours à propos de l'assassinat du dirigeant syndical José Arístides Mejía (cas no 1273).
    • e) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations complémentaires sur les détentions d'Adalberto Martínez (23 juin 1986), d'Andrés Miranda (27 juin 1986), de Gregorio Aguillón Ventura (1er février 1986), et de José Antonio Rodríguez (18 août 1986); et sur la perquisition des locaux d'ANDES et la confiscation de documents de cette organisation par les forces armées, le 29 avril 1986, ainsi que sur le licenciement de six dirigeants du secteur des télécommunications à la suite de la grève du 15 avril 1986.
    • f) Au sujet des incidents survenus le 8 juillet 1987 entre les forces armées militaires et policières et les travailleurs de l'Institut de la sécurité sociale, le comité déplore vivement de tels actes de violence et demande instamment au gouvernement de faire procéder à une enquête judiciaire indépendante, afin de déterminer les responsabilités, de punir les coupables et d'empêcher le renouvellement de tels actes, et de le tenir informé de toutes mesures qui seraient prises en rapport avec le déroulement d'une telle enquête judiciaire.
    • g) Le comité demande enfin au gouvernement de communiquer ses observations sur les allégations présentées par les plaignants les 11 et 27 avril 1988.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer