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S’affranchir de la pauvreté par le travail au Timor-Leste

La longue marche du Timor-Leste vers l’indépendance a affaibli de larges secteurs de l’économie et des infrastructures. Malgré une croissance récente rapide, alimentée par le pétrole, la pauvreté reste un phénomène aigu puisque la moitié de la population vit avec moins d’un dollar par jour.

GENÈVE (OIT Info) – La longue marche du Timor-Leste vers l’indépendance a affaibli de larges secteurs de l’économie et des infrastructures. Malgré une croissance récente rapide, alimentée par le pétrole, la pauvreté reste un phénomène aigu puisque la moitié de la population vit avec moins d’un dollar par jour.

La plupart des pauvres sont employés dans l’agriculture de subsistance à faible productivité. C’est pour cela que les experts de l’OIT ont immédiatement mis l’accent sur les systèmes de développement du marché quand l’Organisation a été appelée à l’aide. «Cette approche accroît les rendements pour les producteurs ruraux indépendants qui travaillent dur sans pouvoir sortir de la pauvreté», a déclaré Roberto Pes, chef de mission de l’OIT au Timor-Leste.

De 2011 à 2015, le projet de l’OIT de services et de soutien aux entreprises (BOSS) a aidé les communautés locales à améliorer les pratiques agricoles, à développer l’accès au marché, à créer des emplois et de petites et moyennes entreprises. Financé conjointement par Irish Aid et la Coopération néo-zélandaise, le projet a promu le développement économique en faveur des pauvres et les emplois de qualité pour les femmes et les hommes, tout en contribuant indirectement à la consolidation de la paix et à la prévention des conflits.

Faire la guerre, c’était facile. Mais donner à manger aux gens, leur donner du travail, un logement, leur fournir de l’eau potable, leur rendre la vie meilleure, c’est la partie la plus difficile.”

Taur Matan Ruak, président du Timor-Leste
Le projet BOSS est intégré à l’Institut d’aide au développement des entreprises au Timor-Leste (IADE), une branche du secrétariat d’Etat pour l’Appui et la promotion du secteur privé. Le projet s’est employé à renforcer les capacités de l’IADE pour qu’il fournisse des services efficaces en matière de création d’entreprise au secteur privé naissant.

Avec l’assistance technique de BOSS, l’IADE propose dorénavant le programme «Gérez mieux votre entreprise» (GERME) aux entrepreneurs et aux futurs chefs d’entreprise. Plus de 5000 entrepreneurs ont été formés jusqu’à présent.

En plus de la formation, l’IADE met maintenant en relation acheteurs et fournisseurs, offre des conseils et des informations aux entreprises, un soutien marketing et des études de marché. Il organise des foires commerciales et, en 2015, l’IADE a initié le premier salon international de la construction dans la capitale du Timor-Leste, Dili. Des exposants venus d’Australie, du Portugal, d’Indonésie et de Chine y ont participé.

Le projet BOSS travaille aussi directement avec des partenaires du secteur privé dans les domaines de l’horticulture, de la viande et du tourisme, comme le montrent les trois exemples suivants.

Récolter plus que des légumes

Niché au cœur des montagnes vallonnées à 1500 mètres d’altitude, Maubisse est l’endroit idéal pour la production de légumes. Ce petit sous-district du sud-ouest du Timor- Leste jouit d’un climat frais, d’une forte pluviosité et de sols fertiles.

Alors que les premiers rayons du soleil éclaboussent les terres luxuriantes, Maria de Jesus Mendoca et sa famille entament leur travail aux champs: ils arrosent, désherbent et sèment. Depuis des générations, faire pousser des légumes a constitué le moyen de gagner leur vie dans cette région d’environ 22000 habitants, et aujourd’hui ils en tirent un revenu stable. Comme le dit l’un des paysans de la région: «Nous n’avons plus à partir pour gagner notre vie. L’argent vient à nous!».

Maubisse au Timor-Leste est l’endroit idéal pour la production de légumes. Le projet de l’OIT de services et de soutien aux entreprises (BOSS) a aidé les communautés locales à améliorer les pratiques agricoles.
Il y a deux ans à peine, les agriculteurs étaient confrontés à une conjoncture difficile quand ils essayaient de vendre leurs légumes. «Avant, nous cultivions beaucoup de légumes que nous ne pouvions pas vendre sur le marché», a expliqué Maria de Jesus Mendoca, 47 ans. «Quand personne ne les achetait, nous devions les rapporter à la maison.» Avec quatre jeunes enfants à élever, Mme Mendoca avait du mal à joindre les deux bouts. D’autres cultivateurs étaient dans la même situation.
Malgré des générations d’expérience dans l’agriculture, les paysans de Maubisse étaient entravés par un accès limité au marché, un manque de fournitures agricoles et des pratiques dépassées.

Les choses ont commencé à changer en mai 2012 quand une société horticole locale, appelée Josephina Farm, a conclu un partenariat avec les paysans. La société a fourni des semences potagères aux agriculteurs, leur a appris de nouvelles techniques de culture et leur a montré comment cultiver des légumes bio et faire du compost biologique. Quand est venue la saison des récoltes, elle a aidé les agriculteurs à récolter, les a payés au comptant et a transporté les légumes pour les vendre dans des supermarchés de Dili, la capitale.

«La situation s’est améliorée à présent», raconte Mme Mendoca. «Nous cultivons des légumes et Josephina les achète directement sur place. Nous pouvons maintenant subvenir aux besoins de nos familles.» Orlando, son mari, approuve: «Nous sommes heureux de pouvoir mener une vie décente, nous et nos familles.»

Actuellement, la famille Mendoca cultive un terrain de 4 hectares et produit une grande variété de légumes: haricots verts, concombres, courgettes, brocolis, roquette, laitue, aubergines, radis, carottes, tomates, chou rouge, persil et coriandre. Leur revenu a augmenté et s’est stabilisé. Avant le partenariat avec Josephina, les cultivateurs comme eux gagnaient 100 dollars par an, maintenant ils peuvent gagner beaucoup plus.

Le directeur de Josephina Farm, Guido Ximenes Sequeira, explique que les changements apportés aux paysans par le projet sont à la fois concrets et pratiques. «Ils sont pleins d’enthousiasme pour travailler ensemble», dit-il. «Vous pouvez constater des progrès en matière de logement et d’éducation: maintenant, ils envoient leurs enfants à l’école et certains vont même à l’université.»

Se lancer dans les affaires à 60 ans

L’âge n’est pas un obstacle pour lancer une nouvelle entreprise innovante. A 60 ans, Jaime Lemos C. Moris a créé et ouvert une entreprise de poulet kampong dans la région de Lautem, au Timor-Leste.

L’inspiration lui est venue en voyant les villageoises partir très loin de chez elles pour vendre leurs poulets sur le marché. «Quand elles m’ont dit que chaque ménage du village élevait des poulets, cela m’a donné l’idée de les aider à les vendre», explique ce père de huit enfants qui s’est lancé dans les affaires en 2014.

J’emploie des jeunes qui ont quitté l’école en vue de leur offrir davantage de perspectives d’emploi.”

Quand il a cherché des moyens pour créer son entreprise et trouver des capitaux, Jaime Lemos est tombé sur une annonce concernant le Concours du plan d’affaires le plus innovant 2014 lancé par l’IADE. Il s’est immédiatement inscrit comme participant.

Même s’il n’a pas remporté le concours, son idée d’entreprise a été sélectionnée parmi les dix meilleures, ce qui lui a donné droit à une assistance commerciale complète, comprenant conseils, formation, promotion commerciale et aide au financement. Cette dernière a été utilisée comme capital de départ pour créer son entreprise à domicile et se procurer les équipements nécessaires, y compris un congélateur.

L’entrepreneur emploie maintenant quatre personnes. «J’emploie des jeunes qui ont quitté l’école en vue de leur offrir davantage de perspectives d’emploi. J’ai commandé une machine pour nettoyer les poulets afin d’accélérer le processus de production, ce qui me permettra de produire davantage et d’embaucher encore plus d’employés.»

Il espère maintenant développer son affaire pour produire de l’alimentation pour poulets. «Les aliments pour poulets sont chers et parfois difficiles à trouver. Ce serait beaucoup plus pratique et rentable si les villageois pouvaient tout simplement acheter l’alimentation pour leurs poulets et vendre leur volaille au même endroit», a-t-il conclu.

Faire du Timor-Leste un nouveau pôle touristique

Atauro est une petite île à proximité de Dili, la capitale du Timor-Leste. Elle est située dans le triangle de corail connu pour la richesse et l’abondance de sa vie marine.

Son principal attrait est son milieu naturel sauvage. Avec ses montagnes majestueuses et son long littoral comme ceux que l’on trouve à Atauro, le Timor-Leste est l’une des nouvelles destinations touristiques en Asie du Sud-Est. Avec une population de 8000 personnes, l’île est facile d’accès depuis Dili par ferry, bateau-taxi et avion charter.

Atauro, c’est l’île d’Avelino Pereira Fernandes, un entrepreneur de 30 ans qui préside l’Association des groupes touristiques (TGA). L’association s’emploie à promouvoir le tourisme à Atauro, à améliorer la coordination et à développer des partenariats entre les entreprises.

Promouvoir une nouvelle destination touristique: l’environnement naturel préservé est l’un des atouts majeurs d’Atauro.
«Je préside cette association depuis deux ans. Nous espérons réunir différentes entreprises pour qu’elles se soutiennent les unes les autres et contribuent à l’essor de l’industrie touristique à Atauro. Nous souhaitons impliquer directement les communautés locales afin qu’elles bénéficient du tourisme», a déclaré Avelino Pereira.

L’association a été fondée en 2005. Toutefois, en raison du manque de coordination et d’engagement, elle n’a pas très bien fonctionné. Grâce au soutien du projet OIT-BOSS, l’association a trouvé un nouvel élan en 2013, avec la désignation d’Avelino Pereira à la présidence.

A ce jour, 20 entreprises touristiques, qu’il s’agisse d’artisanat, de restaurants, de chambres d’hôtes et bien d’autres, se sont inscrites comme membres. En collaboration, la TGA a identifié les attractions touristiques d’Atauro qui peuvent encore être développées, telles que la plongée, le camping et le trekking.

En outre, la TGA a dispensé une formation à ses membres sur l’hospitalité, la cuisine et la gestion commerciale. Des brochures et un site Web ont été créés pour promouvoir Atauro comme une destination touristique attrayante.

Par Gitta Lingga et Hans von Rohland