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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 327, Marzo 2002

Caso núm. 2147 (Türkiye) - Fecha de presentación de la queja:: 13-JUL-01 - Cerrado

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  1. 848. Dans une communication datée du 13 juillet 2001, la Confédération des syndicats des fonctionnaires de Turquie a présenté une plainte contre le gouvernement de Turquie pour violation de la liberté syndicale.
  2. 849. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication datée du 22 octobre 2001
  3. 850. La Turquie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 851. Dans sa communication datée du 13 juillet 2001, la Confédération des syndicats des fonctionnaires de Turquie (TÜRKIYE KAMU-SEN) a présenté les allégations suivantes concernant des violations des droits syndicaux en Turquie. M. Mehmet Akyüz est enseignant à l’Université Ondokuz Mayis de Samsun depuis le 28 mai 1992. Il travaille sur la base de contrats à durée déterminée de deux ans, qui ont été renouvelés sans problèmes depuis 1992. M. Mehmet Akyüz est également président de section de Türk Egitim-Sen (Syndicat des fonctionnaires du secteur de l’éducation, affilié à TÜRKIYE KAMU-SEN) depuis 1992. Il a également été élu représentant de TÜRKIYE KAMU-SEN dans la province de Samsun et assume les fonctions attachées à ce poste depuis 1995.
  2. 852. Pendant les premiers mois de 2001, le débat sur la promulgation de la loi sur les fonctionnaires s’est intensifié en Turquie. Cette initiative constructive visant à harmoniser la législation nationale avec les conventions ratifiées de l’OIT a provoqué certains problèmes sur le lieu de travail. En février 2001, M. Mehmet Akyüz a fait plusieurs déclarations publiques à Samsun, qui ont été rapportées par la presse locale. Ces déclarations ne portent atteinte ni à la législation en vigueur sur les fonctionnaires ni au Code pénal turc. L’administration de l’université les a toutefois utilisées comme prétexte pour procéder à une enquête administrative disciplinaire sur leur auteur, suite à laquelle elle n’a pas renouvelé le contrat de travail de M. Mehmet Akyüz, sans fournir le moindre motif, ce qui confirme que ce licenciement de fait (par non-renouvellement d’une série de contrats à durée déterminée) est imputable aux activités syndicales du plaignant, qui devraient s’intensifier suite à la promulgation de la loi sur les fonctionnaires. Le plaignant considère que ce licenciement constitue une violation du droit syndical.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 853. Dans sa communication datée du 22 octobre 2001, le gouvernement indique que la procédure concernant M. Mehmet Akyüz ne constitue nullement une violation de la convention no 87, et renvoie à cet égard à l’article 31 de la loi no 2547 sur l’éducation supérieure relative aux conditions d’engagement des chargés de cours.
  2. 854. La fonction de M. Mehmet Akyüz, chargé de cours au département de l’enseignement de la Faculté de pédagogie, a pris fin à l’échéance de son contrat de travail, ses services n’étant plus requis, et suite également à la décision no 189 prise le 13 juin 2001 par le conseil d’administration de la Faculté de pédagogie.
  3. 855. Il ressort clairement des dispositions de l’article 31 susmentionné que, lorsqu’une activité cesse automatiquement à la fin de la durée d’engagement et qu’un nouvel engagement est envisagé, celui-ci ne s’effectue pas comme la prolongation du contrat existant mais selon les règles régissant un premier contrat. Cette disposition a force obligatoire. L’administration de l’université jouit par conséquent d’un pouvoir discrétionnaire pour les décisions concernant le recrutement des enseignants. Le réengagement de M. Mehmet Akyüz, dont la relation de travail a pris fin à l’échéance de son contrat, est également soumis au pouvoir discrétionnaire de l’administration. Un des principes fondamentaux du droit administratif turc pose que ce pouvoir discrétionnaire n’a pas un caractère absolu et doit s’exercer en tenant compte de l’intérêt général et des besoins du service concerné.
  4. 856. Etant donné que, d’après les principes régissant les instructions en matière d’examen fournies au chargé de cours, M. Mehmet Akyüz a fait preuve de négligence et failli à son devoir lors d’un examen qui s’est déroulé dans le département des beaux-arts de la Faculté de pédagogie le 31 août 2000, l’université a ouvert une enquête disciplinaire à l’issue de laquelle le Conseil de discipline a prononcé un blâme à l’encontre du professeur en question.
  5. 857. Durant la période où il a enseigné à l’Université du 19 mai, M. Mehmet Akyüz s’est également vu infliger un blâme et une réduction d’un huitième de son salaire. Ces sanctions ont été prises à l’issue d’enquêtes disciplinaires décidées suite à diverses déclarations faites à la presse par l’enseignant en question. Une autre enquête est en cours contre lui, au motif qu’il s’est opposé à la répartition des cours.
  6. 858. Le conseil d’administration de la Faculté de pédagogie de l’Université du 19 mai a examiné l’affaire sur la base du comportement fautif de l’enseignant susmentionné; il en a conclu que ce dernier n’était pas en mesure d’assumer la mission éducative et pédagogique qui lui était confiée, et a avisé le recteur de l’université, dans la décision no 2001/189, qu’il considérait que le contrat de travail de M. Mehmet Akyüz ne devrait pas être renouvelé.
  7. 859. Les sanctions disciplinaires susmentionnées n’ont pas été prises parce que l’enseignant, M. Mehmet Akyüz, était président de section, à Samsun, du Syndicat des enseignants de Turquie, mais parce qu’il a, par son comportement, enfreint les dispositions de la réglementation disciplinaire concernant les administrateurs du Conseil supérieur de l’éducation, des enseignants et des fonctionnaires applicable à ses activités. C’est en sa qualité de président de section, à Samsun, du Syndicat des enseignants de Turquie que M. Mehmet Akyüz devait s’adresser à la presse, afin d’informer le public de l’opinion du syndicat sur une question déterminée. Mais les propos qu’il a tenus ont été délibérément insultants vis-à-vis de l’administration et des enseignants de l’université, et ne concernaient donc nullement ses activités syndicales.
  8. 860. Par conséquent, le fait que M. Mehmet Akyüz n’a pas été reconduit dans ses fonctions à l’université, conformément à l’article 31 de la loi no 2547, n’est nullement en rapport avec ses activités syndicales et ne constitue en rien une violation de la convention no 87.
  9. 861. Par ailleurs, la Turquie étant, aux termes mêmes de sa Constitution, un Etat de droit, toutes les mesures et les procédures administratives peuvent être soumises à un contrôle judiciaire: M. Mehmet Akyüz a donc le droit de formuler une demande auprès du tribunal administratif pour s’opposer aux décisions et aux procédures de l’administration de l’université le concernant.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 862. Le comité note que l’allégation, dans le présent cas, concerne le non-renouvellement, pour des raisons de discrimination antisyndicale, du contrat de M. Mehmet Akyüz, président de section du Syndicat des enseignants de Turquie à Samsun.
  2. 863. Le comité prend dûment note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’activité de M. Mehmet Akyüz reposait sur une série de contrats à durée déterminée de deux ans, et qu’à l’échéance de son dernier contrat, en 2001, il a été décidé que ses services n’étaient plus requis. Selon le gouvernement, cette décision a été prise suite à deux blâmes prononcés par le Conseil de discipline de l’université. Le premier blâme concernait l’incapacité alléguée de M. Mehmet Akyüz à assumer les tâches liées à l’organisation d’un examen, le second a été décidé à l’issue d’enquêtes disciplinaires consécutives à diverses déclarations faites à la presse par l’enseignant en question. Tout en reconnaissant que c’est en sa qualité de président de section du Syndicat des enseignants de Turquie à Samsun que M. Mehmet Akyüz devait prendre la parole pour informer le public de l’opinion du syndicat sur une question déterminée, le gouvernement affirme que les propos en question étaient délibérément insultants pour l’administration et les enseignants de l’université et n’avaient aucun rapport avec les activités syndicales de leur auteur.
  3. 864. Le comité relève que, bien que l’organisation plaignante soutienne que le non-renouvellement du contrat de M. Mehmet Akyüz était lié aux déclarations publiques qu’il a prononcées en février 2001, le gouvernement affirme qu’il s’agit d’une des raisons qui ont motivé son licenciement, mais qu’il avait été réprimandé à une occasion antérieure. Pour ce qui est des déclarations publiques, tant le gouvernement que l’organisation plaignante s’entendent sur le fait que ces déclarations ont été prononcées par M. Akyüz en qualité de président de la section locale du syndicat, bien que le gouvernement ajoute que ces déclarations constituaient des insultes à l’égard des universités sans fournir plus d’informations.
  4. 865. En ce qui concerne les déclarations publiques de M. Akyüz, le comité rappelle à ce propos que le droit d’exprimer des opinions par la voie de la presse ou autrement est l’un des éléments essentiels des droits syndicaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 153.] Le comité estime que l’argument général du gouvernement selon lequel les déclarations publiques de M. Mehmet Akyüz étaient insultantes vis-à-vis de l’université, joint à l’explication du plaignant selon laquelle ces déclarations s’inscrivaient dans le cadre d’un débat sur le projet de loi sur les fonctionnaires, ne permet pas de justifier le non-respect du principe de la liberté d’expression, principe fondamental pour toutes les questions syndicales.
  5. 866. Le comité considère que le non-renouvellement du contrat pour des raisons de discrimination antisyndicale constitue un préjudice au sens de l’article 1 de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par la Turquie. Le comité prie dès lors le gouvernement de diligenter une enquête sur les raisons du non-renouvellement du contrat de M. Mehmet Akyüz et de réexaminer cette décision à la lumière des principes ci-dessus énoncés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 867. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Considérant que le non-renouvellement du contrat pour des raisons de discrimination antisyndicale constitue un préjudice au sens de l’article 1 de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête sur les raisons du non-renouvellement du contrat de M. Mehmet Akyüz et de réexaminer cette décision à la lumière des principes ci-dessus énoncés. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
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