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Commentaires adoptés par la Commission d'experts : Cambodia

Adopté par la commission d'experts 2021

C087 - Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

La commission prend note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2021, relatives à des points examinés dans le présent commentaire et dans lesquelles elle dénonce également qu’en août 2021: i) Rong Chhun, le président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU) et l’ancien président de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA), arrêté en juillet 2020 après avoir pris parti pour des villageois dans un différend foncier le long de la frontière entre le Cambodge et le Viet Nam, a été condamné à deux ans de prison; et ii) Sar Kanika, la présidente de l’Association des travailleurs informels du Cambodge, qui avait également participé à ces activités syndicales en défense des intérêts économiques des fermiers, a été condamnée à 20 mois de prison. La commission se félicite de l’annonce de la libération de M. Chhun et de Mme Kanika, en novembre 2021.
La commission note que la CSI dénonce par ailleurs qu’au cours de l’année écoulée, plusieurs lois et décrets d’urgence ont été adoptés, restreignant l’exercice de la liberté syndicale. En particulier, la CSI fait référence à: i) la loi sur l’administration de la nation dans les situations d’urgence, affirmant qu’elle accorde au gouvernement de larges pouvoirs lui permettant d’interdire les réunions et les rassemblements, de surveiller les télécommunications et d’interdire ou de limiter les médias susceptibles de nuire à la «sécurité nationale», définit une série d’autres mesures «appropriées et nécessaires» et prévoit que toute infraction est passible de lourdes peines d’emprisonnement et d’amendes; et ii) la loi sur les mesures visant à prévenir la propagation de la COVID-19 et d’autres maladies graves, dangereuses et contagieuses, qui comprend l’interdiction des rassemblements, ainsi que des «mesures administratives et autres non spécifiées, nécessaires pour répondre à la propagation de la COVID-19 et la prévenir». La CSI allègue que des dispositions aussi vagues permettent des abus et autorisent les autorités à cibler arbitrairement les personnes et les organisations qui protestent contre les politiques gouvernementales. En outre, toujours selon la CSI, un projet de loi sur l’ordre public, très problématique, exigerait l’autorisation des autorités pour utiliser des espaces publics et leur permettrait de mettre un terme à tout événement pour lequel aucune autorisation n’aurait été demandée. La CSI allègue par ailleurs que le 3 avril 2020, Mme Soy Sros, la présidente d’un syndicat local affilié au Syndicat collectif du mouvement des travailleurs (CUMW), a été arrêtée par la police de la province de Kompong Speu à la suite d’une plainte déposée au pénal par son employeur pour des messages publiés sur les réseaux sociaux liés à un conflit du travail dû au licenciement injuste de plusieurs membres syndicaux. La commission note qu’en ce qui concerne la nécessité d’enquêter sur les allégations de répression violente d’activités syndicales et d’arrestations ou de poursuites judiciaires de dirigeants syndicaux pour des activités syndicales légitimes, le gouvernement: i) indique que des procédures de dépôt de plaintes et de réclamation existent à tous les niveaux et toute personne, y compris des syndicalistes, peut y recourir et en bénéficier; ii) note que d’une façon générale, les syndicats et les syndicalistes doivent présenter leurs réclamations aux autorités compétentes qui prendront des mesures immédiates, conformément aux règles et procédures applicables, et feront suivre les informations pertinentes pour que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle puisse fournir une assistance juridique appropriée; et iii) affirme que les dirigeants syndicaux qui commettent des infractions pénales doivent répondre de leurs actes. Tout en observant, à partir des informations publiquement disponibles, qu’il y a eu une certaine évolution concernant la libération de Mme Soy Sros, la commission regrette que le gouvernement n’ait pas fourni davantage d’informations quant aux autres allégations spécifiques d’organisations de travailleurs qui lui ont été soumises et le prie de fournir ses commentaires détaillés sur toutes ces allégations graves.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 109e session, juin 2021)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après, la Commission de la Conférence) concernant l’application de la convention par le Cambodge. La commission observe que la Commission de la Conférence a exprimé sa profonde préoccupation devant la poursuite des actes de violence contre des travailleurs, les arrestations de nombreux syndicalistes en rapport avec leurs activités, ainsi que devant l’absence d’enquêtes efficaces et en temps opportun sur ces incidents, et a prié instamment le gouvernement: i) d’enquêter sur toutes les allégations de répression violente de l’activité syndicale et de détention de dirigeants syndicaux; ii) de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer les enquêtes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), et d’assurer que les auteurs de ces crimes sont traduits en justice; iii) d’engager tous les efforts nécessaires pour conclure les procédures judiciaires intentées à des syndicalistes dans le cadre des incidents des manifestations de janvier 2014, d’assurer qu’aucune inculpation ou sanction ne soit imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales et d’abandonner tous les chefs d’inculpation pénale contre les syndicalistes accusés dans le cadre des manifestations de janvier 2014; et iv) de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme aux arrestations arbitraires, aux détentions et poursuites de syndicalistes pour avoir mené des activités syndicales légitimes. La Commission de la Conférence a également noté que, si des mesures positives ont été prises pour mettre la législation en conformité avec la convention, des problèmes graves de conformité restent sans réponse et a demandé au gouvernement cambodgien: 1) de communiquer à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les violences visant des dirigeants syndicaux et les meurtres de certains d’entre eux; 2) d’assurer que des enquêtes sont promptement diligentées contre les actes de discrimination antisyndicale et que, si les faits sont avérés, des réparations adéquates et des sanctions dissuasives sont appliquées; 3) avec l’assistance technique du BIT, d’élaborer des lignes directrices, un code de bonne pratique ou un manuel sur le maintien de l’ordre et le traitement des actions collectives et actions de protestation; 4) de modifier la loi sur les syndicats en consultation avec les partenaires sociaux pour garantir sa conformité avec la convention; 5) d’assurer que les travailleurs peuvent enregistrer des syndicats par le biais d’une procédure simple, objective et transparente; 6) de continuer à identifier, en consultation avec les partenaires sociaux, des mesures légales appropriées pour garantir que les enseignants, les travailleurs domestiques et les fonctionnaires qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats jouissent des droits à la liberté syndicale au sens de la convention; 7) d’abroger, dans la loi sur les syndicats, le critère d’alphabétisation figurant dans les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats, le paragraphe 2 de l’article 28 sur la dissolution automatique des organisations de travailleurs en cas de fermeture totale d’une entreprise ou d’un établissement, et l’article 29 sur la dissolution des organisations d’employeurs et de travailleurs à l’initiative de membres de ces organisations; 8) de discuter avec les partenaires sociaux de la possibilité d’autoriser la constitution d’organisations d’employeurs et de travailleurs par secteur ou profession; et 9) d’intensifier ses efforts pour faire du Conseil d’arbitrage une institution efficace et pérenne pour traiter les conflits du travail, et de faire en sorte que les décisions contraignantes du Conseil d’arbitrage soient effectivement appliquées en droit et dans la pratique. Enfin, la Commission de la Conférence a recommandé que le gouvernement accepte dès que possible une mission de contacts directs. À cet égard, la commission accueille favorablement que, par une communication datée du 10 août 2021, le gouvernement accepte la mission de contacts directs et ait pris en contact avec le BIT pour l’organiser dès que possible dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

Droits syndicaux et libertés publiques

Meurtres de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), la commission note que: i) en ce qui concerne le meurtre de Chea Vichea, le gouvernement indique que la police de Phnom Penh a rouvert l’enquête, note que malgré les difficultés, la police fait tout son possible pour clore l’affaire et répète qu’il est indispensable que les membres de la famille et toutes les parties concernées collaborent étroitement; ii) en ce qui concerne le meurtre de Ros Sovannareth, le gouvernement rappelle que la Cour d’appel a réexaminé l’affaire et a rendu son verdict en juillet 2019, condamnant le suspect, Thach Saveth, à 15 ans de prison pour meurtre prémédité; et iii) en ce qui concerne le meurtre de Hy Vuthy, le gouvernement rappelle que Chan Sophon, le suspect qui avait été arrêté en septembre 2013, a fait appel et a été libéré en février 2014 et indique que l’autre suspect, Phal Vannak, a aussi été condamné par contumace et est sous le coup d’un mandat d’arrêt. La commission note par ailleurs que la CSI déplore une fois encore que ces meurtres ne soient pas résolus, ainsi que l’impunité persistante 17 et 14 ans plus tard. La commission réitère sa profonde préoccupation face à l’absence de progrès concernant les enquêtes et renvoie à cet égard aux conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale lors de son examen du cas no 2318 (voir 396e rapport, novembre 2021, paragr. 166 à 172). Rappelant une nouvelle fois la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes, la commission prie instamment et fermement les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure d’enquête et de communiquer des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Incidents durant les manifestations de janvier 2014. En ce qui concerne les syndicalistes faisant l’objet de procédures pénales pour les incidents survenus au cours des manifestations de janvier 2014, dans son précédent commentaire, la commission avait noté avec intérêt que les six dirigeants syndicaux initialement condamnés à une peine de trois ans et demi de prison avec sursis avaient été acquittés de tous les chefs d’accusation le 28 mai 2019. Elle avait aussi noté que pour les autres syndicalistes faisant encore l’objet de procédures judiciaires, un groupe de travail avait été mis en place pour suivre les affaires en cours devant les tribunaux en vue d’accélérer leur résolution. Enfin, elle avait pris note de statistiques détaillées relatives aux efforts visant à résoudre les affaires et avait demandé au gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures en cours. La commission note que dans son dernier rapport, le gouvernement: i) réaffirme qu’on ne peut pas considérer que les émeutes survenues s’inscrivaient dans le cadre de l’exercice pacifique d’activités syndicales et qu’il s’agissait d’un acte à motivation politique; ii) déclare que les plaintes ont été déposées auprès des tribunaux compétents qui ont statué à leur discrétion en fonction des preuves fournies (certains suspects ont été relaxés s’ils étaient innocents en application des règles de procédure); iii) indique qu’en novembre 2021, peu d’affaires pénales étaient en instance devant les tribunaux et aucune ne concernait la liberté syndicale; et iv) rappelle que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de la Justice ont collaboré pour apporter un soutien juridique aux syndicalistes dont les affaires étaient toujours en cours. La commission note par ailleurs que la CSI: i) rappelle que les travailleurs du secteur de l’habillement protestaient pour obtenir un salaire minimum leur permettant de vivre et qu’en réponse, la police militaire a ouvert le feu sur les manifestants, faisant plusieurs morts et blessés; ii) déplore que sept ans après les manifestations de 2014, des cas d’arrestation et de détention arbitraires de syndicalistes ne soient toujours pas résolus; et iii) dénonce que plusieurs syndicalistes font toujours l’objet de poursuites civiles ou pénales pour avoir pacifiquement participé aux manifestations. La commission note également qu’en réponse à la demande de la Commission de la Conférence de communiquer à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les violences visant des dirigeants syndicaux et les meurtres de certains d’entre eux, le gouvernement répète qu’il ne peut pas partager les rapports détaillés des commissions, car ils relèvent des affaires internes du pays, mais que, comme cela a été rapporté à la mission de contact directs de 2016, les conclusions des trois commissions ont été soumises aux tribunaux compétents pour la suite de la procédure et le gouvernement fera part de l’issue de la procédure judiciaire lorsqu’elle sera terminée. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures judiciaires en cours visant des syndicalistes, notamment sur tout verdict rendu. Elle le prie également de communiquer des informations détaillées sur toute décision de justice résultant des conclusions des commissions qui ont enquêté sur les allégations de meurtres, de violences physiques et d’arrestations de travailleurs qui manifestaient, de même que tous les documents liés aux rapports des commissions qui ne mettent pas directement en cause les affaires internes du pays.
Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation. Dans ses commentaires précédents, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates pour éviter l’écueil d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler des manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, la commission avait encouragé le gouvernement à envisager de solliciter l’assistance technique du Bureau en rapport avec la formation des forces de police dans le but, par exemple, d’élaborer des lignes directrices, un code de bonne pratique ou un manuel sur l’attitude à avoir lors d’actions collectives et de protestation. La commission prend bonne note que le gouvernement fait savoir que: i) 120 policiers de quatre unités différentes ont reçu une formation organisée par le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, avec le soutien du BIT; ii) des formations complémentaires ont eu lieu en 2020 et un total 550 policiers ont participé à des formations sur le droit de faire grève et de manifester pacifiquement; et iii) compte tenu des résultats de ces formations, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle maintiendra ses contacts avec les institutions concernées pour engager des consultations en vue d’élaborer des lignes directrices sur l’attitude à avoir lors de conflits du travail et d’actions collectives, et une demande d’appui technique sera présentée au BIT en temps voulu. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations à cet égard, surtout sur l’élaboration, avec l’assistance du BIT, de lignes directrices, d’un code de bonne pratique ou d’un manuel sur le maintien de l’ordre et le traitement des actions collectives et actions de protestation, ainsi que sur le nombre de policiers qui participent aux formations, leur durée et les sujets qu’elles abordent, y compris la question de savoir si les conséquences disciplinaires de l’usage excessif de la force font partie de la formation.

Questions législatives

La commission note que le gouvernement répète les informations qu’il avait fournies sur les amendements à la loi sur les syndicats, qui est entrée en vigueur en janvier 2020, et indique qu’ils ont donné lieu à une augmentation du nombre d’organisations professionnelles enregistrées. Il précise que sur 5 650 organisations inscrites, 5 352 sont des syndicats locaux de travailleurs, 247 des fédérations de syndicats de travailleurs, 40 des confédérations de syndicats de travailleurs et 11 des organisations d’employeurs. La commission note, d’après l’indication du gouvernement, qu’il n’est pas nécessaire de modifier davantage la loi sur les syndicats; que l’une des principales priorités est de sensibiliser les syndicalistes aux dispositions de la loi sur les syndicats; qu’il accueille favorablement que de futures consultations se tiennent pour revoir le contenu de la loi et sa mise en œuvre; et qu’il souhaite demander le soutien du BIT pour organiser des formations sur la loi sur les syndicats afin de renforcer les capacités des partenaires sociaux. Le gouvernement encourage une fois encore les travailleurs et les syndicalistes à déposer plainte auprès du ministère du Travail et de la Formation professionnelle en cas d’irrégularités liées à l’enregistrement, à la représentation ou à l’exercice de la liberté syndicale en application de la loi sur les syndicats. D’autre part, la commission note que la CSI allègue que les modifications apportées à la loi sur les syndicats ne permettent pas une mise en conformité de la législation avec la convention et des syndicats ont fait savoir que le gouvernement n’avait mené aucun dialogue constructif avec eux et avait refusé d’examiner les propositions d’amendement des syndicats alors qu’ils auraient permis d’assurer le respect de la convention.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour garantir que les fonctionnaires (dont les enseignants), qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, peuvent pleinement bénéficier de leurs droits syndicaux tels que conférés par la convention et que la législation est modifiée en conséquence. La commission note que le gouvernement répète que la loi sur les syndicats est applicable aux enseignants qui travaillent dans des établissements privés et que les fonctionnaires et les enseignants des écoles publiques peuvent jouir de la liberté syndicale conformément à la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales. Le gouvernement ajoute que la convention n’exige pas que la liberté syndicale de tous les individus soit couverte par un instrument législatif unique et indique que ces différents régimes sont dus au système administratif et à la répartition des compétences des institutions étatiques chargées de l’enregistrement des organisations professionnelles. À cet égard, la commission se doit de rappeler qu’elle avait déjà souligné que certaines dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contreviennent aux droits que la convention reconnaît aux fonctionnaires en matière de liberté syndicale, car elle ne confère pas aux associations de fonctionnaires le droit de rédiger des statuts et un règlement, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans l’ingérence des autorités publiques, ni le droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris à l’échelon international, et soumet l’enregistrement de ces associations à l’autorisation du ministère de l’Intérieur. En outre, la commission avait noté que les organisations et associations de travailleurs étaient particulièrement inquiètes face au manque de protection des droits syndicaux des enseignants (mentionnant en particulier les sanctions et les menaces visant des enseignants qui cherchent à s’organiser). La commission note que les observations de la CSI allèguent une nouvelle fois que le cadre régressif de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales n’est pas conforme à la convention. Regrettant l’absence persistante de progrès à cet égard, la commission se doit une fois encore de prier urgemment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour garantir que les fonctionnaires (dont les enseignants), qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, peuvent pleinement exercer leurs droits syndicaux tels que conférés par la convention et que la législation est modifiée en conséquence.
En ce qui concerne les travailleurs domestiques, la commission note que le gouvernement déclare que la loi sur les syndicats est applicable à cette catégorie de travailleurs. De plus, pour ce qui est de la possibilité d’autoriser la formation d’organisations par secteur ou profession, le gouvernement indique qu’il n’est pas interdit de constituer des organisations par secteur ou profession tant que les conditions de la loi sur les syndicats sont remplies et affirme que la convention n’exige pas qu’une loi nationale énonce précisément cette disposition. Le gouvernement ajoute qu’il souhaiterait solliciter l’assistance du BIT pour organiser des formations en vue de sensibiliser davantage les travailleurs et les employeurs à ce sujet. Ayant dûment pris note de ces indications, la commission rappelle que les organisations syndicales continuent d’exprimer une profonde préoccupation face aux difficultés que rencontrent les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle en général qui cherchent à constituer des syndicats et à s’y affilier, car la loi sur les syndicats préconise un modèle de syndicat d’entreprise dont les conditions sont très difficiles à remplir pour ces travailleurs et n’autorise pas la création de syndicats par secteur ou profession. Elle note également que, dans ses observations, la CSI souligne de nouveau que l’une des lacunes les plus importantes de la législation nationale est que les travailleurs domestiques, les travailleurs de l’économie informelle et les autres travailleurs qui ne sont pas organisés selon un modèle de syndicat d’entreprise ne peuvent toujours pas, dans la pratique, constituer des syndicats ni s’y affilier. La commission encourage le gouvernement à promouvoir l’exercice complet et effectif par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle des droits que confère la convention. Pour ces travailleurs et les autres travailleurs qui ne sont pas facilement organisés sur un modèle au niveau de l’entreprise, la commission prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats et des associations d’employeurs. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats afin de supprimer l’obligation de savoir lire et écrire le khmer de la liste des conditions d’éligibilité pour les étrangers. La commission note, d’une part, que le gouvernement indique à cet égard que la loi sur les syndicats a été modifiée par un consensus tripartite et que cette condition n’est pas incompatible avec la convention. Elle note d’autre part que les observations de la CSI dénoncent encore cette exigence comme l’un des obstacles importants à la mise en conformité de la loi sur les syndicats avec la convention. La commission rappelle aussi que l’imposition de l’obligation de savoir lire et écrire en tant que condition d’éligibilité des représentants est incompatible avec la convention (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 104). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour supprimer l’obligation de savoir lire et écrire le khmer des articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de modifier le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. Elle avait observé que les modifications de 2019 à la loi sur les syndicats prévoyaient toujours, à son paragraphe 2 de l’article 28, la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement, mais incluaient une condition supplémentaire, à savoir le versement intégral aux travailleurs des salaires et autres prestations. La commission note que le gouvernement réaffirme que l’objectif des modifications apportées était de veiller aux intérêts des travailleurs et des syndicats en cas de fermeture d’une entreprise; qu’à l’époque, les modifications avaient été favorablement accueillies par les syndicats; et qu’étant donné que les syndicats locaux sont légalement liés aux entreprises dans lesquelles ils se constituent, lorsque celle-ci n’existe plus légalement, le syndicat est amené à disparaître également. À cet égard, la commission se doit de rappeler que si le versement des salaires et des autres prestations peut en effet constituer une raison légitime pour un syndicat de rester en activité après la dissolution de l’entreprise concernée, il en existe d’autres (comme la défense d’autres revendications légitimes, y compris à l’encontre de tout successeur légal de l’ancienne société). Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne peut être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts ou par le jugement d’un tribunal, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant entièrement son paragraphe 2.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. La commission avait également demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui accorde à toute partie concernée ou à 50 pour cent du nombre total des membres du syndicat ou de l’association d’employeurs le droit de déposer au tribunal du travail une demande de dissolution. Observant que les modifications de 2019 à la loi sur les syndicats ne modifiaient pas la disposition en question et notant que les membres pouvaient toujours décider de quitter le syndicat, la commission avait rappelé sa précédente observation, à savoir que la seule manière pour les membres de demander la dissolution devait être celle prévue dans les statuts de l’organisation. Notant que le gouvernement ne formule pas de commentaires supplémentaires à cet égard, la commission le prie de nouveau de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats afin de laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses commentaires précédents, la commission avait rappelé combien il était important de veiller au bon fonctionnement du système judiciaire en tant que garantie contre l’impunité et moyen efficace de protéger les droits syndicaux des travailleurs pendant les conflits du travail, ainsi que de répondre aux vives préoccupations soulevées quant à l’indépendance du pouvoir judiciaire et son effet sur l’application de la convention. Elle s’était également félicitée de l’engagement du gouvernement à renforcer le Conseil d’arbitrage et avait voulu croire qu’il resterait facilement accessible et continuerait à jouer un rôle important dans le traitement des conflits collectifs et que les éventuelles mesures nécessaires seraient prises en vue de l’application effective de ses sentences lorsqu’elles sont contraignantes. La commission note avec intérêt l’indication du gouvernement selon laquelle la nouvelle modification apportée à la loi sur le travail a étendu la compétence du Conseil d’arbitrage pour qu’il entende également les conflits individuels et la réaffirmation du gouvernement de son engagement ferme à soutenir les activités du conseil et à garantir la pérennité de cette institution. Elle note aussi qu’il signale qu’en ce qui concerne les décisions du Conseil d’arbitrage, les parties au différend sont priées de choisir dès le début si la sentence est ou non contraignante et en cas de non-respect d’une sentence contraignante, la partie concernée peut déposer plainte auprès du tribunal compétent pour qu’il fasse appliquer la décision. Soulignant l’importance de l’indépendance du pouvoir judiciaire, la commission invite le gouvernement à continuer de fournir des informations sur le fonctionnement du Conseil d’arbitrage, notamment sur le nombre et la nature des litiges portés devant lui et sur le niveau de respect des sentences du Conseil d’arbitrage qui ne sont pas contraignantes, ainsi que sur le recours aux tribunaux pour garantir que les sentences du conseil, lorsqu’elles sont contraignantes, sont dûment exécutées, y compris le nombre de décisions de justice rendues à cette fin.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

C087 - Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Conditions d’enregistrement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que la mission de contacts directs de mars 2017 avait souligné les préoccupations exprimées par des organisations de travailleurs à propos des conditions requises pour obtenir et conserver leur enregistrement, et de leur application dans la pratique, y compris les allégations de refus arbitraire de demandes d’enregistrement et d’introduction par voie réglementaire de nouvelles conditions non prévues par la loi. Elle avait noté que le gouvernement indiquait dans son rapport que: i) à la suite d’un forum syndical sur le sujet, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait émis l’instruction no 39/18, enjoignant à tous les départements chargés de l’enregistrement des organisations de faciliter le processus, notamment en n’exigeant pas de renseignements sur la situation familiale et en permettant au personnel administratif des fédérations ou confédérations d’aider à l’enregistrement des syndicats locaux qui leur sont affiliés; ii) 72 inspecteurs du travail avaient participé à une formation sur les procédures d’enregistrement; et iii) le 31 mai 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait publié l’instruction no 53/19, demandant aux départements compétents de revoir les documents exigés pour les fédérations et confédérations de syndicats de travailleurs et de supprimer certaines conditions. La commission note que le gouvernement indique par ailleurs: i) les conditions établies dans la loi sur les syndicats ne doivent pas être vues comme des obstacles à l’enregistrement; ii) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a reçu aucune plainte concernant exclusivement le refus, la suspension ou le rejet de l’enregistrement; iii) les requêtes du responsable du registre visant à modifier des informations incorrectes dans le formulaire de demande d’enregistrement ne doivent pas être considérées comme des restrictions à l’enregistrement, iv) les procédures légales visent à garantir que les syndicats sont constitués pour protéger les droits et avantages légitimes des travailleurs; v) l’évolution des procédures d’enregistrement a conduit à une augmentation du nombre d’enregistrements de syndicats, malgré les difficultés rencontrées à cause de la pandémie de COVID-19 (394 nouvelles organisations enregistrées); et vi) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle accueille favorablement toutes les plaintes relatives au processus d’enregistrement pour que les autorités puissent les examiner et les traiter. Par ailleurs, la commission note que dans ses observations et faisant référence à des exemples concrets, la Confédération syndicale internationale (CSI) allègue que, malgré certaines modifications apportées aux formulaires de demande, l’enregistrement des syndicats reste difficile et les demandes sont refusées pour des raisons arbitraires ou des erreurs techniques extrêmement mineures. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires à cet égard et, en consultation avec les organisations de travailleurs, de continuer d’évaluer le fonctionnement des procédures d’enregistrement, ainsi que de prendre toute mesure supplémentaire nécessaire pour que l’enregistrement ne soit qu’une formalité simple et rapide n’impliquant aucune discrétion ou autorisation préalable.
Articles 2 et 3. Audits financiers et maintien de l’enregistrement. Dans son précédent commentaire, la commission avait observé que les modifications apportées en 2019 à la loi sur les syndicats prévoyaient: i) un nouvel article 27 exigeant des organisations qu’elles présentent non seulement un état financier à leurs membres, mais aussi qu’elles le fassent vérifier par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations); et ii) un nouvel article 17, sur le maintien de l’enregistrement, exigeant non seulement la présentation des états financiers annuels et des rapports d’activité, mais également leur vérification par un cabinet d’audit indépendant à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations). La commission estime que ces dispositions pourraient exposer les syndicats à des demandes fantaisistes de vérification, ce qui générerait des frais importants pour conserver leur enregistrement. De tels audits financiers ne doivent être imposés que s’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi (ce qui ne devrait pas enfreindre les principes de la liberté syndicale tels que consacrés dans la convention), comme des allégations justifiées de détournement de fonds, ou de manque de légitimité ou d’indépendance. La commission note que selon les observations de la CSI à cet égard, la loi sur les syndicats accorderait un pouvoir excessif de contrôle financier aux autorités, notamment un nombre illimité de vérifications, portant ainsi atteinte au droit des travailleurs de gérer leurs organisations. Notant qu’il ne fournit aucune information supplémentaire à cet égard, la commission prie de nouveau le gouvernement de revoir les articles 17 et 27 de la loi sur les syndicats, en consultation avec les organisations représentatives concernées, pour que la vérification des états financiers et des rapports d’activité n’ait lieu que lorsqu’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi.
Conditions de quorum ou de scrutin pour certaines décisions dans les statuts d’un syndicat. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle les conditions prévues à l’article 13 de la loi sur les syndicats, sur les statuts des syndicats (quorum à la majorité absolue pour les décisions sur la grève et la modification des statuts, ainsi que pour les assemblées générales des syndicats, et vote à la majorité absolue pour la décision de faire grève), n’obligeaient pas de participer personnellement aux réunions et les syndicats pouvaient choisir d’autres moyens appropriés pour convoquer une réunion et déterminer les conditions pour y participer, conformément à leurs statuts, à condition que le quorum fixé soit atteint. De plus, le gouvernement indiquait que les malentendus concernant l’application de cette disposition avaient été dissipés au cours de l’atelier tripartite du 24 mars 2017, mais que des améliorations seraient possibles en procédant à d’autres consultations; que depuis l’atelier, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’avait pas reçu de demandes relatives à l’application de l’article 13 de la loi sur les syndicats; et qu’un forum syndical annuel avait été organisé pour revoir la mise en œuvre de cette loi. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à ce sujet, la commission s’attend à ce que le gouvernement continue de prendre les mesures nécessaires, notamment dans le contexte d’une nouvelle révision de la loi sur les syndicats, pour préciser l’application des conditions de quorum et permettre aux syndicats de déterminer librement dans leurs statuts ou règlements d’autres moyens qu’une présence effective (procuration ou délégation) pour atteindre le quorum fixé, y compris en ce qui concerne les organisations de niveau supérieur.
Article 3. Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leur programme. Dans ses commentaires précédents, la commission avait fait référence à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est habilité à déterminer le service minimum en question. Elle avait aussi prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant notamment des exemples de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. La commission avait noté que le gouvernement indiquait que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait consulté les parties concernées sur l’application de l’article 326 lors de l’élaboration d’un règlement visant à déterminer le service minimum dans une entreprise où une grève a lieu. Elle s’était alors félicitée de l’indication du gouvernement selon laquelle il allait solliciter l’assistance technique du BIT pour organiser une consultation tripartite sur le projet de règlement. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à ce propos et rappelant ses précédentes recommandations, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, y compris sur l’application dans la pratique de l’article 326 de la loi sur le travail.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait également noté que la CSI dénonçait qu’il était courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats avaient respecté toutes les procédures. Dans ses observations, la CSI alléguait aussi que des grèves avaient été violemment réprimées par des criminels engagés à cette fin, que des travailleurs grévistes avaient été massivement licenciés et que des dirigeants syndicaux avaient été placés en détention pour l’organisation d’une grève dans le secteur de l’habillement. La commission avait aussi noté que, selon le gouvernement: i) des injonctions avaient été émises pour protéger les propriétés privées, ainsi que le bien-être et la vie des travailleurs; ii) des injonctions n’avaient jamais été émises contre des grèves correctement menées, dans le respect de la loi, mais uniquement en cas de grève illégale et exigeaient alors la reprise du travail dans les 48 heures, faute de quoi les travailleurs étaient considérés comme ayant commis une faute grave et pouvaient être licenciés; iii) à cause d’un manque d’application effective de la législation et des règlements concernés, de plus en plus de dirigeants syndicaux opportunistes organisaient des grèves illégales dans leur propre intérêt, fragilisant ainsi les efforts déployés pour mettre en place des relations professionnelles constructives et pacifiques; et iv) 99 pour cent des grèves ne respectaient pas au moins une des conditions prévues par la loi. La commission avait donc observé que la réponse du gouvernement et les observations de la CSI confirmaient l’existence de problèmes majeurs et d’importantes difficultés entourant la légalité de l’exercice des actions revendicatives dans le pays. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Articles 5 et 6. Capacité des organisations de niveau supérieur de représenter leurs membres. La commission prend note des observations de la CSI dénonçant le refus du ministère du Travail et de la Formation professionnelle de permettre aux syndicats de niveau supérieur de représenter leurs membres lors de conflits collectifs. À titre d’exemple, la CSI fait référence à une procédure de conciliation pour un conflit du travail où les autorités auraient affirmé que les dirigeants de fédérations et confédérations n’étaient pas autorisés à s’exprimer pendant la réunion et que les syndicats qualifiés de plus représentatifs ne pouvaient se faire représenter. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.

Adopté par la commission d'experts 2020

C098 - Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des observations de la CSI, reçues le 21 septembre 2020, alléguant que les modifications de décembre 2019 apportées à la loi sur les syndicats n’ont pas mis cette loi en conformité avec la convention, et faisant valoir en particulier que les sanctions infligées pour discrimination antisyndicale restent bien trop faibles pour être dissuasives. La commission demande au gouvernement de transmettre ses commentaires à cet égard.
N’ayant reçu aucune information supplémentaire, la commission réitère ses commentaires adoptés en 2019, reproduits ci-après.
La commission prend note des observations soumises par la Confédération syndicale internationale (CSI) en date du 1er septembre 2019 sur des questions faisant l’objet du présent commentaire.
La commission prend note des commentaires du gouvernement en réponse aux observations de la CSI de 2016 et 2017. En ce qui concerne les allégations relatives à l’utilisation prolongée de contrats à court terme pour pouvoir mettre fin à la relation de travail de dirigeants et de membres syndicaux et fragiliser les syndicats actifs, le gouvernement indique que la loi sur les syndicats prévoit des voies de recours en cas de licenciement ou de non-renouvellement de contrats à durée déterminée liés à de la discrimination antisyndicale et précise que, si les faits sont avérés, que les inspecteurs du travail ordonnent à l’employeur de réintégrer les travailleurs ou leur imposent des amendes conséquentes. Le gouvernement ajoute que, pour éviter toute interprétation erronée des dispositions légales relatives aux contrats à durée déterminée, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a procédé à des consultations avec les partenaires sociaux et d’autres parties concernées, comme le Conseil d’arbitrage, afin que tous s’accordent sur une durée maximale de quatre ans pour les contrats à durée déterminée et pour que, en cas de dépassement de cette période maximale, le contrat soit considéré comme à durée indéterminée. En date du 17 mai 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a traduit cette décision dans une Instruction sur la détermination du type du contrat de travail. Tout en prenant bonne note des informations fournies, la commission prie le gouvernement de s’assurer que toutes les mesures sont prises afin de contrôler, en consultation avec les partenaires sociaux, que les contrats à durée déterminée ne sont pas utilisés, y compris par leur non-renouvellement, à des fins antisyndicales et de continuer à fournir des informations à cet égard.
Articles 1 et 3 de la convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. Depuis de nombreuses années, plusieurs organisations de travailleurs, et en particulier la CSI – y compris dans ses observations les plus récentes – dénoncent de nombreux actes graves de discrimination antisyndicale dans le pays. La commission note que le gouvernement indique à cet égard que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle: i) a envoyé un courrier administratif à tous les employeurs et à leurs associations le 31 mai 2019 pour veiller à l’application stricte et effective des dispositions relatives à la discrimination antisyndicale; ii) a invité les représentants des employeurs de 50 entreprises à diffuser l’information sur les protections spéciales contre la discrimination antisyndicale; et iii) a rencontré les représentants de la Confédération du travail du Cambodge (CLC) à deux occasions (13 juin et 18 juillet 2019) en vue du suivi des 44 cas renvoyés devant la justice (le gouvernement fait savoir que des acquittements ont été prononcés dans 11 de ces cas et que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle collabore étroitement avec le ministère de la Justice pour examiner les cas restants). Tout en saluant les mesures adoptées pour la mise en œuvre effective des protections contre la discrimination antisyndicale, la commission observe que, outre la référence aux deux réunions avec la CLC, le gouvernement n’a transmis aucun détail supplémentaire quant aux nombreuses allégations graves de discrimination antisyndicale formulées dans les précédentes observations des organisations de travailleurs. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur le traitement des allégations de discrimination antisyndicale formulées dans les observations de la CSI en 2014, 2016 et 2019, et rappelle qu’il est nécessaire de prendre toutes les mesures pour veiller à ce que des organes indépendants, jouissant de la confiance des parties, enquêtent sur les allégations de discrimination antisyndicale et, lorsque ces allégations sont avérées, que des mesures correctives appropriées et des sanctions suffisamment dissuasives soient imposées.
De plus, dans ses précédents commentaires, la commission avait instamment prié le gouvernement de s’assurer que la législation nationale prévoyait une protection adéquate contre tous les actes de discrimination antisyndicale, comme les licenciements et autres actes préjudiciables commis contre des dirigeants et des membres syndicaux, y compris en prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives. À cet égard, elle avait noté que selon les observations de la CSI, les sanctions prévues dans la loi sur les syndicats en cas de pratiques antisyndicales par des employeurs étaient trop faibles (l’amende maximale étant de 5 millions de riel cambodgiens, soit 1 250 dollars des États-Unis) et pouvaient ne pas être suffisamment dissuasives. La commission avait alors estimé que les amendes prévues dans la loi sur les syndicats en cas de pratiques de travail déloyales pouvaient être dissuasives pour les petites et moyennes entreprises, mais ne semblaient pas l’être pour les grandes entreprises à forte productivité. Elle avait donc invité le gouvernement à évaluer, en consultation avec les partenaires sociaux, le caractère dissuasif des sanctions à introduire dans la loi sur les syndicats ou dans toute autre loi pertinente. En réponse à ces commentaires, la commission note que le gouvernement affirme que les mécanismes légaux en vigueur prévoient une protection appropriée contre la discrimination antisyndicale. Le gouvernement indique que: i) outre l’application des dispositions et des mesures correctives prévues au chapitre XV de la loi sur les syndicats en cas de discrimination antisyndicale, la loi prévoit, à son article 95, que d’autres lois pénales peuvent s’appliquer pour sanctionner de telles actions (les actes de violence et de discrimination contre des syndicats de travailleurs constituant des infractions pénales en vertu des articles 217 et 267 du Code pénal) et des peines de prison pourraient éventuellement être prononcées à l’encontre d’employeurs, par exemple si les actes sont violents; ii) outre les amendes prévues dans la loi sur les syndicats, les victimes peuvent également réclamer une indemnisation; iii) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a jamais reçu de plaintes ou de réclamations de la part de syndicalistes à propos des sanctions prévues; et iv) le gouvernement s’est engagé à renforcer davantage les capacités des inspecteurs du travail et sensibiliser les travailleurs à propos de leurs droits. Par ailleurs, la commission observe que, si de nombreuses réunions de consultation ont été organisées sur la révision et la modification de la loi sur les syndicats, le gouvernement n’indique pas si une évaluation tripartie du caractère dissuasif et efficace des protections contre la discrimination antisyndicale a été effectuée, comme l’avait recommandé la commission. De plus, la commission note que la CSI dénonce dans ses observations, en plus des cas concrets ci-dessus, un manque général d’action et l’absence de protection appropriée contre une discrimination antisyndicale endémique. La commission prie le gouvernement de fournir des informations statistiques détaillées sur l’application des différents mécanismes de protection contre la discrimination antisyndicale, y compris sur les sanctions infligées et autres réparations imposées, comme la réintégration ou l’indemnisation de travailleurs. Elle le prie également d’évaluer, à la lumière de ces données statistiques et en consultation avec les partenaires sociaux, la pertinence des mesures correctives en place et surtout le caractère dissuasif des sanctions, et de fournir des informations sur toute évolution de la situation.
Article 4. Reconnaissance des syndicats aux fins de la négociation collective. Dans sa précédente observation, prenant note de la déclaration du gouvernement selon laquelle, en abaissant le seuil pour déterminer l’organisation la plus représentative à 30 pour cent du total des travailleurs, la loi promouvait les conventions collectives, la commission avait invité le gouvernement à évaluer l’effet de la mise en œuvre de la loi sur les syndicats en fournissant des statistiques sur: a) le nombre d’organisations qualifiées de représentatives sans avoir recours à une élection, dans la mesure où elles disposent du soutien d’au moins 30 pour cent des travailleurs, ainsi que le nombre d’accords collectifs conclus par ces organisations représentatives; et b) le nombre d’élections réalisées suite à l’absence d’organisation disposant du soutien d’au moins 30 pour cent des travailleurs, de même que le nombre de conventions collectives conclues par les organisations ainsi élues. La commission note que le gouvernement fournit les informations suivantes: i) en 2018, quatre organisations ont été qualifiées de représentatives sans avoir recours à une élection, disposant du soutien d’au moins 30 pour cent des travailleurs (toutes dans le secteur de l’habillement, couvrant 3 226 travailleurs), et en 2019, 15 organisations ont ainsi été qualifiées de représentatives (11 dans le secteur de l’habillement, couvrant 11 070 travailleurs et quatre dans le secteur de l’hôtellerie, couvrant 890 travailleurs); et ii) sept conventions collectives ont été conclues en 2018 et 2019 (en 2018, quatre conventions collectives ont été conclues entre l’employeur et les délégués syndicaux et en 2019, trois conventions collectives ont été conclues entre l’employeur et un syndicat qualifié de plus représentatif). Le gouvernement indique que les informations relatives au point b) seront fournies dans son prochain rapport. La commission note également que la mission de contacts directs de mars 2017 avait recommandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, notamment en donnant des instructions aux autorités compétentes, pour veiller à ce que les organisations ou les coalitions de travailleurs satisfaisant au seuil minimum soient qualifiées de plus représentatives sans délai et en toute impartialité. À cet égard, tout en notant que le gouvernement indique qu’il a publié une Instruction sur l’octroi du statut d’organisation la plus représentative et que l’un des objectifs des amendements de la loi sur les syndicats est d’assouplir les conditions d’obtention du statut d’organisation la plus représentative, la commission observe que le nombre d’organisations disposant du soutien d’au moins 30 pour cent des travailleurs sans avoir recours à une élection ainsi que le nombre de conventions collectives conclues en 2018 et 2019 sont très bas. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur le nombre d’organisations qualifiées de plus représentatives et le nombre de conventions collectives en vigueur, en précisant les parties qui les ont conclues (surtout s’il s’agit d’un syndicat qualifié de plus représentatif, d’un conseil de négociation ou d’un délégué syndical), les secteurs concernés et le nombre de travailleurs couverts par ces conventions. Elle le prie également de fournir des informations sur toute mesure supplémentaire adoptée pour répondre aux questions soulevées par la mission de contacts directs à propos de la reconnaissance du statut d’organisation la plus représentative et pour promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de la négociation collective comme le prévoit la convention.
Articles 4, 5 et 6. Droit de négociation collective des fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’État. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, pour veiller à ce que les fonctionnaires non commis à l’administration de l’État, y compris les enseignants, qui sont régis par la loi sur le statut commun des fonctionnaires et par la loi sur l’éducation en ce qui concerne leur droit d’organisation, bénéficient des droits de négociation collective prévus par la convention. La commission note que dans sa réponse, le gouvernement indique que les fonctionnaires, y compris les enseignants, peuvent former des associations, conformément à la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales, mais ne fournit aucune information quant aux mesures pour veiller à ce que les fonctionnaires non commis à l’administration de l’État puissent exercer le droit de négociation collective. Regrettant l’absence de progrès à cet égard, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, pour veiller à ce que les fonctionnaires non commis à l’administration de l’État, y compris les enseignants, bénéficient des droits de négociation collective prévus par la convention. Elle le prie d’indiquer toute mesure adoptée ou envisagée à cet égard et rappelle qu’il peut solliciter l’assistance technique du Bureau.
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