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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 131) sur la fixation des salaires minima, 1970 - Portugal (Ratification: 1983)

Autre commentaire sur C131

Observation
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Réponses reçues aux questions soulevées dans une demande directe qui ne donnent pas lieu à d’autres commentaires
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Articles 3 et 4, paragraphe 2, de la convention. Eléments à prendre en considération pour déterminer le niveau du salaire minimum – Consultation des partenaires sociaux. La commission prend note des observations formulées par la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP) et par l’Union générale des travailleurs (UGT) au sujet de l’application de la convention, qui étaient jointes au rapport du gouvernement.
La CGTP indique que le pouvoir d’achat du salaire minimum a connu une évolution positive entre 2007 et 2010, suite à la mise en œuvre d’un accord tripartite conclu en décembre 2006 concernant l’évolution à moyen terme du salaire minimum. Cependant, selon la CGTP, la crise économique fut invoquée en 2011 pour justifier le non-respect de cet accord, et le salaire minimum n’a pas été ajusté en 2012, ce qui a entraîné une baisse significative de son pouvoir d’achat et la perte d’une partie des gains accumulés entre 2007 et 2010. La CGTP considère que cette évolution revêt une importance particulière en raison du nombre élevé de travailleurs percevant de bas salaires, de la proximité entre le montant du salaire minimum et la ligne de pauvreté, et de l’écart entre le montant du salaire minimum et le salaire moyen dans le secteur privé. Elle se réfère au décret loi no 143/2010 du 31 décembre 2010 qui a fixé à 485 euros le montant du salaire minimum pour 2011, tout en posant comme objectif de le porter à 500 euros à l’issue de deux évaluations qui devaient avoir lieu en mai et septembre 2011. La CGTP allègue que les évaluations prévues n’ont pas eu lieu et que les partenaires sociaux n’ont pas été consultés en mai et septembre 2011. Selon cette organisation, ce n’est qu’en mai 2012 que la question a été discutée au sein de la Commission permanente du dialogue social (CPDS), sans qu’une décision soit prise en vue du réajustement du salaire minimum. De l’avis de la CGTP, le contexte de difficultés économiques ne rend pas moins nécessaire la révision du salaire minimum. Au contraire, en plus de répondre à l’exigence de protection des travailleurs les moins rémunérés, son augmentation constituerait un moyen de favoriser la croissance économique en soutenant la demande intérieure.
Dans ses observations, l’UGT se réfère également à la décision du gouvernement de fixer le salaire minimum à 485 euros pour 2011, en soulignant que le gouvernement a fondé sa décision sur les conditions en matière de politique économique fixées dans le protocole d’accord qu’il a conclu avec la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international (FMI)). L’UGT affirme que les évaluations prévues par le décret-loi no 143/2010 n’ont pas été menées au sein de la CPDS et que le montant du salaire minimum a été maintenu à 485 euros. Elle rappelle que le Code du travail prévoit que le montant du salaire minimum est fixé annuellement par voie législative, après consultation de la CPDS, et allègue que ce n’est que suite aux pressions exercées par les représentants syndicaux que le gouvernement a inscrit cette question à l’ordre du jour des travaux de la CPDS, lors d’une réunion qui n’a eu lieu qu’en mai 2012. En outre, selon l’UGT, lors de cette réunion, le gouvernement s’est limité à informer les partenaires sociaux que le montant du salaire minimum ne serait pas ajusté et serait donc maintenu à 485 euros. Cette organisation considère que des facteurs tels que les besoins des travailleurs et l’augmentation du coût de la vie, et non pas uniquement des objectifs économiques, doivent être pris en compte lors de la fixation du salaire minimum, comme le prévoit la convention. L’UGT estime que, dans le contexte actuel de crise, marqué par le développement de la pauvreté et de l’exclusion, il est très important de tenir compte de ces facteurs. Elle considère, tout comme la CGTP, que l’augmentation du salaire minimum aurait un impact positif sur le marché intérieur, ce qui, en période de récession, est un élément essentiel pour relancer la croissance et développer ou maintenir l’emploi.
Dans sa réponse, le gouvernement indique que le taux élevé de chômage que connaît actuellement le pays constitue le principal obstacle à l’augmentation du salaire minimum. Le gouvernement se réfère à cet égard à une étude publiée en septembre 2011 par les Universités de Porto et de Minho et dont les conclusions font état d’un impact négatif pour l’emploi des augmentations du salaire minimum depuis 2006, en particulier pour les catégories les plus vulnérables de travailleurs, et qui souligne que l’augmentation immédiate du salaire minimum pour le porter à 500 euros entraînerait une diminution du taux d’emploi située entre 0,01 et 0,34 pour cent.
La commission note aussi une étude publiée en janvier 2012 par la Banque du Portugal sur l’impact du salaire minimum sur les travailleurs percevant les salaires les plus bas, qui souligne également l’impact négatif sur l’emploi des augmentations récentes du salaire minimum et, du fait de la plus grande rotation des effectifs dans les entreprises, leur effet préjudiciable sur la productivité, la formation et la progression des entreprises sur le marché intérieur du travail. Le gouvernement évoque également la fragilité extrême du marché du travail portugais, marqué par un taux de chômage élevé et un pourcentage important de nouveaux entrants sur le marché du travail qui perçoivent une rémunération égale au salaire minimum. Le gouvernement indique que la décision relative à la fixation du salaire minimum est précédée par une audition des partenaires sociaux au sein de la CPDS. Il précise que le montant du salaire minimum a été gelé en 2012 dans le cadre du programme d’assistance financière faisant l’objet d’un accord entre l’Etat portugais, la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le FMI. Le gouvernement fait cependant valoir que, en dépit des considérations qui précèdent, son intérêt pour cette question n’est pas moindre, et qu’il a proposé à la CPDS de suivre cette thématique en conduisant une étude sur l’évolution du salaire minimum pour 2013.
La commission note que, confronté à la détérioration de la situation financière du pays, le gouvernement a sollicité et obtenu une assistance financière de l’Union européenne et du FMI, et qu’un protocole d’accord établissant un programme d’ajustement économique pour la période 2011-2014 a été conclu le 17 mai 2011. Elle note que, en vertu de ce protocole d’accord, le gouvernement s’est engagé, en contrepartie de l’aide financière accordée, à ne procéder à des augmentations du salaire minimum que si celles-ci sont justifiées par des changements intervenus sur les plans économique et du marché du travail, et seulement après la conclusion d’un accord à cette fin dans le cadre du réexamen du programme d’assistance financière. La commission note que, en application du protocole d’accord, le gouvernement a décidé de porter le montant du salaire minimum à 485 euros pour 2011 – et non à 500 euros, comme cela avait été convenu dans un accord tripartite conclu en 2006 – et de geler ce montant pour 2012.
La commission est pleinement consciente des importantes difficultés économiques auxquelles le gouvernement est actuellement confronté et note les conclusions des études économiques jointes à son rapport et faisant état de l’impact négatif des dernières augmentations du salaire minimum sur l’emploi. La commission tient cependant à rappeler que «la fixation des salaires minima devrait constituer l’un des éléments de toute politique destinée à lutter contre la pauvreté et à satisfaire les besoins de tous les travailleurs et de leur famille», comme le souligne la recommandation (nº 135) sur la fixation des salaires minima, 1970, qui complète la convention nº 131. Elle relève à ce propos, à la lecture des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport, que le pourcentage de travailleurs à temps complet rémunérés au salaire minimum est passé de 6 pour cent en 2007 à 11,3 pour cent en 2011, et que les décisions prises en matière de salaire minimum ont donc un impact sur un nombre élevé de travailleurs.
La commission rappelle que l’article 3 de la convention exige que les facteurs pris en compte lors de la fixation des salaires minima comprennent non seulement des facteurs d’ordre économique tels que les objectifs de la politique de l’emploi, mais également les besoins des travailleurs et de leur famille, eu égard au niveau général des salaires dans le pays, au coût de la vie, aux prestations de sécurité sociale et aux niveaux de vie comparés d’autres groupes sociaux. La commission rappelle par ailleurs que le Pacte mondial pour l’emploi, adopté par la Conférence internationale du Travail en juin 2009 en réponse à la crise économique mondiale, souligne la pertinence des instruments de l’OIT relatifs au salaire pour la prévention d’un nivellement par le bas des conditions de travail et pour la stimulation de la relance (paragr. 14), suggère que les gouvernements devraient envisager des options, telles qu’un salaire minimum, qui puissent réduire la pauvreté et les inégalités, accroître la demande et contribuer à la stabilité économique (paragr. 23), et fait valoir que, pour éviter la spirale déflationniste des salaires, les salaires minima devraient être réexaminés et réajustés régulièrement (paragr. 12).
La commission considère que la fixation de salaires minima équitables, en concertation avec les partenaires sociaux, constitue un élément essentiel de l’Agenda du travail décent et contribue à la réalisation des objectifs de justice sociale, de paix et de lutte contre la concurrence déloyale que l’OIT poursuit depuis sa création. En outre, comme le souligne le Pacte mondial pour l’emploi, le réajustement régulier des salaires minima dans un contexte de crise économique peut éviter la spirale déflationniste des salaires et favoriser la reprise économique grâce à la stimulation de la demande qu’il permet. En toute hypothèse, la commission insiste sur le caractère fondamental du principe de pleine consultation et de participation directe, sur un pied d’égalité, des partenaires sociaux à l’application des méthodes de fixation des salaires minima. Ce principe devrait être respecté en toute circonstance, sans que la mise en œuvre d’un programme d’ajustement économique ou, plus généralement, d’une politique d’austérité en réponse à une situation de crise puisse exonérer les gouvernements de leurs responsabilités en la matière. Au contraire, le principe de pleine consultation et de participation directe des partenaires sociaux revêt une importance toute particulière dans les périodes de crise économique et sociale, en raison des répercussions considérables que les décisions relatives à la fixation et à l’ajustement périodique des salaires minima sont susceptibles d’avoir tant sur la politique économique, y compris la politique de l’emploi, que sur le pouvoir d’achat des travailleurs. Un dialogue social ouvert et constructif facilite en effet l’adoption de mesures équilibrées qui assurent une répartition équitable des efforts à fournir pour sortir de la crise, favorisant ainsi l’adhésion aux réformes et la préservation de la cohésion sociale. En conséquence, la commission espère que le gouvernement ne manquera pas de procéder à des consultations utiles et efficaces auprès des organisations d’employeurs et de travailleurs représentées au sein de la Commission permanente du dialogue social avant toute décision qu’il sera amené à prendre au sujet de l’éventuelle revalorisation du montant du salaire minimum, et qu’il tiendra pleinement compte dans sa prise de décision tant des besoins des travailleurs et de leur famille que des objectifs de politique économique.
Article 2, paragraphe 1. Caractère obligatoire du salaire minimum. La commission se réfère à son précédent commentaire, dans lequel elle relevait que les sanctions prévues par la loi no 35/2004 portant règlement d’application du Code du travail de 2003 ne s’appliquaient pas aux infractions aux dispositions de cette loi fixant les taux de salaires minima applicables aux apprentis, stagiaires et travailleurs dont la capacité de travail est réduite. Elle note que, dans ses observations, l’UGT fait valoir que la loi no 7/2009 du 12 février 2009 portant nouveau Code du travail ne prévoit toujours pas de sanction en cas de non respect du salaire minimum applicable aux apprentis, personnes en formation et stagiaires, dont le montant est réduit de 20 pour cent par rapport au salaire minimum applicable aux autres travailleurs. L’UGT estime que l’article 275 du Code du travail de 2009 devrait être amendé afin de prévoir des sanctions spécifiques en cas de non-respect du salaire minimum applicable à ces catégories de travailleurs. La commission prie le gouvernement de préciser quelles sont les sanctions applicables en cas de non-respect de l’article 275, paragraphe 1, du Code du travail. Si de telles sanctions ne sont pas prévues par le Code du travail, le gouvernement est prié d’indiquer les mesures qu’il envisage de prendre afin d’assurer que les travailleurs concernés ne perçoivent pas des salaires inférieurs au minimum fixé par cette disposition.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2013.]
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