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Rapport définitif - Rapport No. 142, 1974

Cas no 694 (Honduras) - Date de la plainte: 12-MARS -72 - Clos

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  1. 41. Saisi de ce cas à sa session de novembre 1972, le comité avait décidé d'en ajourner l'examen et avait chargé le Directeur général d'obtenir, tant des plaignants que du gouvernement, certaines informations complémentaires.
  2. 42. La plainte était contenue dans une lettre adressée au Directeur général du BIT par la Confédération mondiale du travail en date du 21 mars 1972. L'organisation plaignante a présenté des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans deux communications datées du 4 novembre 1972 et du 3 mars 1973.
  3. 43. Le gouvernement a fait connaître ses observations dans deux lettres en date du 12 mai 1972 et du 27 décembre 1973.
  4. 44. Le Honduras a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 45. Dans sa lettre en date du 21 mars 1972, la CMT allègue que le 18 février 1972, cinq paysans auraient été tués après que les forces du Corps spécial de sécurité eurent ouvert le feu sur eux, alors qu'ils travaillaient paisiblement la terre qui appartenait à la Ligue des paysans de Talanquera sur le territoire de Juticalpa, département de Olancho. Cinq autres paysans auraient été grièvement blessés. La fusillade aurait, selon les plaignants, été déclenchée sur ordre du responsable du Corps spécial de sécurité et sous pression des propriétaires fonciers.
  2. 46. Dans sa communication datée du 12 mai 1972, le gouvernement ne contestait pas que des paysans aient été tués dans la fusillade. Il précisait que six paysans et un membre des forces armées avaient trouvé la mort dans ces événements graves. De plus, le gouvernement indiquait que l'affrontement avait eu lieu après que le Corps spécial de sécurité et des membres de l'armée eurent commencé à déloger les paysans qui occupaient les terres d'une hacienda, sur ordre du chef de l'Office régional de Juticalpa de l'Institut national agraire.
  3. 47. Le gouvernement citait en outre les conclusions d'une "Commission spéciale" nommée pour enquêter sur les faits. Cette commission était composée d'un représentant de l'Institut national agraire, du président de l'Association nationale des paysans du Honduras, d'un représentant des forces armées et de deux représentants du pouvoir législatif, appartenant respectivement au Parti libéral et au Parti national. Les événements de Juticalpa auraient eu lieu dans le cadre d'une situation confuse, créée par la contestation de droits de propriété et de droits de préemption sur les terres concernées et par la lenteur des autorités judiciaires à trancher le litige.
  4. 48. Le gouvernement ajoutait dans sa réponse que les événements étaient dus à une accumulation de circonstances dont il n'était pas responsable. Les tribunaux ont été saisis de l'affaire afin de déterminer les responsabilités sous l'angle pénal.
  5. 49. A sa session de novembre 1972, le comité avait chargé le Directeur général de prier l'organisation plaignante et le gouvernement d'indiquer quelle était la nature de l'organisation dénommée "Ligue des paysans de Talanquera" et s'il s'agissait d'une organisation de type syndical, et si le titre de propriété en litige appartenait à la ligue en question ou aux paysans sous forme individuelle ou collective.
  6. 50. Dans sa lettre du 3 mars 1973, la CMT indique que c'est à la suite de l'avis favorable du responsable de l'office régional de l'Institut national agraire que les paysans ont pris possession des terres en question. Le litige opposait ces paysans et deux copropriétaires de terres contiguës qui prétendaient avoir des droits sur ces lots antérieurement occupés par des paysans de Salvador. Le problème posé consistait à déterminer si ces lots étaient publics, position défendue par les paysans, ou s'ils faisaient partie intégrante des terres voisines, opinion soutenue par les propriétaires.
  7. 51. Ces derniers, ajoute la CMT, requérirent l'intervention du Corps spécial de sécurité pour obliger les paysans à quitter les terres. Ceux-ci refusèrent d'obtempérer à l'invitation des forces de sécurité, arguant du fait que les parties étaient convenues de rechercher une entente au cours d'une rencontre prévue pour ce même jour, le 18 février 1972. Les forces de l'armée se joignirent alors aux agents du Corps spécial de sécurité et la fusillade se déclencha, provoquant la mort de sept personnes.
  8. 52. La CMT indique en outre que deux procès sont en cours, l'un intenté par les familles des victimes contre un des deux copropriétaires pour assassinat, l'autre intenté par le délégué départemental du Corps spécial de sécurité contre certains paysans pour refus d'obéissance à l'autorité.
  9. 53. Dans sa communication du 27 décembre 1973, le gouvernement déclare que l'organisation dénommée "Ligue des paysans de Talanquera" n'est pas enregistrée au Secrétariat d'Etat au Travail. De ce fait, il ignore quelle est sa nature juridique. Le gouvernement joint à sa communication un rapport établi à ce propos par la Cour suprême de justice.
  10. 54. La Cour suprême déclare dans la lettre accompagnant ce rapport que, ni dans les documents écrits, ni dans les informations orales, on n'a pu trouver un lien entre les événements survenus à Talanquera et l'exercice des libertés syndicales au Honduras. Dans son rapport, la Cour suprême confirme l'exposé des faits tel que présenté par le plaignant.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 55. Le comité se trouve devant un cas très sérieux, mais il doit examiner, en premier lieu, si les questions posées sont relatives à la violation des droits syndicaux qui peuvent être examinés dans le cadre de la procédure en vigueur.
  2. 56. En ce qui concerne l'organisation dénommée "Ligue des paysans de Talanquera", à laquelle appartiennent les paysans concernés par le cas, le gouvernement déclare qu'elle n'est pas enregistrée en tant que syndicat et qu'il ne connaît pas sa nature juridique. Le comité a toujours estimé que, pour apprécier le caractère professionnel d'une organisation, il n'est lié par aucune définition nationale en ce domaine et que, par exemple, l'absence de dépôt des statuts pouvant être imposé au syndicat par la législation ne constitue pas une raison suffisante pour déclarer une plainte non recevable, étant donné que les principes de liberté syndicale exigent justement que les travailleurs puissent, sans autorisation préalable, constituer les organisations de leur choix pour promouvoir et défendre leurs intérêts. Cependant, même si l'on devait considérer cette ligue comme un type d'organisation professionnelle propre aux paysans, il reste à établir si les faits dénoncés sont relatifs à l'exercice d'activités syndicales. A ce sujet, le comité observe, sur la base des informations disponibles, que les paysans mentionnés dans la plainte ont occupé des terres sur lesquelles ils prétendaient avoir des droits, que ces terres faisaient l'objet d'un litige porté devant la justice et qu'ils avaient reçu l'ordre de les évacuer. Devant leur refus de quitter ces terres commença une altercation qui se termina par une violente répression exercée par la police et les forces armées.
  3. 57. Tout en reconnaissant pleinement la gravité de ces faits, compte tenu en particulier du fait que les terres avaient été occupées par les paysans à la suite d'un avis favorable émis par le responsable de l'Office régional de l'Institut national agraire, le comité considère que ces questions ne concernent pas l'exercice de droits syndicaux, mais qu'il s'agit d'une question de possession et de propriété de terres régie par des normes juridiques spécifiques étrangères aux problèmes de la liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 58. En conséquence, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que ce cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
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