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- 330. La plainte figure dans une communication conjointe de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), de la Fédération nationale des syndicats de travailleurs du secteur des banques de Colombie (FENASIBANCOL) et de l'Association nationale des employés de la Banque de la République (ANEBRE), en date du 18 septembre 1990. Le gouvernement a répondu par une communication datée du 9 septembre 1991.
- 331. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 332. Dans leurs communications du 18 septembre 1990, les plaignants allèguent que la Banque de la République a licencié les dirigeants de l'Association nationale des employés de la Banque de la République énumérés ci-après: Jaime Dávila Suárez (1989), Rafael Ruiz Torregloza (1987), Freddy del Valle Espinoza (1987), Humberto Ballesteros Lancheros (1987), Dagoberto Gavalo Hernández (1987), Jesús María Guzmán Sánchez (1987), Helmer E. Sánchez Castillo (1987), Offir Justinico de Escobar (1988), Elías Ruiz de la Victoria (1989), Wilmar Jiménez Rosado (1989), Rosé Rodrigo Chavéz Benavides (1989), Luis Evert Gómez Tinoco (1989), Arnoldo Chica López (1989), Mario Sandoval Rodríguez (1989), Luis Ernesto Maldonado (1989), Teresa García, veuve Ramírez (1990), Hernán Jesús Salazar Morales (1990), Jesús Alberto Rivera Jiménez (1990), Danny Esther Ayala Castro (1990) et Reinaldo Jaimes (1990).
- 333. Les organisations plaignantes ajoutent que ces licenciements systématiques, répétés, continus et massifs de dirigeants constituent une violation des conventions sur la liberté syndicale.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 334. Dans sa communication du 19 septembre 1991, le gouvernement déclare qu'un télégramme officiel du 9 juillet 1991, signé par un fonctionnaire de la Division de surveillance et de contrôle, a été adressé au président de l'Association nationale des employés de la Banque de la République (ANEBRE) pour l'inviter à se présenter devant la division le 15 juillet à 9 heures, afin de s'acquitter des formalités administratives relatives à la plainte présentée. Le 15 juillet 1991, un avocat de la division a constaté par écrit que le président de l'ANEBRE ne s'était pas rendu à la convocation au jour et à l'heure prévus, de sorte que les formalités administratives n'avaient pas pu être effectuées. Ce même avocat, dans un mémoire adressé au chef de la division, signale que le bureau a renvoyé à deux reprises des citations à comparaître au président du syndicat et que, la deuxième fois, un entretien a eu lieu avec lui et il a accepté de présenter par écrit des précisions sur la plainte. Le 2 septembre 1991, le chef de la Division de surveillance et de contrôle a ordonné que l'affaire soit classée, eu égard au rapport du fonctionnaire compétent selon lequel le syndicat en avait connaissance et s'en désintéressait.
- 335. Par ailleurs, le gouvernement a transmis les commentaires de la Banque de la République (en date du 6 décembre 1990) relatifs à la plainte présentée devant le Comité de la liberté syndicale, en signalant expressément qu'il s'agit de l'opinion de la Banque et non du gouvernement.
- 336. Dans ses commentaires relatifs à la présente plainte devant le comité, la Banque de la République déclare qu'elle ne fait pas partie du gouvernement national ni d'aucune des branches de la puissance publique, et qu'elle ne figure pas non plus parmi les organismes de l'administration publique de la nation. Elle est l'Institut d'émission prévu par la Constitution nationale de la Colombie et constitue un organisme de droit public économique unique en son genre, qui jouit d'une autonomie administrative spéciale. Les relations professionnelles entre la Banque de la République et son personnel sont de caractère contractuel et relèvent du Code du travail, selon les modalités suivantes:
- - les relations juridiques découlant du contrat de travail sont régies par les dispositions dudit code, par les statuts de la banque, par son règlement intérieur, par les conventions collectives et par les décisions relatives aux questions de travail prises par le conseil de direction;
- - étant donné les fonctions de la Banque de la République et l'incidence qu'elles ont sur l'économie publique et privée du pays, tous les travailleurs de la banque, du point de vue juridique, sont considérés comme occupant des postes de confiance. Cette qualification juridique est confirmée par le règlement intérieur de la banque et par ses statuts, approuvés par le Président de la République de Colombie.
- Etant donné que l'article 409 du Code du travail exclut de la garantie du privilège syndical, entre autres travailleurs et employés, les personnes qui occupent des postes de confiance, ce privilège n'existe pas pour les travailleurs de la Banque de la République.
- 337. La Banque de la République ajoute que la résiliation du contrat de travail des personnes mentionnées dans la plainte a obéi à de justes motifs exclusivement liés au non-respect par ces travailleurs de dispositions de leur contrat de travail, du règlement intérieur de la Banque ou de la loi. Là où la banque estimait que, dans un éventuel procès, les justes motifs invoqués pourraient être prouvés, elle les a cités dans les lettres de licenciement. Dans le cas contraire, elle a versé les indemnités prévues par la convention collective, lesquelles, selon la loi colombienne, sont en outre accordées à titre discrétionnaire aux parties à un contrat de travail. La Banque de la République mentionne ensuite succinctement le motif de la résiliation de chaque contrat de travail:
- - Jaime Dávila Suárez: participation indue à des activités politiques partisanes, contrairement aux dispositions du contrat et du règlement intérieur. Néanmoins, à la demande de l'intéressé, la banque est ultérieurement parvenue à un accord avec lui.
- - Rafael Ruiz Torreglosa: indemnités prévues par la convention collective.
- - Freddy del Valle Espinoza: indemnités prévues par la convention collective.
- - Humberto Ballesteros L.: a tenu des propos injurieux sur les dirigeants de la banque.
- - Dagoberto Gavalo H.: indemnités prévues par la convention collective. Ultérieurement, un accord a été conclu avec l'intéressé.
- - Jesús María Guzmán S.: n'a pas pointé les rondes de surveillance réglementaires et a ouvert indûment l'horloge de pointage.
- - Helmer Sánchez Castillo: indemnités conventionnelles. La banque a reconsidéré sa décision et, aux termes d'un accord conclu avec lui, l'intéressé a été réintégré dans ses fonctions.
- - Offir Justinico de E.: son contrat de travail, à durée déterminée, n'a pas été renouvelé.
- - Elías Ruiz de la Victoria: a présenté des documents falsifiés pour obtenir une prestation sociale à laquelle il n'avait pas droit.
- - Wilmar Jiménez Rosado: a sorti une arme à feu et menacé des compagnons de travail lors d'une réunion sociale.
- - José Rodrigo Chávez: a, par négligence et sans raison, tiré un coup de feu dans les toilettes des dames avec son arme de garde de sécurité.
- - Luis Evert Gómez Tinoco: a manqué de respect au directeur d'une succursale de la banque et l'a insulté en public.
- - Arnolodo Chica López: indemnités conventionnelles.
- - Mario Sandoval Rodriguez: a contracté des engagements économiques supérieurs à sa capacité de paiement auprès de compagnons de travail, sans autorisation de la banque. Indemnités conventionnelles.
- - Luis Ernesto Maldonado: a tenu, oralement et par écrit, contre certains de ses chefs et de ses compagnons de travail, des propos injurieux qui constituent un grave acte d'indiscipline.
- - Teresa García: a commis des indélicatesses dans la gestion de fonds remis à titre d'avance sur indemnités de voyage et a refusé d'établir le rapport réglementaire sur les dépenses effectuées.
- - Hernán Jesús Salazar M.: indiscipline dans le travail, propos injurieux et agression physique contre un compagnon de travail.
- - Jesús Alberto Rivera: n'a pas repris le travail en temps voulu à la fin de ses vacances et a fourni une excuse non conforme à la vérité.
- - Dany Esther Ayala: a participé à des opérations irrégulières sur un compte d'épargne.
- - Reinaldo Jaimes: a tenu des propos injurieux sur certains de ses compagnons de travail et de ses supérieurs et a falsifié le registre des rondes de surveillance.
- 338. Selon la Banque de la République, la résiliation du contrat de travail des personnes mentionnées n'avait rien à voir avec leur qualité de représentants des travailleurs ni avec leurs activités syndicales et était due uniquement au non-respect de règles propres à la banque, énoncées dans les contrats de travail ou dans le règlement intérieur de l'institution.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 339. Le comité observe que la présente plainte concerne le licenciement de 20 dirigeants syndicaux de l'Association nationale des employés de la Banque de la République (6 en 1987, 1 en 1988, 8 en 1989 et 5 en 1990). Le comité note que le gouvernement souligne le manque d'intérêt manifesté par le président de ladite association nationale, qui ne s'est pas présenté au ministère du Travail le 15 juillet 1991, bien qu'il eût été convoqué pour traiter de la présente plainte. Néanmoins, le comité souligne que la plainte en question avait été présentée par les organisations concernées le 18 septembre 1990, et il ne peut donc que déplorer que le gouvernement ait tant tardé à répondre et à prendre des mesures pour élucider les faits. Le comité observe que, dans ses commentaires (que le gouvernement ne reprend pas à son compte), la Banque de la République nie que les licenciements aient été dus à la qualité de syndicalistes ou aux activités syndicales des intéressés et déclare que, comme tous les travailleurs de la banque occupent des postes de confiance en vertu des statuts de cette institution et de son règlement intérieur, ils ne bénéficient pas de la garantie du privilège syndical prévue par l'article 409 du Code du travail.
- 340. Selon le comité, les motifs allégués par la Banque de la République au sujet de certains licenciements (falsification de documents, tirs de coups de feu sur les lieux de travail, etc.) pourraient, s'ils sont dûment établis (ce qui ne ressort pas pour le moment de la documentation dont dispose le comité), donner lieu à la cessation de la relation de travail. Le comité estime toutefois que d'autres cas de licenciement pourraient être liés à la fonction ou aux activités syndicales des intéressés, puisque: 1) la Banque de la République déclare qu'elle a considéré dans six cas que le juste motif du licenciement des dirigeants syndicaux en question ne pourrait être prouvé et qu'elle a versé les indemnités prévues (deux des intéressés ont été réintégrés ultérieurement); 2) dans un des cas, un contrat de travail à durée déterminée n'a pas été renouvelé; 3) dans trois cas, il est fait état en termes généraux d'un manque de respect vis-à-vis de supérieurs ou de directeurs; 4) dans deux cas, il n'est pas fait état de fautes professionnelles mais de menaces proférées contre des compagnons de travail dans une réunion sociale, ou du fait que les intéressés auraient souscrit auprès des compagnons de travail des engagements économiques supérieurs à leur capacité de paiement.
- 341. Le comité exprime sa préoccupation devant le nombre de dirigeants syndicaux de la Banque de la République (20) qui ont été licenciés entre 1987 et 1990, qui laisse supposer que des actes de discrimination antisyndicale auraient pu être commis. Il exprime également sa préoccupation devant l'argument de la Banque selon lequel, contrairement à ce qui se passe dans les autres institutions, aucun dirigeant syndical de la banque ne jouit d'une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale puisque tous les travailleurs de celle-ci occupent des postes de confiance et, en tant que tels, sont exclus des garanties prévues par l'article 409 du Code du travail.
- 342. Cela étant, le comité prie le gouvernement de prendre sans retard des mesures: 1) pour que l'inspection du travail mène une enquête approfondie sur les motifs du licenciement des 20 dirigeants syndicaux en cause dans le cas présent, et pour que des possiblités de réintégration soient offertes à tous ceux qui auraient été licenciés pour activités syndicales, et 2) pour qu'une protection adéquate soit reconnue aux dirigeants syndicaux de la Banque de la République contre des actes de discrimination antisyndicale et qu'ils ne fassent pas l'objet, à cet égard, d'une discrimination par rapport aux autres dirigeants syndicaux colombiens.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 343. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité, préoccupé par le nombre de dirigeants syndicaux de la Banque de la République - 20 - licenciés entre 1987 et 1990, demande au gouvernement de prendre sans retard des mesures pour que l'inspection du travail mène une enquête approfondie sur les motifs du licenciement des 20 dirigeants syndicaux en cause dans le présent cas et qu'une possibilité de réintégration soit offerte à tous ceux qui auraient été licenciés pour activités syndicales.
- b) Le comité demande également au gouvernement de reconnaître aux dirigeants syndicaux de la Banque de la République une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale.
- c) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de la suite de cette affaire.