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Observación (CEACR) - Adopción: 2016, Publicación: 106ª reunión CIT (2017)

Convenio sobre las peores formas de trabajo infantil, 1999 (núm. 182) - Haití (Ratificación : 2007)

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La commission note les observations de la Confédération des travailleurs et travailleuses des secteurs public et privé (CTSP) reçues le 31 août 2016 et prie le gouvernement de faire part de ses commentaires à ce sujet.
Elle note également avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler ses précédents commentaires.
La commission note l’adoption de la loi no CL/2014-0010 du 2 juin 2014 sur la lutte contre la traite des personnes.
Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues. Vente et traite des enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, d’après le rapport de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les formes contemporaines d’esclavage, une nouvelle tendance a été observée en ce qui concerne la question des enfants employés comme domestiques (désignés en créole par le terme restavèks). Il s’agit de l’apparition de personnes qui recrutent des enfants dans les zones rurales pour les faire travailler comme domestiques dans des ménages urbains et à l’extérieur de la maison, sur les marchés. La Rapporteuse spéciale a noté que, en raison de cette nouvelle tendance, de nombreux intervenants ont qualifié le phénomène de traite, étant donné que les parents confient désormais leurs enfants à des personnes étrangères alors que, auparavant, les enfants étaient confiés à des proches. La commission avait pris note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) selon lesquelles la traite et le trafic des enfants persistent, notamment vers la République dominicaine. La CSI avait recueilli des témoignages graves relatifs aux abus sexuels et à la violence, pouvant aller jusqu’à l’homicide, perpétrés contre les jeunes femmes et jeunes filles victimes de traite, en particulier par les militaires dominicains, et exprimé son inquiétude sur le fait qu’il ne semble pas exister de loi permettant de traduire les responsables de la traite des personnes en justice. La commission avait enfin noté l’indication du gouvernement selon laquelle l’absence d’une loi spéciale sur le trafic et la traite des personnes constitue un vide juridique important et qu’un avant-projet de loi devait être voté par le Parlement.
La commission note avec intérêt l’adoption de la loi no CL/2014-0010 du 2 juin 2014 sur la lutte contre la traite des personnes. La loi prévoit que la traite, soit le recrutement, l’enrôlement, le transfert, le transport, l’hébergement ou l’accueil d’un enfant aux fins d’exploitation, constitue une circonstance aggravante donnant lieu à une peine d’emprisonnement à perpétuité (art. 11 et 21). La commission note cependant que, d’après ses observations finales de 2014 (CCPR/C/HTI/CO/1, paragr. 14), le Comité des droits de l’homme demeure préoccupé par la persistance du phénomène d’exploitation des enfants restavèks et par le manque de statistiques et de résultats sur les enquêtes contre les auteurs. Dans le même sens, la commission relève que, selon le rapport du 7 février 2014 de l’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en Haïti (A/HRC/28/82, paragr. 65, se référant à A/HRC/25/71, paragr. 56), le phénomène des enfants restavèks est la conséquence de la faiblesse de l’Etat de droit et que ces enfants (surtout des filles) sont systématiquement soumis à des travaux forcés, non payés et soumis à des abus physiques et/ou verbaux. Leur nombre était estimé par l’UNICEF à 225 000 en 2012. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre effective de la loi no CL/2014-0010, en veillant en particulier à ce que des enquêtes approfondies et la poursuite efficace des auteurs de traite des enfants de moins de 18 ans soient menées à leur terme. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de cette loi dans la pratique, en communiquant notamment des statistiques sur le nombre et la nature des infractions signalées, les enquêtes menées, les poursuites engagées, les condamnations prononcées et les sanctions pénales imposées.
Alinéas a) et d). Travail forcé ou obligatoire et travail dangereux. Travail domestique des enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait relevé la situation de centaines de milliers d’enfants restavèks qui sont souvent exploités dans des conditions qui relèvent du travail forcé. Elle avait noté que, dans les faits, beaucoup de ces enfants, dont certains n’ont que 4 ou 5 ans, sont victimes d’exploitation, obligés de travailler de longues heures sans rémunération, objets de discriminations et de brimades en tous genres, mal logés, mal nourris et souvent victimes de violences physiques, psychologiques et sexuelles. En outre, très peu d’entre eux sont scolarisés. La commission avait également pris note de l’abrogation du chapitre IX du titre V du Code du travail, relatif aux enfants en service, par la loi de 2003 relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus, de violences, de mauvais traitements ou traitements inhumains contre les enfants (loi de 2003). Elle avait noté que l’interdiction portée à l’article 2(1) de la loi de 2003 vise l’exploitation des enfants, y compris la servitude, le travail forcé ou obligatoire, les services forcés ainsi que les travaux qui, de par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s’exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité des enfants, sans cependant prévoir des sanctions en cas d’infraction à ses dispositions. La commission avait noté qu’au nombre des dispositions abrogées figurent celles de l’article 341 du Code du travail, lequel permettait de confier un enfant dès l’âge de 12 ans à une famille, pour être employé à des travaux domestiques. La commission avait néanmoins observé que l’article 3 de la loi de 2003 prévoit qu’«un enfant peut être confié à une famille d’accueil dans le cadre d’une relation d’aide et de solidarité».
La commission avait noté que, dans son rapport, la Rapporteuse spéciale s’est dite vivement préoccupée par l’imprécision de la notion d’aide et de solidarité et a estimé que les dispositions de la loi de 2003 permettent à la pratique du restavèk de se perpétuer. D’après le rapport de la Rapporteuse spéciale, le nombre d’enfants qui travaillent en qualité de restavèks serait compris entre 150 000 et 500 000 (paragr. 17), ce qui représente environ un enfant haïtien sur dix (paragr. 23). A la suite de ses entretiens avec des enfants restavèks, la Rapporteuse spéciale a constaté que tous s’étaient vu attribuer une lourde charge de travail par leurs familles d’accueil, souvent incompatible avec leur plus complet développement physique et mental (paragr. 25). En outre, la Rapporteuse spéciale a été informée que ces enfants sont souvent maltraités et victimes de violences physiques, psychologiques et sexuelles (paragr. 35). Des représentants du gouvernement et de la société civile ont soulevé que des cas de passages à tabac et de brûlures étaient régulièrement signalés (paragr. 37). La commission a noté que, au vu de ses constatations, la Rapporteuse spéciale a qualifié le système restavèk de forme contemporaine d’esclavage.
La commission note les allégations de la CSI selon lesquelles le séisme du 12 janvier 2010 a conduit à une détérioration abrupte des conditions de vie de la population haïtienne et à une précarisation accrue des conditions de travail. Selon la CSI, un nombre croissant d’enfants sont employés comme restavèks et il est fort probable que leurs conditions se soient détériorées davantage. De nombreux témoignages recueillis par la CSI mettent en évidence des conditions de travail extrêmement pénibles, et l’exploitation se couple souvent à des conditions de travail dégradantes, des horaires très longs, l’absence de congés et à l’exploitation sexuelle et des situations d’extrême violence.
La commission prend note que le gouvernement reconnaît que la domesticité des enfants restavèks s’assimile au travail forcé. Elle exprime à nouveau sa profonde préoccupation face à l’exploitation du travail domestique des enfants de moins de 18 ans exercé dans des conditions assimilables à l’esclavage ou dans des conditions dangereuses. Elle rappelle encore une fois au gouvernement que, en vertu de l’article 3 a) et d) de la convention, le travail ou l’emploi des enfants de moins de 18 ans dans des conditions assimilables à de l’esclavage ou dangereuses constitue l’une des pires formes de travail des enfants et est, aux termes de l’article 1, à éliminer de toute urgence. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces afin de veiller, en droit et dans la pratique, à ce que les enfants de moins de 18 ans ne soient pas engagés comme domestiques dans des conditions assimilables à l’esclavage ou dans des conditions dangereuses, en tenant compte de la situation particulière des filles. A cet égard, elle prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’amender les dispositions de la législation nationale, en particulier l’article 3 de la loi de 2003, qui permettent à la pratique du restavèk de se perpétuer. En outre, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de veiller à ce que des enquêtes approfondies et la poursuite efficace des personnes ayant soumis des enfants de moins de 18 ans à un travail domestique forcé ou à des travaux domestiques dangereux soient menées à leur terme et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées dans la pratique.
Article 5. Mécanismes de contrôle. Brigade de protection des mineurs. La commission note les allégations de la CSI selon lesquelles une brigade de protection des mineurs (BPM) existe en Haïti, protégeant les frontières. Cela étant dit, la CSI indique que la corruption des fonctionnaires de chaque côté de la frontière n’a pas été éradiquée et que les voies de trafic des personnes contournent les quatre postes officiels de frontières et passent par des endroits reculés, où se produisent probablement les plus graves situations d’attentat contre la vie et l’intégrité des migrants.
La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles la BPM est l’unité spécialisée de la police qui procède à l’arrestation des trafiquants qui sont par la suite traduits en justice. Cependant, le gouvernement indique que, durant les enquêtes judiciaires, les questions de procédure offrent souvent une porte de sortie aux inculpés. La commission doit exprimer sa préoccupation face à la faiblesse des mécanismes de contrôle pour empêcher le phénomène de la traite des enfants aux fins d’exploitation. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour renforcer la capacité de la BPM à contrôler et combattre la traite des enfants de moins de 18 ans et inculper les coupables. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises à cet égard et sur les résultats obtenus.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéa b). Prévoir l’aide directe nécessaire et appropriée pour soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Vente et traite. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, d’après le Rapport mondial sur la traite des personnes de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime de février 2009, il n’existe ni système de prise en charge et d’assistance bénéficiant aux personnes victimes de la traite, ni centre d’accueil pour héberger les victimes de la traite. Elle avait également noté que le CEDAW, dans ses observations finales (CEDAW/C/HTI/CO/7, 10 février 2009, paragr. 26), s’est dit préoccupé par le manque de centres d’accueil pour les femmes et les filles victimes de la traite.
La commission note les allégations de la CSI selon lesquelles il existe un système public de prise en charge et d’assistance bénéficiant aux personnes victimes de la traite. Les témoignages recueillis par la CSI relatent que des victimes se sont adressées aux forces de police, lesquelles les ont acheminées vers l’Institut du bien-être social et de recherches (IBESR), qui les place ensuite dans des centres d’accueil.
La commission note que le gouvernement indique qu’un programme pilote de protection sociale était prévu mais que le séisme du 12 janvier 2010 a bouleversé la mise en œuvre de ce programme. La commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures efficaces afin de prévoir l’aide directe nécessaire et appropriée pour soustraire les enfants victimes de la vente et de la traite et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. A cet égard, elle prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’enfants de moins de 18 ans victimes de la traite qui ont pu être placés en centres d’accueil par l’intermédiaire des forces de police et de l’IBESR.
Alinéa d). Identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec eux. Enfants restavèks. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’existence de programmes de réinsertion d’enfants restavèks, mis en place par l’IBESR de concert avec différentes organisations internationales et non gouvernementales. Elle avait noté que ces programmes privilégient la réinsertion dans le cadre familial afin de favoriser le développement psychosocial des enfants concernés. Elle avait cependant noté que, dans ses observations finales, le Comité des droits de l’enfant s’est dit profondément inquiet de la situation des enfants restavèks placés en domesticité et a notamment recommandé au gouvernement de s’attacher à titre d’urgence à faire en sorte que les restavèks se voient proposer des services de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale (CRC/C/15/Add.202, 18 mars 2003, paragr. 56-57).
La commission note les allégations de la CSI selon lesquelles elle a pris connaissance d’initiatives de réinsertion d’enfants restavèks mises en œuvre notamment avec le soutien de l’UNICEF et de l’Organisation internationale pour les migrations. La CSI, tout en saluant ces initiatives, demande au gouvernement que ces programmes continuent d’être assortis de mesures destinées à améliorer les conditions de vie des familles d’origine de ces enfants.
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle les cas de maltraitance d’enfants mineurs en domesticité sont saisis par l’IBESR, qui s’assure de les placer dans des familles aux fins de réadaptation physique et psychologique. Cependant, le gouvernement reconnaît que ces cas demeurent peu nombreux. La commission prie instamment le gouvernement de redoubler d’efforts pour assurer que les enfants restavèks bénéficient de services de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale dans le cadre des programmes de réinsertion des enfants restavèks ou par l’intermédiaire de l’IBESR. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les résultats concrets obtenus en termes de nombre d’enfants qui auront bénéficié de ces mesures.
Article 8. Coopération internationale. Vente et traite d’enfants. La commission avait précédemment noté que le ministère des Affaires sociales et du Travail, en concertation avec le ministère des Affaires étrangères, étudiait le problème des personnes exploitées en République dominicaine dans les champs de canne à sucre et des enfants réduits à la mendicité dans ce pays, et compte entreprendre des pourparlers bilatéraux en vue d’y remédier. Elle avait également observé que le CEDAW, dans ses observations finales (CEDAW/C/HTI/CO/7, 10 février 2009, paragr. 27), a encouragé le gouvernement «à effectuer des travaux de recherche sur les causes profondes de la traite et à renforcer la coopération bilatérale et multilatérale avec les pays voisins, notamment la République dominicaine, en vue de prévenir la traite et de traduire les responsables en justice».
La commission constate encore une fois que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations à cet égard. Elle prie à nouveau le gouvernement de communiquer des informations sur l’état d’avancement des pourparlers visant à l’adoption d’un accord bilatéral avec la République dominicaine, et ce dans son prochain rapport.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
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