National Legislation on Labour and Social Rights
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Employment protection legislation database
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La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Toutefois, les rapports annuels d’inspection pour 2003 et 2004 ont été communiqués respectivement les 6 septembre 2005 et 24 avril 2006. Elle prend note de la communication des observations formulées par le Syndicat national unitaire – travail emploi formation insertion – SNU-TEF (FSU) en date des 13 janvier et 22 novembre 2005 et 10 juillet 2006. Ces observations ont été transmises par le BIT au gouvernement respectivement les 2 mars, 16 février et 4 septembre 2006.
Dans son observation du 13 janvier 2005, le SNU-TEF (FSU) a évoqué l’agression meurtrière perpétrée en septembre 2004 par un exploitant agricole de la Dordogne à l’encontre de deux agents de l’inspection du travail alors qu’ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions, ainsi qu’un drame similaire au Brésil, et exprimé son inquiétude devant l’émergence d’une violence patronale dans le pays. Le syndicat a signalé une certaine lenteur du gouvernement dans le processus de condamnation de l’acte d’agression susmentionné, lui reprochant en outre de n’y avoir pas répondu par des décisions opérationnelles, notamment en termes de renforcement des effectifs de l’inspection du travail. Il a souligné à cet égard une insuffisance criante du nombre d’agents de contrôle au regard du surplus de travail nécessité par la complexité des nouvelles législations (notamment relatives à la durée du travail), des accords de branche et surtout des accords d’entreprise souvent obscurs, ainsi que du fait de l’augmentation du nombre d’établissements assujettis et de travailleurs couverts. La baisse de la fréquence des contrôles toucherait de manière plus aiguë les travailleurs des petites entreprises dans lesquelles serait employé la majorité du salariat et où il n’existe pas de représentation du personnel. La situation décrite par le SNU-TEF (FSU) serait non seulement préjudiciable aux droits des travailleurs mais également aux conditions de travail du personnel d’inspection: une périodicité de contrôle d’une fois tous les dix ans favoriserait, à son avis, la survenue d’incidents dans ces entreprises. Outre la pénurie de personnel d’inspection, le SNU-TEF (FSU) exprime une vive inquiétude quant aux conséquences de la campagne de contrôle décidée par le gouvernement après la condamnation de l’Etat par le Conseil d’Etat en relation avec le retard mis à réagir aux risques professionnels inhérents à l’utilisation de l’amiante. Il se serait agi d’une campagne ciblant l’amiante friable, sur quinze jours, «improvisée», sans préparation sérieuse et exposant en conséquence les agents d’inspection eux-mêmes à un risque cancérogène. Le syndicat reproche par ailleurs au gouvernement son absence de réaction à des publications patronales sous forme d’articles ou via Internet, incitant les entreprises à ne pas observer la législation à l’incitation de certaines fédérations patronales à refuser tout contrôle par les agents de l’inspection du travail sans prise de rendez-vous préalable. Soulignant que les incidents de contrôle rapportés ne reflètent qu’une partie du phénomène, le SNU-TEF (FSU) estime par ailleurs que l’article 18 de la convention est violé, dans la mesure où les instances judiciaires saisies d’incidents en cours d’inspection n’ont prononcé de condamnation que dans 20 pour cent des cas déférés par les inspecteurs. Enfin, l’organisation syndicale considère qu’il est urgent de restaurer la légitimité de la mission de contrôle confiée à l’inspection du travail.
La commission relève à cet égard dans le rapport annuel d’inspection du travail pour 2004 que de nombreuses directions départementales font état de difficultés pour suivre avec efficacité les résultats des procédures pénales.
En date du 22 novembre 2005, le SNU-TEF (FSU) a communiqué au BIT une nouvelle observation au sujet de l’évolution de la situation, liée au décret du 12 mai 2005, portant création d’un Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI). Cet office est rattaché à la sous-direction de la police judiciaire de la gendarmerie nationale avec une coordination globale exercée par la direction centrale de la police judiciaire. Suivant ce décret, l’inspection du travail «est associée aux activités de l’office, en tant que de besoin» (art. 1). L’office intervient à la demande des autorités judiciaires ou des unités de la gendarmerie, de police, des directions et services des autres ministères concernés et des organismes de protection sociale ou d’initiative, chaque fois que les circonstances l’exigent (art. 4). Pour accomplir sa mission, l’office centralise, analyse, exploite et transmet aux services de la police nationale et aux unités de la gendarmerie nationale, ainsi qu’aux administrations publiques et organismes de protection sociale concernés, toutes les informations relevant de son domaine de compétence (art. 5). Suivant l’article 6 du décret, les services de la police, de la gendarmerie, des ministères du Travail, de la Santé, de la Défense, de l’Economie, de l’Equipement, des Transports, de l’Agriculture, ainsi que des autres administrations publiques et organismes de protection sociale concernés, sont tenus d’adresser à l’OCLTI dans les meilleurs délais et selon des procédures définies conjointement toutes informations dont ils ont connaissance ou qu’ils détiennent, relatives aux infractions de travail illégal, à leurs auteurs et à leurs complices. Le SNU-TEF (FSU) a annexé à son observation une circulaire adressée aux préfets par le ministre du Travail le 29 juillet 2005 sur le renforcement de la mobilisation pour la lutte contre le travail illégal, suite à une réunion du Comité interministériel de contrôle de l’immigration (CICI) qui s’était déroulée sous la présidence du ministre de l’Intérieur, le 27 juillet 2005. Cette circulaire porte sur l’organisation dans chaque département, avant le 31 octobre suivant, d’au moins une opération de contrôle conjointe, par tous les services concernés, y compris les services d’inspection du travail, l’inspection des impôts et des douanes, des sites de travail où sont susceptibles d’être occupés illégalement des étrangers sans titre de séjour. Il est clairement indiqué par cette circulaire que «naturellement, la priorité donnée au contrôle de l’emploi des salariés étrangers en situation irrégulière […] ne doit pas conduire à négliger les autres aspects du travail illégal, notamment les fraudes transnationales, […] ni d’autres catégories de fraudes (travail dissimulé, prêt de main-d’œuvre illicite et marchandage, infractions aux lois sur les salaires et à l’ensemble des conditions de travail), qui, du reste, sont fréquemment associées à celle de l’emploi des étrangers sans titre.»
Selon le SNU-TEF (FSU), l’inspection du travail est invitée par cette circulaire à «embrigader l’inspection du travail dans des opérations coup de poing contre des sites où le repérage des étrangers devrait se faire ‘au faciès’» et dont l’issue serait pour les étrangers sans titre de travail la reconduite immédiate à la frontière sans respect des procédures de régularisation de leur situation, au mépris du Code du travail, notamment de son article L 341-6-1 qui considère l’étranger sans papiers comme une victime ayant des droits au regard du travail salarié fourni (salaire dû, indemnité de rupture). L’organisation a communiqué au BIT des documents de presse faisant état de troubles consécutifs à une opération conjointe qui a abouti à l’arrestation d’étrangers. Elle s’est référée à des commentaires adressés à un pays par la commission en 2005, concernant l’attribution de missions en matière de travail illégal aux inspecteurs du travail des étrangers, notant avec satisfaction que le gouvernement avait donné effet à son engagement de prendre les mesures nécessaires pour transférer le contrôle du travail illégal à une entité autre que l’inspection du travail, de manière à ce que les inspecteurs puissent s’acquitter pleinement de leurs fonctions principales, conformément à l’article 3, paragraphes 1 et 2, de la convention.
Enfin, dans une observation communiquée le 10 juillet 2006, la même organisation signale ce qu’il considère comme une aggravation de la situation: une circulaire interministérielle signée le 27 février 2006 ordonnant plusieurs opérations conjointes par an. Du point de vue du SNU-TEF (FSU), cette circulaire viole les principes d’action de l’inspection du travail, sa déontologie et la protection de l’indépendance fonctionnelle de l’inspection du travail garantie par la convention. Toutes les organisations syndicales du ministère du Travail auraient réagi immédiatement pour, d’une part, résister à ce qu’elles considèrent comme des dérives successives ayant pour effet de pervertir l’exercice des missions d’inspection et, d’autre part, défendre la culture et les droit des agents de contrôle en refusant qu’ils soient associés à des opérations menées dans une logique purement policière, menée «au faciès», sans respect de la logique fondamentale du droit du travail, à savoir la protection des droits des salariés, et sans respect de l’article 17 de la convention qui affirme le droit de libre appréciation de l’inspecteur du travail quant aux suites à donner aux contrôles, ni de l’article 15 c) relatif à la préservation de la confidentialité de la source des informations de l’inspection du travail.
Le syndicat indique que, lors d’une réunion nationale convoquée par les syndicats à Paris, les 21 et 22 mars 2006, 800 agents de contrôle sur 1 800 ont voté une motion de refus total de la politique actuelle sur le travail des étrangers, ainsi qu’un préavis de grève national.
La commission espère que le gouvernement ne manquera pas de communiquer les informations en réponse à son observation de 2004 ainsi que tout commentaire qu’il jugera utile au regard des points soulevés par le SNU-TEF (FSU).