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Observación (CEACR) - Adopción: 2021, Publicación: 110ª reunión CIT (2022)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - Belarús (Ratificación : 1956)

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La commission prend note des observations du Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus (BKDP), reçues le 30 septembre 2021, et de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues les 1er et 29 septembre 2021, qu’elle examine ci-dessous.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 109e session, juin 2021)

Suivi des recommandations de la Commission d’enquête nommée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2021 concernant l’application de la convention. La Commission de la Conférence s’est déclarée profondément préoccupée par le fait que, 17 ans après le rapport de la Commission d’enquête, le gouvernement du Bélarus n’ait pas pris de mesures pour donner suite à la plupart des recommandations de la Commission et elle a rappelé les recommandations en suspens de la Commission d’enquête de 2004 et la nécessité de leur mise en œuvre rapide, complète et efficace. La Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement de rétablir sans plus tarder le plein respect des droits et libertés des travailleurs; de mettre en œuvre la recommandation 8 de la Commission d’enquête sur la garantie d’une protection adéquate, voire d’une immunité contre la détention administrative, pour les responsables syndicaux dans l’exercice de leurs fonctions ou de leurs libertés publiques (liberté d’expression, liberté de réunion, etc.); de prendre des mesures pour la libération de tous les syndicalistes encore en détention et pour l’abandon de toutes les charges liées à la participation à des actions revendicatives pacifiques; de s’abstenir d’arrêter ou de détenir des dirigeants et des membres de syndicats menant des activités syndicales légales, ou de se livrer à des actes de violence, d’intimidation ou de harcèlement, y compris le harcèlement judiciaire, à leur encontre; et d’enquêter sans plus tarder sur les cas présumés d’intimidation ou de violence physique au moyen d’une enquête judiciaire indépendante. En ce qui concerne la question de l’adresse légale en tant qu’obstacle à l’enregistrement des syndicats, la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement de veiller à ce qu’il n’y ait d’obstacles à l’enregistrement des syndicats ni en droit ni dans la pratique, et elle a prié le gouvernement de la tenir informée de l’évolution de cette question, en particulier de toutes discussions tenues et des résultats de ces discussions au sein du Conseil tripartite pour l’amélioration de la législation dans les domaines social et du travail (ci-après, Conseil tripartite). S’agissant de la demande du Président du Bélarus de créer des syndicats dans toutes les entreprises privées d’ici 2020, à la demande de la Fédération des syndicats du Bélarus (FPB), la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement dans les termes les plus vifs de s’abstenir de toute ingérence dans la création de syndicats dans les entreprises privées, en particulier d’exiger la création de syndicats sous la menace de la liquidation des entreprises privées; de préciser publiquement que la décision de créer ou non un syndicat dans les entreprises privées est laissée à la seule discrétion des travailleurs de ces entreprises; de mettre immédiatement fin à l’ingérence dans la création de syndicats et de s’abstenir de tout favoritisme à l’égard d’un syndicat en particulier dans les entreprises privées. En ce qui concerne les restrictions à l’organisation de manifestations collectives par les syndicats, la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, y compris dans le cadre du Conseil tripartite de modifier la loi sur les activités collectives et le règlement qui l’accompagne, notamment en vue d’indiquer clairement les motifs justifiant le refus d’une demande d’organisation de manifestation syndicale collective, en garantissant le respect des principes de la liberté syndicale; d’élargir le champ des activités qu’il est possible de financer avec le concours d’aides financières étrangères; de lever tous les obstacles, en droit et dans la pratique, qui empêchent les organisations de travailleurs et d’employeurs de bénéficier de l’aide des organisations internationales de travailleurs et d’employeurs conformément à la convention; d’abolir les sanctions imposées aux syndicats ou aux syndicalistes qui participent à des manifestations pacifiques; d’abroger l’ordonnance no 49 du Conseil des ministres pour permettre aux organisations de travailleurs et d’employeurs d’exercer leur droit d’organiser des manifestations collectives dans la pratique; de prendre en compte les préoccupations soulevées par les syndicats en ce qui concerne l’organisation et la tenue de manifestations collectives dans la pratique et de trouver des solutions concrètes pour répondre à ces préoccupations. En ce qui concerne les consultations relatives à l’adoption de nouveaux textes législatifs ayant une incidence sur les droits et intérêts des travailleurs, la Commission de la Conférence a prié le gouvernement de modifier le règlement du Conseil des ministres no 193 afin de garantir que les partenaires sociaux jouissent de droits égaux dans les consultations préalables à l’élaboration de la législation. S’agissant du fonctionnement du Conseil tripartite, la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour renforcer le Conseil afin qu’il puisse jouer un rôle efficace dans la mise en œuvre des recommandations de la Commission d’enquête et des autres organes de contrôle de l’OIT, aux fins du plein respect de la convention en droit et dans la pratique. La Commission de la Conférence a exprimé sa déception face à la lenteur de la mise en œuvre des recommandations de la Commission d’enquête. Les développements récents indiquent un retour en arrière et un nouveau recul de la part du gouvernement par rapport à ses obligations en vertu de la convention. La Commission de la Conférence a donc prié instamment le gouvernement de prendre avant la prochaine Conférence, en étroite consultation avec les partenaires sociaux, toutes les mesures nécessaires pour mettre pleinement en œuvre toutes les recommandations en suspens de la Commission d’enquête. La Commission de la Conférence a invité le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT et a décidé d’inclure ses conclusions dans un paragraphe spécial du rapport.
La commission prend note du 394e rapport (mars 2021) du Comité de la liberté syndicale sur les mesures prises par le gouvernement de la République du Bélarus pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête.
Libertés publiques et droits syndicaux. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle a exprimé sa profonde préoccupation au sujet des graves allégations de violence extrême visant à réprimer des manifestations et des grèves pacifiques, de détention, d’emprisonnement et de torture de travailleurs en détention, soumises par la CSI et le BKDP, et de la détérioration continue de la situation des droits de l’homme dans le pays après l’élection présidentielle d’août 2020. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à la recommandation 8 susmentionnée de la Commission d’enquête; de prendre des mesures pour faire libérer tous les syndicalistes encore en détention et d’abandonner de toutes les charges découlant de la participation à des manifestations pacifiques et à des actions revendicatives; de communiquer copies des décisions de justice pertinentes qui se prononcent en faveur de la détention et de l’emprisonnement de travailleurs et de syndicalistes et de fournir une liste des personnes concernées; et d’enquêter sans délai sur tous les cas présumés d’intimidation ou de violence physique en ouvrant une enquête judiciaire indépendante.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement exprime son regret devant ce qui, à son avis, constitue un changement négatif important dans les évaluations de la situation au Bélarus par la commission, en relation avec les événements politiques qui ont eu lieu dans le pays après l’élection présidentielle. Le gouvernement considère que des événements purement politiques, sans rapport avec les processus de dialogue social dans le monde du travail, ne devraient pas servir de base à l’évaluation de la situation concernant le respect par le pays des dispositions de la convention. Il souligne que des forces extérieures désireuses de déstabiliser le pays ont pris une part active, sur le plan organisationnel et financier, à la préparation et au déroulement des manifestations de rue illégales qui ont eu lieu après l’élection du Président, afin de servir leurs propres intérêts géopolitiques. Le gouvernement rappelle que les principales revendications des manifestants étaient la démission du chef de l’État, la tenue de nouvelles élections et assurer que les citoyens ayant enfreint la loi ne soient pas poursuivis. Il explique que ces revendications n’ont aucun lien avec les droits syndicaux ou du travail, sociaux et économiques. Il souligne en outre que les manifestations n’étaient pas pacifiques, mais qu’elles ont été menées en violation de la loi et ont constitué une grave menace pour l’ordre public, la sécurité, la santé et la vie des citoyens. Au cours des manifestations, de nombreux incidents de résistance active aux demandes légales des forces de l’ordre ont été enregistrés, impliquant des agressions, l’usage de la violence, des dommages aux véhicules officiels, le blocage de la circulation des véhicules et des dommages aux infrastructures. Le gouvernement considère que le BKDP, la CSI et IndustriALL Global Union tentent délibérément d’établir un lien entre des manifestations de protestation illégales de nature politique et un prétendu mouvement de grève dans le pays. Le gouvernement indique que dans la pratique, le mécontentement n’a touché qu’une petite partie des travailleurs; aucune revendication n’a été présentée aux employeurs concernant la réglementation du travail et les questions socio-économiques. Il affirme que les citoyens mentionnés dans les plaintes déposées par les organisations syndicales comme ayant prétendument souffert de leur participation à des manifestations et des grèves pacifiques, ont été accusés d’infractions disciplinaires, administratives et, dans certains cas, pénales pour avoir commis des actes illégaux bien précis. À cet égard, le gouvernement indique qu’il n’est pas en mesure de communiquer copies à la commission des décisions de justice car la législation nationale ne permet pas de remettre des copies de décisions de justice et d’autres documents à des personnes n’ayant aucun lien avec la procédure. Le gouvernement souligne toutefois que le statut de travailleur ou de dirigeant syndical ne confère pas de privilèges supplémentaires à son titulaire et ne garantit pas le droit inconditionnel à une liberté d’action absolue, sans prise en compte de la législation nationale en vigueur et des intérêts du public et de l’État. Le gouvernement considère que les militants syndicaux non seulement ont les mêmes droits que les autres citoyens mais aussi, comme tout le monde, doivent répondre des violations de la loi; par conséquent, la recommandation 8 de la Commission d’enquête, conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la convention, n’exige pas la décharge des syndicalistes de toute responsabilité pour des actes illégaux qu’ils pourraient commettre. À la lumière de ce qui précède, le gouvernement considère que les appels de la commission à la libération et à l’abandon de toutes les charges contre les militants syndicaux qui ont été accusés de violations précises de la loi ne sont pas fondés. Le gouvernement insiste sur le fait que se fonder sur des événements de nature purement politique pour mesurer la mise en œuvre par le pays des recommandations de la Commission d’enquête est déraisonnable, contre-productif et inacceptable, et que cette approche peut devenir un obstacle sérieux au maintien des relations constructives déjà bien établies tant à l’intérieur du pays qu’avec les experts du BIT.
En ce qui concerne la demande de la commission et de la Commission d’enquête de garantir l’impartialité et l’indépendance du système judiciaire et de l’administration de la justice en général, le gouvernement rappelle que la République du Bélarus est un état de droit. Les particuliers, leurs droits et leurs libertés sont de la plus haute valeur et font l’objet de la plus grande attention. Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans discrimination à une protection égale de leurs droits et intérêts. Aux termes de l’article 60 de la Constitution, chacun se voit garantir la protection de ses droits et libertés par un pouvoir judiciaire compétent, indépendant et impartial. En rendant la justice, les juges sont indépendants et ne sont soumis qu’à la loi. Il est interdit d’interférer dans les activités des juges.
La commission regrette que le gouvernement n’aborde pas la question des allégations d’intimidation et de violence physique à l’encontre des syndicalistes. La commission note que, dans son bilan oral du 24 septembre 2021 de la situation des droits de l’homme au Bélarus, la Haut-Commissaire aux droits de l’homme a déclaré que l’ampleur et le type de comportement des autorités bélarussiennes à ce jour laissaient fortement à penser que les restrictions aux libertés d’expression et de réunion visaient principalement à supprimer les critiques et les dissidences à l’égard des politiques gouvernementales, plutôt que tout objectif considéré comme légitime par le droit humanitaire, tel que la protection de l’ordre public. La Haut-Commissaire s’est également alarmée des allégations persistantes de torture et de mauvais traitements généralisés et systématiques dans le contexte des arrestations et des détentions arbitraires de manifestants. La commission note avec une profonde préoccupation les nouvelles allégations détaillées de poursuites pénales, d’arrestations et d’emprisonnement de syndicalistes et la condamnation de trois syndicalistes à trois ans d’emprisonnement. Elle note également avec préoccupation les allégations de perquisitions de locaux syndicaux et de domiciles de dirigeants syndicaux par la police, de perturbation de réunions syndicales par les forces de l’ordre, et d’actes de représailles et de pressions exercées sur les travailleurs pour qu’ils quittent les syndicats, avancées par le BKDP et la CSI. La commission rappelle que la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a signalé au Conseil des droits de l’homme, en décembre 2020, que le suivi et l’analyse des manifestations depuis le 9 août 2020 indiquaient que les participants étaient en grande majorité pacifiques. Elle rappelle une fois de plus la résolution de 1970 de la Conférence internationale du travail concernant les droits syndicaux et leur relation avec les libertés publiques, qui souligne que les droits conférés aux organisations de travailleurs et d’employeurs doivent être fondés sur le respect des libertés publiques, car l’absence de celles-ci ôte toute signification au concept de droits syndicaux. Parmi ces libertés essentielles à l’exercice normal des droits syndicaux figurent la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, le droit de ne pas faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire et le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial. La commission considère en outre que les grèves et manifestations visant la politique économique et sociale du gouvernement ne devraient pas être assimilées à des grèves purement politiques, lesquelles ne sont pas couvertes par les principes de la convention. Elle estime que les organisations syndicales et les organisations d’employeurs, ayant vocation à défendre des intérêts socio-économiques et professionnels, doivent pouvoir utiliser la grève ou des actions revendicatives pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique sociale et économique qui ont des répercussions immédiates sur leurs membres. De plus, notant que le système démocratique est fondamental pour le libre exercice des droits syndicaux, la commission considère que, dans une situation où elles estimeraient ne pas jouir des libertés essentielles nécessaires à l’accomplissement de leur mission, les organisations syndicales et les organisations d’employeurs seraient fondées à réclamer la reconnaissance et l’exercice de ces libertés et que de telles revendications pacifiques devraient être considérées comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes, y compris lorsque ces organisations ont recours à la grève (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 124).
La commission rappelle à nouveau que la Commission d’enquête sur le Bélarus a estimé qu’une protection adéquate, voire l’immunité contre la détention administrative, devrait être garantie aux responsables syndicaux dans l’exercice de leurs fonctions ou de leurs libertés publiques (liberté d’expression, liberté de réunion, etc.). Tout en prenant note de la référence du gouvernement au paragraphe 1 de l’article 8 de la convention, la commission rappelle que ce texte doit être lu conjointement avec le paragraphe 2 du même article, selon lequel la loi du pays ne doit pas être de nature à porter atteinte, ni être appliquée de manière à porter atteinte, aux garanties prévues par la présente convention. La commission souligne que, depuis plusieurs années, les organes de contrôle de l’OIT expriment leur préoccupation face aux nombreuses violations de la convention en droit et dans la pratique au Bélarus. La commission prie donc une fois de plus instamment le gouvernement, dans les termes les plus vifs, d’enquêter sans délai sur tous les cas présumés d’intimidation ou de violence physique en ouvrant une enquête judiciaire indépendante et de fournir des informations détaillées sur les résultats. Elle le prie en outre instamment de prendre des mesures pour la libération de tous les syndicalistes qui sont toujours en détention et pour l’abandon de toutes les charges liées à la participation à des actions revendicatives pacifiques. La commission attend du gouvernement qu’il communique des informations détaillées sur toutes les mesures prises à cet égard.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle il n’est pas en mesure de donner suite à sa demande de lui communiquer les décisions de justice, au motif que la législation en vigueur ne prévoit pas une telle possibilité, ce qui implique que les décisions de justice et les jugements ne sont pas publics. La commission souligne que lorsqu’elle prie un gouvernement de fournir des jugements dans le cadre d’une procédure judiciaire, cette demande ne porte aucunement atteinte à l’intégrité ou à l’indépendance du pouvoir judiciaire. L’essence même de la procédure judiciaire est que ses résultats sont connus, et la confiance dans son impartialité repose sur cette connaissance. En outre, l’absence de décisions de justice empêche la commission d’examiner ou de confirmer la conclusion du gouvernement selon laquelle les arrestations en question étaient sans rapport avec l’exercice des droits syndicaux fondamentaux. La commission rappelle en outre que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose, à son article 14, que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement. La commission souligne que le droit à un procès équitable et public implique le droit à ce que le jugement ou la décision soit rendu public et que la publicité des décisions est une garantie importante des intérêts de la personne et de la société en général. La commission rappelle également que l’absence de garanties d’une procédure régulière pourrait entraîner des abus et pourrait également engendrer un climat d’insécurité et de peur qui pourrait affecter l’exercice des droits syndicaux. La commission prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris législatives, si besoin est, pour garantir le droit à un procès équitable. Toujours à cet égard, la commission, se référant aux recommandations de la Commission d’enquête, souligne la nécessité d’assurer l’impartialité et l’indépendance du système judiciaire et de l’administration de la justice en général, afin de garantir que les enquêtes sur ces graves allégations soient réellement indépendantes, neutres, objectives et impartiales. En conséquence, la commission prie également à nouveau le gouvernement de prendre des mesures, y compris par voie législative si nécessaire, pour communiquer copies des décisions de justice pertinentes confirmant la détention et l’emprisonnement de travailleurs et de syndicalistes.
Article 2 de la convention. Droit de constituer des organisations de travailleurs. La commission rappelle que, dans ses précédentes observations, elle a prié instamment le gouvernement d’envisager, dans le cadre du Conseil tripartite, de prendre les mesures nécessaires pour que la question d’une adresse légale ne fasse plus obstacle à l’enregistrement des syndicats dans la pratique. Elle attendait en particulier du gouvernement, en sa qualité de membre du Conseil tripartite, qu’il soumette dès que possible les commentaires de la commission sur la question de l’enregistrement à l’examen du Conseil lors de l’une de ses réunions.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la possibilité d’appliquer la recommandation de la Commission pourra être envisagée lorsque le Conseil tripartite reprendra ses travaux, une fois que la situation épidémiologique du pays se sera améliorée. À cette fin, un membre du Conseil tripartite qui soumet cette question à la discussion doit également établir que ladite question est préoccupante. De l’avis du gouvernement, dans la pratique, la question de l’adresse légale ne constitue pas un obstacle à l’enregistrement, car les syndicats ont eu la possibilité de se voir attribuer non seulement l’adresse où se trouve l’employeur, mais aussi celle de tout autre lieu. La commission prend note des statistiques détaillées fournies par le gouvernement sur le nombre de syndicats enregistrés et leurs structures organisationnelles. Elle note en particulier que si, au cours des six premiers mois de 2021, 1 278 structures organisationnelles ont été enregistrées, il n’y a eu qu’un seul refus d’enregistrement d’un syndicat; dans ce cas précis, parce que la constitution du syndicat n’était pas conforme aux exigences légales. Le gouvernement considère que les affirmations du BKDP, selon lesquelles l’obligation légale pour les syndicats et leurs structures organisationnelles de présenter une adresse légale pour s’enregistrer constitue un obstacle aux activités syndicales au Bélarus, semblent manquer de tout fondement objectif.
À cet égard, la commission note avec préoccupation les nouvelles allégations portées par le BKDP et la CSI concernant plusieurs cas de refus d’enregistrement d’organisations de base des affiliés du BKDP. La commission prie le gouvernement de communiquer ses observations à ce sujet. Elle le prie en outre une fois de plus d’inscrire la question de l’enregistrement des organisations syndicales, y compris la question de l’exigence d’une adresse légale, à l’ordre du jour du Conseil tripartite, conformément à sa demande précédente et à l’appel le plus récent de la Commission de la Conférence, qui a jugé cette question préoccupante. La commission attend du gouvernement qu’il fournisse des informations détaillées sur les résultats de la discussion du Conseil tripartite.
En ce qui concerne la demande du Président du Bélarus de créer des syndicats dans toutes les entreprises privées d’ici 2020 à la demande de la FPB, que la commission a considérée comme une manifestation de favoritisme à l’égard de la Fédération et une ingérence dans la création de syndicats dans les entreprises privées, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la FPB est le plus représentatif et le plus actif des partenaires sociaux du pays lorsqu’il s’agit de développer, améliorer et appliquer la politique socio-économique. Dans le cadre de son engagement considérable en faveur de la protection des droits du travail, sociaux et économiques des citoyens, la FPB porte constamment à l’attention des autorités les questions les plus actuelles, critiques et problématiques auxquelles les travailleurs sont confrontés dans l’exercice de leurs droits. Dans le cadre de la défense des droits des citoyens, les syndicats de la FPB traitent régulièrement avec les autorités et collaborent activement avec elles, y compris aux plus hauts niveaux. Lors d’une rencontre entre le chef de l’État et le président de la FPB en tant que dirigeant du syndicat le plus important et le plus représentatif du pays, le président du Bélarus a clairement exposé la position de l’État selon laquelle les entreprises privées ne doivent pas entraver le droit des travailleurs à adhérer à un syndicat, et a également exprimé son appréciation du travail des syndicats pour défendre les droits du travail et les droits socio-économiques des citoyens.
La commission observe avec un profond regret l’absence d’informations sur les mesures prises par le gouvernement pour s’abstenir d’entraver la création de syndicats dans les entreprises privées et l’absence de toute indication publique claire selon laquelle la décision de créer un syndicat est laissée à la seule discrétion des travailleurs eux-mêmes. Au lieu de cela, le gouvernement fournit ce qui semble être une justification du favoritisme de la FPB aux niveaux supérieurs de l’État. La commission note en outre avec une profonde préoccupation que, le 5 août 2021, lors de sa rencontre télévisée avec le dirigeant de la FPB, le chef de l’État a réitéré sa déclaration précédente et souligné que «si certaines entreprises privées n’ont pas compris son message, le gouvernement doit immédiatement discuter de ces questions et faire des propositions spécifiques, y compris sur la liquidation des entreprises privées qui refusent d’avoir des organisations syndicales». La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les trois organes de l’OIT chargés du contrôle et du suivi de la mise en œuvre des recommandations de la Commission d’enquête sur le Bélarus relatives à la non-observation de la convention, à savoir la présente commission, la Commission de la Conférence et le Comité de la liberté syndicale, ont conclu que les demandes du Président du Bélarus constituaient une ingérence dans la création d’organisations syndicales et un favoritisme à l’égard d’un syndicat en particulier, et donc une violation de l’article 2 de la convention. La commission prie donc à nouveau instamment le gouvernement de s’abstenir de toute ingérence dans la création de syndicats dans les entreprises privées, en particulier l’exigence de la création de syndicats sous la menace de liquidation des entreprises privées, de préciser publiquement que la décision de créer ou non un syndicat dans les entreprises privées est laissée à la seule discrétion des travailleurs de ces entreprises, et de s’abstenir de tout favoritisme à l’égard de tout syndicat en particulier dans les entreprises privées. La commission s’attend à ce que toutes les mesures à cet égard soient prises sans délai et détaillées dans le prochain rapport du gouvernement.
Articles 3, 5 et 6. Droit des organisations de travailleurs, y compris les fédérations et confédérations, d’organiser leurs activités. Législation. La commission rappelle que la Commission d’enquête a demandé au gouvernement de modifier le décret présidentiel no 24 (2003) sur la réception et l’utilisation de l’aide étrangère gratuite. La commission rappelle à cet égard qu’elle a estimé que les modifications devraient viser à supprimer les sanctions imposées aux syndicats (dissolution d’une organisation) pour une seule infraction au décret, et à élargir le champ des activités pour lesquelles une aide financière étrangère peut être utilisée, de manière à inclure les manifestations organisées par les syndicats. La commission rappelle que le décret no 24 a été remplacé par le décret présidentiel no 5 (2015), puis par le décret no 3 du 25 mai 2020, en vertu duquel l’aide étrangère gratuite ne peut toujours pas être utilisée pour organiser ou tenir des assemblées, des rassemblements, des défilés de rue, des manifestations, des piquets ou des grèves, ou pour produire ou distribuer du matériel de campagne, tenir des séminaires ou mener d’autres formes d’activités visant un «travail de propagande politique et de masse auprès de la population», et qu’une seule infraction au règlement porte toujours la sanction d’une éventuelle dissolution de l’organisation. La commission observe que l’expression très générale «travail de propagande politique et de masse auprès de la population», lorsqu’elle est appliquée aux syndicats, peut entraver l’exercice de leurs droits car il est inévitable et parfois normal que les syndicats prennent position sur des questions ayant des aspects politiques qui touchent à leurs intérêts socio-économiques, ainsi que sur des questions purement économiques ou sociales.
Toujours à ce propos, la commission rappelle que la Commission d’enquête a prié le gouvernement de modifier la loi sur les activités collectives, en vertu de laquelle un syndicat qui enfreint la procédure d’organisation et de tenue de manifestations collectives peut, en cas de dommage grave ou de préjudice important porté aux droits et intérêts légaux d’autres citoyens et organisations, être dissous pour une seule infraction. La commission rappelle en outre qu’elle a également pris note avec regret du règlement relatif à la procédure de paiement pour les services fournis par les autorités des affaires intérieures en matière de protection de l’ordre public, de dépenses liées à des soins médicaux et de nettoyage après la tenue d’une manifestation collective (ordonnance no 49 du Conseil des ministres). Le règlement définit les frais relatifs au maintien des services publics et prévoit les dépenses des organes spécialisés (services médicaux et de nettoyage) qui doivent être payées par l’organisateur de la manifestation.
À la lecture de ces dispositions, parallèlement à celles interdisant l’utilisation de l’aide étrangère à titre gratuit pour l’organisation de manifestations collectives, la commission a estimé que la capacité de mener des manifestations collectives semblerait extrêmement limitée, voire inexistante dans la pratique. Elle prie donc instamment le gouvernement de modifier le décret no 3 du 25 mai 2020 sur l’enregistrement et l’utilisation de l’aide étrangère gratuite, la loi sur les activités collectives et le règlement qui l’accompagne, et rappelle que les modifications devraient viser à supprimer les sanctions imposées aux syndicats ou aux syndicalistes pour une seule infraction à la législation respective; à définir des motifs clairs pour le refus des demandes d’organisation de manifestations syndicales collectives, en gardant à l’esprit que toute restriction de ce type devrait être conforme aux principes de la liberté syndicale; et à élargir le champ des activités pour lesquelles l’aide financière étrangère peut être utilisée.
La commission note que le gouvernement réaffirme une fois de plus qu’il n’y a aucun lien entre la procédure établie pour obtenir des fonds de l’étranger (aide étrangère gratuite) et les articles 5 et 6 de la convention. Le gouvernement souligne encore une fois que le fait de permettre à des forces extérieures (en l’occurrence les syndicats d’autres pays et les associations syndicales internationales) de parrainer la tenue de manifestations collectives au Bélarus peut constituer une occasion de déstabiliser la situation sociopolitique et socio-économique, ce qui a un effet extrêmement négatif sur la vie publique et le bien-être des citoyens. Ainsi, l’interdiction en vigueur de recevoir et utiliser une aide étrangère gratuite aux fins de mener un travail de propagande politique et de masse auprès de la population est liée aux intérêts de la sécurité nationale et à la nécessité d’exclure toute influence et pression destructrices possibles de la part de forces extérieures. Le gouvernement réaffirme en outre que l’exercice du droit de réunion pacifique n’est soumis à aucune restriction, à l’exception de celles qui sont imposées conformément à la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de la sûreté publique, de l’ordre public, de la protection de la santé ou de la moralité publiques, et de la protection des droits et libertés d’autrui. Lors de l’organisation de manifestations collectives, les syndicats sont tenus de respecter l’ordre public et ne doivent pas se livrer à des actes susceptibles de faire perdre à une manifestation son caractère pacifique et d’infliger un préjudice grave aux citoyens, à la société ou à l’État. De l’avis du gouvernement, la sanction légale prévue pour les organisateurs de manifestations collectives qui causent des dommages ou des préjudices importants aux intérêts des citoyens et des organisations, ainsi qu’aux intérêts de l’État et de la société, ne constitue pas, et ne doit pas être interprétée comme, un facteur contraignant pour l’exercice de leurs droits à la liberté de réunion pacifique des citoyens et des syndicats. Le gouvernement rappelle une fois de plus que la décision de mettre fin aux activités d’un syndicat pour une infraction à la législation sur les manifestations collectives ayant causé des dommages graves et un préjudice important aux droits et intérêts des citoyens, des organisations, de la société et de l’État, ne peut être prise que par un tribunal. Aucune décision de dissolution de syndicats pour violation de la procédure d’organisation et de tenue de manifestations collectives n’a été prise au Bélarus. À la lumière de ce qui précède, le gouvernement estime que tout assouplissement de la responsabilité pour violation de la procédure d’organisation de manifestations collectives ou toute levée des restrictions à l’utilisation de l’aide financière étrangère pour la tenue d’activités de propagande politique et de masse ne pourrait que conduire à des circonstances susceptibles de renforcer l’influence extérieure destructrice sur la situation dans le pays, ce qui ne sert pas les intérêts du Bélarus.
La commission note avec un profond regret que le gouvernement se contente de réitérer les informations qu’il a précédemment fournies et, en particulier, qu’il n’a pas l’intention de modifier la législation comme le demandait la Commission d’enquête, dont il a accepté les recommandations conformément à l’article 29, paragraphe 2 de la Constitution de l’OIT, avec un suivi de la mise en œuvre des recommandations confiées par le Conseil d’administration au Comité de la liberté syndicale, à la présente commission et à la Commission de la Conférence. La commission note que la loi sur les manifestations collectives a été modifiée le 24 mai 2021 et observe avec regret à cet égard que, selon le BKDP et les informations accessibles au public, la modification vise à renforcer encore les exigences relatives à l’organisation de manifestations publiques, comme suit l’organisation de manifestations collectives doit être autorisée par les autorités municipales; des fonds ne peuvent pas être collectés, de l’argent et d’autres actifs ne peuvent pas être reçus et utilisés, des services ne peuvent pas être rendus afin de compenser le coût causé par des poursuites pour violation de la procédure établie d’organisation de manifestations collectives; les associations publiques seront tenues responsables si leurs dirigeants et les membres de leurs organes directeurs lancent des appels publics à l’organisation d’une manifestation collective avant que l’autorisation ne soit accordée.
La commission note en outre avec un profond regret que le 8 juin 2021, le Code pénal a été modifié de manière à introduire les restrictions suivantes et les sanctions qui y sont associées les violations répétées de la procédure d’organisation et de tenue de manifestations collectives, y compris les appels publics en ce sens, sont passibles d’une arrestation, d’une restriction de liberté ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans (art. 342-2); l’insulte d’un représentant de l’État est passible d’une amende et/ou d’une restriction de liberté ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans (art. 369); la peine encourue pour avoir «discrédité la République du Bélarus» a été portée de deux à quatre ans d’emprisonnement assortis d’une amende (art. 369-1); le titre de l’article 369-3 du Code pénal, «Violation de la procédure d’organisation et de tenue de manifestations collectives», a été modifié pour devenir «Appels publics à l’organisation ou à la tenue d’une réunion, d’un rassemblement, d’un défilé de rue, d’une manifestation ou d’un piquet de grève illégaux, ou à la participation de personnes à de telles manifestations collectives», ces activités étant désormais considérées comme une infraction passible d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement. Le BKDP souligne que la responsabilité pénale peut désormais être établie pour la simple organisation de rassemblements pacifiques et que toute critique et tous slogans sont considérés par les autorités comme des insultes au sens de l’article 369 du code pénal. Le BKDP allègue qu’il existe de nombreux précédents de mise en cause de la responsabilité pénale de citoyens, y compris de membres de syndicats indépendants, au titre de l’article 369 du code pénal. Il attire également l’attention sur la déclaration de la ministre du Travail et de la Protection sociale devant la Commission de la Conférence en juin 2021, dans laquelle elle a affirmé que le BKDP s’est prononcé contre le gouvernement et a pris des mesures contre l’intérêt de l’État et du gouvernement, appelant au boycott des produits bélarussiens et à l’application de sanctions. Le BKDP allègue à cet égard que ses dirigeants sont menacés d’être poursuivis en vertu de l’article 369-1 du Code pénal. La commission rappelle que le droit d’exprimer des opinions, y compris celles qui critiquent la politique économique et sociale du gouvernement, est l’un des éléments essentiels des droits des organisations professionnelles. Eu égard aux considérations ci-dessus et ci-dessous, la commission rappelle en outre une fois de plus que le simple fait de participer à des assemblées pacifiques ne devrait pas être sanctionné par la détention ou l’emprisonnement. Elle rappelle également que le simple fait d’appeler à une manifestation et à tout autre événement public, même s’il est déclaré illégal par les tribunaux, ne devrait pas donner lieu à une arrestation et qu’en général, des sanctions ne devraient être envisagées que lorsque, au cours de cet événement, des violences contre des personnes ou des biens, ou d’autres infractions graves au droit pénal ont été commises.
La commission réitère donc sa demande antérieure de modifier sans délai supplémentaire et en consultation avec les partenaires sociaux le décret no 3, la loi sur les activités de masse et le règlement qui l’accompagne (ordonnance no 49 du Conseil des ministres), conformément aux recommandations en suspens de la Commission d’enquête, de la Commission de la Conférence, du Comité de la liberté syndicale et de la présente commission. Elle prie en outre le gouvernement d’abroger les dispositions modifiées du Code pénal susmentionnées afin de les mettre en conformité avec les obligations internationales du gouvernement en matière de liberté syndicale.
Application pratique. La commission rappelle qu’elle a prié instamment le gouvernement de se lancer dans une coopération avec les partenaires sociaux, y compris dans le cadre du Conseil tripartite, pour trouver des solutions concrètes aux préoccupations soulevées par les syndicats, en particulier le BKDP, relatives à l’organisation et la tenue de manifestations collectives. Elle a en outre prié le gouvernement de fournir des statistiques sur les demandes soumises et les autorisations accordées et refusées, ventilées en fonction de l’affiliation à la centrale syndicale.
La commission note que le gouvernement indique que le BKDP et ses syndicats affiliés, comme la FPB, ont à plusieurs reprises exercé leur droit à la liberté de réunion et organisé des manifestations collectives. Le gouvernement réaffirme que toutes les décisions de refuser la tenue de manifestations collectives ont été prises par les organes exécutifs et réglementaires locaux conformément à la loi et en tenant dûment compte de l’obligation de respecter le droit des citoyens à la liberté syndicale et le droit des syndicats à mener des actions collectives pour défendre les intérêts de leurs membres. Il indique une fois de plus que les motifs les plus courants du refus d’accorder l’autorisation d’organiser une manifestation collective sont les suivants la demande ne contenait pas les informations requises par la loi; la manifestation devait avoir lieu dans un lieu non autorisé à cet effet; les documents soumis n’indiquaient pas le lieu précis de la manifestation; la manifestation avait été annoncée dans les médias avant d’avoir été autorisée; une autre manifestation collective était organisée au même endroit et au même moment. Le gouvernement considère que les refus d’autorisation de manifestations collectives ne sont pas tant liés à des exigences légales excessives ou difficiles à respecter qu’à une préparation insuffisante des organisateurs et rappelle qu’une fois les manquements corrigés, les organisateurs peuvent déposer une nouvelle demande d’autorisation. Le gouvernement indique en outre que la possibilité de discuter des questions de l’organisation et de la tenue de manifestations collectives dans le cadre du Conseil tripartite pourra être réexaminée lorsque le Conseil reprendra ses travaux et que la situation épidémiologique s’améliorera. Il souligne toutefois qu’une condition nécessaire à l’examen par le Conseil tripartite est que l’initiateur soumette des informations établissant que la question est préoccupante. La commission estime que le gouvernement, en sa qualité de membre du Conseil tripartite et de responsable en dernier ressort du respect de la liberté syndicale sur son territoire, devrait être en mesure d’inscrire à l’ordre du jour du Conseil tripartite les préoccupations exprimées par les organes de contrôle de l’OIT relatives aux questions de l’exercice du droit de manifester et de tenir des réunions publiques dans la pratique. La commission attend du gouvernement qu’il fournisse des informations sur le résultat de ces discussions dans son prochain rapport. Elle le prie de communiquer des statistiques sur les demandes de manifestation et de tenue de réunions publiques qui ont été soumises, ainsi que sur les autorisations accordées et refusées, ventilées en fonction de l’affiliation à la centrale syndicale.
La commission rappelle les allégations de 2019 du BKDP et de la CSI concernant les cas de MM. Fedynich et Komlik, dirigeants du syndicat REP, reconnus coupables, en 2018, d’évasion fiscale et d’utilisation de fonds étrangers sans les enregistrer officiellement auprès des autorités, conformément à la législation en vigueur. Ils ont été condamnés à quatre ans d’emprisonnement avec sursis, à une restriction de déplacement, à une interdiction d’occuper des postes à responsabilité pendant cinq ans et à une amende de 47 560 BYN (plus de 22 500 dollars américains à l’époque). À cet égard, la commission a également pris note de l’allégation du BKDP selon laquelle le matériel saisi lors des perquisitions dans les locaux du syndicat REP et du BNP n’avait pas été restitué et elle a prié le gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, compte tenu de l’application de la législation d’amnistie aux condamnés, la peine principale, sous la forme d’une restriction de liberté sans être envoyé dans un établissement de type ouvert, a été entièrement purgée par MM. Fedynich et Komlik. Le sort ultérieur des dispositifs de stockage d’informations saisis au cours de l’enquête sur l’affaire pénale sera décidé à l’issue d’une vérification visant à établir si les personnes concernées ont commis d’autres crimes de nature similaire. La commission note que les détails de ces cas sont en cours d’examen par le Comité de la liberté syndicale dans le cadre de son examen des mesures prises par le gouvernement pour appliquer les recommandations de la Commission d’enquête.
Droit de grève. La commission rappelle qu’elle prie depuis plusieurs années le gouvernement de modifier les articles 388(1), (3) et (4), 390, 392 et 393 du Code du travail. Elle regrette que le gouvernement se contente de réitérer l’argument qu’il a avancé précédemment, à savoir que la législation nationale est conforme aux instruments internationaux du travail qui, en tout état de cause, ne prévoient pas expressément le droit de grève; que la légalité de l’interprétation par les organes de contrôle de l’OIT selon laquelle la convention no 87 consacre le droit de grève a été remise en question à plusieurs reprises et à juste titre; que seule la Cour internationale de justice a le droit d’interpréter les conventions de l’OIT en vue d’une application obligatoire ultérieure de cette interprétation par les États membres; qu’au Bélarus, conformément à l’article 388 du Code du travail, une grève constitue un refus temporaire et volontaire des travailleurs d’exercer leurs fonctions (en totalité ou en partie) dans le but de régler un conflit collectif du travail; et que les grèves à caractère politique sont interdites. Le gouvernement affirme une fois de plus que les actions revendicatives non autorisées qui ont eu lieu après la campagne électorale présidentielle de 2020 et les tentatives d’organiser un mouvement de grève dans les entreprises sans tenir compte de la loi n’ont rien à voir avec l’exercice des droits syndicaux et les activités des syndicats visant à protéger les travailleurs ou les droits sociaux et économiques des citoyens. Le gouvernement ajoute que les questions plus larges relatives à la politique économique et sociale sont traitées dans le cadre du système de partenariat social par la négociation, par des consultations et en rejetant toute confrontation. Le gouvernement réaffirme donc que la modification de la législation régissant les grèves ne faciliterait pas l’exercice du droit des organisations de travailleurs d’agir en toute liberté, mais, au contraire, créerait des possibilités supplémentaires d’abus par tout type d’agent destructeur et fournirait un instrument pour saper le potentiel économique du pays.
La commission considère important de rappeler une fois de plus que ses avis et recommandations tirent leur valeur persuasive de la légitimité et de la rationalité de ses travaux, fondés sur son impartialité, son expérience et son expertise. Le rôle technique et l’autorité morale de la commission sont bien reconnus, d’autant plus qu’elle est engagée dans sa tâche de contrôle depuis 95 ans, sur la base de sa composition, de son indépendance et de ses méthodes de travail fondées sur un dialogue permanent avec les gouvernements, en tenant compte des informations fournies par les organisations d’employeurs et de travailleurs. Cela s’est traduit par l’incorporation des avis et recommandations de la commission dans les législations nationales, les instruments internationaux et les décisions des tribunaux. C’est dans le cadre de ce mandat qu’elle a traité les questions relatives au droit de grève.
La commission note avec regret que le Code du travail a été modifié le 28 mai 2021 afin de restreindre davantage encore le droit de grève en autorisant expressément l’employeur à résilier le contrat de travail d’un travailleur qui s’absente du travail pour purger une sanction administrative sous la forme d’une arrestation administrative, qui oblige d’autres travailleurs à participer à une grève ou qui appelle d’autres travailleurs à cesser d’exercer leurs fonctions sans raison valable, et qui participe à une grève illégale ou à d’autres formes de rétention du travail sans raison valable (art. 42(7)). Rappelant les allégations du BKDP selon lesquelles de nombreux syndicalistes qui ont participé à des manifestations collectives et à des grèves organisées à la suite de l’élection présidentielle d’août 2020 ont été jugés coupables d’infractions administratives et ont reçu la sanction correspondante sous la forme d’une arrestation administrative, la commission note que dans ses dernières observations, le BKDP fournit une liste de travailleurs qui, dans ces circonstances, ont été licenciés. La commission regrette que la modification du Code du travail semble faciliter le licenciement et la sanction des travailleurs pour avoir exercé leurs libertés publiques et leurs droits syndicaux. La commission se voit donc obligé de demander au gouvernement de prendre des mesures, en consultation avec les partenaires sociaux, pour réviser les dispositions législatives susmentionnées, qui portent atteinte au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités en toute liberté, et de fournir des informations sur toutes les mesures prises ou envisagées à cette fin.
La commission rappelle qu’elle avait précédemment noté avec préoccupation les allégations détaillées de nombreux cas d’arrestations, de détention et d’amendes imposées à des syndicalistes pour avoir organisé des grèves et y avoir participé à la suite des événements d’août 2020. La commission note avec préoccupation de nouvelles allégations détaillées de représailles (arrestations, détentions, amendes et licenciements) contre des syndicalistes et des travailleurs ayant participé à des grèves conduites par des syndicats. En référence à ses considérations concernant l’exercice des libertés publiques et leur importance pour l’exercice des droits syndicaux exposés ci-dessus, la commission prie instamment le gouvernement de mener des enquêtes indépendantes sur les allégations du BKDP et de la CSI en tenant compte des considérations ci-dessus et de fournir tous les détails pertinents sur les résultats avec son prochain rapport.
Consultations avec les organisations de travailleurs et d’employeurs. La commission rappelle que, dans son précédent commentaire, elle a noté que le BKDP alléguait l’absence de consultations au sujet de l’adoption de nouveaux textes de loi ayant des incidences sur les droits et les intérêts des travailleurs. La commission a également pris note du règlement du Conseil des ministres no 193 du 14 février 2009, aux termes duquel les projets de loi ayant des incidences sur les droits et les intérêts des citoyens au travail et dans le domaine socio-économiques sont soumis à la FPB, en tant qu’organisation de travailleurs la plus représentative, aux fins d’éventuels commentaires et/ou propositions. La commission a prié le gouvernement de modifier le règlement afin de garantir que le BKDP et la FPB, en tant que membres du Conseil national du travail et des questions sociales et du Conseil tripartite, jouissent des mêmes droits en matière de consultations lorsqu’il s’agit d’élaborer un texte de loi. La commission note que le gouvernement considère que le règlement est conforme aux normes internationales du travail et réaffirme à cet égard que la FPB, en tant qu’organisation comptant un nombre global plus élevé de membres, bénéficie de droits préférentiels dans les procédures de consultation sur la législation ayant une incidence sur les droits et les intérêts des travailleurs. La commission se doit de souligner une fois de plus que, pour déterminer la représentativité d’une organisation, le nombre de membres et l’indépendance vis-à-vis des autorités et des organisations d’employeurs sont des éléments essentiels à prendre en considération. Compte tenu du soutien susmentionné exprimé publiquement par les autorités de l’État au plus haut niveau en faveur de la FPB, la commission se voit obligée de réitérer ses précédents commentaires formulés en 2007, qui rappelaient l’importance d’assurer un climat dans lequel les organisations syndicales, au sein ou en dehors de la structure traditionnelle, puissent s’épanouir dans le pays avant d’établir la notion de représentativité. La commission prie à nouveau le gouvernement de modifier sans délai le règlement no 193 et de fournir des informations sur toutes les mesures prises à cet égard.
En ce qui concerne la demande de la commission de renforcer davantage le rôle du Conseil tripartite, qui devrait, comme son titre l’indique, servir d’instance au sein de laquelle peuvent avoir lieu des consultations sur la législation ayant une incidence sur les droits et intérêts des partenaires sociaux et des travailleurs et employeurs qu’ils représentent, la commission note que le gouvernement réitère que le Conseil tripartite a été créé sur les conseils du BIT pour examiner les questions liées à la mise en œuvre des recommandations de la Commission d’enquête ainsi que d’autres questions qui peuvent se poser entre le gouvernement et ses partenaires sociaux, y compris l’examen des plaintes reçues des syndicats. La commission note que le gouvernement réitère sa volonté soit d’œuvrer à améliorer encore le fonctionnement du Conseil tripartite, soit de créer une autre structure. Elle note également que le gouvernement exprime une fois de plus sa préoccupation concernant la question de la représentation au Conseil et la volonté des parties d’accepter les décisions qui seront prises au sein de cet organe tripartite.
La commission note avec préoccupation l’allégation du BKDP selon laquelle les lois et règlements ayant une incidence sur le travail et les intérêts sociaux de la population sont adoptés sans discussion publique et sans coordination avec les parties intéressées. Le BKDP allègue qu’il est également exclu du processus et que son président n’a été invité ni à la réunion du Conseil national du travail et des questions sociales tenue en 2020, ni à la celle tenue le 29 avril 2021 par vidéoconférence pour discuter de la préparation du projet d’accord général pour 2022-2024, ni non plus à la réunion tenue le 28 juillet 2021, également par vidéoconférence, pour discuter de la question des sanctions économiques imposées au pays. Le BKDP indique que, le 15 juillet 2021, il a adressé une correspondance au ministère du Travail et de la Protection sociale pour lui suggérer de convoquer une réunion du Conseil tripartite afin de discuter de la possibilité d’élaborer un plan d’action pour la mise en œuvre des conclusions de la Commission de la Conférence et des recommandations de la Commission d’enquête, mais qu’il n’a reçu aucune réponse. La commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires à ce sujet.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle diverses mesures qu’il a prises – les mesures visant à développer le système de partenariat social qui associe au dialogue tous les syndicats et associations d’employeurs intéressés, sa coopération constructive avec le BIT pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête et son ouverture à une coopération plus poussée – confirment l’engagement du Bélarus en faveur des principes et droits au travail fondamentaux et sa volonté de continuer à s’engager sur les questions préoccupantes soulevées par les parties. La commission s’attend à ce que le gouvernement s’engage pleinement avec les partenaires sociaux, avec le BIT et avec les institutions et organes nationaux pertinents, en vue d’améliorer le fonctionnement, les procédures et les travaux du Conseil tripartite, pour renforcer son impact dans le traitement des questions découlant des recommandations de la Commission d’enquête et des autres organes de contrôle de l’OIT.
Système de résolution des conflits du travail. La commission rappelle qu’elle a précédemment noté la nécessité de continuer à travailler ensemble à la mise en place d’un système solide et efficace de résolution des conflits, qui puisse traiter les conflits du travail portant sur des questions individuelles, collectives et syndicales. Elle note que le gouvernement souligne son engagement à poursuivre son travail conjoint avec les partenaires sociaux et le BIT pour développer un tel système. À cet égard, le gouvernement exprime son appréciation de l’assistance reçue du BIT pour faire avancer les travaux du Conseil tripartite, qui, de l’avis du gouvernement, ont donné des résultats positifs et concrets. La commission prie le gouvernement de s’engager activement avec les partenaires sociaux en vue de mettre en place un système de résolution des conflits du travail qui soit solide, efficace et qui jouisse de la confiance des parties. Elle prie le gouvernement d’indiquer toutes les mesures adoptées et toutes les démarches entreprises à cette fin.
La commission rappelle que, dans son rapport de 2004, la Commission d’enquête a estimé que ses recommandations devaient être mises en œuvre sans délai et que la majorité d’entre elles devraient être appliquées au plus tard le 1er juin 2005. La commission regrette profondément que, 17 ans plus tard, la situation au Bélarus soit encore loin de garantir le plein respect de la liberté syndicale et l’application des dispositions de la convention et que nombre des recommandations de la Commission d’enquête n’aient pas été mises en œuvre. La commission observe que la Commission de la Conférence de 2021 a prié instamment le gouvernement de prendre avant la Conférence internationale du Travail de 2022, en étroite consultation avec les partenaires sociaux, toutes les mesures nécessaires pour mettre pleinement en œuvre toutes les recommandations en suspens de la Commission d’enquête. Elle regrette de constater que les développements récents, y compris de nature législative, examinés ci-dessus, semblent indiquer un retour en arrière continu sur certains progrès réalisés précédemment. La commission prie donc instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts décrits plus haut et espère que le gouvernement, avec l’assistance du BIT et en consultation avec les partenaires sociaux, prendra les mesures nécessaires pour mettre pleinement en œuvre toutes les recommandations en suspens sans délai supplémentaire.
À la lumière de la situation ainsi décrite, la commission se voit obligée de noter qu’il n’y a pas eu de progrès significatifs dans la mise en œuvre complète des recommandations de la Commission d’enquête de 2004, et elle note avec une vive inquiétude que les récents développements mentionnés en détail ci-dessus et l’apparente absence d’action de la part du gouvernement pour donner suite aux conclusions de la Commission de la Conférence en consultation avec tous les partenaires sociaux du pays sembleraient démontrer un manque d’engagement à assurer le respect de ses obligations en vertu de la Constitution de l’OIT.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2022.]
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