National Legislation on Labour and Social Rights
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Informations écrites fournies par le gouvernement
Libertés publiques et droits syndicaux
1. Enquête en cours de la Commission des droits de l’homme sur un cas d’allégation de harcèlement contre plusieurs responsables syndicaux et des militants de la Confédération pour l’unité, la reconnaissance et l’avancement des fonctionnaires (COURAGE)
Dans un rapport du 19 mars 2019, la Commission des droits de l’homme de la Région capitale nationale (CHR-NCR) indique que les trois (3) cas concernant COURAGE ont reçu une solution tandis que les autres sont toujours à l’enquête. Les trois (3) cas traités par la CHR-NCR contiennent le même dispositif fondé sur la constatation que les droits à la vie privée et à la sécurité des plaignants ainsi que leur droit de recruter ont été violés. Toutefois, les cas traités se ressemblent en ce que l’identité réelle des personnes à l’origine du harcèlement n’a pu être établie par manque de preuves directes. Faute d’éléments probants reliant les suspects aux forces de l’Etat, la CHR-NCR a décidé de clore la procédure tout en maintenant la possibilité de la rouvrir si de nouvelles preuves faisaient surface.
2. Assassinats de deux dirigeants syndicaux, l’un ayant été abattu par balles devant la Commission nationale des relations du travail (NLRC) à Quezón City
Edilberto Miralles, 65 ans, président national du Syndicat des travailleurs philippins Kaisahan ng mga Drivers sa R&E (KADRE-UFW), une section locale de R&E Transport, est décédé, abattu par des agresseurs non identifiés qui circulaient à moto le 23 septembre 2016 devant l’immeuble de la NLRC à Quezón City. Le groupe de lutte contre la cybercriminalité de la police nationale philippine (PNP) a publié un agrandissement effectué par la police scientifique des images prises par des caméras de surveillance de la scène du crime. Il s’avère toutefois que les suspects n’ont pu être identifiés clairement parce qu’ils portaient une cagoule, une casquette et un casque, respectivement.
Le 12 avril 2019, l’enquêteur en charge du cas, le PSSg Jerome Dollente, s’est rendu sur le lieu de l’incident pour procéder aux constatations visuelles mais, suivant son rapport, personne n’a pu lui fournir des informations pertinentes sur cet incident. Quoi qu’il en soit, la Direction de la gestion des enquêtes et des détectives de la police nationale (PNP-DIDM) a chargé les services de police de la Région capitale nationale de réexaminer l’affaire pour une éventuelle identification des suspects et de poursuivre l’enquête afin de trouver des témoins et d’identifier les suspects.
A la réunion de l’Organe tripartite régional de surveillance de la Région capitale nationale (RTMB-NCR) du 9 mai 2019, le représentant de la police nationale a indiqué que l’enquête est toujours en cours et qu’ils se sont d’abord concentrés sur son aspect technique (c’est-à-dire l’examen balistique). Il a aussi été précisé que les résultats de l’examen balistique et de correspondance de la pièce récupérée, une (1) douille de calibre 45, ne sont pas encore disponibles.
Orlando Abangan, 35 ans, ancien recruteur du Partido ng Manggagawa, a été tué le 17 septembre 2016 au Sitio Lawis, Brgy. Maghaway, Talisay City, à Cebu. Un rapport de la PNP-DIDM communiqué le 3 avril 2019 indique que le bureau régional de police no 7 a été chargé par le siège de la police nationale de rouvrir l’affaire avant un éventuel classement, afin de convaincre les parents de témoins mineurs et les proches de la victime de témoigner, et de procéder à une enquête approfondie ou à un profilage du suspect Julian Bonghanoy Jr. Par ailleurs, ce cas a été enregistré à la Région VII de la Commission des droits de l’homme (CHR-VII) sous le numéro CHR-VII-2016-0784 (CEB) pour violation du droit à la vie. Dans sa décision, la CHR-VII déclare que l’enquête a révélé que l’assassinat d’Orlando Abangan n’est pas lié à sa qualité de dirigeant ouvrier mais est le résultat d’une rancune personnelle. Il a été découvert que la victime avait suscité le courroux de Julian Bonghanoy Jr, un particulier, en portant continuellement une cagoule en passant à proximité du point de contrôle de ce dernier en septembre 2016.
Nous ne disposons pas de suffisamment de preuves pour conclure que le décès d’Orlando Abangan constitue un assassinat extrajudiciaire au titre des critères de l’ordonnance AO35. De même, rien ne prouve que cet assassinat soit lié à la drogue. En conséquence, la CHR-VII a conclu que cet assassinat ne relève pas de la compétence de la Commission des droits de l’homme (CHR), car il s’agit d’un crime ordinaire relevant d’une enquête pénale de la police. Pour l’essentiel, la CHR-VII recommande de clore l’instruction de l’affaire au niveau de la CHR et de fournir une assistance aux forces de l’ordre afin d’identifier les assassins d’Orlando Abangan et de les traduire en justice.
Sur les 70 cas répertoriés et suivis par le Conseil tripartite national pour la paix sociale – Organe de surveillance à travers ses structures régionales, 50 se sont produits pendant les 9 années du gouvernement Arroyo et 18 à l’époque du gouvernement Aquino. Les deux (2) nouveaux cas d’assassinats extrajudiciaires d’Edilberto Miralles et d’Orlando Abangan sont survenus pendant le mandat du gouvernement actuel.
[Graphique non inclus]
La nette diminution du nombre des assassinats extrajudiciaires signalés est attribuée aux précieux efforts de renforcement du partenariat entre les partenaires sociaux et en leur sein. Le partenariat social et les efforts de collaboration ont bien progressé depuis la mission de haut niveau de 2009. Le gouvernement, en collaboration avec nos partenaires sociaux, affiche une détermination inébranlable à promouvoir et protéger les droits fondamentaux garantis par la Constitution aux travailleurs ainsi que leur bien-être, et tous ses efforts sont inlassablement axés sur une application renforcée et améliorée des normes fondamentales du travail.
3. La crainte exprimée par la CSI que la guerre qu’ont récemment déclarée les forces armées des Philippines (AFP) contre ceux qu’elles appellent les «rouges» fasse revivre les années pendant lesquelles les syndicalistes et recruteurs étaient harcelés, arrêtés, emprisonnés, enlevés et assassinés après avoir été traités de «rouges» par les militaires
Dans notre précédente réponse au Centre international pour les droits syndicaux (ICTUR), nous soulignions que, à la réunion de l’Organe tripartite régional de surveillance (RTMB) du ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) du 12 mars 2018, les informations rassemblées par les représentants du Bureau des droits de l’homme des forces armées philippines (AFP-HRO) ont révélé que les activités menées dans la Compostela Valley, à Mindanao, étaient en fait des descentes dans les barangays effectuées dans le cadre du Programme de soutien aux communautés (CSP). Ce CSP est un concept opérationnel axé sur les barangays et répondant à des problèmes particuliers, utilisé dans des zones de conflit et des zones propices au conflit. Il s’agit d’une initiative de paix et de développement faisant intervenir plusieurs parties prenantes, basée sur la communauté et axée sur l’individu, ayant pour but de rendre les communautés résilientes aux conflits, les développer et les protéger.
Les descentes effectuées dans le cadre du CSP l’ont été par les forces armées en tant que facilitateurs extérieurs, avec des officiels des barangays et d’autres organismes gouvernementaux, afin de déterminer les disparités dans les besoins des barangays (comme les services de santé et d’éducation). En outre, l’AFP-HRO a précisé que les syndicalistes ne font pas l’objet de discrimination et ne sont pas visés par ces opérations puisque tous les habitants étaient visés par ces descentes.
En outre, dans plusieurs communications, le DOLE a appelé les forces armées et la police nationale à faire respecter les Lignes de conduite des DOLE, DILG, DND, DOJ, AFP et PNP par rapport à l’exercice par les travailleurs de leurs droits et activités, qui ont été élaborées et signées par les représentants et les directeurs des agences gouvernementales concernées, ainsi que par les représentants des travailleurs et des employeurs. Cela a été fait pour s’assurer que la conduite des opérations sur le terrain se fait dans le respect de ces lignes de conduite.
Publiées le 7 mai 2012, ces lignes de conduite ont pour but de garantir l’exercice effectif des droits syndicaux et de prévenir les violations des droits des travailleurs dans un climat exempt de violence, de pression, de crainte et de contrainte de quelque sorte que ce soit, de la part de toute organisation, et d’apporter une solution aux problèmes de violence et d’impunité résultant de l’intervention des forces de sécurité et de maintien de l’ordre, en particulier l’armée, la police, les cadres locaux et le personnel de sécurité des entreprises pendant l’exercice des droits des travailleurs.
Les lignes de conduite affirment de manière explicite que les conflits du travail relèvent au premier chef de la seule compétence du DOLE et/ou de ses institutions spécialisées. Les membres des forces armées, de la police et d’autres organes chargés de l’application des lois, y compris la police de proximité et les vigiles et agents de sécurité des entreprises ne peuvent intervenir dans les conflits du travail.
Ces lignes de conduite stipulent aussi que les forces armées ne peuvent intervenir que dans les cas suivants:
a) lorsqu’elles sont expressément requises par écrit, que ce soit par courrier, courriel, fax ou tout moyen similaire par le DOLE, par l’intermédiaire de ses bureaux régionaux; ou
b) lorsqu’un délit pénal a été ou est commis ou est sur le point d’être commis par des actes manifestes tels que prévus à l’article 113 des Procédures pénales révisées, qu’ils soient ou non le résultat d’un conflit du travail; ou
c) en cas de violence effective résultant d’un conflit du travail.
Aux termes des lignes de conduite, la «violence effective consiste en un recours persistant et intentionnel à la force ou la puissance physique contre soi-même, une autre personne ou contre un groupe ou une communauté, qui peut provoquer ou est hautement susceptible de provoquer une lésion, un décès ou des dégâts ou la destruction de biens».
Les lignes de conduite disposent en outre que le personnel ou les unités des forces armées doivent éviter de taxer/étiqueter/stigmatiser des personnalités ou des organisations à moins que cette attitude repose sur des informations exactes, vérifiées, validées et confirmées et/ou des preuves matérielles.
En conséquence, l’AFP-HRO a publié à l’intention de toutes les unités de la 10e division d’infanterie (10ID) des directives traitant du Code du travail et des droits des travailleurs. De même, la 10ID a distribué ces directives à tout l’effectif, le personnel des forces armées devant s’en inspirer dans ses rapports avec les organisations syndicales.
Dans le cadre de l’engagement pris par les forces armées et par la police nationale d’intégrer le Code du travail et les lignes de conduite dans leurs programmes de formation, deux (2) activités ont déjà été menées avec le bureau régional XI du DOLE et l’antenne de la Compostela Valley du DOLE:
a) Discours/orientation sur le Code du travail, les droits syndicaux et autres thèmes connexes concernant l’emploi, au quartier-général de la 10ID, Brgy. Tuboran, Mawab, Compostela Valley Province, le 1er février 2019, avec 97 participants des forces armées et des unités 11 et 12 de la police nationale.
b) Discours/orientation sur la liberté d’association et le syndicalisme à la salle Datu Dalunto du quartier général de la 10ID, Brgy. Tuboran , Mawab, Compostela Valley Province, le 7 mai 2019, avec des participants des unités 11 et 12 de la police nationale, des commandants en second de brigades d’infanterie, des officiers, commandants et S3 du 10CMOBn, de la division TRIAD et ADC, de la 10ID.
4. Progrès accomplis par les équipes tripartites de validation, le NTIPC-MB et d’autres organes compétents pour assurer la collecte des informations nécessaires afin de traduire les cas de violence en suspens devant les tribunaux, et résultats obtenus à cet égard
Bien qu’aient été approuvés le financement et la nomination des représentants des travailleurs et des employeurs qui composeront lesdites équipes tripartites de validation, cette initiative doit encore décoller compte tenu des risques que courent en particulier leurs membres pour leur sécurité pendant leurs activités. Les représentants sectoriels désignés ont reconsidéré la gravité des fonctions et les dangers qui entourent la conduite d’interviews sur le terrain, d’enquêtes et la collecte d’informations de première main.
Quoi qu’il en soit, avec la publication de l’ordonnance administrative no 32 de 2018, déjà mentionnée, sur les directives opérationnelles de la RTMB, la création d’équipes tripartites de validation a été une nouvelle fois institutionnalisée et renforcée. Les préoccupations des membres en matière de sécurité ont elles aussi été prises en compte; ainsi, les équipes tripartites de validation peuvent demander la protection de la police nationale et des forces armées si elles le jugent nécessaire.
En outre, le gouvernement réitère strictement que les cas progressent dans le cadre de procédures pénales régulières, grâce aux efforts constants des partenaires tripartites. La disponibilité des comptes rendus est largement fonction des enquêtes menées par la police et des procédures devant les tribunaux, dont l’avancement peut être affecté par l’absence de témoins matériels. En collaboration avec les partenaires sociaux, le gouvernement continue de suivre et d’accélérer toutes les procédures, dans le respect des droits constitutionnels à un procès rapide et une procédure régulière. L’importance de ces efforts est démontrée par tous les rapports précédents et toutes les réponses que le gouvernement a fournies aux requêtes d’organisations à la fois nationales et internationales.
5. Réformes destinées à assurer une protection suffisante des témoins et à renforcer les capacités du ministère public, des organes chargés de l’application des lois et d’autres acteurs concernés, en particulier dans le domaine de la médecine légale
Le projet de coopération au développement DOLE-BIT-UE-SPG+ prévoit des activités et des initiatives visant à renforcer les connaissances et les capacités des acteurs publics concernés, à savoir la police, l’armée et les cadres locaux, ainsi que des partenaires sociaux quant aux principes et à l’application des conventions nos 87 et 98.
Du 14 au 16 novembre 2018 s’est tenue au Quest Hotel de Clark, à Pampanga, une formation multisectorielle des instructeurs sur le thème de la liberté syndicale et la négociation collective. Cette activité, à laquelle ont participé 32 représentants de différents organes gouvernementaux (soit l’Autorité des zones économiques des Philippines, le ministère de l’Intérieur et de l’Administration locale, le ministère de la Défense nationale, le ministère de la Justice, les forces armées des Philippines, la police nationale des Philippines et la Commission des droits de l’homme), du monde syndical et du secteur de la gestion, visait à inculquer aux diverses parties prenantes et aux partenaires sociaux une compréhension et une interprétation communes des normes internationales du travail, en particulier pour ce qui touche à la liberté syndicale et à la négociation collective, ainsi que des rôles, des fonctions et des mécanismes à observer lors de l’exercice des droits des travailleurs et de leurs activités (c’est-à-dire les Directives communes DOLE-PNP-PEZA pour la conduite du personnel de la police nationale, de la police et des agents de sécurité des zones économiques, des agents de sécurité des entreprises et du personnel assimilé pendant les conflits du travail; et les Lignes de conduite des DOLE, DILG, DND, DOJ, AFP et PNP s’agissant de l’exercice des droits des travailleurs et de leurs activités).
Les partenaires sociaux et parties prenantes ainsi formés peuvent maintenant être mis à contribution en tant que personnes-ressource et promoteurs de la liberté syndicale et de la négociation collective et prononcer des allocutions et/ou organiser des séances didactiques, en particulier sur les directives en vigueur régissant le comportement des divers partenaires sociaux et parties prenantes pendant des conflits du travail vis-à-vis des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective, tel qu’il peut s’appliquer dans leurs organisations respectives.
En parallèle ont été élaborés des outils spécifiques à un secteur particulier, tels que: a) un «Manuel de formation des travailleurs sur la liberté syndicale», supposé renforcer la capacité des représentants des travailleurs à participer aux mécanismes de contrôle existants des violations des libertés civiles des travailleurs et des droits syndicaux et du droit d’organisation; et b) un «Diagnostic du respect des normes du travail: Liste de contrôle pour les petites entreprises», qui est un outil permettant aux employeurs de diagnostiquer le niveau de respect des normes du travail dans les petites entreprises et de disposer de solutions concrètes pour remédier aux carences.
Par ailleurs, le DILG, secondé par l’Académie de l’administration locale, collabore maintenant avec le bureau de pays de LO et le DOLE pour examiner les possibilités d’incorporer les normes internationales du travail, en particulier la liberté syndicale et la négociation collective, et les lignes de conduite dans les orientations et/ou formations régulières des cadres locaux. La Commission des droits de l’homme (CHR), aidée par un consultant engagé par le bureau de pays de l’OIT, a élaboré son propre module de formation sur la liberté syndicale, auquel elle met actuellement la dernière main.
Outre ces outils et modules propres à un département ou un secteur, un module d’apprentissage en ligne sur la liberté syndicale est en voie d’achèvement dans le cadre des services d’éducation au travail et à l’emploi (LEES) du DOLE. Constitué à partir de documents et matériels existants élaborés pour de précédentes initiatives sur la liberté syndicale et la négociation collective, le module d’apprentissage en ligne aborde les thèmes suivants:
- Normes internationales du travail et droits au travail
- Normes internationales du travail
- Principes de l’OIT relatifs à la liberté syndicale et à la négociation collective
- Le contexte philippin: Le droit à l’auto-organisation
- Organes tripartites de surveillance sur l’application des normes internationales du travail et autres mécanismes d’investigation et de surveillance connexes
- Lignes de conduite par rapport à l’exercice des droits des travailleurs, en particulier le droit à la liberté syndicale et à la négociation collective
Les lignes de conduite à observer pendant l’exercice des droits et activités des travailleurs sont aussi en cours d’examen à des fins d’amendement et/ou de mise à jour.
6. Etat d’avancement des cas de Rolando Pango, Florencio «Bong» Romano et Victoriano Embang
S’agissant du cas de Rolando Pango, la Direction de la gestion des enquêtes et des détectives de la police nationale (PNP-DIDM) conclut que cet incident porte sur un conflit agraire. Il n’y avait pas de campagnes syndicales, de rassemblements, de piquets ou de manifestations au moment de cet incident. Quoi qu’il en soit, la PNP-DIDM a chargé le bureau régional no 6 de la police de réexaminer le cas en vue d’une possible réouverture.
S’agissant de Florencio «Bong» Romano, une équipe de suivi s’est rendue à la maison de Benny Dimailig, à Brgy. Lodlod, Lipa City, pour procéder à un interrogatoire, mais elle n’a pu recueillir des informations sur l’incident. La PNP-DIDM a chargé le bureau régional no 4A de la police de réexaminer l’affaire, en vue d’une possible identification de suspects et d’une réouverture du dossier et de mieux se consacrer à l’enquête pour trouver des témoins. Le comité institué par l’AO35 doit encore délibérer sur le cas Romano compte tenu du fait qu’il ne s’est toujours pas réuni. Le déblocage des recours de la famille auprès des SSS a déjà été facilité par le RTMB de la région 4A.
S’agissant du cas de Victoriano Embang, sur base de l’enquête précédente et grâce à la collaboration de certaines témoins et aux résultats d’examens des éléments de preuve récupérés, une procédure pour MEURTRE a été ouverte contre les suspects Ramoncito Isona, alias «Ramon», et Ryan Yana, alias «Ryan» et enregistrée sous la référence 4480, sans recommandation de libération sous caution. En outre, un mandat d’arrestation a été délivré. Le Groupe d’enquête criminelle et de détection (CIDG) a été chargé de mettre sur pied une équipe de traqueurs pour l’opération de chasse à l’homme contre les suspects en liberté et pour la coordination avec le BID s’agissant de la liste de vigilance et de la liste des personnes recherchées.
Comme il a été dit précédemment, le gouvernement répète ici que tous les cas précités sont actuellement traités et font l’objet d’une enquête dans le cadre d’une procédure ordinaire d’instruction et de procédure pénales. De ce fait, la disponibilité des comptes rendus est largement fonction des enquêtes menées par la police et des procédures devant les tribunaux, dont l’avancement peut être affecté par une série d’éléments tels que l’absence de témoins matériels.
Le fardeau de la preuve nécessaire pour étayer une condamnation dans une procédure pénale est la preuve irréfragable. Ainsi, les poursuites pénales dépendent pour une large part de la démonstration au-delà du doute raisonnable de l’existence des éléments du délit incriminé. La preuve doit être administrée pour étayer la procédure pénale et la condamnation, comme l’exige le précepte constitutionnel de la régularité de la procédure.
7. Evolution du programme législatif
En coordination avec ses partenaires sociaux, le gouvernement n’a cessé d’œuvrer pour faire face aux problèmes économiques, sociaux et du travail émergents qui affectent le respect des droits des travailleurs, à mesure qu’évoluent les formes de relations de travail avec la mondialisation et la libéralisation des échanges. Les initiatives du gouvernement visant à promouvoir la liberté syndicale et la négociation collective ont essentiellement pour objectif de sécuriser et régler les problèmes qu’entraînent les formes atypiques d’emploi croissantes et le grand nombre de travailleurs ayant un emploi en dehors d’une relation d’emploi classique.
La relation d’emploi classique est définie par: a) le travail à plein temps; b) un contrat de travail à durée indéterminée; c) un seul employeur; et d) la protection contre le licenciement injustifié. Ainsi, le travail peut être qualifié de précaire lorsqu’il existe un ou plusieurs des éléments suivants: a) travail non garanti/non précisé/horaires irréguliers; b) contrat à durée déterminée; c) employeurs multiples ou déguisés; et d) absence de protection contre le licenciement. Le travail précaire signifie qu’il n’y a pas de stabilité ni de sécurité sur le lieu de travail.
C’est pourquoi de nombreuses réformes ont été initiées à la lumière du principe selon lequel «la sécurité de l’emploi est l’environnement le plus favorable à la liberté syndicale».
Les initiatives et les formes décrites ci-après résultent d’efforts tripartites – travailleurs, employeurs et gouvernement – et visent à la réalisation et la pérennité du travail décent et de la paix sociale, sur la base des principes de croissance inclusive et de justice sociale.
a) Projet de loi sur la sécurité de l’emploi. Le projet de loi sur la sécurité de l’emploi a été approuvé par la Chambre des représentants le 29 janvier 2018 et a été transmis au Sénat le 31 janvier 2018. Le 21 septembre 2018, le Président des Philippines a déclaré l’urgence du projet de loi, et celui-ci est en passe d’être adopté, après avoir été adopté en troisième lecture au Sénat le 22 mai 2019. Le projet de loi doit maintenant être examiné par la Chambre des représentants et le Sénat. Il conviendrait de noter que les dispositions de ce projet de loi vont dans le sens de l’orientation de l’ordonnance gouvernementale no 51, et qu’il fait partie des mesures prioritaires du Conseil consultatif sur la coopération entre les pouvoirs législatif et exécutif (LEDAC), puisque son adoption devrait avoir une incidence positive sur l’exercice des droits des travailleurs, en particulier la liberté syndicale et la négociation collective.
b) Ordonnance gouvernementale no 51, séries de 2018. Le 1er mai 2018, le Président a signé l’ordonnance gouvernementale no 51, séries de 2018, portant application de l’article 106 du Code du travail des Philippines, tel qu’amendé, en vue de protéger le droit à la sécurité de l’emploi de tous les travailleurs, sur la base de la justice sociale prévue par la Constitution philippine de 1987. L’ordonnance gouvernementale no 51 indique expressément qu’il est interdit de recourir à des entreprises contractantes ou sous-traitantes, dans le but de contourner le droit des travailleurs à la sécurité de l’emploi, à l’auto-organisation et à la négociation collective, et à des activités pacifiques concertées, conformément à la Constitution philippine de 1987.
L’ordonnance gouvernementale dispose également que le Secrétaire au travail et à l’emploi peut, en consultation avec le Conseil tripartite pour la paix sociale, en vertu de l’article 290(c) du Code du travail, tel qu’amendé, déterminer les activités susceptibles d’être sous-traitées.
c) Ordonnance ministérielle no 174, séries de 2017, du DOLE. Le 16 mars 2017, le DOLE a promulgué l’ordonnance ministérielle no 174, séries de 2017, portant sur la nouvelle réglementation d’application des dispositions du Code du travail régissant le recours à des contractants ou des sous-traitants aux Philippines. Elle a été publiée le 18 mars 2017 et est entrée en vigueur le 3 avril 2017.
L’ordonnance ministérielle no 174-17 est le fruit de consultations sectorielles complètes et inclusives menées dans tous les secteurs (formel, informel, public, migrants, femmes et jeunes). Cinq groupes de discussion (5) ont été formés, trois (3) sommets sectoriels sur le travail ont été organisés, ainsi que 17 réunions sectorielles. De même, cette ordonnance a été examinée par le Conseil national tripartite pour la paix sociale qui s’est réuni le 7 mars 2017.
Grâce à un engagement continu et des consultations intensives actuellement menées avec les secteurs concernés, des politiques et des mesures adaptées sont élaborées dans le but de garantir le plein respect des normes du travail et des principes et droits fondamentaux au travail, compte étant tenu de la prédominance de modalités de travail à court terme ou de durée déterminée qui mettent à mal le droit des travailleurs à la sécurité de l’emploi. Les véritables réformes que le gouvernement met actuellement en place en matière de flexibilité et de sécurité de l’emploi favorisent un environnement dans lequel les travailleurs peuvent exercer sans entrave leur droit à la liberté syndicale et à la négociation collective.
Etat d’avancement des mesures législatives proposées pour garantir que tout individu résidant sur le territoire d’un Etat, qu’il ait ou non un permis de séjour ou de travail, jouisse des droits syndicaux inscrits dans la convention
La proposition de loi no 4448, intitulée «loi autorisant les étrangers à exercer leur droit à l’auto-organisation et portant abrogation de la réglementation de l’aide étrangère aux syndicats et modification du décret présidentiel spécial no 442, tel qu’amendé, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée à la 17e session du Congrès, le 16 novembre 2016. Cette proposition: a) étend le droit à l’auto-organisation aux étrangers résidant aux Philippines; et b) supprime l’interdiction faite aux organisations syndicales de se livrer à des activités syndicales et réglemente l’aide étrangère aux syndicats philippins.
La proposition de loi no 1354 intitulée «loi permettant à des ressortissants étrangers ou des organisations étrangères de se livrer à des activités syndicales et de fournir une assistance à des organisations ou des groupes de travailleurs, amendant à cet effet les articles 269 et 270 du décret présidentiel no 442, tel qu’amendé, dénommé également le Code du travail des Philippines» a été présenté le 11 juillet 2016. Cette proposition de loi propose d’amender le Code du travail en: a) permettant aux ressortissants étrangers et aux organisations étrangères de se livrer à des activités syndicales aux Philippines; et b) permettant d’étendre l’aide étrangère à des organisations et des groupes de travailleurs.
La 17e session du Congrès étant close, ces propositions de loi devraient être présentées à nouveau à la 18e session du Congrès.
Mesures prises pour veiller à ce que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, aient le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations
La proposition de loi no 8767 intitulée «loi visant à renforcer les droits constitutionnels des fonctionnaires à l’auto-organisation, à la négociation collective et aux activités pacifiques concertées et à l’utilisation de modes volontaires de règlement des litiges» a été présentée le 11 décembre 2018. Elle se trouve devant la Commission de réglementation professionnelle et de la fonction publique depuis le 12 décembre 2018. L’objectif de ce texte est de combler les lacunes dans les relations de travail du secteur public, en particulier en ce qui concerne la protection du droit d’organisation, les facilités accordées aux organisations d’agents de la fonction publique, les procédures visant à déterminer les conditions d’emploi, les droits civils et politiques, et le règlement des conflits liés à la détermination des conditions d’emploi. Ce projet de loi dispose que tous les agents de la fonction publique, y compris ceux travaillant sous d’autres modalités de travail dans le service public, comme l’emploi sur commande, sous contrat de services, selon un protocole d’accord ou l’emploi occasionnel, ont le droit de s’affilier ou d’apporter une aide à une organisation de travailleurs au sein de l’unité organisationnelle.
Les propositions de lois nos 4553 et 5477 intitulées «lois visant à instituer un Code de la fonction publique des Philippines et à d’autres fins» sont en instance devant la Commission de la chambre sur la réglementation professionnelle et la fonction publique. Par ailleurs, la proposition sénatoriale no 641 intitulée «loi visant à instituer le Code de réforme de la fonction publique et à d’autres fins» est en instance devant la Commission du Sénat sur la fonction publique, la réorganisation des structures gouvernementales et la réglementation professionnelle. L’objectif de ces projets de loi est de codifier toutes les lois et les décrets d’application réglementant la fonction publique, sous forme de statut unique et complet, et de régler les questions connexes concernant, entre autres, le droit des agents de la fonction publique à l’auto-organisation et à la sécurité de l’emploi.
Etat d’avancement des mesures législatives proposées pour réduire le nombre minimum de membres requis pour l’enregistrement d’un syndicat ou abaisser le seuil beaucoup trop élevé pour enregistrer un syndicat
La proposition de loi no 1355 intitulée «loi visant à réduire le nombre minimum de membres requis pour l’enregistrement d’un syndicat ou d’une fédération et à rationaliser les procédures d’enregistrement, amendant à cet effet les articles 234, 235, 236 et 237 du décret présidentiel no 442, tel qu’amendé, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée le 11 juillet 2016. L’objectif de cette proposition de loi est de modifier les restrictions imposées au processus de formation des syndicats, en introduisant des amendements au Code du travail, comme suit: a) diminution de 20 à 10 pour cent du nombre minimum de membres requis; b) réduction de dix (10) à cinq (5) du nombre de sections locales affiliées requis pour l’enregistrement d’une fédération; et c) mise en place d’un système d’enregistrement en ligne des syndicats.
La proposition de loi no 4446 intitulée «loi portant création d’un système efficient pour renforcer les droits des travailleurs à l’auto-organisation et à la négociation collective, amendant à cet effet le décret présidentiel no 442, tel que modifié, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée le 16 novembre 2016. L’objectif de cette proposition de loi est de: a) supprimer l’obligation d’enregistrement des sections locales, sur la base du principe selon lequel l’enregistrement d’un syndicat relève uniquement du ministère du DOLE; b) promouvoir «le libre choix du salarié» en permettant aux travailleurs de créer un syndicat ou de s’y affilier plus facilement par le biais d’une «souscription majoritaire»; c) renforcer l’application par ordonnance de mesures provisionnelles pour instaurer un équilibre entre la direction et les salariés, en permettant à ces derniers d’accéder de la même manière à ces mesures, et l’imposition d’une amende et d’une responsabilité pénale aux employeurs accusés de pratiques déloyales; et d) prévenir l’intervention de la direction et refuser la négociation sous la forme de «la médiation et l’arbitrage pour un premier contrat».
La proposition de loi sénatoriale no 1169 intitulée «loi sur le renforcement des droits des travailleurs à l’auto-organisation, amendant à cet effet les articles 240[234](C), 242[235], 243[236], 244[237] et 285[270] du décret présidentiel no 442, dénommé aussi le Code du travail des Philippines», tel qu’amendé, a été présentée le 22 septembre 2016. L’objectif de cette proposition de loi est de diminuer de 20 à 5 pour cent le nombre minimum de membres requis pour l’enregistrement des syndicats indépendants, et de 10 à 5 le nombre requis d’unités de négociation collective/sections locales dûment reconnues pour pouvoir constituer des fédérations. L’objectif est également d’institutionnaliser l’enregistrement en ligne, la décentralisation ou le processus d’enregistrement aux antennes provinciales et locales du DOLE et le processus d’enregistrement en une journée. Le projet de loi vise aussi à supprimer «l’autorisation préalable» requise pour l’aide étrangère aux activités syndicales locales.
Etat d’avancement des mesures législatives proposées pour garantir que l’intervention du gouvernement menant à un arbitrage obligatoire se limite aux services essentiels au sens strict du terme
Les propositions de loi nos 175, 711 et 1908, intitulées «lois visant à rationaliser les interventions des pouvoirs publics dans les conflits du travail, en adoptant des critères définissant les services essentiels dans le contexte de la saisine par le secrétaire au Travail et à l’Emploi, et en dépénalisant les infractions qui s’y attachent, amendant à cet effet les articles 263, 264 et 272 du décret présidentiel no 442, dénommé aussi le Code du travail des Philippines», tel que modifié, ont été présentées le 30 juin 2016. Comme l’indique le titre, ces propositions de loi ont pour objectif de rationaliser les interventions des pouvoirs publics dans les conflits du travail en adoptant des critères définissant les services essentiels dans le contexte de la saisine par le secrétaire au Travail et à l’Emploi, arrêtant les conditions de leur exercice, et en dépénalisant les infractions qui s’y attachent. Le pendant de ces propositions de loi au Sénat est la proposition de loi sénatoriale no 1221 intitulée «loi visant à rationaliser les interventions des pouvoirs publics dans les conflits du travail, en adoptant des critères définissant les services essentiels dans le contexte de la saisine par le secrétaire au Travail et à l’Emploi, et en dépénalisant les infractions qui s’y attachent, amendant à cet effet les articles 278[263], 279[264] et 287[272] du décret présidentiel no 442, dénommé aussi le Code du travail des Philippines, tel que modifié, qui a été présentée le 25 octobre 2016.
La proposition de loi no 4447 intitulée «loi sur le renforcement du droit des travailleurs à la grève, amendant à cet effet le décret présidentiel no 442, tel que modifié, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée le 16 novembre 2016. L’objectif de ce texte de loi est de modifier les sanctions pour non-respect des ordres, interdictions ou injonctions émanant du secrétaire au Travail, et pour la participation directe à une grève illégale, allant du renvoi ou de l’emprisonnement à des mesures disciplinaires sous forme d’amende.
Etat d’avancement des mesures législatives proposées pour garantir qu’aucune sanction pénale ne peut être imposée à un travailleur pour avoir participé à une action de grève pacifique, même si les exigences en matière de négociation ou de préavis n’ont pas été respectées
Cette question est aussi couverte par les mesures susmentionnées, à savoir les propositions de loi sénatoriales nos 175, 711, 1908 et 4447. La 17e session du Congrès étant close, ces propositions de loi devraient être présentées à nouveau à la 18e session du Congrès.
Etat d’avancement des amendements législatifs proposés pour supprimer l’autorisation du gouvernement requise pour l’aide étrangère aux syndicats
La proposition de loi sénatoriale no 4448 intitulée «loi permettant à des ressortissants étrangers d’exercer leur droit à l’auto-organisation et de supprimer la réglementation de l’aide étrangère à des syndicats, amendant à cet effet le décret présidentiel no 442, tel que modifié, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée le 16 novembre 2016. L’objectif de cette proposition de loi est de: a) étendre le droit à l’auto-organisation aux ressortissants étrangers résidant aux Philippines; et b) supprimer l’interdiction faite aux organisations syndicales étrangères de se livrer à des activités syndicales et la réglementation de l’aide étrangère aux syndicats philippins.
La proposition de loi no 1354 intitulée «loi permettant aux ressortissants étrangers ou aux organisations étrangères de se livrer à des activités syndicales et de fournir une aide à des organisations ou des groupes de travailleurs, amendant à cet effet les articles 269 et 270 du décret présidentiel no 442, tel que modifié, dénommé aussi le Code du travail des Philippines» a été présentée le 11 juillet 2016. L’objectif de cette proposition de loi est d’amender le Code du travail pour: a) permettre aux ressortissants étrangers et aux organisations étrangères de se livrer à des activités syndicales aux Philippines; et b) étendre l’aide étrangère à des organisations et des groupes de travailleurs.
8. Examen et état d’avancement des directives opérationnelles des organismes d’enquête et de contrôle pour renforcer et améliorer encore leur fonctionnement, ainsi que leur coordination et leur interaction
Il a précédemment été fait état du projet de coopération pour le développement élaboré par le DOLE, le BIT et l’Union européenne, par l’intermédiaire de son système de préférences généralisées (SPG+) qui vise à donner plus de moyens aux travailleurs, aux employeurs et aux gouvernements pour mieux appliquer les principes relatifs au droit à la liberté syndicale et la négociation collective. L’une des réalisations concrètes du projet consiste en l’examen des mécanismes en place pour lutter contre les violations des libertés civiles des travailleurs et des droits syndicaux. L’étude porte sur les directives opérationnelles et les structures/procédures des trois mécanismes d’enquête, de poursuite et/ou de contrôle chargés de lutter contre les violations des principes de liberté syndicale aux Philippines – NTIPC dirigée par le DOLE – organe de contrôle et organes de contrôle tripartites régionaux (RTMB); commission interinstitutions A035 relevant du DOJ; mécanismes nationaux de contrôle relevant du CHR.
Après avoir examiné les politiques et les directives en place, recueilli les points de vue des principales personnes intéressées (à savoir, membres des syndicats des secteurs publics et privés, points focaux dans les institutions/organisations concernées, etc.), les lacunes et les problèmes rencontrés dans le fonctionnement de ces mécanismes ont été définis, ainsi que les domaines problématiques identifiés par les entités d’enquête, comme la PNP, la CHR et, dans une certaine mesure, l’AFP-HRO. Des recommandations ont ensuite été formulées pour permettre de combler les lacunes ou éliminer les obstacles et faire progresser de manière importante les cas liés au travail qui concernent des exécutions extrajudiciaires ou des violations des conventions nos 87 et 98 de l’OIT, en tenant compte des conclusions et des recommandations formulées par la mission de contacts directs du BIT qui s’est rendue aux Philippines en 2017. Ces recommandations seront prises en compte par les institutions/organisations concernées, pour examen et mise en œuvre éventuelle.
Discussion par la commission
Représentant gouvernemental – Cette invitation est une excellente occasion de rendre compte à la commission de ce que notre pays a accompli dernièrement, ce que nous accomplissons actuellement, et ce que nous comptons faire dans un avenir proche afin de faire progresser encore la liberté syndicale aux Philippines.
Suite aux recommandations de la mission de contacts directs de 2017, le gouvernement philippin et ses partenaires sociaux ont adopté le Plan d’action national sur la liberté syndicale et la négociation collective, avec le soutien du Schéma de préférences tarifaires généralisées du bureau de l’OIT de Manille et de l’Union européenne (GSP+). Nous croyons que l’environnement le plus favorable pour assurer pleinement et librement l’exercice de la liberté syndicale est la garantie d’un emploi dans des conditions de travail sûres et salubres, tous les lieux de travail étant à l’abri de toute violence et de tout harcèlement. Le rapport de 2019 des travailleurs et des syndicats des Philippines sur les objectifs de développement durable va même jusqu’à noter que la contractualisation et l’informalisation intenses du travail formel sont l’une des causes du déclin des syndicats. Ce système est un frein au respect des droits inhérents des travailleurs à la liberté syndicale et à la négociation collective. L’insécurité du travail due au manque de respect des normes du travail, à des conditions de travail dangereuses et à une protection sociale insuffisante est une grave menace qui plane sur la liberté syndicale.
Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement des Philippines a intensifié ses inspections depuis 2016. L’inspection porte déjà sur des questions impliquant des syndicats et des conventions collectives et, encore plus important, la question sur la sécurité de l’emploi. De 2016 à 2018, nous avons inspecté plus de 180 000 établissements couvrant plus de 12 millions de travailleurs, ces inspections ayant donné lieu à la régularisation de plus de 400 000 travailleurs. Cette inspection plus intensive a permis de créer un plus grand espace démocratique de liberté syndicale, ce qui n’avait jamais été fait auparavant. Le gouvernement des Philippines compte, depuis décembre 2018, 136 inspecteurs du travail supplémentaires, et encore 500 de plus cette année. Tous les inspecteurs sont formés et reçoivent l’aide du bureau de l’OIT à Manille, ainsi que du Département du travail des Etats-Unis. Dans l’esprit de dialogue social et d’engagement tripartite, le gouvernement philippin a établi la liste des représentants des syndicats et des employeurs et les a mandatés pour remplir le rôle d’inspecteurs du travail. Ils peuvent désormais accompagner les inspecteurs du travail dans l’inspection des établissements. En janvier 2019, nous comptions 241 partenaires sociaux mandatés.
L’an dernier, notre Président a promulgué le décret no 51, qui définit la politique sous-jacente de l’actuel gouvernement en traitant la question de la sécurité de l’emploi, laquelle est, à notre avis, un élément indispensable de la liberté syndicale. Cependant, pour assurer pleinement et librement l’exercice de ce droit, et compte tenu des limites inhérentes imposées au pouvoir exécutif dans une démocratie, cette politique doit être suivie par le biais de la législation. A ce sujet, permettez-moi tout d’abord d’informer la commission des réformes législatives majeures en cours dans le secteur du travail et de l’emploi. Récemment, le gouvernement philippin a promulgué la loi élargie sur la maternité, la loi sur le télétravail, la loi sur la réforme de la sécurité sociale, les normes sur la santé et la sécurité au travail, la loi sur la couverture maladie universelle et la Magna Carta des pauvres. Ces mesures, qui permettront à un nombre plus important de travailleurs des secteurs tant formel qu’informel d’exercer leur liberté, sont toutes en accord avec les objectifs de développement durable à l’horizon 2030.
Comme il a été dit plus haut, l’environnement le plus favorable pour assurer pleinement et librement l’exercice de la liberté syndicale est la garantie d’un emploi dans des conditions de travail sûres et salubres, tous les lieux de travail étant à l’abri de toute violence et de tout harcèlement. Le projet de loi sur la sécurité du travail est aujourd’hui entre les mains du Congrès philippin. Il est en attente d’approbation par le Président qui décidera de la mesure qu’il compte prendre à son sujet. L’insécurité de l’emploi, le faible respect des normes du travail, des conditions de travail peu sûres et une protection sociale insuffisante sont des causes immédiates courantes aux Philippines, qui conduisent parfois à des conflits entraînant malheureusement des cas avérés de violence et de harcèlement. Je peux assurer la commission que le Conseil national tripartite pour la paix sociale – Organe de surveillance (NTIPC-MB), institutionnalisé, continue à fonctionner efficacement avec la publication de l’ordonnance administrative no 32 qui définit la relation fonctionnelle unissant le NTIPC-MB et les organes régionaux de surveillance tripartites. Il existe dans le pays 16 organes régionaux de surveillance tripartites, qui sont prêts à être mobilisés à tout moment et où que ce soit, lorsque cela est nécessaire. L’Equipe de validation tripartite, dont les membres volontaires reçoivent une assistance sociale et un financement, peut être engagée, si cela est justifié. En mobilisant les organes régionaux tripartites concernés à l’échelle régionale, on apporte une réponse immédiate et une action concrète appropriée. Tout récemment, l’organe régional de surveillance tripartite concerné, en coordination avec la police nationale des Philippines concernée, a été immédiatement mobilisé pour enquêter et surveiller un des cas signalés dans la région de Luzon Sud.
Il convient de noter que, compte tenu du renforcement du partenariat entre les partenaires sociaux et le mécanisme opérationnel utilisé, nous observons un net déclin des cas de meurtres signalés. Ces cas étaient au nombre de 50 de janvier 2001 à juin 2010, 16 de juillet 2010 à juin 2016 et 3 du juillet 2016 à décembre 2018. Comme indiqué précédemment, sur les 66 cas signalés de 2001 à juin 2016, 11 ont été considérés comme relevant de l’ordonnance administrative (AO35). Avec une référence particulière à l’observation étudiée dans le rapport, le cas de Miralles en 2016 fait actuellement l’objet d’une enquête. L’examen numérique médicolégal mené par le Anti-Cyber Crime Group (groupe contre le crime informatique) de la police nationale des Philippines (PNP) sur les images d’archives d’une télévision à circuit fermé (CCTV) qui ont été dévoilées n’a donné aucun résultat positif. L’enquêteur chargé de ce cas n’a pas pu non plus trouver d’information pertinente. La Direction de l’administration des enquêtes et des enquêteurs de la police nationale des Philippines (PNP-DIDM) poursuit l’examen de ce cas en vue de l’éventuelle identification des suspects. Plus axé sur l’aspect technique de l’enquête, un examen balistique et de compatibilité croisée sur les données probantes recueillies a été entrepris. Le rapport fait également état du cas d’Abangan en 2016 qui a fait l’objet d’une investigation non seulement par la PNP, mais aussi, indépendamment, par la Commission des droits de l’homme. La PNP continue à analyser le suspect et à convaincre de témoigner les parents de témoins mineurs et la famille de la victime. Dans une résolution distincte, la Commission des droits de l’homme, qui est un organe indépendant, estime que ce cas relève de la sphère privée. De gros efforts sont encore déployés aujourd’hui pour monter un dossier sérieux contre l’auteur présumé. Ces deux cas particuliers mentionnés dans le rapport sont contrôlés en permanence par les organes régionaux de surveillance tripartites de la région de la capitale nationale et la région VII. Les cas d’Embang en 2012, de Pango en 2014 et de Romano en 2015 font l’objet de compléments d’enquêtes. Cependant, comme pour les autres précédents cas, l’absence ou l’insuffisance de preuves empêche qu’une enquête réussie ait lieu et que des poursuites soient entreprises. Les nouveaux cas signalés, bien que pas assez nombreux, sont très regrettables et, sur tous les points, condamnables le plus fermement possible. Comme tous les autres, ils ont été traités en temps voulu par les organismes appropriés, aux fins d’enquête, de constitution d’un dossier, de poursuite et d’un jugement. Ils sont aujourd’hui surveillés de près par les organes régionaux de surveillance tripartites concernés dans les régions, y compris par le Comité interinstitutions AO35 qui se réunira à nouveau d’ici peu, suite à la planification stratégique du mois de mars 2019 portant sur l’insertion du département dans le Comité interinstitutions et la mise à disposition de l’assistance et de la protection nécessaires des témoins, dans le cadre du Programme de protection des témoins.
Conformément au Plan d’action national qui a fait l’objet d’un accord tripartite (2017-2022), le gouvernement philippin a assuré de manière continue des formations visant à renforcer les capacités des partenaires sociaux, du ministère public, des organes chargés de l’application des lois et d’autres acteurs concernés, en particulier dans les enquêtes criminelles de novembre 2018 à Pampanga, du 15 janvier 2019 à Cebu, du 25 janvier 2019 à Davao et du 4 février 2019 à Manille. Nous mettons actuellement la dernière main sur le Training Manual on Freedom of Association (Manuel de formation sur la liberté syndicale), à l’attention des travailleurs, les Diagnostics of Compliance with Labor Standards (Diagnostics de conformité avec les normes du travail), à l’attention des employeurs, le Freedom of Association (FOA) Training Module (Module de formation sur la liberté syndicale), à l’attention de la Commission des droits de l’homme, et le FOA e-Learning Module on International Standards and Labour Rights (Module d’apprentissage en ligne sur la liberté syndicale, relatif aux normes internationales du travail et aux droits du travail), à l’attention de tous. Une réunion exploratoire et un atelier ont déjà eu lieu, respectivement le 17 décembre 2018 et le 7 mars 2019, avec le département concerné, spécifiquement l’Académie gouvernementale locale pour l’incorporation des normes internationales du travail, notamment la liberté syndicale, et les Directives sur les orientations régulières et la formation des directeurs généraux locaux. Une autre réunion a eu lieu en janvier et en août avec la PNP et les forces armées des Philippines (AFP) sur l’inscription de ces mêmes sujets dans leurs programmes et leurs formations.
Aujourd’hui, et à nouveau au sujet du rapport, nous souhaiterions préciser que les activités menées par les AFP-Bureau des droits de l’homme de Mindanao consistaient en fait en des visites de barangays dans le cadre du Programme de soutien aux communautés des forces armées des Philippines. Il s’agit d’un concept opérationnel orienté vers les communautés et les problèmes en cours, utilisé dans des zones touchées par des conflits. Cela ne vise pas à décimer les syndicats. Les AFP ont affirmé à nouveau leurs engagements aux principes directeurs et ont même publié des directives à toutes les unités militaires afin qu’elles respectent les droits des travailleurs. De même, elles ont redistribué les principes directeurs au personnel afin de le guider dans ses engagements. Récemment, des cours et des orientations sur la liberté syndicale et le syndicalisme, auxquels ont participé le personnel des AFP et de la PNP, ont été organisés les 1er février et 7 mai 2019.
Nous n’avons pas encore achevé notre travail. Dans l’esprit du dialogue social, j’en appelle à nos partenaires sociaux, étant donné les conditions et les circonstances nationales, à poursuivre leur travail et à poursuivre les réformes importantes au niveau national, en vue de donner corps à notre contrat social tel qu’il est défini dans le plan d’action national. C’est pourquoi notre représentation demande, avec l’appui habituel de nos partenaires sociaux, à pouvoir bénéficier du temps nécessaire pour achever et accomplir les activités et les programmes du plan d’action national dans les délais spécifiques qui ont été décidés par accord tripartite. S’il est vrai que les syndicats et les groupes d’employeurs ne font pas partie du gouvernement, nous sommes tous partenaires en termes de gouvernance.
Pour conclure, le gouvernement philippin continue à affirmer son engagement fort et sans faille afin d’obtenir des avancées soutenues s’agissant du respect, en droit et en pratique, de la convention et pour assurer un environnement plus propice à ce que la liberté syndicale soit assurée pleinement et librement aux Philippines. Maraming Salamat, Ginoong Tagapangulo.
Membres travailleurs – Nous souhaitons rappeler qu’en 2016 la commission a examiné l’application de la convention par le gouvernement. C’est ainsi qu’a été organisée une mission de contacts directs en 2017, avec des recommandations concernant les libertés civiles, les droits syndicaux et la promotion d’un climat propice à la liberté syndicale. Or, depuis lors, la protection des libertés et des droits civils a continué à se détériorer et le gouvernement n’a toujours pas avancé dans la modification de sa législation nationale après avoir fait part de ses efforts à plusieurs reprises auprès des organes de surveillance.
Le nombre croissant d’exécutions extrajudiciaires est tout simplement choquant. La commission d’experts notait avec regret qu’il y avait encore de nombreux cas d’homicides de syndicalistes et d’autres actes de violence pour lesquels les auteurs n’ont toujours pas été identifiés et sanctionnés. En outre, la commission d’experts est profondément préoccupée de noter les nouvelles allégations graves d’assassinat de deux dirigeants syndicaux. En effet, il y a tout juste deux semaines, Leonides Dennis Sequeña, ancien syndicaliste, a été assassiné alors qu’il rencontrait un groupe de travailleurs. Il a été tué par un tireur qui est arrivé en moto. Avant son assassinat, M. Sequeña avait travaillé sur plusieurs pétitions concernant des élections d’accréditation dans trois entreprises situées dans la zone franche d’exportation (ZFE) de Cavite, à Rosario. Cette atmosphère politiquement chargée, suscitée par une guerre de type militaire contre ceux que l’on appelait «les rouges», ne manque pas d’entraîner de la violence et rappelle les années où les syndicalistes étaient ciblés, harcelés, emprisonnés, enlevés et assassinés après avoir été traités à tort de «rouges».
Nous faisons appel au gouvernement ainsi qu’aux militaires pour qu’ils s’abstiennent d’utiliser des termes qui pourraient stigmatiser les syndicalistes, ou encore de tolérer des mesures de rétorsion prises à leur encontre au motif des idées qu’ils défendent. Nous notons également avec une profonde préoccupation l’intervention militaire dans des conflits du travail. Rappelons que, entre le 26 mai et le 2 juin 2017, des soldats armés ont menacé des travailleurs en grève d’une entreprise de fruits tropicaux et ont détruit un piquet de grève. Ces interventions militaires dans des affaires syndicales ont lieu avec l’accord du gouvernement, à plusieurs reprises, et ont menacé des travailleurs en grève avec des interventions militaires et de la police. Comme l’ont souligné à plusieurs occasions la commission et d’autres organes faisant partie du système de surveillance, un climat de violence et de meurtres de dirigeants syndicaux constitue un sérieux obstacle à l’exercice des droits syndicaux, en même temps qu’une violation grave des principes d’association. L’échec constant du gouvernement à protéger de tels actes les travailleurs et leurs dirigeants crée une atmosphère d’impunité qui renforce le climat de crainte et d’incertitude et porte atteinte à l’exercice des droits syndicaux.
Les exécutions extrajudiciaires et la violence perpétrée à l’encontre de travailleurs relèvent désormais d’une crise humanitaire. Pourtant, le gouvernement s’abstient toujours d’instaurer des mécanismes de surveillance efficaces afin de traiter cette impunité et assurer l’imputabilité. Nous notons que le Comité interinstitutions (CI) sur les assassinats extrajudiciaires, les disparitions forcées, la torture et autres violations graves du droit des personnes à la vie, la liberté et la sécurité (ordonnance administrative AO35) doit à nouveau se réunir en raison du changement de personnel qui doit avoir lieu au sein du Département de la justice. Nous notons que le NTIPC-MB n’est pas un organe judiciaire ni d’enquête et qu’il est chargé de la surveillance de questions relatives à la paix sociale. Il est alarmant de noter que le NTIPC a présenté 65 cas d’exécutions extrajudiciaires touchant les syndicalistes, mais que seuls 11 de ces cas ont été vérifiés par le CI. Le cas de Florencio «Bong» Romano, traité en 2016 par la commission, et celui de Victoriano Embang, assassiné en 2014, font toujours l’objet d’une enquête par la police. Le CI doit pouvoir bénéficier de ressources pour enquêter et traiter toutes les plaintes d’exécutions extrajudiciaires de syndicalistes. Le NTIPC doit lui aussi recevoir des ressources pour surveiller le climat de justice et de sécurité dans lequel se trouvent les syndicalistes. Nous en appelons au gouvernement pour qu’il fournisse toutes les ressources nécessaires à une enquête rapide et efficace des allégations sérieuses de meurtres de dirigeants syndicaux et pour garantir la sécurité des témoins.
Nous regrettons profondément que, depuis de nombreuses années, divers aspects de la législation des Philippines qui ne sont pas conformes à la convention restent intacts et soient appliqués dans la pratique. Ceci apparaît comme une absence de bonne foi de la part du gouvernement qui ne travaille pas rapidement à l’adoption des mesures nécessaires pour que la législation soit rendue conforme à la convention. Cela fait bon nombre d’années maintenant que le gouvernement fait état de plusieurs projets de loi encore en suspens. Par exemple, les articles 284 et 287(b) du Code du travail empêchent les étrangers d’adhérer à un syndicat, ce qui est contraire à l’article 2 de la convention. Le gouvernement a mentionné les projets de loi no 1354 et no 4488 de la Chambre des représentants qui, à l’entendre, autoriseront, une fois qu’ils seront adoptés, les personnes étrangères à prendre part à des activités syndicales, y compris à s’organiser elles-mêmes. Comme l’a noté la commission d’experts, ces projets de loi sont toujours en suspens, malgré les diverses sessions tenues par la Chambre des représentants, pendant lesquelles ils auraient pu être adoptés.
De nombreuses catégories de travailleurs sont exclues du droit de former des syndicats ou d’y adhérer. C’est le cas notamment des travailleurs qui occupent des postes de direction ou de ceux qui ont accès à des informations confidentielles; des sapeurs-pompiers; des gardiens de prison et autres travailleurs du secteur public; des travailleurs temporaires ou détachés; ainsi que des travailleurs qui n’ont pas de contrat de travail. Ces types d’exclusion sont clairement en contradiction avec l’article 2, qui prévoit d’accorder le droit à la liberté syndicale à tous les travailleurs sans distinction. Le gouvernement a mentionné les projets de loi nos 4533 et 5477 de la Chambre des représentants, ainsi que le projet de loi no 641 du Sénat, qui, selon lui, devraient régler ces types de violation. Toutefois, il doit prendre aussi en bonne foi les mesures nécessaires, afin de garantir que ces projets de loi sont enfin adoptés en tant que lois, et ce avec l’engagement total des partenaires sociaux.
En outre, certains aspects de la législation limitent le droit de constituer des syndicats sans autorisation préalable. En vertu de l’article 240(c) du Code du travail, les syndicats indépendants doivent avoir un seuil minimal d’adhésion de 20 pour cent pour s’organiser. La commission d’experts a indiqué clairement à plusieurs reprises que cette prescription est excessive et qu’elle est donc un obstacle à la constitution libre d’organisations de travailleurs. Le gouvernement insiste à nouveau sur les projets de loi en suspens dont le but est de réduire le seuil minimal, mais ne donne pas d’explication crédible au sujet du retard pris dans l’adoption des amendements nécessaires.
Nous sommes de plus profondément préoccupés par le fait que les protections contre l’ingérence et la protection contre toute intervention compromettant l’exercice de ces libertés, telles que prévues à l’article 3, sont continuellement bafouées. En vertu de l’article 278(g), le gouvernement a le pouvoir d’intervenir unilatéralement dans des conflits du travail qui touchent des services essentiels et d’ordonner un arbitrage obligatoire. Nous prenons note de la publication de l’ordonnance no 40-H-13 destinée à rendre les industries listées comme étant d’intérêt national conformes aux services essentiels tels que prescrits par la convention. Toutefois, le gouvernement retient une définition vaste plutôt qu’une définition stricte et limitée des services essentiels telle qu’elle est stipulée dans la convention. La désignation des services essentiels doit correspondre aux services dont l’interruption mettrait directement en danger la vie, la sécurité et la santé de toute ou d’une partie de la population. La Chambre des représentants a passé en revue quatre projets de loi pour traiter ces problèmes (projets de loi nos 175, 711, 1908 et 4447) et un projet de loi du Sénat (no 1221). Nous insistons sur la nécessité pour le gouvernement de prendre d’urgence des mesures visant à garantir qu’une définition des services essentiels qui soit conforme à la convention soit adoptée en consultation avec les partenaires sociaux. Dans ce contexte, il est également extrêmement troublant que les articles 279 et 287 du Code du travail imposent des sanctions pénales contre des travailleurs ayant participé à une grève pacifique ou l’ayant organisée. Il s’agit là d’une violation des articles 3 et 8 de la convention, cela ne fait aucun doute. Et il est regrettable de constater que les projets de loi de la Chambre des représentants nos 175, 711, 1908 et 4447, dont l’objectif est de traiter cette question, soient en attente d’adoption depuis plusieurs années maintenant. Le gouvernement doit prendre des mesures immédiates et assorties de délai pour veiller à ce qu’aucune sanction pénale ne soit imposée à l’encontre d’un travailleur au motif qu’il aurait organisé une grève pacifique sans respecter la procédure adoptée. De même, nous notons que l’article 285 du Code du travail, qui prévoit que les syndicats ne peuvent recevoir une assistance étrangère sans approbation préalable du secrétaire du Travail, va à l’encontre de l’article 3 de la convention. Le gouvernement a présenté les projets de loi de la Chambre des représentants no 1354 et no 4448 visant à retirer l’interdiction et à réglementer tous les autres aspects de l’assistance étrangère aux syndicats philippins. A nouveau, cette question est en suspens depuis un bon moment à la Chambre des représentants.
Enfin, le gouvernement n’a pas donné pleinement effet à l’article 5 de la convention. L’article 244 du Code du travail fixe un seuil extrêmement élevé de dix sections locales dûment reconnues en tant qu’agents de négociation requis pour enregistrer une fédération ou un syndicat national. Là encore, le gouvernement a indiqué que le projet de loi de la Chambre des représentants no 1355, qui prévoit d’abaisser le nombre minimum de membres, est en suspens, en même temps que le projet de loi no 1169 du Sénat. Nous sommes aussi profondément inquiets par le recours excessif à des contrats de courte durée et son impact négatif sur la liberté syndicale. Certaines procédures législatives attendent depuis trop longtemps sans que la moindre mesure concrète ne soit prise à leur sujet. A nouveau, nous indiquons que les organes de surveillance ont noté l’importance cruciale du dialogue social et de la consultation tripartite sur les questions se rapportant à la législation et à la politique du travail. Nous demandons au gouvernement de poursuivre des consultations qui soient complètes, franches et significatives au sujet de ces projets de loi. Nous espérons que toutes les mesures nécessaires en vue d’assurer l’adoption des amendements soient prises sans plus attendre.
Membres employeurs – Nous remercions le gouvernement pour ses commentaires et nous remercions aussi les travailleurs, car il y a eu beaucoup de détails utiles dans les observations qui ont été faites. La convention, nous le savons, est une convention fondamentale que les Philippines ont ratifiée en 1953. Ce pays a ratifié 37 conventions, y compris les huit conventions fondamentales, ce qui mérite d’être signalé car cela veut dire que le pays prend au sérieux les principes qu’elles contiennent, ou qu’il devrait le faire. Le cas qui nous intéresse aujourd’hui a été examiné auparavant par la commission – en 2007, 2009 et 2016. De plus, il convient de noter également que la commission d’experts a présenté 15 observations depuis 1995, dont sept ces dix dernières années. Les pays qui font l’objet de fréquents commentaires sont ceux qui sont confrontés à des problèmes plus importants. Ce cas dure depuis longtemps, comme nous l’ont fait savoir les travailleurs, ses facettes sont multiples et, de plus, il implique l’application de la convention. Et nous savons tous, compte tenu des commentaires sans fin qui ont été faits, que certains sujets s’y rapportant posent problème pour les employeurs aussi.
Pour récapituler la situation, les employeurs ne partagent pas l’avis de la commission d’experts concernant le droit de grève prévu par la convention et, selon nous, il n’existe pas de normes de l’OIT concernant les grèves, moyennant quoi la portée et les conditions de l’exercice du droit de grève devraient être régies à l’échelle nationale. Par conséquent, pour ce qui est du droit des travailleurs aux Philippines de mener des grèves, nous voudrions simplement signaler qu’à notre avis c’est au gouvernement d’en décider.
De prime abord, ce cas constitue un cas de discrimination systématique par l’Etat à l’encontre d’organisations de travailleurs et de leurs membres. J’utilise les termes «de prime abord» à bon escient, car un examen plus en détail de ces questions laisse entendre que le cas des Philippines n’est pas un cas, mais deux. Le premier concerne la spécificité des plaintes des travailleurs et des syndicats et le second a trait aux réponses fournies par le gouvernement et le contexte dans lequel elles ont été données. Ils doivent donc être examinés l’un après l’autre.
Pour ce qui est des plaintes des syndicats et des travailleurs, depuis plusieurs années, la commission reçoit des plaintes de violation des droits syndicaux, voire pire, notamment des allégations de meurtres de dirigeants syndicaux, d’arrestations et de fausses accusations de meurtres à l’encontre de dirigeants syndicaux, ainsi que d’attaques physiques de travailleurs en grève. Ces exemples sont trop nombreux pour être détaillés ici dans le délai imparti. A nouveau, les observations concernent des allégations graves de violation des droits de l’homme, notamment: les meurtres et les tentatives d’assassinat de dirigeants syndicaux; la suppression violente de grèves et d’autres actions collectives par la police et les forces armées; le harcèlement de syndicalistes et le fait d’interdire l’adhésion à des syndicats dans les ZFE. Soyons clairs, les employeurs ne dénigrent en aucun cas le sérieux des problèmes portés à l’attention de la commission. Il est toutefois important de noter qu’il ne s’agit pas seulement de problèmes liés à la liberté syndicale. Il s’agit aussi de questions relatives aux droits de l’homme et, par définition, certains cas sont en lien avec le droit et la pratique. Des cas comme ceux-là ne sauraient être incontestés, mais nous devons garder à l’esprit le fait qu’ils sont abordés ici dans le contexte de la liberté syndicale. Nous n’avons aucune juridiction qui concerne spécifiquement le droit et la pratique, sans doute pas plus les droits de l’homme, même s’il existe inévitablement des chevauchements. La plupart des détails qui caractérisent le cas présenté cette année sont les mêmes que ceux qui ont été discutés la fois précédente. Les meurtres auxquels il a été fait référence en 2016 ont été discutés auparavant. En conséquence, nous ne devons pas seulement examiner les détails, mais aussi la question de savoir si la situation va mieux ou si elle se détériore. Cette année, il semblerait que les problèmes soulevés sont aussi nombreux, sinon plus, qu’auparavant, mais aussi que le gouvernement aura besoin de beaucoup de temps pour les traiter.
Pour ce qui est de la réponse du gouvernement, le second aspect concerne les réponses du gouvernement aux diverses allégations formulées à son encontre. Depuis plusieurs années, sa réponse a révélé des facettes multiples et, de prime abord, était compréhensible. Mais, malheureusement, cela remonte à plusieurs années et peu de choses semblent avoir changé entre-temps. Pour résumer, le gouvernement fournit depuis plusieurs années des informations sur ses travaux de réforme de ses lois relatives au travail, conformément à la convention. Deux éléments cruciaux de cette activité ont été ce que l’on a appelé: i) le mécanisme national de surveillance, qui a pour mission de suivre les progrès du pays en vue de remédier aux violations des droits de l’homme, en accordant un rang de priorité, à court terme, aux cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées et de torture, et de fournir des services juridiques et d’autres services. Nous admettons que les travaux de ce mécanisme ont abouti à plusieurs condamnations pour exécutions illégales, mais les questions non résolues sont encore très nombreuses et elles doivent encore être soumises à enquête; ii) le Comité insterisntitutions sur les disparitions forcées, la torture et d’autres violations graves du droit à la vie, la liberté et la sécurité des personnes, créé en novembre 2012, également chargé d’enquêter sur des cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de torture et autres violations graves des droits de l’homme, commises par les forces de l’Etat ou autres , d’accorder un rang de priorité aux cas non résolus et de créer des équipes spéciales d’investigation. Nous nous félicitions de cette innovation au moment où elle a été décidée, mais nous notons avec regret qu’elle est toujours en attente depuis la dernière fois que cet élément a été discuté. C’est là un problème grave et les employeurs prient instamment le gouvernement de reprendre rapidement les activités précédentes et de remédier au retard qui ne cesse de s’accroître dans le règlement des cas. Nous nous faisons aussi l’écho de l’appel lancé par la commission d’experts, qui demande au gouvernement de rendre compte des progrès accomplis dans la collecte et le traitement de l’information, grâce à quoi les cas de violence seront traduits en justice, et d’en communiquer les résultats. Nous estimons que ce que nous dit le gouvernement, à savoir qu’il existe 16 organes tripartites régionaux à qui on peut faire appel, lorsque cela est nécessaire, pour enquêter sur des questions, n’est pas suffisant. C’est maintenant que cela est nécessaire, et ces organes devraient être actifs dès maintenant.
Si les enquêtes sur les allégations d’actes contre des membres et des dirigeants syndicaux sont des sujets sérieux à part entière, le contexte dans lequel le gouvernement doit faire ces enquêtes l’est aussi. C’est ainsi que la loi sur la sécurité des personnes des Philippines se trouve certainement au cœur de ce second élément. Cette loi reflète la volonté du gouvernement de préserver la sécurité de ses citoyens contre un contexte d’instabilité politique et civil qui dure depuis longtemps, y compris contre une insurrection armée. C’est à ce contexte que, selon les employeurs, le gouvernement n’a pas accordé par le passé assez d’importance pour que le cas puisse être examiné comme il se doit, et il en est de même aujourd’hui. Ceci est important car les directives opérationnelles du CI définissent les exécutions extrajudiciaires de manière à englober les cas dans lesquels la victime est membre ou affiliée à une organisation syndicale, ou a été prise pour telle, et a été ciblée et tuée en raison de son affiliation réelle ou supposée. Les violations des droits de l’homme ne sont pas toutes une infraction aux droits du travail, ce qui est particulièrement exact si la personne contre laquelle la violation a été commise commettait en fait à ce moment-là un acte illégal ou criminel. Il est donc indispensable que, dans l’examen des cas, il soit énoncé clairement quelle loi est transgressée et si cette loi est conforme aux normes internationales. Ceci n’est pas toujours clairement énoncé et tout manque de clarté ne peut qu’entraver un examen juste du cas en question. Dans le contexte de la liberté syndicale, il est important de distinguer les cas où les membres syndicaux sont des cibles spécifiques en raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales, ou simplement des victimes, parmi d’autres victimes et d’autres citoyens, de violence pour des causes plus générales. Nous avons un mandat pour le premier élément, mais pas pour le second. Les syndicats se sont dits préoccupés par le fait que la loi sur la sécurité des personnes peut être détournée pour être utilisée afin de supprimer des activités syndicales légitimes. Pour sa part, le gouvernement a affirmé que cette loi ne peut être utilisée s’il s’agit d’aller à l’encontre de l’exercice de droits syndicaux, en particulier des activités syndicales légitimes, et que des directives existent afin de garantir que les forces armées et la police ne sont autorisées à intervenir dans des activités syndicales que si elles en ont reçu la demande expresse par les autorités. Ce que nous voyons et ce que nous entendons laissent à penser qu’il s’agit plus de mots que d’une réalité. Pour ce qui est de la surveillance et des investigations, les employeurs se sont félicités, lorsque cela a eu lieu, de la mise en place du Mécanisme national de surveillance et du CI. Le problème est que, s’ils étaient actifs à l’origine, ils semblent aujourd’hui être tombés en désuétude. Nous sommes conscients que le régime a changé et qu’un certain nombre d’activités ont récemment été interrompues. Cependant, cela est un fait, pas une excuse. Nous prions instamment le gouvernement de «redresser la barre» dès que possible.
Le gouvernement a indiqué précédemment qu’il a entrepris une coopération avec le bureau de l’OIT à Manille, qui est un programme de coopération technique sur la formation et le renforcement des capacités de toutes les parties prenantes concernées par les normes internationales du travail, y compris la liberté syndicale et la négociation collective. Nous demandons au gouvernement de fournir une mise à jour de l’état d’avancement de ces travaux et sur tous résultats auxquels ils ont donné lieu.
En ce qui concerne le Code du travail, nous prenons note des propositions du gouvernement d’apporter des modifications afin d’assurer une plus grande cohérence avec les normes internationales du travail, en particulier avec la convention, et de l’information selon laquelle une équipe tripartite chargée de l’examen du Code du travail a pris part au processus de rédaction. Cependant, à nouveau, ce changement est en cours depuis longtemps. Nous y sommes favorables; seulement, une fois de plus, il doit être mené à bien.
En ce qui concerne l’article 2 de la convention, qui concerne le droit des travailleurs à constituer des organisations et de s’y affilier, nous notons que le projet de loi no 5886, qui autorise les non-citoyens à participer à des activités syndicales, ne reconnaît ce droit qu’aux seuls étrangers justifiant d’un permis de travail valable. En outre, il ne traite pas les préoccupations exprimées au sujet de l’exclusion des droits syndicaux à certains fonctionnaires, certains sapeurs-pompiers, aux gardiens de prison, ou aux employés du service public œuvrant dans l’élaboration de politiques ou ayant accès à des données confidentielles. Nous sommes heureux d’apprendre que les Philippines ont ratifié la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978. Cela dit, une fois encore, cela manque de réalisme. C’est la législation nationale devant donner effet à ces conventions qui doit aujourd’hui être accélérée et, à nouveau, nous prions instamment le gouvernement d’agir rapidement pour que cette législation puisse se concrétiser.
Les employeurs rappellent que, si la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, portant sur le droit de négocier collectivement afin d’exclure certains fonctionnaires de la négociation collective, l’autorise, cette question ne fait pas l’objet de la présente convention, qui traite du droit d’organisation. En conséquence, les employeurs espèrent que les amendements législatifs proposés, ainsi que toute autre mesure législative pertinente, seront en accord avec les principes susmentionnés, afin d’assurer à tous les travailleurs, y compris ceux qui ne bénéficient pas de la négociation collective, le droit d’organisation. Les employeurs prient le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard.
Pour ce qui est de l’article 3 de la convention, concernant le droit des organisations d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action sans subir d’ingérence, nous notons l’indication du gouvernement selon laquelle les modifications proposées porteront sur l’harmonisation de la liste des industries, des industries essentielles, indispensables à l’intérêt national. Comme les années précédentes, nous nous félicitons de l’initiative visant à limiter l’intervention du gouvernement aux cas conduisant à un arbitrage obligatoire. Cependant, là encore, nous souhaiterions voir la législation adoptée. Nous en avons entendu parler depuis trop longtemps. Nous avons besoin que ce soit fait maintenant. De plus, nous nous félicitons une nouvelle fois d’apprendre que la représentativité minimale pour constituer un syndicat sera abaissée, de sorte que l’exercice de la liberté syndicale en termes de création d’organisations est aussi libre que possible. Quant aux remarques de la commission d’experts sur le principe selon lequel aucune sanction pénale ne devrait être imposée à l’encontre de travailleurs qui auraient mené des grèves pacifiques, elles nous préoccupent réellement. Compte tenu de mes précédentes remarques sur la convention, ainsi que du fait qu’il n’existe pas de consensus sur l’existence d’un droit de grève, les remarques de la commission d’experts ne peuvent être interprétées comme faisant référence que dans la mesure où la législation nationale prévoit des sanctions dans des cas de grèves irrégulières. Nous ne pouvons qu’espérer que le gouvernement adoptera une approche équilibrée et juste en réponse à ces questions.
En conclusion, seule l’action est l’unique élément que nous devons voir. Nous voudrions voir aussi un rajeunissement des travaux du CI et de ce qu’était le Mécanisme national de surveillance. Nous aimerions pouvoir constater également que les modifications du Code du travail sont bien conformes à la convention, y compris l’autorisation de tous les travailleurs et de tous les employeurs sans distinction aucune de constituer et de faire fonctionner des organisations de leur choix. Nous souhaitons que le gouvernement veille à ce que les travailleurs ne soient pas sanctionnés lorsqu’ils exercent des droits légaux en vertu du droit national, et qu’une version actualisée du projet sur l’état de la coopération technique établi par l’OIT soit disponible. Enfin, nous espérons que toutes ces questions seront traitées le plus rapidement possible.
Membre employeur, Philippines – Les membres employeurs sont en plein accord avec le rapport du représentant du gouvernement quant aux améliorations importantes apportées dans l’application, en droit et en pratique, de la liberté syndicale telle que prévue par la convention. Ils soutiennent également le Plan d’action national sur la liberté syndicale et la négociation collective, ainsi que ses points d’action concomitants relatifs aux droits civils et aux droits syndicaux. Dans le domaine législatif, en réponse aux recommandations et aux commentaires des organes de contrôle de l’OIT, on note en effet plusieurs réformes remarquables, découlant de ce qui précède, sur le travail et l’emploi, comme s’en est fait l’écho jusqu’ici le représentant gouvernemental. Les membres employeurs souhaitent ajouter une loi qui fera date, bien que controversée, qui donne plus de corps et plus de sens au droit des travailleurs d’organiser et de mener une négociation collective, droit garanti par notre Constitution et notre législation. Nous la considérons comme étant controversée car certaines de ses dispositions posent de sérieux problèmes pour les entreprises. Cette loi assouplit et réduit les prescriptions auparavant trop strictes et trop complexes concernant la reconnaissance syndicale. Elle accélère la procédure d’organisation du syndicat d’une entreprise locale en autorisant simplement une fédération ou un syndicat national à délivrer une accréditation reconnaissant le syndicat local en tant que section locale. Même si la délivrance d’une accréditation de section locale ne confère à celle-ci une personnalité juridique que pour le dépôt d’une pétition portant sur le choix de l’accréditation, certains aspects de la loi suscitent une levée de boucliers de la part du monde des affaires, parmi lesquels on citera: i) dans le cadre d’une pétition relative au choix d’une accréditation, l’employeur est prévenu ou informé et vu seulement comme un spectateur. Son rôle dans ce processus se limitera à être prévenu ou informé de la pétition et à soumettre la liste des employés lors de la conférence précédant le choix. Cet état de fait donne une image peu glorieuse du gouvernement et du syndicat qui s’exprime au sujet de l’avenir de l’entreprise, alors que son partenaire social, l’employeur, est tenu à l’écart de la conférence; ii) le syndicat de base et le syndicat des cadres fonctionnant dans le même établissement peuvent adhérer à la même fédération ou au même syndicat national. Ceci a été source de préoccupation de la part des employeurs, en raison de la question qui se pose en termes de conflit d’intérêts. Ceci ne risque-t-il pas de porter atteinte à l’objectivité du cadre lorsque celui-ci est sollicité pour enquêter au sujet d’un employé de base en faute? Si l’un est en grève, les autres syndicats conserveront-ils leur indépendance et se garderont-ils de sympathiser avec l’autre?
Néanmoins, les membres employeurs acceptent cette loi comme illustration de la dure réalité. Dura lex, sed lex. Toute dure qu’elle soit, la loi est la loi. En tant que partenaires sociaux responsables, souscrivant à la convention et à la convention no 98, les employeurs doivent respecter la loi et s’y conformer. Les membres employeurs ont accueilli favorablement la visite de la mission de haut niveau de 2007, ainsi que celle de contacts directs de 2017 au sujet des plaintes relatives aux allégations de non-respect de la convention et de la convention no 98. Toutefois, malgré tout le respect qu’ils ont pour le travail accompli, les employeurs sont préoccupés par le fait que, suite à une véritable enquête, la majorité des plaintes se sont avérées infondées. Si nous avons condamné dans les termes les plus fermes l’assassinat d’un syndicaliste le deuxième jour de ce mois, alors qu’il rencontrait un groupe de membres des Nations Unies – et nous espérons que les coupables seront bientôt derrière les barreaux –, il convient de noter que, sur les 71 exécutions extrajudiciaires et tentatives de meurtres signalées de 2001 à cette année, 27 d’entre elles, soit 38 pour cent, sont classées comme étant supposées être en lien avec le travail. Parmi ces 27 cas, seulement deux sont en attente d’être traités au tribunal, deux autres se sont produits pour des motifs personnels tels qu’une dispute de la circulation, etc. Les 23 autres cas concernaient des personnes qui avaient été renvoyées, ou faisaient encore l’objet d’une enquête, ou encore avaient été classés faute de preuves directes. Dans ce contexte, les membres employeurs suggèrent humblement et respectueusement à la commission d’experts de faire preuve d’une certaine diligence raisonnable en vérifiant de manière assidue et de valider toute plainte de violation alléguée de la convention et de la convention no 98, afin de déterminer s’il existe réellement une cause probable qui expliquerait cette plainte. Pour conclure, les membres employeurs assurent la commission de leur soutien et de leur coopération continus dans l’exécution de leurs fonctions.
Membre gouvernemental, Roumanie – Je m’exprime aujourd’hui au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres. Le Monténégro et l’Albanie, en tant que pays candidats, ainsi que la Norvège, pays membre de l’AELE et de l’Espace économique européen, souscrivent à cette déclaration. Nous sommes engagés à promouvoir la ratification et l’application universelles des huit conventions fondamentales, qui s’inscrivent dans le cadre stratégique sur les droits de l’homme et la démocratie de l’UE. Nous appelons tous les pays à protéger, promouvoir et respecter tous les droits de l’homme et les droits au travail et attachons une grande importance à la liberté syndicale et au droit d’organisation. A cet égard, le respect de la convention et de la convention no 98 est essentiel.
Nous souhaiterions rappeler les engagements pris par les Philippines dans le cadre de l’accord SPG+ et de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’UE et ses Etats membres, en particulier leur engagement en faveur de la ratification et de l’application efficace des conventions internationales sur les droits de l’homme et les droits au travail. Afin de soutenir le pays dans ses efforts, l’UE met en œuvre actuellement un projet conjoint avec les Philippines sur le renforcement de la capacité des administrations publiques à appliquer les huit conventions fondamentales de l’OIT, l’accent étant mis spécifiquement sur la liberté syndicale et la négociation collective.
Malgré certains progrès relevés dans la promotion globale du programme social et des droits au travail, et les engagements pris par les autorités de répondre à ces graves préoccupations, nous regrettons profondément de devoir constater qu’une fois encore ce cas figure sur la liste de la commission, après avoir été discuté en 2016. Nous remercions le gouvernement pour sa réelle collaboration et pour les informations détaillées qu’il a ajoutées. Cela étant dit, nous notons avec une sincère inquiétude que, après plusieurs années, de nombreux cas de violation de la liberté syndicale ne soient pas réglés, y compris les meurtres de syndicalistes ou des actes de violence antisyndicale et de violence de la police lors de grèves pacifiques. Nous sommes tous concernés par le manque d’enquêtes appropriées et de poursuites engagées dans les cas graves. Nous affirmons à nouveau que l’impunité ne peut et ne devrait être tolérée dans n’importe quelle société que ce soit. Nous nous félicitons des mesures prises ces dernières années pour instaurer des organes et des institutions de surveillance, notamment le CI chargé d’enquêter dans des cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées et de torture, le NTIPC-MB et les organes de surveillance tripartites régionaux. Nous regrettons toutefois que le CI ne se soit pas encore à nouveau réuni. Nous observons que des dispositions ont été prises pour mettre en place des équipes tripartites de validation afin d’aider les organes de surveillance régionaux dans leurs travaux. Nous prions le gouvernement de prendre rapidement des mesures afin d’assurer à nouveau le bon fonctionnement des CI, et nous attendons des organes établis qu’ils mènent les investigations requises sur tous les cas, qu’ils condamnent leurs auteurs et qu’ils fassent en sorte que de tels événements ne se reproduisent pas. Reconnaissant la gravité des allégations et la complexité des cas, nous collaborons avec le gouvernement en matière de protection des témoins et de renforcement des capacités des procureurs, des personnes chargées de l’application de la loi et d’autres acteurs impliqués. De plus, nous prions instamment le gouvernement de prendre d’autres mesures visant à renforcer le fonctionnement des organes tripartites de surveillance, tant national que régional.
Tout comme la commission d’experts, nous nous félicitons de la ratification par les Philippines, en 2017, de la convention no 151. Pour autant, nous aimerions faire part de notre préoccupation au sujet des aspects législatifs persistants du cas que les organes de contrôle de l’OIT soulèvent depuis des années. Nous sommes soucieux de l’absence de progrès dans l’adoption de certaines propositions législatives visant à rendre la législation nationale conforme à la convention no 87, et ce malgré le fait qu’à de maintes reprises le gouvernement a exprimé ces dernières années sa volonté de le faire. Nous prions instamment les autorités philippines d’adopter les amendements législatifs, en particulier ceux qui concernent les éléments suivants: accorder les droits syndicaux à tous les travailleurs et catégories de travailleurs présents dans le pays; réduire le nombre minimum de membres requis pour former un syndicat, qui est excessivement élevé; abaisser les prescriptions excessivement élevées concernant l’enregistrement des fédérations de syndicats; limiter l’intervention du gouvernement dans les conflits du travail; veiller à ce qu’aucune sanction pénale ne soit imposée aux travailleurs pour avoir mené une grève pacifique; supprimer le besoin pour un syndicat de demander la permission du gouvernement pour obtenir une assistance étrangère; réduire les prescriptions excessivement élevées que doivent satisfaire les syndicats locaux pour s’enregistrer à l’échelle fédérale ou nationale.
Enfin, les consultations tripartites et un dialogue social crédible et efficace sont des éléments essentiels à l’application des principes et droits fondamentaux au travail, en particulier des conventions fondamentales de l’OIT. C’est pourquoi nous encourageons vivement les Philippines à redoubler d’efforts pour renforcer la coopération avec les travailleurs et les employeurs afin d’assurer l’application effective de la convention ainsi que le respect de la liberté syndicale. Pour conclure, nous aimerions affirmer une nouvelle fois notre fort engagement à poursuivre notre coopération intensive avec le gouvernement des Philippines dans ses efforts pour faire face aux défis qui se posent à lui et assurer le respect des droits de l’homme et des droits au travail dans le pays.
Membre gouvernemental, Thaïlande – La Thaïlande s’exprime au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Cette dernière reconnaît que, en tant que signataires de la convention (signature qui remonte à 1953), les Philippines, avec la collaboration de ses partenaires sociaux, ont fait des progrès importants au sujet de l’application, en droit et en pratique, des principes relatifs à la liberté syndicale, depuis la mission de haut niveau de 2009 et la mission de contacts directs de 2017 et après que la convention ait été examinée par la commission lors de la 105e Conférence internationale du Travail qui s’est tenue en 2016.
L’ASEAN prend note des informations et du rapport sur les progrès accomplis à ce jour, compte tenu des circonstances nationales, dans le respect de la liberté syndicale aux Philippines, grâce au Plan d’action national sur la liberté syndicale et la négociation collective (2017-2022), adopté en 2017 par les partenaires tripartites philippins, avec le soutien du Bureau de pays de l’OIT de Manille et le Schéma de préférences tarifaires généralisées (GSP+) de l’Union européenne. En vue de l’achèvement total, en 2022, du plan d’action national, l’ASEAN s’attend à ce que les partenaires tripartites des Philippines poursuivent l’œuvre louable qu’ils ont entreprise. Les Philippines, accompagnées de leurs partenaires sociaux, doivent avoir la possibilité d’achever la mise au point et la réalisation des activités et programmes inscrits dans le plan d’action national, dans les délais convenus par accord tripartite. C’est pourquoi l’ASEAN prie instamment les Philippines de continuer à respecter ses obligations en vertu de la convention et de poursuivre son engagement sain et constructif avec l’ensemble des partenaires sociaux.
Enfin, l’ASEAN appelle l’OIT et ses organes de contrôle à fournir l’assistance technique et les orientations requises afin de résoudre les problèmes en suspens, tout en assurant un environnement plus propice à l’application de la convention aux Philippines.
Observateur, Fédération des travailleurs libres (FFW) – Je m’exprime aujourd’hui au nom de la Fédération des travailleurs libres et de la Nagkaisa Labor Coalition (Coalition du travail de Nagkaisa) des Philippines. Ce pays a signé la convention dès 1953. Nous nous souvenons qu’en 2016 les Philippines ont à nouveau fait l’objet de la part de la commission d’experts d’une double note de bas de page à propos de la convention. Selon nous, ce choix était une réaction appropriée à la violence que subissaient les syndicalistes et l’absence de poursuites pour exterminations extrajudiciaires, en dépit de l’élaboration de divers mécanismes nationaux de surveillance, destinés à enquêter sur ces crimes. Certes, la violence antisyndicale n’était pas notre préoccupation seulement en 2016. Le fait de passer outre les syndicats en utilisant des programmes d’emploi irrégulier, les lacunes relevées dans la législation existante et l’échec du gouvernement même dans l’application de cette législation défectueuse ont conduit à un climat dans lequel la liberté syndicale est très difficile, voire impossible, à faire appliquer.
Depuis la prise de pouvoir de l’administration du Président Duterte, 43 syndicalistes ont été assassinés. Le premier dirigeant syndical à avoir été tué était Orlando Abangan, un syndicaliste de la SENTRO basé à Cebu. Il a été assassiné en septembre 2016. L’assassinat le plus récent est celui de Dennis Sequeña, ancien syndicaliste, qui a été assassiné à Tanza, Cavite, le 2 juin 2019, alors qu’il tenait des séances d’orientation sur le syndicalisme auprès des travailleurs des ZFE. La police locale n’a même pas déposé plainte officiellement. Pendant le gouvernement précédent, dont la Présidente était Mme Gloria Macapagal Arroyo, 68 syndicalistes ont été assassinés. Le gouvernement n’est simplement pas sérieux lorsqu’il cherche un coupable à ces assassinats. Toute troublante qu’elle soit, la violence n’est pas seulement un problème qui nous concerne nous, aux Philippines, où les travailleurs menés par la Nagkaisa Labor Coalition (Coalition du travail de Nagkaisa) sont parvenus il y a deux ans à convaincre le gouvernement de la République des Philippines de ratifier la convention no 151. Le pays se retrouve ainsi le premier dans toute l’Asie à l’avoir fait. Toutefois, à ce jour, aucune loi n’a encore été passée qui permette de faire respecter la convention dans son esprit et dans son objectif. Cette situation tient à l’écart de la négociation collective dans le secteur public les employés travaillant sous contrat ou bénéficiant d’un contrat de travail, qui sont plus de 628 000 à occuper des fonctions clés dans des services prioritaires au sein de services gouvernementaux, d’agences gouvernementales locales, de collèges et d’universités de l’Etat, y compris de sociétés appartenant ou contrôlées par le gouvernement, les privant donc des avantages d’une telle négociation. Pour cela, le gouvernement devrait «joindre le geste à la parole».
La commission d’experts se réfère à nouveau à plusieurs autres questions d’ordre législatif, y compris, entre autres, les obstacles à l’enregistrement et au fait que, récemment, de nombreuses réformes législatives concernant le travail et l’emploi ont été promulguées, notamment la loi sur la santé et la sécurité au travail, la loi sur le télétravail et la loi sur la réforme de la sécurité sociale, qui offre, parmi d’autres avantages, une prestation en cas de chômage, ainsi que la loi sur l’extension du congé maternité. Cela étant dit, ces mesures sont loin de garantir le droit des travailleurs à jouir pleinement de leur liberté syndicale.
Membre gouvernemental, Brésil – Tout en remerciant le gouvernement des Philippines pour les informations détaillées fournies par la commission, le Brésil fait part à nouveau de son malaise concernant divers aspects du système de contrôle. La présente commission est loin de respecter les meilleures pratiques du système multilatéral. Il est dans l’intérêt de tous – les gouvernements, les travailleurs et les employeurs – que l’OIT soit forte, efficace et légitime et qu’elle soit adaptée aux problèmes d’aujourd’hui. A la recherche d’un futur caractérisé par la prospérité, le travail décent et plus d’emplois, l’OIT devrait accroître sa coopération et ses partenariats internationaux, tout en révisant son système de contrôle des normes, dans l’objectif d’améliorer la transparence, l’objectivité, l’impartialité et de parvenir à un réel tripartisme.
Nous prenons bonne note de l’information fournie par le gouvernement au sujet de sa volonté de garantir la liberté syndicale et l’ensemble des droits des travailleurs. A cet égard, nous insistons sur le rapport relatant les améliorations apportées au respect de la liberté syndicale aux Philippines, grâce à l’adoption, en 2017, par les partenaires tripartites philippins et avec le soutien du Bureau de pays de l’OIT de Manille et le Schéma de préférences tarifaires généralisées (GSP+) de l’Union européenne, du Plan d’action national sur la liberté syndicale et la négociation collective (2017-2022). En vue de la mise en œuvre de ce plan d’action national, nous encourageons les partenaires tripartites des Philippines à poursuivre les efforts qu’ils ont entrepris. Nous sommes confiants que, grâce au dialogue social et au tripartisme, les Philippines seront en mesure de promouvoir un environnement propice à la liberté syndicale, y compris à la négociation collective. Enfin, nous appelons l’OIT et ses organes de contrôle à fournir, si le gouvernement le lui demande, l’assistance technique qui permettra de résoudre les questions en suspens et de faire progresser encore la liberté syndicale aux Philippines.
Membre travailleuse, Philippines – Au nom de la Nagkaisa Labor Coalition, je souhaiterais me joindre à ce que le membre travailleur des Philippines a déclaré. En outre, la situation des travailleurs des ZFE dans le pays reste aussi grave que jamais. Des syndicalistes se voient refuser l’entrée dans les ZFE. La direction harcèle les travailleurs dès que l’on parle d’organisation syndicale, et les travailleurs soupçonnés d’en faire partie sont transférés arbitrairement afin de les isoler, ou sont tout simplement licenciés. Lorsque les tribunaux ordonnent la réintégration de ces travailleurs, les employeurs ignorent systématiquement leur demande, sans aucune impunité. Dans certains cas, elle travaille même avec la police nationale des Philippines afin d’arrêter les dirigeants syndicaux pour des accusations criminelles fausses, quelques jours seulement avant les élections d’accréditation. Parmi ces fausses accusations, on citera des incendies criminels, le trafic de drogue ou des meurtres. Même si le syndicat gagne les élections d’accréditation, la direction de l’usine va parfois reconnaître toutefois que le syndicat est sous son contrôle et qu’elle négocie directement avec les salariés. Certaines usines ont même fermé leurs portes et déplacé leur production dans une société sœur située dans la même ZFE. Bien évidemment, les travailleurs et le syndicat n’ont pas de recours efficace en cas de violation de leurs droits.
Nous sommes très préoccupés de constater que, malgré les observations formulées régulièrement et les recommandations et conclusions de la mission de haut niveau, la situation se détériore. Nous ne voyons pas d’autre option que de demander qu’une mission tripartite de haut niveau soit organisée, dans l’espoir que cela aidera à faire avancer les choses afin qu’au moins certains de ces problèmes soient résolus. Il s’agirait, entre autres, mais pas exclusivement, d’enquêtes efficaces que le gouvernement pourrait mener dans le domaine de la violence antisyndicale, suivies de la poursuite et de la condamnation des coupables. L’organe de surveillance de haut niveau doit être renforcé, des ressources et les moyens nécessaires à la validation des rapports sur l’assassinat de syndicalistes et la coordination avec le CI au sujet des exterminations extrajudiciaires devant être mis à sa disposition. Les membres des forces armées qui stigmatisent les syndicalistes doivent recevoir la punition qui s’impose. Le gouvernement devrait également finir par trouver une solution aux questions législatives que nous soulevons depuis tant d’années, afin de garantir que tous les travailleurs exercent librement leur droit d’association. En outre, le gouvernement devrait modifier la loi sur les zones économiques spéciales, 1995, afin que le respect des normes du travail figure parmi les prescriptions auxquelles une entreprise doit se soumettre pour avoir accès en permanence à toutes les mesures d’incitation proposées par l’Autorité de la zone économique philippine (PEZA). Des conseils tripartites devraient être organisés régulièrement par la PEZA, dans toutes les ZFE, afin de passer en revue les réclamations et recommander des voies de réparation. Le gouvernement et les employeurs doivent également exprimer publiquement leur engagement au respect de la liberté syndicale et à la négociation collective dans les ZFE.
Les travailleurs des Philippines espèrent donc que les recommandations qu’ils ont formulées à la présente commission seront entendues et qu’une réponse leur sera trouvée le plus rapidement possible. Nous souhaiterions insister sur le fait que le projet de loi sur la sécurité de l’emploi, qui a été adopté récemment au Congrès, ne mettra pas fin à la contractualisation ni à l’emploi à durée déterminée. Ce n’est pas ce que le Président Rodrigo Roa Duterte a promis. Dans la continuité de ce qui précède, l’OIT et ses organes de contrôle sont priés de fournir l’assistance technique requise pour offrir un environnement propice qui permette aux travailleurs de bénéficier de leur liberté syndicale. Si les travailleurs ne sont pas en règle chez eux, ils ne peuvent bénéficier pleinement de leurs droits en matière de liberté syndicale.
Membre gouvernemental, Inde – Nous félicitons la délégation du gouvernement des Philippines pour avoir rempli ses obligations internationales dans le domaine du travail, y compris celles qui se rapportent à la convention, à la fois en droit et en pratique, et la remercions pour avoir fourni les données complètes les plus récentes à ce sujet. Nous prenons note avec satisfaction des améliorations significatives apportées en matière d’application de la liberté syndicale aux Philippines ces deux dernières années, soit depuis l’adoption par les partenaires tripartites philippins et avec le soutien de l’OIT du Plan d’action national sur la liberté syndicale et la négociation collective (2017-2022). Nous encourageons les partenaires tripartites des Philippines à coopérer et à collaborer mutuellement, dans un réel esprit de partenariat social, afin de créer les conditions propices à la pleine exécution du plan d’action national d’ici à 2022.
Nous sommes conscients des mesures que prend actuellement le gouvernement des Philippines, en collaboration avec ses partenaires du dialogue social, qui entraînent une baisse considérable des cas signalés de harcèlement et d’assassinats, facilitent la saisie de la justice pour les cas de violence non traités, et pour surveiller et suivre rapidement le processus de respect du droit, que garantit la Constitution, à un procès rapide et équitable, en offrant aux témoins une protection suffisante et en renforçant les capacités du ministère public, des organes chargés de l’application des lois et d’autres acteurs concernés. En outre, les efforts que le gouvernement des Philippines ne cesse de déployer face aux questions émergentes relatives au travail, et ses diverses initiatives pour promouvoir la liberté syndicale et la négociation collective, qui sont ancrées dans le principe selon lequel la sécurité de l’emploi est le meilleur environnement propice à la liberté syndicale, lequel est inscrit dans le programme législatif progressif, valent la peine d’être notés. Nous prions instamment l’OIT et ses mandants de soutenir pleinement le gouvernement des Philippines dans ses efforts visant à s’acquitter de ses obligations en matière de travail, et de lui offrir toute assistance technique qu’il pourrait solliciter. Enfin, nous saisissons cette occasion pour souhaiter au gouvernement philippin un franc succès dans les efforts qu’il déploie.
Observatrice, Confédération syndicale internationale (CSI) – Je soutiens nos travailleurs courageux des Philippines et remercie les employeurs et les gouvernements qui ont instamment prié les Philippines d’agir conformément aux recommandations de la mission de contacts directs et du Comité de la liberté syndicale.
En lançant aujourd’hui l’indice des droits dans le monde de la CSI, je ne peux que déplorer le fait que les Philippines font encore partie des dix pires pays du monde pour les travailleurs. Elles en faisaient déjà partie en 2017, 2018 et 2019, pour des faits de violence et des assassinats, une répression brutale des manifestations publiques, et des lois répressives. Vous avez entendu que, dans la seule année 2018, dix syndicalistes ont été assassinés parmi d’autres exécutions extrajudiciaires, et nous déplorons déjà deux assassinats similaires cette année. Je peux d’ores et déjà vous dire qu’une culture de la peur est déjà palpable dans le pays, à mesure que la culture de l’impunité se développe. Vous avez entendu que le CI ne fonctionne pas, avec un record difficile à imaginer de seulement un cas d’une procédure donnant lieu à une condamnation. Effectivement, lorsque les conseils tripartites pour la paix sociale, nationaux et régionaux, ne disposent d’aucune autorité d’investigation ni de ministère public, cela ne peut pas fonctionner.
Etant donné l’ingérence de l’armée et de la police dans les relations professionnelles, la présence militaire sur les lieux de travail, les grèves, les recherches au porte-à-porte de dirigeants syndicaux, l’enlèvement, le harcèlement de villageois pour qu’il quittent leur syndicat, les charges de l’industrie manufacturière à l’encontre de dirigeants syndicaux, dont j’ai personnellement entendu parler, tout nous montre qu’il ne s’agit pas là d’un pays qui respecte les droits fondamentaux des travailleurs, pas même des employeurs. La vague de nouvelles grèves, de grèves sur le tas, de négociations dans l’impasse, de licenciements massifs en 2018 est pour nous un moyen de répondre à l’oppression et à l’échec de ce qu’affirme le Président, à savoir qu’il a régularisé la contractualisation illégale et oppressive dans le pays. L’actuel projet de loi sur la sécurité de l’emploi ne va pas résoudre le problème que posent les contrats de courte durée, qui relèvent de l’exploitation; ce ne sont pas les promesses du Président qui vont permettre de mettre fin aux modalités de travail précaires et déshumanisantes qui accompagnent cette pratique.
Je me suis rendue dans les lieux où se trouvaient les chaînes de distribution, et je demande aux gouvernements et aux employeurs de comprendre l’exploitation déshumanisante de ces dernières dans des lieux de travail où les travailleurs travaillent, par l’intermédiaire de petites et moyennes entreprises, pour certaines des multinationales les plus riches au monde. La diligence n’existe pas dans ces situations, je peux vous l’assurer, et le gouvernement n’a recours à aucune sanction pour de telles pratiques. Quand une femme a peur pour son fils de 12 ans, qu’elle n’a pas de soutien familial, qu’elle est obligée de faire au tout dernier moment des heures supplémentaires jusqu’à 22 heures, minuit ou 2 heures du matin, sans même avoir de quoi se nourrir, aucun bon de repas à la cantine, qui ouvre à 6 heures du matin, ne lui ayant été délivré, cet état de fait a nécessairement un impact sur elle-même et sur sa situation familiale, ce qui fait peur. Il est vrai qu’après m’être rendue au domicile de ces travailleurs, hommes, femmes ou enfants, qui ont été licenciés par nos multinationales, parmi les plus riches, pour avoir tenté de se défendre et de s’organiser collectivement en vue d’une augmentation du salaire minimum, qui leur permettrait de vivre avec dignité, je ne peux alors que vous affirmer que, lorsque le salaire d’une journée équivaut à une semaine de lait maternisé pour un enfant, le salaire de deux journées à deux semaines, etc., alors, on ne peut parler d’un pays qui respecte les droits des travailleurs.
Et, pour conclure, je ne saurais quitter cette salle sans avoir attiré l’attention sur le fait que les actions d’un pays qui exploite les migrants, tout en ayant recours aux droits des travailleurs dans d’autres pays, pour continuer à exclure du bénéfice de la liberté syndicale des catégories de travailleurs étrangers et autres, relèvent d’un acte d’hypocrisie. Nous ne pouvons dire qu’une chose à la présente commission: qu’avec le soutien de l’OIT, le gouvernement des Philippines parvienne à régulariser la législation et mette un terme à la culture de la peur et de l’impunité.
Observateur, Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) – L’IBB exprime sa préoccupation devant les cas flagrants de violation des droits des travailleurs aux Philippines. Les fondations internationales des droits au travail continuent à être impunément bafouées, par le biais de mesures subtiles menées aussi bien par les directions d’entreprises que par le gouvernement, avec recours à la violence pour laquelle les auteurs n’ont jamais été traduits en justice. Le meurtre n’a pas sa place dans les relations professionnelles; la vie des travailleurs ne devrait pas être sacrifiée dans l’exercice de leurs droits. C’est là le principal message que nous adressons à la commission. La dernière victime de ces attaques meurtrières est Dennis Sequeña, qui organisait un séminaire sur les syndicats fondamentaux à l’attention des travailleurs. Dennis Sequeña n’était pas seulement l’unique dirigeant d’un syndicat donné, il était aussi un mari et un père. Dennis Sequeña n’était pas seulement un nom. Nonoy Palma, exploitant agricole du sud des Philippines, a été tué à son domicile. Orlando, syndicaliste local à Cebu, a été assassiné alors qu’il organisait un séminaire syndical. Ryan, Nelly, Villegas, Angelipe, Peter, Dodong, Morena, Dumaguit, Bingbing, Jomarie. Au moins 43 syndicalistes et défenseurs des droits au travail ont été assassinés sous l’administration de Duterte. Je compte sur vous pour vous souvenir de ces noms, qui sont ceux de travailleurs et de syndicalistes engagés, comme beaucoup d’entre nous dans cette salle. Inutile de rappeler année après année les mêmes statistiques. Il s’agissait de personnes qui croyaient au travail et à la lutte pour un monde meilleur, pour eux-mêmes et pour leurs familles. Les meurtres doivent cesser. C’en est assez maintenant.
De nombreuses indignations et condamnations publiques ont eu lieu, aussi bien à l’intérieur des Philippines que dans le monde, suscitées par les exécutions extrajudiciaires de citoyens ordinaires. Au moins 33 personnes sont tuées chaque jour aux Philippines. Selon la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, on peut estimer à au moins 20 000 le nombre de personnes qui ont été tuées depuis la mi-2016 dans le cadre de la campagne du gouvernement sur les drogues illicites. Cela est une guerre contre les pauvres et contre les travailleurs. Nous en portons la responsabilité morale. Combien d’autres sessions de la commission devrons-nous avoir avant que nous commencions à traiter cette question? Combien de réunions tripartites supplémentaires devons-nous convoquer avant que des mesures soient prises pour mettre fin à ces meurtres? Combien de discours supplémentaires devons-nous donner avant que les voix des familles qui demandent réparation soient entendues? Nous pouvons toujours exprimer notre profonde préoccupation face aux déclarations et aux rapports mais, selon moi, il est temps que la force morale de l’OIT se transforme réellement en force de la justice. Nous ne parviendrons jamais à construire un avenir de travail décent si les nombreux cas de violation et d’attaques à l’encontre des syndicalistes ne sont pas réglés. Comme je l’ai dit plus haut, c’en est assez maintenant. Il est temps d’agir.
Observateur, Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) – Le CI, créé conformément à l’ordonnance administrative 35 (AO35) n’a vérifié que 11 cas d’exécutions extrajudiciaires de syndicalistes sur les 65 cas sur lesquels il a enquêté. Nous avons de sérieuses préoccupations quant aux critères fournis au titre de l’AO35 pour déterminer les exécutions extrajudiciaires. Pour illustrer cela, permettez-moi de partager l’exemple d’un cas actif. La commission a été précédemment informée des meurtres d’Antonio Petalcorin et d’Emiliano Rivera – qui étaient tous les deux des dirigeants de syndicats de transporteurs affiliés à l’ITF. Le 28 novembre 2012, MM. Petalcorin et Rivera ont déposé une plainte auprès de l’Ombudsman national contre le directeur du Bureau des transports, l’accusant de corruption. A peine deux mois plus tard, le 23 janvier 2013, M. Rivera a été assassiné par des assaillants inconnus près du Bureau des transports. Le 2 juillet 2013, M. Petalcorin a été tué de trois balles dans le torse alors qu’il se dirigeait vers le Bureau des transports. Il est évident qu’ils étaient la cible de forces proches des autorités en raison de leurs activités syndicales, dont des tentatives de lutte contre la corruption. Pourtant, le CI a jugé que ces cas ne répondaient pas aux critères d’exterminations extrajudiciaires. C’est pourquoi il est impératif que le gouvernement veille à ce que les critères utilisés par le CI pour sélectionner les cas soient plus larges que les critères judiciaires utilisés par le gouvernement, de façon à ne pas exclure indûment d’éventuels cas de liberté syndicale et de garantir que les activités syndicales donnent lieu à un examen approfondi de la motivation éventuelle du crime ou de l’assassinat. Nous devons aussi souligner la nécessité d’identifier rapidement les auteurs de violence à l’encontre de syndicalistes et les traduire en justice afin de lutter contre l’impunité, même lorsque ces cas relèvent de la loi pénale ordinaire. Voilà six ans que les familles de M. Rivera et de M. Petalcorin attendent que justice soit faite.
Je souhaite m’exprimer très rapidement au sujet d’un second point. Il s’agit du fait que, bien que la commission d’experts ait traité de la question de l’application des articles 279 et 287 du Code du travail concernant l’assimilation d’une action collective à un acte criminel, un autre texte législatif a également été utilisé récemment pour qu’une même assimilation soit faite dans le cas des grèves. En décembre 2017, M. George San Mateo, dirigeant du syndicat PISTON affilié à l’ITF, a été arrêté en application d’une loi datant de la seconde guerre mondiale pour avoir soutenu le droit des travailleurs des transports à engager une action collective. M. San Mateo a été accusé de violer l’article 20(k) de la loi de 1946 du Commonwealth en donnant en toute connaissance de cause et volontairement des instructions aux membres de son syndicat pour qu’ils organisent une grève nationale. Le recours à des arrestations en lien avec l’organisation d’une grève pacifique constitue une menace grave à la liberté syndicale. Le gouvernement devrait désormais passer en revue toute la législation pertinente afin de garantir qu’aucune sanction pénale ne soit imposée à l’encontre d’un travailleur au motif qu’il a organisé ou mené une grève pacifique.
Observateur, Internationale de l’éducation (IE) – Je me présente en tant que secrétaire général du Syndicat des secteurs de l’éducation du Botswana, et je m’exprime aujourd’hui au nom de l’IE et de l’Alliance des enseignants concernés (ACT) des Philippines. J’aimerais dénoncer les atteintes aux droits du travail subies par des enseignants d’écoles publiques et privées, portant en particulier sur: la collecte illégale de données concernant l’affiliation à un syndicat d’enseignants afin d’analyser les données des membres de l’ACT; puis le fait de traiter l’ACT d’organisation «terroriste» et de harceler et menacer les membres et les dirigeants de cette alliance. En décembre 2018, la police a commencé à visiter des écoles afin de s’enquérir au sujet des membres de l’ACT, en demandant les listes de membres syndicaux et enquêtant sur certains d’entre eux en particulier. Une fuite de memoranda «confidentiels» de la police a montré que l’ordre de recueillir des données sur les syndicalistes émanait de la Direction du service de renseignement de la police. La collecte des données concernant les membres syndicaux et l’établissement de leur profil a été suivi peu après par des actes de discrimination antisyndicale. Des membres et des dirigeants de l’ACT à l’échelle locale et nationale ont été suivis, harcelés, ont subi des actes d’intimidation et reçu des messages écrits ainsi que des appels contenant des menaces. A ce jour, le syndicat des enseignants a étudié 45 cas de ce type dans 10 des 17 régions que comptent les Philippines, parmi lesquels on citera les menaces de mort que le secrétaire général de l’ACT, M. Raymond Basilio, a reçues sur son téléphone portable pendant une conférence de presse de l’ACT. Le secrétaire général de l’ACT ne peut pas passer deux nuits consécutives au même endroit et doit changer régulièrement de téléphone portable. Le gouvernement refuse de reconnaître avoir ordonné le profilage de membres syndicaux mais, en même temps, il admet que la collecte de renseignements fait partie de ses opérations contre le crime et le terrorisme. Il accuse l’ACT d’être une organisation de façade pour le parti communiste des Philippines et de recruter pour la Nouvelle armée du peuple. Cette étiquette de communiste donnée à l’ACT, qui vise aussi d’autres organisations et d’autres personnes critiques envers le gouvernement, est encore aujourd’hui une réalité. A cause de ce climat antisyndical, des enseignants d’écoles publiques et privées craignent pour leur liberté et leur sécurité, en particulier depuis que leurs syndicats et leurs organisations sont catalogués, sans données légales ou factuelles, comme des «rebelles», des «communistes» ou des «terroristes» – donc des «ennemis de l’Etat». Ces violations freinent les enseignants dans leur volonté d’exercer leur droit de constituer des syndicats et d’y adhérer, et de bénéficier des droits à la négociation, à la liberté de réunion et à la liberté d’expression qui lui sont attachés. Ceci équivaut à une ingérence du gouvernement dans les activités syndicales, de même qu’à de la discrimination et de la répression. J’ai bon espoir que la présente commission adoptera des recommandations en faveur de ce cas.
Membre travailleuse, Finlande – M’exprimant au nom des pays nordiques, je souhaiterais exprimer la profonde inquiétude que nous inspire la situation aux Philippines, où la violation de la liberté syndicale continue à constituer un problème grave. Nous sommes aussi préoccupés de la violence et du harcèlement que subissent les militants syndicaux, de même que de l’étiquette de «militants rouges» et de l’assassinat de dirigeants syndicaux. Apparemment, le gouvernement n’a rien fait pour mener des enquêtes sur ces cas et traduire leurs auteurs en justice. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de continuer de prendre des mesures afin d’assurer un climat de justice et de sécurité pour les syndicalistes philippins. Nous regrettons d’avoir à constater que de nouveaux assassinats de dirigeants syndicaux ont eu lieu – par exemple l’assassinat récent de Dennis Sequeña –, qui montrent que les mesures gouvernementales n’ont pas été suffisantes. Si l’on en croit les données du Centre des droits syndicaux, Dennis Sequeña est le 43e travailleur à avoir été assassiné depuis que M. Duterte a pris le pouvoir en 2016. Un élément important qui montre que les représentants syndicaux sont susceptibles de servir de cibles est le fait que les forces armées des Philippines continuent à considérer une idéologie particulière comme étant l’ennemi de l’Etat. C’est pour cette raison que le fait de coller une étiquette de «militants rouges», ce qui vient s’ajouter à d’autres actes de violence et de harcèlement, est en passe de devenir une pratique mortelle qu’il convient d’arrêter.
En vertu de l’article 2 de la convention, les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. Comme le Comité de la liberté syndicale l’affirme dans bon nombre de ses décisions, «un climat de violence, de menaces et d’intimidation à l’encontre des dirigeants syndicaux et de leurs familles ne favorise pas le libre exercice et la pleine jouissance des droits et libertés garantis par les conventions nos 87 et 98. Tous les Etats ont le devoir indéniable de promouvoir et de défendre un climat social où le respect de la loi règne en tant que seul moyen de garantir et de respecter la vie.»
Nous prions instamment le gouvernement de faire preuve de sa véritable volonté de prendre toutes les mesures nécessaires pour résoudre cette situation alarmante. Tous les cas allégués encore en suspens relatant une violation des droits syndicaux et le décès de syndicalistes devront faire l’objet d’enquêtes appropriées et de mesures efficaces afin de garantir que les responsabilités ont bien été définies.
Observatrice, IndustriALL Global Union – M’exprimant au nom d’IndustriALL Global Union (qui représente 50 millions de travailleurs dans le monde), je souhaiterais faire part de notre extrême préoccupation suite aux rapports que nous avons reçus de nos adhérents aux Philippines, indiquant qu’ils sont étiquetés en tant que militants rouges, et qui signalent des cas très récents de violation des droits des travailleurs et des syndicats d’exercer simplement leur droit syndical. Parmi ces cas, nous pouvons citer les suivants.
- Juste après que la direction et le Syndicat des travailleurs SPI ont trouvé un accord, en novembre 2018, sur la question de fermetures illégales, la direction a déposé plainte contre 52 dirigeants syndicaux et membres de la SMT, accusant ces travailleurs de coercition grave, de violation de droits et de comportements malicieux. Le cas a été débouté par la justice en avril, mais la direction a fait appel de cette décision en mai 2019. Les travailleurs ont aujourd’hui présenté leur déclaration sous serment et l’affaire est actuellement en cours.
- Dans une autre entreprise, en janvier 2019, la majorité des travailleurs titulaires de contrats de longue durée d’une manufacture, qui ont demandé à adhérer à un syndicat, ont été acceptés. L’entreprise a alors commencé à les harceler et a renvoyé illégalement 52 d’entre eux qui ont participé aux célébrations du 1er mai. Le 3 juin 2019, 22 autres travailleurs, dont 9 dirigeants syndicaux, ont eux aussi été licenciés illégalement.
- A nouveau dans une autre entreprise, le 22 avril 2019, alors que les travailleurs s’organisaient depuis 2018, la direction a licencié de force 27 travailleurs, dont tous les dirigeants syndicaux. Les travailleurs ont continué à enregistrer leur syndicat, le 29 avril 2019, même si la veille la direction a déposé une plainte pour insubordination à l’encontre de 200 travailleurs, dans le but de les empêcher de participer à l’assemblée générale de leur syndicat. Six autres travailleurs, dont trois dirigeants, ont été préventivement suspendus de leurs fonctions en mai dernier.
- Le président d’un syndicat, M. Eugenio Garcia, a été arrêté à partir de preuves établies, après que la police a effectué un mandat de perquisition au domicile de M. Garcia, le soir du 18 mars 2019. La police de Pasig affirme que M. Garcia était en possession d’un pistolet 9 mm, alors que celui-ci avait en fait été déposé par les policiers lors de leur soi-disant recherche. L’émission du mandat de perquisition et l’arrestation illégale ont eu lieu précisément le jour où le syndicat annonçait l’instauration de sa convention collective.
- Le mandat de perquisition de la résidence de M. Ricky Chavez, le 20 mars 2019, a été émis et exécuté par 50 membres de la police nationale des Philippines, à bord de dix véhicules, à la recherche de ce dirigeant. Seule sa femme était là car, avant le début des recherches, M. Chavez était allé participer à une protestation de son syndicat, qui se déroulait à la G.T. International Tower, à Makati, afin de commémorer le 18e anniversaire de leur lutte. M. Chavez fait partie des 233 syndicalistes qui ont été illégalement licenciés en 2001 de l’usine du géant automobile.
La semaine dernière, dans la zone industrielle de Cavite, des centaines de personnes ont participé à une marche lors des funérailles de la membre de parti et organisatrice syndicale de ZFE, Mme Ka Dennis Sequeña, qui a été tuée par balle le 6 juin alors qu’elle donnait un cours sur les syndicats. Suite à cet assassinat, nous prenons à notre compte la déclaration de la Sénatrice Risa Hontiveros, selon laquelle: «le droit de nos travailleurs à s’organiser, à défendre leur qualité de vie, ne devrait pas s’exercer au prix de leur liberté et, encore plus important, de leur vie». Si nécessaire, nous tenons à la disposition de la commission les noms des travailleurs licenciés et des entreprises concernées.
Observatrice, Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) – Ce à quoi il est fait largement référence aux Philippines comme étant la «contractualisation» est une pratique fondée sur le déni de la liberté syndicale et du droit de négociation collective tels qu’établis dans la présente convention et dans la convention no 98. Il est approprié et nécessaire que nous abordions la question dans ces termes lors d’une réunion d’examen de la commission. La travailleuse «contractualisée», précaire, se voit refuser son droit à mener des négociations collectives avec l’entreprise, ou l’organisme d’Etat, qui gère le système, mais n’a pour autant aucune responsabilité ni aucune responsabilité juridique de rendre compte auprès du travailleur. Il s’agit là d’un déni de droits massif, fondé sur ce que l’OIT appelle une «relation de travail déguisée» dans la recommandation (nº 198) sur la relation de travail, 2006. De toute évidence, le gouvernement des Philippines ne parvient pas à faire respecter l’application des conventions nos 87 et 98, et cette situation prend d’autant plus d’ampleur que les employeurs ont recours de plus en plus à des relations de travail indirectes, avec l’intervention d’une tierce personne. Dans les secteurs de l’UITA, un exemple parlant est celui de l’échec du gouvernement à instaurer une ordonnance du Département du travail et de l’emploi visant la régularisation de 6 400 travailleurs dans une chaîne de restauration rapide.
Le Comité de la liberté syndicale, dans sa réponse à notre plainte no 3236 concernant un conflit grave dans le secteur des fruits de mer, notait que plus de quatre ans se sont écoulés sans qu’il y ait eu d’action significative de la part du gouvernement en réponse aux allégations de licenciements massifs qui ont suivi les efforts qu’avaient déployés les travailleurs pour s’organiser et adhérer à un syndicat. Nous notons qu’aucune suite n’a été donnée aux recommandations de 2016 de la commission.
De la même manière, le problème de la corruption devrait être examiné dans les cadres des droits spécifiques traités aux conventions nos 87 et 98. Les travailleurs et leurs syndicats ont droit à une procédure administrative et judiciaire juste, transparente, impartiale et rapide. Il est porté atteinte à ce droit à cause des retards de procédure et de préjugés clairement ancrés dans la corruption, dont la conséquence est que les travailleurs ne peuvent bénéficier de leurs droits.
Des exécutions extrajudiciaires, y compris l’assassinat de membres et de dirigeants syndicaux, et l’impunité judicaire ont des impacts multiples sur les droits, à commencer par leur impact sur la capacité des travailleurs à accéder à leurs droits syndicaux. Le Comité sur la liberté syndicale a déclaré, en sous-estimant un peu les choses, qu’un climat de violence, de coercition et de menaces de tous types, visant des dirigeants syndicaux et leurs familles, ne favorise pas le libre exercice et la pleine jouissance des droits et libertés établis dans les conventions n° 87 et 98. Le meurtre est l’ultime menace. La lutte contre la corruption et l’impunité est un combat destiné à assurer le respect de la convention et de la convention no 98.
Membre travailleuse, République de Corée – En 2016, je me suis exprimée au nom des travailleurs coréens au sujet du non-respect chronique de la liberté syndicale dans les ZFE, en illustrant mes propos d’exemples qui se sont produits dans des entreprises coréennes situées à Cavite et à Laguna. Depuis, rien n’a changé et, jusqu’à ce jour, la liberté syndicale est systématiquement bafouée dans les zones. Malheureusement, la PEZA fait preuve de négligence dans la sauvegarde et la promotion du droit de liberté syndicale. En voici quelques exemples clairs: dans une fabrique de vêtements coréenne, appelée Dong Seung, qui se trouve dans la ZFE de Cavite, la direction a suspendu pour trente jours, à la mi-2018, tous les 16 dirigeants syndicaux, prétextant qu’ils s’en prenaient à l’entreprise en sollicitant des actions auprès de marques de vêtements mondiales qui sont leurs clients, en matière de violation de la liberté syndicale et de normes de travail. Cette suspension massive fait suite au harcèlement de travailleurs qui ont adhéré au syndicat ou lui apportent leur soutien. Les syndicalistes ne peuvent bénéficier de prêts et sont transférés à des chaînes de production différentes pour qu’ils soient rétrogradés des postes de mécaniciens à des postes dans la couture. Dans une autre usine coréenne située elle aussi dans la ZFE de Cavite EPZ, les travailleurs ont commencé à créer des syndicats en 2017. Les dirigeants syndicaux qui ont été identifiés ont tous été transférés d’une chaîne de production à une autre afin qu’ils soient séparés des autres travailleurs. L’entreprise a interrompu l’élection d’accréditation d’un syndicat en organisant une grande réunion de travailleurs dans la ZFE de Cavite afin de faire campagne contre le vote en faveur du syndicat. Le syndicat a perdu l’élection. Mais, pour finir d’écraser le syndicat, l’entreprise a fermé et les travailleurs ont été suspectés de détourner les commandes vers les entreprises sœurs. La fermeture avait donc bien pour motif de harceler les membres syndicaux. Dans la troisième usine coréenne, dès que la direction a appris que les travailleurs étaient en train de se syndiquer, elle a commencé à menacer et à harceler les membres et les dirigeants syndicaux. Elle a annoncé aux travailleurs que l’usine allait fermer s’ils votaient oui à leur syndicat, de sorte que ce dernier a perdu leur élection d’accréditation. Dans des cas extrêmes, les syndicalistes sont assassinés afin de mettre un terme à une campagne de recrutement syndical. Le meurtre de Dennis Sequeña dont le porte-parole des travailleurs faisait état semblerait être en lien avec trois initiatives syndicales prises ces quelques mois dans une entreprise syndicale. La priorité que le gouvernement donne aux droits des investisseurs, parfois même au détriment des droits des travailleurs et des syndicats, est la cause profonde qui explique la violation chronique de la liberté syndicale dans les ZFE. Il convient donc de poursuivre les efforts faits en matière de législation, y compris l’amendement à apporter à la loi de 1995 sur les zones économiques spéciales, afin d’inscrire le respect des normes du travail en tant que prescription pour que l’entreprise puisse continuer à avoir accès aux mesures d’incitation qu’offre la PEZA.
Membre travailleuse, Japon – Comme le rapport de la commission d’experts l’indiquait clairement, de nombreuses législations en suspens et de modifications de lois n’ont pas progressé, ce qui révèle que la volonté du gouvernement de mettre en application la convention que son pays a ratifiée en 1953 est faible ou inexistante. Parmi les législations en suspens, on citera par exemple: l’article 240(c) du Code du travail, visant à abaisser à 20 pour cent les inscriptions requises pour créer un syndicat; l’article 278(g) du Code du travail visant à restreindre l’intervention du gouvernement conduisant à l’arbitrage obligatoire aux seuls services essentiels; les articles 279 et 287 du Code du travail, visant à n’imposer aucune sanction pénale à l’encontre d’un travailleur qui a organisé une grève pacifique; et les articles 284 et 287 du Code du travail, visant à accorder le droit d’organisation à tous les travailleurs résidant aux Philippines, y compris les travailleurs étrangers. Il est regrettable de constater que, en dépit des promesses faites par le gouvernement, aucun progrès n’a été fait concernant le nombre important de législations encore en suspens, et que la convention n’est toujours pas appliquée, ce qui a entraîné de nombreux problèmes graves dans les activités syndicales, y compris le meurtre de syndicalistes. Je me dois aussi de mentionner la question de la contractualisation, qui est un obstacle majeur à l’exercice de la liberté syndicale, dans le secteur privé comme dans le secteur public. Malgré tout le battage fait par le Département du travail et de l’emploi autour des réformes, aucun de ses efforts n’a permis de réduire la prévalence de la contractualisation dans le pays. Le gouvernement a pris plusieurs mesures législatives pour réduire la contractualisation, à savoir l’ordonnance no 174-17, du Département du travail, publié le 16 mars 2017, et l’ordonnance exécutive no 51 de mai 2018. Même le projet de loi sur la sécurité de l’emploi adopté par le Congrès ne mettra pas un terme aux contrats «endo» (fin de contrat), qui est une pratique de travail abusive par laquelle le travailleur est embauché pour une période pouvant aller jusqu’à cinq mois pour contourner une loi du travail qui accorde le statut de permanent après six mois de service. Endo est un type de contrat si mauvais qu’il convient de le dénoncer dans les termes les plus forts possible. La contractualisation continuera à constituer la principale raison pour laquelle la grande majorité des travailleurs philippins ne peuvent pas exercer leur droit de liberté syndicale et de négociation collective.
A nouveau, j’aimerais demander au gouvernement philippin de prendre des mesures immédiates afin de modifier le Code du travail conformément à la convention, en particulier en ce qui concerne les prescriptions strictes sur l’enregistrement des syndicats et la pénalisation de grèves pacifiques, pour ne nommer qu’elles, et l’adoption d’une loi qui renforcera la sécurité de l’emploi en interdisant l’emploi à durée déterminée pour les travailleurs aussi bien du secteur public que du secteur privé. De nombreuses allégations dont il est fait état montrent à quel point la situation aux Philippines est grave. C’est pourquoi des mesures concrètes et immédiates s’imposent.
Membre travailleuse, Canada – Je m’exprime aujourd’hui au nom des travailleurs du Canada, des Etats-Unis et de l’Argentine. Les Philippines sont souvent décrites comme étant la «capitale mondiale des centres d’appel», dans la mesure où des centaines de consortiums américains et d’autres multinationales dépendent des Philippins pour assurer leurs services à la clientèle. Ce vaste secteur, connu comme étant l’industrie d’externalisation des fonctions d’entreprise, est la deuxième source de revenus la plus importante pour le pays, employant plus de 1,3 million de personnes et générant plus de 22 milliards de dollars E.-U. de revenus par an. En termes de contributions à l’économie nationale, un tel montant ne peut être comparé qu’à ceux que les travailleurs à l’étranger envoient dans le pays. Le gouvernement offre également le service d’opérateurs de centres de contacts basés à l’étranger, qui a commencé à fonctionner grâce aux exemptions fiscales coopératives sur plusieurs années, lesquelles sont généreuses. Il est bon que ces travailleurs puissent trouver du travail chez eux, mais le travail doit être conforme à la convention, que les Philippines ont ratifiée. Les travailleurs de ce secteur, qui est tellement indispensable pour l’économie du pays, sont confrontés à des défis, en loi comme en pratique, qui sont susceptibles effectivement de mettre en cause leur droit syndical, leur droit d’organiser leurs activités et leur liberté de mettre au point des programmes. Ceci est particulièrement vrai ces dernières années où ils ont souvent dû faire face à un climat hostile dans l’exercice de la liberté syndicale, recevant des menaces exprimées à leur encontre et faisant l’objet, ce qui est plus que courant, de fausses accusations pour avoir annoncé leur intention de participer à des grèves pacifiques et légales. Les menaces à l’encontre de travailleurs s’organisant dans le secteur relevaient de harcèlement à la fois par le biais du système juridique et par des menaces de violence bel et bien mises à exécution aux Philippines. Les employeurs multinationaux les plus importants fonctionnent dans ce climat de répression qui est, à court terme, à leur avantage. En 2018, de même que cette année, un groupe de travailleurs, qui a légalement enregistré son syndicat en 2015, a subi à plusieurs reprises une répression de ses droits. En septembre 2018, ces travailleurs ont déposé un avis de grève en réponse à un démantèlement syndical qu’ils ont subi. Alors qu’ils essayaient de négocier, plusieurs actions de protestation ont été prises, auxquelles la direction a rétorqué en renvoyant des travailleurs et en déposant des fausses plaintes à l’encontre du syndicat et de ses alliés. Bien que certaines de ces charges aient été abandonnées en mars de cette année, à ce jour, celles qui concernent des éventuelles diffamations graves déposées par l’employeur à l’encontre de dirigeants syndicaux sont toujours en suspens. Même s’ils sont moins discutés que dans le domaine de la fabrication, les chaînes d’approvisionnement mondiales et les services qui les accompagnent doivent eux aussi être conformes aux normes internationales et tenir compte du travail décent, car il est possible que des emplois soient déplacés de pays où les travailleurs avaient peut-être la possibilité de s’organiser et de négocier collectivement vers des pays où il leur était devenu difficile d’exercer leurs droits en raison d’environnements hostiles, de menaces et de violence qui limitent la loi. Les Philippines s’inscrivent parmi ces pays très recherchés pour les centres d’appel et autres secteurs à forte externalisation des processus opérationnels et, pour tous ces domaines, le travail décent doit être assuré.
Les actions susmentionnées ont toutes été prises à l’encontre de travailleurs tentant d’exercer leur droit syndical dans Alorica, basée aux Etats-Unis, qui est la troisième plus grande entreprise de centres d’appel du monde et qui fournit ses services depuis les Philippines aux principales multinationales américaines, européennes et asiatiques. Un pays ne peut envisager un développement durable fondé sur une industrie qui reçoit des avantages fiscaux importants, mais nie régulièrement les droits des travailleurs.
Représentant gouvernemental – Nous nous félicitons de la possibilité qui nous est donnée ici de rendre compte à la commission des travaux des partenaires tripartites philippins en application de la recommandation de la mission de contacts directs de 2017 prévue par le Plan national sur la liberté syndicale et la négociation collective (2017-2022).
Les Philippines accueillent avec satisfaction les observations et points de vue des travailleurs et des employeurs, ainsi que des gouvernements, dont l’intention est que nous poursuivions notre application de la disposition de la convention en droit et dans la pratique. Nous voudrions toutefois clarifier certains points. Premièrement, les Philippines sont un bon endroit pour la liberté d’association. Nous n’appartenons pas à cette liste des pires pays pour les travailleurs. Notre bureau, en particulier le mien, est même un lieu régulier de manifestations et de grèves, mais aussi de consultations exhaustives, franches et significatives avec les travailleurs et les employeurs. L’assertion quant à l’impunité présumée revient à une quasi-déclaration générale qui ne reflète pas la situation d’ensemble aux Philippines. Bien qu’il puisse y avoir des cas de violation des normes relatives aux droits des travailleurs, ils peuvent être considérés comme des cas isolés car ils ne reflètent pas la situation réelle dans le pays. Et prétendre que rien n’a changé depuis 2016, c’est fermer les yeux sur la jouissance substantielle des libertés par les syndicats et les travailleurs philippins au cours des trois dernières années.
Contrairement à ce que l’on prétend, il n’y a pas eu 43 nouveaux cas de décès de syndicalistes aux Philippines sous cette administration. Aussi notre représentation demande-t-elle respectueusement qu’on lui présente la liste des 43 cas signalés. Nous apprécierions beaucoup de pouvoir disposer d’une liste pour être en mesure de répondre à la question qui nous est posée. Le gouvernement philippin condamne le décès de Dennis Sequeña. Du fait du poste que j’occupe, je le connaissais personnellement. Leur président est un de mes amis. Pour mémoire, ce cas particulier ne fait pas partie du rapport. Par conséquent, nous n’étions pas tenus de fournir à l’avance des renseignements détaillés. Mais puisque son cas a déjà été mentionné, nous souhaiterions informer la commission que les mécanismes de surveillance et d’enquête existants ont déjà été lancés. Le jour même de l’incident, le 2 juin 2019, un dimanche, le Secrétariat du NTIPC-MB, en coordination avec l’Organe de surveillance tripartite régional de la région 4A, a été immédiatement dépêché sur place pour recueillir des informations sur le cas. Son rapport est en cours d’élaboration et sera soumis pour examen à l’Organe de surveillance tripartite régional avant d’être approuvé par l’Organe de surveillance tripartite national. Entre-temps, l’enquête pénale a déjà commencé. A ce stade, permettez-moi de réaffirmer que l’environnement le plus propice au libre et plein exercice des libertés dans notre pays est un emploi sûr, des conditions de travail sûres et saines dans tous les lieux de travail, exempts de violence et de harcèlement.
En ce qui concerne la question de la violence et du harcèlement contre des syndicalistes, permettez-moi de répéter qu’il n’y a pas d’augmentation de cas de décès de syndicalistes dans notre pays. Selon les constatations, ce nombre va en décroissant. La question des condamnations est cependant restée un grave problème récurrent dans tous les cas, compte tenu de l’absence ou de l’insuffisance des preuves, en particulier dans un contexte où, dans notre juridiction, tout comme peut-être dans la vôtre, le nombre de preuves nécessaires pour condamner les auteurs de crimes doit permettre de statuer hors de tout doute raisonnable, conformément à des procédures rigides normalisées, étant donné que tout accusé a le droit, garanti dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, d’être présumé innocent. Ce problème n’est pourtant pas insurmontable. Nous avons juste besoin d’un soutien important sur cet aspect. Il convient également de rappeler que l’année dernière, un tribunal philippin a condamné un général à la retraite de l’armée et lui a infligé, ainsi qu’à deux autres personnes, une peine de quarante ans de détention. D’autres condamnations similaires sont là pour démontrer que, lorsqu’il y a suffisamment de preuves, nul de peut jamais jouir de l’impunité. Il nous semble parfaitement opportun de mentionner ici que les Philippines prennent note du Report on Addressing Impunity: A Review of the Three Monitoring Mechanisms (Rapport sur la lutte contre l’impunité: examen des trois dispositifs de surveillance), publié en avril 2019 par le Bureau de pays de l’OIT à Manille. Nous prenons sa conclusion et sa recommandation à la lettre et très au sérieux. Nous avons reconnu que les trois dispositifs de surveillance existants ont leurs propres points forts et points faibles. Leurs mandats, leurs structures et leurs règles internes doivent être revus. Il est intéressant de noter que, compte tenu de la recommandation du rapport publié en avril 2019, l’élaboration et la mise en œuvre de modules de plaidoyer pour la liberté d’association sont en cours. La prescription de modules sur la liberté d’association dans les subventions au titre du Programme de développement des organisations de travailleurs peut être envisagée. L’intensification des activités du système de contrôle du respect des normes internationales du travail, y compris en ce qui concerne la liberté d’association, se poursuivra. L’ordonnance administrative no 35 doit être renforcée en garantissant l’ouverture et la transparence des poursuites ainsi que les délocalisations pour les affaires d’exécutions extrajudiciaires, en adoptant un critère inclusif dans l’examen de ces affaires, eu égard notamment à l’exercice de la liberté d’association, en renforçant les capacités en matière de liberté d’association et les capacités de collecte de preuves physiques et médico-légales essentielles pour éviter de trop devoir s’appuyer sur des preuves testimoniales.
En ce qui concerne les questions législatives, la pleine utilisation des ressources gouvernementales pour accélérer l’adoption d’une réforme législative majeure dans le domaine du travail et de l’emploi ne signifie aucunement que nous oublions de poursuivre l’adoption d’autres amendements nécessaires au Code du travail, conformément aux observations et recommandations de l’OIT et de ses organes directeurs. Des projets de loi ont été déposés au dernier Congrès. Ceux-ci seront sûrement déposés lors de la prochaine session. Des ressources seront réorientées à cette fin.
Dans le même ordre d’idées, il convient de noter que les Philippines ont ratifié un instrument de plus, ce qui porte à 39 le nombre de conventions qu’elles ont ratifiées, dont les huit conventions fondamentales. Avant cela, notre dernière ratification était celle de la convention no 151. Nous avons constaté que dans le secteur public l’organisation des travailleurs connaissait un regain de vitalité. Les syndicats du secteur public, en particulier dans les administrations locales, sont de plus en plus nombreux. Je tiens à souligner que nous avons une règle d’habilitation, le décret no 180 sur le droit à l’auto-organisation et à la négociation collective dans le secteur public. Pour la commission, notre volonté de ratifier la convention traduit notre engagement ferme et sans équivoque et notre obligation de promouvoir le travail décent, non pour quelques-uns mais pour tous.
Les Philippines ne doutent donc pas que, grâce à un dialogue social franc, exhaustif et constructif, les partenaires tripartites progresseront tous ensemble plutôt que de se détruire mutuellement. Nous, les Philippins, poursuivrons la mise en œuvre du Plan d’action national pour la liberté syndicale et la négociation collective (2017-2022), avec l’assistance technique indéfectible et les conseils constants de l’Organisation internationale du Travail, de ses organes de supervision et d’autres partenaires de développement. Pour terminer, rappelons-nous que «la réussite d’une réforme n’est pas un événement. C’est un processus durable qui s’appuie sur son propre succès – un cycle vertueux de changement».
Membres employeurs – Nous remercions le gouvernement de ses observations. Je pense que ce qui ressort de toute cette discussion c’est qu’il ne s’agit pas d’une situation nouvelle, que nous ne traitons pas d’événements récents, que nous traitons d’événements qui se sont produits sur une longue période et que les progrès ont été plutôt lents, ce qui est une autre caractéristique. Cela étant dit, nous accueillons favorablement les déclarations du gouvernement selon lesquelles il travaille activement en ce moment à enquêter sur des cas, et je voudrais simplement revenir à mes remarques précédentes pour m’assurer que nous sommes clairs lorsque nous examinons des cas dont nous sommes saisis, comme en l’espèce, des cas liés à la liberté d’association, parce que, comme je l’ai mentionné, il existe des situations, par exemple, dans lesquelles des membres de syndicats et des permanents syndicaux sont pris dans le cycle de la violence, mais pas nécessairement parce qu’ils sont membres de syndicats ou permanents syndicaux; le fait est simplement que, dans certains cas, il peut s’agir d’une coïncidence et que nous devons donc être attentifs à opérer une distinction entre les questions réellement liées à un empêchement ou une limitation de la liberté d’association et celles qui sont simplement collatérales à des questions plus larges et à des questions sociales.
S’agissant du règlement de ces questions, nous notons et appuyons l’utilisation par le gouvernement des mécanismes de surveillance tripartites et de l’IAC. Nous regrettons que ceux-ci ne semblent pas avoir été aussi actifs ces derniers temps qu’ils l’étaient au début, et nous exhortons donc le gouvernement à les réactiver, non pas «selon les besoins», mais de façon «permanente». Il y a évidemment beaucoup de travail à faire et il ne semble donc pas nécessaire d’attendre.
En ce qui concerne certains aspects plus détaillés, nous notons une fois de plus l’engagement du gouvernement à faire en sorte que les syndicats et les associations d’employeurs soient totalement libres de s’établir et de fonctionner sans ingérence publique ou intervention gouvernementale mais, là encore, les codes du travail qui appliquent ces dispositions semblent toujours en cours d’élaboration et, une fois de plus, nous demandons instamment au gouvernement d’aller de l’avant dans leur réalisation, de les finaliser et de les appliquer de façon ouverte et transparente. De même, en ce qui concerne la capacité des syndicats de se constituer moyennant des seuils raisonnables, nous nous réjouissons une fois encore de l’engagement du gouvernement d’abaisser les seuils, de permettre la création de syndicats et d’associations d’employeurs et d’ouvrir les portes à l’aide extérieure au pays afin de permettre aux organisations de se développer et de survivre.
Compte tenu de ces quelques éléments, je pense qu’il s’agit ici, pour l’essentiel, d’un nombre relativement restreint de recommandations, mais que celles-ci constituent, encore une fois, une répétition des recommandations que nous avons formulées les années précédentes. Nous espérons simplement qu’avoir exposé cette année ces recommandations, qui figurent ci-après, nous n’aurons pas à les reformuler à l’avenir. Il faut:
- tout d’abord se prévaloir de l’assistance technique facilement disponible du BIT offerte en particulier par l’intermédiaire du Bureau de pays de Manille;
- remettre les mécanismes de surveillance de l’IAC sur les rails et les rendre actifs de façon «continue»;
- mener à terme la modification des codes du travail afin de les placer en pleine conformité avec la convention;
- s’assurer que les travailleurs ne sont pas pénalisés pour avoir exercé les droits qui leur sont accordés; et enfin
- s’assurer que les mécanismes du dialogue social dont il a été question sont eux-mêmes un processus «continu» et non un processus actif «selon les besoins».
Membres travailleurs – Nous avons écouté attentivement toutes les interventions et plus particulièrement les informations fournies à la commission par le gouvernement. Cependant, il ne saurait y avoir de justification ou d’explication valable pour la violence systématique et les assassinats perpétrés à l’encontre des militants syndicaux. Le gouvernement a simplement l’obligation de mettre fin à cette violence. Pourtant, l’absence d’enquêtes et de sanctions efficaces dans de tels cas de violations flagrantes crée un climat d’impunité et jette le doute sur l’engagement du gouvernement à garantir l’état de droit. Le porte-parole des employeurs a souligné que cette affaire concerne également les droits de l’homme et l’état de droit. Nous sommes d’accord. En revanche, nous ne pouvons convenir que ces questions sortent du cadre de notre discussion. A cet égard, nous rappelons au groupe des employeurs la résolution de 1970 de la Conférence internationale du Travail sur les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles. Cette résolution reconnaît que les droits conférés aux organisations de travailleurs et d’employeurs doivent être fondés sur le respect des libertés civiles. Nous avons rappelé cette résolution à maintes reprises et avons adopté des conclusions pertinentes au sein de la commission, notamment en ce qui concerne les plaintes déposées par les organisations d’employeurs à cet égard. Nous devons de toute urgence prendre des mesures pour enquêter sur les violations des droits syndicaux, et en particulier les actes de violence, et les sanctionner comme il se doit. Cela doit maintenant être prioritaire pour le gouvernement et cela implique l’allocation de fonds et de personnel suffisants pour mener à bien ce travail avec efficacité et rapidité et pour éviter une situation d’impunité. La mise en place d’organes de surveillance est insuffisante à elle seule. Pour gagner la confiance des partenaires sociaux et des victimes, ces organes de surveillance doivent être activés de manière efficace et efficiente et être transparents quant aux progrès réalisés. D’une manière plus générale, le gouvernement doit prendre des mesures préventives pour empêcher la récidive des crimes contre des syndicalistes, y compris la mise en place de systèmes de protection des syndicalistes.
S’agissant de la conformité de la législation nationale avec la convention, ce serait un euphémisme que de souligner qu’elle reste totalement insuffisante pour garantir les droits reconnus par la convention. Les mesures prises jusqu’à présent pour placer la législation du travail en conformité avec la convention semblent se trouver dans une phase de stagnation sans fin. Pour faire preuve de bonne foi, le gouvernement doit veiller à l’adoption en temps opportun des lois appropriées. Je dois convoquer d’urgence les partenaires sociaux afin d’élaborer un plan d’action global pour combler les nombreuses lacunes de la législation. Ce plan d’action doit inclure la suppression de l’exigence d’une autorisation gouvernementale pour l’aide étrangère aux syndicats et la réduction de dix à cinq du nombre des agents négociateurs, ou sections locales, dûment reconnus pour qu’un syndicat puisse être enregistré. Le seuil excessivement élevé en vigueur pour les syndicats cherchant à former des fédérations ou des syndicats nationaux doit être abaissé. En outre, la législation doit garantir que tous les travailleurs sans distinction jouissent du droit à la liberté d’association. Il est devenu urgent d’accorder une attention particulière aux mesures propres à garantir l’exercice effectif, par les travailleurs précaires, de leur droit à la liberté d’association. Le gouvernement doit également prendre des mesures décisives pour prévenir l’utilisation abusive des contrats de courte durée et des classifications erronées ayant pour but d’entraver la libre syndicalisation des travailleurs. La définition des services essentiels doit être stricte et limitée aux services dont l’interruption pourrait mettre en danger la vie, la sécurité personnelle ou la santé de tout ou partie de la population.
Nous demandons également au gouvernement de prendre des mesures concrètes et assorties d’un calendrier précis pour faire en sorte que les dispositions qui imposent des sanctions pénales aux travailleurs qui participent à une grève ou qui la mènent soient modifiées. Le droit de grève relève du champ d’application de la convention et notre position sur cette question n’a pas changé. Le gouvernement doit veiller à ce que les modifications législatives soient conformes aux obligations juridiques internationales des Philippines et soient rapidement adoptées après une consultation complète et franche avec les partenaires sociaux. Nous nous attendons à ce que le gouvernement rende compte immédiatement et pleinement à la commission d’experts des progrès réalisés. Notre conclusion est que, étant donnée la gravité des problèmes posés dans le présent cas, les travailleurs sollicitent l’envoi d’une mission tripartite de haut niveau.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des informations fournies par le représentant du gouvernement et de la discussion qui a suivi.
La commission a noté avec préoccupation les nombreuses allégations de meurtres dont auraient été victimes des syndicalistes et d’actes de violence antisyndicale, ainsi que les allégations faisant état de l’absence d’enquêtes sur ces allégations.
La commission a noté que le gouvernement avait introduit des réformes législatives pour faire face à certains des problèmes. Toutefois, la commission a regretté que ces réformes n’aient pas été adoptées, et a prié instamment le gouvernement de rendre la loi conforme à la convention.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission demande au gouvernement de:
- prendre des mesures efficaces pour prévenir la violence en ce qui concerne l’exercice par les organisations de travailleurs et d’employeurs d’activités légitimes;
- mener immédiatement et efficacement des enquêtes sur les allégations d’actes de violence qui auraient visé des membres d’organisations de travailleurs afin d’établir les faits, d’identifier les coupables et de sanctionner les auteurs de ces faits;
- rendre opérationnels les organes de suivi, notamment en fournissant des ressources suffisantes, et donner régulièrement des informations sur ces mécanismes et sur les progrès des cas dont ils sont saisis; et
- s’assurer que tous les travailleurs sans distinction puissent constituer des organisations de leur choix et s’y affilier, conformément à l’article 2 de la convention.
La commission demande au gouvernement d’accepter une mission tripartite de haut niveau avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail et d’élaborer, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, un rapport sur les progrès accomplis pour le présenter à la commission d’experts avant le 1er septembre 2019.
Représentant gouvernemental – Une fois de plus, le gouvernement philippin apprécie l’espace qui lui est accordé, non seulement pour faire rapport sur les progrès de notre engagement tripartite, mais aussi pour apporter des précisions sur les points qui ont été soulevés, sur les voies de recours et sur les nouvelles allégations, infondées, qui ont été exprimées. Permettez-moi de répéter qu’il n’y a pas eu 43 autres cas de décès dans mon pays. Nous prenons donc note avec réserve des conclusions auxquelles la commission est parvenue. Elles sont tout à fait surprenantes au vu du travail accompli par les partenaires sociaux philippins dans le cadre du plan d’action national tripartite qui a été convenu. Quoi qu’il en soit, nous continuons à faire en sorte que, au niveau national, aucun partenaire social ne soit exclu dans la mesure où, au niveau international, aucun pays, aucun travailleur et aucun employeur ne doit être laissé pour compte, cela pour assurer des emplois décents, sur la base de la justice sociale et pour assurer aussi un avenir meilleur. Nous informerons respectueusement la commission de la réponse officielle de la capitale à ce sujet.