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Definitive Report - Report No 383, October 2017

Case No 3163 (Mexico) - Complaint date: 16-APR-15 - Closed

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Allégations: L’organisation plaignante dénonce le refus de la part d’un conseil local de conciliation et d’arbitrage d’enregistrer le changement de son équipe dirigeante

  1. 464. La plainte figure dans deux communications du Syndicat unique des travailleurs du réseau de distribution d’eau potable et d’assainissement (SUTSAPA), en date du 16 avril et du 22 octobre 2015.
  2. 465. Le gouvernement a envoyé sa réponse dans deux communications, en date du 26 mai et du 25 octobre 2016.
  3. 466. Le Mexique a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 467. Dans sa communication du 26 mai 2015, l’organisation plaignante indique que, le 1er octobre 2013, MM. Raúl Contreras Ramírez, Luis Aguilar Domínguez et Miguel Avitia Sánchez, en tant que représentants des travailleurs, ont convoqué pour le 5 octobre de la même année une assemblée extraordinaire du SUTSAPA, à laquelle ont assisté plus de 51 pour cent des membres du syndicat. L’organisation plaignante allègue que, dans le cadre de l’exercice de leur droit légitime à la liberté syndicale, les travailleurs réunis à l’occasion de ladite assemblée extraordinaire ont décidé de démettre de leurs fonctions l’ensemble des dirigeants du syndicat, car plusieurs d’entre eux se seraient rendus coupables de harcèlement sexuel à l’encontre de membres du syndicat et auraient enfreint les statuts de l’organisation.
  2. 468. L’organisation plaignante affirme que, au cours de la même assemblée extraordinaire, M. Adin Corzo Hernández a été élu secrétaire général du SUTSAPA et que, le 10 octobre 2013, le nouveau comité exécutif a demandé au président du Conseil local de conciliation et d’arbitrage de l’Etat du Chiapas (le Conseil) de «prendre note» (demande d’enregistrement) du changement de direction, conformément aux dispositions de l’article 377 de la loi fédérale relative au travail (LFT). Le 18 octobre 2013, les membres du nouveau comité exécutif se sont réunis avec le directeur général de l’entreprise pour l’informer du changement de direction et lui indiquer que toute correspondance avec l’ancienne direction devait être interrompue.
  3. 469. L’organisation plaignante signale que, le 5 décembre 2013, le nouveau secrétaire général du SUTSAPA a demandé au Conseil d’enregistrer sans délai le changement de direction. Compte tenu de l’inaction dudit Conseil, la direction du syndicat a sollicité l’intervention du gouverneur de l’Etat du Chiapas. Celui-ci, dans une lettre datée du 16 janvier 2014, a informé la nouvelle direction du syndicat que sa demande avait été transmise au Secrétariat au travail de l’Etat du Chiapas et qu’elle serait traitée dans les plus brefs délais.
  4. 470. L’organisation plaignante ajoute que, le 9 décembre 2013, le président du Conseil a refusé de prendre note du changement de direction au motif que, selon l’article 365, alinéa IV, de la LFT, le syndicat devait lui remettre une copie du procès-verbal de l’assemblée au cours de laquelle a été élue la nouvelle direction et que cette copie devait être autorisée par le secrétaire général, le secrétariat et le secrétaire chargé des procès-verbaux de l’organisation, ce qui n’avait jamais été fait. Le refus a également été justifié par le fait que la convocation à l’assemblée extraordinaire ne mentionnait pas de changement de comité exécutif dans l’ordre du jour de l’assemblée, ce qui est contraire aux dispositions de l’article 19 des statuts dudit syndicat, et par le non-respect de la procédure prévue à l’article 34 de ces mêmes statuts.
  5. 471. En ce qui concerne le refus susmentionné, l’organisation plaignante fait valoir que: i) refuser de prendre note du changement de direction au motif que les dispositions des statuts du syndicat n’auraient pas été respectées ne relève pas de la compétence du Conseil, étant donné que, selon les principes directeurs du Comité de la liberté syndicale, l’enregistrement des dirigeants syndicaux devrait se faire automatiquement par notification de la part du syndicat et ne devrait pouvoir être contesté qu’à la demande des membres du syndicat en question; il ne revenait donc pas au Conseil de vérifier d’office le déroulement de ladite procédure; ii) le syndicat a respecté la procédure prévue dans ses statuts, étant donné que, conformément à l’article 11 de ce texte, la destitution ou la démission d’un dirigeant syndical doit être décidée au cours d’une assemblée extraordinaire; iii) lors d’un changement de direction survenu le 28 janvier 2012, bien qu’effectué dans le cadre d’une assemblée ordinaire et constituant donc une infraction aux statuts du syndicat, le Conseil ne s’y était pas opposé; iv) selon les dispositions des articles 9 et 17 desdits statuts, l’assemblée générale constitue l’organe suprême de décision du syndicat et bénéficie d’une autonomie syndicale. Par conséquent, elle n’est pas liée par les dispositions des statuts du syndicat, et les décisions qu’elle adopte en séance ordinaire ou extraordinaire sont irrévocables; v) le refus du Conseil de prendre note du changement de direction au motif que les copies reçues n’étaient pas autorisées et étaient donc dépourvues de force probante n’est pas justifié, car selon les principes du Comité de la liberté syndicale le président du Conseil doit uniquement prendre note des informations transmises et non qualifier les éléments de preuve; vi) étant donné que le Conseil a été saisi de la demande d’enregistrement du changement de direction du syndicat le 10 octobre 2013 et qu’il a refusé ledit enregistrement le 9 décembre 2013, plus de soixante jours se sont écoulés après le dépôt de la demande, et celle-ci se trouvait donc dans une situation de silence administratif positif (positiva ficta).
  6. 472. En outre, l’organisation plaignante affirme que les dirigeants élus ont déposé un recours en amparo indirect auprès de la sixième juridiction de district de l’Etat du Chiapas pour s’opposer à la décision du président du Conseil rendue le 9 décembre 2013. Le recours a été rejeté le 23 septembre 2014, au motif que l’enregistrement du changement de comité exécutif était subordonné à la vérification de la procédure électorale et que l’autorité compétente devait donc vérifier si la procédure ayant abouti à l’élection de la nouvelle direction était conforme aux conditions formelles prévues dans les statuts du syndicat.
  7. 473. L’organisation plaignante estime que, à la suite de la réforme constitutionnelle en matière de droits de l’homme de 2011 et compte tenu de la décision de la Cour suprême de justice de la nation dans l’affaire Rosendo Radilla Pacheco, les droits de l’homme définis par les sources juridiques du droit international font partie intégrante du système constitutionnel mexicain. Ainsi, le juge qui a subordonné l’enregistrement du changement de direction aux conditions formelles prévues dans les statuts du syndicat aurait dû tenir compte des principes du Comité de la liberté syndicale, alors qu’il s’en est, au contraire, éloigné.
  8. 474. L’organisation plaignante ajoute que la décision concernant le recours en amparo rendue par la sixième juridiction a fait l’objet d’un pourvoi en révision auprès du troisième tribunal collégial du vingtième circuit. Le 12 mars 2015, ce dernier a rejeté ledit pourvoi, estimant qu’il n’était pas possible de reconnaître ou d’enregistrer de manière automatique tout changement demandé à partir de n’importe quel type de document présenté, car il fallait s’assurer que les mesures prises étaient conformes à la procédure prévue dans les statuts du syndicat et à la LFT. Ainsi, le tribunal a indiqué que, pour que l’autorité compétente procède automatiquement à l’enregistrement demandé après vérification du respect des conditions prévues, les syndicats étaient tenus de fournir un double des copies autorisées des procès-verbaux rendant compte du changement de direction syndicale, afin que l’autorité en question puisse vérifier si la procédure et le résultat décrits dans ces documents sont conformes aux règles adoptées librement et inscrites dans les statuts du syndicat, et si le suffrage et le résultat correspondant respectent les dispositions desdits statuts, établis librement par les membres du syndicat. A cet égard, l’organisation plaignante allègue une fois de plus que l’enregistrement des comités directeurs des organisations syndicales devrait se faire automatiquement et que le Conseil, qui a refusé de prendre note du changement de direction, ainsi que les deux juridictions qui ont confirmé ce refus ont entravé et limité l’exercice du droit syndical prévu à l’article 3 de la convention no 87.
  9. 475. Enfin, l’organisation plaignante dénonce la dégradation des conditions de travail de plusieurs dirigeants syndicaux élus à l’issue de l’assemblée générale du 5 octobre 2013, en violation de leur immunité syndicale. A cet égard, elle indique que: i) M. Jorge Alejandro Reyes López, secrétaire chargé des activités sportives, qui travaillait de nuit depuis cinq ans, a été placé dans l’équipe du matin et a subi ainsi une baisse de salaire; ii) Mme Esperanza Melgar Cruz, secrétaire chargée des finances, des statistiques et du budget, a été mutée dans une autre succursale; iii) M. Apolinar Jonapa Morales, secrétaire chargé de la presse et de la diffusion, a été muté dans une autre succursale et contraint de changer d’horaires de travail.
  10. 476. L’organisation plaignante demande au comité de reconnaître le droit des travailleurs à élire librement leurs dirigeants, droit dont l’exercice requiert un enregistrement immédiat des changements de direction. Il demande également le lancement d’une enquête approfondie sur la dégradation des conditions de travail des dirigeants syndicaux susmentionnés.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 477. Dans sa communication reçue le 2 novembre 2016, le gouvernement transmet les informations fournies par le Conseil. A cet égard, il fait valoir que, le 11 septembre 2015, M. Jorge Iván Domínguez Molina, secrétaire général du SUTSAPA, a présenté au Conseil un document dans lequel il lui demande de prendre note de la mise en place d’un nouveau comité exécutif, élu à la majorité des suffrages exprimés au cours d’une assemblée extraordinaire tenue le 29 août 2015.
  2. 478. En ce qui concerne l’enregistrement du changement de direction du syndicat, le gouvernement signale en outre que, le 18 septembre 2015, le Conseil a donné une issue favorable à la demande datée du 29 août 2015, une fois que les auteurs de ladite demande s’étaient conformés aux conditions prévues par les articles 359 et 377, alinéa II, de la LFT, aux procédures établies dans les articles 9 et 19 des statuts du syndicat et à l’article 3 de la convention no 87. Ainsi, le gouvernement communique la composition du nouveau comité exécutif, dont le mandat porte sur la période allant du 29 août 2015 au 28 août 2018.
  3. 479. S’agissant de la plainte déposée auprès du comité, le gouvernement estime que les droits à la liberté syndicale du SUTSAPA n’ont pas été bafoués. Par conséquent, il prie le comité de prendre note des informations communiquées et de clore le présent cas, estimant qu’il ne nécessite pas un examen plus approfondi.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 480. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue que le refus de prendre note du changement de direction du SUTSAPA, par une décision rendue le 9 décembre 2013, d’une part, et la dégradation des conditions de travail de trois membres du comité exécutif élus à l’occasion de ce changement de direction, d’autre part, portent atteinte aux principes de la liberté syndicale.
  2. 481. En ce qui concerne tout d’abord le refus de la part du Conseil de prendre note du changement de direction au motif que le syndicat ne lui a pas remis de copie autorisée du procès-verbal de l’assemblée, contrairement aux dispositions de la LFT, et que les procédures définies dans les statuts du SUTSAPA n’ont pas été suivies, le comité note que l’organisation plaignante fait notamment valoir que: i) le Conseil a outrepassé sa compétence, étant donné que l’enregistrement de la nouvelle direction devait se faire automatiquement et qu’il ne revenait donc au Conseil ni de vérifier la conformité des procédures avec les statuts du syndicat ni de déterminer si les documents remis étaient de simples copies ou des copies autorisées; ii) conformément aux statuts du SUTSAPA, la destitution de dirigeants syndicaux doit être décidée au cours d’une assemblée extraordinaire; iii) selon les dispositions desdits statuts, l’assemblée générale bénéficie d’une autonomie syndicale et n’est donc pas tenue de satisfaire aux aspects formels des statuts en question.
  3. 482. Tout en prenant note des informations concernant l’enregistrement par le Conseil de la nouvelle direction du SUTSAPA, élue en assemblée extraordinaire en 2015, le comité regrette que le gouvernement ne lui ait pas communiqué ses observations concernant la décision rendue par le Conseil le 9 décembre 2013, dans laquelle celui-ci refuse de prendre note du changement de direction.
  4. 483. Le comité note en outre que, selon les informations transmises par l’organisation plaignante, le refus du Conseil de prendre note du changement de direction a fait l’objet d’un recours en amparo auprès de la sixième juridiction de district de l’Etat du Chiapas, qui a rejeté ce recours, puis d’un pourvoi en révision auprès du troisième tribunal collégial du vingtième circuit, qui a confirmé la décision négative rendue précédemment.
  5. 484. Compte tenu des éléments susmentionnés, le comité observe que la nouvelle direction élue le 5 octobre 2013 n’a pas été enregistrée par le Conseil au motif que, d’une part, le syndicat ne lui a pas remis de copie autorisée du procès-verbal de l’assemblée, contrairement aux dispositions de l’article 365, alinéa IV, de la LFT, et que, d’autre part, le syndicat n’a pas respecté les articles 19 et 31 de ses statuts, en particulier les dispositions relatives à l’inscription de l’élection d’un nouveau comité exécutif à l’ordre du jour de l’assemblée extraordinaire.
  6. 485. En ce qui concerne la nécessité, selon le Conseil, de respecter la condition légale consistant à fournir des copies autorisées du procès-verbal de l’assemblée extraordinaire au cours de laquelle a été décidé le changement de direction et de respecter les procédures établies par les statuts du syndicat, le comité souligne que le principe de libre élection des dirigeants syndicaux n’est pas incompatible avec le respect de certaines exigences de forme concernant l’enregistrement des organisations syndicales et de leurs dirigeants, à condition que ces exigences soient raisonnables et qu’il soit donné la possibilité à l’organisation concernée de rectifier d’éventuelles irrégularités constatées par l’autorité compétente dans les documents présentés. [Concernant ce dernier point, voir les cas antérieurs suivants: 334e rapport, cas no 2282, paragr. 638; 337e rapport, cas no 2346, paragr. 1056; 340e rapport, cas no 2393, paragr. 1059.] Le comité observe qu’une nouvelle direction a été enregistrée en 2015 et, de ce fait, il ne poursuivra pas l’examen du présent cas.
  7. 486. En ce qui concerne la question du non-respect par l’organisation plaignante de ses statuts, soulevée par le Conseil et les tribunaux, le comité estime important de rappeler qu’il n’y a pas violation des principes de la liberté syndicale lorsque la législation contient certaines règles destinées à promouvoir des principes démocratiques au sein des organisations syndicales ou à garantir le déroulement normal de la procédure électorale dans le respect des droits des membres afin d’éviter tout conflit au sujet des résultats des élections. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 399.] Le comité observe que, dans le présent cas, l’inscription de l’élection du nouveau comité exécutif du syndicat à l’ordre du jour de l’assemblée extraordinaire, en plus d’affecter la gouvernance du syndicat, aurait pu avoir une influence sur le niveau de participation des membres du syndicat à ladite assemblée et, par conséquent, sur la décision finale adoptée. Dans ces conditions et dans la mesure où le respect des statuts du syndicat semble avoir pour objectif de garantir le fonctionnement démocratique de ce dernier, le comité considère qu’il n’y a pas de violations aux principes de liberté syndicale dans le cas en espèce, de manière que le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  8. 487. En ce qui concerne les allégations de dégradation des conditions de travail, notamment des mutations et des changements unilatéraux d’horaires de travail pour trois représentants syndicaux élus le 5 octobre 2013, le comité veut croire que le gouvernement s’assurera que les travailleurs en question ne subiront pas de préjudices du fait de leurs activités syndicales.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 488. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d’administration de décider que le présent cas n’appelle pas un examen plus approfondi.
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