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- 58. La plainte, qui fait l'objet du présent cas, figure dans des communications du Syndicat des employés de l'Université de Costa Rica (SINDEU), datées des 2 décembre 1993 et 19 janvier 1994. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 29 septembre 1994.
- 59. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante- 60. Dans ses communications des 2 décembre 1993 et 19 janvier 1994, le Syndicat des employés de l'Université de Costa Rica (SINDEU) allègue qu'en raison d'une grève observée le 29 juillet 1993 pour réclamer le respect des aspects fondamentaux de la négociation salariale et du régime de sécurité sociale, le rectorat de l'Université de Costa Rica a diffusé, la veille du 29 juillet, une circulaire rédigée notamment dans les termes suivants:
- ...
- c) Nous lançons un appel à tous les universitaires pour qu'ils collaborent dans un esprit de tolérance au respect du droit au travail et à l'accès aux lieux de travail, de sorte que, dans toute la mesure possible, les activités normales des facultés et autres départements universitaires ne soient pas interrompues et que nous unissions nos énergies pour sauvegarder les intérêts de notre institution.
- d) Nous comprenons qu'usant d'un droit individuel certains travailleurs décident de participer à la grève; aussi, conformément à la législation nationale - qui limite la rémunération aux heures effectuées -, les chefs de département devront dresser une liste des personnes qui observeront un arrêt de travail et la remettre au bureau du personnel afin que soient opérées les réductions de salaires correspondantes.
- 61. L'organisation plaignante envoie le texte de l'accord, conclu le 30 juillet 1993 entre le gouvernement et les organisations syndicales "dans le but de parvenir à une solution du conflit", dans lequel il est notamment déclaré que:
- "Le gouvernement maintient sa décision de déduire d'un montant correspondant le salaire des fonctionnaires qui auraient observé un arrêt de travail, conformément à la directive du pouvoir exécutif."
- "Les syndicats manifestent leur opposition à tout type de réduction de salaire et présenteront leurs objections après avoir consulté les travailleurs."
- ...
- "Les représentants des travailleurs, après avoir consulté la base et compte tenu du présent accord et de la volonté de négociation du gouvernement, s'engagent à mettre un terme immédiat au mouvement de grève ou à tout autre moyen de pression."
- ...
- "Nul travailleur, qu'il soit intérimaire ou sous contrat, ne sera puni de sanctions administratives ou professionnelles en raison de sa participation au mouvement qui a donné lieu au présent règlement."
- ...
- 62. L'organisation plaignante ajoute qu'en dépit de cet accord et d'un document signé le 5 août 1993 par le président de l'Association nationale des enseignants et par le ministre de l'Education, dans lequel ceux-ci s'engagent à "ne pas prendre de mesures de représailles par suite de cet accord", une liste des personnes qui ont participé à la grève a été établie, et un montant correspondant à une journée de travail a été retranché de leur salaire.
- B. Réponse du gouvernement
- 63. Dans sa communication du 29 septembre 1993, le gouvernement déclare que le Syndicat des employés de l'Université de Costa Rica (SINDEU) a lancé un mot d'ordre de grève pour les 29 et 30 juillet et le 4 août 1993. Ce mouvement était motivé non pas par l'inexécution d'engagements salariaux de la part de l'Université de Costa Rica, mais par la contestation de la loi-cadre sur les pensions et de l'augmentation des salaires fondée sur l'indice des prix à la consommation (IPC), décrété par l'administration centrale. Or cette grève a été déclenchée au lendemain d'une intense période de négociation salariale entre l'Université de Costa Rica et le SINDEU, qui a abouti à la conclusion d'une nouvelle convention collective du travail. Sous l'angle des bonnes relations entre employeurs et employés, cet arrêt de travail revenait de toute évidence à dénaturer inutilement des négociations qui venaient d'être menées à terme, puisqu'il tenait à des faits et des circonstances indépendants des autorités universitaires, lesquelles avaient donné leur agrément à la conclusion d'un instrument collectif.
- 64. Le gouvernement ajoute que, par le biais de la circulaire no R-3386-93 (à laquelle se réfère l'organisation plaignante) destinée à la communauté universitaire, le rectorat et le vice-rectorat ont exprimé leur appui aux revendications salariales des travailleurs, à la nécessité d'une rémunération juste et proportionnelle à l'augmentation du coût de la vie et à l'opportunité de "chercher d'autres méthodes de soutien qui ne portent pas atteinte au fonctionnement normal de l'institution". De même, la circulaire invitait à respecter le droit au travail, à ne pas entraver l'accès aux lieux de travail et à ne pas interrompre les activités normales des facultés et autres départements universitaires. Les chefs de département ont reçu pour instruction de communiquer au bureau des ressources humaines le nom des travailleurs qui observeraient un arrêt de travail, à seule fin de ne pas verser de sommes indues, ce qui serait contraire à la législation et à la Constitution. En application de la circulaire précitée, 209 fonctionnaires ont été signalés au bureau des ressources humaines.
- 65. En conséquence, poursuit le gouvernement, le SINDEU a proposé au vice-recteur une déduction salariale en deux parties, la première qui serait soustraite dès le mois d'août et la seconde en septembre 1993. Cependant, et sur une nouvelle demande du SINDEU, la première déduction a été la seule effectuée et la seconde prévue pour septembre a été annulée, l'application de cette mesure s'inscrivant dans le cadre des négociations engagées avec les autorités universitaires. A la suite d'une erreur technique commise au centre informatique, la déduction du mois de septembre a été effectuée sur le salaire de certains fonctionnaires, mais en octobre la somme déduite leur a été restituée, ce qui prouvait la volonté de négociation des autorités universitaires.
- 66. Le gouvernement précise que la circulaire en question se limitait à lancer "un appel pour que les universitaires collaborent dans un esprit de tolérance au respect du droit au travail et à l'accès aux lieux de travail, de sorte que, dans toute la mesure possible, les activités normales des facultés et autres départements universitaires ne soient pas interrompues, et que nous unissions nos énergies pour sauvegarder les intérêts de notre institution...".
- 67. Le gouvernement indique en outre que le 1er décembre 1993 le recteur a rappelé au SINDEU que des négociations étaient en cours entre ledit syndicat et l'université concernant la déduction de salaire. Il signale également l'existence d'une proposition formulée par l'Université de Costa Rica et suggérée par la conseillère juridique du syndicat et qui consistait à: a) déduire de la deuxième tranche d'augmentation de salaire la somme correspondant à une demi-journée non travaillée; b) ne pas déduire le deuxième jour de salaire pour les fonctionnaires qui ont observé l'arrêt de travail; c) accorder une demi-journée de congé aux personnes dont le salaire a été diminué d'un montant correspondant au jour non travaillé, lequel serait décompté du congé de fin d'année. Provoquant une rupture des négociations et rejetant le contenu de la proposition précitée, qui découlait desdites négociations, le SINDEU a déposé une plainte devant l'OIT le 2 décembre 1993, avant d'épuiser les voies de conciliation administrative concernant le règlement des conflits du travail par le dialogue et la concertation entre les parties.
- 68. Le gouvernement déclare également que la rémunération des prestations dans la fonction publique est assujettie, conformément aux principes de la Constitution, à l'existence d'une relation de travail qui exige une prestation effective de services; toute rémunération versée en dehors d'une prestation de service devient un paiement indu et contraire aux principes constitutionnels et légaux sur le budget annuel de l'Etat, lesquels constituent le contenu nécessaire et les limites du budget. La circulaire no R-3386-93 du 28 juillet 1994 réitère ces principes et ne réclame nullement l'application de sanctions; les déductions effectuées sur le salaire d'un certain nombre d'employés de l'université ne doivent en aucun cas être considérées comme des actes de persécution antisyndicale et, selon les dispositions en vigueur, les autorités universitaires ne sont tenues de verser de salaire qu'aux personnes ayant effectivement accompli leurs tâches.
- 69. Par ailleurs, les dirigeants syndicaux ont proposé à l'administration universitaire que la déduction de salaire pour les jours de grève s'effectue en deux temps et non en un seul montant, proposition qui a été acceptée par l'université et qui est conforme aux principes constitutionnels applicables en la matière. De ce fait, les déductions salariales sont également justifiées par le consentement donné par le SINDEU à leur mise en application et par la rupture unilatérale de la part de cette organisation des négociations internes, censées aboutir à un accord fondé sur des revendications formulées expressément par le plaignant.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 70. Dans le présent cas, l'organisation plaignante allègue qu'en raison d'une grève une liste des personnes qui y ont participé a été dressée et qu'un jour de salaire leur a été déduit, alors que le gouvernement s'était engagé à ne pas imposer de sanctions.
- 71. Le comité prend note des déclarations du gouvernement, et notamment de ce que: 1) l'établissement de la liste des grévistes (209 fonctionnaires) ne constituait pas un acte de persécution antisyndicale, mais avait pour objet de permettre la déduction de salaire d'un jour de grève; 2) loin d'être une sanction, cette déduction de salaire est justifiée par des préceptes constitutionnels et juridiques qui interdisent à l'administration d'opérer des versements indus, ainsi que, selon le gouvernement, par le consentement de l'organisation plaignante qui avait sollicité une déduction de salaire en deux temps; 3) sur la demande de l'organisation plaignante, seul le premier montant a été déduit du salaire et le second a été annulé; 4) les autorités universitaires ne sont tenues de verser un salaire qu'aux personnes qui ont effectivement travaillé; 5) l'organisation plaignante a rompu unilatéralement les négociations relatives aux déductions salariales.
- 72. Le comité constate que l'accord conclu le 30 juillet 1993 entre le gouvernement et les organisations syndicales pour résoudre le conflit n'a pas permis aux parties de s'entendre sur la déduction salariale, si bien que par la suite les autorités universitaires ont engagé à cet égard de nouvelles négociations qui ont produit certains résultats, mais n'ont pas donné pleine satisfaction au syndicat plaignant.
- 73. A cet égard, le comité rappelle que, dans un cas antérieur, la question de la déduction des salaires pour cause de grève a été examinée et qu'il a admis que "les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d'objections du point de vue des principes de la liberté syndicale". (Voir 230e rapport, cas no 1171 (Canada), paragr. 170.)
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 74. Vu les conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que le présent cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.