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1166. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 2010 et a présenté au Conseil d’administration un rapport intérimaire à ce sujet. [Voir 358e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 309e session (novembre 2010), paragr. 954 à 983.]

  1. 1166. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 2010 et a présenté au Conseil d’administration un rapport intérimaire à ce sujet. [Voir 358e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 309e session (novembre 2010), paragr. 954 à 983.]
  2. 1167. Le gouvernement a fait parvenir des observations additionnelles par une communication datée du 21 février 2011.
  3. 1168. La République bolivarienne du Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 1169. Lors de son dernier examen de ce cas, en novembre 2010 [voir 358e rapport, paragr. 983], le comité a formulé à propos des questions restées pendantes les recommandations suivantes:
    • a) Le comité tient à exprimer sa profonde préoccupation concernant la gravité des allégations d’assassinats de travailleurs et de dirigeants syndicaux, qu’il déplore profondément, et prie instamment le gouvernement d’agir avec diligence pour faire toute la lumière en la matière.
    • b) En ce qui concerne les allégations relatives à l’assassinat de trois dirigeants de l’Union bolivarienne des travailleurs du secteur du bâtiment à El Tigre (MM. Wilfredo Rafael Hernández Avile, secrétaire général, Jesús Argenis Guevara, secrétaire de l’organisation, et Jesús Alberto Hernández, secrétaire à la culture et aux sports) et de deux délégués syndicaux dans la région de Los Anaucos en juin 2009 (MM. Felipe Alejandro Matar Iriarte et Reinaldo José Hernández Berroteran), le comité demande au gouvernement d’intensifier les procédures judiciaires et l’enquête menées par le ministère public afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner sévèrement les auteurs matériels et les commanditaires de ces actes ainsi que leurs complices. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution des procédures et espère qu’elles donneront des résultats dans un proche avenir.
    • c) Pour ce qui est des allégations relatives à l’assassinat par des tueurs à gages de plus de 200 travailleurs et dirigeants du secteur du bâtiment, le comité demande à l’organisation syndicale de fournir sans délai au gouvernement une liste des personnes assassinées et de décrire les circonstances dans lesquelles ces assassinats ont été commis afin que le gouvernement puisse mener au plus vite les enquêtes correspondantes.
    • d) S’agissant des allégations relatives aux poursuites pénales engagées contre six travailleurs de l’entreprise PDVSA et à l’arrestation ultérieure de ces travailleurs décidée par le parquet au motif qu’ils ont paralysé les activités de l’entreprise dans le cadre d’un mouvement de protestation par lequel ils réclamaient le respect de leurs droits de travailleurs, le comité demande au gouvernement ou aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour annuler ces poursuites pénales et obtenir sans délai la libération des dirigeants syndicaux. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires à la modification de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services afin qu’il ne s’applique pas aux services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme et qu’en aucun cas une grève pacifique ne puisse entraîner de sanctions pénales. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité attire l’attention de la commission d’experts sur l’aspect législatif de ce cas.
    • e) Concernant les allégations relatives à la criminalisation du mouvement de protestation, à l’ouverture de procédures judiciaires dans plusieurs entreprises du secteur du pétrole, du gaz et de la sidérurgie et au licenciement de dirigeants en raison de ce mouvement (selon la CTV, des procédures judiciaires ont été engagées contre 27 travailleurs de la holding publique PDVSA et 25 travailleurs de l’entreprise Siderúrgica del Orinoco «Alfredo Maneiro» pour avoir participé à des mouvements de protestation pour défendre leurs droits en tant que travailleurs, et dix délégués syndicaux de la raffinerie d’El Palito ont été licenciés après que 600 travailleurs eurent décidé d’arrêter le travail en raison du non-respect des engagements prévus dans la convention collective; selon la CTV, les travailleurs des entreprises Gas PetroPiar et Gas Comunal ont également été touchés), le comité demande à nouveau à l’organisation plaignante d’envoyer le texte des accusations dont ces syndicalistes feraient l’objet.
    • f) Concernant la mise en examen de 110 travailleurs en raison de leurs revendications, le comité demande une nouvelle fois à l’organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires sur ces allégations, plus précisément les noms des personnes mises en examen et une description de leurs activités présumées, pour que le gouvernement puisse communiquer ses observations à cet égard.
    • g) Le comité invite de nouveau l’organisation plaignante à indiquer si, dans les processus de négociation collective mentionnés par le gouvernement, les droits de négociation collective de ses organisations affiliées ont été respectés.
    • h) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 1170. Dans sa communication du 21 février 2011, le gouvernement déclare à titre préliminaire qu’il tient à exprimer son inquiétude devant les profondes incohérences entre les conclusions et recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans son rapport et sa qualification de ce cas no 2727 comme ayant un «caractère extrêmement grave et urgent». Le gouvernement relève en particulier que le comité avait pris acte de la communication par le gouvernement d’informations relatives au cas no 2727, se réservant de les examiner à sa prochaine session, et notamment qu’au paragraphe 983 de son 358e rapport, il donnait raison au gouvernement et enjoignait à l’organisation plaignante de fournir sans retard au gouvernement des informations détaillées à l’appui de ses allégations en précisant les circonstances des faits allégués afin que les investigations appropriées puissent être effectuées. De fait, sur les six recommandations du comité, quatre (les recommandations c), e), f) et g)) tendaient à ce que l’organisation plaignante fournisse des informations. Quant aux deux restantes, adressées au gouvernement, le fait est que depuis 2009, année où la plainte a été déposée, le comité est tenu informé de l’avancement des enquêtes et des procédures menées suite aux évènements qui se sont produits à El Tigre, Etat d’Anzoátegui, et dans le secteur de Los Anaucos; de même, le comité est tenu informé des procédures judiciaires mises en œuvre par le ministère public à l’encontre de six anciens travailleurs de l’entreprise PDVSA à raison des délits qu’ils sont présumés avoir commis. Pour ces raisons, le gouvernement rejette catégoriquement, comme lors de la 309e session du Conseil d’administration au moment de l’adoption du rapport du Comité de la liberté syndicale, la qualification faite par le comité de ce cas comme ayant un «caractère extrêmement grave et urgent», qualification en vertu de laquelle le comité se dispose à analyser les dernières réponses données par le gouvernement tandis que toutes les informations demandées à l’organisation plaignante font encore défaut alors que, sur les six recommandations du comité, quatre étaient adressées justement à l’organisation plaignante.
  2. 1171. Le gouvernement se réfère ici aux recommandations a) et b) du comité, ainsi conçues: «Le comité […] prie instamment le gouvernement d’agir avec diligence pour faire toute la lumière sur les assassinats de travailleurs et de dirigeants syndicaux». En outre, le comité demande au gouvernement «d’intensifier les procédures judiciaires et l’enquête menées par le ministère public afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner sévèrement les auteurs matériels et les commanditaires de ces actes ainsi que leurs complices». Le gouvernement signale à cet égard que cette plainte a été déposée en juin 2009, puis a été portée à la connaissance du gouvernement, qui y a répondu au mois d’octobre de la même année, soit quelques mois seulement après son dépôt. Dans cette première réponse, le gouvernement a donné des informations sur les enquêtes menées dans ces affaires à la demande du ministère public, indiquant qui étaient les procureurs qui en étaient chargés ainsi que le détail des actions menées par le corps d’investigations scientifiques, pénales et criminelles. Par la suite, en mars et en mai 2010, le gouvernement a communiqué des réponses additionnelles, continuant ainsi de satisfaire à son obligation d’informer le comité sur les progrès accomplis. A travers ces réponses, le comité a eu connaissance du nom des personnes présumées coupables des faits signalés, des accusations présentées par les procureurs, des délits imputés et de l’état d’avancement des procédures et audiences.
  3. 1172. Le gouvernement indique plus spécifiquement qu’en ce qui concerne les meurtres de Wilfredo Rafael Hernández, Jesús Argenis Guevara et Jesús Alberto Hernández survenus le 24 juin 2009 dans l’Etat d’Anzoátegui, le ministère public a demandé le 25 novembre 2009 le désistement des poursuites, en application de l’alinéa 3 de l’article 318 du Code organique de procédure pénale et vu l’alinéa 1 de l’article 48 du même code, puisque le décès du prévenu Pedro Guillermo Rondón, survenu à l’occasion de la commission d’un délit de droit commun, éteint l’action pénale. En ce qui concerne les meurtres de David Alexander Zambrano et Freddy Antonio Miranda Avendaño dans le secteur de Los Anaucos, Etat de Miranda, le gouvernement indique que le ministère public a déposé le 17 décembre 2009 un acte d’accusation pour port illicite d’arme à feu et homicide qualifié contre Richard David Castillo et Jorge Mizael López, et que le procès est actuellement en cours, l’audience étant fixée au 13 avril 2011.
  4. 1173. Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement se déclare surpris des déclarations du comité selon lesquelles le gouvernement devrait agir avec «diligence et célérité afin de faire la lumière sur les assassinats…», «… faire en sorte que les procédures judiciaires et les enquêtes ordonnées par le ministère public s’intensifient…» et que «les auteurs matériels et les commanditaires de ces actes ainsi que leurs complices soient sévèrement punis». Le gouvernement, ses institutions et leurs organes compétents ont agi avec diligence et avec la plus grande célérité que ces affaires exigeaient, sans autre objectif que de faire la lumière sur les faits. Le gouvernement souligne que le ministère public et les autres organes compétents ont mené les enquêtes appropriées et mis en œuvre à l’égard des prévenus les procédures judiciaires qui s’imposaient, afin que ceux-ci soient punis par la juridiction compétente conformément à ce que prévoit la législation nationale pour la commission de tels délits.
  5. 1174. Pour l’ensemble de ces raisons, le gouvernement ne comprend pas la raison des appels que le comité lui adresse, alors que dans chacune de ces affaires il a agi en vue de leur élucidation avec la plus grande célérité, dans la plus grande transparence et avec la plus grande diligence et qu’il a toujours fait preuve de coopération quant à la communication de toutes les informations que cet organe de contrôle de l’OIT a pu lui demander.
  6. 1175. S’agissant des allégations relatives aux poursuites pénales engagées contre six travailleurs de l’entreprise PDVSA et au placement des intéressés en détention, le gouvernement expose une fois de plus que le placement en détention de six travailleurs de PDVSA-GAS – Larry Antonio Pedroza, José Antonio Tovar, Iván Ramón Aparicio Martínez, Jaffet Enrique Castillo Suárez, Rey Régulo Chaparro Hernández et José Luis Hernández Álvaro – est lié à la commission d’un délit de boycott, délit prévu et réprimé par l’article 139 de la loi pour la défense des personnes et l’accès aux biens et aux services. Le ministère public, suite aux investigations appropriées et conformément à la procédure prévue, a déposé formellement un acte d’accusation contre les intéressés. La tenue de l’audience préliminaire a été reportée au 3 mars 2011.
  7. 1176. S’agissant de la loi pour la défense des personnes et l’accès aux biens et aux services, le gouvernement souligne que cet instrument a pour objet la défense, la protection et la sauvegarde des droits et des intérêts individuels et collectifs relatifs à l’accès des personnes aux biens et aux services pour la satisfaction des besoins et pour la paix sociale, la justice et le droit à la vie et à la santé de la population. Plus spécialement, l’article 139 de cette loi dispose que les personnes qui, par des actes ou des omissions, entravent la production, la fabrication, l’importation, le transport, la distribution et la commercialisation des biens reconnus de première nécessité seront punies d’une peine de six à dix ans de prison. Ni cette loi ni aucune autre loi nationale ne porte atteinte au droit de grève ou fait peser des sanctions pénales sur le déploiement de grèves pacifiques n’ayant pas d’incidence sur les biens qui sont de première nécessité pour la population; bien au contraire, cette loi protège la population dans son droit à l’accès aux biens reconnus de première nécessité en punissant toute personne qui mettrait en péril la production et la distribution desdits biens ou produits. C’est pourquoi le gouvernement ne peut donner suite à la recommandation par laquelle le comité demande que soient abandonnées les poursuites pénales engagées contre des personnes qui ont commis des délits qualifiés et punis par l’ordre juridique vénézuélien, étant donné qu’un tel abandon ferait naître des situations d’impunité dans le pays, ce qui irait contre les valeurs et principes proclamés par la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela.
  8. 1177. De même, poursuit le gouvernement, le Comité de la liberté syndicale affirme que le gaz n’est pas un service essentiel pour la population. A cet égard, le gouvernement tient à représenter une fois de plus au comité que l’ensemble des activités et du processus de commercialisation du gaz constitue dans la République bolivarienne du Venezuela un service essentiel et de première nécessité pour la population, service dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité et la santé des personnes. Le gouvernement tient à mentionner au comité que dans la plus grande partie du pays on utilise le gaz pour cuisiner les aliments, si bien que l’interruption de la livraison et de la commercialisation de ce produit constituerait assurément dans la République bolivarienne du Venezuela une atteinte au droit à l’alimentation, donc au droit à la santé et à la vie.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1178. Avant d’examiner les questions pendantes quant au fond, notant que le gouvernement met en question la qualification de ce cas comme présentant un «caractère extrêmement grave et urgent» en dépit des informations qu’il a communiquées, notamment sur les procédures en cours, et alors que le comité est encore en attente d’informations de la part de l’organisation plaignante, le comité souligne que, dans le présent cas, certains faits allégués, y compris certains faits reconnus par le gouvernement, se rapportent à l’assassinat de dirigeants syndicaux. Le comité signale au surplus que la décision de qualifier le caractère d’un cas comme extrêmement grave et urgent est prise au terme d’un débat objectif, qui s’appuie sur tous les éléments disponibles.
  2. 1179. S’agissant des recommandations c), e), f) et g), dans lesquelles le comité demande de plus amples informations à l’organisation plaignante, le comité regrette que l’organisation plaignante ait omis pour la troisième fois consécutive de les communiquer et l’informe que, si elle ne le fait pas avant son prochain examen de ce cas, le comité ne sera pas en mesure d’examiner les allégations en question.
  3. 1180. Le comité réitère donc les recommandations qu’il avait adressées antérieurement à l’organisation plaignante:
    • – pour ce qui est des allégations relatives à l’assassinat par des tueurs à gages de plus de 200 travailleurs et dirigeants syndicaux du secteur du bâtiment, le comité demande à l’organisation syndicale de fournir sans délai au gouvernement une liste des personnes assassinées et de décrire les circonstances dans lesquelles ces assassinats ont été commis afin que le gouvernement puisse mener au plus vite les enquêtes correspondantes;
    • – concernant les allégations relatives à la criminalisation du mouvement de protestation, à l’ouverture de procédures judiciaires dans plusieurs entreprises du secteur du pétrole, du gaz et de la sidérurgie et au licenciement de dirigeants en raison de ce mouvement (selon la CTV, des procédures judiciaires ont été engagées contre 27 travailleurs de la holding publique PDVSA et 25 travailleurs de l’entreprise Siderúrgica del Orinoco «Alfredo Maneiro» pour avoir participé à des mouvements de protestation pour défendre leurs droits en tant que travailleurs, et 10 délégués syndicaux de la raffinerie d’El Palito ont été licenciés après que 600 travailleurs eurent décidé d’arrêter le travail en raison du non-respect des engagements prévus dans la convention collective; selon la CTV, les travailleurs des entreprises Gas PetroPiar et Gas Comunal ont également été touchés), le comité demande à nouveau à l’organisation plaignante d’envoyer le texte des accusations dont ces syndicalistes feraient l’objet;
    • – concernant la mise en examen de 110 travailleurs en raison de leurs revendications, le comité demande une nouvelle fois à l’organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires sur ces allégations, plus précisément les noms des personnes mises en examen et une description de leurs activités présumées, pour que le gouvernement puisse communiquer ses observations à cet égard;
    • – le comité invite de nouveau l’organisation plaignante à indiquer si, dans les processus de négociation collective mentionnés par le gouvernement, les droits de négociation collective de ses organisations affiliées ont été respectés.
  4. 1181. En ce qui concerne les allégations relatives à l’assassinat de trois dirigeants de l’Union bolivarienne des travailleurs du secteur du bâtiment à El Tigre (MM. Wilfredo Rafael Hernández Avile, secrétaire général, Jesús Argenis Guevara, secrétaire de l’organisation, et Jesús Alberto Hernández, secrétaire à la culture et aux sports) et de deux délégués syndicaux dans la région de Los Anaucos en juin 2009 (MM. Felipe Alejandro Matar Iriarte et Reinaldo José Hernández Berroteran), le comité tient à rappeler qu’il a demandé au gouvernement d’intensifier les procédures judiciaires et investigations menées par le ministère public afin que les responsabilités soient déterminées et que les auteurs matériels et les commanditaires de ces actes ainsi que leurs complices soient sévèrement punis, et qu’il avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l’état d’avancement des procédures, espérant qu’elles donneraient des résultats rapidement.
  5. 1182. Le comité note que le gouvernement rappelle que cette plainte a été déposée en juin 2009, puis a été portée à la connaissance du gouvernement, qui y a répondu au mois d’octobre de la même année, soit quelques mois seulement après son dépôt. Dans cette première réponse, le gouvernement a donné des informations sur les enquêtes menées dans ces affaires à la demande du ministère public, indiquant quels étaient les procureurs qui en étaient chargés ainsi que le détail des actions menées par le corps d’investigations scientifiques, pénales et criminelles. Par la suite, en mars et en mai 2010, le gouvernement a communiqué de nouvelles réponses, continuant ainsi de satisfaire à son obligation d’informer le comité sur les progrès accomplis. A travers ces réponses, le comité a eu connaissance du nom des personnes présumées coupables des faits signalés, des accusations présentées par les procureurs, des délits imputés et de l’état d’avancement des procédures et audiences.
  6. 1183. Le comité note que, plus spécifiquement, le gouvernement expose que: 1) en ce qui concerne les meurtres de Wilfredo Rafael Hernández, Jesús Argenis Guevara et Jesús Alberto Hernández survenus le 24 juin 2009 dans l’Etat d’Anzoátegui, le ministère public a demandé le 25 novembre 2009 le désistement des poursuites, en application de l’alinéa 3 de l’article 318 du Code organique de procédure pénale et vu l’alinéa 1 de l’article 48 du même code, puisque le décès du prévenu Pedro Guillermo Rondón, survenu à l’occasion de la commission d’un délit de droit commun, éteint l’action pénale; et 2) en ce qui concerne les meurtres de David Alexander Zambrano et Freddy Antonio Miranda Avendaño dans le secteur de Los Anaucos, Etat de Miranda, le ministère public a déposé le 17 décembre 2009 un acte d’accusation pour port illicite d’arme à feu et homicide qualifié contre Richard David Castillo et Jorge Mizael López, et que le procès est actuellement en cours, l’audience étant fixée au 13 avril 2011.
  7. 1184. Le comité note que le gouvernement se déclare surpris des déclarations du comité selon lesquelles le gouvernement devrait agir avec «diligence et célérité afin de faire la lumière sur les assassinats…», «… faire en sorte que les procédures judiciaires et les enquêtes ordonnées par le ministère public s’intensifient…» et que «les auteurs matériels et les commanditaires de ces actes ainsi que leurs complices soient sévèrement punis», alors que le gouvernement, ses institutions et leurs organes compétents ont agi avec diligence et avec la plus grande célérité que ces affaires exigeaient, sans autre objectif que de faire la lumière sur les faits, diligentant les enquêtes appropriées et mettant en œuvre à l’égard des prévenus les procédures judiciaires qui s’imposaient, afin que ceux-ci soient punis par la juridiction compétente conformément à ce que prévoit la législation nationale pour la commission de tels délits. Le comité signale à l’attention du gouvernement que ses recommandations visaient, en l’espèce, à ce que les auteurs d’assassinats de syndicalistes soient condamnés par les juridictions compétentes et que ce n’est que récemment que le gouvernement a mentionné que les audiences dans le cadre du procès relatif à l’assassinat de ces deux syndicalistes ont été fixées au 13 avril 2011.
  8. 1185. Le comité exprime le ferme espoir que les sentences des juridictions compétentes visant les auteurs matériels de ces actes, leurs commanditaires et leurs complices seront prononcées dans un proche avenir. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  9. 1186. S’agissant des allégations relatives à l’engagement de poursuites pénales à l’encontre de six travailleurs de l’entreprise PDVSA et du placement des intéressés en détention à la demande du ministère public pour le motif que leur action de protestation à l’appui de revendications touchant aux droits du travail avait entraîné la paralysie des activités de l’entreprise, le comité tient à rappeler qu’il avait demandé au gouvernement ou aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour que lesdites poursuites pénales soient abandonnées et ces dirigeants syndicaux remis en liberté sans attendre. Le comité avait également demandé que le gouvernement prenne les mesures nécessaires à la modification de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services afin qu’il ne s’applique pas aux services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme et qu’en aucun cas une grève pacifique ne puisse entraîner de sanctions pénales, et il avait indiqué qu’il attirait l’attention de la commission d’experts sur l’aspect législatif de ce cas.
  10. 1187. Le comité prend note des déclarations faites par le gouvernement au sujet de ses recommandations et, en particulier, que: 1) le placement en détention de six travailleurs de PDVSA-GAS – Larry Antonio Pedroza, José Antonio Tovar, Iván Ramón Aparicio Martínez, Jaffet Enrique Castillo Suárez, Rey Régulo Chaparro Hernández et José Luis Hernández Álvaro – est lié à la commission d’un délit de boycott, délit prévu et réprimé par l’article 139 de la loi pour la défense des personnes et l’accès aux biens et aux services. Le ministère public, suite aux investigations appropriées et conformément à la procédure prévue, a déposé formellement un acte d’accusation contre les intéressés. La tenue de l’audience préliminaire a été reportée au 3 mars 2011; 2) s’agissant de la loi pour la défense des personnes et l’accès aux biens et aux services, cet instrument a pour objet la défense, la protection et la sauvegarde des droits et des intérêts individuels et collectifs relatifs à l’accès des personnes aux biens et aux services pour la satisfaction des besoins et pour la paix sociale, la justice et le droit à la vie et à la santé de la population. Plus spécialement, l’article 139 de cette loi dispose que les personnes qui, par des actes ou des omissions, entravent la production, la fabrication, l’importation, le transport, la distribution et la commercialisation des biens reconnus de première nécessité seront punies d’une peine de six à dix ans de prison; 3) ni cette loi ni aucune autre loi nationale ne porte atteinte au droit de grève ou fait peser des sanctions pénales sur le déploiement de grèves pacifiques n’ayant pas d’incidence sur les biens qui sont de première nécessité pour la population; bien au contraire, cette loi protège la population dans son droit à l’accès aux biens reconnus de première nécessité en punissant toute personne qui mettrait en péril la production et la distribution desdits biens ou produits; 4) c’est pourquoi le gouvernement ne peut donner suite à la recommandation par laquelle le comité demande que soient abandonnées les poursuites pénales engagées contre des personnes qui ont commis des délits qualifiés et punis par l’ordre juridique vénézuélien, étant donné qu’un tel abandon ferait naître des situations d’impunité dans le pays, ce qui irait contre les valeurs et principes proclamés par la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela; 5) le Comité de la liberté syndicale affirmant que le gaz n’est pas un service essentiel pour la population, le gouvernement tient à représenter une fois de plus au comité que l’ensemble des activités et du processus de commercialisation du gaz constitue dans la République bolivarienne du Venezuela un service essentiel et de première nécessité pour la population, service dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité et la santé des personnes. Le gouvernement tient à représenter au comité que dans la plus grande partie du pays on utilise le gaz pour cuisiner les aliments, si bien que l’interruption de la livraison et de la commercialisation de ce produit constituerait assurément dans la République bolivarienne du Venezuela une atteinte au droit à l’alimentation, donc au droit à la santé et à la vie.
  11. 1188. Le comité déplore que le gouvernement n’ait pas donné suite aux recommandations qu’il a formulées à l’issue de son examen antérieur de ce cas et reprenne les mêmes arguments que ceux qu’il avait fait valoir à cette occasion. Le comité renvoie aux conclusions qu’il avait formulées alors [voir 358e rapport, paragr. 977 à 979]:
    • Pour ce qui est des allégations relatives à la mise en accusation par le parquet pour délit de boycott de six travailleurs de l’entreprise PDVSA Gas Comunal (MM. Larry Antonio Pedroza, délégué syndical, José Antonio Tovar, Juan Ramón Aparicio Martínez, Jafet Enrique Castillo Suárez, Roy Rogelio Chaparro Hernández et José Luis Hernández Álvarado) et à leur arrestation ultérieure au motif qu’ils ont paralysé les activités de l’entreprise dans le cadre d’un mouvement de protestation par lequel ils réclamaient le respect de leurs droits de travailleurs (selon la Fédération unitaire des travailleurs du pétrole, gaz, matières connexes et dérivés du Venezuela (FUTPV), le parquet est instrumentalisé par le gouvernement), le comité rappelle qu’il avait noté que le gouvernement a fait savoir que, le 12 juin 2009, un groupe de travailleurs avait paralysé les activités de mise en bouteille du gaz dans le cadre d’une manifestation, affectant la commercialisation d’un bien de première nécessité, motif de leur arrestation. Le 13 juin 2009, le deuxième tribunal de première instance chargé des questions de droit pénal de l’Etat de Miranda a convoqué les travailleurs à une audience au cours de laquelle le procureur de la seizième circonscription a qualifié les faits de boycott au sens de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services, aux termes duquel: «Toute personne qui, seule ou en groupe, organise ou mène des actions, ou se rend coupable d’omissions, empêchant, de manière directe ou indirecte, la production, la fabrication, l’importation, l’approvisionnement, le transport, la distribution ou la commercialisation de biens déclarés de première nécessité sera sanctionnée d’une peine d’emprisonnement allant de six à dix ans.» Le comité avait également relevé que le gouvernement avait signalé que l’article 139 auquel il est fait référence ne s’applique pas au droit de manifestation pacifique. [Voir 356e rapport, paragr. 1649.]
    • Le comité observe que, dans sa dernière réponse, le gouvernement a renouvelé ces déclarations et ajouté que l’autorité judiciaire a fixé l’audience préliminaire au 2 juin 2010 et que, étant donné que la plupart des foyers font usage du gaz pour cuisiner, l’interruption de l’approvisionnement et de la commercialisation de ce produit constitue une atteinte au droit de la population à l’alimentation et, par conséquent, au droit à la santé et à la vie. Le comité note que, d’après le gouvernement, il s’agit d’un service essentiel et de première nécessité, dont l’interruption risquerait de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la population. Le comité relève finalement que la loi ne prévoit pas de sanctions lorsqu’une grève ne porte pas atteinte aux biens de première nécessité pour la population que la législation doit protéger.
    • A cet égard, le comité souligne que l’activité de mise en bouteille du gaz et sa commercialisation ne constituent pas un service essentiel au sens strict du terme (c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne), dans lequel l’exercice du droit de grève ou d’interruption des activités peut être interdit totalement, et encore moins si l’argument mis en avant consiste à dire que c’est un produit que la plupart de la population utilise pour cuisiner. Le comité estime en outre que l’exercice pacifique de ces droits syndicaux ne devrait pas pouvoir faire l’objet de poursuites pénales ni entraîner l’arrestation pour boycott des dirigeants syndicaux organisateurs, comme c’est le cas en l’espèce, en application de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services. Dans ces conditions, le comité rappelle que l’arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l’exercice d’activités syndicales légitimes constitue une violation de la liberté syndicale. Tout en prenant note du fait que le gouvernement déclare ne pas pouvoir annuler les poursuites pénales, le comité rappelle que les autorités publiques sont tenues de respecter les conventions de l’OIT qu’elles ont ratifiées. Le comité demande donc une nouvelle fois au gouvernement ou à l’autorité compétente de prendre les mesures nécessaires pour annuler les poursuites pénales engagées contre les six dirigeants syndicaux de PDVSA Gas Comunal et obtenir leur libération sans délai. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires à la modification de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services (qui prévoit des sanctions pénales en cas d’interruption des activités) afin qu’il ne s’applique pas aux services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme et que, en aucun cas, une grève pacifique ne puisse entraîner de sanctions pénales. Le comité attire à nouveau l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur l’aspect législatif de ce cas. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  12. 1189. Dans ces conditions, le comité réitère ses conclusions et recommandations précédentes sur ces questions.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1190. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité exprime sa profonde préoccupation concernant les graves allégations d’assassinats de travailleurs et de dirigeants syndicaux, qu’il déplore profondément.
    • b) En ce qui concerne les allégations relatives à l’assassinat de trois dirigeants de l’Union bolivarienne des travailleurs du secteur du bâtiment à El Tigre (MM. Wilfredo Rafael Hernández Avile, secrétaire général, Jesús Argenis Guevara, secrétaire de l’organisation, et Jesús Alberto Hernández, secrétaire à la culture et aux sports) et de deux délégués syndicaux dans la région de Los Anaucos en juin 2009 (MM. Felipe Alejandro Matar Iriarte et Reinaldo José Hernández Berroteran), le comité exprime le ferme espoir que les sentences des juridictions compétentes visant les auteurs matériels de ces actes, leurs commanditaires et leurs complices seront prononcées dans un proche avenir. Elle prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • c) S’agissant des allégations relatives aux poursuites pénales engagées contre six travailleurs de l’entreprise PDVSA et à l’arrestation ultérieure de ces travailleurs décidée par le parquet au motif qu’ils ont paralysé les activités de l’entreprise dans le cadre d’un mouvement de protestation par lequel ils réclamaient le respect de leurs droits de travailleurs, le comité demande au gouvernement ou aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour annuler ces poursuites pénales et obtenir sans délai la libération des dirigeants syndicaux. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires à la modification de l’article 139 de la loi pour la défense de l’accès des personnes aux biens et services afin qu’il ne s’applique pas aux services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme et qu’en aucun cas une grève pacifique ne puisse entraîner de sanctions pénales. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité attire l’attention de la commission d’experts sur l’aspect législatif de ce cas.
    • d) Le comité regrette que l’organisation plaignante ait omis pour la troisième fois consécutive de communiquer les informations supplémentaires demandées dans ses conclusions et recommandations précédentes et l’informe que, si elle ne le fait pas avant son prochain examen de ce cas, le comité ne sera pas en mesure d’examiner les allégations en question. Pour mémoire, le comité reproduit ci-après lesdites recommandations:
      • – pour ce qui est des allégations relatives à l’assassinat par des tueurs à gages de plus de 200 travailleurs et dirigeants du secteur du bâtiment, le comité demande à l’organisation syndicale de fournir sans délai au gouvernement une liste des personnes assassinées et de décrire les circonstances dans lesquelles ces assassinats ont été commis afin que le gouvernement puisse mener au plus vite les enquêtes correspondantes;
      • – concernant les allégations relatives à la criminalisation du mouvement de protestation, à l’ouverture de procédures judiciaires dans plusieurs entreprises du secteur du pétrole, du gaz et de la sidérurgie et au licenciement de dirigeants en raison de ce mouvement (selon la CTV, des procédures judiciaires ont été engagées contre 27 travailleurs de la holding publique PDVSA et 25 travailleurs de l’entreprise Siderúrgica del Orinoco «Alfredo Maneiro» pour avoir participé à des mouvements de protestation pour défendre leurs droits en tant que travailleurs, et 10 délégués syndicaux de la raffinerie d’El Palito ont été licenciés après que 600 travailleurs eurent décidé d’arrêter le travail en raison du nonrespect des engagements prévus dans la convention collective; selon la CTV, les travailleurs des entreprises Gas PetroPiar et Gas Comunal ont également été touchés), le comité demande à nouveau à l’organisation plaignante d’envoyer le texte des accusations dont ces syndicalistes feraient l’objet;
      • – concernant la mise en examen de 110 travailleurs en raison de leurs revendications, le comité demande une nouvelle fois à l’organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires sur ces allégations, plus précisément les noms des personnes mises en examen et une description de leurs activités présumées, pour que le gouvernement puisse communiquer ses observations à cet égard;
      • – le comité invite de nouveau l’organisation plaignante à indiquer si, dans les processus de négociation collective mentionnés par le gouvernement, les droits de négociation collective de ses organisations affiliées ont été respectés.
    • e) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
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