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Interim Report - Report No 281, March 1992

Case No 1559 (Australia) - Complaint date: 22-NOV-90 - Closed

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  1. 326. Dans une communication en date du 22 novembre 1990, la Confédération de l'industrie australienne (CAI) a présenté une plainte contre le gouvernement de l'Australie pour violations de la liberté syndicale. Elle a fourni des renseignements supplémentaires, dans une lettre datée du 24 décembre 1990. L'Organisation internationale des employeurs (OIE), dans une lettre datée du 26 novembre 1990, a déclaré appuyer cette plainte.
  2. 327. Le gouvernement a communiqué ses observations au sujet des allégations dans des communications en date des 25 octobre et 4 novembre 1991.
  3. 328. L'Australie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 329. Dans sa lettre du 22 novembre 1990, la CAI déclare que les modifications qu'il est prévu d'apporter à la loi fédérale de 1988 sur les relations professionnelles en vertu du projet de loi de 1990 portant modification de la législation relative aux relations professionnelles restreignent de manière déraisonnable l'enregistrement des nouvelles organisations de travailleurs constituées au niveau des entreprises et de la petite industrie, et restreignent le libre choix des travailleurs.
  2. 330. Les allégations se fondent sur les arguments suivants. Les dispositions de la loi de 1988 permettent l'enregistrement des associations de travailleurs et d'employeurs sous réserve qu'elles répondent à un certain nombre de conditions. L'enregistrement est essentiel pour qu'une association puisse participer de manière effective au système de conciliation et d'arbitrage et, d'une manière générale, au système de relations professionnelles établi par la loi. L'article 189 1) de la loi, avant modification, prévoit l'enregistrement lorsque:
    • c) dans le cas d'une association de travailleurs:
    • i) l'association compte au moins 1.000 membres travailleurs; ou
    • ii) le membre de la commission désigné comme ayant rang de président considère que des circonstances particulières justifient l'enregistrement de l'association;
      • et que l'association répond à certaines autres conditions énoncées dans ledit article. L'article 193 de la loi contient des dispositions relatives au maintien de l'enregistrement d'une "petite organisation", définie à l'article 193 7) comme: "... une organisation de travailleurs comptant moins de 1.000 membres travailleurs ...". L'article 193 1) dispose ce qui suit:
      • Un membre désigné de la commission comme ayant rang de président est habilité à examiner, en ce qui concerne une petite organisation, si des circonstances particulières justifient le maintien de l'enregistrement de l'organisation dans l'intérêt public. Si, en exerçant le pouvoir qui lui est conféré en vertu du paragraphe (1), le membre ayant rang de président ne constate aucune circonstance particulière justifiant le maintien de l'enregistrement d'une petite organisation dans l'intérêt public, (il) annulera l'enregistrement de l'organisation.
      • Conformément à d'autres dispositions de l'article 193, un membre de la commission désigné comme ayant rang de président doit examiner les questions ci-dessus pendant la période pertinente, définie comme: "la période commençant trois ans après la date d'entrée en vigueur du présent article et prenant fin quatre ans après cette date". Les plaignants font observer que la loi de 1988, y compris cet article, est entrée en vigueur le 1er mars 1989.
    • 331. Selon les plaignants, le projet de loi de 1990 prévoit, dans la disposition no 12, de modifier l'article 189 de la loi de 1988 en remplaçant le chiffre de 1.000 qui y figure par le chiffre de 20.000 et, dans la disposition no 14, de remplacer l'article 193 par deux nouveaux articles (193 et 193A) de manière à créer deux catégories de petites organisations. Le premier type serait défini comme une organisation de travailleurs comptant moins de 1.000 membres travailleurs (première étape); pour ces organisations, un membre de la commission désigné comme président doit commencer à examiner s'il existe des circonstances particulières justifiant le maintien de l'enregistrement pendant la première étape, définie comme la période commençant le 1er mars 1992 et prenant fin le 28 février 1993; s'il ne constate pas l'existence de telles circonstances, le membre ayant rang de président doit annuler l'enregistrement. Le deuxième type de petite organisation est défini à l'article 193A comme une organisation de travailleurs comptant moins de 20.000 membres travailleurs (deuxième étape); pour ces organisations, la période prévue pour l'examen de l'existence de circonstances particulières commence le 1er mars 1994 et prend fin le 28 février 1995. Là aussi, si le membre désigné ne constate pas l'existence de circonstances particulières, il doit annuler l'enregistrement de l'organisation.
  3. 332. Les plaignants font donc valoir que la loi actuelle restreint l'enregistrement des nouvelles associations en exigeant qu'elles comptent au moins 1.000 membres travailleurs - une exigence déraisonnable qui affecte la liberté syndicale, parce que les travailleurs ne sont pas libres de créer les organisations de leur choix dans la petite industrie ou au niveau d'une entreprise. En outre, les dispositions du projet de loi qui visent à porter à 20.000 le nombre minimum de membres requis pour l'enregistrement constituent une nouvelle restriction déraisonnable, car elles priveraient en fait les travailleurs de la possibilité de créer des organisations au niveau des entreprises et dans la petite industrie. Enfin, de l'avis des plaignants, les dispositions de la loi actuelle comme celles du projet de loi, qui prévoient le réexamen de l'enregistrement des organisations existantes comptant moins de 1.000 membres (première étape) ou de 20.000 membres (deuxième étape) et l'annulation de cet enregistrement si l'existence de circonstances particulières n'est pas constatée, portent atteinte aux principes de la liberté syndicale. L'application du critère du nombre minimal de 20.000 membres, par exemple, entraînerait l'annulation de l'enregistrement de 104 organisations de travailleurs sur les 149 qui existent actuellement.
  4. 333. Les plaignants soulignent que la loi et le projet de loi ont les effets suivants sur les employeurs et les associations d'employeurs:
    • a) les dispositions de ces instruments restreignent la nature des associations de travailleurs avec lesquelles les employeurs doivent traiter dans le cadre du système prévu par la législation, et font notamment obstacle à la création d'associations au niveau de l'entreprise et de la petite industrie;
    • b) elles requièrent l'annulation de l'enregistrement d'un grand nombre d'organisations de travailleurs avec lesquelles les associations d'employeurs ont des relations établies;
    • c) elles favorisent la création de très grandes organisations de travailleurs, ce qui est propre à modifier le rapport de forces entre les organisations de travailleurs, d'une part, et les employeurs et leurs associations, de l'autre.
  5. 334. Dans sa lettre du 24 décembre 1990, la CAI fait savoir que le Parlement australien a adopté le 20 décembre le projet de loi de 1990 portant modification de la loi de 1988, avec les amendements ci-après, qui revêtent un intérêt du point de vue de sa plainte: l'article 189 1) c) i) contient désormais le chiffre de 10.000 au lieu de 1.000; l'article 193A définit dorénavant le deuxième type de petite organisation comme "une organisation de travailleurs comptant moins de 10.000 membres travailleurs"; enfin, l'article 193A fait courir la période correspondant à la deuxième étape pour l'examen de l'existence de circonstances particulières, du 1er mars 1993 au 28 février 1994. La CAI joint un exemplaire du procès-verbal du débat du Sénat sur le projet de loi, au cours duquel le ministre des Relations professionnelles a fait une déclaration soulignant le large pouvoir d'appréciation dont le membre de la commission désigné comme ayant rang de président est investi pour déterminer si des "circonstances particulières" existent, conformément aux articles 193 et 193A. Le ministre a donné des exemples d'éléments justifiant le maintien de l'enregistrement et souligné que "le critère des circonstances particulières n'est pas censé être appliqué de manière étroite ou rigide". La CAI estime cependant que la déclaration du ministre concernant le pouvoir d'appréciation dont il doit être fait usage pour maintenir l'enregistrement des petites organisations telles qu'elles sont définies ne constitue pas une garantie suffisante de la liberté syndicale. Nonobstant le texte définitif des modifications, les plaignants maintiennent leurs allégations, en soulignant que la condition relative au nombre minimal de 10.000 membres entraînerait l'annulation de l'enregistrement de 92 organisations de travailleurs sur 149 au total.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 335. Dans ses lettres des 25 octobre et 4 novembre 1991, le gouvernement déclare qu'il appuie vigoureusement les principes de la liberté syndicale consacrés par les conventions, et qu'il ne considère pas qu'il y ait été porté atteinte dans le cas présent. Il cite la disposition constitutionnelle conformément à laquelle la loi sur les relations professionnelles a été adoptée par le Parlement en 1988 et est entrée en vigueur le 1er mars 1989. La loi sur les relations professionnelles prévoit entre autres choses: a) la création d'un tribunal du travail indépendant, la Commission australienne des relations professionnelles (AIRC), dont la tâche principale est de prévenir ou de régler, en exerçant ses pouvoirs de conciliation et d'arbitrage, les conflits du travail relevant de sa compétence; et b) l'enregistrement volontaire des organisations de travailleurs ou d'employeurs, qui confère à ces organisations certains droits et leur impose certaines obligations dans le cadre du système fédéral de relations professionnelles.
  2. 336. Le gouvernement ajoute que chacun des Etats d'Australie a son système de relations professionnelles, qui règle au niveau de l'Etat les questions ne relevant pas de la compétence fédérale ou dont l'AIRC ne connaît pas. Le gouvernement ne décrit pas en détail les systèmes en place au niveau des Etats, car la plainte ne concerne que le système fédéral. Il note cependant que les lois sur les relations professionnelles de chacun des Etats établissent aussi des tribunaux du travail dotés de pouvoirs de conciliation et d'arbitrage, et prévoient l'enregistrement ou la reconnaissance officielle des associations d'employeurs et de travailleurs. D'après le Bureau australien de statistique, les conditions d'emploi des salariés sont réglementées pour 31,5 pour cent d'entre eux par des sentences arbitrales rendues par l'AIRC, et pour 46,5 pour cent par des sentences rendues par des tribunaux d'Etat. Vingt pour cent des salariés ne relèvent d'aucune sentence arbitrale (2 pour cent environ relèvent de sentences arbitrales de nature indéterminée).
  3. 337. La loi sur les relations professionnelles permet aux associations d'employeurs et de travailleurs de demander à être enregistrées conformément à la loi, enregistrement qui conditionne la prévention et le règlement des conflits dans le cadre du système fédéral. Certaines conditions légales doivent être remplies (articles 188, 189, et 194 à 201), et une audition est prévue avant que l'AIRC ne prenne la décision d'accepter ou de rejeter la demande (article 189, titre VII, division 1, du règlement sur les relations professionnelles). Les organisations enregistrées et les autres parties intéressées (par exemple les syndicats enregistrés au niveau des Etats ou les employeurs) peuvent élever des objections contre l'enregistrement d'une association (disposition 36); ces objections doivent être examinées et il doit être statué à leur sujet avant qu'une demande d'enregistrement ne soit acceptée (disposition 37). L'enregistrement en vertu de la loi sur les relations professionnelles fait suite au dépôt volontaire d'une demande en ce sens et n'est pas une condition préalable à la constitution et au fonctionnement d'une association professionnelle ou d'un syndicat. La constitution et l'enregistrement des organisations sont encouragés par la loi sur les relations professionnelles: dans l'article 3 3) f), il est indiqué que l'un des objectifs de la loi est d'encourager la formation d'organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs et leur enregistrement conformément à la loi.
  4. 338. L'enregistrement confère un certain nombre d'avantages à une organisation, mais entraîne aussi certaines obligations. Les avantages sont les suivants: a) l'octroi du statut de personne morale à l'organisation considérée, qui a pour corollaire la capacité de posséder des biens et d'en disposer et celle d'ester en justice (article 192); b) un champ d'action professionnel défini conformément aux statuts enregistrés de l'organisation (article 195), avec le droit qui en résulte de présenter, pour le compte de ses membres et des personnes remplissant les conditions voulues pour être membres, des plaintes entrant dans la compétence de l'AIRC vis-à-vis des employeurs; c) le droit de s'adresser à l'AIRC pour qu'elle rende des sentences arbitrales ayant force exécutoire, que ce soit sur consentement mutuel ou sur arbitrage (articles 99 et 110 à 115), en ce qui concerne l'emploi de ces personnes; d) le droit de s'opposer, dans le cadre d'une instance auprès de l'AIRC, à ce que d'autres organisations obtiennent, soit au moyen d'une sentence arbitrale, soit par le biais d'une modification de leurs statuts, compétence pour une activité professionnelle entrant dans le cadre des statuts enregistrés de l'organisation (articles 111 i) g), 204, 253 et dispositions réglementaires connexes); e) la capacité d'introduire une instance auprès d'un tribunal pour faire appliquer une sentence arbitrale fédérale à laquelle l'organisation est partie (articles 58 et 178); f) le droit de demander le règlement, au besoin par arbitrage, de conflits avec d'autres organisations portant sur la délimitation des domaines professionnels couverts (article 4 1): définition du "conflit du travail"; articles 118 et 118A); g) la protection légale des membres de l'organisation contre les discriminations dans l'emploi à quelque titre que ce soit, notamment en raison de l'appartenance à l'organisation ou de la participation à ses activités (article 334).
  5. 339. En même temps, l'enregistrement implique un certain nombre d'obligations, et notamment: a) le respect de certaines prescriptions légales visant à assurer la direction démocratique des organisations par leurs membres et la protection de leurs intérêts (titre IX de la loi sur les relations professionnelles); b) l'obligation de porter à la connaissance de l'AIRC tout conflit auquel l'organisation est partie (article 99) et de comparaître devant la commission lorsque cela est requis dans le cadre d'une instance relative à un conflit auquel l'organisation est partie (articles 111 et 119); c) l'acceptation, sous réserve des droits de recours, des décisions de l'AIRC sur toutes questions touchant l'organisation intéressée et ses membres (la non-observation des sentences arbitrales et des instructions de l'AIRC est un motif d'annulation de l'enregistrement d'une organisation - article 294).
  6. 340. Le gouvernement explique que n'importe quelle organisation de travailleurs peut déposer une demande d'enregistrement en vertu de la loi sur les relations professionnelles, à condition: a) que certains de ses membres ou tous ses membres soient des "travailleurs" (définis à l'article 4 1) comme des personnes dont l'occupation habituelle est celle de travailleur) ayant capacité pour s'engager dans un conflit du travail, et que les autres membres (éventuels) soient i) des dirigeants de l'organisation ou ii) considérés comme des travailleurs aux fins de la législation sur les relations professionnelles de l'Etat qui est spécifiée (article 188 1) b)); et b) que l'organisation soit effectivement représentative de ses membres travailleurs (article 188 2)). Les critères retenus par l'AIRC pour accorder l'enregistrement lors de l'audition d'une demande d'enregistrement sont les suivants: a) l'organisation est une véritable association du type visé à l'article 188 et tend à promouvoir les intérêts de ses membres (article 189 1) a)); b) l'organisation compte au moins 10.000 membres travailleurs (avant l'entrée en vigueur de la loi de 1991, le nombre minimal requis était de 1.000), ou bien l'AIRC considère qu'il existe des circonstances particulières justifiant l'enregistrement de l'association (article 189 1 c)); et c) l'association remplisse d'autres conditions, sans intérêt pour la présente plainte, qui sont énoncées dans l'article 189.
  7. 341. Le gouvernement déclare que la loi de 1991 a introduit les nouveaux articles 193 et 193A pour qu'il soit possible d'examiner si le maintien de l'enregistrement des "petites organisations" dans le cadre de la loi sur les relations professionnelles est justifié dans l'intérêt public. Lorsque le membre de la commission ayant rang de président ne considère pas que l'existence de circonstances particulières justifie le maintien de l'enregistrement, celui-ci doit être annulé (article 193 7) et 193A 7)). L'examen de l'enregistrement des "petites organisations" doit s'effectuer en deux étapes. Aux fins de la première étape, dont traite l'article 193, on entend par "petite organisation (première étape)" une organisation de travailleurs comptant moins de 1.000 membres travailleurs, et cette étape couvre la période allant du 1er mars 1992 au 28 février 1993. Aux fins de la deuxième étape, dont traite l'article 193A, on entend par "petite organisation (deuxième étape)" une organisation de travailleurs comptant moins de 10.000 membres travailleurs, et la deuxième étape couvre la période allant du 1er mars 1994 au 28 février 1995.
  8. 342. D'après le gouvernement, outre l'augmentation du nombre de membres requis pour qu'une organisation puisse être enregistrée, la loi sur les relations professionnelles a été largement modifiée pour faciliter la fusion des organisations enregistrées.
  9. 343. Le gouvernement note qu'il est allégué dans la plainte que la prescription concernant un nombre minimal de 10.000 membres entraînerait l'annulation de l'enregistrement de 92 organisations de travailleurs sur 149 au total. En fait, au 30 juin 1990, il n'y avait que 139 syndicats enregistrés; en outre, le chiffre de 92 est trompeur, car un nombre considérable de syndicats enregistrés au niveau fédéral participent à un programme de fusions volontaires conformément à la politique du mouvement syndical.
  10. 344. Le gouvernement considère que les informations fournies par les plaignants sont injustement sélectives et trompeuses. Si l'on envisage les prescriptions législatives qui font l'objet de la plainte dans le contexte global du système australien de relations professionnelles, les objections ne peuvent être maintenues. Tout d'abord, en ce qui concerne les critères applicables pour l'enregistrement, le gouvernement répond que plusieurs facteurs ont été négligés et que, si on les fait entrer en ligne de compte, les conditions relatives au nombre minimal de membres ne peuvent plus être considérées comme constituant une infraction aux normes en matière de liberté syndicale. Ces facteurs sont les suivants: l'enregistrement au niveau fédéral n'est pas une condition préalable à la constitution ni au fonctionnement d'un syndicat (la CAI, par exemple, n'est pas un organisme enregistré et, sur les 34 organisations qui sont membres de la confédération ou qui lui sont affiliées, huit seulement sont enregistrées au titre de la loi sur les relations professionnelles); cet enregistrement n'est nullement obligatoire; l'enregistrement au titre de la loi sur les relations professionnelles ne présenterait normalement qu'un intérêt minime pour un petit syndicat d'entreprise; la loi sur les relations professionnelles n'interdit pas l'enregistrement des syndicats comportant moins de 10.000 membres: elle leur impose seulement d'apporter la preuve de l'existence de "circonstances particulières" justifiant leur enregistrement; les membres d'un syndicat non enregistré peuvent, s'ils ont capacité pour être parties à un conflit interEtats, entrer dans le champ de compétence de l'AIRC; la loi sur les relations professionnelles autorise les quelque 150 syndicats non enregistrés au niveau fédéral et les autres parties intéressées (y compris les employeurs) à soulever des objections contre les décisions prises par l'AIRC en faveur des syndicats enregistrés au niveau fédéral au détriment des parties dont les relations professionnelles se déroulent en dehors du domaine de compétence de l'AIRC; la législation fédérale et la législation des Etats contiennent diverses dispositions de nature à encourager et faciliter l'établissement volontaire de relations constructives et coopératives entre les syndicats enregistrés au niveau fédéral et ceux enregistrés au niveau des Etats, en autorisant notamment l'appartenance simultanée à ces deux types de syndicats et le partage de ressources entre eux; les modifications apportées à la loi ont l'appui de l'écrasante majorité des syndicats fédéraux et des syndicats des Etats, ainsi qu'il ressort des congrès biennaux du Conseil australien des syndicats.
  11. 345. Le gouvernement souligne que la participation au système fédéral de relations professionnelles établi par la loi sur les relations professionnelles n'est pas nécessaire pour qu'un syndicat fonctionne de manière satisfaisante. Un peu moins de la moitié des syndicats en Australie sont enregistrés au titre de la loi sur les relations professionnelles. Un grand nombre de syndicats ont choisi de ne mener leurs activités que dans le cadre géographique d'un Etat. D'après le recensement des syndicats effectué par le Bureau australien de statistique, il y avait, au 30 juin 1990, 295 syndicats en Australie, dont moins de la moitié (139) étaient enregistrés au niveau fédéral. A côté des sections d'Etat des syndicats enregistrés au niveau fédéral, on trouve souvent des syndicats enregistrés au niveau des Etats qui sont équivalents, certaines personnes étant affiliées aux deux organisations, lesquelles ont des biens en commun et sont dirigées par les mêmes responsables. Certains syndicats enregistrés au niveau des Etats n'ont pas d'homologue au niveau fédéral. La législation fédérale comme celle des Etats contient des dispositions visant à faciliter les relations entre les syndicats fédéraux et les syndicats des Etats, notamment en autorisant les membres d'un syndicat enregistré au niveau d'un Etat à s'affilier à un syndicat homologue enregistré au niveau fédéral, même si les conditions d'admissibilité à la qualité de membre du syndicat enregistré au niveau fédéral ne sont pas identiques à celles du syndicat enregistré au niveau de l'Etat (article 202 de la loi sur les relations professionnelles). En outre, les effets du système fédéral d'enregistrement des syndicats ont déjà été examinés par le Comité de la liberté syndicale. Dans le cas no 1511, présenté par la Fédération internationale des associations de pilotes de ligne (IFALPA), le comité a tiré la conclusion suivante en ce qui concerne l'enregistrement au titre de la loi sur les relations professionnelles de la Fédération australienne des pilotes de ligne (AFAP) (277e rapport, paragr. 229):
    • "Le comité ne considère pas qu'on puisse voir dans ces événements une violation des principes de la liberté syndicale. L'enregistrement au titre de la loi de 1988 est facultatif. L'AFAP avait choisi de se faire enregistrer et d'accepter les avantages qui en découlent. Le comité considère qu'il est parfaitement raisonnable que la législation et l'AIRC exigent l'adhésion aux normes du système de conciliation et d'arbitrage à titre de contrepartie pour ces avantages. Cela ne semble nullement incompatible avec les garanties prévues par les articles 2 et 3 de la convention no 87 et par l'article 4 de la convention no 98. Les travailleurs peuvent constituer le syndicat de leur choix et s'y affilier. Ce syndicat peut ensuite choisir, s'il le souhaite, de se faire enregistrer au titre de la loi fédérale. Il peut aussi se faire enregistrer au titre de la législation d'un ou de plusieurs Etats, ou ne pas se faire enregistrer. Qu'il soit enregistré ou non, il peut élaborer ses programmes en toute liberté. Il peut aussi participer à des négociations collectives libres."
  12. 346. Le gouvernement souligne également qu'un syndicat est libre de déposer ou non une demande d'enregistrement au niveau fédéral. L'aboutissement d'une telle demande d'enregistrement donne plus aisément accès au système fédéral de règlement des conflits, confère certains avantages et impose certaines obligations. En outre, on ne peut alléguer que l'élément de choix soit illusoire, en prétendant par exemple que les désavantages du non-enregistrement sont tels qu'un syndicat qui ne serait pas enregistré au niveau fédéral ne pourrait continuer à exister, parce qu'un syndicat peut être constitué et fonctionner en dehors du système fédéral (comme a choisi de le faire la majorité des syndicats australiens), et parce qu'un syndicat non enregistré au niveau fédéral a le droit de contester l'utilisation du système fédéral par des syndicats enregistrés à ce niveau pour empiéter sur son secteur d'activité.
  13. 347. Le gouvernement insiste sur le fait que le système fédéral ne présente pas d'intérêt pour les syndicats d'entreprise. Pour des raisons constitutionnelles, la compétence de l'AIRC ne peut, dans la grande majorité des cas, s'exercer qu'en cas de conflit du travail interEtats effectif ou probable. Or la dimension et la dispersion géographique des entreprises en Australie sont telles que la plupart des syndicats d'entreprise recrutent normalement leurs membres dans un seul Etat. Bien que cela soit théoriquement possible, il y a peu de chances que des négociations entre un syndicat d'entreprise (ce type de syndicat n'est pas courant en Australie) et l'employeur correspondant se déroulent dans le contexte d'un conflit interEtats. A ce niveau, il est beaucoup plus normal et pratique de recourir à des négociations directes ou, si nécessaire, au système de conciliation et d'arbitrage de l'Etat.
  14. 348. En ce qui concerne le critère des circonstances particulières, le gouvernement explique que l'enregistrement au titre de la loi sur les relations professionnelles d'un syndicat comportant moins de 10.000 membres n'est pas interdit. Les syndicats en cause doivent seulement prouver à un tribunal indépendant (l'AIRC) que, bien qu'ils ne remplissent pas la condition relative au nombre minimal de membres, il y existe des raisons positives qui, compte tenu des objectifs de la loi, justifient leur participation en tant qu'organisations enregistrées au système fédéral de relations professionnelles. L'AIRC dispose d'un large pouvoir d'appréciation, et l'intention du législateur était manifestement d'éviter que cette condition ne soit appliquée de façon déraisonnable ou trop stricte. Toute décision en la matière est susceptible de recours.
  15. 349. Un autre élément important selon le gouvernement est la participation officielle de membres d'un syndicat non enregistré au système fédéral. Il est établi en droit en Australie qu'un groupe donné de travailleurs peut être partie à un conflit relevant de la compétence de l'AIRC et que ces travailleurs peuvent, pour leur propre compte, être collectivement parties à une sentence arbitrale fédérale. De tels exemples sont rares en pratique, ce qui montre nettement que la représentation syndicale et les relations intersyndicales sont généralement stables en Australie. Il est vrai également qu'une telle démarche est quelque peu pesante et comporte d'autres inconvénients par rapport à la participation au système fédéral d'un syndicat enregistré à ce niveau. Il serait tout de même erroné d'en déduire que le système fédéral n'existe qu'au profit des organisations enregistrées à ce niveau. L'objectif principal du système, ainsi qu'il a été indiqué, est d'assurer la prévention et le règlement des conflits du travail interEtats, que les parties soient ou non enregistrées dans le cadre de ce système.
  16. 350. D'après le gouvernement, la protection assurée dans le cadre du système fédéral peut être étendue aux intérêts des syndicats qui ne sont pas enregistrés à ce niveau. En vertu de la loi sur les relations professionnelles, un syndicat non enregistré au niveau fédéral a capacité: pour s'adresser à l'AIRC à propos d'une action engagée auprès d'elle, en lui demandant d'opposer une fin de non-recevoir ou de s'abstenir de traiter l'affaire parce qu'elle relève de la compétence d'une instance professionnelle au niveau d'un Etat, ou parce qu'il n'est pas nécessaire ou souhaitable de poursuivre l'action dans l'intérêt public (articles 111 1) g) et 111 2); disposition réglementaire 134); et pour faire objection à l'élargissement du champ professionnel couvert par un syndicat enregistré au niveau fédéral (articles 204 et 253; dispositions réglementaires 61 et 73). Un employeur intéressé, partie à un conflit ou susceptible d'être affecté par ce conflit, a également la faculté de soulever des objections, soit en tant que partie soit en tant qu'intervenant (article 43) contre les mesures prises par l'AIRC.
  17. 351. Le gouvernement soutient que les dispositions législatives encouragent et facilitent les relations entre les syndicats enregistrés au niveau fédéral et ceux qui le sont au niveau des Etats. Le système australien est caractérisé par l'existence de relations étroites entre les syndicats enregistrés au niveau fédéral et les syndicats homologues enregistrés au niveau des Etats. Il est fréquent que des sections de syndicats enregistrés au niveau fédéral soient enregistrées séparément en tant que syndicats d'Etat et de la sorte investies d'une personnalité juridique distincte. Les syndicats fédéraux et ceux qui leur correspondent dans les Etats partagent parfois des ressources et ont des membres en commun. Bien qu'il arrive que des conflits opposent des syndicats fédéraux et des syndicats d'Etat s'occupant en partie des mêmes domaines d'activité professionnelle, il existe des mécanismes pour régler de tels conflits. La loi sur les relations professionnelles vise à encourager la coopération et à éviter les difficultés d'ordre juridique ou pratique: elle autorise en effet les syndicats à conclure un accord permettant aux membres du syndicat d'Etat d'être admis au sein du syndicat fédéral, même s'ils ne remplissent pas les conditions normalement requises pour en être membres, et à participer aux affaires internes de ce syndicat (article 202); elle remédie à certains défauts de validité découlant de la participation aux activités d'une organisation enregistrée au niveau fédéral de personnes non habilitées aux termes des statuts de l'organisation à en être membres (par exemple des membres d'un syndicat d'Etat traités à tort comme des membres du syndicat fédéral); ou encore, elle impose des auditions conjointes de l'AIRC et des tribunaux des Etats pour faciliter le règlement de questions connexes relevant à la fois de la compétence des institutions fédérales et de celle des Etats (par exemple lorsqu'un syndicat fédéral et un syndicat d'Etat ont déposé simultanément une plainte concernant une même activité professionnelle ou une même industrie (article 175).
  18. 352. Enfin, le gouvernement souligne que les syndicats sont en faveur de cette législation. D'après le Bureau australien de statistique, 54 pour cent des travailleurs en Australie appartiennent à un syndicat fédéral ou à un syndicat d'Etat et, sur les 295 syndicats dénombrés, 127 - représentant près de 2,8 millions de travailleurs, soit plus de 80 pour cent de l'ensemble des travailleurs syndiqués - sont affiliés à l'organisation syndicale nationale faîtière, le Conseil australien des syndicats (ACTU). L'ACTU a été pleinement consulté au sujet de la modification des conditions relatives au nombre de membres, et il les a acceptées. Le gouvernement cite une lettre qui lui a été adressée par le conseil, dans laquelle ce dernier déclare qu'il n'appuie la plainte en aucune manière:
    • ... l'ACTU considère que cette plainte n'est pas sincère et a été conçue uniquement à des fins politiques, pour affaiblir l'organisation des travailleurs en Australie en favorisant le développement de syndicats inféodés à la direction des entreprises;
    • l'ACTU approuve la législation visée, au sujet de laquelle il a été pleinement consulté, et considère qu'elle est juste, pratique et appropriée pour le système fédéral de relations professionnelles;
    • l'ACTU note que les syndicats comptant moins de 10.000 membres ne sont pas exclus de l'enregistrement, pour autant qu'ils démontrent l'existence de circonstances particulières justifiant leur admission ou leur maintien dans le système fédéral en tant qu'organisations enregistrées, et qu'ils remplissent les autres conditions prévues par la loi qui s'appliquent à tous les syndicats;
    • la politique de l'ACTU, qui a été approuvée par une majorité écrasante de ses affiliés lors de son congrès de 1991, vise la rationalisation progressive du champ couvert par les syndicats;
    • cette politique, qui témoigne de la maturité de l'organisation syndicale en Australie, doit être mise en oeuvre par la fusion volontaire des syndicats conformément à la loi, laquelle permet aux membres des syndicats visés par ces fusions de participer à un vote afin de décider s'il doit y être procédé;
    • l'ACTU note que la loi ne s'applique pas aux affiliés et autres syndicats qui opèrent en dehors du système fédéral ni ne les affecte, en particulier ceux qui opèrent dans le cadre des systèmes des Etats (c'est-à-dire la majorité des affiliés de l'ACTU).
    • Aucune autre organisation syndicale faîtière ni aucun syndicat n'a fait part au gouvernement australien d'objections à l'encontre de la mise en oeuvre des dispositions législatives depuis leur entrée en vigueur.
  19. 353. Le gouvernement fait observer que, depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1991, les dispositions relatives aux fusions, dans leur version révisée, ont été invoquées un nombre considérable de fois. Dix-sept fusions, mettant en cause 41 syndicats enregistrés au niveau fédéral, ont été approuvées par les membres touchés. Lorsque toutes ces fusions volontaires auront pris effet, le nombre des syndicats enregistrés au niveau fédéral aura été réduit de 25. En outre, 20 syndicats enregistrés au niveau fédéral participent actuellement aux processus engagés dans le cadre de huit projets de fusions. Un grand nombre d'autres syndicats enregistrés au niveau fédéral ont entamé des négociations à cette fin ou sont sur le point de le faire. Sur les trente-huit syndicats fédéraux comptant moins de 1.000 membres, qui étaient enregistrés lors de l'entrée en vigueur, en 1989, de la loi sur les relations professionnelles, 12 ont déjà fusionné volontairement avec d'autres syndicats fédéraux et quatre sont à présent officiellement engagés dans un processus de fusion.
  20. 354. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'examen de l'enregistrement, dans la première et dans la deuxième étape, et son annulation dans les cas où il n'existe pas de circonstances particulières limitent de manière déraisonnable le maintien de l'enregistrement des organisations visées et portent atteinte aux principes de la liberté syndicale, le gouvernement assure que les plaignants n'ont pas présenté les dispositions dans leur contexte. Il fait observer, par exemple que:
    • a) tous les syndicats ont été avertis très à l'avance des examens auxquels il allait être procédé, puisque les petites organisations comptant moins de 1.000 membres ont eu trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi sur les relations professionnelles pour s'y préparer (les examens devant commencer le 1er mars 1992), et que celles qui comptent moins de 10.000 membres ont eu pour ce faire deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi de 1991 (les examens devant commencer le 1er mars 1993);
    • b) les petits syndicats comptant moins de 1.000 membres et ceux qui en comptent moins de 10.000 sont libres d'essayer d'accroître leurs effectifs en recrutant ou en fusionnant, ou bien de demeurer tels quels et de défendre leurs intérêts devant l'AIRC;
    • c) l'examen sera dirigé par un membre ayant rang de président de l'AIRC - organisme indépendant qui, en vertu de la loi sur les relations professionnelles, a le statut de juridiction -, et une audition est prévue lors de laquelle le syndicat en cause pourra exposer son cas, chaque syndicat étant en droit de faire recours devant la commission plénière;
    • d) le membre de la commission ayant rang de président doit vérifier s'il existe des circonstances particulières et, si tel est le cas, l'enregistrement du syndicat ne sera pas affecté;
    • e) le membre de la commission ayant rang de président a la faculté d'ajourner un examen s'il considère que la petite organisation en cause fait tout ce qui est en son pouvoir pour atteindre le nombre minimal de membres.
  21. 355. Soulignant que le membre de la commission ayant rang de président dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer ce qui constitue des "circonstances particulières", le gouvernement se réfère à la déclaration du ministre des Relations professionnelles lors de la discussion du projet de loi au Sénat au sujet de l'interprétation de l'expression "circonstances particulières" dans le contexte de la version révisée de l'article 193 et du nouvel article 193A. Conformément à la loi de 1901 sur l'interprétation des lois, un tribunal peut invoquer une telle déclaration pour élucider l'esprit d'une disposition législative.
    • Même ainsi ... il ne s'ensuit pas que les syndicats comptant moins de 10.000 membres n'ont pas leur place dans le système national. C'est précisément pour cela qu'il faut qu'une exemption soit possible en cas de circonstances particulières. La question s'est posée de savoir dans quelles limites cette exemption pouvait jouer. L'exemption proposée comporte deux éléments connexes. Le premier est l'existence confirmée de circonstances particulières. Le projet de loi ne définit pas l'expression "circonstances particulières". Cela est délibéré; toute tentative de définition serait contraire au but visé, qui est d'assurer l'exercice d'un large pouvoir d'appréciation. L'objectif est d'assurer un pouvoir qui puisse s'exercer avec souplesse et donne toute latitude de tenir compte des faits dans un cas donné. Le deuxième élément est que lorsque l'existence de circonstances particulières est avérée il est dans l'intérêt public que l'enregistrement de l'organisation soit maintenu. Le membre de la commission désigné comme ayant rang de président sera seul habilité, en faisant usage de ce pouvoir d'appréciation, à déterminer si ces éléments sont réunis; toutefois, ce pouvoir d'appréciation ne sera pas exercé dans le vide. Pour faire usage d'un pouvoir d'appréciation établi par la loi, il faut tenir compte de la portée, de l'objet et des objectifs de la loi en question. Dans le cas de la loi sur les relations professionnelles, cette exigence est renforcée par l'article 90, conformément auquel la commission doit, dans l'exercice de ses fonctions, tenir compte de l'intérêt public et, à cette fin, considérer entre autres choses les objectifs de la loi ... qui sont de promouvoir l'harmonie des relations professionnelles et la coopération entre les parties qui y participent en Australie.
  22. 356. Le gouvernement fait valoir que, même lorsqu'il est décidé que l'enregistrement d'un syndicat doit être annulé, cette annulation n'entraîne pas la disparition du syndicat; n'affecte pas les statuts du syndicat, sa composition, ses droits de propriété, ou les droits et les obligations qui lui sont reconnus par la loi; n'empêche pas le syndicat de négocier en dehors du système fédéral, que ce soit en participant au système de l'Etat en question ou autrement; par contre, elle exclut le syndicat du champ d'application des sentences arbitrales de l'AIRC.
  23. 357. Enfin, le gouvernement conteste que les employeurs soient défavorablement affectés, parce que la structure du mouvement syndical n'est pas déterminée par les intérêts des employeurs ni par ce qui leur convient. Les exigences relatives au nombre de membres n'entraîneront pour les syndicats aucune difficulté supplémentaire pour ce qui est de créer, ou de faire enregistrer, de nouveaux syndicats. Rares doivent être les branches d'activité, s'il en existe, qui n'occupent pas 10.000 travailleurs. Le mouvement syndical lui-même a commencé, dans le cadre de sa politique de rationalisation volontaire, à se réorganiser à l'échelon de la branche. Le gouvernement cite des exemples de syndicats de branche déjà enregistrés en vertu de la loi sur les relations professionnelles (par exemple le Syndicat du secteur financier, le Syndicat du secteur public australien, la Fédération des constructeurs de véhicules, le Syndicat national des cheminots). Il soutient qu'il est peu probable qu'un grand nombre de syndicats d'entreprise voient un intérêt à participer au système fédéral, puisque, à des fins pratiques, ils doivent mener leur action au niveau de l'Etat. Le gouvernement note que certains syndicats d'entreprise ont été enregistrés en vertu de la loi sur les relations professionnelles, dans des cas où l'employeur intéressé est une grande entreprise nationale (par exemple l'Association du personnel de l'AMP, l'Association des administrateurs de la CSR et l'Association du personnel de la Commonwealth Bank, mais ces syndicats se sont raréfiés, les travailleurs préférant faire partie d'un grand syndicat de branche ou d'un syndicat interbranches. En fait, le syndicat de l'AMP a volontairement fusionné avec le Syndicat du secteur financier qui l'a absorbé. Quant aux "petites" organisations qui sont assujetties à un examen et dont l'enregistrement est annulé, leur existence et leur aptitude à opérer en dehors du système fédéral ne seront pas affectées.
  24. 358. En tout état de cause, le gouvernement réfute l'argument selon lequel, sur le plan de la liberté syndicale, il y aurait lieu de se plaindre de ce que les syndicats tendent à s'agrandir, à mieux s'organiser et à se renforcer; cela est particulièrement vrai dans les cas où la constitution de grands syndicats se fait par fusion volontaire, laquelle doit être approuvée par leurs membres au moyen d'un vote au scrutin secret. Quoi qu'il en soit, cet aspect de la plainte prête à confusion, car les trente-sept syndicats comptant plus de 20.000 membres représentent 86,4 pour cent des membres de l'ensemble des syndicats enregistrés au niveau fédéral, et la grande majorité des employeurs et de leurs organisations représentatives qui participent au système fédéral ont l'habitude de traiter fréquemment avec les grands syndicats enregistrés à ce niveau. Le gouvernement souligne qu'au niveau fédéral les grands syndicats nationaux sont, du côté des travailleurs, des partenaires clés. En pratique, les positions de négociation relatives des employeurs et des travailleurs dans le système fédéral sont depuis longtemps caractérisées par le rôle prédominant des associations d'employeurs et des grands syndicats enregistrés au niveau fédéral.
  25. 359. En conclusion, le gouvernement souligne que les dispositions législatives en cause ont pour objet de renforcer le système fédéral de relations professionnelles en introduisant un mécanisme visant à assurer la participation de syndicats suffisamment bien organisés et dotés de ressources suffisantes pour représenter efficacement leurs membres à ce niveau. Ce mécanisme n'est pas conçu pour aboutir à l'exclusion automatique des petits syndicats de ce système, mais pour leur imposer de démontrer l'existence de raisons positives justifiant leur participation au système national en tant qu'organismes enregistrés. La non-réalisation de cette condition n'entraîne pas leur dissolution ni leur incapacité de fonctionner en tant que syndicats, non plus que leur exclusion complète du système fédéral. Les dispositions législatives en cause ne restreignent nullement le droit des travailleurs de créer un syndicat de leur choix ou d'adhérer à un tel syndicat, pas plus que la capacité de ces syndicats de fonctionner de manière efficace.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 360. Le comité note que ce cas porte sur deux aspects de la loi amendant la législation relative aux relations professionnelles adoptée par le Parlement australien le 20 décembre 1990 et entrée en vigueur le 1er janvier 1991. L'association d'employeurs plaignante fait valoir, d'une part, que la condition relative à l'existence d'un effectif de 10.000 membres figurant maintenant dans l'article 189 de la loi fédérale sur les relations professionnelles est un seuil trop élevé qui, pour diverses raisons, porte atteinte aux principes de la liberté syndicale; et, d'autre part, que le pouvoir d'appréciation dont il est question dans les articles 193 et 193A, s'agissant de permettre le maintien de l'enregistrement des "petites" organisations déjà enregistrées, ne constitue pas une garantie suffisante de la liberté syndicale. L'association souligne également les difficultés auxquelles elle se heurte en pratique en tant qu'organisation d'employeurs pour mener ses activités dans les conditions établies par ces nouvelles dispositions.
  2. 361. Le comité prend note également de la réponse détaillée du gouvernement à ces allégations, à savoir que le système établi en vertu de la loi sur les relations professionnelles - qui est maintenu avec les amendements apportés en 1991 - est facultatif et, s'il n'agrée pas aux organisations de travailleurs, ou si ces dernières ne remplissent pas les conditions qui y sont attachées, elles sont libres de mener leur action en dehors du système fédéral de relations professionnelles, ce qu'elles font d'ailleurs comme le montrent les statistiques fournies à l'appui de cette assertion; le gouvernement ajoute qu'il existe des dispositions permettant aux membres des syndicats non enregistrés d'être admis jusqu'à un certain point dans le système; que les amendements en question ont reçu l'appui de la principale organisation syndicale nationale d'Australie (l'ACTU), qui s'est déclarée en faveur de la rationalisation des (139) organisations de travailleurs existantes; que l'examen de l'enregistrement des "petites" organisations est équitable, indépendant, et qu'il est fait usage en la matière d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer s'il existe des circonstances particulières justifiant le maintien de cet enregistrement; enfin, que tout inconvénient pouvant en résulter pour les organismes d'employeurs n'est pas un argument qui permette de réfuter valablement les amendements introduits pour renforcer le mouvement syndical; de tels inconvénients pourraient d'ailleurs être inexistants puisque la plupart des syndicats d'entreprise ne mènent pas leur action au niveau fédéral.
  3. 362. Ayant examiné les déclarations formulées par les plaignants et le gouvernement, le comité observe que les amendements apportés en 1991 à la loi fédérale sur les relations professionnelles ont pour effet d'empêcher les organisations syndicales de moins de 10.000 membres d'avoir accès au système fédéral de conciliation et d'arbitrage. Toutefois, des dérogations à cette règle pourront être accordées en vue du maintien de l'enregistrement des organisations quand des circonstances particulières le justifieront dans l'intérêt public.
  4. 363. Afin de se prononcer en pleine connaissance de cause sur le présent cas, le comité demande à l'organisation plaignante et au gouvernement de fournir des précisions sur les conséquences qu'entraînent ces amendements sur les activités que peuvent mener ces organisations syndicales. Le comité demande également au gouvernement de préciser la nature et l'étendue des "circonstances particulières" qui pourraient justifier une dérogation au seuil minimal de 10.000 membres.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 364. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité observe que les amendements de 1991 à la loi fédérale sur les relations professionnelles ont pour effet, sauf dérogations, d'empêcher les organisations syndicales de moins de 10.000 membres d'avoir accès au système fédéral de conciliation et d'arbitrage.
    • b) Le comité demande à l'organisation plaignante et au gouvernement de fournir des précisions sur les conséquences qu'entraînent ces amendements sur les activités que peuvent mener ces organisations syndicales.
    • c) Le comité demande également au gouvernement de préciser la nature et l'étendue des "circonstances particulières" qui pourraient justifier une dérogation au seuil minimal de 10.000 membres.
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