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Rapport définitif - Rapport No. 217, Juin 1982

Cas no 1108 (Costa Rica) - Date de la plainte: 26-JANV.-82 - Clos

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  1. 155. Dans un télégramme du 26 janvier 1982, la Fédération syndicale mondiale (FSM) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale au Costa Rica. Peu après, dans un télégramme du 3 février 1982, l'Union internationale des syndicats des travailleurs de l'agriculture, des forêts et des plantations (UISTAFP) s'est jointe à la plainte initiale de la FSM. Le gouvernement, pour sa part, a communiqué ses observations dans des lettres des 12 et 18 février 1982.
  2. 156. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1947, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 157. Dans leurs télégrammes, tant la FSM que l'UISTAFP dénoncent la répression qui aurait frappé les travailleurs en grève dans la zone de Sixaola dans les bananeraies de Chiriqui Land Co. et El Pais. Les plaignants disent s'insurger contre la violation brutale du droit de grève des travailleurs costariciens.
  2. 158. Selon eux, le travailleur Narciso Morales Valdelomar a été assassiné. Des dizaines de travailleurs ont été blessés et plus de deux cents ont été arrêtés, dont le Sous-secrétaire général de la Centrale unitaire des travailleurs, Luis Carlos Montero, et le Secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs des plantations. Ces deux dirigeants syndicaux auraient été soumis à procès.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 159. Dans sa communication du 12 février 1982, le gouvernement déclare d'abord, de façon générale, que ces allégations ne sont accompagnées d'aucun élément de preuve, qu'elles sont puériles et qu'elles ne visent qu'à porter préjudice politiquement au gouvernement et au prestige de la nation.
  2. 160. Puis le gouvernement explique les faits de la façon suivante: selon lui, aucune grève générale ou de caractère légal n'a eu lieu dans l'entreprise agricole mentionnée par les plaignants. Le syndicat Sitrachiri, affilié à la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD), avait signé huit mois auparavant, avec l'entreprise, une convention collective qui était encore en vigueur et homologuée légalement au sein du ministère du Travail. Cependant, le 11 janvier 1982, ce syndicat avait déposé un cahier de revendications afin d'obtenir une révision de la convention collective.
  3. 161. Par ailleurs, toujours selon le gouvernement, l'Union des travailleurs Limonenses Utral, affiliée à la centrale unitaire des travailleurs (CUT), d'orientation marxiste-léniniste, a déclenché, le 14 janvier 1982, pour deux jours, un blocage des centres de travail au moyen de piquets formés par des syndicalistes, dont certains étaient des travailleurs des bananeraies mais dont un grand nombre faisaient partie d'éléments étrangers à la zone empêchant les travailleurs de se rendre sur leurs lieux de travail. Face à cette situation anormale qui cherchait par des voies de fait et en marge de la légalité à obtenir la représentation des travailleurs afin de signer une nouvelle convention collective, le gouvernement a décrété l'illégalité du mouvement en usant des attributions que lui confère la loi. Il a fait ordonner, par décision judiciaire, l'envoi de la police pour garantir le libre accès des centres de travail et le droit élémentaire au travail et pour éliminer les foyers d'intimidation qui les en empêchaient par la force.
  4. 162. Les affrontements qui ont eu lieu à la suite de la résistance à l'intervention de la police ont eu pour résultat la perte accidentelle de la vie d'un travailleur. En effet, explique le gouvernement, lorsque la garde civile a tiré pour écarter un groupe qui résistait ouvertement et violemment à son action, celui-ci fut touché par ricochet par un fragment de projectile qui avait précédemment frappé une surface solide, comme le démontre l'enquête balistique effectuée par l'organe compétent à la demande du pouvoir judiciaire.
  5. 163. D'autre part, poursuit-il, tous les participants aux affrontements ont été arrêtés de même que les responsables qui ont endommagé trois mille mètres de câbles utilisés pour le transport des fruits et causé une perte de l'ordre de 10 millions de colones. Le gouvernement convient que, parmi lés personnes arrêtées, se trouvaient les dirigeants syndicaux marxistes-léninistes Luis Carlos Montero et Erminio Dover. Il explique que ces derniers sont actuellement poursuivis par le Procureur général de la République pour sédition, agression, menace et coups et blessures avec des armes à feu et que leur condition de syndicaliste ne constitue en rien une exemption d'imputabilité pénale.
  6. 164. Le gouvernement précise que les deux dirigeants de même que les autres participants à ces actes délictueux ont été remis en liberté en attendant le déroulement de la procédure pénale engagée contre eux, mais qu'ils demeurent sous les ordres des tribunaux ordinaires qui statueront sur leur cas.
  7. 165. Le gouvernement ajoute que le gros des travailleurs sont retournés normalement à leur travail dès que les centres ont été libérés des éléments subversifs et qu'il règne dans la zone de Sixaola une ambiance de tranquillité absolue, d'harmonie dans les rapports patrons-ouvriers et de travail comme l'a confirmé la déclaration publique de la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD) dont le gouvernement communique une copie en annexe à sa réponse.
  8. 166. Il joint également une coupure de presse du 21 janvier 1982 faisant état de l'expulsion de plusieurs étrangers sans permis de travail dont quatre Panaméens, dix Nicaraguayens et un Salvadorien considérés comme instigateurs des actes de violence qui s'étaient produits dans la zone de Sixaola.
  9. 167. Enfin, dans une communication complémentaire du 18 février 1982, il ajoute que la Confédération costaricienne des travailleurs démocratiques (CCTD) adresse un télégramme à l'OIT dénonçant avec véhémence l'agression dont elle a été victime de la part de la centrale unitaire des travailleurs (CUT), agression qu'elle qualifie de piraterie syndicale. Le texte du télégramme dispose en effet que: "Le problème de la grève dans la bananeraie Sitrachiri est de la Confédération des travailleurs communistes contre nous titulaires de la convention collective; il n'y a pas de violation de la liberté syndicale mais une agression contre le droit de convention collective de la part de la centrale communiste. Nous demandons de prendre note et d'intervenir contre ces actes de piraterie syndicale". Il est signé par le Secrétaire général de la CCTD, Luis Arando Gutierrez Rodriguez.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 168. Le comité note que la présente affaire concerne la mort violente d'un travailleur et de nombreuses arrestations au cours d'un conflit du travail dans la zone de Sixaola dans les bananeraies de Chiriqui Land et compagnie.
  2. 169. Le comité note également que le gouvernement, sans nier les faits, apporte des précisions sur la manière dont, selon lui, ils se sont déroulés. Il apparaît, d'une part, qu'il s'est agi de rivalité intersyndicale et que le syndicat le plus représentatif, la CCTD, n'était pas d'accord pour déclencher un arrêt de travail et, d'autre part, que les forces de l'ordre sont intervenues et qu'au cours des affrontements violents qui ont suivi un travailleur a été tué.
  3. 170. Le comité note qu'au dire même du gouvernement la garde civile a tiré pour disperser les manifestants et il déplore profondément la mort du travailleur Narciso Morales Valdelomar qui, selon le gouvernement, serait accidentelle, comme le démontre l'enquête balistique ordonnée par la justice. Il prie le gouvernement d'adopter des mesures pour que de tels faits ne se renouvellent pas.
  4. 171. En ce qui concerne les arrestations de deux dirigeants syndicaux et de nombreux participants aux troubles qui ont lieu dans la zone en question, le comité note que les intéressés sont actuellement en liberté et que certains d'entre eux vent être jugés pour des infractions de droit commun.
  5. 172. Enfin, le comité note qu'au dire tant du gouvernement que de la CCTD il règne désormais dans cette zone une ambiance de tranquillité absolue. Les plaignants, par contre, auxquels a été offerte la possibilité de fournir des informations complémentaires à l'appui de leur plainte n'ont pas usé de leur droits.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 173. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver les conclusions suivantes:
    • a) Le comité déplore profondément la mort du travailleur Narciso Morales Valdelomar survenue alors que la garde civile a tiré pour disperser les manifestants mais qui, selon le gouvernement, serait accidentelle, comme le démontre l'enquête balistique ordonnée par la justice. A cet égard, le comité prie le gouvernement d'adopter des mesures pour que de tels faits ne se renouvellent, pas.
    • b) Le comité note que les dirigeants syndicaux et les nombreux participants aux troubles arrêtés ont été libérés et que certains d'entre eux vont être jugés pour infractions de droit commun.
    • c) Enfin, en ce qui concerne le conflit du travail qui avait éclaté dans les bananeraies de Chiriqui Land, le comité note que, selon le syndicat le plus représentatif, la CCTD, une ambiance de tranquillité absolue règne dans la zone de Sixaola. Le comité note également que les organisations plaignantes n'ont pas fourni d'informations complémentaires à l'appui de leurs plaintes comme elles y avaient été invitées. Dans ces conditions, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
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