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- 544. Dans une communication conjointe en date du 17 février 1994, la Confédération suédoise des syndicats (LO), la Confédération générale des cadres, fonctionnaires et employés de Suède (TCO) et la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) ont présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de la Suède.
- 545. Le gouvernement a fait parvenir ses observations sur le cas dans une communication datée du 2 mai 1994.
- 546. La Suède a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes
- 547. Dans leur plainte du 17 février 1994, la LO, la TCO et la CISL allèguent qu'une décision prise par le Parlement suédois le 16 décembre 1993, qui amende la loi de 1982 sur la protection de l'emploi (ci-après dénommée "la loi de 1982") et qui invaliderait les conventions collectives conclues, viole les conventions nos 98 et 154, toutes deux ratifiées par la Suède. Les organisations plaignantes expliquent que la loi de 1982 comprend notamment des dispositions concernant les contrats de travail. Le principe directeur de cette loi est que le contrat d'engagement est valable jusqu'à nouveau préavis. Il existe cependant des dispositions sur les contrats de travail à durée déterminée. L'employeur et le salarié peuvent conclure un engagement à l'essai si la période d'essai n'excède pas six mois. Par ailleurs, des contrats d'engagement peuvent être conclus pour une certaine durée, par exemple en cas de surcroît occasionnel de travail pour une durée n'excédant pas six mois au total au cours d'une période de deux ans. Cependant, cette loi régissant la question est sujette à dérogation, ce qui veut dire que l'employeur et l'organisation syndicale peuvent, par voie de convention collective, prescrire des dispositions supplémentaires concernant ces questions, y compris les périodes et les règles de la codétermination.
- 548. Les organisations plaignantes considèrent que la décision du Parlement en la matière a les effets suivants: i) la période durant laquelle il est permis d'utiliser les travailleurs temporaires en cas de surcroît de travail passera d'un maximum total de six mois à un maximum total de douze mois au cours d'une période de deux ans; ii) la période maximale d'essai pour un engagement à l'essai passera de six à douze mois; iii) les conventions collectives existantes qui stipulent des périodes d'emploi temporaire et à l'essai plus courtes que celles des nouvelles dispositions seront ignorées. Ceci ressort du point 2 des dispositions transitoires de la nouvelle loi (loi de 1993: 1496) dont une copie est jointe en suédois par les organisations plaignantes.
- 549. Les organisations plaignantes estiment que la décision du Parlement déclarant nulles et de nul effet les conventions collectives déjà conclues est contraire à l'article 4 de la convention no 98. Elles soutiennent que ces conventions collectives avaient été conclues volontairement entre les organisations d'employeurs et de travailleurs de Suède. Si l'Etat a le droit d'annuler les conventions collectives existantes, le droit à la liberté de négociation des partenaires sociaux est considérablement affaibli dans la pratique. En outre, ceci conduirait à priver les partenaires sociaux de leur autonomie, et ceux-ci ne pourraient plus alors se fier à leurs propres accords sans risque d'ingérence de l'Etat. De l'avis des organisations plaignantes, l'Etat n'avait pas de bonnes raisons d'intervenir dans l'exercice de la libre négociation collective, pas plus que la nature des problèmes en question concernant l'engagement temporaire et à l'essai ne justifiait son intervention.
- 550. Les organisations plaignantes soutiennent que la décision prise par le Parlement d'abolir les conventions collectives est contraire à la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981, qui définit l'importance de l'Etat dans la promotion de la négociation collective indépendante et volontaire, et les objectifs de ces mesures. De plus, les représentants des travailleurs ont soutenu que la proposition du gouvernement était contraire aux conventions nos 98 et 154 avant même que la décision ne soit prise par le Parlement, mais sans résultat.
- 551. En résumé, les organisations plaignantes concluent que la décision prise par le Parlement de considérer comme nulles et de nul effet les conventions collectives en vigueur constitue une ingérence dans le droit à la liberté de négociation, contraire aux conventions nos 98 et 154. La question de cette ingérence est capitale car, si une ingérence telle que celle décrite plus haut était autorisée, cela pourrait entraîner à long terme des risques évidents d'ingérence dans d'autres domaines également régis par les conventions collectives. Les organisations plaignantes estiment que cette loi devrait être amendée de manière que la Suède respecte ses engagements en la matière.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 552. Dans sa communication en date du 2 mai 1994, le gouvernement décrit d'abord les grandes lignes du système d'engagement à durée déterminée en rapport avec un surcroît occasionnel de travail et les contrats à l'essai. Il précise que la loi suédoise, article 4 de la loi de 1982 sur la protection de l'emploi, fait de l'engagement à durée indéterminée la pratique normale. L'article 5 de la loi de 1982 prévoit cependant l'engagement à durée déterminée dans certains cas précis, par exemple en cas de surcroît de travail. En outre, l'article 6 permet la conclusion d'engagements à l'essai pour une durée déterminée.
- 553. Les nouvelles périodes maximales pour l'engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail et pour l'engagement à l'essai ont été définies dans un amendement législatif entré en vigueur le 1er janvier 1994. Avant cet amendement, l'engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail pouvait durer jusqu'à six mois au cours d'une période de deux ans. L'objet de cette disposition était de permettre à l'employeur de faire face à certaines situations exigeant un renforcement temporaire de personnel. De la même manière, l'engagement à l'essai pouvait durer jusqu'à six mois avant l'amendement. Le contrat à l'essai était censé déboucher sur un contrat à durée indéterminée à l'expiration de la période d'essai. Lorsque ni l'employeur ni le salarié ne désirait que l'engagement continue à l'expiration de la période d'essai, un avis à cet effet devait être donné à l'autre partie au plus tard à l'expiration de cette période. En l'absence d'un tel avis, le contrat de travail à l'essai était converti en un contrat à durée indéterminée. Depuis le 1er janvier 1994, les possibilités d'engager du personnel en cas de surcroît de travail ont été élargies en portant de six à douze mois la durée de la période autorisée au cours d'une période de deux ans. De même, la durée maximale autorisée de l'engagement à l'essai a été portée à douze mois.
- 554. Parmi les diverses raisons avancées par le projet de loi pour prolonger la durée maximale autorisée de l'engagement à l'essai en cas de surcroît de travail, on peut noter les suivantes: l'engagement à durée indéterminée continuera à être la procédure normale d'embauche; le délai légal de l'embauche en cas de surcroît de travail vise à prévenir les abus et les contournements de la loi; une limitation dans le temps permet effectivement d'empêcher un employeur d'abuser de la loi en employant le même salarié pendant une longue durée pour un surcroît de travail. Cependant, le délai ne doit pas être réduit au point de supprimer un nombre excessif d'engagements à durée déterminée qui se justifient. Si, par exemple, une entreprise obtient une grosse commande dont l'exécution prendra plus de six mois, il est absurde que l'employeur soit forcé d'engager indéfiniment du personnel supplémentaire qui devra alors recevoir un préavis ou être transféré à d'autres activités en cas d'excédent de main-d'oeuvre. La durée autorisée de l'engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail doit donc être allongée. Si l'employeur a encore besoin du salarié après douze mois au total, rien ne lui permet de dire que le besoin est motivé par un surcroît de travail. Si l'employeur souhaite continuer à utiliser les services du salarié, il devra lui offrir un contrat de travail à durée indéterminée à la place. Ce seront vraisemblablement les petites entreprises employant peu de salariés qui bénéficieront principalement de l'allongement de la durée de l'engagement en cas de surcroît de travail. Ces entreprises peuvent souvent avoir des difficultés à satisfaire une commande exceptionnelle sans engager du personnel supplémentaire. Par ailleurs, il peut arriver, à long terme, qu'elles soient dans l'impossibilité d'employer de façon permanente un ou plusieurs travailleurs supplémentaires. Cela étant, l'engagement à durée indéterminée ne constitue pas un véritable choix.
- 555. Les raisons d'allonger la période d'essai autorisée sont diverses. Pour l'employeur, la période d'essai a pour objet de lui offrir la possibilité de juger la manière dont un salarié s'acquitte de ses tâches sans avoir à assumer les responsabilités liées à un emploi à durée indéterminée. A l'inverse, la période d'essai constitue, pour le salarié, l'occasion de se faire une opinion sur l'emploi. Pour que l'engagement à l'essai ait l'effet souhaité, la période d'essai doit être assez longue pour offrir une base d'évaluation suffisante. Les règles en vigueur, par exemple, n'offrent aucune possibilité d'extension au cas où le salarié tomberait malade ou partirait en congé. Dans de nombreux cas, une période d'essai de six mois est tout à fait suffisante, mais il existe des situations où une période plus longue serait souhaitable et nécessaire. La question est de savoir quelle devrait être la longueur maximale de cette période. Le Conseil national du marché de l'emploi a affirmé que l'engagement à l'essai sur une période relativement longue pouvait augmenter les chances de prendre pied solidement sur le marché de l'emploi, et qu'il a été prouvé que les périodes d'essai jouaient un rôle capital dans la réadaptation. Le conseil a recommandé d'autoriser l'engagement à l'essai pour une période allant jusqu'à un an. Le gouvernement a retenu la recommandation et a proposé en conséquence une période d'essai maximale de un an. L'élargissement des possibilités d'embauche à l'essai bénéficiera surtout aux petites entreprises, en leur accordant plus de temps pour évaluer la capacité d'un salarié. En outre, comme le soutient le Conseil national du marché de l'emploi, ce changement devrait être profitable pour les salariés, notamment les jeunes, car bien souvent l'engagement à l'essai constitue dans la pratique leur unique chance d'entrer sur le marché du travail et de montrer leurs capacités.
- 556. Le gouvernement explique que l'article 3 de la loi, même après amendement, n'empêche pas les conventions collectives conclues ou approuvées par une organisation centrale de salariés de s'écarter des dispositions légales concernant l'engagement à durée déterminée et l'engagement à l'essai pour une durée déterminée. L'amendement ne porte donc pas atteinte au droit des parties, de convenir par exemple de périodes de durées différentes, plus courtes ou plus longues que celles prescrites par la loi pour l'engagement en cas de surcroît de travail ou l'engagement à l'essai. A l'appui de son argumentation, le gouvernement communique les dispositions transitoires accompagnant ces amendements (point 2):
- Toute convention collective conclue avant l'entrée en vigueur de la présente loi contenant des dispositions prévoyant des périodes d'engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail et d'engagement à l'essai plus courtes que celles stipulées par les articles 5 et 6 de la présente loi sera à cet égard nulle et de nul effet. La convention sera toutefois valide si elle est conclue en dérogation aux articles 5 et 6 de la loi dans son libellé actuel.
- 557. Le gouvernement déclare que les principales raisons avancées par le projet de loi pour cet arrangement étaient les suivantes: le droit de passer des accords sur l'engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail n'était pas régi par la législation jusqu'à l'adoption de la loi de 1982 sur la protection de l'emploi. Au moment du vote de la loi cependant, les conventions collectives dérogeant à ces dispositions n'ont pas été affectées. Il existe encore, dans d'importants domaines du marché de l'emploi, des conventions collectives prévoyant des périodes d'engagement de moins de six mois en cas de surcroît de travail occasionnel et d'engagement à l'essai. Ces dispositions remontent pour la plupart à la période d'avant 1982, durant laquelle ces formes d'engagement n'étaient autorisées que si une convention collective avait été conclue en la matière. Il importe que les amendements législatifs désormais proposés sous forme d'allongement de la période autorisée s'appliquent à l'ensemble du marché du travail et non pas seulement à la partie non réglementée par les conventions collectives. Si tel n'était pas le cas et si les anciennes dispositions collectives devaient donc rester en vigueur, il y aurait un risque évident que les amendements législatifs ne puissent produire assez rapidement les effets escomptés au cours de la reprise imminente.
- 558. De l'avis du gouvernement, il existe fondamentalement deux façons d'obtenir que les amendements législatifs aient l'effet recherché. La première est de rendre les dispositions impératives; ceci reviendrait à priver les parties de la possibilité de conclure des conventions collectives sur ces questions et à décréter que les conventions contraires aux dispositions légales sont caduques. L'autre façon de procéder consiste à prévoir que les dispositions légales restent facultatives pour les parties au marché du travail, mais que soient éliminées les dispositions des conventions collectives en vigueur autorisant des périodes plus courtes. Le gouvernement a choisi de recommander la dernière option, et telle a été la décision prise par le Riksdag (Parlement). Le gouvernement a fait ce choix parce qu'il souhaitait laisser les parties libres d'adapter les dispositions légales par le biais de conventions collectives, selon les besoins d'une industrie, d'une entreprise ou d'une activité quelconque.
- 559. Le gouvernement affirme donc que les parties restent toujours entièrement libres, même depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, de convenir de périodes d'engagement différentes de celles prescrites par la loi. Si les parties sont tombées d'accord sur une période inférieure à six mois, elles peuvent donc encore conclure une nouvelle convention ayant le même effet, même après adoption de l'amendement. Les dispositions transitoires stipulaient aussi que, si les parties le souhaitaient, elles pouvaient déjà avant l'entrée en vigueur de la loi conclure des conventions collectives dérogeant à l'amendement. Ainsi, une convention collective identique à la convention antérieure pouvait entrer en vigueur le même jour que la législation elle-même.
- 560. Le gouvernement reconnaît qu'une telle procédure peut soulever des objections de principe. Cependant, la question n'est pas entièrement nouvelle. Elle a fait l'objet de discussions approfondies lors de l'examen du projet de loi du gouvernement ayant abouti à la loi sur la participation aux décisions dans le travail. Les dispositions transitoires de cette loi stipulaient de manière analogue que les conventions collectives conclues avant l'entrée en vigueur de la loi, qui dérogeraient aux dispositions de la nouvelle loi, seraient nulles et de nul effet. Les raisons avancées étaient qu'une réforme telle que celle de la loi sur la participation aux décisions dans le travail devrait entrer en vigueur au même moment pour l'ensemble du marché du travail, et que son entrée en vigueur ne devait donc pas être régie par des conventions collectives conclues dans des conditions complètement différentes. Lorsque la loi sur l'égalité entre les femmes et les hommes au travail a été adoptée en 1979, il a été prescrit de façon similaire que toute convention conclue avant l'entrée en vigueur de la loi qui dérogerait aux dispositions de la loi serait caduque. Le gouvernement ajoute qu'avant les présents amendements à la loi sur la protection de l'emploi, le Conseil de la législation avait fait la déclaration suivante:
- De nos jours, cependant, il faut considérer comme une pratique législative établie dans le droit du travail l'application rétroactive de règles statutaires non obligatoires aux conventions collectives préexistantes à condition que l'on considère qu'il est urgent que les nouvelles règles statutaires aient un impact rapide sur l'ensemble du marché du travail. La proposition du gouvernement affirme qu'il est important que les amendements statutaires proposés aient un tel impact, et certaines raisons ont été fournies à cela. Le conseil ne souhaite donc pas s'opposer à l'introduction de la disposition transitoire proposée au point 2.
- 561. Par ailleurs, le Comité permanent parlementaire sur les questions du marché du travail déclare notamment:
- L'allongement des périodes de contrat en cas de surcroît de travail et d'engagement à l'essai vise à encourager les entreprises à embaucher de nouveaux salariés, et donc à aider les personnes sans emploi à obtenir un travail. Etant donné la conjoncture actuelle, extrêmement difficile, il est vital que l'impact des règles statutaires soit aussi rapide et généralisé que possible. De l'avis du Comité permanent, les changements dans les règles devraient avant tout bénéficier aux groupes victimes de forts taux de chômage - les jeunes, les immigrants et les autres personnes qui ne sont pas solidement intégrées au marché du travail. Comme l'a fait observer le Conseil de la législation dans sa déclaration, il convient, de nos jours, de considérer comme une pratique législative établie dans le droit du travail l'application rétroactive des règles statutaires non obligatoires aux conventions collectives préexistantes à condition que l'on considère qu'il est urgent et nécessaire que les nouvelles règles statutaires aient un impact rapide sur l'ensemble du marché du travail. Le Comité permanent ne voit donc pas d'obstacle juridique à une disposition transitoire éliminant les parties des conventions collectives qui font obstacle à l'objectif même des amendements statutaires.
- 562. Le gouvernement affirme que, conformément à l'article 4 de la convention no 98, la Suède définit traditionnellement les conditions d'emploi par voie de conventions collectives. Par ailleurs, le droit du travail prévoit que, lorsque plusieurs dispositions législatives sont concernées, les parties peuvent déroger aux règles statutaires en concluant des conventions collectives. Les parties au marché suédois du travail ont donc un rôle très important à jouer dans la réglementation des conditions d'emploi. Le gouvernement estime que l'amendement législatif et les dispositions actuellement à l'examen, qui ont pour effet d'invalider les dispositions des conventions collectives définissant des périodes d'engagement inférieures à 12 mois pour les deux formes d'engagement, ne peuvent pas être considérées comme contraires à la convention. Comme cela a déjà été précisé, les parties restent libres de conclure des conventions collectives dérogeant aux dispositions législatives. Le projet de loi du gouvernement souligne la nécessité essentielle pour les parties d'adapter leurs conventions aux nouvelles dispositions sur l'allongement de la période d'engagement.
- 563. Par ailleurs, le gouvernement fait valoir que, si les plaignants soutiennent que la décision prise par le Parlement est contraire à la convention no 154, ils n'ont pas défini leur position quant à cette convention, pas plus qu'ils n'ont précisé davantage quelle partie de la convention est violée par la Suède. L'article 5 de la convention stipule que "des mesures adaptées aux circonstances nationales devront être prises en vue de promouvoir la négociation collective" et indique quels devront être les objectifs de ces mesures. Le gouvernement ne voit pas en quoi l'amendement en question est contraire à cette disposition, ou à tout autre article de la convention, puisque comme il est indiqué plus haut, les parties sont entièrement libres de conclure de nouvelles conventions collectives.
- 564. Le gouvernement conclut en soutenant qu'il n'a violé aucune des deux conventions précitées en adoptant les dispositions transitoires accompagnant les amendements à la loi sur la protection de l'emploi. Cette mesure a été inspirée par le désir de faire en sorte que l'amendement législatif ait un effet rapide sur le marché suédois du travail. Le gouvernement et le Riksdag ont jugé que cette question avait la plus haute importance, compte tenu de la difficile conjoncture de l'emploi en Suède à l'heure actuelle. Pour promouvoir la liberté de négociation et les conventions collectives entre les parties, le gouvernement et le Riksdag (Parlement) ont choisi de rendre à l'avenir les dispositions en question non obligatoires pour les parties au marché du travail, tout comme elles l'avaient été antérieurement. En d'autres termes, la Suède a encouragé à trouver à l'avenir des solutions à ce problème grâce à la négociation collective.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 565. Le comité note que les allégations dans le présent cas concernent des violations des principes de la négociation collective suite à des amendements à la loi de 1982 sur la protection de l'emploi (ci-après dénommée la loi), entrés en vigueur le 1er janvier 1994 et qui rendent notamment caduques les conventions collectives antérieurement conclues (sur les questions d'engagement à durée déterminée dans certains cas) qui ne se conforment pas aux exigences de la nouvelle législation. Le gouvernement soutient que, si les dispositions transitoires des amendements à la loi de 1982 invalident effectivement les dispositions des conventions collectives non conformes aux exigences de la nouvelle législation conclues antérieurement, elles ne violent pas les principes de la négociation collective, étant donné que les parties peuvent toujours conclure de nouvelles conventions collectives dérogeant aux nouvelles dispositions législatives.
- 566. Le comité note pour sa part qu'aux termes du point 2 des dispositions transitoires des amendements de 1993 les conventions collectives antérieurement négociées prévoyant des périodes inférieures à douze mois pour un engagement à durée déterminée en cas de surcroît de travail et d'engagement à l'essai sont en effet annulées. A cet égard, le comité voudrait avant tout appeler l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale et que les autorités publiques devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. Par ailleurs, le comité a souligné l'importance qu'il attache au principe de l'autonomie des partenaires à la négociation collective, principe généralement reconnu au cours de la discussion préparatoire qui a conduit à l'adoption par la Conférence internationale du Travail de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1985, paragr. 583 et 593.)
- 567. Le comité prend note des explications détaillées du gouvernement selon lesquelles cette mesure législative a été dictée par la situation économique ainsi que par des préoccupations de politique socio-économique. Bien que le comité ait conscience des diverses préoccupations du gouvernement à cet égard, il ne lui appartient pas d'exprimer une opinion de quelque manière que ce soit sur la justification économique de la présente mesure législative. Le comité note que, selon le gouvernement, la libre négociation collective continuera dans tous les cas puisque les parties peuvent, aux termes du point 2 des dispositions transitoires, conclure de nouvelles conventions collectives dérogeant à la nouvelle législation qui pourraient prévoir des périodes d'engagement de la même durée que celle stipulée par les conventions collectives annulées. Toutefois, de l'avis du comité, l'existence de cette possibilité ne change pas la position de base, à savoir que la loi a prépondérance sur les dispositions des conventions collectives existantes.
- 568. Par ailleurs, tout en admettant qu'une loi de cette nature peut être sujette à des objections de principe, le gouvernement explique que cette question n'est pas nouvelle étant donné que les dispositions transitoires de deux lois, à savoir la loi de 1976 sur la participation aux décisions dans le travail et la loi de 1979 sur l'égalité entre les femmes et les hommes au travail, stipulaient que les conventions collectives conclues avant l'entrée en vigueur de ces lois seraient nulles et de nul effet lorsqu'elles dérogeaient aux dispositions de ces lois. Le gouvernement déclare que ces types de mesures, y compris la présente, sont justifiées par le fait que lesdits amendements doivent entrer en vigueur au même moment pour l'ensemble du marché du travail, et que leur entrée en vigueur ne doit pas être régie par des conventions collectives conclues dans des conditions complètement différentes.
- 569. A cet égard, le comité doit faire remarquer au gouvernement que le recours répété à des restrictions législatives ne peut, à long terme, qu'affecter et déstabiliser le climat des relations professionnelles et que si le législateur intervient pour suspendre ou mettre fin à l'exercice de droits reconnus aux syndicats et à leurs membres, cela peut nuire à l'intérêt que les travailleurs et les employeurs portent à l'affiliation syndicale.
- 570. Pour toutes les raisons susmentionnées, le comité estime que la nouvelle loi, dans la mesure où elle l'emporte sur les conventions collectives antérieurement négociées, constitue un acte d'ingérence restreignant le droit des syndicats et des employeurs de négocier librement et, de ce fait, viole le principe de l'autonomie des parties au processus de négociation collective. Le comité demande au gouvernement de s'abstenir à l'avenir d'avoir recours à de telles mesures d'intervention législative. Il lui demande en outre de faire en sorte que le point 2 des dispositions transitoires de la loi de 1993 amendant la loi de 1982 soit modifié de telle sorte que les conventions collectives conclues antérieurement ne soient pas affectées, et de le tenir informé de l'évolution de la situation.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 571. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Considérant que la loi de 1993 amendant la loi de 1982 sur la protection de l'emploi, dans la mesure où elle l'emporte sur les conventions collectives antérieurement conclues, constitue un acte d'ingérence qui viole le principe de l'autonomie des parties à la négociation collective, le comité demande au gouvernement de s'abstenir à l'avenir d'avoir recours à de telles mesures d'intervention législative. Il demande, entre autres, au gouvernement de faire en sorte que la loi de 1993 soit modifiée de telle sorte que les conventions collectives conclues avant son entrée en vigueur ne soient pas affectées, et de le tenir informé de l'évolution de la situation.
- b) Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs du présent cas.