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Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Guatemala (Ratification: 1952)

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La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que de la discussion qui a eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2010 et des onze cas en instance devant le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2203, 2241, 2341, 2361, 2445, 2609, 2673, 2708, 2709, 2768 et 2811). La commission avait pris note, dans son observation précédente, du rapport de la mission de haut niveau qui s’est rendue dans le pays en avril 2008, de l’accord tripartite signé pendant cette mission afin d’améliorer l’application de la convention, de la mission de haut niveau qui s’est rendue dans le pays du 16 au 20 février 2009, des missions d’assistance technique du 3 janvier 2009 ainsi que d’une dernière mission destinée à aider la commission tripartite à élaborer la feuille de route sur les mesures demandées par la Commission de l’application des normes (cette mission s’est rendue dans le pays du 16 au 20 novembre 2009). La commission avait noté qu’il n’y avait finalement pas eu de consensus entre les partenaires sociaux et que c’est le gouvernement seul qui avait élaboré la feuille de route. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’une formation au sujet des normes internationales du travail a été organisée en avril 2010, avec l’assistance du BIT, destinée au personnel du ministère public, juges, magistrats, Procureur des droits de l’homme ainsi qu’au personnel du ministère du Travail. La commission note par ailleurs que le gouvernement a accepté la mission demandée par la Commission de l’application des normes en juin 2010 relative à la visite d’une personnalité internationale importante, accompagnée d’une mission de haut niveau de l’OIT, qui examinerait ces questions et formulerait des recommandations. La commission prend note de ce que le gouvernement propose, à savoir que la mission soit organisée début 2011.

Actes de violence à l’encontre des syndicalistes

La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle prend note, dans ses observations, d’actes de violence à l’encontre de syndicalistes et du climat d’impunité et demande au gouvernement de fournir des informations au sujet de l’évolution de la situation. La commission note que, sur la proposition d’une mission de haut niveau en 2008, la commission tripartite a approuvé un accord visant à éliminer la violence. L’accord prévoit ce qui suit: «1) une évaluation des mesures institutionnelles, y compris les plus récentes, en particulier les mesures spéciales de protection visant à prévenir les actes de violence à l’encontre de syndicalistes qui ont été menacés; et 2) une évaluation des mesures en cours (augmentation des ressources budgétaires et accroissement du nombre d’enquêteurs) afin de garantir des enquêtes efficaces et dotées de moyens suffisants pour faire le jour sur les délits dont ont été victimes les syndicalistes et pour identifier les responsables».

Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, dans leurs commentaires de 2009, tant la Confédération syndicale internationale (CSI) que le Mouvement syndical du peuple indigène et des paysans guatémaltèques pour la défense des droits des travailleurs et des travailleuses (MSICG) faisaient état de graves actes de violence à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes en 2008-09 et soulignaient l’existence d’un climat de crainte et d’intimidation visant à démanteler les syndicats existants et à éviter la constitution d’autres syndicats. Les deux organisations mettaient aussi l’accent sur les déficiences de l’inspection du travail et sur la crise du système judiciaire. La commission avait exprimé l’espoir que, dans le cadre de l’accord tripartite conclu pendant la mission de haut niveau, l’ensemble des questions soulevées ainsi que les commentaires de la CSI, de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) et du MSICG seraient examinés et abordés de manière tripartite par le gouvernement et les partenaires sociaux, lors des travaux de la Commission tripartite sur les questions internationales et de ceux de la Sous-commission des réformes juridiques et du mécanisme de traitement rapide des cas. La commission note avec regret que rien n’indique dans le rapport du gouvernement que cet examen tripartite ait été réalisé et prie à nouveau le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires à sa réalisation, de manière à ce que ces questions soient examinées sans délai par la commission tripartite.

La commission prend note des longs commentaires du MSICG datés du 30 août 2010 sur l’application de la convention. La commission observe que le MSICG indique que, dans les années 2009 et 2010, de nombreux actes de violence se sont produits contre des syndicalistes et dirigeants syndicaux, en ce compris des assassinats (47 depuis 2007, dont sept en 2010), des menaces de mort et actes d’intimidation ainsi que des enlèvements, tortures et attaques à armes à feu ou armes blanches. Il y a eu également des violations de domiciles de syndicalistes ou de sièges de syndicats. D’après le MSICG, l’Etat n’a pas toujours octroyé les mesures de sécurité sollicitées par les personnes menacées, et le ministère public ne diligente pas des enquêtes dans la totalité des cas, certaines plaintes n’étant même pas enregistrées dans la base de données du ministère public. Le MSICG fait également référence à des obstacles et entraves administratives à la constitution ou au fonctionnement de syndicats ainsi qu’à la désagrégation de syndicats en formation. Par ailleurs, plus de 20 000 travailleurs du secteur public n’ont pas de contrat de travail mais seulement un contrat civil pour services professionnels, sans droits syndicaux. De même, les activités syndicales sont criminalisées, les syndicalistes poursuivis pénalement pour avoir organisé des manifestations pacifiques et des atteintes sont portées aux syndicalistes au travers de publications antisyndicales ou de campagnes de discréditation. Selon le MSICG, il y a eu également de nombreuses mutations de syndicalistes, de nombreux licenciements et destitutions antisyndicaux ainsi que des actes d’ingérence des employeurs. D’un autre côté, il ajoute que les autorités ont encouragé la création d’organisations syndicales sous son contrôle, en parallèle à celles existantes, et ces représentants faiblement représentatifs participent à la commission tripartite. En ce qui concerne les procédures, le MSICG souligne que la lenteur des procédures et les retards procéduraux continuent à poser problème et que les réformes législatives demandées par l’OIT n’ont pas été adoptées. Enfin, le MSICG signale que le climat antisyndical se reflète dans le taux d’affiliation (2,2 pour cent de la population active économiquement, desquels 87,5 pour cent correspondent au secteur public).

La commission note qu’une grande partie des allégations contenues dans la communication du MSICG ont été soumises au Comité de la liberté syndicale en novembre 2009 et 2010. Dans ses conclusions, le Comité de la liberté syndicale a noté avec préoccupation que les allégations présentées dans ce cas sont d’une extrême gravité et incluent de nombreux assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes (16), une disparition, des actes de violence (parfois même contre les familles des syndicalistes), des menaces, des persécutions physiques, des intimidations, le viol d’une jeune fille de la famille d’un syndicaliste, des entraves à la reconnaissance de la personnalité juridique de syndicats, la dissolution d’un syndicat, des poursuites pénales en raison d’activités syndicales et des lacunes institutionnelles graves dans l’inspection du travail et dans le fonctionnement des autorités judiciaires qui entraînent une situation d’impunité dans le domaine du travail (par exemple des retards excessifs, le manque d’indépendance, le non-respect d’ordonnances judiciaires de réintégration) et sur le plan pénal. (Voir 355e rapport, cas no 2609, paragr. 858 et suiv.)

La commission se voit obligée de constater que la situation de violence à l’encontre de syndicalistes, le fonctionnement déficient de la justice pénale et l’impunité se sont encore aggravés. La mission de haut niveau de février 2009 a constaté que ces dernières années, malgré le nombre important d’actes violents commis à l’encontre des syndicalistes (selon des informations de fonctionnaires du gouvernement), il n’y a eu ni procès ni condamnations fermes. La mission de haut niveau a entendu des témoignages faisant état de l’absence générale d’indépendance du pouvoir judiciaire et d’organismes du gouvernement en ce qui concerne les cas examinés au pénal. Le gouvernement a indiqué à la mission de haut niveau que la situation de violence était généralisée et a nié l’existence d’une politique de l’Etat contre le mouvement syndical.

La commission a noté que la mission de haut niveau de février 2009 a indiqué qu’il faut accroître significativement les capacités et le budget du bureau du Procureur général de la nation afin d’augmenter le nombre des magistrats et des enquêteurs; la mission a suggéré que d’autres ressources soient allouées au programme en place de protection de syndicalistes (actuellement, 44 syndicalistes bénéficient de mesures de protection) et de témoins, et que ces programmes soient coordonnés comme il convient. La mission de haut niveau a estimé qu’il faut prendre des mesures pour dissuader activement toute stigmatisation des syndicats et du mouvement syndical, stigmatisation qui consiste à comparer les activités syndicales avec des actes criminels. La mission de haut niveau a indiqué que le taux de syndicalisation et de conventions collectives est très faible. D’après les commentaires du MSICG, cette situation n’a pas changé.

La commission prie le gouvernement d’envoyer des observations détaillées en réponse aux commentaires du MSICG de 2010. La commission prend note des déclarations du gouvernement devant la Commission de l’application des normes de la Conférence, selon lesquelles l’inspection du travail a été renforcée avec 30 nouveaux inspecteurs et que, en 2009, 70 syndicats et 45 conventions collectives ont été enregistrés et que la majorité des cas d’assassinat ne sont pas liés aux activités syndicales.

La commission souhaite se référer aux conclusions de la Commission de l’application des normes de juin 2010, qui sont rédigées comme suit:

La commission a noté que la commission d’experts continuait à exprimer sa préoccupation concernant les questions suivantes: actes de violence nombreux et graves, y compris des assassinats et des menaces visant les syndicalistes, stigmatisation des syndicats et dispositions législatives ou pratiques incompatibles avec les droits prévus dans la convention. La commission d’experts a également pris note de l’inefficacité des procédures pénales relatives aux actes de violence, des délais excessifs des procédures judiciaires et du manque d’indépendance du pouvoir judiciaire, ce qui entraîne une situation d’impunité grave.

La commission a noté que le représentant gouvernemental avait signalé que la situation de violence et d’impunité était générale et qu’elle ne concernait pas uniquement le mouvement syndical. Le gouvernement a sollicité l’appui des Nations Unies pour lutter contre l’impunité, et une Commission internationale contre l’impunité a été créée à cette fin. Le gouvernement a demandé l’établissement de rapports pour déterminer si les assassinats de syndicalistes étaient liés à des activités syndicales. Le gouvernement a sollicité à de multiples reprises l’assistance technique du BIT pour traiter l’ensemble des problèmes posés, notamment la violence, l’impunité et les réformes législatives demandées, et pour élaborer la feuille de route. Le représentant gouvernemental a déclaré que le dialogue social tripartite avait lieu dans le cadre de la Commission tripartite nationale et que quatre tables rondes pour le dialogue tripartite avaient été créées au niveau régional. Il a également indiqué que, suite à la dernière mission de haut niveau de l’OIT, les mécanismes de coordination interinstitutionnelle avaient été renforcés. En outre, des actions ont été menées pour réintégrer les travailleurs des maquilas. Des activités de formation ont également été mises en œuvre, et il a été décidé de créer deux centres de formation. Il a également indiqué que, même si des mesures avaient été prises pour renforcer l’inspection du travail et les services du ministère chargés des relations avec l’OIT, l’assistance technique du BIT s’avère encore nécessaire.

La commission a noté qu’il s’agit d’un cas important discuté depuis de nombreuses années et que le gouvernement avait bénéficié de nombreuses missions d’assistance technique afin de rendre la législation et la pratique conformes à la convention.

La commission a noté avec une profonde préoccupation que la situation de violence et d’impunité semblait s’être aggravée et rappelé qu’il importe de s’assurer de toute urgence que les travailleurs puissent mener leurs activités syndicales dans un climat exempt de peur, de menaces et de violence. La commission a également pris note avec préoccupation de la démission du directeur de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICG) le 7 juin 2010. La commission a instamment prié le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour garantir le fonctionnement efficace des mécanismes de protection des syndicalistes et des défenseurs de la liberté syndicale et des autres droits de la personne.

La commission a noté avec préoccupation que le gouvernement n’avait pas fait preuve d’une volonté politique suffisante pour lutter contre la violence visant les dirigeants syndicaux et les syndicalistes et pour combattre l’impunité. La commission a souligné la nécessité de réaliser des progrès significatifs en ce qui concerne la condamnation des auteurs d’actes de violence antisyndicale et les sanctions infligées qui doivent viser non seulement les auteurs directs de crimes mais également les instigateurs. La commission a prié le gouvernement d’intensifier ses efforts pour mettre fin à l’impunité, notamment en augmentant considérablement les ressources budgétaires allouées au système judiciaire, aux services du Procureur général, à la police et à l’inspection du travail.

Relevant également avec préoccupation que le climat de violence est généralisé, la commission a rappelé que la liberté syndicale ne peut s’exercer si la sécurité des personnes et le respect des libertés civiles fondamentales ne sont pas assurés. La commission a instamment prié le gouvernement de garantir une voie de recours simple et rapide ou tout autre recours efficace devant les tribunaux compétents afin d’assurer une protection contre les actes portant atteinte aux droits fondamentaux.

La commission rappelle que, dans la feuille de route préparée par le gouvernement à la demande de la Commission de l’application des normes en 2009, le gouvernement signalait la nécessité de mieux s’occuper des cas de violence commis à l’encontre de syndicalistes, d’enquêter à ce sujet et d’y mettre un terme et qu’il considérait, par conséquent, qu’il était nécessaire de commencer à prendre des mesures énergiques afin de donner des informations concrètes et périodiques au Comité de la liberté syndicale et de mettre en place des moyens de coordination interinstitutionnelle afin de permettre l’échange d’informations pertinentes et utiles et de faire en sorte qu’elles soient transmises aux organes de contrôle de l’OIT. Le gouvernement proposait de renforcer l’unité de procuration de la Direction des affaires internationales, en la dotant d’effectifs qualifiés qui s’occuperont exclusivement de cette question et qui disposeront des ressources nécessaires pour réaliser leurs activités, de façon à traiter immédiatement chacun des cas faisant actuellement l’objet d’une enquête. De plus, le gouvernement souhaitait élaborer un chronogramme annuel de réunions du ministère du Travail (Unité des affaires internationales du travail) et du ministère public afin de définir le cadre de travail permanent des deux institutions. Ainsi, la Direction des affaires internationales du travail recenserait les cas ayant déjà été traités et les porterait à la connaissance du Comité de la liberté syndicale. D’un autre côté, le gouvernement signalait que, en matière de coordination interinstitutionnelle, la Commission du travail multi-institutionnelle pour les relations du travail au Guatemala avait été relancée et qu’une liste serait dressée des entités ne se trouvant pas encore dans cette commission mais ayant un lien étroit avec les questions du travail.

La commission note que le gouvernement, dans son rapport, manifeste sa disposition et sa volonté à assurer la mise en œuvre de la convention. Il signale dans ce sens que:

–           l’unité de procuration de la Direction des affaires internationales a été renforcée avec, pour objectif, d’atteindre et de renforcer les exigences des organes de contrôle de l’OIT, en désignant un avocat assesseur et un procureur à partir d’avril 2010, ce qui a permis d’améliorer l’échange d’informations sur les cas dénoncés. Concrètement, 127 courriers ont été envoyés entre avril et août 2010, demandant des informations à plusieurs fiscalías du ministère public, à des juges de paix, de première instance et des chambres d’appel du travail, au Procureur des droits de l’homme, à l’Inspection générale du travail et au Conseil technique et cabinets juridiques du ministère du Travail et de la Prévention sociale, au sujet de plaintes déposées par des travailleurs et organisations syndicales. Sur la base de ces informations, le gouvernement a envoyé au Comité de la liberté syndicale 37 rapports permettant de donner suite à des plaintes spécifiques dans ces cas;

–           les magistrats de la Cour suprême de justice ont apporté leur assistance à la 99e session de la Conférence internationale du Travail, organisée à Genève du 2 au 18 juin 2010, avec pour objectif de parvenir à une participation plus directe de l’organe judiciaire dans la connaissance de l’application de la convention no 87 et des plaintes pour violation de cette dernière concernant le gouvernement du Guatemala; et

–           une audience spéciale devant la Commission tripartite pour les questions internationales a été demandée en novembre 2009 (demande réitérée en janvier 2010) au directeur du ministère public et au Conseil du ministère public, pour traiter du sujet «assurer une investigation et une instruction efficaces des responsables des actes de violence et menaces à l’encontre de syndicalistes» et établir «des avancées dans la création et le renforcement du procureur pour les délits contre les syndicalistes», audience qui, à cette date, n’a pas pu être organisée en ce que la sélection du nouveau Procureur général est en cours.

La commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le principe selon lequel un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer dans un climat de violence et d’incertitude; la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l’homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne; les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations. Il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. De plus, la commission rappelle que la lenteur excessive des procédures et l’absence de jugements contre les coupables entraînent une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales.

Au vu de ce qui précède et bien qu’elle ait été informée que le gouvernement a envoyé des réponses au Comité de la liberté syndicale au sujet des cas en instance, du fonctionnement effectif de la Commission multi-institutionnelle et de la volonté du pouvoir législatif – selon le gouvernement – de renforcer le budget du secteur de la justice, la commission conclut avec regret que le gouvernement n’a pas démontré de volonté politique suffisante pour lutter contre la violence à l’encontre des dirigeants syndicaux et syndicalistes et contre l’impunité. La commission observe que, d’après le rapport du gouvernement, l’audience sollicitée auprès du directeur du ministère public pour que se réunisse la Commission tripartite nationale n’a pas pu être organisée. La commission exprime sa profonde préoccupation devant le manque de progrès significatifs, compte tenu en particulier des missions répétées de l’OIT et des recommandations très claires et concrètes des organes de contrôle de l’OIT; elle est préoccupée en particulier par le fait que le gouvernement n’a pas fourni d’informations générales et de statistiques actualisées au sujet des actes de violence à l’encontre de syndicalistes, de l’état des procédures judiciaires au pénal, de l’identification et de la condamnation des coupables ni au sujet d’éventuels accroissements budgétaires pour les organes de l’Etat compétents en matière de lutte contre la violence et l’impunité.

La commission prie instamment à nouveau le gouvernement de: i) garantir la protection des syndicalistes menacés de mort; ii) faire part au bureau du Procureur général et à la Cour suprême de justice de sa profonde préoccupation en raison de la lenteur et de l’inefficacité du système de justice; formuler des recommandations sur la nécessité de faire le jour sur les assassinats et les délits perpétrés contre les syndicalistes afin que les coupables soient punis; iii) consacrer des ressources suffisantes pour ces objectifs, accroître par conséquent les effectifs et les ressources matérielles, coordonner l’action des différents organes de l’Etat qui interviennent dans le système de justice et former les enquêteurs; et iv) donner la priorité à ces questions dans la politique du gouvernement. La commission invite le gouvernement à recourir à l’assistance technique du BIT pour résoudre le grave problème de l’impunité pénale qui existe en ce qui concerne les infractions pénales commises contre des syndicalistes.

Enfin, la commission exprime à nouveau sa profonde préoccupation au sujet des actes de violence commis à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. Elle rappelle que les droits syndicaux ne peuvent être exercés que dans un climat exempt de violence. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra des mesures pour garantir le plein respect des droits de l’homme des syndicalistes et continuera à assurer à tous les syndicalistes qui le demandent le mécanisme de protection en place. La commission prie aussi le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires afin de mener à terme les enquêtes et d’identifier ainsi les responsables des actes de violence commis à l’encontre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, de les juger et de les sanctionner, conformément à la loi. La commission demande au gouvernement d’indiquer tout fait nouveau à cet égard. La commission, observant que les informations fournies par le gouvernement ne rendent compte qu’exceptionnellement de cas dans lesquels les coupables ont été identifiés et sanctionnés, exprime sa préoccupation à ce sujet et demande avec insistance que soit renforcé considérablement le système de justice pénale.

Problèmes d’ordre législatif

La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle formule des commentaires sur les dispositions suivantes qui posent des problèmes de conformité avec la convention:

–           restrictions à la libre constitution d’organisations (obligation, en vertu de l’article 215 c) du Code du travail, de réunir la majorité absolue des travailleurs du secteur intéressé pour pouvoir constituer un syndicat du secteur industriel), retards dans l’enregistrement de syndicats ou refus d’enregistrement;

–           restrictions au droit de libre choix des dirigeants syndicaux (obligation d’être d’origine guatémaltèque et de travailler dans l’entreprise ou dans le secteur économique en question pour pouvoir être élu dirigeant syndical en vertu des articles 220 et 223 du Code du travail);

–           restrictions au droit des organisations de travailleurs d’exercer librement leurs activités (en vertu de l’article 241 du Code du travail, pour être licite, la grève doit être déclarée non par la majorité des votants mais par la majorité des travailleurs); possibilité d’imposer l’arbitrage obligatoire en cas de conflit dans les transports publics et dans les services de distribution de combustibles; il convient de déterminer si les grèves intersyndicales de solidarité restent interdites (art. 4, alinéas d), e) et g), du décret no 71-86, tel que modifié par le décret législatif no 35-96 du 27 mars 1996); sanctions professionnelles et sanctions au civil et au pénal applicables en cas de grève de fonctionnaires ou de travailleurs de certaines entreprises (art. 390, paragr. 2, et 430 du Code pénal et décret no 71-86);

–           projet de loi sur la fonction publique. Dans son observation précédente, la commission avait pris note d’un projet de loi sur la fonction publique qui, selon l’UNSITRAGUA et la Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’Etat (FENASTEG), imposait un pourcentage trop élevé pour constituer un syndicat et fixait certaines restrictions à l’exercice du droit de grève. La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle le projet a été paralysé en juillet 2008 lorsqu’une table ronde réunissant plusieurs secteurs a été organisée pour élaborer un projet de loi tenant compte des besoins spécifiques des secteurs concernés;

–           situation de nombreux travailleurs dans le secteur public qui ne jouissent pas des droits syndicaux. Il s’agit de travailleurs engagés en vertu du poste 029 et d’autres postes du budget pour des tâches spécifiques ou temporaires. Pourtant, ils réalisent des tâches ordinaires et permanentes et, souvent, ne bénéficient ni des droits syndicaux ni d’autres prestations liées au travail, en dehors des salaires. Ils ne cotisent pas à la sécurité sociale et ne bénéficient pas des négociations collectives lorsqu’il y en a. La commission note que les membres de la Cour suprême de justice ont déclaré à la mission de haut niveau qu’en vertu de la jurisprudence ces travailleurs jouissaient du droit syndical. Néanmoins, selon des informations de l’assistance technique, cette jurisprudence n’a pas été appliquée dans la pratique nationale.

En ce qui concerne ces questions, la commission avait noté que, sur proposition de la mission de haut niveau de 2008, la Commission tripartite avait approuvé un accord visant à moderniser la législation et à mieux appliquer les conventions nos 87 et 98; cet accord prévoyait un examen des dysfonctionnements du système actuel des relations professionnelles (retards excessifs et irrégularités de procédure, absence d’application effective de la loi et des sentences, etc.), en particulier un examen des mécanismes de protection du droit de négociation collective et des droits des organisations de travailleurs et d’employeurs et de leurs membres consacrés dans les conventions nos 87 et 98. Pour cet examen, il serait tenu compte des commentaires de la commission d’experts – observations techniques et commentaires substantiels ou sur les procédures. La commission avait noté que la mission de haut niveau s’était engagée à faciliter l’octroi d’une assistance technique à ces questions, et que cette assistance avait débuté.

La commission avait noté que la feuille de route prévoyait des délais pour la soumission de projets de loi ayant trait aux réformes législatives demandées par la commission d’experts (la date butoir ayant été fixée au 28 février 2010). La commission rappelle à cet égard que, avec la collaboration de missions techniques du BIT, plusieurs propositions avaient été élaborées au sein de la Commission tripartite nationale pendant le premier trimestre 2009 pour traiter des problèmes législatifs susmentionnés.

La commission note que la feuille de route élaborée par le gouvernement en décembre 2008 dispose:

Nous avons nommé une Commission d’avocats du ministère du Travail et de la Prévision sociale afin d’analyser la viabilité des recommandations de réformes législatives qu’a formulées la commission d’experts. L’opinion de cette commission avait été portée à la connaissance de la mission précédente d’assistance technique du BIT.

Nous disposons d’une liste des propositions de loi en vue de réformes à apporter au décret no 1441 du Congrès de la République et au Code du travail. Ces propositions sont actuellement examinées par le Congrès de la République. Ainsi est démontrée la volonté politique de l’Etat du Guatemala de résoudre progressivement les problèmes qui ont trait à l’application du droit du travail guatémaltèque.

En outre, nous avons examiné les dispositions qui font que le Code du travail sanctionne le droit de grève des travailleurs et, pour donner suite aux recommandations de la commission d’experts, nous avons élaboré une étude qui sera portée à la connaissance des organismes de l’Etat pour commentaires.

Nous avons aussi planifié la stratégie que nous appliquerons pour réaliser les objectifs voulus.

La commission observe que rien dans le rapport du gouvernement ne permet de constater des progrès dans le domaine législatif. Le MSICG signale également qu’il n’y a pas eu de progrès.

La commission constate que le gouvernement se limite à signaler à la Commission de l’application des normes certaines mesures liées au projet de loi sur le service public. La commission regrette devoir constater qu’il n’y a pas eu de progrès dans les réformes législatives demandées. La commission estime qu’il aurait dû y avoir davantage d’efforts et espère pouvoir constater des progrès dans un avenir proche. La commission exprime le ferme espoir que, grâce à l’assistance technique qu’il reçoit, le gouvernement sera en mesure de fournir, dans son prochain rapport, des informations faisant état d’une évolution positive concernant les différents points mentionnés.

Autres questions

Secteur des maquilas. Depuis plusieurs années, la commission prend note des commentaires d’organisations syndicales faisant état de problèmes importants liés à l’application de la convention en ce qui concerne les droits syndicaux dans les maquilas.

La commission avait noté les commentaires de la CSI de 2009 selon lesquels il est impossible dans les zones franches d’exercer les droits syndicaux en raison de l’opposition tenace des employeurs; sur les 200 maquilas en place, des syndicats n’ont été créés que dans trois d’entre elles, et les autorités du travail sont incapables de mettre un terme à l’inobservation et aux violations de la législation dans ce secteur. Le MSICG estime que l’impossibilité de constituer des organisations dans le secteur des maquilas est due à des pratiques de discrimination antisyndicale.

La commission avait noté que, dans ses conclusions, la mission de haut niveau de 2008 avait indiqué ce qui suit: «D’après le ministère du Travail et de la Prévision sociale, sept conventions collectives s’appliquent dans le secteur des maquilas, mais deux seulement datent de 2007. Les autres datent de 2003, voire des années antérieures. Quant à l’affiliation syndicale, d’après les autorités administratives, il existe six syndicats auxquels sont affiliés 562 travailleurs des maquilas, alors que le secteur compte près de 200 000 travailleurs. Pour la direction du mouvement syndical, il n’existe que deux syndicats dans ce secteur. Quel que soit le chiffre exact, dans les maquilas, l’activité syndicale reste faible et la négociation collective peu répandue. Un problème d’application des conventions nos 87 et 98 se pose.» Le gouvernement indique dans son rapport qu’il y a sept syndicats actifs dans les entreprises de maquilas et textile ainsi qu’une convention collective homologuée pour la période 2008-2010.

Selon le gouvernement, le nombre de plaintes relatives à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical portées à l’attention de l’Inspection générale du travail en 2008 était de 33; certains cas ont fait l’objet de conciliation, d’autres sont toujours en cours. Le nombre de plaintes relatives à la liberté syndicale traitées par l’Inspection générale du travail en 2009 était de 30, la majorité desquelles étant en cours. Le nombre de plaintes relatives à la liberté syndicale traitées par l’Inspection générale du travail en 2010 est de sept, toutes étant en cours de traitement. Enfin, le gouvernement joint une lettre datée du 15 janvier 2010, adressée au Procureur général et au directeur du ministère public.

La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’exercice, en pratique, des droits syndicaux dans les maquilas (nombre de syndicats, de travailleurs affiliés et de conventions collectives, couverture des conventions collectives, plaintes pour infraction aux droits syndicaux, décisions prises par les autorités et nombre d’inspections). La commission exprime l’espoir que le gouvernement continuera de bénéficier de l’assistance technique du Bureau afin que la convention soit pleinement appliquée dans les maquilas et le prie de fournir des informations à ce sujet. La commission prie le gouvernement de soumettre à la Commission tripartite nationale les problèmes relatifs à l’exercice des droits syndicaux dans les maquilas et de fournir des informations à ce propos.

Commission tripartite nationale. La commission note qu’il existe au sein de cette commission des problèmes liés à la reconnaissance, par toutes les parties, de l’intégration du secteur des travailleurs, en raison d’une division au sein de l’UNSITRAGUA. La commission note que le gouvernement a demandé l’assistance technique du Bureau à ce propos. La commission espère que le gouvernement recevra l’assistance technique sollicitée.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 100e session et de répondre en détail aux présents commentaires en 2011.]

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