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Informe definitivo - Informe núm. 251, Junio 1987

Caso núm. 1375 (España) - Fecha de presentación de la queja:: 01-ABR-86 - Cerrado

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  1. 108. La Fédération des employés de banques, de caisses d'épargne, d'assurances et de bureaux (FEBASO) porte plainte en violation de la liberté syndicale en Espagne dans une communication du 1er avril 1986.
  2. 109. Le gouvernement a envoyé ses observations en réponse aux allégations présentées dans cette affaire dans une communication du 15 décembre 1986.
  3. 110. A sa réunion de février 1987, le comité a noté dans son 248e rapport (paragr. 11) que la réponse du gouvernement avait été reçue et qu'un recours en inconstitutionnalité contre la disposition de la loi sur le budget général de l'Etat applicable à certaines catégories de travailleurs et contestée par l'organisation plaignante avait été déposé. Le comité avait donc rappelé au gouvernement que sa saisine n'était pas subordonnée à l'épuisement des voies de recours internes et il avait indiqué au gouvernement qu'il examinerait ce cas quant au fond à sa prochaine réunion.
  4. 111. L'Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 112. La FEBASO, qui déclare être affiliée à l'Union générale des travailleurs (UGT), porte plainte contre le gouvernement de l'Espagne en violation de l'article 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
  2. 113. D'après la FEBASO, les faits sont les suivants: la Direction de la Banque extérieure d'Espagne tente d'appliquer, dans la négociation de la XIIIe convention collective, la loi du budget général de l'Etat (loi no 50 du 30 décembre 1984), dont l'article 44 limite les pensions versées aux classes dites passives, qui sont à la charge de la sécurité sociale ou de tout autre organisme ou entité financé, en tout ou en partie, par des fonds publics, à un plafond de 187.950 pesetas (environ 3.000 francs suisses au cours de la peseta par rapport au franc suisse en décembre 1984, devenus depuis environ 2. 350 francs suisses en avril 1987). Or, explique la FEBASO, la XIIe convention collective de la Banque extérieure d'Espagne prévoit en ses articles 179 à 186 le droit des travailleurs de ladite banque de percevoir un complément de 100 pour cent du total de la rémunération liquide annuelle perçue antérieurement, y compris l'aide familiale, lors du départ à la retraite desdits travailleurs.
  3. 114. Selon la FEBASO, l'application des articles 44 et 46 de la loi no 50 à l'ensemble des travailleurs de la banque porte atteinte à leur droit de négociation collective reconnu par l'article 37, alinéa 1), de la Constitution espagnole, qui dispose que la loi garantira le droit de négociation collective entre les représentants des travailleurs et des employeurs, ainsi que la force obligatoire des conventions. L'article 53, alinéas 1) et 2), de la Constitution consacre la liberté syndicale et les droits inhérents à cette liberté, donc le droit de libre négociation collective.
  4. 115. Toujours d'après la FEBASO, la loi no 50 ne devrait pas s'appliquer à un ensemble de travailleurs qui ne sont ni fonctionnaires de l'Etat, ni non plus des classes dites passives. En effet, la loi budgétaire en question couvre, dans son champ d'application, les sociétés d'Etat qui perçoivent des subventions ou autres aides financières de l'Etat, ce qui n'est pas le cas de la Banque extérieure d'Espagne.
  5. 116. En conclusion, selon la FEBASO, l'application de la loi no 50 dans le présent cas porte gravement atteinte à l'article 4 de la convention no 98 ratifiée par l'Espagne, en enfreignant le droit des travailleurs de la Banque extérieure d'Espagne à la liberté syndicale et au droit de libre négociation collective. Enfin, l'organisation plaignante joint à sa communication des extraits de la loi budgétaire no 50 et de la convention collective no XII.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 117. Dans sa réponse du 15 décembre 1986, le gouvernement observe que la plainte ne porte pas sur l'application d'une loi ou d'une convention collective préalablement négociée entre les parties, qui, aux termes de l'article 37, alinéa 1), de la Constitution espagnole, a effectivement force obligatoire, mais qu'elle porte plutôt sur l'existence d'un cadre légal préalablement posé avant le commencement d'une procédure de négociation, au terme duquel la partie patronale allègue ne pas pouvoir accéder à une certaine demande de la partie ouvrière, à cause de limitations légales qui transcendent sa compétence mais qui sont applicables au processus de formulation de la volonté contractuelle.
  2. 118. La plainte se fonde essentiellement sur la prétendue inapplicabilité d'une loi formelle à une certaine entreprise, au motif qu'elle ne recevrait pas de subventions ou d'aides financières de l'Etat. Pour le gouvernement, cette assertion est absolument inexacte étant donné que la Banque extérieure d'Espagne est une société anonyme d'Etat dans le capital social de laquelle l'Etat détient une participation publique majoritaire.
  3. 119. Le gouvernement convient que l'article 37, alinéa 1), de la Constitution espagnole garantit le droit de négociation collective entre les représentants des travailleurs et des employeurs ainsi que la force obligatoire des conventions, mais il ajoute que l'article 131 de la Constitution dispose également que l'Etat, par voie législative, pourra planifier l'activité économique générale pour tenir compte des nécessités collectives, équilibrer et harmoniser le développement régional et sectoriel et encourager la croissance des revenus et des biens et leur redistribution la plus équitable. Enfin, l'article 53 de la Constitution prévoit que les droits et les libertés en question lient l'ensemble des pouvoirs publics et que seule la loi peut réglementer l'exercice desdits droits et libertés.
  4. 120. D'après le gouvernement, la loi budgétaire no 50 du 30 décembre 1984, réglementant le budget de l'Etat pour 1985, à laquelle se réfère la plainte, se situe dans ce cadre. Cette loi traite, pour la première fois, des revenus des sociétés étatiques qui perçoivent des subventions ou d'autres aides financières de l'Etat et comporte une réforme du régime de pensions qui était alors en vigueur des classes dites passives. Elle prévoit que l'ensemble des pensions des différents régimes publics de prévoyance sociale doit être considéré conjointement afin de limiter l'accroissement constant des pensions.
  5. 121. La loi no 46 du 27 décembre 1985, concernant le budget général de l'Etat pour 1986, affine d'ailleurs la réforme commencée par la loi antérieure, en mettant l'accent sur la nécessité de poursuivre une politique de redistribution adéquate des revenus publics, poursuit le gouvernement.
  6. 122. Il confirme que ces deux lois ont donc fixé à 187.950 pesetas le plafond des pensions mensuelles pouvant être perçues par une seule personne, qu'il s'agisse d'une seule pension ou de plusieurs provenant de systèmes ou de régimes publics de protection sociale différents, régimes dont fait partie la Banque extérieure d'Espagne en tant que société d'Etat à capitaux majoritairement publics.
  7. 123. Le gouvernement estime que la loi no 50 de décembre 1984 ne viole pas le droit de négociation collective, mais qu'elle applique le mandat constitutionnel qui lui est imparti de planification de l'activité économique générale en vue d'une redistribution plus équitable des revenus et des biens, et que la négociation de la convention collective en cause se doit de s'y ajuster.
  8. 124. Le gouvernement indique que le Tribunal constitutionnel doit d'ailleurs statuer sur l'harmonisation de ses propres normes en ce qui concerne la portée de la loi budgétaire au regard du contenu d'une convention collective en vigueur, ce qui, d'après le gouvernement, n'est pas le cas.
  9. 125. Le gouvernement indique aussi que le ministère de l'Economie et du Logement estime, comme l'a indiqué le sous-secrétaire d'Etat au président de la Banque extérieure d'Espagne dans une communication du 6 mai 1986 en réponse à une demande formulée par le comité exécutif, qu'il n'est pas possible d'alléguer à l'encontre de la loi budgétaire no 50 des droits acquis par les futurs et éventuels percepteurs d'avoirs passifs, étant donné que la loi en question est applicable à la Banque extérieure d'Espagne, société étatique, qui perçoit des subventions et autres aides extérieures de l'Etat.
  10. 126. En ce qui concerne une prétendue atteinte à l'article 4 de la convention no 98, qui découlerait de la loi no 50, le gouvernement considère n'avoir absolument pas violé cet article, étant donné qu'il n'a pas failli à ce qui est consacré dans la disposition en question, à savoir que l'Etat espagnol a adopté toutes les mesures nécessaires pour encourager et promouvoir la négociation collective entre les représentants des employeurs et des travailleurs et qu'il n'a pas porté atteinte à l'exercice de la liberté syndicale. Il s'agit uniquement, dans le présent cas, de rendre conforme aux directives de politique économique fixées par le gouvernement, en vue d'une plus juste redistribution des bénéfices et des charges sociales, le contenu de la future convention collective.
  11. 127. Selon le gouvernement, il n'y a pas eu de violation du droit de négociation collective, et la plainte n'est donc pas admissible.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 128. Le comité observe que la plainte porte essentiellement sur les incidences d'une législation budgétaire restrictive sur le renouvellement du contenu d'une convention collective, couvrant le secteur des pensions de retraite du personnel des sociétés étatiques qui perçoivent des subventions ou autres aides financières de l'Etat.
  2. 129. Dans le cas d'espèce, le comité note que, au dire même du gouvernement, la loi budgétaire no 50 du 30 décembre 1984, réglementant le budget de l'Etat pour 1985, ainsi que la loi no 46 du 27 décembre 1985, réglementant le budget de l'Etat pour 1986, limitent à 187.950 pesetas par mois le plafond des pensions de retraite qu'une seule personne peut percevoir.
  3. 130. Le comité note également que les articles 184 et 185 de la XIIe convention collective de la Banque extérieure d'Espagne stipulaient expressément que l'entreprise s'obligeait à verser la différence entre la retraite de la sécurité sociale ou de tout autre organisme public ou privé auquel la banque contribue par ses cotisations et les cent pour cent du total de la rémunération liquide annuelle du personnel âgé de 60 ans et ayant effectué quarante années de service dans la profession ou trente-cinq années de service dans la Banque extérieure d'Espagne, sur la base des trente-six derniers mois de salaire précédant le départ à la retraite des intéressés. Il note également que le gouvernement confirme que la nouvelle convention collective (la convention no XIII) doit s'ajuster aux dispositions de la loi no 50.
  4. 131. Le comité estime que, dans la mesure où la loi no 50 de décembre 1984, renouvelée en 1985, s'applique aux retraités couverts par la convention collective no XII en limitant à 187.950 pesetas par mois les pensions de retraite des intéressés, cette législation porte atteinte aux droits, préalablement négociés et consacrés par une convention collective, des anciens travailleurs de percevoir, après quarante années de service dans la profession ou trente-cinq années de service à la Banque extérieure d'Espagne et avoir atteint l'âge de 60 ans, les cent pour cent de leur rémunération liquide annuelle.
  5. 132. Le comité a pris bonne note des arguments du gouvernement concernant sa responsabilité en matière de redistribution plus équitable des revenus et des biens; néanmoins, le comité rappelle que, dans le domaine de la négociation collective, les gouvernements devraient toujours préférer la persuasion à la contrainte, les parties devant rester libres de leurs décisions finales.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 133. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Au sujet des mesures contenues dans les dispositions des lois budgétaires de 1984 et de 1985, qui établissent un plafond aux pensions de retraite dans le secteur public, et en particulier un plafond de retraite pour le personnel de la Banque extérieure d'Espagne, plaignant dans cette affaire, par une décision unilatérale, le comité estime que de telles mesures portent atteinte aux droits à pension de ces travailleurs. Néanmoins, il observe que le Tribunal constitutionnel ne s'est pas encore prononcé sur la constitutionnalité de ces lois par rapport aux conventions collectives déjà en vigueur.
    • b) Le comité rappelle que les gouvernements devraient préférer la persuasion à la contrainte et qu'en tout état de cause les parties devraient rester libres de leurs décisions finales.
    • c) Le comité invite en conséquence le gouvernement à prendre des mesures en vue de réexaminer les dispositions législatives en cause et de s'efforcer d'assurer que les questions concernant la fixation des pensions de retraite des travailleurs soient résolues par la négociation directe entre les parties.
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