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- 551. Dans une communication du 29 décembre 1982, la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) a soumis une plainte pour violation des droits syndicaux au Canada/Colombie britannique. Elle a transmis des informations supplémentaires à l'appui de cette plainte les 21 janvier, 10 février, 25 août et 31 octobre 1983. Le gouvernement a envoyé ses observations sur les communications initiales de la CMOPE dans une lettre du 17 mai 1983.
- 552. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ni non plus la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 553. Dans sa communication du 29 décembre 1982, la CMOPE déclare que, par suite des réductions subites des budgets des conseils scolaires que le gouvernement provincial a imposées, les conventions collectives en vigueur conclues par les enseignants et leurs employeurs, à savoir les conseils scolaires, ne seront pas appliquées et un grand nombre d'enseignants risquent le licenciement. La confédération affirme aussi qu'un texte de loi d'urgence fait obligation de réduire les salaires fixés par les conventions collectives d'un montant correspondant à la rémunération afférente à 5 ou à 11 jours de travail, l'année scolaire ayant été raccourcie de cinq jours.
- 554. L'organisation plaignante fait observer que, bien que les conseils scolaires soient responsables de leurs propres budgets, ils n'en sont pas moins tributaires, les procédures fiscales étant ce qu'elles sont, de subventions annuelles accordées par le gouvernement provincial. La réduction de ces subventions est d'une telle ampleur que les conseils ne peuvent pas répondre aux obligations salariales qui leur incombent en vertu des conventions collectives actuellement en vigueur. En conséquence, dans quelques circonscriptions scolaires, les conseils offrent aux syndicats le choix entre, d'une part, une renégociation volontaire des conventions collectives et, d'autre part, l'acceptation, soit d'une réduction des salaires, soit de licenciements d'enseignants.
- 555. Selon la CMOPE, le ministre de l'Education a pressé les enseignants d'accepter le premier de ces deux partis et a déclaré qu'il utilisera le mode de financement pour imposer un gel des salaires en 1983. Bien que la législation provinciale pertinente n'évoque pas le droit des fonctionnaires de recourir à la grève pour des questions n'entrant pas dans le cadre de la négociation collective, le ministre de l'Education a menacé de licenciement tout enseignant qui prendrait part à un arrêt de travail décrété pour protester contre les mesures mentionnées ci-dessus.
- 556. Dans sa communication du 21 janvier 1983, la CMOPE communique la loi d'urgence - la loi (provisoire) sur les services scolaires - qui est devenue exécutoire le 14 octobre 1982. Selon les articles 1 3) et 5 3), les conseils scolaires devront amputer les versements au titre du salaire payés à chaque fonctionnaire d'un montant total correspondant à la rémunération afférente à cinq jours ouvrables au cours de la période s'étendant du 1er janvier 1983 jusqu'au 30 juin 1983 et, si les conseils et les enseignants ne parviennent pas à un accord sur les jours non rémunérés pendant lesquels un enseignement n'est pas dispensé au cours de l'année scolaire 1982-83, une nouvelle compression correspondant au salaire afférent à deux jours ouvrables sera effectuée mensuellement pour les mois d'octobre, de novembre et de décembre 1982. L'organisation plaignante fait observer qu'au titre de l'article 2 la loi est censée annuler toutes dispositions d'un contrat ou d'une loi en vigueur qui seraient en contradiction avec elle.
- 557. Tout en relevant que le gouvernement du Canada n'a pas ratifié les conventions nos 98 et 154, l'organisation plaignante déclare que ce changement unilatéral des conditions prévues par les conventions collectives en vigueur est une infraction au principe de la détermination bilatérale de la négociation collective.
- 558. En outre, selon la CMOPE, les commentaires faits en public par le ministre de l'Education, lorsqu'il a menacé de procéder à des licenciements si des conventions ou des décisions arbitrales accordaient des augmentations salariales, aussi minimes soient-elles, a indûment infléchi les procédures d'arbitrage qui sont obligatoires dans les cas où un accord bilatéral ne parvient pas à être conclu. L'organisation plaignante joint une copie des observations d'un conseil d'arbitrage qui, faisant état des menaces du ministre, les décrit comme étant "totalement injustifiées et une ingérence indue dans les fonctions judiciaires de ce conseil".
- 559. Avec sa communication du 10 février 1983, l'organisation plaignante transmet la copie de la décision rendue par un arbitre éminemment respecté, concernant le stade final des négociations salariales entre certains enseignants et les conseils qui les employaient. La sentence - rendue le 4 décembre 1982 - se réfère aux effets discriminatoires de la loi nouvelle, qui faisait supporter aux enseignants seuls des réductions de salaires par rapport aux rémunérations qui avaient été convenues antérieurement, et elle accorde notamment une augmentation de 3,5 pour cent aux enseignants concernés malgré les recommandations susmentionnées du ministère de l'Education.
- 560. Dans sa communication du 25 août 1983, la CMOPE se réfère aux projets de lois provinciales qui semblent avoir pour objet de priver les fonctionnaires en général et les enseignants en particulier de la possibilité de négocier collectivement. L'organisation joint le texte des trois projets de lois considérés. Le premier est le projet de loi 3 sur le secteur public (restrictions) qui donne toute latitude à l'employeur de licencier, sans recours, les salariés pour une large gamme de considérations économiques - les dispositions prévoyant des formes et garanties de procédure qui figureraient dans les conventions collectives en vigueur n'étant applicables que jusqu'à la date initialement prévue pour l'échéance de la convention, même si celle-ci est, dans son ensemble, unilatéralement prorogée par d'autres mesures gouvernementales. De plus, le projet de loi 3 englobe, dans la définition du "cadre supérieur" un "directeur ou sous-directeur ou tout autre enseignant occupé par un conseil scolaire et exerçant des fonctions de surveillance"; de ce fait, les salaires, les classifications de postes et les conditions d'emploi de ces personnes peuvent être déterminés par le lieutenant gouverneur en conseil au lieu d'être fixés par voie de négociation collective.
- 561. Selon l'organisation plaignante, le projet de loi 11 portant modification de la loi sur la stabilisation de la rémunération convertit les contrôles de la négociation collective, dispositions d'urgence qui avaient été adoptées pour deux ans en 1982, en une mesure permanente et ajoute de nouveaux contrôles de la négociation collective. Ce texte estime que le facteur déterminant de la rémunération est la capacité de payer du secteur public agissant en tant qu'employeur. D'après l'organisation plaignante, cette conception est dangereuse à la lumière d'un projet de loi 6 (provisoire) sur le financement de l'éducation, en vertu duquel le gouvernement s'octroie le pouvoir de contrôler la capacité de payer des employeurs des enseignants, à savoir les conseils scolaires. La CMOPE affirme aussi que le projet de loi 11 habilite un commissaire désigné par le gouvernement à limiter les augmentations salariales, comme à bloquer ou à réduire la rémunération dans le secteur public, conformément à des règlements émis par le gouvernement à sa discrétion.
- 562. Le troisième texte mis en cause par l'organisation plaignante est le projet de loi 26 qui modifie la loi relative aux normes en matière d'emploi de telle sorte que, lorsqu'une convention collective comprend une disposition portant sur une des questions énumérées dans le projet de loi (durée du travail, congés, congés de maternité, licenciement, par exemple), toutes les dispositions de la loi qui se rapportent à cette question, et notamment celles qui sont plus favorables, cessent d'être applicables. En conséquence, d'après l'organisation plaignante, si l'on prend la situation des enseignants de la Colombie britannique en matière de négociation, lorsque des salariés parviendront à obtenir, par voie contractuelle, l'application de dispositions - incomplètes - s'ajoutant aux normes minimales qu'énonce la loi relative aux normes en matière d'emploi, ils risqueront de perdre jusqu'à cette protection minimale pour tout ce qui concerne la question ayant été négociée.
- 563. Dans une communication ultérieure du 31 octobre 1983, la CMOPE déclare que les projets de législation mentionnés plus haut sont devenus lois avec deux amendements importants relativement à la plainte, à savoir que la loi sur les restrictions dans le secteur public (ancien projet no 3) permet de désigner automatiquement les directeurs, vice-directeurs et autres personnels de la catégorie supérieure comme des personnels dont les salaires seront unilatéralement décidés par le gouvernement sans qu'il ait été nécessaire de les avoir désignés préalablement comme personnels de la catégorie supérieure et que la loi (provisoire) sur le financement de l'éducation (ancien projet no 6) est en vigueur jusqu'au 31 décembre 1983. Ceci signifie que le gouvernement contrôlera le pouvoir des employeurs, en l'occurrence des conseils scolaires, de verser des salaires aux enseignants jusqu'à cette date.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 564. Dans sa communication du 17 mai 1983, le gouvernement se réfère à la gravité de la récession qui a sévi en 1982-83 et déclare que l'énorme déficit budgétaire de la province était imputable à des facteurs qu'elle ne maîtrisait pas, tels que les taux d'intérêt élevés, le tassement de la demande d'énergie et les politiques monétaires restrictives, qui ont leur origine ailleurs. Il fait observer que, à la lumière de cette situation d'urgence, le gouvernement de la Colombie britannique a mis sur pied un programme de stabilisation économique comprenant un programme de restrictions dans l'administration de l'Etat et un programme de stabilisation des rémunérations, l'un et l'autre applicables à tous les fonctionnaires provinciaux et municipaux dont l'effectif s'élève à environ 225.000.
- 565. Le gouvernement provincial souligne que son programme de stabilisation des rémunérations n'est pas discriminatoire, que sa durée d'application est limitée à deux ans, qu'il n'enfreint ni ne remet en question des conventions collectives en vigueur (sauf accord des deux parties), qu'il n'entrave ni le droit de libre négociation collective ni le droit de grève et qu'il se borne à suggérer des lignes directrices volontaires prévoyant des augmentations salariales de 0 à 10 pour cent pour la première année et de 0 à 9 pour cent pour la seconde. A la date à laquelle il écrit, 500 plans de rémunérations applicables à presque 100.000 fonctionnaires ont été établis.
- 566. En ce qui concerne les allégations spécifiques formulées dans le présent cas, le gouvernement de la Colombie britannique décrit la procédure, habituelle de négociation collective pour le personnel enseignant et fait observer que la seule modification apportée en application du programme de stabilisation de la rémunération consiste à modifier la forme des conventions négociées (ou les sentences arbitrales lorsqu'il a été recouru à arbitrage) pour en faire des plans de rémunération. Ces plans doivent être soumis, pour examen, au commissaire chargé de l'administration du programme. Selon le gouvernement, celui-ci a reçu toutes les sentences arbitrales régissant le personnel enseignant qui, de par la loi, devaient être rendues à la date du 31 décembre 1982. Le gouvernement déclare que 11 plans de rémunération applicables au personnel enseignant ont été approuvés; ils prévoient des taux d'augmentation allant de 0 à 3,61 pour cent - les circonstances locales déterminant, dans chaque cas, les augmentations salariales effectives - et tiennent compte de la capacité de payer de la province pendant cette récession temporaire.
- 567. En ce qui concerne le raccourcissement de l'année scolaire, le gouvernement de la Colombie britannique note qu'il n'a eu d'effet que sur le montant global des salaires perçu par les enseignants en 1983, pas sur les taux de salaires qui avaient été déterminés par voie de négociation collective. Il souligne également que ce raccourcissement a conduit à un accroissement de productivité.
- 568. Pour ce qui est de l'allégation de menaces contre toute action de protestation des enseignants, le gouvernement de la Colombie britannique explique qu'à l'heure actuelle les grèves des enseignants ne sont pas protégées par le Code du travail de la Colombie britannique et que les absences non autorisées de la salle de classe sont qualifiées par la loi sur les écoles comme étant des fautes graves passibles de mesures disciplinaires, et notamment de licenciement. Il fait en outre observer que, dans toutes les circonscriptions législatives du Canada (à l'exception du Saskatchewan), il est illégal, depuis 39 ans, d'entreprendre une grève ou un lock-out pendant la durée d'application d'une convention collective. Le gouvernement répond à l'allégation selon laquelle les déclarations du ministre de l'Education auraient influencé la procédure d'arbitrage en affirmant qu'aucun des 13 conseils d'arbitrage ayant siégé en 1982 n'a rendu une sentence entérinant la "majoration 0" que le ministre avait recommandée, ce qui prouve manifestement qu'ils n'avaient pas été intimidés. De plus, selon le gouvernement, le ministre a le droit et le devoir de faire connaître son avis au sujet des répercussions budgétaires qu'entraîneraient les résultats des négociations salariales.
- 569. Enfin, le gouvernement souligne que ce programme provincial souple de stabilisation salariale est conforme à l'obligation qu'il a envers la population de protéger les emplois et les services et que, étant de nature temporaire et exceptionnelle, il fonctionne équitablement et sans discrimination.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 570. Le comité note que le présent cas porte essentiellement sur des ingérences alléguées dans la négociation collective résultant de dispositions législatives qui ont pour effet de réduire le montant de la rémunération qu'une certaine catégorie de fonctionnaires de la Colombie britannique, à savoir le personnel enseignant, devait percevoir pendant l'année scolaire 1982-83, et qui avait été précédemment convenu à la faveur d'une négociation collective volontaire. S'ajoute à cela une allégation selon laquelle le ministre provincial de l'Education aurait publiquement proféré des menaces de compressions de personnel au cas où les conventions collectives ou les sentences arbitrales accorderaient une majoration salariale, si minime soit-elle, et des menaces de licenciement si les enseignants essayaient de protester contre la législation nouvellement adoptée.
- 571. De plus, le comité note que l'organisation plaignante, dans sa communication la plus récente, soumet de nouvelles allégations concernant des lois de la Colombie britannique qui instaureraient des restrictions salariales, allégations auxquelles le gouvernement n'a pas encore répondu. Le comité examinera ces allégations lorsqu'il aura reçu les observations du gouvernement.
- 572. Le comité prend note de l'argument du gouvernement selon lequel, ayant été confronté à une récession économique extraordinaire, il a été contraint d'adopter des programmes d'une durée d'application de deux ans tendant à stabiliser les salaires dans le secteur public. Néanmoins, le comité observe que l'allégation faisant actuellement l'objet de son examen ne critique pas la modération salariale générale de son programme de gouvernement; au contraire, le problème est ici que le gouvernement contraint des employeurs publics déterminés, à savoir les conseils scolaires, à résilier des contrats préalablement conclus et encore en vigueur. Le gouvernement le reconnaît partiellement lorsqu'il souligne que la législation ne se répercute ni sur la négociation collective, ni sur le droit de grève, ni sur les procédures d'arbitrage.
- 573. Après avoir examiné ce texte législatif, à savoir la loi (provisoire) sur les services scolaires qui a pour effet de modifier de manière négative les dispositions d'accords collectifs librement négociés, le comité estime qu'une telle action n'est pas compatible avec les principes du droit d'organisation, et ce d'autant plus que la législation a été adoptée, apparemment, sans que les travailleurs en cause, leurs syndicats ou leurs représentants aient été consultés. Le comité a, dans le passé', souligné l'importance qu'il attache au principe de l'autonomie des partenaires à la négociation collective, principe qui a été généralement reconnu au cours de la discussion préparatoire qui a conduit à l'adoption par la Conférence internationale du Travail de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. Il découle de ce principe que les autorités publiques devraient, en règle générale, s'abstenir d'intervenir pour modifier le contenu des accords collectifs librement conclus. Le comité souhaite également rappeler que les restrictions au droit de négociation collective ne pourraient être acceptables qu'à la condition de rester une mesure d'exception limitée à l'indispensable, de ne pas dépasser une période raisonnable et d'être accompagnées de garanties suffisantes pour protéger le niveau de vie des travailleurs.
- 574. En ce qui concerne les restrictions budgétaires imposées dans le présent cas, qui limitent la possibilité des employeurs publics de remplir leurs obligations, le comité considère que l'exercice des prérogatives de puissance publique en matière financière d'une manière qui a pour effet d'empêcher le respect de conventions collectives préalablement négociées par des organismes publics n'est pas compatible avec le principe de la liberté de négociation collective.
- 575. Une question également grave est soulevée par la réponse du gouvernement qui, bien que ne faisant pas l'objet d'allégations, mérite que le comité s'y arrête. Le comité note que, en vertu du programme officiel de stabilisation de la rémunération, les conventions librement conclues ou les sentences arbitrales sont converties en prétendus plans de compensation qui doivent être soumis pour examen au commissaire dont relève le programme. Il semble que si de tels accords ou une sentence accordent une augmentation salariale trop élevée, l'approbation peut être refusée. Le comité estime que cela décourage le recours à la négociation collective volontaire'; il estime aussi qu'une intervention des autorités publiques, même lorsqu'elle vise essentiellement à garantir que les parties qui négocient subordonnent leurs intérêts à la politique économique nationale du gouvernement - que celle-ci recueille ou non leur agrément - n'est pas compatible avec les principes de non-ingérence de la part des autorités publiques.
- 576. A l'allégation concernant des menaces de licenciement en cas d'augmentation salariale de quelque ordre que ce soit, le gouvernement répond en se référant au fait que, à ce jour, malgré ses directives et certaines déclarations, 11 plans de rémunération prévoyant des majorations allant jusqu'à 3,6 pour cent pour des enseignants ont été approuvés sans entraîner le moindre licenciement. De plus, le comité note la détermination des conseils d'arbitrage de la Colombie britannique de ne pas se laisser influencer par de telles déclarations publiques, détermination qui ressort notamment des informations que l'organisation plaignante a fournies. Le comité considère en conséquence que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- 577. De plus, en ce qui concerne les déclarations publiques du ministre de l'Education concernant les licenciements, qui pourraient intervenir si les enseignants entreprenaient une action directe sous la forme d'un arrêt de travail pour protester contre la nouvelle législation, et qui, selon le gouvernement, constitueraient des absences non autorisées de l'établissement d'enseignement et seraient, en conséquence, considérés comme des actes d"'inconduite" aux termes de la loi sur les services scolaires, le comité note que ni la loi sur les services scolaires ni son règlement d'application ne définissent ce qu'on entend par "acte d'inconduite". Bien que le gouvernement soutienne que celle-ci pourrait englober les grèves, car il s'agirait là d'une "absence non autorisée des établissements d'enseignement", le comité ne trouve aucune justification à ce raisonnement dans les textes mêmes de la loi ou du règlement. De plus, le comité souhaite souligner que le principe selon lequel le droit de grève pourrait être limité, voire interdit, dans la fonction publique ou les services essentiels, qu'ils soient publics, semi-publics ou privés, risquerait de perdre tout son sens si la législation sur la fonction publique ou les services essentiels avait une portée trop large. Une telle interdiction , devrait se limiter à la fonction publique exerçant des prérogatives de puissance publique ou aux services dont l'interruption mettrait en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne. Le comité estime que les enseignants ne tombent pas dans cette définition. Le comité note cependant qu'aucune allégation n'a été formulée faisant état de licenciements à la suite d'actes de protestation.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 578. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité note que le gouvernement n'a pas encore répondu à la communication la plus récente de l'organisation plaignante qui se réfère à trois textes de la Colombie britannique, à savoir des lois récentes portant restrictions salariales; en conséquence, le comité reporte son examen des nouvelles allégations jusqu'à ce qu'il ait reçu les observations du gouvernement.
- b) En ce qui concerne l'allégation d'ingérence dans la négociation collective résultant de dispositions législatives qui ont pour effet de réduire le montant du salaire perçu par les enseignants dans l'année scolaire 1982-83 malgré les conventions collectives en vigueur, le comité estime qu'une telle mesure n'est pas compatible avec les principes du droit d'organisation, et ce d'autant plus que la législation considérée a été adoptée, apparemment, sans consultation des travailleurs en cause.
- c) En ce qui concerne les restrictions budgétaires imposées dans le présent cas, qui limitent la possibilité qu'ont les employeurs publics de remplir leurs obligations, à savoir la capacité des conseils scolaires de payer aux enseignants les sommes précédemment convenues, le comité estime que l'exercice des prérogatives de puissance publique en matière financière d'une manière qui a pour effet d'empêcher le respect des conventions collectives préalablement négociées par des organismes publics n'est pas compatible avec le principe de la liberté de négociation collective.
- d) Le comité observe, à l'examen de la réponse générale du gouvernement provincial, que la législation applicable à l'ensemble des fonctionnaires, y compris les enseignants, dispose que les conventions négociées ou les sentences arbitrales seront soumises à l'approbation d'une autorité publique. Le comité souhaite souligner qu'une telle mesure non seulement peut décourager le recours à la négociation collective volontaire, mais qu'elle est également incompatible avec le principe de la non-ingérence des autorités publiques dans le processus de la négociation collective.
- e) Le comité estime que les allégations de menaces de compression du personnel enseignant et de licenciement pour faute grave proférées par le ministre de l'Education dans ses déclarations publiques n'appellent pas un examen plus approfondi; il souhaite cependant attirer l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel l'interdiction du droit de grève des fonctionnaires devrait être limitée aux fonctionnaires exerçant des prérogatives de puissance publique ou aux services dont l'interruption mettrait en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité de la personne.