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Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Convention (n° 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 - Géorgie (Ratification: 1993)

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La commission prend note des commentaires soumis par l’Internationale de l’éducation (IE) dans des communications datées du 30 août 2010 et du 31 août 2011, concernant des questions pendantes devant le Comité de la liberté syndicale (CLS) dans le cas no 2678, au sujet d’une ingérence dans les activités du Syndicat libre des enseignants, éducateurs et scientifiques de Géorgie (ESFTUG) et de licenciements de syndicalistes, ainsi que la réponse du gouvernement à cet égard. La commission prend note à ce propos des conclusions et recommandations du CLS de novembre 2011 (voir le 361e rapport). La commission prend note par ailleurs des commentaires formulés par la Confédération des syndicats de Géorgie (GTUC) et la Confédération syndicale internationale (CSI) dans des communications datées, respectivement, du 3 septembre 2010, ainsi que du 4 août et du 10 octobre 2011, portant sur des allégations de nombreux cas de discrimination antisyndicale, d’ingérence des employeurs dans les affaires syndicales et de violation des droits de négociation collective. La commission note que plusieurs de ces allégations se réfèrent à des questions pendantes devant le CLS dans le cas no 2663. La commission prend note, à ce propos, des conclusions et recommandations du comité de mars 2010 (voir le 356e rapport). La commission note la réponse du gouvernement aux commentaires de la CSI.
La commission note la discussion qui s’est tenue dans le cadre de la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2010. Elle note aussi que, à cette occasion, la Commission de la Conférence a accueilli favorablement les mesures prises par le gouvernement pour institutionnaliser le dialogue social dans le pays grâce à la création de la Commission tripartite du partenariat social (TSPC), dont les statuts ont été adoptés et le secrétariat établi, respectivement, en mars et mai 2010.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que, au cours de la période de janvier 2010 à juillet 2011, la TSPC s’est réunie environ dix fois et que son groupe de travail tripartite a tenu 24 réunions. Le gouvernement explique que, avant chaque réunion, le secrétariat de la TSPC élabore un ordre du jour et le transmet pour commentaires aux partenaires sociaux. Il souligne que les principales questions discutées par la TSPC concernent les allégations de la GTUC portant sur la violation des droits syndicaux. En outre, le gouvernement indique que, compte tenu des recommandations des organes de contrôle de l’OIT selon lesquelles des enquêtes relatives aux violations des droits syndicaux devraient être menées par le gouvernement, il a établi une décision selon laquelle de tels cas devraient être examinés dans le cadre de la TSPC afin d’assurer la participation de toutes les parties intéressées. C’est dans cet objectif que la TSPC a été chargée de diriger les procédures de conciliation et de médiation des conflits du travail. Le gouvernement indique que les cas suivants de discrimination antisyndicale faisant l’objet des allégations de la GTUC, de la CSI et de l’IE ont été discutés au sein de la TSPC: le cas de la zone portuaire LTD Poti; le cas de l’industrie textile LTD BTM; le cas des Chemins de fer de Géorgie LTD; et le cas d’ESFTUG. La commission accueille favorablement ces informations. Elle rappelle, cependant, que, après avoir pris note des cas de violation présumée de la convention dans la pratique, elle avait soulevé des questions concernant l’insuffisance du cadre législatif nécessaire pour assurer une protection effective et adéquate contre la discrimination antisyndicale et une promotion significative de la négociation collective. Elle avait noté, à ce propos, que le groupe de travail tripartite susmentionné de la TSPC a été chargé d’examiner et d’analyser la conformité de la législation nationale avec les conclusions et recommandations de la commission d’experts et de proposer les modifications nécessaires. La commission avait exprimé l’espoir que toutes modifications proposées prendraient en considération ses commentaires, qui portaient sur les questions suivantes.
Articles 1 et 3 de la convention. Protection contre les actes de discrimination antisyndicale. La commission avait précédemment noté que l’article 11(6) de la loi sur les syndicats et l’article 2(3) du Code du travail qui interdisaient, dans des termes très généraux, la discrimination antisyndicale ne semblaient pas constituer une protection suffisante contre la discrimination antisyndicale au moment du recrutement des travailleurs lors de la cessation de leur emploi. La commission avait noté, notamment, que, conformément à l’article 5(8) du Code du travail, l’employeur n’est pas tenu de justifier sa décision de ne pas recruter un candidat et avait considéré que l’application pratique de cet article risquait de représenter un obstacle insurmontable à l’égard du travailleur qui est appelé à prouver que son recrutement a été rejeté en raison de ses activités syndicales. La commission avait de même noté que, selon les articles 37(d) et 38(3) du Code du travail, l’employeur avait le droit de mettre un terme au contrat avec son employé, de sa propre initiative, à condition que l’employé reçoive un mois de salaire sauf en cas de clause contraire dans le contrat. La commission avait considéré que, en l’absence de dispositions interdisant expressément tout licenciement pour raisons d’affiliation à un syndicat ou de participation à des activités syndicales, le Code du travail n’offrait pas une protection suffisante contre les licenciements antisyndicaux. La commission avait donc espéré que les mesures nécessaires seraient prises en vue de modifier les dispositions susmentionnées du Code du travail, de manière à assurer une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. Elle avait également prié le gouvernement d’indiquer la nature des compensations offertes aux travailleurs victimes d’actes de discrimination antisyndicale, notamment lors de licenciements, de transferts, de rétrogradations, etc.
La commission note que le gouvernement réitère l’information qu’il avait précédemment fournie en se référant à l’interdiction générale de la discrimination antisyndicale prévue dans la Constitution (art. 14 et 26), la loi sur les syndicats (art. 11(6)), le Code du travail (art. 2(3)) et le Code pénal (art. 142). Le gouvernement estime que la législation interdit expressément tout type de discrimination, y compris les licenciements antisyndicaux, et assure une protection suffisante contre les violations de ces droits, et qu’elle est donc conforme à la convention. Le gouvernement ajoute qu’aucune demande n’a été soumise aux organismes gouvernementaux pertinents au cours des dernières années au sujet de restrictions éventuelles aux droits syndicaux. En ce qui concerne l’article 5(8) du Code du travail, le gouvernement indique que, dans la pratique, un travailleur s’affilie à un syndicat après son engagement et qu’on ne relève aucun cas de personne n’ayant pas été recrutée à cause de son affiliation syndicale; il estime donc que cette disposition est conforme à la convention. En ce qui concerne l’article 37(9) du Code du travail, le gouvernement indique que cette disposition ne prévoit pas qu’un employeur peut licencier un travailleur sans aucun motif; mais plutôt que l’un des motifs de la suspension des relations de travail est la cessation du contrat de travail, qui est possible à l’initiative de l’une ou l’autre des parties ou pour les motifs prévus dans le contrat. Si un travailleur licencié recourt devant la justice, l’employeur est tenu de fournir au tribunal les arguments et les motifs du licenciement. En outre, le gouvernement souligne que, en vertu du code, en cas de cessation d’emploi, un employeur est tenu de payer au moins un mois de salaire sauf si un montant supérieur est prévu dans l’accord entre les parties. Pour ce qui est de la compensation fournie aux travailleurs victimes d’actes de discrimination antisyndicale, y compris lors de licenciements, de transferts et de rétrogradations, le gouvernement indique que de tels travailleurs ont le droit de réclamer une compensation en recourant devant la justice et en indiquant le montant désiré de la compensation; c’est le tribunal qui rend une décision définitive au sujet de la compensation et de son montant. Le gouvernement conclut en déclarant qu’il ne voit pas la nécessité d’entamer une procédure de modification du Code du travail.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement. Elle note, en particulier, que, d’un côté, le gouvernement indique qu’il n’y a eu aucune plainte pour restrictions aux droits syndicaux et, d’un autre côté, que les allégations de violation de droits syndicaux pendantes devant les organes de contrôle de l’OIT sont examinées par la TSPC. En outre, elle prend note de nouvelles allégations de licenciement de dirigeants syndicaux et de membres fondateurs présentées par la CSI dans sa communication datée du 10 octobre 2011. La commission rappelle que, aux termes de l’article 1 de la convention, les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination en matière d’emploi. La commission rappelle qu’une telle protection doit couvrir le recrutement, le licenciement et les mesures discriminatoires en cours d’emploi. En ce qui concerne la protection lors du recrutement, la commission rappelle que les travailleurs peuvent connaître beaucoup de difficultés pratiques à prouver la nature réelle du refus de leur engagement, notamment dans un contexte d’établissement de listes noires de membres syndicaux, une pratique dont la force réside dans son caractère secret. Vu qu’il est souvent difficile, voire impossible, pour un travailleur de prouver qu’il a été victime d’un acte de discrimination antisyndicale, la législation peut trouver des moyens de remédier à ces difficultés, par exemple en prévoyant que les motifs de la décision du non-recrutement devraient être fournis sur demande. En ce qui concerne la cessation de l’emploi, la commission estime qu’une législation qui autorise l’employeur dans la pratique à mettre fin à l’emploi d’un travailleur sous réserve du versement d’une indemnisation prévue dans la loi dans tous les cas de licenciement abusif, sans prévoir de protection particulière visant à empêcher la discrimination antisyndicale, est insuffisante selon les articles 1 et 3 de la convention. La commission souligne que, bien qu’il existe tout un éventail de systèmes prévoyant une protection «adéquate» contre les actes de discrimination antisyndicale, il est essentiel que le système en place soit efficace. Seraient donc compatibles avec la convention un système établissant un mécanisme préventif en exigeant qu’un licenciement soit autorisé par un organisme indépendant ou une autorité publique (inspection du travail ou tribunaux); un système prévoyant la réintégration d’un travailleur victime de licenciement abusif; ou un système prévoyant une indemnisation pour le préjudice causé à la suite d’un acte de discrimination antisyndicale et des sanctions suffisamment dissuasives imposées aux employeurs reconnus coupables de discrimination antisyndicale, lequel aura également un effet dissuasif pour empêcher dans la pratique les licenciements antisyndicaux. Tout en notant que des dispositions générales interdisant la discrimination existent dans la législation, la commission estime, compte tenu des nombreux cas de discrimination antisyndicale présumée, que le système actuellement en place en Géorgie ne prévoit pas de protection adéquate. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier les articles 5(8), 37(d) et 38(3) du Code du travail en consultation avec les partenaires sociaux, de manière à veiller à ce que le Code du travail prévoie une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale, en tenant compte des principes susmentionnés. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées à ce propos. La commission prie également le gouvernement de communiquer des informations détaillées sur l’application pratique de la convention, ainsi des statistiques sur le nombre de cas avérés de discrimination antisyndicale, les voies de recours fournies et les sanctions imposées, comme demandé par la Commission de la Conférence en juin 2010.
Article 4. Négociation collective. La commission avait précédemment noté que les articles 41 à 43 du Code du travail semblent mettre au même niveau les conventions collectives conclues avec des organisations de travailleurs et les accords conclus entre un employeur et des travailleurs non syndiqués, même si ces derniers ne sont qu’au nombre de deux. Considérant que la négociation directe entre une entreprise et ses travailleurs, contournant, lorsqu’elles existent, les organisations représentatives, va à l’encontre du principe selon lequel les négociations entre les employeurs et les organisations de travailleurs doivent être encouragées et promues, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier sa législation de manière à ce que la position des syndicats ne soit pas affaiblie par l’existence d’autres représentants de travailleurs ou par des situations discriminatoires qui favorisent le personnel non syndiqué.
La commission note, d’après l’indication du gouvernement, que la législation du travail vise à habiliter les travailleurs à conclure des conventions collectives de travail afin de leur assurer de meilleures conditions de travail et que cette convention a le même objectif; en conséquence, la législation est conforme à la convention. Le gouvernement estime que, bien que la convention prévoie la possibilité de mener des négociations collectives entre un employeur et un syndicat, elle n’interdit pas la négociation collective entre un employeur et des travailleurs non syndiqués, même si un syndicat existe dans une entreprise donnée. En conséquence, ajoute le gouvernement, les conventions collectives conclues avec les syndicats et les conventions conclues entre un employeur et des travailleurs non syndiqués ont, selon la législation nationale en vigueur, la même valeur. Le gouvernement souligne, cependant, que les travailleurs syndiqués bénéficient de plusieurs avantages par rapport aux travailleurs non syndiqués. Par exemple, un employeur est obligé de négocier collectivement avec un syndicat à l’initiative de ce dernier, mais n’est pas obligé de le faire avec les travailleurs non syndiqués; les syndicats bénéficient de certaines facilités (locaux, retenues des cotisations à la source, etc.), dont ne disposent pas les travailleurs non syndiqués. Le gouvernement indique aussi qu’il favorise la négociation collective dans la pratique et que les plus grandes sociétés ont signé des conventions collectives avec les syndicats respectifs. Pour ce qui est de la promotion de la convention collective prévue à l’article 4 de la convention, le gouvernement estime qu’une telle «promotion» n’implique pas nécessairement l’établissement de mesures législatives. Le gouvernement indique aussi que le Code du travail et la loi sur les syndicats ne restreignent en aucune façon la promotion de la négociation collective, mais bien au contraire comportent des règles, conditions et procédures adéquates. Le gouvernement conclut en soulignant que, aux termes du Code du travail, le droit de négocier collectivement appartient non seulement aux syndicats, qui ne regroupent que 12 pour cent environ de la main-d’œuvre (2008), mais également aux autres unions ou groupes de travailleurs. Une telle réglementation place les travailleurs non syndiqués et les travailleurs organisés dans le cadre de syndicats dans des conditions d’égalité et exclut ainsi la discrimination basée sur l’affiliation syndicale.
La commission prend note des arguments présentés par le gouvernement, mais estime difficile de concilier l’égalité accordée par la loi entre les conventions collectives du travail conclues avec des organisations syndicales et les conventions conclues avec un groupe de travailleurs non syndiqués avec les principes de l’OIT sur la négociation collective, selon lesquels des mesures doivent être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs ou les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. Si, au cours d’une négociation collective avec le syndicat, l’entreprise offre de meilleures conditions de travail aux travailleurs non syndiqués dans le cadre d’accords individuels, cela risque sérieusement d’affaiblir la capacité de négociation du syndicat et d’entraîner des situations discriminatoires en faveur du personnel non syndiqué; en outre, une telle situation pourrait encourager les travailleurs syndiqués à se retirer du syndicat. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier sa législation de manière que la position des syndicats ne soit pas affaiblie par l’existence d’autres représentants de travailleurs ou de situations discriminatoires en faveur des travailleurs non syndiqués et de promouvoir la négociation collective avec les organisations syndicales. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur toutes mesures prises ou envisagées à cet égard.
La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer le nombre de conventions collectives conclues dans le pays et de communiquer les statistiques pertinentes relatives au secteur privé. La commission note, d’après l’indication du gouvernement, que, bien que ne disposant pas de statistiques officielles sur les conventions collectives, il affirme que les vingt plus grandes entreprises du pays ont signé des conventions collectives avec les syndicats et fournit, à ce propos, l’exemple de cinq de ces entreprises. La commission prie le gouvernement de continuer à transmettre toutes informations pertinentes à ce propos.
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