Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Danemark
présentée par
l'Organisation des infirmières danoises (DNO)
Allégations: prorogation législative de conventions collectives
et ingérence législative dans une grève
du secteur hospitalier
369. L'Organisation des infirmières danoises (DNO) a soumis une plainte contre le gouvernement du Danemark pour violations des droits syndicaux par communications datées des 10 mai et 17 juin 1996, ainsi que du 3 février 1997.
370. Le gouvernement a fait parvenir ses observations sur ce cas par communication datée du 6 septembre 1996.
371. Le Danemark a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
372. Dans sa communication du 10 mai 1996, l'Organisation des infirmières danoises (DNO) indique que sa plainte a trait à un projet de loi gouvernemental du 23 mai 1995 portant "prorogation et renouvellement des contrats de travail et des conventions collectives applicables aux infirmières, aux assistants de radiologie, aux infirmières de pédiatrie, aux infirmières de secteur, aux assistants de laboratoires hospitaliers, etc.", adopté par le Parlement du Danemark le 24 mai 1995 (loi no 330/1995) (le texte de cette loi fait l'objet de l'annexe I). Selon l'organisation plaignante, la loi, qui a été proposée et adoptée sans sa consultation préalable avec la DNO, prévoyait que toutes les conventions collectives conclues entre les employeurs compétents du secteur public (c'est-à-dire l'Association des conseils de comté du Danemark, l'Association nationale des autorités locales, la municipalité de Copenhague, la municipalité de Frederiksberg, la Direction des hôpitaux de Copenhague et le ministère des Finances), d'une part, et la DNO, d'autre part, devaient être renouvelées ou prorogées jusqu'au 31 mars 1997 selon les mêmes conditions et modalités que pour les conventions collectives déjà conclues dans d'autres branches du secteur public danois.
373. Cette loi prévoyait en outre la création d'une commission composée de représentants des parties aux conventions collectives applicables aux infirmières et chargée d'étudier les questions de salaires et de conditions de travail sur lesquelles les parties n'auraient pu parvenir à un accord lors de leurs précédentes négociations. Cette commission devait avoir terminé ses travaux au 1er octobre 1995 et ne pouvait formuler que des propositions contenues dans un cadre économique extrêmement restreint. A ce stade, les parties aux conventions collectives disposaient de 30 jours pour négocier d'éventuels amendements aux conventions collectives déjà renouvelées ou prorogées, en se basant sur les propositions de la commission. Toute question non réglée après ce cycle ultime de négociations devait être soumise à l'arbitrage obligatoire de l'ex-président indépendant de la commission. La sentence de cet arbitre a été rendue le 10 novembre 1995.
374. La loi en question a été proposée et adoptée pour mettre un terme à une grève légale de la DNO touchant un petit nombre de services bien circonscrits de certains hôpitaux publics et d'un petit nombre d'établissements de soins de santé primaires. Des accords garantissant le maintien 24 heures sur 24 des services d'urgence et des services vitaux avaient été négociés avec les employeurs et étaient appliqués dans tous les secteurs touchés par la grève.
375. Les hôpitaux publics du Danemark emploient environ 25 000 infirmiers et infirmières dans des postes couverts par des conventions collectives. Sur ce nombre, 2 175 seulement ont été touchés par la grève décidée par la DNO et devenue effective le 1er mai 1995. En réponse, l'hôpital de Copenhague a mis à pied 570 infirmières, et l'Association des conseils de comté a notifié de leur mise à pied environ 4 500 infirmières avant d'annuler cette décision pour environ un millier d'entre elles. Ainsi, au moment de l'intervention, l'action revendicative sur le terrain dans les hôpitaux se traduisait par 2 175 infirmières en grève et à peu près 4 000 infirmières mises à pied.
376. Environ 11 000 infirmières sont régies par des conventions collectives dans le secteur des soins de santé primaires. La grève ne touchait en fait que 1 300 de ces infirmières. Mais, l'Association nationale des autorités locales, la municipalité de Copenhague et la municipalité de Frederiksberg ont néanmoins notifié quelque 6 500 infirmières de leur mise à pied, à partir du 1er juin 1995. La loi a finalement mis un terme à toutes les actions à partir du 27 mai 1995.
377. Tout d'abord, la DNO considère que la loi no 330/1995 constitue une atteinte au droit de libre négociation collective des infirmières, tel qu'il ressort de la convention no 98. Cette loi a imposé aux infirmières le renouvellement ou la prorogation de leurs conventions collectives pour une durée de deux ans, selon des conditions et modalités qui, bien qu'acceptées par d'autres syndicats, avaient été rejetées nettement et à plusieurs reprises par la DNO, comme le gouvernement le savait pertinemment. Pour la DNO, cette loi, en imposant la formule consistant à charger une commission de faire une étude et d'examiner des propositions sur les problèmes spécifiques à la profession d'infirmière, puis à organiser subséquemment des négociations se concluant éventuellement par un arbitrage obligatoire sur ces mêmes questions, introduit un système ayant peu de ressemblance avec la négociation collective volontaire.
378. En second lieu, la DNO considère que l'adoption de cette loi constitue une violation du droit de grève des infirmières. La DNO reconnaît assurément que des limitations peuvent être imposées à ce droit dans certains établissements ou services essentiels tels que celui des soins de santé. Toutefois, à l'époque où il a été mis fin à la grève par intervention législative, cette grève ne durait que depuis moins d'un mois et n'avait aucunement engendré une situation mettant en péril la santé, la sécurité ou la vie d'une partie ou de l'ensemble de la population. Cette intervention du législateur était plutôt inspirée par la perspective des perturbations qui ne manqueraient pas de résulter de la mise à pied, de plus grande ampleur, décidée par l'Association nationale des autorités locales pour le 1er juin 1995 dans le secteur des soins de santé primaires. Compte tenu du lien étroit entre les employeurs du secteur public et le gouvernement, la DNO demande si ce type d'action de la part d'employeurs du secteur public peut véritablement justifier l'intervention d'un gouvernement sur le droit, pour les travailleurs, de mener une grève légalement décidée.
379. Dans sa communication du 17 juin 1996, la DNO indique qu'elle compte 66 600 membres et couvre plus de 95 pour cent de toutes les infirmières en activité dans le pays. La DNO explique que, depuis 1969, son droit de négocier collectivement au nom de ses membres s'appuie sur son droit de déclencher la grève pour appuyer ses revendications.
380. La DNO, se prévalant de cette nouvelle situation juridique, a négocié des conventions collectives avec les employeurs du secteur public aux niveaux de l'Etat, de la région et de la commune. Le niveau du salaire de base des différentes catégories de salariés du secteur public a toutefois été fixé de facto par une commission désignée par le gouvernement et ne pouvait être sensiblement modifié. Pour les infirmières diplômées, ce niveau correspondait à celui d'un ouvrier qualifié employé dans le secteur public.
381. Outre ces conventions sur les salaires et les conditions de travail, la DNO a conclu des conventions-cadres ("hovedaftaler") avec les employeurs, conformément à une pratique courante sur le marché du travail danois. Ce genre de convention réglemente, entre autres choses, le droit de grève ou de tout autre type d'action directe.
382. La convention-cadre conclue entre l'Association des conseils de comté du Danemark, la Direction des hôpitaux de Copenhague et ce qui était alors le ministère des Salaires et Pensions publiques, d'une part, et, d'autre part, l'Organisation des infirmières danoises et l'Organisation des infirmières municipales de Copenhague au nom des infirmières salariées et des infirmières payées à l'heure, le 17 septembre 1971, comporte les dispositions suivantes:
Article 5. Les parties se reconnaissent mutuellement le droit d'annoncer un arrêt de travail et de procéder à un tel arrêt de travail dans le respect des règles ci-après.
Clause 5. L'arrêt de travail ne peut associer des membres auxquels les parties sont convenues, par voie d'accord, de ne pas reconnaître le droit d'annoncer un arrêt de travail et d'y procéder.
Clause 6. Est considéré comme arrêt de travail, la grève, le lock-out, le blocage ou le boycott.
383. L'article 5, clause 5, est en outre limité par le protocole suivant: Les parties sont convenues que, le cas échéant, un accord doit être conclu afin d'assurer le maintien des effectifs minimums indispensables pour la sécurité dans tous les secteurs affectés par un arrêt de travail.
384. La DNO décrit des situations antérieures dans lesquelles, bien qu'il ait été fait usage de la grève et du lock-out, les parties sont parvenues à un accord.
385. La DNO affirme que les négociations de 1995 avaient pour origine un mécontentement croissant de ses membres quant à leurs salaires et à leurs conditions de travail. La DNO faisait valoir depuis très longtemps et dans des termes très explicites cette revendication majeure auprès des employeurs du secteur public, aussi bien par les voies officielles qu'à travers un vaste débat public basé sur une campagne publique intense entreprise à l'automne 1994.
386. En février et mars 1995, la DNO avait annoncé pour les 1er avril et 1er mai 1995 des arrêts de travail aux niveaux provincial et local, associant au total 3 450 infirmières et 25 manipulateurs de radiologie.
387. Peu après les préavis donnés par la DNO, des négociations ont été ouvertes avec les employeurs concernés, et des accords ont été conclus pour assurer le maintien des effectifs nécessaires pour les services d'urgence et les services vitaux dans tous les secteurs devant être touchés par les grèves.
388. En mars 1995, l'Association des conseils aux niveaux régional, local et national a donné un préavis de lock-out pour le 1er mai 1995 touchant 4 500 infirmières, dans 60 hôpitaux et 285 services au total. Le lock-out a touché essentiellement les services chirurgicaux, les services d'anesthésie et les cliniques de soins ambulatoires.
389. Les négociations qui ont ensuite eu lieu pour le maintien des effectifs d'urgence ont révélé qu'en réalité la dotation ordinaire en effectifs d'un certain nombre de ces services et de ces cliniques ne dépassait pas ce que l'on peut considérer comme la norme minimale de sécurité. C'est ainsi que l'Association des conseils de comté du Danemark a dû, à ce stade précoce, retirer son préavis de lock-out en ce qui concerne un certain nombre de services en sous-effectifs.
390. Le 27 avril 1995, l'Association nationale des autorités locales a donné un préavis de lock-out massif pour le 1er juin 1995, mesure qui devait toucher toutes les infirmières ordinaires se consacrant aux soins de santé dans 246 municipalités non touchées par le préavis de grève de la DNO.
391. Avant ce préavis de lock-out, l'Association nationale des autorités locales avait décidé d'appliquer le principe selon lequel aucune municipalité ne pourrait être exceptée du lock-out. Cette décision rendait difficile les négociations sur les accords portant sur les services d'urgence. Malgré cette politique de la part des employeurs, au total 18 services à fonctionnement mixte et services de soins à domicile, 68 maisons de santé et deux réseaux d'inspecteurs sanitaires ont finalement été exceptés des 243 municipalités concernées, pour lesquelles des accords ont été conclus avant le 24 mai 1995.
392. La municipalité de Copenhague a lancé un préavis de lock-out devant prendre effet au 1er juin 1995 en ce qui concerne les infirmières d'établissement en service de jour comme en service de nuit dans tous les centres sociaux non concernés par le préavis de grève de la DNO. Ce préavis de lock-out s'est ensuite étendu à toutes les infirmières à domicile ainsi qu'à toutes les infirmières attachées aux maisons de santé ou aux logements médicalisés de Copenhague. La municipalité de Frederiksberg a elle aussi lancé un préavis de lock-out pour le 1er juin 1995 en ce qui concerne toutes les infirmières d'établissement, toutes les infirmières à domicile et les infirmières de trois maisons de santé de la commune.
393. Enfin, la Direction des hôpitaux de Copenhague a lancé un préavis de lock-out pour le 1er juin 1995 en ce qui concerne toutes les infirmières employées dans les services liés aux services touchés par la grève.
394. Le médiateur public ayant réussi à geler le conflit pendant un mois au total, les grèves et les lock-out qui avaient été annoncés pour le 1er avril 1995 et le 1er mai 1995 n'ont pris effet qu'à la dernière de ces deux dates.
395. Selon l'organisation plaignante, les services d'urgence incombant aux services touchés par la grève de la DNO ont fonctionné sans problèmes majeurs, conformément aux accords généraux et locaux. Par contre, le lock-out décidé par l'Association des conseils de comté du Danemark s'est révélé très rapidement excessif et, dès le deuxième jour du conflit, des pourparlers tendant à son atténuation ont été engagés avec pour effet que 59 des services et cliniques visés par le lock-out et d'autres services et cliniques, employant au total 1 022 infirmières, ont été exceptés de cette mesure de lock-out et remis en marche totalement.
396. Dans les considérations liminaires accompagnant le projet qui devait devenir la loi no 330, il est seulement indiqué que le conflit impliquait 7 000 infirmières, qu'il a duré plus de trois semaines sans aucun signe de rapprochement des partenaires et que, s'il se poursuivait, le gouvernement craignait pour la santé et la sécurité de la population. Ces remarques font en outre allusion à des listes d'attente croissantes dans les hôpitaux.
397. Enfin, comme raison dirimante de la nécessité d'une intervention immédiate, le gouvernement évoque une escalade planifiée du conflit à partir du 1er juin "lorsque les infirmières à domicile des municipalités non encore touchées par le conflit devaient s'y associer". Le gouvernement exprimait sa crainte que cette évolution n'ait des conséquences graves pour de nombreuses personnes âgées ou malades, malgré les dispositions d'urgence éventuelles. Il n'est nullement mentionné que cette escalade était uniquement imputable au lock-out décidé par les employeurs du secteur public.
398. L'organisation plaignante souligne que les inquiétudes exprimées par le gouvernement étaient nullement fondées et que son action sur le plan législatif n'avait en conséquence qu'un caractère purement préventif.
399. Le gouvernement n'a fait aucune tentative pour que les partenaires reprennent les négociations ni pour essayer d'inciter les employeurs à une attitude plus responsable.
400. En résumé, selon la DNO, l'adoption de cette loi était inutile ou, tout au moins, prématurée, que le gouvernement n'a rien fait pour explorer d'autres solutions, à travers des consultations avec elle-même ou autrement, et qu'il a témoigné, directement aussi bien qu'indirectement, d'un préjugé certain pour une solution du conflit en faveur des employeurs, comme en atteste le contenu de la loi.
401. La loi instituait une prorogation ou un renouvellement obligatoire, selon les mêmes conditions et modalités qu'antérieurement, des conventions collectives conclues entre les collectifs de négociation des organisations de salariés du secteur public, d'une part, et les employeurs de ce secteur et leurs négociateurs, d'autre part, dans chacun des secteurs où des infirmières sont employées, bien que la DNO ait expressément rejeté cette issue en février et mars 1995.
402. A son article 3, clause 5, la loi ménage la possibilité de nouvelles augmentations salariales. De telles augmentations sont toutefois limitées à 1,12 pour cent pour les infirmières au bénéfice de conventions conclues avec le ministère des Finances, les autorités régionales ou les autorités locales. Dans les hôpitaux dirigés par la Direction des hôpitaux de Copenhague, cette limite a été fixée à 1,29 pour cent. Ces pourcentages coïncident exactement avec les augmentations de salaire que les collectifs de négociation avaient chargé chacun de leurs syndicats de faire accepter à leurs membres. La loi prévoit que toute augmentation de salaire au-delà de ce plafond devra être financée par les infirmières elles-mêmes, à travers une amélioration de l'efficacité, des rationalisations, etc.
403. Ces limitations restaient inchangées dans le cadre du cycle suivant de négociations, prévu pour octobre 1995, et de la sentence devant être rendue par l'arbitre pour les questions non résolues.
404. Ainsi, en résumé, la loi a eu pour effet, sur le plan économique, d'empêcher juridiquement la DNO d'obtenir une augmentation de salaire supérieure au chiffre résultant de l'arrangement accepté par les catégories n'ayant pas mené d'action revendicative. Cette limite ne pouvait être dépassée, même si l'employeur y consentait.
405. En outre, en soumettant à l'arbitrage obligatoire toutes les questions pendantes, la loi empêchait les partenaires de faire des concessions mutuelles, du fait que l'un et l'autre préféraient s'en remettre à l'arbitre. Selon l'organisation plaignante, cette loi a conféré aux employeurs du secteur public le droit d'obtenir tout ce qu'ils voulaient, pourvu que le prix payé soit jugé équitable par l'arbitre.
406. L'arbitre a rendu sa sentence le 10 novembre 1995. Dans sa brève remarque liminaire, l'arbitre souligne qu'en prenant sa décision elle a attaché une importance particulière aux possibilités d'introduire plus de souplesse dans l'utilisation des ressources et de mieux utiliser celles-ci, en envisageant notamment d'augmenter éventuellement le nombre d'heures de présence sur le lieu de travail pour les infirmières. Elle souligne expressément qu'il n'est pas de sa compétence de prendre une décision en ce qui concerne le niveau général des salaires des infirmières.
407. En conclusion, l'organisation plaignante déclare que le gouvernement a porté atteinte à son droit de libre négociation collective par le fait qu'il est l'auteur et le promoteur du projet qui a été adopté en l'espèce de la loi no 330/1995, violant ainsi les conventions nos 87 et 98.
408. Enfin, l'organisation plaignante estime que l'adoption de cette loi a constitué une violation du droit de grève des infirmières. Cette intervention juridique est survenue à un moment où il n'existait pas de raison dirimante de mettre un terme à un conflit du travail. La raison invoquée pour cette intervention est en partie fictive et en partie le résultat de manœuvres évidentes, de la part des employeurs, avec qui le gouvernement a des liens étroits à tous les niveaux.
409. Dans sa communication du 3 février 1997, l'organisation plaignante soumet un certain nombre d'observations sur les informations fournies dans la réponse du gouvernement qui insistent sur l'argumentation développée dans la plainte initiale.
B. Réponse du gouvernement
410. Dans sa communication datée du 6 septembre 1996, le gouvernement du Danemark convient que le Parlement danois a adopté le 24 mai 1995 une loi tendant à mettre un terme à une grève légale qui durait depuis vingt-trois jours et qui opposait, d'une part, l'Organisation des infirmières danoises et, d'autre part, l'Association des autorités locales, l'Association des conseils de comté du Danemark, le ministère des Finances, la municipalité de Copenhague, la municipalité de Frederiksberg et la Direction des hôpitaux de Copenhague.
411. Selon le gouvernement, cette situation était si grave que le gouvernement a considéré qu'une prolongation du conflit mettrait en péril la santé de la population. Il ne se dessinait aucun signe de solution au conflit, et les positions de chacune des parties étaient très divergentes. Sans préjudice des accords conclus entre les parties en ce qui concerne les services d'urgence, les listes d'attente ont accusé un allongement marqué au cours de cette période. Selon les estimations du ministère de la Santé, le conflit avait entraîné l'annulation de plus de 18 000 opérations. Un nouvel allongement des listes d'attente aurait eu des conséquences graves sur la situation sanitaire de la population. En outre, de nombreux patients étaient en attente d'un examen préliminaire ne relevant pas des services d'urgence, et tout nouveau report dans ce domaine aurait eu pour conséquence que des maladies non bénignes seraient restées sans traitement pendant un délai inacceptable.
412. A cela s'ajoute que le conflit devait s'étendre à partir du 1er juin, du fait que des municipalités, en leur qualité d'employeurs, avaient donné un préavis de lock-out concernant les infirmières de secteur à compter de cette date. Sans préjudice de la mise en place éventuelle d'un service d'urgence, le lock-out aurait eu de graves conséquences pour de nombreuses personnes malades ou âgées.
413. Le gouvernement déclare que, s'il est acquis que le Parlement aurait préféré que les parties résolvent le conflit elles-mêmes, celles-ci ont mené de longues négociations avant que le conflit n'éclate, en février 1995, négociations qui ont été reprises dans le cadre du service de conciliation du Danemark. Le médiateur public a obtenu, sans résultats, un report des actions revendicatives dont le préavis avait été donné deux fois. Au cours du conflit, aucun signe n'a indiqué un quelconque rapprochement entre les parties.
414. Le gouvernement déclare, en outre, que l'organisation plaignante a été reçue par la commission parlementaire compétente pour l'élaboration de la loi et a eu la possibilité d'exprimer son avis.
415. S'agissant de l'affirmation des plaignants selon laquelle il existerait une connivence entre les employeurs du secteur public et le gouvernement, ce dernier déclare que, en raison de sa nature même, le secteur hospitalier fait partie intégrante du secteur public. Les catégories les plus nombreuses de salariés du secteur hospitalier sont toutefois celles qui sont employées par les secteurs municipaux et régionaux, sans rapport avec le gouvernement. S'agissant de l'allégation des plaignants selon laquelle leur droit de grève a été violé, le gouvernement déclare que, dans un cas tel que le présent cas, où la santé et la sécurité de la population sont en jeu, il est fondé à intervenir dans un conflit dans la mesure où les personnels en cause bénéficient d'une protection appropriée en compensation des restrictions dont leur droit de négocier fait l'objet.
416. La loi du 24 mai 1995 proroge la durée d'application des conventions en vigueur jusqu'au 31 mars 1997, date départ du prochain cycle de négociation collective axé sur le renouvellement des conventions collectives dans le secteur public. En conséquence, l'action directe qui était menée ou dont le préavis avait été donné devenait caduque. En outre, une commission a été constituée, composée de représentants des parties avec à leur tête un président désigné par eux.
417. Cette commission était chargée d'étudier et de discuter les conditions de salaire des infirmières, leurs attributions, la répartition des tâches, l'utilisation des ressources, etc., et de donner aux parties la possibilité -- sans aucune intervention de la part du Parlement ou de toute autre instance -- de négocier et de présenter des propositions relatives à la répartition de la masse salariale, laquelle avait été majorée d'un montant correspondant à l'augmentation de la masse salariale négociée dans d'autres domaines du secteur public.
418. La commission pouvait en outre faire des propositions entraînant des suppléments de coûts, sous réserve que ceux-ci puissent être financés par des mesures de promotion-efficacité, de nouvelles formes d'organisation du travail, etc. Elle devait avoir achevé ses travaux au plus tard le 1er octobre 1995.
419. Sur la base de ces propositions, les parties à la convention collective devaient engager des négociations sur l'évolution possible des salaires et des conditions de travail. Ces négociations devaient être achevées le 1er novembre 1995 au plus tard. A défaut d'un accord entre les parties sur ces propositions, le président de la commission devait agir comme arbitre et rendre une décision qui serait contraignante pour les deux parties.
420. La loi a eu pour conséquence de mettre un terme au conflit. Mise à part la question relative à la masse salariale, les parties étaient libres de conclure des accords au terme de leurs négociations. Malheureusement, leurs positions étaient trop divergentes et aucune ne semblait prête à faire des concessions. L'arbitre a donc dû rendre une sentence, datée du 10 novembre 1995.
421. En conclusion, le gouvernement est d'avis que le Parlement n'avait d'autre choix que d'agir dans l'intérêt de la situation sanitaire de la population danoise. Cette situation était grave -- 18 000 opérations reportées, soit 6 000 par semaine -- et un grand nombre d'examens préliminaires annulés. Elle constituait le risque maximum que le Parlement pouvait accepter. Tout nouvel allongement des listes d'attente aurait pu avoir des conséquences très graves. Des services d'urgence avaient certes été mis en place, mais ils ne compensaient pas les annulations d'opérations et d'examens préliminaires.
422. La loi a été fondée, dans la plus large mesure possible, sur les conventions existantes. En outre, les parties ont eu la possibilité d'étudier les conditions des infirmières dans une instance impartiale constituée exclusivement par elles-mêmes, avec à leur tête un président désigné à l'unanimité, et elles ont eu, en outre, la possibilité de mener des négociations appropriées dans le cadre de cette loi. Cette loi donnait aux parties la possibilité de discuter et de négocier sur toute question jugée pertinente et, à défaut d'un accord entre elles, le président devait rendre une sentence contraignante pour les deux. Le gouvernement estime donc qu'il a satisfait aux conditions applicables en cas d'intervention dans des grèves menées par des catégories assurant des services essentiels.
423. Le comité note que, dans ce cas, les allégations portent sur l'interruption par voie de législation d'une action revendicative menée légalement dans le secteur hospitalier aux niveaux local, municipal et national, et sur la prorogation par voie de législation de conventions collectives applicables aux infirmières et autres personnels hospitaliers concernés.
424. Le comité note que, depuis 1969, les travailleurs et les employeurs du secteur hospitalier ont le choix de déclencher des actions directes à l'appui de leurs revendications, sous réserve de certaines restrictions énoncées dans un certain nombre d'accords généraux conclus avec leurs employeurs respectifs. Il note que l'un de ces instruments prévoit qu'en cas d'arrêt de travail un accord doit être conclu pour assurer le maintien d'un effectif minimal de sécurité dans tous les secteurs touchés. Au début de 1995, la DNO a lancé un préavis d'arrêt de travail concernant au total 3 500 infirmières, avant d'engager des négociations pour déterminer les effectifs nécessaires à la mise en place de services d'urgence et de services vitaux dans tous les secteurs touchés. La DNO a ensuite conclu un accord-cadre prévoyant le contrat type devant servir de base pour les accords spécifiques à chaque secteur ou à chaque établissement. Cet accord, jugé suffisant pour assurer les services nécessaires et vitaux, a été accepté par les employeurs dans tous les cas. Au bout du compte, 2 175 infirmières des hôpitaux publics sur les 25 000 et 1 300 infirmières du secteur des premiers soins sur les 11 000 que compte le Danemark étaient concernées par la grève lancée par la DNO.
425. Peu après que la DNO eut lancé ces préavis d'arrêt de travail, l'Association des conseils de comté a lancé un préavis de lock-out visant 4 500 infirmières. Il ressort que les négociations sur la mise en place d'un service d'urgence ont fait apparaître à cette occasion qu'en réalité la dotation quotidienne en effectifs de ces services et cliniques n'excédait pas ce que l'on peut considérer comme la norme minimale de sécurité, si bien que l'association a dû annuler sa décision en ce qui concerne un certain nombre de services en sous-effectifs, c'est-à-dire environ 1 000 infirmières. Après cela, l'Association nationale des autorités locales, la municipalité de Copenhague et la municipalité de Frederiksberg ont lancé, elles aussi, un préavis de lock-out touchant, dans leur juridiction, toutes les infirmières soignantes, les infirmières de maison de santé et les infirmières visiteuses non encore touchées par la grève. Le comité note, en outre, que la mesure de lock-out prise par l'Association des conseils de comté s'est révélée excessive et que, dès le deuxième jour du conflit, des pourparlers tendant à son atténuation ont été engagés et un certain nombre de services entièrement rétablis. Au moment de l'intervention du gouvernement dans l'action revendicative, près de 4 000 infirmières faisaient l'objet d'un lock-out.
426. Le comité prend note de l'avis du gouvernement selon lequel, en dépit des mesures prises pour réduire le nombre d'infirmières en grève ou mises à pied, et tendant à garantir des services minimums, la situation était si grave qu'une prolongation du conflit risquait de mettre en péril la situation sanitaire de la population. Il note, en outre, que le gouvernement a craint que l'extension du lock-out prévu pour le 1er juin n'ait des conséquences graves pour de nombreuses personnes âgées ou malades.
427. Le comité rappelle que, dans des cas antérieurs, il a considéré que le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 526.] A ce titre, le comité a considéré que le secteur hospitalier est un service essentiel, pouvant faire l'objet d'une restriction ou d'une interdiction du droit de grève par l'effet de mesures gouvernementales, comme le reconnaissent les organes directeurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 544.]
428. Le comité note que l'organisation plaignante déclare, en l'espèce, que les services d'urgence mis en place dans les services touchés par la grève de la DNO ont continué à fonctionner sans problèmes majeurs et que la gravité de la situation ne s'est accrue que par le fait d'un vaste lock-out décidé par les différents employeurs. Toutefois, le comité est d'avis que le caractère essentiel des services hospitaliers autorise le gouvernement à mettre un terme à un conflit du travail s'il considère, comme dans ce cas, que la vie, la sécurité ou la santé de la personne sont mises en danger. Le comité rappelle au gouvernement le principe général selon lequel les employés privés du droit de grève parce qu'ils rendent des services essentiels doivent bénéficier de garanties appropriées destinées à sauvegarder leurs intérêts, interdiction correspondant au droit de lock-out, établissement d'une procédure paritaire de conciliation et, seulement lorsque la conciliation échoue, institution d'une procédure paritaire d'arbitrage. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 551.]
429. Le comité rappelle également que, lorsque le droit de grève se trouve restreint ou interdit dans des services essentiels comme les hôpitaux, les travailleurs devraient bénéficier d'une protection adéquate, de manière à compenser les restrictions qui auraient été imposées à leur liberté d'action. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 546.] On peut y parvenir, par exemple, en prévoyant des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer, et dans lesquelles les sentences rendues devraient être appliquées entièrement et rapidement. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 547.] Le comité note que, dans le présent cas, la loi no 330 prévoit: a) que les contrats et conventions venus à échéance le 1er avril 1995 sont prorogés jusqu'au 31 mars 1997; b) qu'il est constitué deux commissions, composées de représentants des parties concernées, pour analyser les activités, les niveaux de rémunération, etc., respectivement des infirmières et des techniciens de laboratoire médical; c) que des négociations doivent s'engager entre les parties sur d'éventuels amendements aux conditions et modalités d'emploi, amendements qui, s'ils ne sont pas décidés d'un commun accord entre les parties, seront tranchés par les présidents de chacune des commissions; et d) qu'il est fixé une limite de 1,12 et 1,29 pour cent à toute proposition d'augmentation de salaire.
430. Le comité note que les parties n'ont pas réussi à parvenir à un accord dans les conditions prévues par la loi et que la décision finale a été rendue par le président de la commission le 10 novembre 1995. Il n'appartient pas au comité de se prononcer sur le contenu de cette sentence mais plutôt de s'assurer que cette forme de compensation de la suppression de la possibilité de recourir à l'action revendicative sur le terrain est conforme à ses principes.
431. Le comité note que la procédure instituée par la loi no 330 est tout à fait comparable à celle qui avait été instituée dans le cadre d'une affaire dont le comité avait été saisi et qui concernait l'interruption de l'action de grève menée par des jeunes internes des hôpitaux. [Voir cas no 1421 (Danemark), 265e rapport, paragr. 62-103.] Selon le critère mentionné plus haut, le comité considère, comme il l'avait fait dans le cadre de ce précédent cas, qu'aussi bien la procédure générale mise en place pour le règlement des différends relatifs aux conventions collectives prorogées que la procédure spécifique (commission paritaire/arbitre indépendant) instituée par la loi no 330 sont appropriées, impartiales et rapides et associent les parties. Le comité estime qu'à ce titre elles sauvegardent effectivement les intérêts des travailleurs, qui sont tenus de maintenir la paix du travail en vertu de la législation en question.
432. Le comité doit toutefois examiner également l'allégation selon laquelle l'adoption de la loi no 330 résulte d'une intervention du gouvernement dans la négociation collective volontaire. Il doit rappeler à cet égard que l'un des aspects fondamentaux de la liberté d'association est le droit, pour les organisations de travailleurs, de négocier librement avec les employeurs et leurs organisations les salaires et les conditions de travail, et que toute restriction à ce droit ne devrait être appliquée qu'en tant que mesure d'exception, limitée à l'indispensable et n'excédant pas un délai raisonnable; il rappelle en outre que toute restriction de cette nature doit s'accompagner de garanties appropriées pour la protection du niveau de vie des travailleurs. [Voir cas no 1421, 265e rapport, paragr. 99.]
433. En outre, le comité rappelle une fois de plus que l'article 6 de la convention no 98 permet d'exclure les "fonctionnaires publics" de ce droit fondamental, terme que les organes de contrôle ont examiné à la lumière de la distinction à faire entre les fonctionnaires employés à des titres divers dans les ministères gouvernementaux ou organismes de cet ordre et les autres personnes employées par le gouvernement, les établissements ou entreprises du secteur public (comme, en l'occurrence, les hôpitaux publics) ou par des organismes publics indépendants. [Voir cas no 1421, 265e rapport, paragr. 100.]
434. Dans le présent cas, par conséquent, le comité estime que l'Organisation des infirmières danoises (DNO) jouissait légitimement du droit de négocier les conditions de travail des infirmières par voie de conventions collectives jusqu'à ce que la loi no 330 mette un terme aux négociations à défaut d'accord pour la durée de la validité des conventions prorogées, c'est-à-dire du 1er novembre 1995 au 31 mars 1997.
435. En outre, le comité note que la commission paritaire créée par la loi pour que la DNO et les différents employeurs négocient d'éventuels amendements à la convention prorogée, disposait d'une marge de négociation sur les augmentations de salaire limitée à 1,12 et 1,29 pour cent, et que la loi précitée limitait de même toute sentence finale que le président de cette commission devait éventuellement rendre en la matière. Etant donné que l'augmentation de salaire semble avoir été, dans le présent cas, la principale revendication ayant entraîné le recours à la grève, le comité considère qu'une telle restriction du champ de négociation du syndicat n'est pas propice à des relations professionnelles harmonieuses.
436. Le comité souhaite rappeler que, comme dans le cas no 1421 relatif à une grève d'internes des hôpitaux, il est d'avis que l'intervention du gouvernement est allée au-delà des critères exposés aux paragraphes précédents concernant les restrictions acceptables à la fixation volontaire des conditions de travail, que la méthode utilisée allait au-delà de l'indispensable et de ce qui se conçoit comme un délai raisonnable du fait qu'elle prolongeait de deux ans et parfois de quatre la durée d'application des conventions collectives. [Voir cas no 1421, 265e rapport, paragr. 102.] Etant donné que, dans le présent cas, les conventions collectives ont également été prorogées autoritairement de deux ans, le comité doit à nouveau conclure que cette intervention du gouvernement est allée au-delà de ce qui peut être considéré comme une restriction acceptable. A cet égard, sans méconnaître que le gouvernement indique que les négociations et procédures de conciliation entreprises avant l'action revendicative sur le terrain se sont révélées vaines, le comité note qu'il n'a pas été avancé d'élément démontrant que l'économie danoise dans son ensemble ou le secteur des infirmières lui-même se trouvait dans une situation si critique qu'une intervention dans la négociation collective volontaire fût justifiée. Le comité demande au gouvernement de s'abstenir de prendre des mesures de ce type à l'avenir.
437. Enfin, le comité note que, si l'organisation plaignante déclare n'avoir été aucunement consultée avant l'adoption de la loi no 330, le gouvernement déclare que l'organisation plaignante a été reçue par la commission parlementaire compétente et a eu la possibilité d'exprimer son avis. Devant le caractère contradictoire de ces deux versions, le comité ne peut que rappeler l'importance devant être accordée au principe de la consultation et de la collaboration entre pouvoirs publics, organisations d'employeurs et organisations de travailleurs au niveau de la branche comme au niveau national, conformément aux dispositions de la recommandation (no 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960. [Voir cas no 1421, 265e rapport, paragr. 92.]
438. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Loi no 330 portant prorogation et renouvellement des contrats
de travail et conventions collectives applicables aux infirmières,
manipulateurs de radiologie, infirmières en pédiatrie, infirmières
de secteur, assistants de laboratoire hospitalier, etc.
Article 1. Les contrats et conventions visés à l'appendice I, section A, et qui viennent à échéance le 1er avril 1995, sous réserve de nouveaux contrats ou nouvelles conventions conclues avant l'entrée en vigueur de la loi, sont prorogés au 31 mars 1997 avec les additifs et modificatifs énoncés à l'appendice II et selon les modalités spécifiées dans les accords ou sentences visés à l'article 4.
Article 2. Les contrats et conventions visés à l'appendice I, section B, et qui viennent à échéance le 1er avril 1995, sous réserve de nouveaux contrats ou nouvelles conventions conclues avant l'entrée en vigueur de la loi, sont prorogés au 31 mars 1997 avec les additifs et modificatifs énoncés à l'appendice II et selon les modalités spécifiées dans les accords ou sentences visés à l'article 4.
Article 3, paragraphe 1. Il sera désigné une commission chargée d'établir une étude sur les soins infirmiers dans le secteur de la santé, cette étude portant sur:
Paragraphe 2. Il sera désigné une commission chargée d'établir une analyse du travail des techniciens de laboratoire médicaux, cette analyse portant sur les domaines d'activité, l'attribution des tâches et responsabilités, et les salaires.
Paragraphe 3. La commission visée au paragraphe 1 ci-dessus se composera de représentants de l'Organisation des infirmières danoises, de l'Association des conseils de comté du Danemark, l'Association nationale des autorités locales, la municipalité de Copenhague, la municipalité de Frederiksberg, la Direction des hôpitaux de Copenhague et le ministère des Finances. Cette commission sera présidée par un président désigné conjointement par les parties siégeant en son sein. Si ces dernières ne s'accordent pas pour désigner le président, celui-ci sera désigné par le Service des conciliations publiques.
Paragraphe 4. La commission visée au paragraphe 2 ci-dessus sera composée de représentants de l'Association danoise des techniciens de laboratoire médical, l'Association des conseils de comté du Danemark, la Direction des hôpitaux de Copenhague et le ministère des Finances. Elle sera présidée par un président désigné conjointement par les parties siégeant en son sein. Si ces dernières ne s'accordent pas sur la désignation du président, celui-ci sera désigné par le Service des conciliations publiques.
Paragraphe 5. La commission visée au paragraphe 1 ci-dessus peut formuler des propositions entraînant un supplément de dépenses à compter du 1er octobre 1995 dans la limite des pourcentages ci-après pour les salaires de base, primes ou indemnités non comprises, tels qu'au 1er octobre 1994:
Paragraphe 6. La commission visée au paragraphe 2 peut formuler des propositions entraînant un supplément de dépenses à compter du 1er octobre 1995 dans la limite des pourcentages ci-après des salaires de base, primes et indemnités non comprises, tels qu'au 1er octobre 1994:
Paragraphe 7. Les commissions peuvent également formuler des propositions entraînant un supplément de dépenses qui puisse être financé par des améliorations de l'efficacité, une rationalisation, une réorganisation des méthodes de travail, etc.
Paragraphe 8. Les commissions doivent avoir achevé leurs travaux le 1er octobre 1995.
Paragraphe 9. Les frais et dépenses des commissions seront couverts par des crédits du gouvernement central.
Article 4. Sur la base des propositions émanant des commissions visées à l'article 3 ci-dessus, des négociations seront engagées entre les parties aux contrats de service sur d'éventuels amendements aux conditions énoncées par ces contrats.
Paragraphe 2. Les points n'ayant pu faire l'objet d'un accord entre les parties compétentes au 1er novembre 1995 seront, en ce qui concerne les infirmières, tranchés par le président de la commission visée à l'article 3.1 ci-dessus et, en ce qui concerne les assistants de laboratoire hospitalier, tranchés par le président de la commission visée à l'article 3.2 ci-dessus.
Paragraphe 3. Les frais et dépenses du président visés au paragraphe 2 ci-dessus seront couverts par les deux parties aux contrats de service, à raison de la moitié pour chacune.
Paragraphe 4. Les accords visés au paragraphe 1 ci-dessus et les décisions prises en vertu du paragraphe 2 n'auront pas à être approuvés par le Conseil des salaires des autorités locales danoises ni par le conseil visé à l'article 14 de la loi de coopération des hôpitaux de Copenhague.
Article 5. Les contrats et conventions collectives visés à l'article 1 ci-avant seront soumis à un embargo sur la grève et le lock-out pour la période au cours de laquelle lesdits contrats et lesdites conventions sont prorogés.
Paragraphe 2. Les contrats et les conventions visés à l'article 2 ci-dessus seront soumis à un embargo sur la grève et le lock-out à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi, et les arrêts de travail nés des désaccords entre les parties cesseront.
Paragraphe 3. Il ne se produira pas de perturbation imputable à une action revendicative sur le terrain.
Article 6. Les questions de violation ou d'interprétation des contrats et des conventions dont cette loi porte prorogation et renouvellement seront tranchées conformément aux règles courantes s'appliquant en la matière.
Article 7. Le projet de loi peut être ratifié immédiatement après adoption.
Article 8. La loi entrera en vigueur à compter du 27 mai 1995. La prorogation des contrats et conventions collectives visés à l'article 1 prend effet le 1er avril 1995. Le renouvellement des contrats et des conventions collectives visés à l'article 2 prend effet avec l'entrée en vigueur de la loi.
Article 9. La loi ne s'applique pas aux îles Faeroe ni au Groenland.
Rapport intérimaire
Plaintes contre le gouvernement de l'Ethiopie
présentées par
-- la Fédération internationale des employés,
techniciens et cadres (FIET) et
-- la Confédération des syndicats de l'Ethiopie (CETU)
Allégations: occupation de locaux syndicaux, voie de fait
sur un syndicaliste et destitution forcée de dirigeants syndicaux élus
439. Dans une communication en date du 14 novembre 1996, la Fédération internationale des employés, techniciens et cadres (FIET) a présenté une plainte contre le gouvernement de l'Ethiopie pour violations des droits syndicaux. La Confédération des syndicats de l'Ethiopie (CETU) a présenté des allégations relatives à ce cas dans une communication également en date du 14 novembre 1996. Elle a soumis des informations complémentaires dans une communication du 27 janvier 1997.
440. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date des 17 janvier et 6 février 1997.
441. L'Ethiopie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
442. Dans sa communication en date du 14 novembre 1996, la FIET allègue que, le 4 novembre 1996, six membres du Front populaire démocratique révolutionnaire de l'Ethiopie (EPRDF) au pouvoir, appuyés par des forces de sécurité et de police, ont occupé les bureaux de la Fédération des syndicats du commerce, des activités techniques et de l'imprimerie (FCTP), affiliée à la FIET. Cette dernière affirme que cet assaut constitue le point culminant d'une campagne gouvernementale menée contre la FCTP. Elle s'inscrit dans la suite d'un harcèlement continu de la part des fonctionnaires gouvernementaux et de l'intervention de certains départements gouvernementaux dans les activités de cette fédération qui a défendu la liberté, l'indépendance et le syndicalisme démocratique en Ethiopie.
443. La FIET soutient que, depuis 1994, le EPRDF et différents départements gouvernementaux sont parvenus, en manipulant des syndicats de base et en exerçant des pressions sur des personnes et des congrès antistatutaires, à transformer sept des neufs fédérations affiliées à la CETU en organisations progouvernementales. Toujours d'après la FIET, le EPRDF et ces départements s'efforcent maintenant de réduire au silence les deux seules fédérations indépendantes restantes et le président de la CETU. La FIET a en outre des craintes pour la sécurité physique des dirigeants de la FCTP et de l'autre fédération affiliée à la FIET, la Fédération industrielle des syndicats des banques et des assurances (IFBITU) ainsi que du président de la CETU, M. Dawey Ibrahim.
444. Dans sa communication du 14 novembre 1996, la CETU avance également que, le 4 novembre de la même année, six membres du EPRDF, pleinement appuyés par les forces de sécurité et de police, ont occupé de force les bureaux de la FCTP par la force. La CETU souligne que la FCTP, qui lui est affiliée, lutte pour l'existence de syndicats libres, indépendants et démocratiques en Ethiopie. De ce fait, elle a été la cible de propagandes qui ont culminé avec l'attaque illégale de ses locaux avec l'appui sans réserve du gouvernement.
445. La CETU indique plus précisément que les six membres du EPRDF ont d'abord pénétré dans le bureau du trésorier, M. Mulatu Gurmu, qui était alors seul. Ils ont insisté pour que celui-ci leur donne les clés des bureaux de la FCTP et devant sa résistance l'ont battu avec brutalité. Ils se sont ensuite saisis des clés des locaux, d'argent et de documents personnels sur M. Gurmu. Les bureaux de la FCTP sont maintenant sous le contrôle de personnes recrutées par le gouvernement et relèvent donc de celui-ci.
446. La CETU ajoute qu'une plainte a été déposée auprès de la police et du procureur de la République. Elle n'attend toutefois aucune action immédiate de leur part puisque l'occupation des locaux de la FCTP a été entièrement appuyée par le gouvernement et que, de plus, les principes du droit ne sont pas respectés. La CETU fait donc appel à l'OIT afin que celle-ci fasse pression auprès du gouvernement pour qu'il respecte les droits syndicaux garantis par les conventions nos 87 et 98 qui ont été ratifiées par l'Ethiopie.
447. Dans sa plus récente communication du 27 janvier 1997, la CETU allègue que les procédures judiciaires l'opposant au ministère du Travail au sujet de son enregistrement sont en instance devant la chambre sociale de la Haute Cour fédérale. Sur cette question, la CETU déclare que les commissions exécutives et de contrôle des huit fédérations ont adopté une déclaration le 4 janvier 1997, dans laquelle il est décidé de réorganiser la CETU et d'établir un comité de coordination pour gérer son patrimoine.
448. La CETU souligne, au sujet de la décision de rétablir l'organisation, qu'aux termes de l'article 123 de la Proclamation du travail no 42/93 un syndicat dont l'enregistrement est annulé par le ministère du Travail cesse d'exister s'il n'a pas interjeté appel devant le tribunal compétent dans les délais prévus par la loi ou lorsque la décision du ministère est confirmée en appel. Puisque la CETU a présenté un recours devant le tribunal conformément à la procédure prévue par la loi et que le cas est toujours en instance devant la justice qui n'a pas encore rendu une décision finale, la Confédération est toujours une personne juridique en vie. En conséquence, toute action qui a pour sujet de rétablir la CETU est illégale et préjuge de la fonction du tribunal, ce qui revient fondamentalement à saper l'indépendance du judiciaire.
449. Au sujet de la décision d'établir un comité de coordination pour gérer son patrimoine, la CETU indique que six des huit fédérations avaient auparavant demandé au ministère d'instituer un comité intérimaire. Endossant cette demande, le ministère l'a soumise au tribunal connaissant de l'appel de la CETU. Le tribunal a tranché le 4 août 1995 en estimant qu'il n'y avait pas besoin d'instituer un comité intérimaire pour la simple raison que la Confédération avait une existence légale et pouvait administrer son patrimoine. La CETU estime que, puisque cette décision n'a pas été infirmée, elle reste valable. Ainsi, la très récente déclaration des commissions exécutives et de contrôle des huit fédérations ne constitue pas moins qu'un désaveu de la décision de la Haute Cour.
450. En outre, les commissions en question n'ont pas de mandat légal ou constitutionnel pour mettre un terme au statut légal de la CETU ou pour réorganiser, remplacer ou assumer ses fonctions. Leur unique mandat est de représenter les travailleurs de leurs secteurs d'activités respectifs et mener leurs tâches tel que le prévoient les statuts des fédérations. Les conseils et congrès de ces fédérations n'ont aucun pouvoir de par la loi, ou de par leurs statuts, de décider de l'existence de la CETU ou de l'administration de son patrimoine.
451. La CETU déclare en conséquence que la déclaration des commissions exécutives et de contrôle viole non seulement les résolutions du Congrès général des travailleurs éthiopiens concernant l'administration du patrimoine dont l'ancien Centre national (ETU) était propriétaire et possesseur -- mais contrevient aussi à la législation nationale du travail et aux normes internationales du travail. La tentative de prendre le contrôle du patrimoine de la CETU, par simple autorisation administrative, constitue rien de moins qu'un acte illégal de la plus haute gravité. La CETU estime que le ministère du Travail devrait assurer le respect de la règle de droit. En outre, le ministère ne devrait pas autoriser la création ou la reconnaissance du comité intérimaire afin que le tribunal rende une décision finale dans le différend sur l'annulation de l'enregistrement de la CETU.
B. Réponse du gouvernement
452. Dans sa communication en date des 17 janvier et 6 février 1997, le gouvernement revenant sur les craintes exprimées par la FIET quant à la sécurité physique des dirigeants des deux fédérations, à savoir la FCTP et la IFBITU, ainsi que du président de la CETU, M. Dawey Ibrahim, affirme catégoriquement qu'il n'a jamais essayé et qu'il est nullement dans ses intentions d'attaquer un dirigeant syndical ou de s'ingérer dans les affaires intérieures des syndicats. Au contraire, il a toujours défendu les droits syndicaux et le strict respect de la liberté syndicale.
453. Le gouvernement affirme que la plainte relative à l'occupation forcée des bureaux de la FCTP par six membres du EPRDF, appuyés par des forces de sécurité et de police, est sans fondement.
454. Le gouvernement indique que, dans une lettre en date du 22 octobre 1996, le bureau exécutif de la FCTP a demandé au ministère du Travail et des Affaires sociales de fournir des cartes d'identité aux dirigeants récemment élus de la fédération. D'après le gouvernement, le bureau exécutif de la FCTP a indiqué dans cette lettre que, conformément à sa constitution, l'assemblée générale tenue le 19 octobre 1996 avait élu de nouveaux dirigeants syndicaux pour remplacer ceux qui avaient quitté la fédération pour des raisons personnelles.
455. Conformément à cette requête, le ministère qui est un organe gouvernemental chargé de l'enregistrement et de l'homologation des organisations syndicales et de leurs dirigeants a délivré des cartes d'identité après avoir examiné les documents pertinents. Le gouvernement souligne toutefois que la délivrance de cartes d'identité à des dirigeants syndicaux nouvellement élus n'est pas un fait exceptionnel. Les dirigeants des huit autres fédérations disposent également de cartes d'identité qui leur ont été fournies de la même manière par le ministère.
456. De plus, le gouvernement souligne que ni le EPRDF ni les forces de police et de sécurité n'ont occupé les locaux de la FCTP. Il souligne qu'il décourage tout harcèlement et autre pratique non démocratique. Enfin, il réaffirme son engagement en faveur du libre exercice des droits syndicaux conformément aux conventions relatives à la liberté syndicale.
457. Le comité note que le présent cas concerne l'occupation par la force des locaux de la Fédération des syndicats du commerce, des activités techniques et de l'imprimerie (FCTP), affiliée à la FIET, par six membres du Front populaire démocratique révolutionnaire de l'Ethiopie (EPRDF) au pouvoir, appuyés par les forces de sécurité et de police. Ces allégations font également référence à des voies de fait sur le trésorier de la FCTP ainsi qu'à la destitution forcée de dirigeants syndicaux élus de la même fédération. Les allégations se réfèrent enfin aux tentatives menées par huit fédérations progouvernementales en collusion avec les autorités de réorganiser la CETU et d'administrer son patrimoine.
458. En ce qui concerne les allégations d'interdiction dans les locaux de la FCTP ainsi que d'occupation de ces locaux par six membres du EPRDF, le comité fait remarquer que le gouvernement nie catégoriquement qu'un tel assaut ait eu lieu. Par conséquent, a fortiori, aucun syndicaliste n'a fait l'objet de voie de fait. Compte tenu des profondes contradictions entre les déclarations des plaignants et celles du gouvernement quant aux faits véritablement intervenus dans les locaux de la FCTP le 4 novembre 1996, le comité rappelle que les assauts menés contre des locaux syndicaux et les menaces exercées contre des syndicalistes créent un climat de crainte parmi les syndicalistes fort préjudiciable à l'exercice des activités syndicales et que les autorités, lorsqu'elles sont informées de tels faits, devraient sans tarder faire procéder à une enquête pour déterminer les responsabilités afin que les coupables soient sanctionnés. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 179.] Le comité note que cet incident a été signalé à la police. Il demande donc au gouvernement de faire en sorte qu'une enquête indépendante portant sur les allégations d'assaut contre des locaux de la FCTP et de voie de fait sur le trésorier de cette fédération le 4 novembre 1996 soit menée afin d'identifier et de sanctionner les coupables. Il demande en outre au gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
459. Pour ce qui est du contrôle allégué des locaux de la FCTP par des personnes recrutées par le gouvernement, le comité note que celui-ci réfute également cette allégation. Il note que, selon la déclaration du gouvernement, le bureau exécutif de la FCTP a demandé au ministère du Travail et des Affaires sociales de délivrer des cartes d'identité à ses dirigeants nouvellement élus. De plus, d'après le gouvernement, la délivrance de ces cartes d'identité est une procédure régulière qui a déjà été utilisée pour les dirigeants des huit autres fédérations. Ici encore, compte tenu des contradictions frappantes entre les déclarations des plaignants et celles du gouvernement quant à la question de savoir si les nouveaux dirigeants de la FCTP ont été élus démocratiquement ou non, le comité rappelle le principe selon lequel la désignation par les autorités publiques de membres des comités exécutifs des syndicats constitue une intervention directe dans les affaires intérieures des syndicats et n'est pas conforme à la convention no 87. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 396.] Compte tenu des doutes qui entourent la régularité des procédures suivies pour la nomination des nouveaux dirigeants de la FCTP et du principe selon lequel les cas de contestation des résultats des élections syndicales doivent relever des autorités judiciaires, qui devraient garantir une procédure impartiale, objective et rapide [voir Recueil, op. cit., paragr. 405], le comité demande au gouvernement de faire procéder à une enquête judiciaire indépendante sur ces allégations et de le tenir informé.
460. Enfin, le comité note que le gouvernement n'a pas fourni ses observations sur les allégations formulées par la CETU dans sa communication du 27 janvier 1997 concernant les tentatives de huit fédérations progouvernementales de réorganiser la CETU et d'administrer son patrimoine. Le comité demande au gouvernement de répondre sans tarder à ces allégations.
461. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de l'Inde
présentée par
l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation,
de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac
et des branches connexes (UITA)
Allégation: meurtre d'une syndicaliste
462. Dans une communication du 2 octobre 1995, l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), au nom de son affilié, le Hind Khet Mazdoor Panchayat, a déposé contre le gouvernement de l'Inde une plainte pour violation des droits syndicaux. Elle a transmis des informations complémentaires par une communication du 14 novembre 1995.
463. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication datée du 30 janvier 1997.
464. L'Inde n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
465. Dans sa communication du 2 octobre 1995, l'UITA indique que sa plainte se réfère à l'assassinat, le 23 août 1995, de Mme Ahilya Devi, une syndicaliste.
466. Plus spécifiquement, l'UITA explique que Mme Ahilya Devi était membre d'un de ses syndicats affiliés, l'Hind Khet Mazdoor Panchayat, et s'occupait en particulier des droits des femmes et des paysans sans terres. A la fin de 1993, alors qu'elle travaillait à un programme de redistribution des terres, elle a été agressée par des hommes armés. Malgré de graves blessures, elle a survécu. Dans un premier temps, la police a refusé d'ouvrir une enquête sur le principal suspect, M. Narsingh Singh, dont on disait qu'il était protégé par la police et les politiciens locaux. L'UITA indique que, dès cette époque, elle avait protesté auprès du gouvernement fédéral ainsi qu'auprès du gouvernement de l'Etat du Bihar. Malheureusement, cela n'a pas suffi puisque Mme Ahilya Devi a été assassinée deux ans plus tard, le 23 août 1995, preuve que tant le gouvernement fédéral que le gouvernement de l'Etat du Bihar n'ont pas fait le nécessaire pour protéger pleinement et adéquatement le droit des militants syndicaux d'exercer leurs fonctions sans risque pour leur sécurité.
467. En outre, l'UITA affirme que la police locale n'a rien fait pour que Mme Devi, qui était grièvement blessée, reçoive rapidement des soins, qu'elle l'a laissée se vider de son sang pendant deux heures et demie au poste de police et qu'elle a refusé à plusieurs reprises de prendre sa déposition. Mme Devi a finalement succombé à ses blessures à l'hôpital. A la suite de protestations massives, le 17 septembre 1995, deux hommes ont été placés en garde à vue; ils seraient "immédiatement passés aux aveux", ce qui a mis un terme à l'enquête. L'UITA souligne que l'assassinat de Mme Devi était le troisième assassinat politique d'un défenseur des droits sociaux et politiques des populations rurales dans le même district de l'Etat du Bihar en deux ans. Selon l'UITA, cela signifie, au minimum, que les autorités locales n'ont jamais fait le nécessaire pour protéger efficacement les syndicalistes ruraux qui travaillent dans un climat de violence permanente.
B. Réponse du gouvernement
468. Dans sa communication en date du 30 janvier 1997, le gouvernement déclare que le meurtre de Mme Ahilya Devi a fait l'objet d'une enquête approfondie menée par les autorités de l'Etat du Bihar. Les enquêtes ont été menées par un officier de police très expérimenté dans le district de Kishangunj. Les enquêtes ont révélé les faits suivants.
469. Mme Devi vivait dans la région de Galgalia, district de Kishangunj, où elle entra en contact avec M. Narsingh Singh, contrebandier notoire de la région. Elle s'est installée dans la maison, propriété de M. Narsingh Singh. Mme Devi aurait commencé à s'impliquer dans des activités politiques, il y a environ trois ans, et est devenue, à cette époque, membre du Hind Khet Mazdoor Panchayat. Les relations entre Mme Devi et M. Narsingh Singh sont devenues conflictuelles il y a de cela deux ans et demi.
470. En décembre 1993, certaines personnes ont blessé Mme Devi au cours d'un différend foncier. Cet incident a été communiqué à la police. Dans sa première déclaration à cet égard, Mme Devi a dénoncé Satyanarayan Jha, Dev Narayan Rai, Dukhi Sahni, Shanti Devi, Kabri Devi et Narsingh Singh. Ces allégations ont fait l'objet d'enquêtes menées par la police. Cinq de ces six personnes ont été mises en accusation conformément aux dispositions pertinentes du Code pénal de l'Inde. Les accusations contre M. Narsingh Singh ont fait l'objet d'une enquête mais n'ont pas été prouvées. Les affaires concernant les personnes mises en accusation sont actuellement en instance devant le tribunal.
471. Le gouvernement souligne qu'aucun incident n'a été rapporté entre Mme Devi et M. Narsingh Singh entre ces événements et le 23 août 1995. Selon les membres de la famille de Mme Devi, elle s'est rendue, dans la matinée du 23 août 1995, dans un village situé dans l'Etat adjacent du Bengale-Occidental en raison de différends fonciers. Dans la soirée, sur son retour, elle a été attaquée par des personnes qui se seraient échappées. Mme Devi a été blessée dans l'attaque et a été transportée par une tierce personne à la résidence du sous-inspecteur responsable de la station de police. Mme Devi n'a pas répondu aux efforts de l'officier de police en vue de connaître les faits en cause. Il a dès lors demandé aux membres de sa famille de rester à proximité. Même avec l'aide des membres de sa famille, Mme Devi était incapable de fournir quelque information permettant d'éclaircir les faits. L'officier de police la transporta à l'hôpital Thakurganj, situé à 15 kilomètres, dans un autobus privé. Le conjoint de Mme Devi l'a accompagnée à l'hôpital où elle est décédée. Elle ne prononça aucune déclaration avant sa mort.
472. Sur la base de la déclaration du conjoint de Mme Devi, une information fut ouverte par la police. Dans cette affaire, le conjoint de la personne décédée fit référence à six personnes, soit Narsingh Singh, Shravan Giri, Bhrigunath Gupta, Ratan Ghosh et deux autres personnes non identifiées. Au cours de l'enquête préliminaire, des chefs d'accusation furent établis contre Shravan Giri mais aucune preuve ne permit d'étoffer les accusations contre les autres personnes. M. Giri a dès lors été arrêté par les forces policières de Galgalia à Ludhiana dans l'Etat du Punjab, à plus de 1 000 kilomètres de distance. Il avoua les faits et déclara que M. Tapan Kumar Chaki et M. Dinesh Mandal étaient également présents au moment de l'assassinat de Mme Devi. Il indiqua que des querelles en relation avec la contrebande étaient à l'origine de l'assassinat. M. Tapan Kumar Chaki a également été arrêté par la police et a avoué le crime. Des accusations formelles contre Shravan Giri et Tapan Kumar Chaki ont été déposées auprès du tribunal. M. Dinesh Mandal, également accusé, est toujours libre bien que des procédures de confiscation de ses propriétés aient été entreprises. En outre, les officiers en charge ont ordonné l'arrestation de M. Narsingh Singh, Bhrigunath, Gupta et Ratan Ghosh, qui avaient été nommément désignés dans la plainte du conjoint de Mme Devi.
473. Selon le gouvernement, il appert des faits ci-avant mentionnés que l'assassinat de Mme Devi n'a rien à voir avec ses activités politiques ou syndicales. Le meurtre, tel que relaté par l'un des accusés qui a avoué, serait le résultat des activités de contrebande de Mme Devi sur la frontière indo-népalaise. Le gouvernement conclut en indiquant qu'il s'agit d'un meurtre relié aux activités criminelles de la victime, qui a été traitée conformément aux lois nationales.
474. Le comité constate que les allégations dans le présent cas se rapportent à l'assassinat de Mme Ahilya Devi, une syndicaliste s'occupant de l'organisation des travailleurs ruraux dans l'Etat du Bihar, qui serait intervenu le 23 août 1995 alors qu'une première tentative de meurtre avait été perpétrée en 1993. Selon l'organisation plaignante, elle aurait été assassinée en raison de ses activités syndicales et politiques. Bien qu'il reconnaisse que Mme Devi était devenue membre du Hind Khet Mazdoor Panchayat, syndicat affilié à l'organisation plaignante, le gouvernement déclare, à la suite des enquêtes menées, que Mme Devi a été assassinée en raison de ses activités de contrebande qui l'auraient opposée à d'autres personnes aussi impliquées.
475. Le comité observe que le gouvernement déclare que MM. Shravan Giri et Tapan Kumar Chaki ont été mis en accusation et arrêtés par la police à la suite du décès de Mme Devi. Ils auraient avoué leur participation au crime. Afin de connaître tous les éléments pertinents de ce cas, le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures entreprises contre ces deux personnes et de lui fournir, dans une langue de travail de l'OIT, les jugements qui seront rendus. En outre, le comité note que le gouvernement indique que M. Dinesh Mandal, aussi impliqué dans l'assassinat de Mme Devi, est encore en liberté bien que des procédures de confiscation de ses propriétés aient été entreprises. Le gouvernement ajoute que les officiers de police ont ordonné l'arrestation de MM. Narsingh Singh, Bhrigunath Gupta et Ratan Ghosh, qui ont été nommément désignés dans la plainte du conjoint de Mme Devi. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des développements concernant l'arrestation de ces quatre personnes.
476. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Notant la mise en accusation de MM. Shravan Giri et Tapan Kumar Chaki, qui ont avoué leur participation au crime de Mme Ahilya Devi, une syndicaliste s'occupant de l'organisation des travailleurs ruraux de l'Etat du Bihar, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des procédures entreprises contre ces deux personnes et de fournir une copie, dans une langue de travail de l'OIT, des jugements qui seront rendus à cet égard. Il prie également le gouvernement de le tenir informé des développements concernant l'arrestation de MM. Dinesh Mandal, Narsingh Singh, Bhrigunath Gupta et Ratan Ghosh, qui ont également été impliqués dans le meurtre de Mme Ahilya Devi.
Rapport sur lequel le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Pakistan
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: arrestation de syndicalistes et actes de violence
commis à leur encontre;
annulation de l'enregistrement d'un syndicat
477. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté dans une communication du 23 septembre 1996 une plainte contre le gouvernement du Pakistan pour violation des droits syndicaux. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 4 et 13 novembre 1996.
478. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
479. Dans sa communication du 23 septembre 1996, la Confédération internationale des syndicat libres (CISL) allègue que, le 6 juin 1996, un groupe de policiers a attaqué des membres du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Limited, qui manifestaient de façon pacifique contre la décision unilatérale de l'employeur de rejeter les accords conclus entre les parties à propos de la réduction des effectifs. L'usine appartient au groupe Schon de Karachi, qui l'a achetée en 1992 après sa privatisation. L'organisation plaignante ajoute que, selon ses informations, nombre de travailleurs ont été violemment battus par la police qui, aidée de quelque 80 "gorilles" recrutés par l'employeur, a occupé l'usine et la cité ouvrière adjacente, menaçant les travailleurs ainsi que leurs familles.
480. L'organisation plaignante ajoute que 45 dirigeants syndicaux ont été arrêtés et conduits en des lieux inconnus (sans doute les cellules des locaux de la police des agglomérations voisines). Menottés et enchaînés, le secrétaire général du syndicat, M. Haji Hakar Khan, et son président, M. Lala Manzur, ont été conduits à la ville de Dera Ismail Khan, à 500 kilomètres au sud de Haripur. Il semble que ces arrestations aient été opérées en vertu de l'article 3 de la loi sur le maintien de l'ordre, qui permet de garder les personnes en détention sans jugement pendant trois mois. Cette détention peut être prolongée indéfiniment par périodes de trois mois.
481. Le gouvernement aurait déclaré qu'il s'agissait de manifestations politiques et aurait prétendu, contrairement à la vérité, que l'arrestation des syndicalistes avait été opérée sur ordre de la Cour suprême. Le 9 juin 1996, une délégation de travailleurs a rencontré le ministre fédéral du Travail, de l'Emploi et des Pakistanais de l'étranger, lui demandant d'intervenir pour faire remettre en liberté sous caution les personnes détenues. Le Premier ministre a été instamment prié de libérer immédiatement tous les dirigeants syndicaux.
482. L'organisation plaignante affirme aussi avoir été informée que les autorités avaient suspendu l'enregistrement du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd à la demande de l'employeur. Cette suspension est intervenue très rapidement, sans que le syndicat inscrit au registre depuis dix ans n'ait eu la possibilité de se défendre. Le motif invoqué par l'employeur était le fait que l'entreprise fournit de l'ammoniac à l'industrie de la défense et que, en vertu des dispositions restrictives de la législation du travail du Pakistan, l'industrie militaire est l'un des nombreux secteurs où les syndicats sont interdits.
B. Réponse du gouvernement
483. Dans ses communications des 4 et 13 novembre 1996, le gouvernement transmet les informations fournies par le gouvernement de la Province de la Frontière du Nord-Ouest (NWFP). Il indique que l'usine Pak China Fertilizer (Haripur) a traversé une crise financière aiguë due, entre autres, à un excédent de personnel. Pour y remédier, la direction de l'usine, après avoir consulté les dirigeants du syndicat, a décidé de réduire les effectifs. Les parties ont signé le 11 décembre 1995 un accord à ce sujet. Cependant, au lieu de s'en tenir à cet accord, le syndicat s'est emparé de l'usine illégalement.
484. Le cas a donc été soumis à la Commission nationale des relations professionnelles qui, après avoir entendu les parties et jugé la réduction des effectifs illégale, a enjoint au préfet de police adjoint de la Province de la Frontière du Nord-Ouest d'assurer le fonctionnement normal de l'usine et de convoquer les parties à une réunion afin d'éviter que ne se reproduisent de tels faits. Cependant, les réunions successives avec les dirigeants syndicaux n'ont pu mettre un terme à l'occupation illégale de l'usine, et c'est pourquoi l'administration du district a dû prendre des mesures pour faire appliquer la décision de la Commission nationale des relations professionnelles. Après que la direction et le syndicat furent parvenus à un accord, 316 des 417 travailleurs ont repris le travail. Dirigeants syndicaux et travailleurs sont maintenant tous en liberté, et les relations professionnelles ont retrouvé leur cours normal.
485. En ce qui concerne l'allégation relative à l'annulation de l'enregistrement du syndicat, le gouvernement déclare que c'est le directeur de l'usine qui en a fait la demande à la Commission nationale des relations professionnelles, au motif que l'usine livre du gaz ammoniac aux forces armées et que, en vertu de l'ordonnance de 1969 sur les relations professionnelles, les travailleurs des entreprises fournissant des services liés à la défense ne peuvent s'affilier à un syndicat. A la demande du directeur, la commission a suspendu les activités du syndicat dans l'usine et a ordonné qu'il soit rayé du registre.
486. Le gouvernement insiste sur sa volonté de respecter les obligations qui lui incombent en vertu des conventions de l'OIT et affirme qu'il continuera de protéger et de défendre les droits légitimes des travailleurs du Pakistan.
487. Le comité observe que dans la présente plainte l'organisation plaignante allègue: 1) que la police et les gorilles recrutés par l'usine Pak China Fertilizer Ltd ont violemment battu les travailleurs de l'usine qui manifestaient de façon pacifique, ont menacé les travailleurs et leurs familles dans la cité ouvrière adjacente et ont arrêté 45 syndicalistes, dont le président et le secrétaire général du syndicat de l'usine; 2) que l'enregistrement du syndicat a été suspendu sous prétexte que l'usine relève de l'industrie militaire.
488. Le comité prend note de la déclaration du gouvernement indiquant que les parties sont parvenues à un accord sur le motif principal du conflit collectif (le plan de réduction des effectifs) et que tous les travailleurs et syndicalistes sont en liberté. Le comité comprend que ces travailleurs et syndicalistes n'ont pas été mis en accusation et prie le gouvernement de le confirmer. Le comité constate cependant que le plaignant et le gouvernement divergent sur l'appréciation des circonstances dans lesquelles la police est intervenue: selon le plaignant, il s'agissait d'une manifestation pacifique; selon le gouvernement, qui n'a jamais nié le caractère pacifique de l'action syndicale, il s'agissait d'une occupation illégale de l'usine. Le gouvernement signale en particulier que la Commission nationale des relations professionnelles a considéré que la réduction du personnel par l'entreprise était illégale, mais qu'elle a demandé aux autorités d'assurer le fonctionnement normal de l'usine -- illégalement occupée -- et de convoquer les parties, lesquelles ont conclu par la suite un accord qui a mis fin au conflit.
489. Compte tenu du fait que la réduction du personnel de l'usine a été déclarée illégale et que les nombreuses restrictions apportées par la législation pakistanaise à l'exercice des droits syndicaux et du droit de grève expliquent que les organisations syndicales décident parfois d'organiser des manifestations ou d'occuper les lieux de travail pour soutenir leurs revendications, le comité regrette profondément que, dans le cadre d'une action syndicale, de nombreux syndicalistes (dont le président et le secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer) aient été battus et arrêtés et que leurs familles aient fait l'objet de menaces. Le comité signale à l'attention du gouvernement que la détention de militants et de dirigeants syndicaux pour des raisons liées à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs est contraire aux principes de la liberté syndicale [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 73], et qu'un climat de violence à l'encontre des dirigeants syndicaux et de leurs familles ne favorise pas le libre exercice des droits syndicaux garanti par les conventions nos 87 et 98 [que] tous les Etats ont le devoir de garantir. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 61.]
490. En ce qui concerne l'annulation de l'enregistrement du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd, le comité observe que, selon le gouvernement, c'est le directeur de l'usine qui en a fait la demande à la Commission nationale des relations professionnelles, au motif que l'usine livre du gaz ammoniac aux forces armées et que, en vertu de l'ordonnance de 1969 sur les relations professionnelles, les travailleurs des entreprises fournissant des services liés à la défense ne peuvent s'affilier à un syndicat. C'est pourquoi, à la demande du directeur, la commission a suspendu les activités du syndicat dans l'usine et ordonné qu'il soit radié du registre.
491. Observant que le motif invoqué pour suspendre les activités du syndicat et annuler son enregistrement est le fait que l'usine fournit des services liés à la défense (livraison de gaz ammoniac aux forces armées) et que, en vertu de l'ordonnance de 1969 sur les relations professionnelles, les travailleurs concernés ne peuvent s'affilier à un syndicat (bien qu'ils exercent en fait leurs droits syndicaux depuis des années dans le cadre de leur syndicat), le comité rappelle les conclusions qu'il a déjà formulées dans un cas précédent relatif à la portée du droit d'organisation au Pakistan [voir 295e rapport, cas no 1771, paragr. 499]:
... le comité rappelle que l'article 2 de la convention no 87 dispose que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. Certes, l'article 9 de la convention autorise des dérogations en ce qui concerne les forces armées et la police, mais le comité rappelle que les membres des forces armées qui peuvent être exclus doivent être définis de manière restrictive. En outre, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a fait observer que, l'article 9 de la convention ne prévoyant que des exceptions au principe général, les travailleurs devraient en cas de doute être considérés comme des civils [Etude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 55] ..., le comité attire l'attention du gouvernement sur la nécessité de garantir dans sa législation ... le droit de tous les travailleurs qui ne sont pas membres des forces armées de jouir de la liberté syndicale et d'exercer des activités syndicales.
492. Le comité conclut que la suspension des activités du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd et l'annulation de son enregistrement constituent une violation manifeste de la liberté syndicale, d'autant qu'elle intervient peu après la signature par l'usine et le syndicat d'un accord mettant fin à un conflit collectif, et qu'il semble donc bien s'agir là de représailles contre le syndicat.
493. Dans ces conditions, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour annuler la suspension des activités du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd, d'inscrire à nouveau au registre des syndicats et garantir le déroulement normal de ses activités.
494. Enfin, le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures qu'il aura prises pour donner suite à ses recommandations.
495. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport sur lequel le comité demande
à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plaintes contre le gouvernement du Pérou
présentées par
-- le Syndicat des travailleurs de l'usine sidérurgique
du Pérou (SIDERPERU)
-- la Fédération nationale des travailleurs de l'Office national
es ports SA (FENTENAPU)
-- la Fédération des travailleurs de l'électricité
et de l'énergie du Pérou
-- la Coordination des centrales syndicales du Pérou
-- la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP)
-- la Confédération unitaire des travailleurs du Pérou (CUT) et
-- la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
Allégations: licenciements de dirigeants syndicaux, gel de fonds syndicaux,
et élaboration d'un projet de loi contraire à la liberté syndicale
496. Le comité a examiné ce cas à sa session de juin 1996 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 304e rapport du comité, paragr. 417 à 473, approuvé par le Conseil d'administration à sa 266e session (novembre 1996).]
497. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations par une communication en date du 16 décembre 1996.
498. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
499. A sa session de juin 1996, le comité a formulé les recommandations suivantes sur des allégations restées en instance [voir 304e rapport, paragr. 473]:
B. Réponse du gouvernement
500. Dans une communication en date du 16 décembre 1996, le gouvernement a fait parvenir les observations suivantes en réponse aux demandes formulées par le comité dans les recommandations susmentionnées:
501. En rapport avec les allégations concernant les licenciements massifs survenus dans l'entreprise sidérurgique du Pérou SA, le comité prend note des observations du gouvernement, mais lui demande une nouvelle fois de prendre les mesures nécessaires à l'avenir pour que, dans le cas où ce type de programme de cessation volontaire du contrat de travail devrait être appliqué, il ne soit pas utilisé pour procéder à des licenciements antisyndicaux. Le comité prie de nouveau le gouvernement de le tenir informé de l'issue des recours interjetés devant la Cour suprême par certains dirigeants syndicaux licenciés.
502. S'agissant de l'allégation de gel des fonds syndicaux du SIDERPERU, le comité prend note des indications du gouvernement selon lesquelles les dirigeants syndicaux eux-mêmes ont demandé l'endossement des dépôts judiciaires effectués par l'entreprise et ont retiré les montants afférents aux cotisations syndicales. Le comité note également que les procédures non contentieuses entre l'entreprise et le syndicat qui se déroulent devant les tribunaux ne se réfèrent pas à la question des fonds syndicaux.
503. S'agissant de l'interdiction faite aux travailleurs en période d'essai de s'affilier aux organisations de leur choix, le comité note avec intérêt que le gouvernement informera le Congrès de la République de sa demande visant à supprimer cette interdiction afin qu'elle soit prise en considération au moment de la discussion du projet de loi tendant à modifier la loi sur les relations collectives de travail. En ce qui concerne l'évolution de la préparation du projet de loi sur les relations collectives de travail considéré par les organisations plaignantes comme contraire à la liberté syndicale, le comité note que, selon les déclarations du gouvernement, ce projet n'a pas été approuvé par le Congrès. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toute évolution dans la préparation du projet de modification de la loi sur les relations collectives du travail mentionné par le gouvernement et signale cet aspect du cas à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
504. En ce qui concerne les allégations concernant le licenciement arbitraire de plus de 120 travailleurs, dont un dirigeant syndical, le comité note que, selon les recherches effectuées par le gouvernement, en conformité avec l'article 71 de la loi no 26513, l'entreprise Electrolima SA a, pour des raisons financières, licencié 95 travailleurs et que 94 d'entre eux ont perçu une indemnisation et des avantages sociaux sans avoir interjeté aucune demande d'annulation du licenciement. S'agissant de M. Iván Arias Vildoso, ancien dirigeant syndical, le comité prend note que le juge a déclaré fondée la demande de ce dernier et ordonné sa réintégration, le paiement des salaires non perçus ainsi que la régularisation des autres prestations liées au travail. L'entreprise a fait appel de cette décision devant une juridiction supérieure. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de la décision définitive rendue par le tribunal supérieur.
505. Pour ce qui est des licenciements arbitraires massifs intervenus dans l'entreprise Manufacturera del Sur SA allégués par la CLAT, le comité prend dûment note que, sur 122 travailleurs devant faire l'objet d'un licenciement collectif pour des raisons économiques et de restructuration de l'entreprise, grâce à la conciliation du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, les parties, sur la base d'une convention collective, sont convenues de ramener le nombre de départs volontaires à 16 travailleurs qui ont perçu leurs prestations sociales et une indemnité de départ. En rapport avec les licenciements intervenus dans l'entreprise Agraria El Escorial, le comité note que, selon les informations du gouvernement, cette entreprise a mis fin à la relation de travail de deux travailleurs seulement qui n'étaient pas dirigeants syndicaux et ont reçu leurs avantages sociaux.
506. En ce qui concerne les licenciements de 15 dirigeants syndicaux et de 55 travailleurs syndiqués survenus dans l'Entreprise nationale des chemins de fer du Pérou (ENAFER), le comité note que, selon les observations du gouvernement, attendu que l'entreprise relève du domaine d'application de la loi no 26120 sur le processus de privatisation, l'ENAFER a procédé à une réduction de personnel. A cet égard, le comité rappelle à l'attention du gouvernement que un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi -- licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables -- et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 724.] Le comité prie le gouvernement de faire mener une enquête indépendante sur les licenciements dont ont été l'objet les dirigeants syndicaux et syndicalistes, et de le tenir informé à cet égard. Le comité, comme il l'a signalé dans des cas similaires, demande une nouvelle fois que, dans le cas où il serait nécessaire d'appliquer de nouveaux programmes de réduction du personnel, des négociations aient lieu entre les entreprises concernées et les organisations syndicales. [Voir 291e rapport, cas nos 1648/1650, Pérou, paragr. 472.] De même, le comité prie une nouvelle fois le gouvernement d'adopter les mesures nécessaires pour qu'à l'avenir l'application de ces programmes de réduction du personnel ne soit pas utilisée pour procéder à des actes de discrimination antisyndicale.
507. En ce qui concerne les licenciements intervenus dans la clinique San Antonio Vitarte, le comité prend note des observations du gouvernement selon lesquelles dans la procédure de licenciement collectif effectuée par l'entreprise aucun dirigeant syndical n'a été inclus et que l'unique dirigeante syndicale, Mme Victoria Castro Muños, qui avait été licenciée, comme cela a été signalé dans le cas no 1784, a été réintégrée à son poste de travail suite à une décision judiciaire.
508. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandation suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Pérou
présentée par
-- le Syndicat des travailleurs de la Fabrique
de chaussures péruvienne SA (STFCP)
-- le Syndicat des travailleurs de la Compagnie péruvienne
de téléphone (STCPT) et
-- le Syndicat unifié des travailleurs de l'électricité (SUTREL)
Allégations: violations du droit de négociation collective
509. Le comité a examiné ce cas à sa session de mars 1996, où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 302e rapport, paragr. 495 à 518, approuvé par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996).] Par une communication datée du 28 janvier 1997, le gouvernement a envoyé de nouvelles observations.
510. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
511. Lors de l'examen antérieur du cas, une allégation était restée en instance concernant la "convention individuelle" (jointe par le plaignant) par laquelle l'entreprise Luz del Sur SA octroyait, avant que ne commence la négociation collective, une augmentation de rémunération et d'autres prestations aux travailleurs non syndiqués. Le comité a prié le gouvernement de communiquer d'urgence ses observations à ce sujet. [Voir 302e rapport, paragr. 518 d).]
512. Concrètement, le Syndicat unifié des travailleurs de l'électricité (SUTREL) [voir 302e rapport, paragr. 501] a fait savoir qu'avant le début de la négociation collective l'entreprise Luz del Sur SA avait remis aux travailleurs une convention individuelle (dont il joint une copie) qui octroyait une augmentation de la rémunération et d'autres prestations au personnel non syndiqué pour l'amener à quitter le SUTREL. Un extrait de cette convention individuelle est reproduit ci-après:
Il est établi par le présent document une convention individuelle portant augmentation de rémunération et octroi de prestations parallèles entre, d'une part, la société Luz del Sur représentée par M. César Berghüsen G., directeur des ressources humaines, et, d'autre part, le travailleur salarié non syndiqué qui souscrit la présente convention, ci-après dénommé "le travailleur", selon les conditions et les modalités suivantes:
PRIMO -- La présente convention s'inscrit dans le cadre de la proposition relative à l'augmentation de la rémunération et à d'autres prestations faite par Luz del Sur au personnel salarié non syndiqué en considération du fait que la majorité absolue des salariés de l'entreprise, ce qui ne comprend pas le personnel de direction et de confiance, n'est pas affiliée à quelque organisation syndicale que ce soit, et n'est donc pas couverte par les conventions collectives conclues pour la période 1994-95 par les syndicats qui, aux termes de la loi, ne les représentent pas; la proposition qui est acceptée par le travailleur se substitue aux prestations perçues par le personnel salarié syndiqué par suite de la négociation collective d'octobre 1994 -- septembre 1995.
SECUNDO -- Eu égard à la teneur de la première clause, Luz del Sur convient avec le travailleur de lui fournir les prestations suivantes:
Les parties se déclarent d'accord avec les clauses ci-dessus et y souscrivent. Fait à Lima le .... avril 1995.
Luz del Sur
Le travailleur.
B. Réponse du gouvernement
513. Dans sa communication datée du 28 janvier l997, le gouvernement fait savoir que le premier paragraphe de l'article 9 du décret-loi no 25593 (loi sur les relations collectives du travail) dispose qu'en matière de négociation collective le syndicat qui regroupe la majorité absolue des travailleurs de son secteur d'activité représente la totalité des travailleurs, y compris ceux qui ne sont pas syndiqués. L'article 42 dispose que la convention collective du travail lie les parties qui l'ont adoptée, les personnes au nom desquelles elle a été conclue et auxquelles elle est applicable, ainsi que les travailleurs qui intègrent ultérieurement les entreprises couvertes par la convention, à l'exception de ceux qui occupent des postes de direction ou de confiance. Par ailleurs, l'article 43 dispose dans son alinéa a) que la convention collective de travail a pour effet de modifier de plein droit les aspects de la relation de travail auxquels elle s'applique, et que les contrats individuels sont automatiquement alignés sur la convention et ne peuvent contenir de dispositions contraires préjudiciables au travailleur. On peut en déduire que les accords collectifs conclus en application du décret-loi no 25593 doivent prévaloir sur les contrats individuels dans la mesure où a) le syndicat regroupe la majorité absolue des travailleurs de son secteur d'activité, et b) les prestations octroyées par la convention sont plus avantageuses que celles prévues par le contrat individuel. En ce sens, l'ordre juridique vise à protéger les intérêts des travailleurs dans un contexte d'équité et de justice, afin d'assurer la paix sociale, garante du développement national.
514. Le comité note que l'organisation plaignante conteste les conventions individuelles proposées par l'entreprise Luz del Sur SA aux travailleurs non syndiqués dans la mesure où elles prévoient une augmentation de la rémunération et d'autres prestations destinées à se substituer aux prestations perçues par le personnel salarié syndiqué par suite de la négociation collective d'octobre 1994 -- septembre 1995.
515. Le comité prend note des déclarations du gouvernement, notamment de ce que les conventions collectives conclues en application du décret-loi no 25593 (loi sur les relations collectives du travail) doivent prévaloir sur les contrats individuels dans la mesure où a) le syndicat regroupe la majorité des travailleurs de son secteur, et b) les prestations octroyées sont plus avantageuses que celles dont il a été convenu antérieurement.
516. Le comité note que le gouvernement n'a pas envoyé d'observations particulières sur la légalité et la portée des conventions individuelles proposées par l'entreprise Luz del Sur SA et contestées par l'organisation plaignante et qu'il se réfère uniquement aux dispositions du décret-loi no 25593 (loi sur les relations collectives du travail). Le comité déduit des dispositions légales citées par le gouvernement que l'organisation plaignante (SUTREL) ne regroupe pas la majorité absolue des travailleurs, ce qui autorise la conclusion de conventions individuelles dans les conditions indiquées au paragraphe précédent.
517. Le comité considère que, lorsque l'entreprise, au cours de négociations avec le syndicat, offre en même temps aux travailleurs non syndiqués une amélioration des conditions de travail par le biais de conventions individuelles, il existe un risque sérieux de réduire la capacité de négociation du syndicat et d'engendrer une discrimination au profit du personnel non syndiqué; en outre, cela peut encourager les travailleurs syndiqués à quitter leur syndicat.
518. Dans ces conditions, le comité prie instamment le gouvernement de faire en sorte que les conventions individuelles proposées par l'entreprise Luz del Sur SA aux travailleurs non syndiqués ne pénalisent pas les travailleurs inscrits au SUTREL ni ne réduisent la capacité de négociation de ce dernier.
519. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité prie instamment le gouvernement de faire en sorte que les conventions individuelles proposées par l'entreprise Luz del Sur SA aux travailleurs non syndiqués ne pénalisent pas les travailleurs inscrits au SUTREL ni ne réduisent la capacité de négociation de ce dernier.
Rapport intérimaire
Plaintes contre le gouvernement du Pérou
présentées par
-- le Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de
l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS) et
-- le Syndicat unique des travailleurs de la Société péruvienne
de radiodiffusion (SUTRACPR)
Allégations: refus d'enregistrer une organisation syndicale,
refus d'une institution de négocier collectivement et actes antisyndicaux
520. Les plaintes qui font l'objet du cas présent figurent dans des communications du Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS), datées des 9 et 25 avril, 28 octobre, 15 novembre, 11 décembre 1996 et 29 janvier 1997, et du Syndicat unique des travailleurs de la Société péruvienne de radiodiffusion (SUTRACPR) du 16 août 1996. Dans des communications datées des 28 janvier et 28 février 1997, le gouvernement a fait parvenir ses commentaires.
521. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. Allégations des plaignants
522. Le Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS) allègue que le ministère du Travail et de la Promotion sociale a refusé d'enregistrer le Syndicat unitaire national des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUNTAEIPSS). L'organisation plaignante ajoute que le ministère du Travail explique son refus en alléguant, d'une part, que cette organisation et le SUTAEIPSS constituent la même organisation syndicale et, d'autre part, que, puisque le SUTAEIPSS a été enregistré en qualité de syndicat de fonctionnaires par l'Institut de l'administration publique (INAP), le fait d'enregistrer le SUNTAEIPSS dotera la première organisation d'une double personnalité.
523. Le SUTAEIPSS (organisation plaignante) allègue que le ministère du Travail a commis une erreur de jugement, puisque l'organisation reconnue par l'INAP est d'ampleur régionale, tandis que le SUNTAEIPSS, bien que constitué par les mêmes affiliés que le SUTAEIPSS est d'ampleur nationale, que c'est une nouvelle organisation syndicale qui compte plus d'une filiale et qu'elle a été constituée conformément à la loi des relations collectives de travail (décret-loi no 25593). L'organisation plaignante ajoute que le SUNTAEIPSS a tenté de se faire enregistrer par le ministère du Travail car, comme l'INAP avait été dissous et qu'il s'agissait de l'entité chargée de l'enregistrement des syndicats de fonctionnaires, ceux-ci se sentaient privés de protection et de recours s'agissant de défendre leurs droits syndicaux. L'organisation plaignante conclut que, compte tenu de la proposition du président de la Commission du travail et de la sécurité sociale du Congrès de la République, proposition qui consiste à assujettir tous les fonctionnaires au régime du secteur privé, la prétention du SUNTAEIPSS d'être enregistré auprès du ministère du Travail était d'autant plus justifiée.
524. En outre, l'organisation plaignante allègue que l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS) a refusé à plusieurs reprises de négocier les cahiers de revendications correspondant aux années 1994, 1995 et 1996, concernant les augmentations de salaire, les conditions de travail et autres prestations sociales. L'IPSS a persisté dans son refus bien que le SUTAEIPSS ait exprimé sa volonté d'arriver à un accord et de réduire à quatre points seulement les diverses réclamations contenues dans les trois plis pétitoires.
525. Dans une communication datée du 16 août 1996, le Syndicat unique des travailleurs de la Société péruvienne de radiodiffusion (SUTRACPR) allègue que cette dernière a imposé un programme généralisé de requalifications de postes à 230 travailleurs qui occupent ainsi des postes de confiance. Ces travailleurs sont tous des syndicalistes parmi lesquels se trouvent des dirigeants syndicaux. Compte tenu du fait qu'en vertu de la législation nationale les travailleurs assurant des postes de confiance ne sont pas autorisés à constituer des syndicats ni à être couverts par la négociation collective, on peut en déduire que, par cette mesure, l'entreprise tente de faire disparaître l'organisation syndicale.
B. Réponse du gouvernement
526. Pour ce qui est du refus du ministère du Travail et de la Promotion sociale d'enregistrer le Syndicat unitaire national des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUNTAEIPSS), dans une communication datée du 28 janvier 1997, le gouvernement fait savoir que le Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS) est une organisation syndicale de fonctionnaires qui représente tous ses affiliés au niveau national et qui est inscrite au registre de l'ancien Institut d'administration publique (INAP); d'une part, comme le reconnaît l'organisation plaignante, le SUNTAEIPSS est constitué des mêmes travailleurs que le SUTAEIPSS et, d'autre part, les représentants syndicaux sont aussi les mêmes, de sorte que les deux organisations syndicales ont une identité commune. Le gouvernement avance que la preuve la plus concrète de cette communauté d'identité est le fait que la plainte dont a été saisie l'OIT a été présentée par le SUTAEIPSS et non pas par l'organisation intéressée, à savoir le SUNTAEIPSS.
527. Le gouvernement ajoute que l'organisation plaignante apporte des arguments en faveur de la position du gouvernement puisqu'elle affirme qu'à aucun moment elle n'a souhaité cumuler deux personnalités juridiques, à savoir la première qu'elle tenait de l'INAP et une deuxième qu'elle aurait tenté d'obtenir du ministère du Travail, mais à un autre titre que celui du SUTAEIPSS au niveau national. Le gouvernement affirme que l'organisation plaignante ne souhaitait pas un simple changement de nom, mais plutôt l'élimination du SUTAEIPSS, car elle croyait ainsi pouvoir élargir sa base d'affiliés aux travailleurs assujettis au régime social du secteur privé.
528. Par ailleurs, le gouvernement indique que les droits collectifs des fonctionnaires sont régis par des dispositions spécifiques telle la loi sur la carrière administrative qui consacre le droit d'organisation; ainsi, le SUNTAEIPSS ne pouvait être constitué en vertu de la loi des relations collectives de travail puisque cette loi s'applique aux travailleurs du secteur privé ou aux entreprises d'Etat assujetties au régime de ce même secteur. Le gouvernement fait savoir également que, conformément à la loi no 25636, les salariés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS), qui sont demeurés à leur poste de travail après l'application d'un processus de rationalisation du personnel, peuvent en principe choisir entre deux options: poursuivre leurs activités dans le cadre du régime social public ou être assujettis au régime du secteur privé, tandis que le personnel recruté dorénavant sera d'office assujetti au régime du secteur privé et pourra donc constituer des organisations syndicales en vertu du décret-loi no 25593. Le gouvernement indique que cette possibilité a permis la coexistence des deux régimes juridiques sociaux, l'un public et l'autre privé, car après le processus de rationalisation tous les travailleurs qui sont demeurés à leur poste de travail n'ont pas choisi le régime privé, ce qui explique que le SUTAEIPSS représente les travailleurs assujettis au régime public.
529. Le gouvernement conclut que, même si la disparition de l'INAP a provoqué un vide juridique en ce qui concerne l'inscription et l'enregistrement des organisations syndicales de fonctionnaires, cela ne signifie pas que ces organisations ne puissent pas se constituer pour défendre les droits de leurs affiliés puisque l'inscription dans un registre syndical n'est pas une condition indispensable à leur existence, et que leur constitution dépend en fait de la seule volonté des travailleurs. Enfin, le gouvernement indique que, si la proposition du président de la Commission du travail et de la sécurité sociale du Congrès de la République mentionnée par l'organisation plaignante et qui a trait à l'assimilation de tous les fonctionnaires au régime social du secteur privé est retenue, plus rien ne viendra s'opposer à l'exercice des droits collectifs des fonctionnaires actuels, conformément au décret-loi no 25593 et de son règlement.
530. A propos des allégations relatives au refus de l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS) de négocier les cahiers de revendications correspondant aux années 1994, 1995 et 1996, le gouvernement fait savoir que, même si les fonctionnaires ne sont pas habilités à négocier collectivement des augmentations de salaire, ces augmentations peuvent être octroyées par l'administration dans la mesure où la situation budgétaire de l'organisme public concerné le permet et si cet organisme dispose de l'autorisation nécessaire. Le gouvernement explique que l'administration publique mène ses activités dans le cadre d'un budget, et qu'elle ne peut disposer de ressources plus importantes que celles qui sont spécifiquement assignées à chaque exercice budgétaire, compte tenu notamment du processus de restructuration et d'austérité que traverse l'Etat péruvien. L'octroi d'une augmentation de salaire aux fonctionnaires au cours d'une année budgétaire implique nécessairement la modification du budget déjà approuvé. Par conséquent, l'organisme correspondant ne peut octroyer à ses travailleurs aucune augmentation sans l'approbation du ministère de l'Economie et des Finances. Le gouvernement ajoute que le refus de l'IPSS de négocier des augmentations de salaire avec le SUTAEIPSS est conforme à l'existence d'un cadre budgétaire qu'il ne pouvait outrepasser et à des dispositions spécifiques dont le but est de rationaliser les dépenses publiques.
531. Le comité observe que, dans le cas présent, les plaintes font référence au refus d'enregistrer une organisation syndicale, au refus d'une institution de négocier collectivement les conditions d'emploi de ses travailleurs et au fait qu'une entreprise a commis des actes de nature antisyndicale.
532. Le comité prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement en ce qui concerne les raisons pour lesquelles le ministère du Travail et de la Promotion sociale a refusé d'enregistrer le Syndicat unitaire national des techniciens et des auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUNTAEIPSS). En particulier, le comité note que, conformément aux arguments avancés par le gouvernement, le Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS) est une organisation syndicale de fonctionnaires de caractère national, inscrite au registre de l'ancien Institut d'administration publique (INAP) et que, d'une part, et comme le reconnaît l'organisation plaignante, le SUNTAEIPSS est constitué par les travailleurs affiliés au SUTAEIPSS et, d'autre part, que les représentants syndicaux des deux organisations sont les mêmes, de sorte que ces deux organisations ont la même identité.
533. En outre, le comité note que les droits collectifs des fonctionnaires sont régis par des dispositions spécifiques, comme la loi sur la carrière administrative qui consacre le droit d'organisation, de sorte que le SUNTAEIPSS ne pouvait être constitué conformément à la loi de relations collectives de travail, puisque cette loi s'applique aux travailleurs du secteur privé ou à des entreprises d'Etat assujetties au régime de ce secteur.
534. Le comité note également que, conformément à la loi no 25636, les fonctionnaires de l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS), qui sont demeurés à leur poste de travail après l'application d'un processus de rationalisation du personnel, auraient le choix entre poursuivre leurs activités dans le cadre du régime social public ou être assujettis au régime du secteur privé, et que le personnel recruté dorénavant sera, quant à lui, assujetti d'office au régime du secteur privé et pourra donc constituer des organisations syndicales en vertu du décret-loi no 25593. Par ailleurs, le comité note que, conformément aux indications du gouvernement, les travailleurs qui sont demeurés à leur poste de travail n'ont pas tous choisi le régime du secteur privé, ce qui explique que le SUTAEIPSS représente les travailleurs assujettis au régime social public.
535. Compte tenu de ce qui précède, le comité observe qu'il s'agit d'une situation complexe dans laquelle coexistent deux régimes juridiques sociaux, l'un public et l'autre privé, au sein d'une même institution publique, à savoir l'IPSS, et que, dans ces conditions, certains travailleurs (ceux auxquels s'applique le régime privé) ne sont pas en mesure de constituer librement les organisations de leur choix ni d'élire leurs représentants. A cet égard, le comité prie le gouvernement d'adopter les mesures nécessaires pour que le principe susmentionné soit respecté, conformément aux articles 2 et 3 de la convention no 87.
536. A propos du refus de l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS) de négocier les cahiers de revendications correspondant aux années 1994, 1995 et 1996, au motif que les fonctionnaires ne sont pas autorisés à négocier collectivement des augmentations de salaire, le comité rappelle que, lorsque le Pérou a ratifié les conventions nos 98 et 151, le gouvernement s'est engagé à prendre des mesures appropriées pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation de procédures permettant la négociation collective des conditions d'emploi.
537. Quant aux contraintes budgétaires auxquelles sont soumis les organismes publics et au fait que l'organisme public doit compter avec l'autorisation du ministère de l'Economie et des Finances pour pouvoir octroyer une augmentation de salaire à ses fonctionnaires, comme l'indique le gouvernement, le comité a indiqué, dans un cas similaire, qu'il était conscient du fait que la négociation collective dans le secteur public exige la vérification des ressources disponibles au sein des divers organismes ou entreprises publics, et que ces ressources dépendent du budget de l'Etat, ce qui peut poser des difficultés. Cependant, le comité a indiqué que l'on devrait prévoir un mécanisme afin que les organisations syndicales et les employeurs soient consultés lors des négociations collectives dans le secteur public et puissent faire connaître leur point de vue à l'autorité chargée du contrôle des incidences financières des projets de conventions collectives. Cependant, indépendamment de toute opinion exprimée par les autorités financières, les parties en négociation devraient avoir la possibilité de conclure librement un accord. [Voir 287 e rapport, cas no 1617 (Equateur), paragr. 63 à 65.]
538. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les négociations collectives puissent avoir lieu entre l'Institut péruvien de sécurité sociale (IPSS) et le Syndicat unitaire des techniciens et auxiliaires spécialisés de l'Institut péruvien de sécurité sociale (SUTAEIPSS), et de prévoir un mécanisme afin que les organisations syndicales et les employeurs du secteur public soient consultés lors des négociations collectives dans le secteur public et puissent faire connaître leur point de vue à l'autorité chargée du contrôle des incidences financières des projets de conventions collectives.
539. En ce qui concerne l'allégation du Syndicat unique des travailleurs de la Société péruvienne de radiodiffusion (SUTRACPR), relative au fait que l'entreprise a commis des actes de nature antisyndicale, le comité se propose d'examiner cette allégation à la lumière de la récente communication du gouvernement du 28 février 1997.
540. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Pérou
présentée par
la Fédération syndicale mondiale (FSM)
Allégations: entrave à la négociation collective
au niveau de la branche d'activité -- persécution syndicale
541. La plainte figure dans une communication de la Fédération syndicale mondiale (FSM) du 20 septembre 1996. La FSM a présenté des informations complémentaires dans une communication du 2 décembre 1996.
542. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 23 janvier 1997.
543. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
544. Dans sa communication du 20 septembre 1996, la Fédération syndicale mondiale (FSM) conteste la décision de la Cour suprême de justice de la République déclarant inapplicable l'arrêté ministériel no 053-93-TR, qui étend la loi sur les relations collectives du travail et son règlement d'application à la négociation collective dans le secteur de la construction civile. Cet arrêté disposait dans son article 4 qu'"en application des articles 71 et 45 de la loi sur les relations collectives du travail, la négociation collective aura lieu au niveau de la branche d'activité, les parties pouvant cependant, d'un commun accord, modifier le niveau auquel la négociation aura lieu, ainsi que son champ d'application territoriale, les entreprises concernées et d'autres aspects délimitant et facilitant la négociation collective" (cet arrêté ministériel no 053-93-TR a été pris conformément au règlement d'application de la loi sur les relations collectives du travail, qui prévoit, dans sa quatrième disposition transitoire que le ministère du Travail et de la Promotion sociale, par arrêté du responsable du secteur, édicte les normes propres à étendre aux travailleurs de la construction civile le titre III de la loi [sur les relations collectives du travail]). L'organisation plaignante allègue que pour donner suite à cette décision de justice, le ministère du Travail a pris l'arrêté no 051-96-TR portant abrogation de l'arrêté ministériel no 053-93-TR et disposant que la négociation collective des travailleurs de la construction civile est soumise à la loi sur les relations collectives du travail [(articles 44, 45 et 46)], à son règlement d'application et aux dispositions du présent arrêté ministériel. Compte tenu de ce qui précède, l'organisation syndicale allègue que le cahier de revendications national présenté par la Fédération des travailleurs de la construction civile du Pérou (FTCCP) ne pourra être appliqué qu'au niveau de l'entreprise et que l'on empêche la négociation par branche d'activité. (On trouvera ci-après les articles susmentionnés de la loi sur les relations collectives du travail:
Article 44. La convention collective s'appliquera au cadre convenu par les parties, qui peut être:
Article 45. En l'absence d'une convention collective antérieure à l'un quelconque des niveaux indiqués à l'article précédent, les parties conviendront d'un commun accord du niveau auquel sera réalisée la première convention. Faute d'accord, la négociation sera réalisée au niveau de l'entreprise.
S'il existe une convention à quelque niveau que ce soit, il est indispensable, pour entamer la négociation d'une convention substitutive ou complémentaire à un autre niveau, qu'un accord se fasse entre les parties car il ne peut être atteint par voie administrative ou sentence arbitrale.
Les conventions de niveau distinct souscrites par les parties devront être agencées de façon à définir les matières qui seront traitées par chaque convention. En cas de conflit, la convention la plus favorable sera appliquée en comparant les conventions dans leur intégralité.
Au niveau de l'entreprise, il pourra y avoir négociation de questions non abordées dans une convention de niveau supérieur qui réglementent les conditions de travail propres et exclusives à l'entreprise ou s'y rapportent.
Article 46. Pour réaliser une convention collective par branche d'activité ou par corporation, il faut que l'organisation syndicale ou les organisations syndicales représentent la majorité des entreprises et des travailleurs de ladite activité ou de ladite corporation, au niveau local, régional ou national, et que soient convoquées, directement ou indirectement, toutes les entreprises concernées.)
545. Dans sa communication du 2 décembre 1996, la FSM allègue la persécution des dirigeants syndicaux de la Fédération des travailleurs de la construction civile du Pérou (FTCCP), et notamment la condamnation, à un an de prison avec sursis, de M. José Luis Risco Montalván, secrétaire général, et de MM. Mario Huaman Rivera et Víctor Herrera Rubiños, secrétaires, pour le délit supposé d'atteinte à l'ordre public commis en novembre 1991 au cours d'un conflit syndical visant à obtenir le rétablissement du cahier de revendications national unique.
B. Réponse du gouvernement
546. Dans sa communication du 23 janvier 1997, le gouvernement déclare que la loi sur les relations collectives du travail, dans son article 44, dispose que la convention collective s'appliquera au cadre convenu par les parties, qui peut être celui de l'entreprise (quand la convention s'applique à tous les travailleurs d'une catégorie, d'une section ou d'un établissement déterminés de cette entreprise), celui de la branche d'activité (quand la convention englobe tous les travailleurs d'une même activité économique ou ceux d'une partie déterminée de cette branche), ou celui de la profession (quand la convention s'applique à tous les travailleurs qui exercent une même profession, un même métier ou une même spécialité dans des entreprises diverses); c'est affirmer clairement le principe de la liberté du choix du niveau de négociation. En vertu de ce principe, une partie ne peut obliger l'autre à négocier à un niveau plutôt qu'un autre. Le gouvernement fait valoir la quatrième disposition transitoire du décret suprême no 011-92-TR, aux termes de laquelle le ministère du Travail et de la Promotion sociale édicte les normes applicables au secteur de la construction, et il indique que l'arrêté ministériel no 053-93-TR, en application des dispositions dudit décret, a institué les règles destinées à faciliter la négociation collective des travailleurs de la construction civile sur la base du décret-loi no 25593 -- loi sur les relations collectives du travail -- et de son règlement d'application approuvé par décret suprême no 011-92-TR.
547. Le gouvernement ajoute que la Chambre péruvienne de la construction (CAPECO), dans l'exercice de l'une des garanties constitutionnelles consacrées par l'article 200 de la Constitution politique de l'Etat, a engagé une action populaire contre l'arrêté ministériel no 053-93-TR, se fondant sur le fait que celui-ci, en prévoyant que la négociation collective dans le secteur de la construction doit avoir lieu au niveau de la branche d'activité, contredit diverses dispositions légales et constitutionnelles, notamment la troisième disposition finale et transitoire du décret-loi no 25593 (loi sur les relations collectives du travail). Le gouvernement conteste toute ingérence dans le fonctionnement du pouvoir judiciaire, dans la mesure où c'est précisément une des parties à la négociation qui a demandé à la justice de trancher la question de savoir si, selon ses allégations, l'arrêté ministériel, outre qu'il lui porte atteinte, est contraire aux dispositions légales et constitutionnelles en la matière. Le ministère du Travail et de la Promotion sociale n'est pas intervenu et n'a exercé aucune influence sur la décision rendue en dernier ressort à l'issue d'un procès régulier, ce qui montre son respect pour l'autonomie et l'indépendance du pouvoir judiciaire.
548. Le gouvernement indique que la première chambre sociale de la Cour supérieure de justice de Lima a déclaré illégal et inapplicable l'arrêté ministériel no 053-93-TR, en se fondant sur les considérations suivantes: 1) le décret-loi no 25593, dans son article 45 et sa troisième disposition transitoire et finale, dispose qu'en l'absence d'accord entre les parties la négociation a lieu au niveau de l'entreprise. Pour entamer la négociation d'une convention à un autre niveau, l'accord des parties est indispensable, car il ne peut être atteint par voie administrative ou sentence arbitrale; ce principe du respect de la volonté des parties établi par la loi est violé par l'arrêté ministériel susmentionné, car celui-ci impose aux parties une négociation par branche d'activité, transgressant ainsi l'article 211, alinéa 11, de la Constitution de 1979 sous l'empire duquel l'action populaire a été engagée (article 118, alinéa 8, de la Constitution de 1993); 2) il n'est pas possible d'invoquer l'article 71 du décret-loi no 25593, qui réglemente les négociations qui ont lieu par l'intermédiaire de commissions paritaires ou multipartites et d'autres cas particuliers, pour alléguer la validité de l'arrêté ministériel susmentionné car, en application de la quatrième disposition transitoire et finale du décret suprême no 011-92-TR -- règlement d'application du décret-loi no 25593 (qui dispose que le ministère du Travail et de la Promotion sociale, par arrêté du responsable du secteur, édicte les règles soumettant les travailleurs de la construction civile au décret-loi no 25593), au moment où cet arrêté ministériel a été pris, les travailleurs de la construction n'étaient pas censés négocier par l'intermédiaire de commissions tripartites puisque la quatrième disposition transitoire et finale du décret suprême no 011-92-TR a abrogé le décret suprême no 018 du 4 décembre 1982 portant création d'une commission nationale de la construction civile. La seule option possible était donc la négociation collective au niveau fixé par les parties (la branche d'activité ou l'entreprise), aussi aurait-il suffi de soumettre les travailleurs de la construction civile au titre III de la loi, comme le prévoyait la quatrième disposition transitoire et finale déjà mentionnée; cependant, l'arrêté ministériel no 053-93-TR est allé plus loin que cette simple extension de la loi aux travailleurs de la construction civile, violant ainsi les principes constitutionnels en matière de hiérarchie des normes; 3) la loi sur les relations collectives du travail consacre un système de négociation collective souple, c'est pourquoi il ne fait aucun doute que la troisième disposition finale et transitoire du décret-loi no 25593 autorisait la Chambre péruvienne de la construction à décider que la négociation aurait lieu au niveau de l'entreprise; en ce sens, l'arrêté ministériel no 053-93-TR, en fixant le niveau auquel les travailleurs de la construction civile doivent négocier, niant du même coup la liberté de négociation des parties, opère un dépassement des attributions que le décret suprême no 011-92-TR confère au ministère du Travail et de la Promotion sociale.
549. Le gouvernement ajoute qu'en deuxième et dernier ressort la Cour suprême de justice de la République, par arrêt du 24 avril 1996, a confirmé la décision de la Cour supérieure de justice de Lima déclarant fondée l'action entamée par la Chambre péruvienne de la construction (CAPECO) contre le ministère du Travail et de la Promotion sociale, et donc l'inapplicabilité de l'arrêté ministériel no 053-93-TR à la négociation collective dans le secteur de la construction civile à partir du lendemain de sa publication. L'arrêt de la Cour suprême se fonde sur les motifs suivants: 1) dans son avis, le Procureur de la République indique que c'est l'objet même de l'action de garantie (acción de garantía) de faire déclarer illégal et inapplicable l'arrêté ministériel no 053-93-TR, qui soumet la négociation collective des travailleurs de la construction civile à la loi sur les relations collectives du travail et à son règlement d'application. L'article 45 de cette loi dispose que, à défaut d'accord, la négociation collective sera réalisée au niveau de l'entreprise; que, pour entamer la négociation à un autre niveau, un accord doit se faire entre les parties car il ne peut être atteint par voie administrative ou sentence arbitrale. En ce sens, l'article 4 de l'arrêté susmentionné, en disposant que la négociation collective doit avoir lieu au niveau de la branche d'activité et non à celui de l'entreprise, viole l'alinéa 11) de l'article 211 de la Constitution de 1979, applicable à cette époque; 2) l'arrêté ministériel susmentionné édicte des normes de portée générale qui rendent la loi sur les relations collectives du travail applicables à la négociation collective des travailleurs de la construction civile. Ces normes de portée générale doivent céder le pas à celles situées à un niveau supérieur de la hiérarchie, comme c'est le cas du décret-loi no 25593. En ce sens, l'article 45 de ce décret-loi dispose que, en l'absence d'une convention collective antérieure à l'un des niveaux indiqués à l'article 44, les parties doivent convenir d'un niveau qui, à défaut, sera celui de l'entreprise; l'article 45 indique également que, s'il existe une convention à quelque niveau que ce soit, une autre convention ne peut être négociée à un autre niveau qu'avec l'accord des parties; 3) par ailleurs, la troisième disposition finale et transitoire du décret-loi no 25593 dispose que les entreprises ou corporations concernées par une négociation collective en cours au niveau de la branche d'activité doivent confirmer leur volonté de continuer à négocier à ce niveau dans les trente jours qui suivent l'entrée en vigueur du décret-loi; à défaut d'accord, le niveau de négociation reste celui de l'entreprise; 4) l'arrêté ministériel no 053-93-TR impose que la négociation ait lieu au niveau de la branche d'activité et contredit par conséquent le décret-loi no 25593 (loi sur les relations collectives du travail), violant ainsi le principe de légalité; la Cour suprême confirme donc la décision qui déclare fondée l'action populaire.
550. Enfin, le gouvernement déclare que, pour donner effet à la décision de justice, le ministère du Travail et de la Promotion sociale a pris l'arrêté ministériel no 051-96-TR; cet arrêté, qui privilégie la volonté des parties dans la détermination du niveau de négociation (par défaut celui de l'entreprise, comme le prévoit l'article 45 de la loi sur les relations collectives du travail), est compatible avec les normes nationales et les normes internationales en la matière, ces dernières ayant été ratifiées par le Pérou.
551. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante conteste l'abrogation de l'arrêté ministériel no 053-93-TR qui disposait que, dans le secteur de la construction civile, la négociation devait avoir lieu au niveau de la branche d'activité, ainsi que l'application en ses lieu et place des dispositions de la loi sur les relations collectives du travail qui régissent la détermination du niveau de la négociation collective.
552. En rapport avec les allégations présentées, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: i) l'article 44 de la loi sur les relations collectives du travail dispose que la convention collective est applicable au cadre convenu par les parties, consacrant ainsi la liberté des parties dans la détermination du niveau de négociation; ii) l'arrêté ministériel no 053-93-TR établissait des règles destinées à faciliter la négociation collective des travailleurs de la construction civile en se fondant sur la loi sur les relations collectives du travail; iii) la Chambre péruvienne de la construction (CAPECO) a saisi les autorités judiciaires contre l'arrêté no 053-93-TR; iv) les autorités judiciaires ont déclaré inapplicable l'arrêté ministériel no 053-93-TR au motif, entre autres, que "la loi sur les relations collectives du travail consacre un système de négociation collective souple ..." et que "l'arrêté ministériel no 053-93-TR dépasse les attributions que le décret suprême no 011-92-TR confère au ministère du Travail et de la Promotion sociale, car il détermine le niveau auquel doit négocier le secteur de la construction civile, portant ainsi atteinte à la liberté de négociation des parties"; et v) pour donner effet à la décision de justice, le ministère du Travail et de la Promotion sociale a pris l'arrêté ministériel no 051-96-TR, qui privilégie la volonté des parties dans la détermination du niveau de négociation et qui dispose que, si les parties ne se mettent pas d'accord, la négociation doit avoir lieu au niveau de l'entreprise, conformément à la norme générale de l'article 45 de la loi sur les relations collectives du travail.
553. A cet égard, le comité observe qu'il a déjà eu, avant la présente plainte, l'occasion d'examiner des allégations relatives à des entraves légales et matérielles à la négociation collective au niveau de la branche d'activité; la contestation portait sur les dispositions de la loi sur les relations collectives du travail qui déterminent le niveau auquel la négociation collective a lieu. [Voir 302e rapport, cas no 1845, paragr. 514, 515 et 518 b).] Par conséquent, le comité rappelle les conclusions qu'il avait formulées à cette occasion: le principe de la négociation collective libre et volontaire visée à l'article 4 de la convention veut que la détermination du niveau de négociation résulte essentiellement de la volonté des parties et que, par conséquent, ce niveau ne soit pas déterminé par la législation; "l'obligation de rassembler non seulement la majorité des travailleurs mais encore la majorité des entreprises pour pouvoir conclure des conventions collectives par branche d'activité ou corporation, comme le prévoit l'article 46 de la loi de 1992 sur les relations collectives du travail, peut poser des problèmes de compatibilité par rapport à la convention no 98". Comme il l'avait déjà fait à cette occasion, "le comité demande au gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, des mesures pour modifier la législation, de façon que les organisations de travailleurs, les employeurs et leurs organisations puissent exercer librement et sans entrave le droit de négociation collective à tous les niveaux".
554. En ce qui concerne l'allégation relative à la persécution des dirigeants syndicaux de la Fédération des travailleurs de la construction civile du Pérou (FTCCP), et plus précisément le fait d'avoir condamné à un an de prison avec sursis M. José Luis Risco Montalván, secrétaire général, et MM. Mario Huamán Rivera et Victor Herrera Rubiños, secrétaires, pour le délit supposé d'atteinte à l'ordre public commis en novembre 1991 au cours d'un conflit syndical visant à obtenir le rétablissement du cahier de revendications national unique, le comité demande au gouvernement qu'il communique ses observations à ce sujet.
555. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la Roumanie
présentée par
la Confédération nationale des syndicats libres
de Roumanie-FRATIA (CNSLR-FRATIA)
Allégations: intervention policière dans un conflit du travail,
atteintes au droit de grève
556. La Confédération nationale des syndicats libres de Roumanie-FRATIA (CNSLR-FRATIA) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de la Roumanie, dans une communication datée du 19 juin 1996. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à cette plainte dans une communication du 8 juillet 1996. Le gouvernement a soumis ses observations dans une communication en date du 28 octobre 1996.
557. La Roumanie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
558. Dans sa communication du 19 juin 1996, la CNLSR-FRATIA indique qu'elle porte plainte au nom de ses affiliés, le Syndicat libre et le Syndicat Viitorul (L'avenir) de la société commerciale CELROM SA, Drobeta Turnu Severin, département de Mehedinti. La CNLSR-FRATIA se réfère premièrement à l'action de la police contre les grévistes de la société CELROM SA et deuxièmement à certaines dispositions de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, particulièrement l'article 30.
559. Selon l'organisation plaignante, pendant la nuit du 19 au 20 mars 1996, la police a utilisé la force contre les grévistes. L'organisation fait valoir que cette action viole le droit des syndicats d'organiser et de formuler leurs programmes d'action énoncé à l'article 3 de la convention no 87. L'organisation explique que les travailleurs étaient en grève après des essais infructueux de la Direction du travail et de la sécurité sociale en vue de résoudre le conflit par la conciliation et après des négociations qui se sont déroulées sans succès entre les représentants des syndicats et des salariés et la direction de l'entreprise.
560. L'intervention de la police s'est déroulée à 4 heures du matin. Elle était motivée par l'exécution d'une décision judiciaire qui visait à rétablir l'accès de la direction dans l'entreprise. La grève ayant eu lieu avec occupation des lieux de travail, les grévistes se trouvaient à l'intérieur de l'entreprise. L'organisation plaignante allègue que la police est entrée en attaquant les grévistes, malgré le fait que la loi prévoit d'autres moyens (tels que l'élaboration de dossiers de mise en jugement); en outre, elle est entrée pendant la nuit, alors que la loi précise que cela ne peut se faire avant 8 heures du matin, et elle n'était pas accompagnée par des huissiers ou par le procureur. Elle est donc intervenue violemment contre des travailleurs qui exerçaient pacifiquement leur droit de grève, alors qu'il n'y avait eu ni destruction de biens ni aucun autre acte de violence.
561. D'après les documents communiqués par les plaignants, la société CELROM SA produit du carton ondulé et du papier. Elle compte 1 200 travailleurs, dont 800 environ sont syndiqués au sein du syndicat CELROM et une trentaine auprès de deux autres syndicats. Le conflit du travail, qui a débuté le 15 février 1996, se situe dans un contexte complexe de privatisation. La grève déclenchée par le syndicat a été suivie d'une grève spontanée, menée par des représentants élus des grévistes. Ces derniers ont refusé d'appliquer la décision du tribunal visant l'accès de la direction dans l'entreprise. Après deux présentations infructueuses de la décision du tribunal par la police, celle-ci est intervenue, pendant la nuit du 19 au 20 mars 1996, avec un effectif de 200 à 300 hommes. Les syndicats ont immédiatement protesté contre cette action. Le 20 mars, la Cour suprême de justice a pris une décision de suspension de la grève pour une durée de 50 jours. Le ministère de l'Intérieur a fait une enquête sur le conflit, mais son rapport n'a pas été rendu public. Un représentant du syndicat CNSLR-FRATIA et un représentant de la CISL ont rencontré les grévistes et ont dressé un rapport, dont il ressort que les policiers ont enfoncé des portes de l'entreprise, gardée la nuit par une trentaine de grévistes, mais que, averties de l'intervention, environ 350 personnes s'étaient rendues sur les lieux; qu'il y a eu des affrontements entre la police et les grévistes, dont plusieurs ont reçu des coups et au moins un a été blessé. Les policiers ont quitté l'établissement vers 9 heures du matin. Le 9 avril, le tribunal de Mehedinti a rendu une décision définitive selon laquelle la grève était déclarée légale. Les salariés ont repris le travail le 13 mai 1996.
562. Sur le deuxième point, concernant la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, l'organisation plaignante cite la teneur de l'article 30 qui dispose: A la demande des directeurs des unités dans lesquelles un conflit collectif a été déclenché, la Cour suprême de justice peut suspendre le déclenchement ou la poursuite de la grève pour un délai de 90 jours au plus si les intérêts majeurs de l'économie nationale ou les intérêts d'ordre humanitaire sont affectés. Selon l'organisation plaignante, cette disposition a donné la possibilité à la Cour suprême de justice, par une interprétation abusive, de suspendre la grève dans la société CELROM SA pour une période de 50 jours. La CNLSR-FRATIA mentionne les commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT qui avait demandé au gouvernement de modifier la disposition en question. L'organisation plaignante souligne que l'article 30 de la loi en cause produit ses effets dans la suspension de la grève de CELROM SA et dans d'autres cas, sans que la preuve ait été faite que ces grèves affectaient des intérêts humanitaires ou l'économie nationale.
B. Réponse du gouvernement
563. Dans sa communication du 28 octobre 1996, le gouvernement affirme que l'intervention des forces de l'ordre dans le conflit collectif de la société CELROM SA s'est faite dans le cadre de l'observation des dispositions légales en la matière. En particulier, selon la loi no 26 de 1994 sur l'organisation et le fonctionnement de la police et l'article 373 du Code de procédure civile, les forces de l'ordre sont tenues d'accorder leur appui en vue de l'exécution d'une décision de justice et pour rétablir l'état de légalité. Le gouvernement relève que la grève déclenchée par les salariés de la société CELROM a été déclarée illégale par le tribunal de Drobeta Turnu Severin et par la sentence civile no 2354 du 14 mars 1996. Cette même instance, aux termes de l'article 581 du Code de procédure civile et de l'article 28 de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, a reconnu le droit du directeur de l'unité d'entrer dans l'établissement afin de remplir ses tâches. La décision judiciaire, selon le gouvernement, prévoit l'exécution d'office, sans sommation et sans délai.
564. Etant donné qu'il n'a pas été possible de mettre en application la sentence mentionnée, à cause de l'opposition des grévistes, poursuit le gouvernement, le tribunal a sollicité de manière expresse (par demande no 302/R/1996 fondée sur l'article 373, alinéa 4, du Code de procédure civile qui prévoit que, lorsque l'huissier le juge nécessaire, les forces de l'ordre sont tenues de lui accorder leur concours afin d'effectuer l'exécution forcée) l'appui de la police pour la mise en exécution de la décision judiciaire définitive. L'intervention des forces de police est également jusitifiée, selon le gouvernement, par les dispositions de l'article 46 (1) de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, qui prévoit que le fait, par menaces ou violences, d'empêcher ou d'obliger un salarié ou un groupe de salariés de participer à la grève ou de travailler durant la grève constitue une infraction punissable d'emprisonnement ou d'amende ou, le cas échéant, de peines plus graves. Les attributions de la police, conformément à l'article 1 de la loi no 26 sur l'organisation et le fonctionnement de la police, comportent celles qui visent la défense des droits et libertés fondamentaux des citoyens.
565. A la lumière des faits et des dispositions légales mentionnés, le gouvernement considère que l'intervention des forces de l'ordre à l'appui de l'huissier n'a pas visé à impliquer la police dans le conflit collectif dans la société CELROM SA, et que l'exercice du droit de grève des salariés de la société n'a pas été affecté.
566. En ce qui concerne l'article 30 de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, conformément aux prérogatives établies par la loi, aucune instance, y compris la Cour suprême de justice, ne peut suspendre l'exercice du droit de grève comme tel, c'est-à-dire le droit des syndicats de déclencher une grève. La disposition permet uniquement à la Cour suprême de justice de retarder le déclenchement ou de suspendre la grève.
567. Quant aux raisons de la suspension de la grève dans la société CELROM SA Drobeta Turnu Severin, elles étaient connues des parties par le contenu de la décision prononcée par la Cour suprême de justice.
568. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale se préoccupe en permanence du perfectionnement du système législatif dans le domaine du travail, en vue de l'harmonisation avec les réglementations européennes. La modification de la loi sur le règlement des conflits collectifs du travail en fait partie, mais il y a lieu de tenir compte de la complexité particulière du processus de changement législatif.
569. Le comité note que les allégations formulées dans le présent cas portent sur l'intervention violente des forces de police dans une entreprise occupée par des grévistes ainsi que sur l'application de l'article 30 de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs qui établit les conditions de suspension d'une grève.
570. S'agissant de l'allégation selon laquelle la police est violemment intervenue contre les grévistes dans la nuit du 19 au 20 mars 1996, dans l'enceinte de la société CELROM, le comité observe que le gouvernement ne réfute pas l'allégation mais justifie cette intervention qui avait pour but d'obtenir l'exécution d'une décision judiciaire reconnaissant le droit au directeur d'entrer dans l'établissement et de rétablir la légalité. En premier lieu, le gouvernement relève que la police a agi en conformité avec les dispositions légales. Ensuite, le gouvernement fait valoir que la grève déclenchée par les salariés de la société CELROM SA a été déclarée illégale par le tribunal de Drobeta Turnu Severin et par la sentence civile no 2354 du 14 mars 1996. La décision judiciaire prévoyait l'exécution d'office, sans sommation et sans délai. Etant donné qu'il n'a pas été possible de mettre en application la sentence, le tribunal a demandé l'appui de la police pour la mise en exécution de la décision définitive. L'organisation plaignante, de son côté, reconnaît que l'intervention de la police a été motivée par l'exécution forcée de la décision judiciaire qui permettait l'accès de la direction à l'entreprise, mais elle affirme que la police a violé la loi, parce qu'elle a utilisé la force pour attaquer les grévistes, que l'intervention a eu lieu de nuit, et qu'elle n'était accompagnée ni d'un huissier, ni du procureur. Enfin, les grévistes exerçaient pacifiquement leur droit de grève. Le comité constate que le gouvernement ne fournit aucune information sur les circonstances qui auraient motivé l'intervention nocturne de la police ni celles dans lesquelles les violences ont eu lieu.
571. Le comité considère que, s'il a été fait appel à la police pour permettre l'accès des membres de la direction à l'entreprise occupée par les grévistes en application d'une décision de justice en bonne et due forme, cela ne constitue pas une atteinte aux principes de la liberté syndicale. Il semble toutefois que certaines règles et garanties applicables aux interventions de la force publique n'ont pas été entièrement observées. Le comité considère que, si les travailleurs et leurs organisations sont tenus de respecter la légalité (article 8, alinéa 1, de la convention no 87), l'intervention des forces de police pour obtenir l'exécution d'une décision judiciaire visant des grévistes, devrait quant à elle respecter les garanties élémentaires applicables dans tout système respectueux des libertés publiques fondamentales.
572. Pour ce qui est de l'article 30 de la loi no 15 sur le règlement des conflits collectifs, qui autorise la Cour suprême de justice à suspendre une grève pour une période de 90 jours au plus, à la demande des employeurs, si la grève risque d'affecter des intérêts majeurs pour l'économie nationale ou des intérêts d'ordre humanitaire, le comité note que cette disposition a été appliquée sans que la preuve ait été faite que ces grèves affectaient les intérêts humanitaires ou l'économie nationale. Le comité observe que la société CELROM SA produit du papier et du carton, qu'elle compte 1 200 travailleurs et qu'il serait difficile d'admettre que l'arrêt de travail dans une telle entreprise soit, par définition, propre à engendrer un état de crise nationale aiguë.
573. Le comité a déjà examiné l'application de l'article 30 de la loi no 15 dans le cadre du cas no 1788. [Voir 297e rapport, paragr. 316 à 366.] Il avait constaté que les violations aux principes de la liberté syndicale dans ce cas ont eu pour origine l'article 30 de la loi et avait demandé au gouvernement de prendre l'initiative de faire abroger cette disposition. Le comité note que la même disposition a fait l'objet de commentaires répétés de la commission d'experts qui a rappelé dans son observation la plus récente la nécessité de modifier ou d'abroger cette disposition.
574. Dans le cas d'espèce, le comité considère que les restrictions ainsi imposées sont allées au-delà des restrictions acceptables et ont donc porté atteinte aux principes de la liberté syndicale. Constatant que les violations aux principes de la liberté syndicale relevées dans le présent cas ont pour origine, une fois de plus, la disposition en question et estimant que les pouvoirs de la Cour devraient être circonscrits aux cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme, le comité demande instamment au gouvernement de prendre des mesures pour l'abroger dans les plus brefs délais.
575. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les conclusions suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de la Roumanie
présentée par
-- le Bloc national syndical (BNS) et
-- la Fédération des travailleurs des métros (USLM)
Allégations: ingérence gouvernementale, atteinte
aux droits de négociation collective et de grève
576. Le 8 octobre 1996, le Bloc national syndical (BNS) et la Fédération des travailleurs des métros (USLM) ont déposé une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement de la Roumanie.
577. Dans une communication en date du 23 janvier 1997, le gouvernement a fait parvenir ses observations.
578. La Roumanie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations des organisations plaignantes
579. Le Bloc national syndical (BNS) indique qu'il porte plainte au nom de son affiliée, la Fédération des travailleurs des métros (USLM), contre des actes imputables directement au gouvernement de Roumanie ainsi qu'à la Régie autonome METROREX RA (METROREX), une société d'Etat.
580. La plainte se réfère à des restrictions non justifiées aux droits de négociation collective et de grève.
581. Les organisations plaignantes rappellent que la loi no 15/1991 sur le règlement des conflits collectifs du travail (Monitorul oficial, partie I, 11 février 1991, no 33, pp. 1-4) dispose, en son article 2 2, que les conflits collectifs peuvent survenir entre la direction de l'unité et les salariés d'une unité subordonnée ou d'un département de celle-ci, ainsi qu'entre la direction de l'unité et les salariés qui exercent un même métier ou une même profession au sein de cette unité. En outre, au regard de la loi no 13/1991 concernant les conventions collectives de travail (Monitorul oficial, partie I, 9 février 1991, no 32, pp. 1-2), une convention collective est une convention conclue entre salariés et employeurs, incluant les régies autonomes, les sociétés commerciales ou toutes autres organisations ou individus employant des travailleurs. Pour les organisations plaignantes, l'intervention des plus hautes instances gouvernementales, au cours du conflit collectif de mars 1996 à METROREX, est contraire aux lois en vigueur et est injustifiée, d'autant plus qu'elle a donné lieu à des pressions exercées et menaces proférées contre les représentants syndicaux et les travailleurs.
582. Les documents fournis à l'appui de la plainte indiquent que le conflit de travail à METROREX aurait commencé le 4 décembre 1995 et se serait terminé au cours du mois de mars 1996. Les griefs de la USLM se rapportaient notamment à l'amélioration des conditions de travail, aux maladies professionnelles, à des augmentations salariales et à l'octroi de droits identiques à ceux des cheminots. Le 4 décembre 1995, conformément à l'article 7 de la loi no 15/1991 sur le règlement des conflits collectifs, la USLM informait la direction de METROREX du déclenchement de la procédure de conciliation directe. Le 17 décembre 1996, comme aucun accord n'avait été conclu, la USLM avisa le ministère du Travail et de la Protection sociale de son vœu de poursuivre la conciliation sous son égide. A la suite de l'épuisement des procédures de règlement des différends prévues dans la loi, une grève d'avertissement de deux heures fut tenue le 8 février 1996. Le jour suivant, la direction de METROREX saisissait les tribunaux d'une requête en vue de déclarer la grève illégale arguant qu'elle visait la modification d'une convention collective contrairement à l'article 25 de la loi no 15/1991. Le 11 février 1996, les parties procédèrent à une séance de médiation dirigée par le Président roumain. Il fut alors décidé que la direction de METROREX serait remplacée, que des solutions au conflit collectif devraient être trouvées avant le 29 février, que la grève devrait être suspendue jusqu'à cette date et que METROREX retirerait sa procédure judiciaire. Compte tenu qu'aucun règlement n'était intervenu au 1er mars, la USLM annonça le déclenchement de la grève pour le 4 mars suivant en précisant que, conformément à la loi, un tiers du service de métro serait maintenu.
583. Les tensions s'accrurent entre, d'une part, les travailleurs de METROREX et, d'autre part, la direction et les instances gouvernementales. Les organisations plaignantes allèguent que des menaces de licenciement auraient alors été adressées aux représentants syndicaux. Dès le 6 mars, la USLM annonçait que la grève serait suspendue pour les raisons suivantes: conditions climatiques défavorables; ingérence des plus hautes instances gouvernementales; désir de régler le conflit par la négociation.
584. Les employés de METROREX, ayant pris connaissance des déclarations de la USLM, se réunirent spontanément le même jour en vue de manifester leur insatisfaction, bloquant les plates-formes et tunnels du métro, rendant ainsi impossible toute tentative de le faire fonctionner. Constatant que le travail n'avait pas repris, la direction de METROREX déposa une nouvelle plainte devant les tribunaux. Le 8 mars, le tribunal du secteur 1 et la Cour suprême déclaraient la grève illégale. Le 11 mars, la USLM portait ces décisions en appel devant la Cour municipale de Bucarest. Cette même journée, le gouvernement rendait publique une déclaration selon laquelle les employés de METROREX qui décidaient de retourner au travail devraient signer une confirmation à cet égard. Il appert que 609 des 6 500 travailleurs visés auraient signé ledit document. Les négociations et pourparlers se seraient poursuivis au cours des jours suivants, pour aboutir le 14 mars à la reprise du service et à l'abandon par le gouvernement des mesures de licenciement contre les travailleurs n'ayant pas signé la confirmation de retour au travail. Enfin, le 29 mars, la Cour municipale de Bucarest donnait raison à la USLM et ordonnait un nouveau procès. Au 31 mars 1996, l'ensemble des griefs ayant donné lieu au différend était réglé à la satisfaction de la USLM.
585. Les organisations plaignantes se réfèrent à l'article 25 de la loi no 15/1991 qui interdit la grève pour obtenir la modification des clauses d'une convention collective. Elles expliquent que la grève ne visait pas la modification d'une convention collective mais plutôt la protection des intérêts professionnels des travailleurs, conformément à l'article 2 1 de la loi no 15/1991.
586. Les organisations plaignantes rappellent en outre que l'article 30 de la loi no 15/1991 permet à la Cour suprême de suspendre la grève pour une durée maximale de 90 jours dans les cas où la grève porte préjudice à l'économie nationale ou à des intérêts de nature humanitaire. Elles soutiennent que le retrait du droit de grève constitue une restriction importante à l'un des moyens les plus essentiels dont disposent les syndicats pour défendre les intérêts de leurs membres. Elles considèrent dès lors que les grèves ne devraient être suspendues que dans les cas extrêmes et toujours pour une durée définie. La grève déclenchée par la USLM n'est pas survenue dans ces circonstances et par conséquent n'aurait pas dû être déclarée illégale par les tribunaux roumains.
587. En ce qui concerne plus précisément l'action judiciaire prise par METROREX, les organisations plaignantes soutiennent que leur droit à une défense pleine et entière n'a pas été respecté et que bon nombre des dispositions du code de procédure civile ont été violées en ce que, notamment, l'assignation adressée à la USLM et la procédure en vertu de laquelle elle lui a été transmise étaient entachées de vices la rendant nulle ab initio.
588. Enfin, les organisations plaignantes allèguent que le fait pour le gouvernement de refuser l'accès à M. Radoi, président de la USLM et représentant dûment élu des travailleurs de METROREX, à la réunion conviée en vue de mettre un terme au conflit collectif en mars 1996 contrevient à l'article 3 de la convention no 87 qui garantit le droit des travailleurs de choisir librement leurs représentants.
589. Les organisations plaignantes terminent en soulignant que la nouvelle loi sur le contrat collectif de travail, que le Parlement roumain examine, contient de nombreuses limitations à l'activité syndicale, telles que le pouvoir octroyé aux seuls employeurs d'enclencher les procédures de négociation collective ou la préférence donnée aux ententes individuelles par rapport aux conventions collectives.
B. Réponse du gouvernement
590. Dans sa réponse, le gouvernement de la Roumanie rappelle qu'au mois de novembre des élections parlementaires et présidentielles ont eu lieu à la suite desquelles un nouveau gouvernement a été constitué. Il considère dès lors que, dans ces circonstances, les allégations relatives aux affirmations publiques de l'ancien gouvernement ne lui sont pas imputables.
591. Le gouvernement rapporte que, selon les récentes déclarations exprimées tant par les autorités que par les organisations syndicales, y compris l'organisation plaignante, les relations entre l'exécutif et les partenaires sociaux sont fondées sur la transparence et la volonté commune de collaboration en vue de la conclusion d'un pacte social. Afin de connaître le point de vue des organisations syndicales, le gouvernement les a priées de formuler des propositions en vue de perfectionner les mécanismes de négociation collective et de présenter des propositions concernant notamment la loi sur les conventions collectives de travail et la loi sur les conflits collectifs au travail.
592. Le gouvernement affirme que les propositions qui seront alors soumises seront discutées avec les partenaires sociaux et examinées par des personnalités indépendantes. Enfin, il conclut que, dans cette perspective, le ministère du Travail et de la Protection sociale a annoncé qu'il faisait de la révision des lois du travail une priorité législative afin qu'elles soient conformes aux conventions de l'OIT. Il rappelle qu'à la suite d'une demande d'assistance technique du BIT un expert s'est rendu à Bucarest à la fin de janvier 1997 en vue d'évaluer les besoins pour réaliser le plus efficacement possible la révision des projets de lois les plus urgents dans le domaine du travail et de la protection sociale. Les organisations d'employeurs et de travailleurs ont participé également à cet exercice. Le gouvernement indique son intention de demander l'aide du BIT lors du processus d'analyse des lois du travail.
593. Le présent cas porte sur des allégations se référant à des restrictions imposées au droit de grève et au droit de négociation collective.
594. Avant d'aborder les questions de fond, le comité souhaite rappeler, à propos de la déclaration du gouvernement selon laquelle les actes de l'ancien gouvernement ne lui sont pas imputables, qu'en présence d'allégations en violation des droits syndicaux par un gouvernement, [...] un gouvernement qui lui succède ne peut pas, du seul fait de ce changement, échapper à la responsabilité que des événements survenus sous un gouvernement précédent peuvent avoir engagée. Le nouveau gouvernement est en tout cas responsable de toutes suites que de tels événements peuvent avoir. En cas de changement de régime dans un pays, le nouveau gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences que les faits sur lesquels porte une plainte auraient pu continuer à avoir depuis son arrivée au pouvoir, bien que ces faits se soient produits sous le régime de son prédécesseur. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 18.]
595. Le comité note en outre, à la lumière de la documentation fournie par les organisations plaignantes, que les griefs qui ont donné lieu au différend et à la grève de mars 1996 à la Régie autonome METROREX, société d'Etat assurant le service de métro dans la ville de Bucarest, ont été réglés à leur entière satisfaction.
596. Pour ce qui est des menaces de licenciement proférées par les autorités gouvernementales à la suite de l'annonce de la grève, le comité constate que les organisations plaignantes ne rapportent aucun licenciement ou mesures discriminatoires effectivement imposés. Le comité souhaite néanmoins rappeler qu'au regard des principes de la liberté syndicale le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Le licenciement de travailleurs pour fait de grève constitue une grave discrimination en matière d'emploi pour exercice d'activité syndicale licite contraire à la convention no 98. Quand les syndicalistes ou les dirigeants syndicaux sont licenciés pour avoir exercé leur droit de grève, le comité ne peut s'empêcher de conclure qu'ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et font l'objet d'une discrimination antisyndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 591 et 592.] A cet égard, le comité prie le gouvernement de s'assurer qu'aucune influence ou pression de la part des autorités ne vienne affecter en pratique l'exercice du droit de grève.
597. De manière générale, le comité comprend que les événements qui sous-tendent la plainte ont pour origine, en grande partie, l'application de la loi no 15/1991, et notamment de ses articles concernant l'illégalité des grèves. Le comité rappelle que la loi no 15/1991 a déjà fait l'objet d'un examen, en mars 1995, dans le cadre d'une plainte déposée par le BNS et la Fédération syndicale libre et indépendante des chauffeurs de locomotives de la Roumanie. [Voir cas no 1788, 297 e rapport, paragr. 316-366.] A cette occasion, le comité avait conclu, tout comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, que plusieurs des dispositions de la loi no 15/1991 contrevenaient aux conventions de l'OIT, et avait prié le gouvernement de la modifier afin de la rendre plus conforme aux principes de la liberté syndicale.
598. A cet égard, le comité retient que le gouvernement fait de la révision des lois du travail une priorité. Il prend bonne note de sa déclaration selon laquelle il désire que les partenaires sociaux soient partie intégrante de cet exercice. Il constate en outre que le Parlement roumain a déjà adopté, en date du 17 octobre 1996, la nouvelle loi sur le contrat collectif de travail. Dans ce contexte, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout développement dans la révision législative entreprise et signale que les services du BIT sont à sa disposition pour faciliter l'adoption d'une législation sur les conflits collectifs du travail qui soit pleinement conforme aux normes et principes de l'OIT en matière de liberté syndicale ainsi qu'à ses recommandations.
599. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
600. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Soudan
présentée par
la Fédération (légitime) des syndicats des travailleurs
du Soudan (FSTS)
Allégations: morts violentes et arrestations de syndicalistes,
ingérence gouvernementale
601. Le 15 mai 1995, la Fédération (légitime) des syndicats des travailleurs du Soudan (FSTS) a déposé une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Soudan. Par des communications en date des 30 décembre 1995, 2 janvier, 8 avril et 7 mai 1996, l'organisation plaignante faisait parvenir de nouvelles allégations ou fournissait des informations complémentaires.
602. Dans des communications en date des 24 septembre 1995, 12 février et 16 octobre 1996, le gouvernement a fait parvenir ses observations.
603. Le Soudan n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
604. Dans ses diverses communications, l'organisation plaignante résume ses allégations sous trois rubriques. Premièrement, elle allègue qu'un grand nombre de syndicalistes auraient été licenciés à la suite de décisions administratives gouvernementales. Plus de 95 000 travailleurs auraient perdu leur emploi à la suite de décisions n'autorisant aucun recours. En outre, elle ajoute que de nombreux travailleurs auraient fait l'objet de tortures ou de mauvais traitements. Afin d'étayer ses allégations, elle annexe une liste de noms de syndicalistes qui auraient été licenciés en raison de leurs activités syndicales et ceux d'autres empêchés par les autorités de les exercer (annexe 1) ainsi qu'une autre liste qui contient principalement les noms de membres de la FSTS qui auraient également été l'objet de mesures antisyndicales (annexe 2). Enfin, elle précise le nom des syndicats dont les dirigeants auraient été licenciés ou empêchés d'exercer leurs activités syndicales (annexe 3).
605. Deuxièmement, l'organisation plaignante rappelle que l'abrogation et le remplacement de la loi de 1986 sur les syndicats par celle de 1992 ont notamment eu pour conséquences la dissolution des syndicats alors existants ainsi que l'arrestation et la détention, souvent accompagnées d'actes de torture, de leurs dirigeants. Ces arrestations ont eu lieu sans que soient respectées les mesures minima garantissant une procédure judiciaire régulière; les syndicalistes furent arrêtés sans mandat, maintenus en détention sans être informés des raisons le justifiant et sans avoir la possibilité de contester la légalité de leur détention devant une instance judiciaire. L'organisation plaignante précise que deux syndicalistes auraient été torturés: M. Mohamed Babiki, secrétaire général du syndicat général des employés, et l'ingénieur Yousif Hussain. Trois autres syndicalistes seraient décédés à la suite d'actes de violence dont ils auraient été l'objet: Dr Ali Fadl, membre du comité directeur du syndicat des médecins (décédé en décembre 1989); M. Abdel Moniem Suliman, membre du comité directeur du syndicat des enseignants (décédé en 1990); et M. Abdel Moniem Rahma, membre du syndicat des employés des transports, Wad Medani, Gezira (décédé en 1995).
606. L'organisation plaignante ajoute par surcroît que la loi de 1992 sur les syndicats autorise l'ingérence gouvernementale dans les affaires syndicales. Elle rapporte à cet égard les déclarations du secrétaire général de la Fédération des syndicats des travailleurs du Soudan, M. Al-Sadiq Atta el Mannan, selon lesquelles il encourage la défense du pays par tous les citoyens et clame que les travailleurs armés doivent participer à cette protection. L'organisation plaignante soutient que ces déclarations mettent en exergue les liens étroits qui existent entre le gouvernement et cette organisation inféodée au pouvoir étatique, soulignant que les activités de cette fédération n'ont rien à voir avec les activités normales d'une centrale syndicale ou les intérêts des travailleurs.
607. Troisièmement, l'organisation plaignante soutient que l'instance d'appel, mise en place par l'ordonnance ministérielle no 723 et qui a pour mandat de réexaminer les plaintes des travailleurs qui considèrent avoir été lésés par leur licenciement, ne constitue qu'un autre exemple des mesures dilatoires ou de la tactique adoptées par le gouvernement en vue de contrecarrer la critique internationale. En fait, cette commission est composée de fonctionnaires qui ne présentent pas l'objectivité et l'impartialité requises. En outre, ils ne jouissent que d'un pouvoir consultatif et ne peuvent dès lors ordonner la réintégration des travailleurs dans leur poste de travail. Il appert qu'aucun dirigeant syndical n'a, à ce jour, bénéficié d'une décision recommandant la réintégration.
608. L'organisation plaignante conclut en requérant l'envoi d'une mission de contacts directs de l'OIT en vue de vérifier in situ la situation des syndicats au Soudan.
B. Réponse du gouvernement
609. Dans ses communications, le gouvernement déclare qu'aucun syndicaliste n'est détenu au Soudan, la loi n'autorisant pas l'arrestation fondée sur les activités syndicales.
610. Le gouvernement précise que les personnes licenciées peuvent être groupées en trois catégories: 1) certains travailleurs auraient perdu leur emploi à la suite de la réorganisation et du démantèlement d'entreprises fonctionnant à perte. Le gouvernement explique que ces pertes d'emplois se sont produites en raison de la vente de l'entreprise et cite, à titre d'exemple, l'industrie du textile soudanaise qui a été réorganisée en fonction des objectifs et plans du nouvel acquéreur; 2) d'autres auraient été licenciés à la suite d'une évaluation du comité responsable aux termes de laquelle il aurait conclu que leur performance ne rencontrait pas les objectifs des entreprises ou usines au sein desquelles ils travaillaient; 3) certains noms mentionnés dans les listes soumises par l'organisation plaignante seraient des employeurs alors que d'autres noms seraient fictifs. Enfin, certaines institutions gouvernementales ont fait l'objet d'une réorganisation, à la suite de recommandations formulées par la Banque mondiale aux termes desquelles une réduction du personnel était suggérée. Tous les employés affectés par ces mesures ont obtenu l'entière indemnité de fin d'emploi à laquelle ils avaient droit.
611. En ce qui concerne l'ordonnance ministérielle no 723 adoptée le 30 août 1995, le gouvernement rappelle qu'elle avait pour objet la mise en place d'une commission ayant pour mandat l'examen des cas de mise à la retraite pour intérêt public depuis le 30 juin 1989. En avril 1996, cette commission rendait publics le travail accompli et les conclusions auxquelles elle était parvenue. En fait, elle aurait reçu 3 240 plaintes requérant la réintégration, certaines provenant de l'extérieur du pays. Soixante-seize pour cent des plaignants auraient bénéficié de mesures de réinsertion dans leur poste de travail ou d'une augmentation de l'indemnité de fin d'emploi initialement versée. La commission a conclu, en ce qui concerne les cas de licenciement en raison de la réorganisation et de la vente de nombreuses entreprises publiques, que certains des travailleurs affectés devraient voir cette compensation révisée à la hausse.
612. Le comité rappelle tout d'abord que ce cas se réfère à de très graves allégations de violations des droits syndicaux au Soudan, et notamment de mesures de représailles antisyndicales, y compris la détention de syndicalistes et des actes de violence à leur encontre. Le comité rappelle qu'il avait examiné, en mars 1994, une plainte portant également sur des actes extrêmement graves de représailles antisyndicales contre le gouvernement du Soudan. [Voir cas no 1688, 292e rapport, paragr. 411 à 433.] Il note toutefois avec une profonde préoccupation que le gouvernement n'a pris aucune mesure pour donner suite aux recommandations alors formulées.
613. En ce qui concerne les licenciements en masse de syndicalistes et le travail réalisé par la commission d'appel mise sur pied aux termes de l'ordonnance ministérielle no 723 en date du 30 août 1995, le comité note les informations générales du gouvernement selon lesquelles ces pertes d'emploi seraient intervenues en raison principalement de la réorganisation de certaines entreprises publiques. En outre, le comité relève que, selon le gouvernement, plus de 76 pour cent des travailleurs, ayant déposé une plainte auprès de la commission d'appel, auraient bénéficié de mesures de réintégration ou d'une augmentation de l'indemnité de fin d'emploi initialement versée. La commission d'appel aurait en outre recommandé, dans les cas de licenciement en raison de la réorganisation ou la vente d'entreprises publiques, la majoration de l'indemnité reçue. Le comité déplore néanmoins que le gouvernement n'ait fourni aucune information sur les allégations de mesures antisyndicales dont auraient été l'objet les travailleurs dont les noms et données d'identification ont été transmis par l'organisation plaignante (annexes 1 et 2), ainsi que sur les dirigeants des syndicats dont les noms sont mentionnés en annexe 3. Le comité prie dès lors le gouvernement: a) de préciser la situation des travailleurs dont les noms apparaissent en annexes 1 et 2 du présent rapport ainsi que celle des dirigeants des syndicats nommément désignés dans l'annexe 3, et d'indiquer s'il s'agit des personnes ayant bénéficié des mesures recommandées par la commission d'appel; et b) de préciser la suite donnée aux recommandations de la commission d'appel aux termes desquelles elle propose, dans les cas de licenciement en raison de la réorganisation ou de la vente d'entreprises publiques, la majoration de l'indemnité de fin d'emploi initialement versée.
614. En ce qui concerne les très graves allégations d'arrestation et de détention de membres de syndicats, souvent accompagnées d'actes de torture, le comité ne peut que noter avec sérieuse préoccupation que le gouvernement ne fournit aucune information à cet égard, se limitant à déclarer qu'aucun syndicaliste n'a été détenu en raison de ses activités syndicales. Le comité relève néanmoins que l'organisation ne précise pas dans ses communications, à l'exception de deux cas, les syndicalistes qui auraient été arrêtés et auraient fait l'objet d'exactions. Dans ces circonstances, le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les syndicalistes et dirigeants syndicaux ne fassent pas l'objet de mesures d'arrestation arbitraire, de détention et de condamnation lorsqu'ils exercent leurs fonctions ou activités syndicales en vue de défendre leurs droits et leurs intérêts.
615. Pour ce qui est plus précisément des deux syndicalistes qui auraient été torturés ainsi que des trois autres qui seraient décédés à la suite d'actes de violence dont ils auraient été l'objet, le comité regrette profondément l'absence d'informations du gouvernement. Il note néanmoins qu'il a déjà été saisi du cas du Dr Ali Fadl, membre du comité directeur du syndicat des médecins, décédé en décembre 1989. En effet, dans le cadre d'une plainte antérieure contre le gouvernement du Soudan et aux termes de laquelle il était allégué que le Dr Ali Fadl était décédé à la suite d'actes de torture, le comité s'inquiétait notamment, en 1992, de ce que le gouvernement n'avait pas fourni d'informations supplémentaires et que l'affaire était encore soumise aux autorités judiciaires. Le comité avait alors souligné la nécessité, dans les cas où les enquêtes judiciaires relatives à la mort de syndicalistes semblent tarder à aboutir, d'activer la procédure pour que les affaires parviennent à une conclusion rapide, car une administration dilatoire de la justice équivaut à un déni de justice. [Cas no 1508, 281e rapport, paragr. 295 à 310, et 284e rapport, paragr. 418 à 442, notamment paragr. 427.]
616. Pour ce qui est des tortures exercées contre M. Mohamed Babiki et M. Yousif Hussain ainsi que des décès de M. Abdel Moniem Suliman et M. Abdel Moniem Rahma qui seraient intervenus à la suite d'actes de torture, le comité rappelle l'importance qu'il convient d'attacher au principe consacré dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques selon lequel nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le comité insiste en outre sur le principe corollaire selon lequel toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et dans le respect dû à un être humain. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, notamment paragr. 59.] En outre, le comité estime, dans les cas allégués de torture ou de mauvais traitements, que le gouvernement en cause devrait enquêter sur les plaintes et prendre les mesures qui s'imposent, y compris la réparation des préjudices subis et la sanction des personnes responsables. Le comité rappelle en effet que l'absence de jugement des coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité et qui est dès lors extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 55.] Le comité prie dès lors le gouvernement: a) d'ouvrir une enquête afin d'établir précisément les circonstances dans lesquelles M. Mohamed Babiki, secrétaire général du syndicat général des employés, et l'ingénieur Yousif Hussain auraient été torturés ainsi que les causes du décès de M. Abdel Moniem Suliman, membre du comité directeur du syndicat des enseignants (décédé en 1990), et M. Abdel Moniem Rahma, membre du syndicat des employés des transports, Wad Medani, Gezira (décédé en 1995); et b) de prendre les mesures nécessaires pour traduire en justice les responsables et réparer les préjudices subis. Le comité prie en outre le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
617. Enfin, le comité relève que la Fédération des syndicats des travailleurs du Soudan jouit d'un monopole syndical autorisé et instauré par la loi de 1992 (voir notamment les articles 9 (3) et 36 (c) de cette loi) et corroboré par les allégations de l'organisation plaignante à cet égard. Le comité rappelle avoir identifié, lors d'une plainte antérieure contre le gouvernement du Soudan, les dispositions de la loi de 1992 contraires aux principes de la liberté syndicale qui, notamment, restreignent le droit de tous les travailleurs de se syndiquer, établissent un monopole syndical ou permettent l'ingérence des autorités dans les affaires syndicales. En outre, la loi de 1992 ne confère pas une protection adéquate aux travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale et ne prévoit pas de disposition touchant la promotion de la négociation volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs. [Voir cas no 1508, 284e rapport, notamment paragr. 430 à 441.] Tout comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, le comité prie le gouvernement de réviser sa législation eu égard aux nombreuses et graves incompatibilités existant entre la loi de 1992 sur les syndicats et les principes de la liberté syndicale. Le comité appelle à nouveau l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs de ce cas en rapport avec l'application de la convention no 98, ratifiée par le Soudan. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
618. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Syndicalistes qui auraient été licenciés pour leurs activités
syndicales ou empêchés de les exercer
Noms Fonctions
1. Kamal Hussein Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat du textile
2. Sami Hihazi Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat du logement
3. Hashim Taha El-Mugammar Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat de l'électricité
4. Mohamed Ahmed El-Mubarak Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat de l'industrie du sucre El-Ginaid
5. Salah Hasan Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat du textile
6. Awad El-Karim Mohamed Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat des ingénieurs
7. Mukhtar Osman Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat des ingénieurs
8. Sid Ahmed Abdel Rahim Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat de l'électricité
9. Hussein Shagalbat Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat de l'électricité
10. Ahmed Mohamed Saleh Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- syndicat de l'électricité
11. Abdallah Malik Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- Fédération des employeurs
12. Kamal Abdel Karim Merghani Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- Fédération des employeurs
13. Mohamed Wahba Membre du comité directeur de la Fédération professionnelle -- Fédération des employeurs
14. Abdoun Abdel Rahim Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
15. Ahmed Abdel Magid Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
16. Usama Merghani Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
17. Haydar Ahmed Saad Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
18. Abdel Wahab Bilal Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
19. Al-Lazim Shadid Mohamed Zein Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
20. Mohamed Ali Adam Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
21. Ahmed Ali Ahmed Saleh El-Masri Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
22. Ammar Abde Khaliq Travailleur et syndicaliste de la Société nationale manufacturière
23. Ali Mukhtar Awad Président du syndicat de la Société nationale des travailleurs des eaux en milieu rural
24. Umran Abde Aziz Trésorier du syndicat de la Société nationale des travailleurs des eaux en milieu rural
25. Ali Ahmed Omar Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
26. Adam Abdallah Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
27. Ali Al Hasan Abdel Magid Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
28. Mohamed Sharief Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
29. Mohamed Sakan Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
30. Tarig Mohamed Idris Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
31. Usief Khairi Président du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
32. Gasam Alla El Tayib Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
33. El Shiekh Karkab Idris Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
34. Hasan Abdel Latif Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
35. Bashier Ali Osman Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural
36. Hasan Ibrahim Membre du comité directeur du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
37. Mme Alawiya El Hag Hashim Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
38. Osman Hasan El Tayib Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
39. Kamal Zein Al Abdin Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
40. Al Mahi Abdallah Ali Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
41. Bashier Ali Osman Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
42. Abdel Khalig Saeed Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
43. Al Ebaid Ibrahim El Sayid Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
44. Saleh Eissa Membre du syndicat des travailleurs des eaux en milieu rural, Medani
45. Ibrahim Mohamed Ahmed
46. Ibrahim Nasr
47. Abu Nab
48. Emanuel Doko Joseph
49. Saddig Sid Ahmed Al-Shami
50. Farouk Mohamed Ibrahim
51. Sayed Ahmed Abdel Rahim
52. Badr Eldin Abdel Tam
53. Hamouda Fathel Rahman
54. Kamal Al Rashid
55. Tariq Ismail
56. Neola Jordon
57. Mukhtar Mohamed
58. Abdel Wahab Gas El Seed
59. Mohamed El Khidr Dafalla
60. Shihab Ahmed Gaffar
61. Mohamed El Sayed Sa'lam
62. Hayder Zein El Abdien
63. Abdel Wahab Senada
64. Al Sir Atai
65. Yahia Senada
66. Hafez Ismail
67. Salah Hassan
68. Imadd Adam Babikir
69. Mohamed Mustafa Al-Houri
70. Rashid Sayed Ahmed
71. Hassan Saeed Ahmed
72. Hamza Sir El Khatim
73. Khieri Mohamed Khier
Membres de la FSTS qui auraient fait l'objet
de mesures antisyndicales
Noms Fonctions
1. Mohamed Osman Gama'a Président de la FSTS
2. Mahagoub Ahmed Al-Zubeir Vice-président de la FSTS
3. Al-Tahir Al-Ragig Dirigeant de la FSTS, président du syndicat des enseignants
4. Mohmed H. Al-Amin Dirigeant de la FSTS, président du syndicat du textile
5. Ali Abd Alla Al-Seimat Dirigeant de la FSTS, président du syndicat de l'industrie ferroviaire
6. Nasr M. Nasr Dirigeant de la FSTS, président du syndicat des transports
7. Al-Shiek Mohmed Al-Imam Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat des transports
8. Yahia Ali Abd Alla Vice-président de la FSTS, président du syndicat des travailleurs œuvrant dans le domaine de la fenestration
9. Mohmed M. Tom Dirigeant de la FSTS, président du syndicat des transports fluviaux
10. Osman Sulieman Dirigeant de la FSTS
11. Al-Haj Osman Al-Hassan Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat des employés du gouvernement local
12. Nour El-Din Garad Membre du syndicat des employés du gouvernement local
13. Siddiq Shamoun Dirigeant de la FSTS, président du syndicat des transports par route
14. Ali Al-Mahi Al-Sakhi Président de la Fédération centrale des travailleurs
15. Yousif Abu Shama Secrétaire général de la FSTS
16. Hasab Alla M. Hassan Dirigeant de la FSTS, président du syndicat de l'industrie pétrolière
17. El-Tigani Dawod Dirigeant de la FSTS
18. Akasha Abdel Rahaman Dirigeant de la FSTS
19. Atta Mohamed Ahmed Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat de l'industrie touristique
20. Gabriel Awad Al-Faki Président du syndicat des travailleurs du textile œuvrant dans le secteur privé
21. Hassan Khalid Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat de l'industrie du textile
22. Siddiq Yahia Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat du logement
23. Abdel Atti Mohmed Khir Président du syndicat de l'industrie pétrolière, Port-Soudan
24. John Makam Dirigeant de la FSTS, vice-président du syndicat de l'industrie de la fenestration
25. Abdalla Musa Président de l'industrie du textile, Port-Soudan
26. Saudi Darag Membre du comité directeur du syndicat du commerce
27. Mustafa Abada Dirigeant de la FSTS, membre du syndicat de l'industrie du transport fluvial
28. Abdel Wahab Abdel Gani Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire
29. Mohmed Al-Hassan Ibrahim Membre du comité directeur du syndicat de
(Control) l'industrie ferroviaire
30. Ali Isielat Membre du comité directeur du syndicat de l'industrie ferroviaire
31. Min Alla Abdel Wahab Dirigeant de la FSTS, secrétaire du syndicat de l'industrie du textile, Khartoum nord
32. Osman Hassan Shankal Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire
33. Ibrahim Obeid Alla Président du syndicat de l'industrie ferroviaire
34. Mahgoub Sid Ahmed Membre du syndicat de l'industrie de l'électricité
35. Mohmed Aidarous Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire
36. Mohmed Abdalla Salih Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire, Khartoum
37. El-Haj El-Tom El-Hassan Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire
38. Awad Elkarim Ikleit Membre du syndicat de l'industrie ferroviaire, Khartoum
39. Mme Ha'd Elraid Al-Mahi Secrétaire du syndicat de l'industrie du textile, Khartoum nord
40. Kamil Abdel Rahaman Secrétaire du syndicat de l'industrie du textile, Khartoum nord
41. Osman Adlan Secrétaire du syndicat de l'industrie du textile, Khartoum nord
42. Badr Eldin Abdel Tam Fédération des syndicats
43. Sid Ahmed Abdel Rahaman Syndicat des ingénieurs de l'électricité, Khartoum
44. Hamouda Fath El-Rahaman Association des médecins
45. Mohmed Al-Khidr Dafalla Syndicat des infirmières
46. Mohmed El-Said Salam Syndicat des employés de banques
47. Abdel Wahab Sinada Association des médecins
48. Salah Hassan Syndicat des employés de banques
49. Kamal Hassan Syndicat des employés de l'industrie ferroviaire
50. Mohmed Mustafa El-Hori Secrétaire du syndicat de l'industrie du transport et secrétaire adjoint de la fédération des syndicats
51. Emad Adam Babikr Secrétaire du syndicat de l'industrie de la restauration
52. Mohmed Babikr Mukhtar Secrétaire du syndicat général des employés et professionnels
53. Omer Ahmed El-Amin Secrétaire du syndicat des employés de banques
54. Rashid Sid Ahmed Membre du syndicat de l'industrie du transport
55. Hayder Zein Al-Abdeen Dirigeant de la FSTS, membre du syndicat de la défense, Khartoum
56. Hayder Bashir Membre du syndicat des employés des services de la santé
57. Ahmed Adam Boni Membre du syndicat des sociétés d'ingénierie, Khartoum
58. Abdel Wahid Gasm El-Saeed Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
59. Abdel Gafar Al-Fagi Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
60. El-Haj Osman Haroon Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
61. El'Naim Elshiek Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
62. Mohmed Fasl Elbari Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
63. Abdel Rahm Omer Yousif Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
64. Salah Falolah Membre du syndicat des travailleurs du Soudan, Atbara
65. Abdelaziz Ahmed Dafalla Syndicat de l'industrie de l'assurance, secteur privé
66. Mohmed Alkhidr Gafar Employés du conseil local de Khartoum nord
67. Shehab Ahmed Gafar Syndicat des employés du domaine de la santé, hôpital Omudurman
68. Khaes Koko Société Sata, Khartoum nord
69. Faisal Ibrahim Dirigeant du syndicat des employés du domaine de la santé
70. Dr Magedi Mahamadani Association des médecins
71. Omer El-Mukhtar Membre du syndicat du commerce, Khartoum nord
72. Gassim Amiro
73. Ali Khalifa
74. Carlo Alia
75. Maghoud Sid Ahmed
76. Abdel Khier Abdalla
Syndicats dont les dirigeants auraient été l'objet
de mesures antisyndicales
1. Syndicat des employés de l'agriculture -- Société Montagnes Nuba
2. Syndicat des employés de l'agriculture -- Nil blanc
3. Syndicat des employés de l'agriculture -- Nil bleu
4. Syndicat des employés de l'agriculture -- Al Sooki
5. Syndicat des employés de l'agriculture -- projet Rahad
6. Syndicat des employés de l'agriculture -- projet Zaidad
7. Syndicat des employés de la télécommunication
8. Syndicat des employés de la tannerie du Nil blanc
9. Syndicat des employés de la tannerie du Nil bleu
10. Syndicat des employés de la tannerie de Khartoum
11. Syndicat des employés de la tannerie de Port-Soudan
12. Syndicat des employés de l'industrie de filature de Port-Soudan
13. Syndicat des employés du projet de Abu Niam Kenaf
14. Syndicat de l'industrie de la publication du Nil bleu
15. Syndicat des employés de l'hôtel de la mer Rouge de Port-Soudan
16. Syndicat des employés de l'hôtel de l'amitié de Khartoum
17. Syndicat de l'hôtel Soudan
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Swaziland
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: actes d'intimidation et de harcèlement à l'encontre de syndicalistes et violations de
la liberté syndicale et du droit de grève
619. Dans des communications datées des 23 et 29 mai 1996, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) avait présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Swaziland. La CISL a transmis des informations additionnelles les 6 février et 4 mars 1997.
620. Le Swaziland a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
621. Le gouvernement a adressé sa réponse dans une communication datée du 24 décembre 1996 ainsi que des informations complémentaires le 4 mars 1997.
622. Le comité note que, lors du débat sur la question de l'application de la convention no 87 au Swaziland en 1996, la Commission de l'application des normes de la Conférence a noté que le représentant gouvernemental du Swaziland a invité le Bureau à envoyer une mission de contacts directs dans son pays afin d'examiner les allégations formulées, y compris celles qui font l'objet de la présente plainte. Donnant suite à cette invitation, le Directeur général a désigné M. Barney Jordaan, professeur de droit du travail à l'Université de Stellenbosch en Afrique du Sud, afin de le représenter dans le cadre d'une mission de contacts directs au Swaziland, qui s'est déroulée du 30 septembre au 4 octobre 1996. M. Jordaan était accompagné de Mme Curtis, juriste principale du Service de la liberté syndicale, et de M. Ndjonkou, directeur du bureau de l'OIT à Pretoria. Le rapport de cette mission figure à l'annexe I au présent rapport.
A. Allégations de la confédération plaignante
623. Dans sa communication en date du 23 mai 1996, la CISL fait état d'actes d'intimidation et de harcèlement commis à l'encontre de la Fédération des syndicats du Swaziland (SFTU) qui lui est affilée et de ses dirigeants par les autorités du Swaziland et par les forces de sécurité, et déclare en outre que la loi de 1995 sur les relations professionnelles porte gravement atteinte au droit syndical et au droit de grève des travailleurs.
624. En octobre 1993, la SFTU avait présenté au gouvernement une liste de questions qui pourrait donner lieu à l'ouverture de négociations. Cette liste a ensuite été plus connue sous le nom de 27 revendications. Ces revendications portaient notamment sur l'adoption d'une loi autorisant les tribunaux à ordonner la réintégration de travailleurs injustement licenciés; la fixation d'un salaire minimum au niveau national; la mise en place d'un régime national de sécurité sociale; l'octroi d'un congé de maternité rémunéré; l'institution d'un jour de congé le 1er mai; la mise sur pied d'un forum économique; la nécessité de mettre fin aux brutalités commises par des agents du conseil municipal contre les marchands ambulants ainsi qu'aux représailles exercées contre des journalistes; l'arrêt du programme de privatisation des services de distribution d'eau; ainsi que l'instauration d'une société plus démocratique et plus représentative.
625. Les 21 et 22 février 1994, la SFTU a organisé une grève générale à l'appui de ses 27 revendications. Ces dernières ont fait l'objet de discussions et de négociations entre la SFTU et le gouvernement qui, conjointement avec les autres parties, a désigné un groupe de travail chargé d'analyser les revendications. Cependant, cela n'a débouché sur aucune proposition concrète. Dans les mois qui ont suivi, des grèves ont été déclenchées dans de nombreux secteurs. Selon la CISL, la police a fait à diverses reprises usage de violence et de gaz lacrymogènes pour y mettre un terme, et les autorités ont eu recours à la Cour suprême afin d'obtenir des ordonnances visant à interdire aux grévistes de poursuivre leur action, détournant ainsi le système de relations professionnelles.
626. La CISL allègue en outre que lors d'une grève observée dans une usine le 22 juillet 1994 les services de police ont tiré à balles réelles sur un travailleur, lui fracturant la jambe. Le secrétaire général de la SFTU, Jan Sithole, s'est rendu dans l'usine, mais le travailleur avait déjà été transporté dans une clinique. Alors que Jan Sithole se rendait au chevet du travailleur blessé, la police lui a signifié que de hauts fonctionnaires de police souhaitaient le voir. Il n'a pas pu rendre visite au travailleur blessé et il a dû se présenter au service de sécurité de l'entreprise où l'attendaient de hauts fonctionnaires de police. Il a été interrogé par ces fonctionnaires qui ont tenté, en vain, d'établir un lien entre la SFTU et des partis politiques interdits par la loi swazie.
627. La police a ensuite contraint Jan Sithole à monter en voiture avec trois policiers armés. La voiture, qui était suivie d'un autre véhicule où avaient pris place quatre fonctionnaires armés, a été conduite dans des plantations de canne à sucre. Les deux voitures se sont arrêtées au milieu de champs isolés et les policiers ont déclaré à Jan Sithole qu'ils regrettaient que la loi autorisant soixante jours de détention administrative ne soit plus en vigueur. Ils se sont demandé pourquoi il n'avait pas encore été arrêté, étant donné qu'à leur sens il semait le trouble dans le pays et le rendait ingouvernable. Puis les voitures ont été reconduites en ville et Jan Sithole a été libéré après cinq heures de détention.
628. Par la suite, Jan Sithole a fait l'objet d'une étroite surveillance policière et a reçu par téléphone des menaces de mort anonymes. Trois hommes en arme ont pénétré dans sa maison en son absence et le téléphone a été provisoirement coupé. La rumeur a couru que des fonctionnaires appartenant aux milieux gouvernementaux planifiaient un "accident" afin de l'éliminer. Des fonctionnaires de police en civil ont surveillé des réunions et des séminaires de la SFTU. On a tenté de corrompre des membres du secrétariat de la SFTU pour obtenir des procès-verbaux et des documents du syndicat. Une équipe des services de sécurité de la police a entamé une enquête approfondie concernant la citoyenneté de Jan Sithole dans l'intention de l'expulser. Les membres de cette équipe se sont rendus au Mozambique et en Afrique du Sud, mais la démarche s'est révélée vaine.
629. Les 13 et 14 mars 1995, la SFTU a déclenché une grève générale à l'appui des 27 revendications et pour exprimer sa déception devant l'incapacité persistante du gouvernement de présenter des propositions concrètes pour régler les problèmes. La grève a paralysé la capitale, Mbabane, et la principale ville du pays, Manzini. Plusieurs travailleurs ont été arrêtés pour faits de grève.
630. Le gouvernement a fait en sorte que certains des principaux problèmes soient résolus dans les sept jours. Une commission parlementaire a été créée. Toutefois, malgré la volonté de la SFTU et de la Fédération des employeurs du Swaziland de négocier, aucun progrès n'a été réalisé et il est apparu clairement que le gouvernement recherchait la confrontation.
631. Le 24 mars, la police a ordonné à la SFTU d'annuler les réunions d'information destinées aux militants et qui étaient prévues pour la fin de la semaine. Les deux réunions, l'une de responsables syndicaux et l'autre de travailleurs, ont finalement eu lieu après que la Cour suprême eut annulé l'interdiction policière.
632. A la fin de mars 1995, le gouvernement a présenté à l'Assemblée nationale un projet de loi sur les relations professionnelles. Selon la CISL, ce projet de loi et les modifications de la loi sur l'emploi ont été présentés sans avoir été examinés au préalable par la Commission tripartite consultative du travail. Le projet de loi a été condamné par les syndicats, comme par les employeurs, à cause des graves violations qu'il entraîne en matière de droits syndicaux.
633. Le projet de loi sur les relations professionnelles a été adopté par l'Assemblée nationale le 7 décembre 1995 et a été promulgué par le Roi du Swaziland le 19 janvier 1996.
634. La CISL signale les dispositions ci-après de la loi sur les relations professionnelles qui portent atteinte à la convention no 87 de l'OIT:
635. A l'issue de la grève générale observée en mars 1995, le climat était à l'optimisme quant au règlement de tous les problèmes demeurés en instance entre la SFTU et le gouvernement, mais il n'en a rien été. Les divergences de vues ont persisté sur un certain nombre de questions et un climat de défiance s'est installé. La SFTU considérait les dispositions du projet de loi sur les relations professionnelles comme une tentative manifeste soit de neutraliser ses dirigeants, soit de les éliminer.
636. Au début de juin 1995, les autorités ont prétendu que Jan Sithole n'avait pas droit à la citoyenneté swazie, bien qu'il soit né dans le pays, qu'il y ait vécu toute sa vie et que sa mère ait été de nationalité swazie. Son père était originaire du Mozambique. La police s'est présentée à son domicile le 3 juin à 1 heure du matin pour lui remettre une lettre du chef des services d'immigration lui ordonnant de comparaître devant un conseil de la citoyenneté le 22 juin afin de motiver sa demande de nationalité swazie. Des articles de journaux évoquaient déjà l'éventualité de son expulsion au Mozambique.
637. Jan Sithole avait demandé la nationalité swazie en 1979 afin de se conformer aux normes juridiques de 1974, mais sa demande était restée sans réponse. Ultérieurement, en vertu de la loi de 1992 sur la citoyenneté, la nationalité swazie a été accordée à toute personne de père non swazi, et toutes ces personnes ont été invitées à retirer une attestation de naturalisation au ministère des Affaires étrangères. L'audition de Jan Sithole devant le Conseil de citoyenneté, qui avait été reportée au 20 juillet, n'a finalement pas eu lieu. Le 19 juillet, les autorités lui ont demandé par écrit "des preuves convaincantes qu'il remplissait les conditions requises par la loi pour devenir un citoyen du Swaziland".
638. Le 9 juillet, après le nouvel échec des négociations avec le gouvernement au sujet de ses revendications, la SFTU a appelé pour le 17 juillet à une grève à l'échelle nationale, vu que bon nombre de ses revendications n'avaient pas été satisfaites. Jan Sithole continuait de recevoir par téléphone des menaces de mort anonymes et la SFTU faisait part de rumeurs selon lesquelles il disparaîtrait avant le 17 juillet.
639. Le 14 juillet, le Premier ministre a rendu le décret-loi no 100 qualifiant de boycottage la grève générale organisée par la SFTU et rendant ainsi passible d'une peine de six mois de prison toute personne qui favorise un boycottage. Le gouvernement a mobilisé les services de police, l'armée et le personnel pénitentiaire et a déclaré qu'ils feraient usage de la force contre ceux qui participent à la grève. Des troupes ont été déployées dans les principaux établissements pour intimider les travailleurs. En outre, des menaces, des actes d'intimidation et des licenciements ont été observés sur les lieux de travail.
640. L'annonce de l'absence du travail a conduit à un accord de dernière minute sur l'ouverture de négociations tripartites et à la suspension de l'absence du travail pour une période de deux semaines. Une commission tripartite a été instituée pour examiner le projet de loi de 1995 sur les relations professionnelles. Le 21 juillet, le gouvernement abrogeait le décret-loi no 100.
641. La CISL indique que, dans la soirée du 29 août, quatre hommes masqués et armés de fusils automatiques ont arrêté la voiture de Jan Sithole. Ils ont dépouillé ce dirigeant syndical de ses vêtements, de ses papiers personnels et de documents de la SFTU, et l'ont enfermé dans le coffre de sa voiture. L'un des ravisseurs a manifesté l'intention de le tuer. La voiture a été conduite dans la banlieue de Manzini où elle a été abandonnée au milieu de la route dans un endroit sombre. Jan Sithole a été libéré du coffre de la voiture le lendemain matin par un passant.
642. La CISL ajoute que, selon la SFTU, des agents du gouvernement sont à l'origine de l'enlèvement et de la tentative d'assassinat. Les documents volés par les ravisseurs de Jan Sithole auraient été en possession de la police.
643. Le 15 novembre, six militants syndicaux et deux membres de groupes prodémocratiques ont été arrêtés à Mbabane. Au nombre des syndicalistes arrêtés figuraient les responsables suivants de syndicats affiliés à la SFTU: Themba Shongwe, vice-président du Syndicat des travailleurs de l'information; Barbara Dlamini, secrétaire générale du Syndicat des travailleurs de l'hôtellerie et de la restauration; Julia Ndwandwa, trésorière du Syndicat des travailleurs des ports et des télécommunications; et John Masombuka, président du Syndicat des marchands ambulants. Ils ont été relâchés le lendemain après avoir subi un interrogatoire. Les arrestations auraient été liées à une réunion prodémocratique qui s'était déroulée les 11 et 12 novembre. Le même mois, Jabulani Nxumalo, secrétaire général adjoint de la SFTU, a été licencié sous prétexte d'une réorganisation dans son entreprise.
644. Vers la fin de 1995, les autorités ont commencé à enquêter sur la citoyenneté de Richard Nxumalo, président de la SFTU. La police et des membres des services de renseignements se sont rendus à son domicile dans les zones rurales et, à deux reprises au moins, ont interrogé plusieurs personnes pour savoir à quel moment sa famille s'était établie dans la région. Ils ont également rencontré son employeur pour consulter ses états de service. Les autorités prétendent que Richard Nxumalo n'est pas swazi, mais sud-africain.
645. La SFTU a annoncé qu'elle lancerait une action collective au début de 1996 pour continuer de faire pression sur le gouvernement afin qu'il satisfasse à ses 27 revendications. Sur les ondes de la radio d'Etat, un fonctionnaire du gouvernement a rétorqué que la force serait utilisée contre les travailleurs en grève.
646. Le 16 décembre, le Vice-premier ministre a allégué que la SFTU était hostile à la monarchie et s'apprêtait à renverser le Roi, ce que la fédération a démenti avec véhémence.
647. La SFTU a annoncé le déclenchement d'un mouvement de grève pour le 22 janvier 1996, afin de demander aussi la légalisation des partis politiques.
648. Le 18 janvier, le Premier ministre a proclamé par le décret-loi no 11 de 1996 que la grève générale était un boycottage relevant de l'article 13 de la loi de 1963 sur l'ordre public. Aucune mise en liberté sous caution ne peut être accordée pour une accusation prononcée en vertu de cette loi.
649. Le 22 janvier, Jan Sithole, Richard Nxumalo et Jabulani Nxumalo ont été arrêtés lors d'une réunion avec la Fédération des employeurs du Swaziland. Ils ont été conduits au poste de police de Mbabane où on leur a notifié qu'ils seraient inculpés en vertu des articles 40 et 75 de la loi de 1995 sur les relations professionnelles. Leur avocat a été autorisé à leur rendre visite et a appris que l'affaire serait instruite le lendemain à Mbabane, et que les trois dirigeants syndicaux seraient détenus à Piggs Peak, à 70 kilomètres de là. Or c'est au poste de police de Mliba, à 93 kilomètres dans la direction opposée, que ceux-ci ont été conduits. La police n'est venue les chercher que le lendemain à 13 h 30. Alors qu'ils croyaient se rendre à Mbabane, ils ont été conduits à un autre poste de police, à Siphofaneni, soit à 75 kilomètres environ de Mbabane.
650. A Mliba, les dirigeants de la SFTU ont été détenus dans des conditions effroyables. Ils partageaient avec trois autres personnes une cellule d'un mètre carré et demi sans eau et sans lumière.
651. Un magistrat et le Procureur général de l'Etat se sont rendus au poste de police pour instruire l'affaire. Heureusement, le président de l'Ordre swazi des avocats a remarqué le groupe de véhicules. Il s'est rendu au poste de police et a constaté que les dirigeants syndicaux avaient déjà été inculpés en application de la loi de 1963 sur l'ordre public, suite au décret-loi no 11 de 1996, et cela en l'absence de leur avocat (la confédération plaignante a annexé à sa plainte un exemplaire du procès-verbal).
652. Le président de l'Ordre des avocats a dénoncé le fait qu'ils avaient été inculpés en l'absence d'un avocat, et l'affaire a été ajournée. Accompagné de l'avocat de la SFTU à qui on avait dit au départ que l'audience aurait lieu à Mbabane, puis à Big Bend, il s'est rendu à Siphofaneni. Lorsque les deux avocats sont arrivés dans la localité, l'affaire avait été instruite et la mise en liberté sous caution refusée. Le magistrat avait ordonné que les trois dirigeants syndicaux soient placés en détention provisoire en attendant une nouvelle audience qui aurait lieu dans un délai de sept jours. Le Procureur général a recommandé qu'ils soient placés dans une prison de haute surveillance. La police a refusé de révéler à l'avocat leur lieu de détention. On a finalement découvert qu'ils avaient été conduits à la prison de Big Bend où ils sont demeurés peu de temps avant d'être transférés à la prison de haute surveillance de Matsapa.
653. Le lendemain, l'avocat de la SFTU a déposé une demande urgente de mise en liberté provisoire et a contesté les inculpations prononcées par la Cour suprême de Mbabane. Le 25 janvier, jour où les avocats du gouvernement devaient défendre leur cause, l'affaire a été classée. Dans son résumé, le juge a émis de vives critiques sur la façon dont le ministère public a traité l'affaire. Il a déclaré que des informations fausses et mensongères avaient été fournies aux avocats au sujet du lieu de détention des responsables de la SFTU, des chefs d'accusation sous lesquels ils étaient détenus et du lieu de leur audition. Par la suite, le juge a été rétrogradé de président de la Cour par intérim au poste de juge titulaire.
654. Après leur libération le 25 janvier, les trois dirigeants syndicaux ont participé à une réunion syndicale à la raffinerie de sucre de Simunye. L'identité de tous les participants a été contrôlée pour vérifier que les représentants syndicaux étaient bien accrédités. Une voiture est arrivée avec deux plaques d'immatriculation superposées l'une sur l'autre. Après contrôle, il a été établi que le véhicule avait une plaque d'immatriculation du gouvernement, masquée par une plaque privée. Les deux occupants de la voiture ont pris la fuite. Ils ont été pris après une poursuite et on a découvert qu'ils faisaient partie des forces de police. La voiture a été fouillée: elle contenait des revolvers et deux pistolets, des munitions, un matériel d'enregistrement et des émetteurs-récepteurs. Il y avait plusieurs plaques d'immatriculation dans le coffre de la voiture. La SFTU a dénoncé ces faits à la police qui a confisqué la voiture. Le gouvernement avait déployé l'armée et la police dans la zone.
655. La SFTU a suspendu l'ordre de grève générale du 29 janvier. La police avait lancé des gaz lacrymogènes et frappé des travailleurs au cours du mouvement de grève, et une jeune fille de 16 ans avait été tuée par une balle perdue tirée par la police.
656. Le gouvernement a ensuite déclaré à la SFTU qu'il avait chargé cinq ministres d'Etat de négocier avec la fédération. La SFTU a cherché pendant deux jours à rencontrer les négociateurs du gouvernement, mais en vain. Le jour suivant, le gouvernement a fait savoir par écrit qu'il était prêt à rencontrer le jour même les responsables de la SFTU, en sachant pertinemment que la réunion ne pourrait avoir lieu du fait que les responsables de la fédération se rendaient aux obsèques de la jeune fille qui avait été tuée.
657. La SFTU a prévu d'organiser une manifestation de masse pour le 4 février et la police a menacé de procéder à des arrestations et de provoquer des affrontements si la manifestation avait lieu. Les autorités ont interdit la manifestation.
658. Le 7 février, Jabulani Nxumalo, vice-secrétaire général de la SFTU, a été arrêté et accusé d'avoir falsifié un diplôme d'études secondaires en 1984. Il a été relâché sous caution. Des dirigeants de la SFTU ont continué de recevoir des menaces de mort.
659. Le gouvernement a lancé de nouvelles accusations contre les trois dirigeants de la SFTU (Jan Sithole, Richard Nxumalo, Jabulani Nxumalo), deux hauts responsables syndicaux (Themba Msibi, Barbara Dlamini) et contre la SFTU elle-même. Ils ont été accusés, en application de l'article 40 et des articles 73 et 75 de la loi sur les relations professionnelles, d'avoir organisé la grève générale de janvier. Ils ont été cités à comparaître le 29 mars. Les négociations avec le gouvernement ont été suspendues, car tous les inculpés faisaient partie de l'équipe de négociation de la SFTU.
660. La CISL conclut que le climat d'intimidation et de violence instauré à l'encontre des responsables de la SFTU et le non-respect des droits de l'homme rendaient impossible l'exercice d'activités syndicales normales. Le secrétaire général de la SFTU, Jan Sithole, et les autres dirigeants de cette fédération sont victimes d'une répression systématique en raison de leurs activités syndicales. Les travailleurs se voient refuser le droit de grève de manière flagrante, et l'ampleur de l'ingérence du gouvernement dans les affaires syndicales démontre son intention de briser le mouvement syndical indépendant et démocratique.
661. Dans sa communication du 29 mai 1996, la CISL ajoute que l'article 3 de la loi de 1963 sur l'ordre public, qui habilite la police à accorder ou à refuser l'autorisation de tenir des réunions et des rassemblements publics, s'applique aux réunions syndicales se tenant au Swaziland et autorise par conséquent la police à y assister.
B. Informations additionnelles de l'organisation plaignante
662. Dans une communication en date du 6 février 1997, la CISL a transmis des informations additionnelles en ce qui concerne des violations graves de la liberté syndicale. Selon l'organisation plaignante, la SFTU aurait proposé, dans le cadre d'une nouvelle tentative pour stimuler le dialogue avec les autorités, la cessation du travail pendant deux jours à partir du 3 février 1997. A la suite d'une réunion syndicale tenue le 31 janvier, le secrétaire général de la SFTU, Jan Sithole, fut arrêté par la police. Au cours de cette même nuit, le président du syndicat, Richard Nxumalo, le vice-président, Themba Msibi, et le secrétaire général adjoint, Jabulani Nxumalo, ont également été appréhendés et détenus à la centrale de police de Mankayane à environ 40 km de Manzini. Ils ont été officiellement mis en accusation devant un juge le 3 février pour avoir contrevenu à l'article 12 de la loi de 1963 sur l'ordre public. Comme ce chef d'accusation ne prévoit pas qu'une caution puisse être versée, ils sont demeurés détenus. Il appert qu'ils auraient été transférés à l'établissement pénitentiaire à sécurité maximale de Matsapa le 4 février.
663. La CISL ajoute que, le 1er février 1997, sept policiers et 15 soldats lourdement armés ont fait irruption au quartier général de la SFTU et l'ont fouillé sans mandat. Cette même journée, le gouvernement a requis le tribunal du travail d'émettre une ordonnance en vue d'interdire à la SFTU, ses affiliés et tous les travailleurs du Swaziland de participer dans l'arrêt de travail. Cette interdiction fut immédiatement ordonnée aux termes de l'article 70 de la loi sur les relations professionnelles. L'avis légal no 9 du 31 janvier 1997 dispose que cet arrêt de travail constitue un boycott au regard de la loi de 1963 sur l'ordre public. Quiconque est trouvé coupable de saboter des services essentiels sera puni par un emprisonnement à vie. Toute autre infraction au regard de la loi entraîne des pénalités variant de six mois à cinq ans d'emprisonnement.
664. Le 2 février 1997, la SFTU a tenu une autre réunion en vue de demander le retrait des chefs pesant contre les dirigeants arrêtés, la fin des menaces, des actes d'intimidation et de harcèlement contre les syndicalistes, ainsi que le début des négociations sur la base de préoccupations socio-économiques auxquelles participerait une équipe ministérielle désignée. L'organisation ajoute que, à 19 heures, le 3 février, 150 policiers ont entouré 23 membres du conseil général de la SFTU ayant terminé une réunion dans une école. La police a alors ouvert le feu. Il n'y a pas eu de blessés. On ordonna aux syndicalistes de se rendre à la station de police locale où ils furent emprisonnés dans une salle remplie de gaz lacrymogènes jusqu'à trois heures du matin. Parmi les personnes détenues se trouvait le trésorier de la SFTU, Mxolisi Mbata, individu se déplaçant à l'aide d'une chaise roulante. L'organisation plaignante ajoute que les soldats l'auraient tiré hors de son fauteuil et l'auraient forcé à ramper jusqu'à la centrale de police. Tous les membres du conseil général du syndicat auraient été battus et interrogés individuellement. En réponse à une question visant à vérifier ce qui leur permettait de tenir une réunion sans autorisation préalable de la police, le secrétaire général aurait déclaré qu'il s'agissait d'une réunion privée qui ne nécessitait pas d'autorisation.
665. La première journée de l'arrêt de travail a rencontré un certain succès dans la plupart des secteurs économiques. Des mesures considérables de sécurité ont été imposées, incluant la présence de soldats lourdement armés gardant les centrales électriques, les réservoirs d'eau, les lignes de télécommunication, les aéroports et les banques à Mbabane et Manzini. Des actes de violence et d'intimidation auraient été commis par les forces policières. L'organisation plaignante ajoute que le syndicaliste Simon Tsabedze aurait été battu, et que la maison du fiduciaire de la SFTU, Afrika Magongo, aurait été perquisitionnée par la police sans mandat. En outre, la police aurait cerné les bureaux de la SFTU rendant son accès impossible pour les travailleurs concernés.
666. Dans sa communication du 4 mars 1997, la CISL a précisé que les dirigeants de la SFTU, arrêtés le 31 janvier, ont été libérés.
C. Réponse du gouvernement
667. Dans sa communication du 24 décembre 1996, le gouvernement met l'accent sur la stabilité et la bonne réputation dont jouit le Swaziland en matière de climat social harmonieux et ajoute qu'il bénéficie d'une loi sur les relations professionnelles qui facilite la constitution d'organisations d'employeurs et de travailleurs aux fins de négocier les conditions d'emploi, y compris le droit des fédérations d'exprimer leur opinion sur l'action du gouvernement et sur la gestion des affaires publiques. Le gouvernement ajoute cependant que les événements récents ont conduit les organisations de travailleurs à s'employer activement à mobiliser les forces syndicales pour susciter des transformations politiques en prenant prétexte des questions liées au travail. C'est ainsi que les organisations de travailleurs dirigées par la SFTU ont menacé de semer l'anarchie afin de déstabiliser le gouvernement et de compromettre l'action des responsables de l'exécution des lois, qui ont réagi en prenant des mesures efficaces destinées au maintien normal de l'ordre public.
668. Le gouvernement indique en outre que s'il accepte le principe du contrôle législatif en ce qui concerne toutes les lois relatives à l'emploi, au moyen de consultations avec les partenaires sociaux, il se réserve également le droit de gouverner, de maintenir la paix et la stabilité et de créer un climat propice au respect mutuel de la primauté du droit. Enfin, le gouvernement confirme son souhait de collaborer avec l'OIT et indique qu'il examinera toute opinion ou recommandation qui seront formulées sur le sujet.
669. En ce qui concerne les actes d'intimidation et de harcèlement que la police aurait commis à l'encontre de dirigeants de la SFTU, le gouvernement indique qu'il n'était pas au courant de pareils agissements, mais ajoute que la police est légalement tenue d'assister aux réunions publiques pour assurer le maintien de l'ordre public ainsi que pour protéger la vie et la propriété, tout en précisant que cette obligation ne saurait être synonyme d'ingérence étant donné que la police n'influe en rien sur les décisions prises lors de ces réunions. Dans l'éventualité où l'ordre public serait menacé, la police est autorisée à utiliser la force dans une mesure minimum et suffisante pour accomplir son devoir légitime, comme l'utilisation de gaz lacrymogènes pour disperser des fauteurs de troubles. Le gouvernement souligne que même un minimum de force n'est pas utilisé aveuglément.
670. Tout en admettant que la police a eu de fréquentes discussions avec M. Jan Sithole, secrétaire général de la SFTU, concernant des questions de sécurité nationale pendant la grève, le gouvernement indique qu'il n'a pas eu connaissance de ce que M. Sithole aurait été interrogé, que lui et son organisation auraient été associés à des partis politiques et qu'une plainte aurait été déposée auprès de la police selon laquelle M. Sithole aurait été conduit par la police dans un champ de canne à sucre, accusé de perturber le climat social et de rendre le pays ingouvernable. Le gouvernement précise aussi qu'il n'a pas eu connaissance d'allégations concernant la surveillance policière dont le domicile de M. Sithole aurait été l'objet, de coups de téléphone anonymes, etc. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle des agents gouvernementaux auraient planifié un accident pour éliminer M. Sithole, le gouvernement déclare qu'il n'a pas eu connaissance de pareille machination et insiste sur le fait qu'en aucun cas il ne pourrait être mêlé à un crime quelles que soient les circonstances. Pour ce qui est de la citoyenneté de M. Sithole, le gouvernement indique que M. Sithole a été cité à comparaître devant le Conseil de la citoyenneté pour un simple entretien étant donné qu'il a demandé en 1979 la nationalité swazie, en vertu des dispositions de l'arrêté de 1974 sur la citoyenneté, et que cette citation n'était aucunement liée à son rôle de dirigeant du mouvement syndical. Enfin, le gouvernement estime que le fait de le soupçonner d'être à l'origine de l'enlèvement de M. Sithole est à la fois dénué de tout fondement et totalement irresponsable. Les actes d'enlèvement en voiture s'inscrivent dans le cadre d'une vague de délits qui affectent non seulement le Swaziland, mais l'ensemble de l'Afrique australe. Cette affaire, ainsi que d'autres cas similaires, fait l'objet d'une enquête de police.
671. Le gouvernement confirme l'allégation selon laquelle un travailleur a malheureusement été blessé au cours d'une grève dans la raffinerie de sucre de Mhlume. Cependant, les travailleurs avaient refusé d'obtempérer à une décision judiciaire rendue à la demande de la direction leur ordonnant de se maintenir à 100 mètres de distance de la raffinerie de sucre. La police était sur les lieux pour faire respecter l'ordre public et pour protéger la vie des personnes et les biens de l'entreprise. La foule des grévistes, armés de toute une série d'engins dangereux, a agressé les membres de la direction, et la police a fait son devoir en lançant des grenades lacrymogènes dont une a frappé à la jambe et blessé l'un des travailleurs engagés dans l'affrontement.
672. En ce qui concerne les arrestations liées à la grève de mars 1995, le gouvernement indique qu'il n'a connaissance que de l'arrestation de 19 individus surpris en train de piller des magasins, dont six ont été jugés et condamnés par décision de justice. Le gouvernement confirme néanmoins que la police a interrompu le 24 mars une réunion de la SFTU, afin de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, en application de la loi sur l'ordre public.
673. S'agissant de l'allégation selon laquelle la loi de 1996 sur les relations professionnelles porte atteinte au droit syndical et au droit de grève, le gouvernement affirme qu'au contraire cette loi contient plusieurs dispositions qui garantissent ces droits. En outre, contrairement aux allégations, le gouvernement indique que les partenaires sociaux ont été consultés au sujet de ce projet de loi, mais qu'ils ont été incapables de parvenir à un consensus sur les questions fondamentales. Pour ce qui est des allégations spécifiques de la confédération plaignante concernant les dispositions de la loi, le gouvernement formule les observations suivantes:
674. De l'avis du gouvernement, le décret-loi no 100 adopté par le Premier ministre le 14 juillet 1995, qualifiant la grève générale de boycottage et ordonnant à la police de faire usage de la force, était uniquement destiné à remédier à la situation provoquée par les responsables de la SFTU qui avaient incité des personnes membres ou non de syndicats qui lui sont affiliés à prendre part à une assemblée et à des activités tumultueuses et séditieuses. La vie et les biens des personnes étaient en danger en raison d'actes de violence sporadiques et incontrôlés qui consistaient notamment à incendier des autobus et à frapper des passagers effectuant le trajet entre leur domicile et leur lieu de travail. En outre, la police n'a pas reçu l'ordre de faire usage de la force, mais de faire tout son possible, dans le cadre de la loi, pour protéger la vie et les biens. En tout état de cause, le décret-loi a été ultérieurement retiré pour faciliter les négociations. Le gouvernement indique qu'il en va de même du décret-loi no 11 de 1996.
675. Pour ce qui est du licenciement de M. Nxumalo, le gouvernement indique qu'il s'agit d'une affaire intérieure à l'entreprise et que le gouvernement n'est jamais associé à ce genre d'affaire, à moins qu'un rapport sur un conflit du travail soit présenté au ministère du Travail. Dans de tel cas, une procédure de conciliation est entamée. Or il n'a pas été présenté de rapport semblable dans ce cas.
676. Au sujet de l'allégation selon laquelle un juge de la Cour suprême aurait été rétrogradé à la suite de vives critiques qu'il avait émises sur la façon dont les dirigeants du syndicat de la SFTU avaient été traités, le gouvernement indique qu'aucun juge de la Cour suprême n'a jamais été rétrogradé. Il affirme néanmoins qu'un juge a été appelé à faire office de président du tribunal, alors que le pays était encore à la recherche d'un candidat apte à occuper le poste. Ce n'était pas la première fois que ce juge était appelé à siéger, puis en était dispensé lorsque la personne appropriée était désignée. Lorsqu'il a été consulté, le juge a convenu qu'il ne verrait pas d'inconvénient à être remplacé par le titulaire actuel. Le procès-verbal de la Commission des services judiciaires peut être consulté à cet effet. Devant l'Ordre des avocats qui craignait qu'il n'ait pas été informé du changement, le président du tribunal a expliqué d'une manière catégorique qu'il avait l'obligation de demander au juge de reprendre ses fonctions initiales. De par sa nature, un poste occupé par intérim n'offre pas à celui qui l'a exercé provisoirement la garantie qu'il finira par en devenir le titulaire.
677. En ce qui concerne la grève annoncée pour janvier 1996, le gouvernement nie que des fonctionnaires aient menacé de faire usage de la force contre quiconque à un moment donné. Ils avaient simplement indiqué que la justice suivrait son cours à l'encontre de personnes soupçonnées d'avoir commis des actes criminels. Le gouvernement confirme cependant l'arrestation de responsables de la SFTU à la suite de cette grève, mais dément que les avocats se soient vu refuser le droit de visite à leurs clients, et que les responsables syndicaux aient été détenus dans des conditions effroyables, alors qu'ils étaient en fait enfermés dans des cellules normales. S'ils ont été déplacés d'un poste de police à un autre, c'est uniquement pour des raisons de sécurité.
678. En ce qui concerne l'accusation d'espionnage portée contre deux fonctionnaires de police, le gouvernement indique que ces fonctionnaires ne faisaient que patrouiller à proximité de la réunion de la SFTU pour assurer la sécurité. Selon le gouvernement, ils ont ensuite été agressés par un groupe de travailleurs et dépossédés de leur matériel pour être enfin remis au directeur de la SFTU en étant soupçonnés à tort et délibérément d'être des espions chargés par le gouvernement d'assassiner les hauts dirigeants de la SFTU. La SFTU n'a cependant fourni aucune preuve tangible à cet égard.
679. En ce qui concerne la jeune fille tuée lors de la grève de janvier 1996, le gouvernement indique que, après avoir reçu des informations concernant certains troubles, à savoir des pierres lancées contre des automobiles et des bruits de coups de feu provenant d'un groupe de grévistes, les forces de police ont été déployées pour maîtriser la situation. Arrivées sur place, elles ont tiré des grenades lacrymogènes et des grenades paralysantes pour disperser les manifestants qui ont fini par prendre la fuite. En raison du bruit assourdissant des grenades paralysantes, il n'a pas été possible de déterminer si des coups de feu avaient été tirés en provenance des grévistes. Après cet incident, on a découvert que la jeune fille en question avait été blessée et elle est ensuite décédée. La police a ouvert une enquête qui n'est pas encore terminée.
680. Le gouvernement confirme le mandat d'arrestation contre Jabulani Nxumalo pour falsification présumée d'un diplôme d'études secondaires et donne des indications détaillées sur les raisons qui ont conduit à soupçonner que ce diplôme a en fait été dérobé à Michael Nxumalo pour être falsifié en lui substituant le prénom de Jabulani. Le gouvernement affirme que cette arrestation est étrangère à la qualité de membre de la SFTU de l'intéressé et à une quelconque intrigue policière.
681. Enfin, en ce qui concerne les nouvelles accusations portées contre des responsables de la SFTU pour la grève de janvier, le gouvernement indique que celles-ci ont été prononcées par le Vice-premier ministre, dont le devoir est de faire respecter l'ordre public conformément à la législation du Swaziland, et n'avaient aucun rapport avec des querelles sociales. Selon la loi, le Vice-premier ministre peut user de sa prérogative pour amender ou modifier à tout moment des accusations pénales avant qu'un inculpé plaide coupable sur le chef d'accusation initial. Le fait que des négociations se déroulaient au même moment est regrettable, mais l'application de la loi ne pouvait être entravée.
682. Le comité note que les allégations qui font l'objet du présent cas ont trait à l'intimidation, au harcèlement, à l'arrestation et à la détention de dirigeants syndicaux ainsi qu'à l'assaut donné à des locaux syndicaux, à la dissolution d'assemblées syndicales, à l'interdiction de faire grève et à l'entrée en vigueur en janvier 1996 d'une loi nouvelle sur les relations professionnelles contenant de nombreuses dispositions qui sont contraires aux principes de la liberté syndicale.
683. Le comité remercie le représentant du Directeur général, le professeur Barney Jordaan, pour son rapport sur la mission de contacts directs qu'il a effectuée au swaziland en octobre 1996. Le comité prend note de la coopération pleine et entière que le gouvernement a manifestée pendant cette mission, ainsi que des informations fournies par le gouvernement dans sa communication du 24 décembre 1996.
684. Le comité prend note tout d'abord de l'indication générale du gouvernement selon laquelle les organisations de travailleurs ont récemment pris une part active à une tentative d'introduire des transformations politiques en prenant prétexte des questions liées au travail. Si le comité a estimé que ce n'est que dans la mesure où elles prendront soin de ne pas conférer à leurs revendications professionnelles un caractère nettement politique que les organisations syndicales pourront légitimement prétendre à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à leurs activités, il a également fait observer que la frontière entre ce qui est politique et ce qui est proprement syndical est difficile à tracer avec netteté. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition (révisée), 1996, paragr. 457.] Dans le présent cas et sur la base des informations fournies dans le rapport de mission, le comité est d'avis que les questions sous examen concernent l'exercice d'activités syndicales légitimes et qu'elles n'entrent pas dans le domaine des activités purement politiques, dont l'appréciation ne relève pas de la compétence du comité. En outre, le comité rappelle qu'un système démocratique est fondamental pour le libre exercice des droits syndicaux et que toutes les mesures adéquates doivent être adoptées pour garantir que ces droits puissent s'exercer normalement et dans un climat exempt de violence, de pressions, de craintes et de menaces de tous ordres et dans le respect des droits de l'homme. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 34 et 36.]
Loi de 1996 sur les relations professionnelles
685. Pour ce qui est des allégations concernant la violation des principes de la liberté syndicale par l'adoption de la loi sur les relations professionnelles (les dispositions pertinentes sont reproduites à l'annexe II), le comité, à l'instar de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, note avec regret que cette loi contient plusieurs dispositions qui enfreignent certains des principes les plus fondamentaux de la liberté syndicale. Il relève dans le rapport de mission que le projet de loi sur les relations professionnelles, rédigé par le gouvernement, aurait emprunté certains éléments au projet de l'OIT et au rapport de la Commission Wiehahn, mais qu'il n'a fait l'objet d'aucune consultation directe avec les partenaires sociaux avant d'être présenté au Parlement. En outre, alors qu'un forum tripartite a été constitué en vue de déterminer les aspects du projet de loi qui étaient inacceptables pour les partenaires sociaux et de proposer des solutions concertées et notant que ce forum a approuvé sans retard un protocole contenant 62 amendements unanimes, le comité déplore que le gouvernement paraît n'avoir fait aucun effort pour répondre aux préoccupations soulevées, mais semble avoir été soucieux de faire voter l'adoption de la loi dans sa version initiale. A cet égard, le comité appelle l'attention du gouvernement sur l'importance d'une consultation préalable des organisations d'employeurs et de travailleurs avant l'adoption de toute loi dans le domaine du droit du travail [voir Recueil, op. cit., paragr. 930] et exprime l'espoir que toutes nouvelles propositions concernant la législation du travail seront formulées sur la base de consultations fructueuses avec les partenaires sociaux.
686. En ce qui concerne les dispositions concrètes de la loi évoquées dans la plainte, le comité note que l'article 40 interdit à une fédération ou à l'un quelconque de ses responsables de provoquer ou d'encourager la cessation ou le ralentissement du travail ou des activités économiques sous peine d'emprisonnement et limite les activités des fédérations à des fonctions de consultation et de services. Tout en prenant note des explications données par le gouvernement au sujet de ces restrictions, le comité rappelle que, pour défendre les intérêts de leurs mandants de manière effective, les organisations de travailleurs et d'employeurs doivent avoir le droit de constituer des fédérations et des confédérations de leur choix qui devraient elles-mêmes jouir des divers droits reconnus aux organisations de base, notamment en ce qui concerne leur droit d'organiser librement leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d'action. De plus, l'interdiction faite aux fédérations et aux confédérations de déclencher la grève n'est pas compatible avec la convention no 87 (ratifiée par le Swaziland). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 621 et 478.] Le comité demande instamment au gouvernement d'amender sa législation de façon à assurer que les fédérations jouissent pleinement de leurs droits syndicaux, y compris du droit de grève. En ce qui concerne la peine maximale de cinq ans de prison pour participation à une grève déclenchée par une fédération, prévue à l'article 40(3) de la loi, tout en relevant l'indication du gouvernement selon laquelle des sanctions effectives sont nécessaires, le comité rappelle que nul ne devrait être privé de liberté et faire l'objet de sanctions pénales pour le simple fait d'avoir organisé une grève pacifique ou d'y avoir participé [voir Recueil, op. cit., paragr. 602] et demande instamment au gouvernement d'abroger les sanctions pénales énoncées à l'article 40(3), ainsi que celles qui figurent aux articles 69(2) (grève illégale), 72(3) (grève pendant qu'une procédure judiciaire est en cours), 73(3-5) et 74 (grève dans les services essentiels et toute aide financière destinée à la soutenir) et 87(3) (piquets de grève).
687. Les allégations font également mention de l'article 70 de la loi qui dispose que le ministre du Travail peut obtenir d'un tribunal une injonction en vue de mettre fin à une grève lorsqu'il estime qu'une telle action pourrait menacer ou compromettre l'intérêt national. Tout en notant que le gouvernement insiste sur le fait que ce pouvoir est soumis au contrôle judiciaire, le comité entend rappeler que le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique, uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire des services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 526.] De l'avis du comité, les restrictions imposées aux grèves qui nuisent à l'intérêt national n'entrent dans aucune des deux catégories ci-dessus. Le gouvernement est donc prié de prendre les mesures nécessaires pour abroger cet article de la loi.
688. S'agissant de l'allégation selon laquelle l'article 73 de la loi contient une définition trop large des services essentiels, le comité relève que cet article inclut les services de radio et télédiffusion dans la liste des services essentiels. A cet égard, le comité se doit de rappeler qu'il a estimé que les services de radio et télédiffusion ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme dans lesquels le droit de grève peut être interdit. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 545.] En outre, et relevant dans le rapport de mission les préoccupations soulevées par les travailleurs et les propositions de la Commission consultative du travail concernant les fonctionnaires, le comité note que les services essentiels sont aussi définis dans la loi comme tout service exécuté dans l'administration publique en rapport avec le gouvernement du Swaziland. Il rappelle, comme il est indiqué ci-dessus, que le droit de grève peut être restreint, voire interdit dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat, et il veut croire que l'application pratique de l'article 73(6) sera limitée en conséquence.
689. S'agissant de l'article 71 de la loi qui dispose que, lorsque le Procureur général a lieu de croire qu'une grève en cours ou envisagée n'est pas conforme aux dispositions de la loi précitée ou à toute autre loi, il peut demander unilatéralement au tribunal de rendre une ordonnance déclarative à cet effet et que, par la suite, les parties devront immédiatement s'abstenir d'entreprendre cette action faute de quoi le gouvernement peut prendre des mesures appropriées pour y mettre un terme, le comité considère que cet article n'enfreint les principes de la liberté syndicale que dans la mesure où les dispositions de la loi qui ont été violées par la grève portent atteinte aux principes de la liberté syndicale. A cet égard, le comité évoque ses conclusions énoncées plus haut concernant les restrictions du droit de grève.
690. La CISL fait également valoir que le greffier est investi de pouvoirs importants pour s'ingérer dans les statuts des syndicats. A ce sujet, le comité note que l'article 26 de la loi contient une longue liste de points qui doivent être inscrits dans les statuts d'une organisation, mais qui dans la plupart des cas semblent être des exigences de pure forme, laissant aux organisations elles-mêmes le soin de préciser les questions de fond. A cet égard, le comité rappelle que la simple énumération dans la législation des points devant être inscrits dans les statuts ne constitue pas en soi une atteinte au droit des organisations syndicales d'élaborer librement leurs règlements intérieurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 340.] L'organisation plaignante allègue cependant que le pouvoir du greffier de suspendre une organisation ou une fédération dont les statuts ne seraient pas conformes à la loi n'est pas soumis à l'approbation des autorités judiciaires. Le comité note à ce propos que le droit de faire appel de telles décisions devant le tribunal du travail est prévu à l'article 5(2) de la loi. Il rappelle toutefois que, pour que le principe selon lequel une organisation professionnelle ne doit pas être soumise à une suspension ou dissolution par voie administrative puisse s'appliquer convenablement, il ne suffit pas que la législation prévoie un droit d'appel contre ces décisions administratives, il faut que ces dernières ne puissent prendre effet qu'une fois écoulé le délai légal sans qu'un appel ait été interjeté ou lorsque ces décisions ont été confirmées par l'autorité judiciaire. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 681.] Le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que toute décision administrative visant à suspendre une organisation professionnelle soit différée en attendant l'issue de tout appel judiciaire correspondant.
691. Le comité relève néanmoins que l'article 30 de la loi confère également au greffier le pouvoir de refuser un enregistrement s'il est convaincu qu'une organisation déjà enregistrée est suffisamment représentative, en tout ou substantiellement, des intérêts pour lesquels l'organisation demande son enregistrement. Le comité relève dans le rapport de mission que la Commission Wiehahn avait maintenu ce système de syndicats d'industrie dans ses recommandations au motif que le droit de refus conféré au greffier signifiait en réalité qu'il lui est loisible d'enregistrer plus d'une organisation dans une branche d'activité et que tout refus peut faire l'objet d'un appel. Il convient néanmoins de rappeler que l'existence d'une organisation dans une profession déterminée ne doit pas constituer un obstacle à la création d'une autre organisation, si les travailleurs le souhaitent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 276.] Il demande donc instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger l'article 30(5) de la loi.
692. S'agissant de l'allégation selon laquelle la loi enfreint les principes de la liberté syndicale en interdisant aux personnes d'occuper un poste de responsabilité dans plus d'une organisation en même temps ou d'occuper un poste de responsabilité dans une organisation et dans un parti politique (article 35), le comité, tout en notant le souci du gouvernement d'éviter les conflits d'intérêt, rappelle qu'il incombe aux organisations de travailleurs et d'employeurs de déterminer les conditions dans lesquelles leurs dirigeants syndicaux sont élus, et que les autorités devraient s'abstenir de toute intervention indue dans l'exercice du droit garanti aux organisations de travailleurs et d'employeurs d'élire librement leurs représentants, conformément à la convention no 87. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 351.] Il demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger les restrictions susmentionnées à l'élection des représentants syndicaux et de s'en remettre aux organisations elles-mêmes du soin de déterminer les conditions d'éligibilité dans leurs propres statuts.
693. Relevant qu'après l'adoption de la loi la Commission tripartite consultative du travail a présenté au ministre du Travail et de la Fonction publique en mars 1996 des recommandations en vue d'amender ladite loi et se félicitant de l'ouverture du gouvernement qui a manifesté sa volonté de réviser la loi, le comité veut croire que le gouvernement prendra dans un très proche avenir toutes les mesures nécessaires pour amender sa législation afin de la mettre en conformité avec les principes précités, compte dûment tenu des propositions de la commission tripartite. Il demande au gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard. Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
Intervention de la police pendant des réunions syndicales,
usage de la force lors d'actions de protestation
et harcèlement policier
694. En ce qui concerne les allégations générales relatives à l'intervention de la police pendant des réunions syndicales, le comité relève dans le rapport de mission que le décret de 1973 sur les réunions et manifestations a été invoqué par le chef des services de police pour justifier la présence des forces de police chargées de veiller à ce que les réunions syndicales ne servent pas uniquement de façade à des groupements politiques d'opposition déclarés illégaux. A cet égard, le comité, de même que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, relève avec préoccupation que l'article 12 de ce décret impose d'importantes restrictions au droit des organisations de tenir des réunions et des manifestations pacifiques et que ces restrictions peuvent conduire à une violation grave de la liberté syndicale. Le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger l'article 12 de ce décret afin de permettre aux organisations syndicales de fonctionner librement et de s'abstenir de se livrer à de tels actes d'ingérence dans les activités syndicales.
695. Pour ce qui est des allégations générales selon lesquelles la police a brisé plusieurs grèves par l'usage de la force et de gaz lacrymogènes, le comité note que, selon les explications données par le chef des services de police, la police n'a fait usage de gaz lacrymogènes qu'à deux reprises, lorsque l'action de protestation devenait impossible à maîtriser. Bien qu'il ne soit pas possible au vu des informations disponibles de déterminer si la réaction de la police aux diverses grèves était disproportionnée, le comité souhaite rappeler l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels, que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux, et que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique dans des cas de mouvements de grève que dans des situations présentant un caractère de gravité et où l'ordre public serait sérieusement menacé. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 132, 475 et 580.]
696. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle une collégienne de 16 ans a été tuée par une balle perdue qui aurait été tirée par la police lors de la grève de janvier 1996 organisée par la SFTU, le comité note que, selon l'indication fournie par le chef des services de police, le rapport du médecin légiste a établi que la jeune fille a été tuée par une balle d'un calibre différent de celui qui est normalement utilisé par la police. Tout en notant également que cette affaire fait l'objet d'une enquête de police qui n'est pas encore terminée, le comité regrette qu'une enquête impartiale pour examiner l'affaire n'ait pas été diligentée. A cet égard, le comité rappelle que, dans les cas où la dispersion d'assemblées publiques par la police a entraîné la perte de vies humaines ou des blessures graves, il attache une importance spéciale à ce que l'on procède immédiatement à une enquête impartiale et approfondie des circonstances et à ce qu'une procédure légale régulière soit suivie pour déterminer le bien-fondé de l'action entreprise par la police et pour déterminer les responsabilités. En conséquence, et en vue d'instaurer un climat de confiance, le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour qu'on procède immédiatement à une enquête indépendante en vue de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables.
697. Pour ce qui est de l'arrestation et de la détention dont auraient fait l'objet des syndicalistes, et notamment six syndicalistes et deux membres de groupements prodémocratiques en novembre 1995, le comité estime que ces actions sont contraires aux principes de la liberté syndicale et insiste sur le fait que le gouvernement s'abstienne de prendre des mesures contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes dans l'exercice de leurs activités syndicales légitimes.
698. Le comité relève également les allégations selon lesquelles Jan Sithole, Richard Nxumalo et Jabulani Nxumalo, responsables de la SFTU, ont été arrêtés le 22 janvier et conduits du poste de police de Mbabane à celui de Siphofaneni, sans que leur avocat n'en ait été dûment informé. En conséquence, ces responsables syndicaux ont été inculpés le lendemain en l'absence de leur avocat. Tout en notant que ces accusations ont été ultérieurement levées par suite de la requête en récusation présentée par l'avocat de la SFTU, le comité relève également dans le rapport de mission que le chef des services de police a confirmé les allégations ci-dessus, déclarant que les responsables de la SFTU ont été déplacés pour leur sécurité personnelle et pour éviter toutes confrontations violentes au poste de police, et note que le fait que le changement de lieu de détention n'a pas été communiqué à leur avocat était purement involontaire. A cet égard, le comité doit rappeler que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques établit, en son article 14, le droit de toute personne accusée d'une infraction pénale à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix [voir Recueil, op. cit., paragr. 118], et il est donc persuadé que toutes les mesures seront prises à l'avenir pour veiller à ce que, en cas de détention, les avocats des syndicalistes seront dûment informés de leurs déplacements. Pour ce qui est de la rétrogradation alléguée du juge instruisant cette affaire, le comité prend note des explications données par le gouvernement et estime qu'il n'est pas en mesure de déterminer si le juge a été déplacé des fonctions qu'il occupait par intérim en raison de la position qu'il a adoptée au sujet du cas. Le comité tient néanmoins à souligner l'importance qu'il attache au principe de l'indépendance totale dont les autorités judiciaires doivent jouir pour faire pleinement respecter les principes de la liberté syndicale, de même que l'importance que revêt la perception de cette indépendance pour la promotion de relations professionnelles harmonieuses.
699. S'agissant des menaces de mort anonymes proférées contre M. Sithole et son enlèvement sous la menace d'une arme le 29 août, le comité relève que, de l'avis de la confédération plaignante, des agents du gouvernement étaient à l'origine de l'enlèvement étant donné que la police était, selon toute vraisemblance, en possession des documents dérobés à M. Sithole. D'après les informations fournies aux membres de la mission, le comité note que le chef des services de police n'avait pas connaissance de menaces de mort proférées contre des fonctionnaires de la SFTU et qu'aucune plainte n'a été déposée à ce sujet auprès des services de police. En ce qui concerne l'enlèvement, le comité note que, selon le gouvernement, les soupçons de l'organisation plaignante quant à une implication du gouvernement dans cette affaire sont à la fois dénués de tout fondement et injustifiables. Il ressort du rapport de mission que le chef des services de police a attribué l'enlèvement à des criminels et a indiqué que la police avait trouvé les papiers auxquels se réfère la confédération plaignante dans la zone où les auteurs de l'enlèvement ont dû trouver refuge. Selon le chef des services de police, une enquête est en cours qui pourrait durer jusqu'à un an. A cet égard, le comité estime que la disparition, y compris le bref enlèvement, de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l'ouverture d'enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits, et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits, et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d'empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 51.] Le gouvernement est donc prié d'indiquer les mesures qu'il a prises pour ouvrir une enquête indépendante concernant l'enlèvement de M. Sithole et de tenir le comité informé des résultats de cette enquête.
700. Le comité note que, selon le gouvernement, celui-ci n'avait pas connaissance d'une surveillance policière du domicile de M. Sithole, la convocation de ce dernier devant le Conseil de citoyenneté résultait de la demande de nationalité qu'il avait présentée quinze ans auparavant et la démarche n'était aucunement liée à ses fonctions de dirigeant du mouvement syndical. Il relève en outre le harcèlement dont aurait été victime Richard Nxumalo en ce qui concerne sa citoyenneté swazie et l'arrestation de Jabulani Nxumalo pour avoir falsifié un diplôme d'études secondaires plus de dix ans auparavant. En ce qui concerne Jabulani Nxumalo, le comité note une fois de plus que, selon le gouvernement, son arrestation est étrangère à son affiliation ou à ses activités syndicales. En outre, le comité est particulièrement préoccupé par le harcèlement systématique dont M. Sithole a été l'objet et insiste pour que le gouvernement prenne des mesures strictes pour y mettre fin. Le comité souhaite rappeler qu'il convient d'adopter toutes les mesures adéquates pour garantir que, quelle que soit la tendance syndicale, les droits syndicaux puissent s'exercer normalement, dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et dans un climat exempt de violence, de pressions, de crainte et de menaces de tous ordres et que des allégations de comportement criminel ne doivent pas être utilisées pour harceler des syndicalistes à cause de leur affiliation ou de leurs activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 36 et 43.] Le comité veut donc croire qu'à l'avenir des mesures seront prises pour veiller à ce que les syndicalistes ne soient pas harcelés à cause de leur affiliation ou de leurs activités, étant donné notamment que, dans le présent cas, le harcèlement concerne des faits qui remontent à 1979.
Abus du pouvoir d'ordonner l'interruption
des grèves de protestation
701. Le comité relève que, ces derniers temps, le gouvernement a eu fréquemment recours à des ordonnances juridiques qualifiant les grèves de boycottages en vertu de la loi de 1963 sur l'ordre public. Il note également que, selon les dernières allégations de l'organisation plaignante en date du 6 février 1997, le gouvernement a utilisé à nouveau la loi de 1963 sur l'ordre public afin de mettre un terme à la grève de boycottage convoquée par la SFTU pour le 3 février. Entre autres dispositions, la loi de 1963 sur l'ordre public rend toute personne favorisant un "boycottage" passible d'une peine de six mois de prison. Les grèves nationales de protestation de juillet 1995 et de janvier 1996 à l'appui des 27 revendications de la SFTU ont toutes deux été déclarées boycottages au sens de la loi de 1963 et, dans le dernier cas, des inculpations ont tout d'abord été prononcées à l'encontre des responsables de la SFTU en vertu de cette loi. En outre, le gouvernement a assimilé la grève de janvier 1996 à un boycottage avant même qu'elle n'ait lieu, déclarant que l'action aurait "probablement pour effet de provoquer la haine ou le mépris, de susciter le mécontentement à l'égard du pouvoir légitime du gouvernement du Swaziland ou de le déstabiliser, de mettre en danger l'ordre public et la vie économique du Swaziland". Aucune solution autre que l'interdiction de la grève ne semble avoir été recherchée en vue de maintenir l'ordre public. Le comité rappelle que le droit de grève peut être restreint, voire interdit uniquement dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, ou encore dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 526.] Le comité est d'avis que les deux actions à l'appui des 27 revendications de la SFTU constituent des activités syndicales légitimes et n'entrent pas dans les deux catégories ci-dessus. Tout en prenant note des préoccupations exprimées par le gouvernement au sujet d'un risque éventuel pour la vie et les biens des personnes, le comité déplore qu'aucune solution n'ait été recherchée pour assurer le maintien de l'ordre public dans le cadre de l'action de grève envisagée. Il estime donc que la déclaration d'illégalité et l'interdiction d'une grève nationale déclenchée pour protester contre les effets sociaux de la politique économique du gouvernement constituent une grave violation de la liberté syndicale et demande instamment au gouvernement de s'assurer que la loi de 1963 sur l'ordre public soit amendée pour faire en sorte qu'à l'avenir il ne soit plus fait usage de cette loi pour étouffer une grève légitime et pacifique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 493.]
Accusations portées contre les responsables
de la SFTU pour avoir participé à une action
de protestation
702. Le comité note que, alors que les accusations initialement portées contre Jan Sithole, Richard Nxumalo et Jabulani Nxumalo concernant l'action de protestation de janvier 1996 ont été levées, de nouvelles inculpations ont été prononcées depuis lors à l'encontre de ces trois responsables de la SFTU, de deux autres dirigeants syndicaux (Themba Msibi et Barbara Dlamini) et de la SFTU elle-même en vertu de l'article 40 de la loi sur les relations professionnelles compte tenu des articles 73 et 75. A cet égard, le comité souhaite se référer tout d'abord aux observations qu'il a formulées au paragraphe 63 du présent document sur ces articles de la loi. De plus, le comité se doit une fois encore de souligner l'importance du droit de grève qu'il considère comme un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 475.] Il invite donc le gouvernement à prendre des mesures immédiates pour abandonner les accusations qui ont été portées contre ces responsables de la SFTU en raison de l'exercice d'activités syndicales légitimes.
Licenciements
703. Le comité prend note des allégations générales de licenciements et de l'allégation concrète selon laquelle le secrétaire général adjoint de la SFTU, Jabulani Nxumalo, a été licencié sous le prétexte d'une réorganisation des activités dans son entreprise. Tout en relevant que, selon le gouvernement, le licenciement concerne les affaires internes de l'entreprise et que le ministère du Travail n'a été saisi d'aucune demande de conciliation, le comité rappelle que le licenciement d'un travailleur en raison de son appartenance à un syndicat ou de ses activités syndicales porte atteinte aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 702.] Il prie donc le gouvernement d'ouvrir sans retard une enquête indépendante sur le licenciement de Jabulani Nxumalo et, s'il apparaît que son licenciement était lié à ses activités syndicales, de prendre les mesures nécessaires pour qu'il soit réintégré dans son poste de travail s'il le souhaite. Il prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
Nouvelles allégations
704. Enfin, le comité exprime sa grave préoccupation en ce qui concerne les nouvelles allégations soumises par la CISL dans sa communication en date du 6 février 1997, notamment celles relatives aux arrestations de nombreux dirigeants de la SFTU et des membres de son conseil général ainsi qu'à la détention des secrétaire général, président, vice-président et secrétaire général adjoint de ce syndicat. Tout en notant l'information de l'organisation plaignante selon laquelle les dirigeants de la SFTU, qui avaient été arrêtés et mis en accusation aux termes de la loi de 1963 sur l'ordre public, ont été libérés, le comité estime devoir rappeler ses conclusions relatives à l'article 70 de la loi sur les relations professionnelles et l'utilisation abusive de la loi de 1963 sur l'ordre public. Le comité insiste sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales en particulier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 71.] Le comité note les informations transmises par le gouvernement le 4 mars 1997 et se propose de les examiner à sa prochaine session.
705. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport sur une mission de contacts directs au Swaziland
(30 septembre -- 4 octobre 1996)
Cas no 1884
I. Introduction
Dans des communications datées des 23 et 29 mai 1996, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a soumis une plainte contre le gouvernement du Swaziland pour violations des droits syndicaux (cas no 1884).
Par ailleurs, au cours de ses débats sur la question de l'application de la convention no 87 au Swaziland, en 1996, la commission chargée de l'application des conventions et recommandations de la Conférence a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental selon lesquelles son gouvernement souhaitait qu'une mission de l'OIT se rende dans le pays et enquête sur toutes les allégations soumises à la Commission de la Conférence qui avaient trait à un certain nombre d'éléments figurant dans la plainte.
Le Directeur général a désigné M. Barney Jordaan, professeur de droit du travail à l'Université de Stellenbosch en Afrique du Sud, pour effectuer cette mission, qui s'est déroulée du 30 septembre au 4 octobre 1996. M. Jordaan était accompagné de Mme Karen Curtis, juriste principale du Service de la liberté syndicale, et de M. Ndjonkou, directeur du bureau de l'OIT à Pretoria.
II. Déroulement de la mission
Pendant sa visite au Swaziland, la mission a eu des entretiens avec le Vice-premier ministre, le ministre du Travail et de la Fonction publique, le ministre des Affaires étrangères et d'autres fonctionnaires de ces ministères et du ministère de la Planification économique et du Développement. Il y a eu également des réunions avec les organisations de travailleurs suivantes: Fédération des syndicats du Swaziland (SFTU), Fédération des travailleurs du Swaziland (SFL), Association nationale des enseignants du Swaziland (SNAT), et Association des enseignants et professeurs d'université (ALAP). La mission a aussi rencontré la Fédération des employeurs du Swaziland (FSE), les membres de la Commission tripartite consultative du travail, le chef des services de police et d'autres fonctionnaires, ainsi que des parlementaires. Enfin, la mission a également rendu une visite de courtoisie au représentant résident du PNUD (pour la liste des personnes rencontrées voir en annexe).
III. Situation des cas soumis au comité
avant la mission
La plainte de la CISL concernait des actes de harcèlement, des agressions, des menaces, des arrestations et des détentions de dirigeants et de militants de la Fédération des syndicats du Swaziland. La CISL allègue des actes précis de répression et d'ingérence de la part des forces de police et des autorités gouvernementales lors de rassemblements et de réunions des syndicats, ainsi que lors de grèves, et l'arrestation de plusieurs dirigeants et membres de syndicats. Enfin, la CISL se plaint de plusieurs dispositions de la loi de 1996 sur les relations professionnelles, qui violent, d'après elle, les principes de la liberté syndicale. Elle se plaint en particulier de dispositions qui interdisent aux fédérations de déclencher une grève et imposent des sanctions pénales pour violation de la loi; elle relève la définition très large des services essentiels; les pouvoirs du Procureur général de requérir une ordonnance pour mettre fin à une grève qui nuit à l'intérêt national; les dispositions qui confèrent au greffier le pouvoir, non susceptible d'appel, de suspendre des organisations; celles qui limitent le rôle des fédérations à des fonctions de conseils et de services; celles qui interdisent à un dirigeant syndical d'exercer plus d'une fonction et qui lui interdisent d'occuper un poste de responsabilité dans un parti politique.
IV. Informations obtenues pendant la mission
Généralités
Le projet de loi du BIT
En 1989, le gouvernement du Royaume du Swaziland a pris contact avec le Bureau international du Travail pour lui demander de l'aider dans la révision de certaines dispositions de la loi de 1980 sur les relations professionnelles. En octobre 1991, l'expert engagé par le Bureau pour diriger les travaux de révision a soumis un projet de loi au gouvernement. Si la Fédération des syndicats du Swaziland (SFTU) a trouvé ses propositions acceptables en principe, la Fédération des employeurs du Swaziland (SFE) les a, en revanche, rejetées.
Le rapport de la Commission Wiehahn
En 1992, le gouvernement a institué une commission d'enquête sur les relations professionnelles au Swaziland, dont il a confié la direction au professeur Wiehahn, assisté finalement par deux assesseurs, qui représentent la SFE et la SFTU, respectivement, les partenaires sociaux ayant insisté pour participer à cet exercice. La commission indique dans son rapport que, si le projet de loi du BIT semblait juger nécessaire de remplacer la législation existante, dont la loi sur les relations professionnelles, par une législation nouvelle, pour leur part, le gouvernement et les partenaires sociaux estimaient à l'unanimité que la législation en vigueur devait être maintenue et amendée en fonction des besoins du moment et de l'évolution de la situation.
Sur certains points précis de la loi de 1980 sur les relations professionnelles qui avaient été soulevés par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, la commission s'est prononcée comme suit dans son rapport: le système des syndicats d'industrie doit être maintenu dans la mesure où le droit du greffier de refuser l'enregistrement d'un syndicat, s'il est convaincu qu'une autre organisation enregistrée est suffisamment représentative, est plus souple que dans l'interprétation qu'en a donnée la commission d'experts de l'OIT et signifie plutôt qu'il peut en fait enregistrer plus d'une organisation dans une industrie donnée et où l'organisation qui fait la demande d'enregistrement, de toute façon, a le droit d'interjeter appel (la mission a également noté que cette disposition, qui a été retenue dans le nouveau texte de loi, ne fait pas partie de celles dont se plaignent les organisations de travailleurs représentées à la Commission consultative du travail (voir, toutefois, le paragraphe 34)); les restrictions imposées aux fédérations par la loi de 1980 devraient être abrogées; l'obligation d'obtenir une autorisation avant toute affiliation à une organisation internationale devrait être abrogée; les objectifs des organisations devraient être précisés dans leurs propres statuts et non dans la loi; le pouvoir du ministre de soumettre un différend à l'arbitrage obligatoire lorsque ce différend constitue une menace pour l'intérêt national devrait être maintenu; les enseignants devraient être rayés de la liste des services essentiels; une procédure de règlement obligatoire des différends devrait être prévue pour les services essentiels; le pouvoir du ministre de modifier la liste des services essentiels devrait être soumis à consultation de la Commission tripartite consultative du travail; seuls les services de l'administration publique qui sont vraiment essentiels devraient être classés comme tels; les grèves de solidarité devraient être qualifiées d'illégales; le vote au scrutin secret, sous la surveillance d'une personne indépendante et acceptable pour tous, devrait être rendu obligatoire, et l'action de grève envisagée doit avoir l'appui d'une majorité des salariés concernés.
Le rapport de la commission, soumis en novembre 1993, n'a pas été approuvé par le représentant de la SFTU, M. Jan Sithole, qui a expliqué à la mission son refus d'approuver ces recommandations par le fait que la plupart des entretiens de la commission s'étaient déroulés en son absence, M. Sithole participant à ce moment-là à la session de la Conférence de l'OIT de 1993. Le rapport indique que les objections de fond de la SFTU aux recommandations de la commission concernent l'absence de recommandations sur les points suivants: le pouvoir du tribunal du travail d'ordonner la réintégration d'un salarié licencié; le congé de maternité payé obligatoire; et la participation des syndicats aux procédures de licenciement, ainsi qu'à toute restructuration ou rationalisation de l'entreprise.
Les 27 revendications
En octobre 1993, la SFTU a soumis au gouvernement une liste de questions pour négociation qui a finalement déclenché en février 1994 une action de soutien à ces revendications qui a pris la forme d'une grève. A la suite de la demande de ses membres, la SFTU a ensuite présenté au gouvernement les 27 revendications suivantes (finalement regroupées en 26 revendications): réintégration obligatoire des travailleurs injustement licenciés; remplacement du plafond de 26 semaines prévu pour l'indemnisation en cas de licenciement injustifié par le projet de proposition du BIT (166 à 226 semaines); reconnaissance du 1er mai comme jour férié; exonération fiscale pour les indemnités de départ; un mois de congé de maternité payé; interdiction d'externaliser les services; dépôt de garantie de l'entreprise porté à trois mois, au lieu d'un mois; établissement de la preuve du déclin économique de l'entreprise avant tout licenciement; conversion de la caisse de prévoyance nationale en un régime de pensions; droit à pension des travailleurs saisonniers; établissement d'une politique officielle d'action volontariste (en faveur des nationaux); extension du droit de grève à l'ensemble des travailleurs, exception faite du personnel des services essentiels, définis au sens strict, notamment en parlant des travailleurs qui sont essentiels, et non des services pris globalement; institution d'un salaire minimum au niveau national; moyens d'hébergement convenables pour les policiers et leurs familles; arrêt des brutalités dont sont victimes les marchands ambulants; arrêt du programme de privatisation des services d'eau; pas d'augmentation des impôts pendant la présente année budgétaire; les travailleurs élus au Parlement ne devraient pas être forcés de démissionner de leur poste de travail et devraient continuer à recevoir un salaire de leur employeur; le gouvernement devrait se porter garant que les journalistes ne subiront pas de représailles; création d'un forum économique auquel seraient représentés les partenaires sociaux et qui traiterait de toutes les questions économiques d'importance nationale; participation des travailleurs à la réforme de la Constitution par le biais des représentants qu'ils auront désignés; mise sur pied d'un régime de sécurité sociale national; égalité de chances et de traitement pour les travailleuses; dispenser les propriétaires de bus de payer l'impôt sur les ventes de leurs véhicules; les employeurs devraient utiliser l'Institut de technologie du Swaziland (SCOT) pour leurs besoins en formation; et le projet de loi du BIT devrait être soumis à la Commission consultative du travail avant d'être présenté au Cabinet comme base d'un nouveau texte de loi sur les relations professionnelles.
Rapport du groupe de travail tripartite
sur les 27 revendications
Par la suite, le gouvernement a engagé des discussions avec la SFTU qui ont abouti, en mars 1994, à la mise sur pied d'un groupe de travail tripartite chargé d'examiner les revendications de la fédération. Dans le rapport qu'il a remis en juin, ce groupe de travail a fait des recommandations unanimes sur les 21 points suivants: officialisation du 1er mai comme jour férié; pas d'externalisation des services par les employeurs lorsque derrière cette pratique se cache une volonté de discrimination, et travailleurs à consulter à ce sujet; exonération fiscale des indemnités de départ par le biais du Conseil fiscal; instauration d'un régime d'assurance dans l'esprit de la convention no 173 sur la protection des créances des travailleurs en cas d'insolvabilité de leur employeur; coopération et consultation entre partenaires sociaux au sujet des licenciements, dans l'esprit de la convention no 158 sur le licenciement; conversion de la caisse de prévoyance nationale en un régime de pensions; instauration d'une commission de l'action volontariste en faveur des nationaux; services essentiels à redéfinir compte tenu des conventions du travail pertinentes; étude par un expert de la question du salaire minimum au niveau national; hébergement convenable pour les policiers et leurs familles; établissement d'une politique de protection des marchands ambulants; les partenaires sociaux devraient être consultés pour tout projet de privatisation des services d'eau; le gouvernement devrait consulter les partenaires sociaux avant toute augmentation des impôts; les journalistes ne devraient pas subir de représailles simplement parce qu'ils ont fait leur travail; le gouvernement devrait envisager sérieusement la création d'un forum économique tripartite; tous les partenaires sociaux devraient être représentés par leurs propres candidats au forum constitutionnel national, une fois celui-ci créé; mise en place d'un régime de sécurité sociale national conforme aux conventions de l'OIT; arrêt de toute discrimination à l'égard des femmes sur le lieu de travail; le gouvernement devrait répondre aux préoccupations des conducteurs de bus; l'Institut de technologie devrait être choisi en priorité pour la formation s'il dispose de l'équipement nécessaire; le projet de loi du BIT et le rapport Wiehahn devraient être soumis à la Commission consultative du travail comme documents de travail pour tout amendement futur de la législation du pays.
Les employeurs ont nettement marqué leur désaccord avec les revendications des travailleurs concernant la réintégration des travailleurs injustement licenciés, l'indemnisation des travailleurs pour licenciement injustifié pendant 166 à 226 semaines, le congé de maternité payé par l'employeur (mais ils ont trouvé bon que le gouvernement envisage l'instauration d'un régime de sécurité sociale, comme solution à long terme), et le droit à pension des travailleurs saisonniers (cette question devant être réglée au niveau de chaque établissement et du Conseil des salaires). Ils ont ajouté que les employeurs ne devraient pas être obligés de verser un salaire aux travailleurs élus au Parlement (tout en précisant que le gouvernement devrait trouver un moyen de compenser la perte financière que subit un salarié qui est forcé de quitter son emploi parce qu'il est élu au Parlement).
Le gouvernement a répondu au rapport vers la fin de 1994. Il a exprimé son appui pour la plupart des recommandations qui avaient fait l'objet d'un consensus parmi les membres du groupe de travail. Il a émis des réserves sur les autres questions, tout en précisant qu'il formulerait ses propres propositions sous forme d'amendements aux textes de lois pertinents, dont la loi de 1980 sur les relations professionnelles.
Le projet de loi sur les relations professionnelles
Dans la première moitié de 1995, à la suite d'une autre grève nationale déclenchée par son refus de donner suite aux 27 revendications de la SFTU, le gouvernement a publié, pour commentaire, un projet de loi sur les relations professionnelles, qu'il a ultérieurement soumis au Parlement. Selon le ministère du Travail et de la Fonction publique, ce projet de loi s'inspire des recommandations de la Commission Wiehahn, du projet du BIT et des conclusions de ses propres travaux de recherche. Les partenaires sociaux n'ont pas été consultés lors de l'élaboration de ce projet de loi. Il est vrai que ce projet de loi (devenu loi par la suite) répond à certaines des 27 revendications de la SFTU. C'est ainsi qu'il aborde la question de la réintégration en cas de licenciement injustifié, qu'il porte le plafond de l'indemnisation en cas de licenciement injustifié de 26 semaines à 24 mois et qu'il raye l'enseignement de la liste des services essentiels. Il apporte, toutefois, un certain nombre de restrictions aux droits syndicaux, comme le droit des fédérations d'exercer des activités syndicales légitimes, qui n'avaient pas du tout été abordées ni dans le projet de loi du BIT ni lors des discussions de la Commission Wiehahn.
Le forum tripartite et le Protocole
concernant le projet de loi
Après le passage du projet de loi au Parlement, mais avant qu'il ne parvienne au Sénat, le gouvernement a eu d'autres entretiens avec les partenaires sociaux, ces derniers étant troublés de ne pas avoir été consultés sur le projet de loi avant son passage au Parlement, et étant nettement opposés à un certain nombre de dispositions de base de ce projet. Ces entretiens ont abouti à la mise en place d'un forum tripartite formé de représentants du gouvernement, de la SFTU, de la SFE et de la Fédération des travailleurs du Swaziland (SFL). [Les syndicats non affiliés à la SFTU ou à la SFL, comme le Syndicat national des enseignants, n'étaient pas représentés à ce forum.] Le 14 juillet 1995, le forum a adopté une résolution libellée comme suit:
Les employeurs et les travailleurs [devraient] mettre en évidence, aussitôt que possible, les aspects du projet de loi sur les relations professionnelles soumis au Parlement qui ne leur paraissent pas acceptables et se rencontrer dans le cadre d'un forum tripartite pour élaborer et adopter des amendements qui soient acceptables pour toutes les parties afin que le gouvernement puisse, après les avoir dûment examinés, charger le ministre du Travail et de la Fonction publique de les introduire lorsque ce projet de loi arrivera au Sénat, étant entendu que si le Cabinet devait juger inacceptable tel ou tel amendement il le renverrait au forum tripartite, avec ses recommandations, pour réexamen par ce dernier.
Il a également été convenu que les membres désignés par les parties seraient autorisés par leurs supérieurs à négocier, et qu'ils seraient chargés de prendre des décisions et de conclure des accords.
En réponse à cette résolution, les partenaires sociaux ont identifié et adopté en août 1995 une série d'amendements au projet de loi. Leurs propositions ont par la suite été soumises au forum tripartite, qui a présenté, le 29 septembre 1996, après une série de réunions et avec l'aide de médiateurs, un protocole contenant 65 projets d'amendements au projet de loi, qui ont été soumis au Cabinet au début du mois d'octobre 1995. Sur ces 65 projets d'amendements, 62 avaient été approuvés à l'unanimité par les membres du forum, et trois rejetés. L'un de ces derniers points devait encore être examiné par le Cabinet: il s'agit de la disposition qui interdit les actions de protestation et les grèves déclenchées par les fédérations, disposition que les travailleurs comme les employeurs ont demandé de supprimer, tandis que les représentants du gouvernement demandaient qu'elle soit maintenue. Le désaccord portait également sur une proposition visant à limiter les conditions prévues par la loi en ce qui concerne le contenu des statuts des organisations, transférant ainsi plusieurs de ces nombreuses conditions dans un code de directives pratiques. Les représentants du gouvernement ont, par ailleurs, rejeté la proposition disant que l'intérêt national ne devrait être défini que pour les services essentiels, et que le ministre ne devrait pas pouvoir présenter de requêtes unilatérales, ces questions devant être laissées aux tribunaux.
Bien sûr, des compromis ont dû être faits à certains points, et les travailleurs ont dû modifier la position qu'ils avaient prise dans leurs revendications. Par exemple, ils ont accepté qu'il y ait une plus grande marge de manœuvre en ce qui concerne l'indemnisation pour licenciement injustifié, avec un minimum de six mois et un maximum de vingt-quatre mois, et, pour les questions de réintégration, ils ont demandé que le tribunal tienne compte d'un certain nombre de facteurs, comme les possibilités qu'a l'employeur d'appliquer un jugement en réintégration. Toutefois, certaines propositions ont été acceptées à l'unanimité, y compris l'élargissement du mandat de la Commission consultative du travail, la suppression de l'interdiction d'occuper un poste de responsabilité dans une organisation en cas de condamnation au pénal ou si on occupe une fonction dans un parti politique; la suppression d'un grand nombre de sanctions pénales; la suppression de l'obligation de consulter le ministre avant de soumettre des requêtes à des organismes internationaux; la suppression de l'obligation de procéder à un vote de grève (qui devrait plutôt figurer dans un code de directives pratiques); la suppression de la limitation des activités non professionnelles des organisations et fédérations; la révision de la définition des services essentiels de manière à ne pas y inclure tous les fonctionnaires, mais seulement ceux qui sont véritablement considérés comme essentiels; l'inclusion des services pénitentiaires du Swaziland dans la liste des services essentiels, ces services étant à rayer des catégories exclues du projet de loi.
Malgré les termes de la résolution prise par le forum tripartite le 14 juillet 1995, le projet de loi a été présenté au Sénat sans les amendements proposés dans le protocole. Le ministre du Travail et de la Fonction publique a expliqué cette omission à la mission de contacts directs en disant que le pouvoir de légiférer était une tâche et une prérogative du Parlement, et non des partenaires sociaux. Le 17 octobre 1995, les membres du forum tripartite, y compris les représentants du gouvernement, ont fait part de leur consternation dans une déclaration qui mettait en doute la bonne foi du gouvernement. Dans cette déclaration, les membres du forum ont également réaffirmé leur appui sans réserve au protocole, qui restait, selon eux, le meilleur moyen de faire avancer la législation sur les relations professionnelles. Le Cabinet a réagi le jour même par un document qui rejetait nettement les propositions faites dans le protocole.
La loi de 1996 sur les relations professionnelles
Le projet de loi, tel qu'il a été soumis par le ministre du Travail et de la Fonction publique (autrement dit sans les amendements proposés), a finalement été adopté par le Sénat. La SFTU a réagi, et ce avant que le projet de loi ne soit promulgué par le Roi du Swaziland, en lançant un appel à une grève nationale pour le 22 janvier 1996. Toutefois, le vendredi 19 janvier, le Roi a finalement promulgué ce projet de loi, qui est devenu loi le samedi 20 janvier 1996 par voie d'arrêté publié dans l'Extraordinary Gazette. Le 22 janvier 1996, après le déclenchement de la grève, le secrétaire général et le président de la SFTU ont été arrêtés et inculpés en vertu de l'article 40 de la loi nouvelle sur les relations professionnelles, qui interdit les grèves déclenchées par les fédérations, et des articles 73 (interdisant les grèves tant que le jugement n'a pas été rendu), et 75 (interdisant les grèves dans les services essentiels). Peut-être à cause de l'incertitude qui régnait sur le fait de savoir si cette loi était déjà en vigueur au moment de la grève, ces chefs d'inculpation ont été remplacés par les motifs avancés dans l'Extraordinary Gazette publiée le 18 janvier 1996, qui a qualifié la grève de boycottage collectif, faisant de la participation à cette grève une infraction en vertu des dispositions de la loi de 1963 sur l'ordre public. Ces inculpations ont finalement été retirées, et les intéressés remis en liberté le 25 janvier, pour être inculpés de nouveau en mars 1996 (voir paragraphe 23).
Un forum de négociations conjoint, rassemblant des représentants du gouvernement et des partenaires sociaux, s'est réuni le 29 février 1996 et il a résolu de classer les préoccupations de la SFTU sous trois rubriques: les questions constitutionnelles, les questions législatives et les questions de relations professionnelles. Cette résolution renvoie les questions constitutionnelles à une commission d'examen constitutionnelle (cela concerne essentiellement la demande de réforme constitutionnelle faite dans les 27 revendications et la demande d'abrogation du décret de 1973 qui interdit les partis politiques), et les questions législatives ou de relations professionnelles (aspects législatifs des 27 revendications, plus le protocole tripartite) à la Commission consultative du travail. Il a été convenu que c'était dans le but d'obtenir des amendements à la loi sur les relations professionnelles s'inspirant du protocole, et de faire passer ces amendements devant le Parlement en priorité par le biais d'un certificat d'urgence que ces questions étaient renvoyées devant la Commission consultative du travail.
La Commission consultative du travail a proposé des amendements
à la loi sur les relations professionnelles
En mars 1996, la Commission consultative du travail a soumis au ministre du Travail et de la Fonction publique des propositions d'amendements à la loi de 1996 sur les relations professionnelles. Ces propositions étaient pratiquement semblables à celles qui figuraient dans le protocole tripartite et étaient faites dans le même esprit. Malgré le consensus auquel est parvenu le forum de négociations conjoint, les propositions de la Commission consultative du travail n'ont toujours pas été soumises au Parlement.
Allégations de harcèlement à l'égard des syndicalistes
D'après les allégations qui ont été présentées, il y aurait eu harcèlement de syndicalistes, et suppression des activités syndicales par le gouvernement du Swaziland. Dans des communications datées des 23 et 29 mai 1996, la CISL a présenté au BIT une plainte qui fait état, en plus de violations présumées de droits syndicaux avec la promulgation de la loi de 1996 sur les relations professionnelles, des actes de harcèlement ci-après: intervention violente des forces de police dans les grèves, qui s'est soldée par la mort d'une jeune fille; interrogatoires abusifs et harcèlement des dirigeants de la SFTU par les forces de police, qui auraient notamment refusé de communiquer le lieu de détention des dirigeants arrêtés à leurs avocats; présence de policiers à des réunions de la SFTU; menaces de mort anonymes adressées à un dirigeant de la SFTU; bref enlèvement d'un autre dirigeant de la SFTU; arrestation de syndicalistes; travailleur blessé d'un coup de fusil à la jambe lors d'une grève d'usine. Par ailleurs, la mission a obtenu les informations suivantes sur ces allégations.
Ainsi qu'il est indiqué au paragraphe 19 ci-dessus, les dirigeants de la SFTU ont été arrêtés le 22 janvier 1996. Bien qu'ils aient été relâchés le 25 janvier, leur inculpation pénale ayant été retirée, le gouvernement a intenté contre le syndicat et ses dirigeants une action en dommages-intérêts pour les dommages causés par la grève. D'autres actions pénales ont été intentées en mars 1996 en vertu de la loi de 1963 sur l'ordre public. Ces affaires sont encore en instance.
Le 22 janvier, alors que la grève se poursuivait, des affrontements entre grévistes et membres des forces armées ont entraîné la mort par balle d'une collégienne de 16 ans. Le gouvernement et la SFTU se rejettent la responsabilité de l'incident et sont en désaccord sur les circonstances qui l'entouraient. La SFTU a demandé à plusieurs reprises l'ouverture d'une enquête indépendante sur cette affaire, mais le gouvernement a préféré opter pour une enquête de police. Pendant la grève, la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les grévistes. La SFTU affirme que des membres de la police suivaient et surveillaient de près ses réunions. Elle ajoute que des membres de son comité exécutif auraient été menacés de mort.
Lors des entretiens qu'il a eus avec des membres de la mission de contacts directs, le chef des services de police du Swaziland a répondu à ces allégations dans les termes suivants:
a) Harcèlement/utilisation abusive
des gaz lacrymogènes par la police
Le chef des services de police a déclaré qu'il n'y a eu recours aux gaz lacrymogènes que dans deux circonstances, la manifestation échappant à tout contrôle, avec boutiques saccagées, véhicules renversés et passants agressés par des grévistes. Il a ajouté que la police avait été, elle aussi, victime de harcèlement de la part de la SFTU, et que deux officiers de police considérés comme des espions avaient été agressés par des membres de cette fédération. Apparemment, cette affaire fait toujours l'objet d'une enquête.
b) Assassinat de la collégienne de 16 ans
Le chef des services de police a déclaré que l'enquête n'avait pas encore permis d'établir les responsabilités en ce qui concerne cette mort. L'incident qui est à l'origine de cette mort s'est produit de nuit au cours d'un affrontement entre la police et les grévistes pendant lequel des vitres de voiture ont été brisées et des coups de feu tirés sur la police. Selon lui, le rapport du médecin légiste établit que cette jeune fille a été tuée par une balle d'un autre calibre que celui utilisé normalement par la police. Il a ajouté qu'il ne comprenait pas la publicité faite par la SFTU autour de cette affaire, cette jeune fille n'étant pas une travailleuse mais une étudiante. L'enquête de police sur cette affaire n'est pas encore terminée.
c) Transfert des dirigeants syndicaux arrêtés vers différents postes
de police après leur arrestation sans que leurs avocats en soient informés
Le chef des services de police a confirmé que les dirigeants de la SFTU ont été transférés vers différents postes de police pour leur propre sécurité et pour éviter tout affrontement violent au poste de police. Ce n'était évidemment pas de bonne politique que de ne pas en informer leurs avocats, mais ce n'était pas intentionnel.
d) Menaces de mort adressées à des membres
du comité exécutif de la SFTU et enlèvements
Le chef des services de police a déclaré qu'il n'était au courant d'aucune menace de mort qui aurait été adressée à des membres du comité exécutif de la SFTU, et qu'aucune plainte de ce genre n'avait été déposée auprès de la police. Il a ajouté qu'il était au courant de l'enlèvement présumé, qu'il attribue à des criminels, de M. Jan Sithole, secrétaire général de la SFTU. Des documents appartenant à la SFTU ont été trouvés ultérieurement par la police dans la zone où les ravisseurs se seraient réfugiés. Il a assuré ses interlocuteurs que l'affaire faisait encore l'objet d'une enquête sérieuse, et qu'il faudrait peut-être encore six à douze mois pour la résoudre.
e) Présence à des réunions de syndicats
et de la Fédération des syndicats
Le chef des services de police a estimé que les policiers avaient le droit d'assister à des réunions de syndicats et de la Fédération des syndicats pour veiller au maintien de l'ordre. Il a également déclaré que son département n'avait pas pour habitude de s'ingérer dans des activités syndicales légitimes, mais qu'il était tenu par les dispositions du décret de 1973 (qui suspend la Déclaration des droits du citoyen et interdit tout groupement politique de l'opposition) et de la loi de 1963 sur l'ordre public d'intervenir chaque fois que la situation l'exige. Cela comprend l'interdiction de toute réunion qui paraît menacer l'ordre public ou à laquelle participent des groupements politiques. Il a ajouté que les réunions de la SFTU n'étaient pas toujours des réunions proprement syndicales à son sens, et qu'elles étaient souvent convoquées au nom du parti politique interdit de l'opposition dans le cadre de son propre programme d'activités.
f) Cas du travailleur blessé à la jambe
par balle lors d'une grève d'usine
Le chef des services de police a précisé que le travailleur mentionné dans les allégations qui a été blessé à la jambe n'a pas été touché par une balle mais par une grenade lacrymogène. Selon la police, l'emploi de gaz lacrymogènes était devenu nécessaire, car les travailleurs voulaient séquestrer les directeurs de l'établissement, et ils étaient armés de gourdins.
V. Résultats obtenus et assurances données par les autorités
et perspectives d'avenir
Réforme politique et des relations professionnelles
Un processus de révision de la Constitution a été annoncé par le Roi du Swaziland au début de cette année. Parmi les questions inscrites à l'ordre du jour figure l'abrogation du décret de 1973, qui suspend la Déclaration des droits du citoyen et interdit les partis politiques de l'opposition. Bien que mécontentes de voir que le membre qui les représentait n'a pas été choisi par elles, mais qu'il a été directement désigné par le gouvernement, les organisations de travailleurs ont néanmoins accepté de participer à la Commission de révision de la Constitution mise en place dans l'espoir de progrès possibles.
Les représentants du gouvernement que des membres de la mission ont rencontrés ont déclaré que le gouvernement respectait les droits des travailleurs et des syndicats, mais qu'il fallait bien faire la distinction entre les questions politiques et les questions de relations professionnelles. Par conséquent, d'après le gouvernement, les syndicats ne devraient ni faire de la politique, ni présenter des revendications politiques ou avoir une plate-forme commune avec des groupements politiques qui revendiquent le multipartisme. Les représentants du gouvernement ont estimé que les 27 revendications de la SFTU et la grève qu'elle avait organisée depuis la présentation de ces revendications servaient en fait de couverture à un programme politique.
Bien que ces 27 revendications soient clairement de nature socio-économique, la SFTU a admis qu'elle considérait également que c'était un devoir civique que de demander l'abrogation du décret de 1973 et l'instauration d'un régime démocratique pour le pays. Par ailleurs, la SFTU et d'autres groupements non gouvernementaux ont estimé que certaines questions qui sont parfois considérées comme des questions purement politiques par le gouvernement sont en fait de nature socio-économique et intéressent donc légitimement les travailleurs. Il a également été souligné que les représentants du gouvernement et les partenaires sociaux avaient déjà accepté, lors de leur réunion du 22 février 1996 (voir paragraphe 20 ci-dessus), de distinguer les questions qui apparaissent comme des questions politiques des questions de relations professionnelles et législatives, les premières intéressant le processus de révision de la Constitution, tandis que les autres étaient renvoyées à la Commission consultative du travail pour discussion. Il ressort également des entretiens qui ont eu lieu avec la SFTU, la SFL et la SFE que toutes trois jugent nécessaire d'apporter des amendements à la loi de 1996 sur les relations professionnelles, non seulement pour tenir compte des propositions faites dans le protocole tripartite et par la Commission consultative du travail à court terme, mais aussi pour aligner les dispositions de la loi sur les obligations qui incombent au Swaziland en vertu des conventions de l'OIT qu'il a ratifiées. Ces parties ont également déclaré que leur accord tel qu'il figure dans le protocole tripartite et les propositions de la Commission consultative du travail ne répondaient pas expressément à la question de savoir dans quelle mesure les dispositions de la loi de 1996 sur les relations professionnelles étaient conformes aux conventions ratifiées de l'OIT, et ne signifiaient pas que la loi, même amendée à la lumière de leurs propositions, leur paraissait conforme à ces conventions. Les membres de la Commission consultative du travail ont toutefois signalé à la mission leur désir d'être orientés par l'OIT sur ce point.
Bien que le gouvernement ait plusieurs fois engagé des consultations avec les partenaires sociaux depuis 1993, date à laquelle la SFTU a présenté pour la première fois ses 27 revendications, il y a beaucoup de méfiance entre eux (entre les partenaires sociaux et le gouvernement). Cela tient à ce que organisations de travailleurs et organisations d'employeurs considèrent que le gouvernement a manqué de bonne foi, lorsqu'il a soumis unilatéralement au Parlement, sans consulter les partenaires sociaux, un projet de loi sur les relations professionnelles qui n'avait pas leur appui, et lorsqu'il a refusé ultérieurement d'appliquer les amendements contenus dans le protocole tripartite et dans les propositions de la Commission consultative du travail, et même de se prononcer à ce sujet.
Dans une déclaration de politique générale faite devant le Parlement le 16 août 1996, le Premier ministre a fait savoir qu'il inviterait les partenaires sociaux à formuler des suggestions concernant les améliorations à apporter à la loi sur les relations professionnelles. Si certains groupes d'intérêts ont fait part de leur optimisme et ont vu dans la déclaration du Premier ministre l'annonce d'une nouvelle phase de coopération, d'autres se sont dits d'autant plus sceptiques que la Commission consultative du travail avait déjà soumis ses propositions à cet égard au gouvernement sans qu'aucune mesure ne soit jamais prise.
Les représentants du gouvernement que les membres de la mission ont rencontrés ont souligné que le Royaume du Swaziland tenait à respecter ses obligations en tant que Membre de l'OIT, et ont souhaité que le BIT les aide à promouvoir le dialogue et la compréhension entre les partenaires sociaux, et leur prodigue les conseils nécessaires pour pouvoir aligner les dispositions de sa législation sur celles des conventions auxquelles le Royaume est partie. Ce point de vue a été fermement appuyé par des membres d'un comité spécial du Parlement (comprenant des membres du Sénat), qui ont fait savoir que le Parlement était disposé à examiner toute proposition que lui soumettrait le ministre du Travail. Un des membres a ajouté que le Parlement pourrait examiner toutes les propositions, même celles qui lui seraient soumises non par le gouvernement, mais par les partenaires sociaux eux-mêmes. Toutefois, le ministre du Travail et de la Fonction publique, le Vice-premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont tous trois souligné que toute modification de la législation que proposerait le BIT devrait tenir compte des spécificités nationales.
Le ministère du Travail a indiqué qu'une assistance technique était aussi nécessaire, notamment pour la mise en place de dispositifs de règlement des différends et la formation de conciliateurs, de médiateurs et d'arbitres, si l'on voulait employer les mécanismes prévus par la nouvelle loi.
VI. Conclusions
La méfiance entre le gouvernement du Swaziland et ses partenaires sociaux du secteur privé est très grande depuis que le premier a pris la décision unilatérale de réviser la loi sur les relations professionnelles et après son refus ultérieur d'apporter à cette loi les amendements proposés par la Commission consultative du travail. Les représentants du gouvernement n'ont pu donner d'explication convaincante pour ce refus.
Le régime politique actuel du Swaziland ne tolère aucune activité syndicale autre que directement liée aux besoins immédiats des travailleurs et aux relations professionnelles dans l'entreprise. Aussi le gouvernement a-t-il tendance à avoir une conception très étroite des questions auxquelles les syndicats et les fédérations peuvent légitimement s'intéresser. De ce fait, même les revendications et les activités syndicales qui visent à promouvoir les intérêts socio-économiques légitimes des travailleurs sont généralement considérées comme des activités à motivations politiques et, par conséquent, illégales en vertu de la loi sur les relations professionnelles et d'autres textes de loi.
Tous les partenaires sociaux, y compris le gouvernement, ont toutefois exprimé le désir de bénéficier des conseils et de l'assistance technique du BIT dans les efforts qu'ils font pour promouvoir un dialogue positif et pour façonner la législation sur les relations professionnelles. Apparemment, l'Organisation peut apporter une contribution positive en encourageant le gouvernement du Swaziland à incorporer dans la loi sur les relations professionnelles les amendements proposés par la Commission consultative du travail; en indiquant les autres aspects de la loi qui doivent être modifiés pour qu'elle soit conforme aux normes de l'OIT; en fournissant une assistance technique pour la révision de la loi et l'application effective des mécanismes de règlement des différends prévus par la loi (médiation et arbitrage); et en formulant des suggestions sur la manière de renforcer le rôle et les attributions de la Commission consultative du travail.
La mission n'a pas été en mesure de déterminer si la police était impliquée en quoi que ce soit dans les menaces de mort proférées contre des syndicalistes; dans l'enlèvement de M. Jan Sithole; ou dans l'assassinat d'une collégienne. Pour ce qui est de ce dernier, il serait souhaitable que le gouvernement diligente une enquête indépendante sur la question, l'enquête de police manquant de légitimité. La mission est également restée sur l'impression que d'autres cas d'ingérence policière dans les affaires syndicales (comme la présence de policiers à des réunions syndicales) pourraient s'expliquer par l'existence de textes de loi tels que le décret de 1973 et la loi de 1963 sur l'ordre public.
Les membres de la mission tiennent à remercier le gouvernement du Swaziland, la SFTU, la SFL, la SFE, et d'autres organismes avec lesquels ils ont eu des entretiens, pour leur coopération.
Liste des personnes rencontrées
Fonctionnaires
Ministère du Travail:
M. A.H.N. Shabangu, ministre
M. S.B. Ceko, premier secrétaire
M. J.M. Mndzebele, greffier adjoint
M. J.L. Nkhambule, assistant du greffier
Cabinet du Premier ministre:
M. S.S. Nxumalo, Vice-premier ministre
M. F. Buckam, secrétaire
Ministère des Affaires étrangères:
M. A.R.V. Khoza, ministre
Planification économique et développement:
M. E.M. Hlophe, secrétaire permanent
Organisations de travailleurs
Fédération des syndicats du Swaziland (SFTU):
Jan J. Sithole, secrétaire général
Richard Nxumalo, président
Themba J. Msibi, vice-président
Barbara N. Dlamini, deuxième assistant du secrétaire général
Mxolisi Mbata, trésorier
Sphiwe Hiopne, trésorier en second
Africa Magionego, administrateur
Fédération des travailleurs du Swaziland (SFL):
Sam Dlamini, président par intérim
Vincent Ngongwane, secrétaire général
Reginald Simelane, trésorier
Dan Mango, premier assistant du secrétaire général
Patrick Longa, administrateur
Jimson Gwebu, trésorier adjoint
Enock Radebe, membre du comité exécutif
Association nationale des enseignants du Swaziland (SNAT):
Meshack Masuku, président
Pheneas Magagula, vice-président
Musa P.S. Dlamini, secrétaire général
Clifford Magagula, secrétaire général adjoint
Evart Dlamini, secrétaire chargé de l'organisation
Zodwa Simelane, éditeur
Poppy Hlatshwako, secrétaire chargé de l'enregistrement
Association des enseignants et professeurs d'université (ALAP):
Mhlangano Mgrhelela
Cyril Matzebula
Leonard Ndlovlu
Mandla Mlipha
Bonginkosi Sikhondje
Nomthetho Simelane
Bongile Putsoa
Organisations d'employeurs
Fédération des employeurs du Swaziland (SFE):
Muhawu Maziya, directeur exécutif adjoint
G.J. Manana, directeur des ressources humaines
Dumsane J. Dlamini
R.H. Howe
Commission consultative du travail (LAB):
J.M. Mndzebele, président
Ernest Tsabedze, secrétaire
Jan J. Sithole (SFTU), membre
T. Msibi (SFTU), membre suppléant
Rowen Howe (SFE), membre
D. Dlamini (SFE), membre
M. Maziya (SFE), membre
D. Mango (SFL), membre
Ndzimandze, membre indépendant
P.L. Magagula, membre indépendant
Police
M. E.E. Hillary, chef des services de police
M. B. Mavuso, assistant du chef des services de police
M. I. Magagula, assistant du chef des services de police
M. S. O'Connor, assistant du chef des services de police
M. J.D. Dlamini, assistant par intérim du chef des services de police
M. E.M. Niwakati, assistant par intérim du chef des services de police
Parlement
C.M. Masuku, député
Dr P.K. Dlamini, sénateur
M.N. Dlamini, député
W. Msibi, député
K.S.G. Mvubu, député
Dr M.P. Makhubu, sénateur
I.S. Shabangu, député
R.D.N. Fanourakis, député
V.T. Thwala, député
Musa Nkhambule, député
S.M. Shongwe, député
M.D. Ward, sénateur
M.R. Dlamini, député
M. Temple, sénateur
W. Bennett, sénateur
P.V. Dlamini, député
Dr M. Mdziniso, sénateur
D. Masango, député
Articles pertinents de la loi de 1996
sur les relations professionnelles
Partie II. Institution et administration
du tribunal du travail
Attributions et pouvoirs
5. 1) Le tribunal est seul compétent pour dire le droit et accorder réparation s'il y a lieu dans toute affaire dont il est saisi à bon droit, y compris toute demande, prétention ou plainte et toute infraction à l'une quelconque des dispositions de la présente loi, d'une loi sur le travail, d'une loi sur l'indemnisation des travailleurs, et de tout autre texte de loi qui étend la compétence du tribunal à tout différend relevant de la common law pouvant surgir entre un employeur et un salarié à l'occasion du travail, ou entre un employeur ou une association d'employeurs et un syndicat d'industrie, ou encore entre une association d'employeurs, un syndicat d'industrie, une association du personnel d'industrie, une fédération et un membre d'un tel groupement.
2) a) Une demande, une prétention ou une plainte peut être déposée auprès du tribunal par ou contre un salarié, un employeur, un syndicat d'industrie, une association du personnel, une association d'employeurs, une fédération, le greffier ou le ministre.
Partie IV. Organisations, fédérations et organisations internationales
de travailleurs, de personnel et d'employeurs
Statuts
26. Les statuts d'une organisation:
Pouvoirs du greffe en ce qui concerne les statuts
et les états des organisations et fédérations
30. 1) Lorsque le greffier est d'avis que les statuts d'une organisation ou d'une fédération, ou que les amendements apportés à ces statuts, ou tout état requis en vertu de la présente loi, ne sont pas conformes, en tout ou en partie, aux dispositions de la présente loi, il donnera son avis immédiatement et par écrit à l'organisation ou à la fédération concernée et lui ordonnera de remédier à la situation de telle manière qui aura été précisée.
2) Dans le cas où l'organisation ou la fédération concernée refuse de se conformer dans un délai de 30 jours à l'article 29 et à la directive du greffier visée à l'alinéa 1), le greffier peut ordonner la suspension de l'organisation ou de la fédération.
3) Avant d'agir conformément à l'alinéa 2), le greffier examinera toute représentation faite par l'organisation ou la fédération, y compris toute contre-proposition faite à la directive visée à l'alinéa 1).
4) A l'expiration d'un délai suspensif de 30 jours, le greffier rayera l'organisation ou la fédération concernée du registre par avis publié dans la Gazette et dans les journaux paraissant au Swaziland.
5) Le greffier peut refuser d'enregistrer les statuts d'une organisation s'il est convaincu qu'une organisation dont les statuts sont déjà enregistrés est suffisamment représentative, en tout ou substantiellement, des intérêts pour lesquels le postulant demande son enregistrement.
Déchéance, etc.
35. 1) a) Personne ne peut occuper un poste de responsabilité dans plus d'une organisation en même temps, ni occuper un poste de responsabilité dans une organisation et dans un parti politique ou tout en étant ministre, ministre adjoint ou vice-ministre au gouvernement, ou membre du Parlement.
b) Personne ne peut occuper un poste de responsabilité dans une fédération et dans un parti politique ou tout en étant ministre, ministre adjoint ou vice-ministre au gouvernement, ou membre du Parlement.
Constitution des fédérations
40. 1) Les organisations et les employeurs peuvent constituer une fédération ayant pour principal objet de conseiller ses membres et de leur fournir des services, y participer et s'y affilier.
2) Une fédération ou un responsable de fédération n'agira, ni en donnant des instructions à ses membres, ni sur instruction de ces derniers, d'une manière qui puisse être interprétée comme une interdiction de la concurrence, ou de toute autre manière qui puisse être interprétée comme un moyen de conférer à la fédération le statut ou la fonction d'un syndicat d'industrie, d'une association de personnel d'industrie ou d'une association d'employeurs et, sans préjudice du caractère général de ce qui précède, une fédération ou un responsable de fédération ne convoquera aucun membre de syndicat d'industrie ou d'association de personnel d'industrie, ni aucune autre personne qui n'est pas membre de la fédération à l'une quelconque de ses réunions, et ne donnera à ces membres ou à cette personne et n'acceptera d'eux ni instruction ni conseil ou suggestion, et ne déférera, n'acquiescera ou ne succombera à aucune sommation ni instruction et à aucun ordre de ces membres ou de cette personne qui pourrait causer ou entraîner une violation des dispositions de la présente loi.
3) Toute fédération ou tout responsable d'une fédération qui amène ou incite une organisation ou les membres d'une telle organisation à cesser ou ralentir le travail ou l'activité économique, ou qui enfreint l'alinéa 2), commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de cinq ans au plus.
Conséquences d'une action de grève ou d'un lock-out
non conforme aux dispositions du présent titre
69. 1) Lorsqu'une grève ou un lock-out n'est pas conforme aux dispositions du présent titre:
2) Tout employeur ou syndicat ou association de personnel d'industrie qui commet une infraction aux termes du présent article sera passible, si sa culpabilité est démontrée, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou, à défaut de paiement, soit d'une peine de prison de deux ans au plus, soit de la radiation du registre des organisations.
Le ministre peut requérir une ordonnance
dans l'intérêt national
70. 1) Si une grève ou un lock-out est envisagé ou en cours, que cela soit conforme aux dispositions de la présente loi ou pas, et si le ministre estime que l'intérêt national est, de ce fait, menacé ou compromis, il peut demander d'office au tribunal de délivrer une injonction interdisant aux parties d'entreprendre ou de poursuivre une telle action, et le tribunal peut délivrer tel type d'injonction qu'il juge approprié compte tenu de l'intérêt national.
2) Si, à la suite de la requête visée à l'alinéa 1), le tribunal délivre une injonction, les parties liées par cette dernière doivent immédiatement s'abstenir d'entreprendre une telle action ou y mettre fin, et le différend qui a donné lieu à une telle action est réputé avoir été soumis au tribunal par les parties concernées pour règlement.
Le Procureur général peut requérir
une ordonnance déclarative
71. 1) Sous réserve des dispositions de l'article 70, si le Procureur général a lieu de croire qu'une grève ou un lock-out en cours ou envisagé n'est pas conforme aux dispositions de la présente loi ou de toute autre loi, il peut demander d'office au tribunal de rendre une ordonnance en ce sens.
2) Cette ordonnance étant rendue, les parties impliquées dans la grève ou le lock-out doivent immédiatement s'abstenir d'entreprendre une telle action ou y mettre fin, faute de quoi le gouvernement peut prendre des mesures appropriées pour y mettre un terme.
Action de grève ou lock-out interdits
pendant le déroulement de la procédure
72. 1) Il est interdit à toute personne, organisation ou fédération qui est partie à un différend de poursuivre ou d'entreprendre une action de grève ou un lock-out pendant le déroulement de la procédure concernant un différend auquel cette action se rapporte.
2) Il est interdit à toute personne, organisation ou fédération d'entreprendre une action de grève ou un lock-out par suite d'un désaccord ou d'un mécontentement par rapport à une ordonnance ou une sentence du tribunal.
3) Toute personne, organisation ou fédération qui contrevient aux dispositions de l'alinéa 1) ou 2) commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de deux ans au plus.
Action de grève ou lock-out interdits
dans les services essentiels
73. 1) Sans préjudice des dispositions de l'article 69, les dispositions du présent article ne s'appliquent qu'aux salariés occupés dans les services essentiels tels que définis à l'alinéa 6) du présent article.
2) Il est interdit à tout employeur offrant un service essentiel et à tout salarié occupé dans un tel service d'entreprendre une action de grève ou un lock-out en rapport avec un tel service.
3) Tout employeur qui contrevient à l'alinéa 2) est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de deux ans au plus.
4) Tout salarié qui contrevient à l'alinéa 2) est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 2 000 E (deux mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison d'un an au plus.
5) Toute organisation ou fédération ou personne occupant un poste de responsabilité dans une organisation ou une fédération, ou encore toute autre personne qui lance un mot d'ordre de grève ou qui déclenche une action de grève dans un service essentiel, ou qui pousse ou incite un travailleur d'un tel service à faire grève commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie:
a) dans le cas d'une organisation ou d'une fédération, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum;
b) dans le cas d'une personne occupant un poste de responsabilité dans une organisation ou une fédération, d'une amende de 3 000 E (trois mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison d'une année au plus ou des deux sanctions conjuguées, et ladite personne peut se voir interdire l'exercice d'une fonction de responsabilité dans une organisation pour une période d'une année à compter du moment où sa culpabilité est établie; ou
c) dans le cas d'une personne qui n'occupe aucun poste de responsabilité dans une organisation ou une fédération, d'une amende de 2 000 E (deux mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison d'une année au plus.
6) a) Aux fins du présent article, les services essentiels, quels qu'en soient les prestataires, et qu'ils soient rendus au gouvernement ou à toute autre personne, sont:
b) Le ministre peut modifier, après avoir obtenu l'approbation des deux chambres du Parlement, signifiée par résolution et par voie d'avis publié dans la Gazette, la liste des services essentiels donnée au paragraphe a).
Infraction commise par toute personne ou organisation
ou fédération qui apporte une aide financière ou autre
pour promouvoir ou soutenir une action de grève ou un
lock-out dans un service essentiel
74. 1) Toute personne qui, afin de promouvoir ou de soutenir une grève ou un lock-out dans un service essentiel contraire aux dispositions de la présente loi, apporte directement ou indirectement une aide financière ou autre à une organisation ou une fédération d'employeurs qui lance un mot d'ordre de grève ou déclenche une telle action, et tout salarié impliqué dans une telle action, commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de cinq ans au plus ou des deux sanctions conjuguées.
2) Tout employeur, organisation ou fédération qui reçoit une aide financière ou autre destinée à soutenir une grève ou un lock-out en cours ou envisagé dans un service essentiel contraire aux dispositions de la présente loi commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de cinq ans au plus ou des deux sanctions conjuguées.
3) Tout salarié ou autre personne qui reçoit une aide financière ou autre destinée à soutenir une grève ou un lock-out dans un service essentiel contraire aux dispositions de la présente loi commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de cinq ans au plus ou des deux sanctions conjuguées.
Piquets de grève
87. 1) La mise en place d'un piquet de grève pacifique par des personnes impliquées directement dans le différend qui est à l'origine du piquet de grève est autorisée, sauf:
... e) si le piquet de grève est organisé contre un établissement ou une entreprise qui n'est pas directement impliqué dans le différend.
... 3) Toute personne, organisation ou fédération qui contrevient aux dispositions du présent article commet une infraction et est passible, si sa culpabilité est établie, d'une amende de 5 000 E (cinq mille emalangeni) au maximum ou d'une peine de prison de deux ans au plus ou des deux sanctions conjuguées.
Décret de 1973 sur les réunions et manifestations
Article 12
Aucune réunion de nature politique, ni cortège ou manifestation, ne sera organisée ni n'aura lieu dans un lieu public sans le consentement préalable du chef des services de police, qui pourra refuser son consentement s'il a lieu de penser qu'une telle réunion ou manifestation ou un tel cortège est directement ou indirectement lié à des mouvements politiques ou à d'autres rassemblements séditieux qui peuvent troubler la paix ou gêner, d'une autre manière, le maintien de l'ordre public.
Max Rood, Président.
Points appelant une décision:
paragraphe 69;
paragraphe 120;
paragraphe 141;
paragraphe 151;
paragraphe 176;
paragraphe 247;
paragraphe 294;
paragraphe 346;
paragraphe 361;
paragraphe 368;
paragraphe 438;
paragraphe 461;
paragraphe 476;
paragraphe 495;
paragraphe 508;
paragraphe 519;
paragraphe 540;
paragraphe 555;
paragraphe 575;
paragraphe 600;
paragraphe 618;
paragraphe 705.
1 Article 55: Le droit de négociation collective est garanti pour régulariser les relations du travail, avec les exceptions prévues par la loi.
Le devoir de l'Etat est de promouvoir la concertation et les autres moyens permettant de résoudre pacifiquement les conflits collectifs du travail.
Article 56: Le droit de grève est garanti, sauf dans les services publics essentiels définis par le législateur.
La loi réglementera ce droit.
Suit le troisième sous-alinéa déjà mentionné.
2 PNUD COL/95/102.
3 Dans l'exercice de ses fonctions constitutionnelles et légales, le Défenseur du peuple a pour obligation de divulguer les résultats des enquêtes et les rapports ayant trait à des faits qui portent préjudice aux droits de l'homme et dont les responsables présumés sont des employés et des travailleurs de l'Etat et de ses entités décentralisées, membres des forces publiques, et particuliers qui exercent des fonctions publiques ou qui sont chargés d'un service public.
4 Voir le quotidien El Tiempo, 7/X/96.
5 Jaime Córdoba Triviño: Troisième rapport annuel du Défenseur du peuple devant le Congrès de la Colombie, 1996, vol. I, Santafé de Bogotá, p. 19.
6 On attribue au Général (r) Farouk Yanine une responsabilité présumée dans un délit de conspiration avec des groupes paramilitaires. Durant le séjour de la mission dans le pays, l'Unité spéciale des procureurs des droits de l'homme lui a imposé des mesures de détention préventive, sans lui permettre de bénéficier d'une mise en liberté. Cf. le quotidien El Espectador, 12 octobre 1996, p. 1.
7 Miguel Santamaría Dávila, lors de la XXXIIe assemblée annuelle de la Confédération interaméricaine des éleveurs et des agriculteurs.
8 Voir le quotidien El Espectador du 11 octobre, p. 6-A.
9 La crédibilité sociale de l'avocat général a été confirmée par une enquête publiée le samedi 12 octobre en première page du quotidien El Espectador, qui arrivait à la conclusion que 51 pour cent des intentions de vote lui seraient favorables s'il se portait candidat à la présidence.
10 Quotidien El País du 21 octobre 1996.
11 Une autre différence relative que la mission a pu observer par rapport à d'autres pays de la région est le rôle important que la femme joue dans la gestion de la société.
12 Angelino Garzón, Informe Evaluativo del Proyecto Nueva cultura de las relaciones de trabajo, juillet 1966.