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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 374, Marzo 2015

Caso núm. 3052 (Mauricio) - Fecha de presentación de la queja:: 05-DIC-13 - Cerrado

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Allégation: L’organisation plaignante allègue des actes de discrimination antisyndicale par l’entreprise Innodis Ltd contre des dirigeants et des membres de deux organisations syndicales, la Farm Workers’ Union et la Cold Storage Workers’ Union, en représailles à une action de protestation licite menée en novembre 2013 pour réclamer le paiement de primes

  1. 562. La plainte figure dans une communication datée du 5 décembre 2013 envoyée par la Fédération des travailleurs unis (FTU).
  2. 563. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 2 avril 2014.
  3. 564. Maurice a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégation de l’organisation plaignante

A. Allégation de l’organisation plaignante
  1. 565. Dans une communication datée du 5 décembre 2013, la FTU indique que Innodis Ltd est une entreprise privée active dans la distribution de produits secs et surgelés. Les travailleurs d’Innodis Ltd (ci-après l’entreprise) sont soit membres de la Farm Workers’ Union (FWU), soit membres de la Cold Storage Workers’ Union (CSWU), respectivement, toutes deux affiliées à la FTU. Ces deux syndicats sont reconnus par l’entreprise depuis plus de vingt ans.
  2. 566. La FTU déclare que, depuis 1993, chaque employé de l’entreprise peut prétendre à une prime de rendement, versée annuellement vers octobre/novembre. Dans le cadre du renouvellement de la convention collective, un différend du travail a surgi entre les deux syndicats et l’entreprise qui a été examiné par la Commission de conciliation et de médiation (CCM). Ce différend portait sur les points suivants: la question de savoir si la prime de rendement versée à chaque employé pour les années 2011 et 2012, respectivement, devrait ou non représenter un mois de salaire de base; et la question de savoir si chaque salarié se verrait accorder une augmentation de salaire de 15 pour cent à compter du mois d’octobre 2012, en sus de l’augmentation statutaire. Le 6 novembre 2013, avec l’appui de la FTU, les dirigeants des syndicats ont mené une action de protestation licite devant le bureau du ministère du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi exigeant son intervention urgente pour le paiement de la prime.
  3. 567. Selon la FTU, le 12 novembre 2013, une réunion de la commission a eu lieu pour examiner le différend mais, à la surprise générale, la direction de l’entreprise a présenté une motion visant à révoquer le négociateur de la FWU et de la CSWU au motif qu’il avait participé à l’action de protestation du 6 novembre 2013. La commission a toutefois rejeté la motion de l’entreprise. Le lendemain, non satisfaite de cette décision, la direction de l’entreprise, par une lettre du 13 novembre 2013, a révoqué le négociateur avec effet immédiat et lui a interdit l’accès aux locaux de l’entreprise. En outre, les deux présidents et membres exécutifs des deux syndicats ont été convoqués par la direction devant une commission de discipline pour répondre de l’action de protestation qu’ils avaient menée.
  4. 568. L’organisation plaignante insiste sur le fait que tous les travailleurs (11 manifestants) qui ont participé à l’action de protestation étaient au bénéfice d’un congé annuel approuvé, à l’exception du négociateur. Le ministre du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi a convoqué la FWU, la CSWU et l’entreprise à une réunion le 27 novembre 2013 mais l’entreprise a refusé d’y prendre part.
  5. 569. L’organisation plaignante cite ci-après les dispositions législatives applicables:
    • – article 29(1)(c) de la loi sur les relations professionnelles (ERA) (loi no 32 de 2008): «Tout travailleur pourra … prendre part, en dehors des heures de travail ou avec le consentement de l’employeur durant les heures de travail, aux activités licites d’un syndicat dont il est membre»;
    • – article 14(2) de l’ERA: «Nul ne pourra agir comme négociateur d’un syndicat à moins d’avoir été désigné par le comité de gestion de celui-ci; ou comme responsable, à moins d’en avoir la compétence …»;
    • – article 30 de l’ERA: «Nul ne pourra s’ingérer dans la création, le fonctionnement ou la gestion d’un syndicat de travailleurs»;
    • – article 54(1) de l’ERA: «Aucune partie ne pourra avoir recours à une forme quelconque de pratique du travail injuste durant la négociation collective»; et
    • – article 38(1) de la loi sur les droits en matière d’emploi (loi no 33 de 2008): «Un employeur ne pourra mettre fin à un accord au motif qu’un travailleur va devenir ou est membre d’un syndicat, cherche à exercer ou exerce un mandat syndical ou participe à des activités syndicales en dehors des heures de travail ou, avec le consentement de l’employeur, pendant les heures de travail».
  6. 570. Enfin, l’organisation plaignante allègue que les dirigeants de l’entreprise font pression sur les membres syndicaux pour qu’ils quittent la FWU. L’affaire a déjà été portée devant le commissaire des services de police.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 571. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 2 avril 2014. Il reconnaît que, les 8 et 26 août 2013 respectivement, la FWU et la CSWU ont signalé un différend du travail portant sur les mêmes problèmes avec l’entreprise à la CCM, à savoir notamment: i) la question de savoir si la prime de rendement versée à chaque employé les années 2011 et 2012 respectivement devrait ou non représenter un mois de salaire de base; et ii) la question de savoir si chaque employé se verra accorder un augmentation de salaire de 15 pour cent à compter du mois d’octobre 2012, en sus de l’augmentation statutaire. La FWU et la CSWU ont nommé M. Atma Shanto comme leur négociateur en vertu de l’article 14 de l’ERA.
  2. 572. Tandis que le différend était en discussion au niveau de la CCM, M. Shanto et les membres exécutifs des deux syndicats ont organisé une action de protestation licite le 6 novembre 2013 devant le bureau du ministère du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi en demandant l’intervention urgente du ministère sur les point contestés.
  3. 573. A la suite de cette action de protestation, l’entreprise a fait savoir à M. Shanto, dans une lettre datée du 12 novembre 2013, qu’il ne serait plus reconnu comme négociateur en raison notamment de violations de l’accord de procédure en vigueur entre les syndicats et l’entreprise et des propos diffamatoires qu’il a tenus contre l’entreprise durant la protestation (lettre annexée). Le même jour, l’entreprise a notifié à la CCM sa décision de ne pas reconnaître M. Shanto comme le négociateur des syndicats.
  4. 574. Néanmoins, selon le gouvernement, à la suite de réunions tenues à la CCM et de plusieurs concessions faites par l’entreprise, un accord a été conclu le 30 décembre 2013 entre l’entreprise et les deux syndicats en vertu duquel l’entreprise versera une prime e rendement de 38 pour cent de deux mois du salaire de base et accordera une augmentation de salaire de 5 pour cent échelonnée sur deux ans aux travailleurs concernés (copies des accords jointes en annexe).
  5. 575. Par ailleurs, en application de l’article 40 de l’ERA relatif à l’accès aux locaux de travail, la FWU a saisi le tribunal des relations professionnelles pour lui demander d’accorder à M. Shanto le droit d’accéder aux locaux de l’entreprise. La FWU a ensuite retiré sa demande, étant entendu que l’accord proposé devant le tribunal des relations professionnelles serait signé par le directeur général de l’entreprise à son retour de l’étranger. Mais, compte tenu du fait que les termes de l’accord proposés par la suite par l’entreprise à M. Shanto étaient différents de ceux proposés au niveau du tribunal, ce dernier a refusé de le signer et a entamé une grève de la faim le 12 mars 2014 pour protester contre la position de l’entreprise. Le ministre du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi est alors intervenu personnellement et a convoqué toutes les parties à une réunion le 15 mars 2014 à l’issue de laquelle un accord a été conclu et signé à la satisfaction de l’ensemble des parties (copie jointe). En vertu de cet accord: i) M. Shanto pourra accéder aux locaux de l’entreprise en tant que négociateur pour la FWU et la CSWU; ii) les deux syndicats et leur négociateur ont exprimé leurs profonds regrets pour tout préjudice qu’ils ont pu causer en manifestant publiquement le 6 novembre 2013 contre l’entreprise; et iii) l’entreprise, comme les syndicats, s’engage à respecter les dispositions de l’ERA et à adhérer aux dispositions du code de bonnes pratiques y figurant. M. Shanto a alors mis fin à sa grève de la faim.
  6. 576. Le gouvernement a aussi fourni des éclaircissements communiqués par l’entreprise sur le présent cas. L’entreprise nie avoir présenté une motion devant la CCM visant à révoquer M. Shanto en tant que négociateur sur la question. Elle s’est bornée à informer la CCM de sa décision de ne plus reconnaître M. Shanto comme le négociateur des syndicats et n’a demandé aucune décision sur cette question de la part de la commission. L’entreprise déclare aussi que la manifestation du 6 novembre 2013 est une violation manifeste de l’accord procédural conclu entre les parties qui stipule entre autres qu’il ne devrait y avoir aucune communication avec les médias tant que les discussions entre les parties sont en cours. La compagnie a également fait savoir que, dans le but de parvenir à un règlement à l’amiable de la question, un projet d’accord a été soumis aux syndicats ainsi qu’à M. Shanto, dans lequel l’entreprise déclare être prête à revoir sa décision et à reconnaître M. Shanto une nouvelle fois comme négociateur à la condition qu’il présente ses excuses à l’entreprise et à son directeur général pour ses allégations dénuées de fondement. Les syndicats ont toutefois rejeté l’accord. Enfin, l’entreprise a nié avoir exercé une forme quelconque de pression contre tout employé pour l’obliger à quitter les syndicats et affirme que les employés ont exprimé leur souhait de se dissocier du syndicat, non satisfaits de leurs agissements, mais ont peur d’exprimer leurs préoccupations.
  7. 577. Le gouvernement a aussi fourni un rapport du département de la police contenant une déclaration faite en mars 2014 par M. Louis David Collard, président de la FWU, selon laquelle de nombreux travailleurs lui ont fait savoir qu’ils faisaient l’objet d’actes d’intimidation de la part de la direction pour les forcer à quitter le syndicat. Les représentants de la direction, à savoir M. Goinsamy Moorgiah (directeur des ressources humaines), M. Mohammed Massoorula Joumun (contremaître) et Mme Vaneesha Vishnee Busawon (responsable d’une usine de traitement), ont été contactés par la police et informés de la plainte susmentionnée. Ces derniers ont rejeté les allégations portées à leur encontre. Deux autres travailleurs de l’entreprise, M. Nagamootoo Goinden et M. Hemraz Lobine, tous deux membres de la FWU, ont déclaré pour leur part n’avoir jamais fait l’objet de pressions de la direction pour qu’ils quittent le syndicat. L’enquête menée par la police est en cours.
  8. 578. Le gouvernement conclut que la seule question en suspens reste celle des mesures d’intimidation alléguées pour forcer les travailleurs à quitter leur syndicat, question qui fait toujours l’objet d’une enquête de police.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 579. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue des actes de discrimination antisyndicale par l’entreprise contre des dirigeants et membres de la FWU et de la CSWU en représailles à une action de protestation licite menée en novembre 2013 pour réclamer le paiement de primes.
  2. 580. A la lumière des précisions fournies par l’organisation plaignante et par le gouvernement, le comité note que, en août 2013, la FWU et la CSWU ont signalé à la CCM un différend du travail avec l’entreprise portant sur le paiement de primes de rendement. Les deux syndicats ont nommé un négociateur (M. Atmar Shanto) en vertu de l’article 14 de l’ERA. Alors que le différend était en discussion au niveau de la CCM, M. Shanto et les membres exécutifs des deux syndicats ont organisé une action de protestation licite le 6 novembre 2013 devant le bureau du ministère du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi demandant l’intervention urgente du ministère sur les points contestés. A la suite de cette protestation, l’entreprise a fait savoir à M. Shanto dans une lettre datée du 12 novembre 2013 qu’il ne serait plus reconnu comme négociateur en raison de violations de l’accord de procédure en vigueur entre les syndicats et l’entreprise qui stipule qu’il ne devrait y avoir aucune communication avec les médias tant que les discussions entre les parties sont en cours et en raison des propos diffamatoires qu’il a tenus contre l’entreprise durant ladite manifestation. Le même jour, l’entreprise a notifié à la CCM sa décision de ne pas reconnaître M. Shanto comme le négociateur des syndicats. Toutefois, après plusieurs réunions organisées à la CCM, un accord a été conclu le 30 décembre 2013 entre l’entreprise et les deux syndicats en vertu duquel la compagnie versera une prime de rendement de 38 pour cent de deux mois du salaire de base et accordera une augmentation de salaire de 5 pour cent échelonnée sur deux ans aux travailleurs concernés.
  3. 581. Dans l’intervalle, en application de l’article 40 de l’ERA relatif à l’accès aux locaux de travail, le FWU a saisi le tribunal des relations professionnelles pour lui demander d’accorder à M. Shanto le droit d’accéder aux locaux de l’entreprise. La FWU a ensuite retiré sa demande, étant entendu que l’accord proposé devant le tribunal des relations professionnelles serait signé par le directeur général à son retour de l’étranger. Mais, compte tenu du fait que les termes de l’accord proposés par la suite par l’entreprise à M. Shanto étaient différents de ceux proposés au niveau du tribunal, ce dernier a refusé de le signer et a entamé une grève de la faim le 12 mars 2014 pour protester contre la position de l’entreprise.
  4. 582. Le comité note en outre que le ministre du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi est intervenu personnellement et a convoqué toutes les parties à une réunion le 15 mars 2014 à l’issue de laquelle un accord a été signé à la satisfaction de l’ensemble des parties. En vertu de cet accord: i) M. Shanto pourra accéder aux locaux de l’entreprise en tant que négociateur de la FWU et de la CSWU; ii) les deux syndicats et leur négociateur ont exprimé leurs profonds regrets pour tout préjudice qu’ils ont pu causer en manifestant publiquement le 6 novembre 2013 contre l’entreprise; et iii) l’entreprise, comme les syndicats, s’engage à respecter les dispositions de l’ERA et à adhérer aux dispositions du code de bonnes pratiques y figurant.
  5. 583. En conclusion, le comité salue l’intervention des autorités pour régler le différend soulevé par la FWU et la CSWU en organisant diverses réunions au niveau de la CCM ainsi que l’intervention du ministère du Travail, des Relations professionnelles et de l’Emploi qui ont abouti à un accord à la satisfaction de l’ensemble des parties et qui permettent d’espérer des relations professionnelles pacifiques entre l’entreprise et les syndicats à l’avenir.
  6. 584. Le comité note en outre que le département de la police a mené une enquête sur les mesures d’intimidation alléguées pour pousser les travailleurs à renoncer à leur affiliation syndicale. A cet égard, le comité rappelle que nul ne doit être licencié ou faire l’objet d’autres mesures préjudiciables en matière d’emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l’exercice d’activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d’emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 771.] Tout comportement visant à obtenir des travailleurs qu’ils quittent les syndicats de leur entreprise pourrait gravement porter préjudice au droit des travailleurs à la liberté syndicale.
  7. 585. Le comité note que, selon le rapport de police, les représentants de la direction ont rejeté les allégations portées à leur encontre par le président de la FWU. De plus, deux membres de la FWU ont déclaré, pour leur part, n’avoir jamais fait l’objet de mesures d’intimidation pour les pousser à quitter le syndicat. Le comité note aussi que le gouvernement fournit dans sa réponse une déclaration faite par l’entreprise dans laquelle elle dément notamment avoir exercé une forme quelconque de pression contre tout employé pour le pousser à quitter les syndicats et affirme que les employés ont exprimé leur souhait de se dissocier du syndicat, mais ont peur d’exprimer leurs préoccupations. En conclusion, le gouvernement déclare que les mesures d’intimidation de travailleurs alléguées pour les pousser à quitter le syndicat restent la seule question en suspens dans le présent cas et que l’enquête de la police est en cours. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 586. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l’enquête menée par la police sur les mesures d’intimidation qui auraient été prises contre des travailleurs de l’entreprise Innodis Ltd pour les pousser à renoncer à leur affiliation syndicale.
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