L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
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GB.270/3/2
270e session
Genève, novembre 1997


TROISIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

Suivi de la discussion du rapport
du Directeur général à la 85
e session (1997)
de la Conférence internationale du Travail

b) Autres aspects de la suite à donner à la discussion
du rapport du Directeur général

1. Dans le cadre de la question susvisée, le Conseil d'administration est saisi d'un premier document(1)  portant sur la question des droits fondamentaux et de l'inscription éventuelle à l'ordre du jour de la 86e session de la Conférence d'une déclaration à ce sujet. Ce second document examine les autres questions découlant de la discussion du rapport du Directeur général. Il s'agit d'un document préliminaire qui présente un inventaire de ces questions et des réactions qu'elles ont entraînées en vue de permettre au Conseil d'administration d'examiner si et de quelle manière et quand il pourrait leur être donné suite.

2. Afin de faciliter la prise de décisions, le contenu de ce document suit le plan du rapport présenté par le Directeur général à la Conférence. Pour chaque proposition, un rappel de son contenu est suivi d'une courte présentation synthétique des réactions qu'elle a soulevées lors de la plénière de la Conférence ainsi que de suggestions quant à la suite qui pourrait éventuellement lui être donnée.

3. Sur un plan général, la plupart des orateurs ont souligné la qualité et le caractère novateur du rapport soumis à la Conférence. Ils ont été quasi unanimes à estimer que le moment était venu de recentrer l'action normative de l'OIT au regard de la mondialisation de l'économie. Un certain nombre d'orateurs ont souligné le fait qu'il leur avait été difficile d'apporter des réponses complètes, compte tenu des contraintes de temps, tant les propositions contenues dans le rapport étaient nombreuses. Certains orateurs ont cependant présenté des propositions ou des idées qu'il a paru utile, pour donner une image fidèle de la discussion, de regrouper à la fin du présent document. Au total, il est néanmoins permis de considérer que les contributions à la discussion générale ont été particulièrement riches dans leur diversité.

I. Emulation du progrès social: Rapport sur le progrès social dans le monde

(rapport pp. 22-36)

4. Si la garantie des droits fondamentaux est une condition sine qua non de la possibilité d'un progrès social auto-entretenu, elle ne saurait être considérée comme suffisante. Chaque Membre devrait s'efforcer de contribuer au progrès selon ses possibilités, en consultation avec les partenaires sociaux. Etant donné l'interdépendance des efforts des nations telle qu'elle est reconnue dans le Préambule de la Constitution, la communauté internationale devrait pouvoir objectivement constater leur réalité. La question est de savoir si l'OIT dispose des moyens institutionnels nécessaires pour encourager et mesurer de manière plus directe et plus systématique ces efforts déployés par les Etats pour traduire concrètement les bénéfices de la mondialisation en avancées sociales, et par là même permettre à l'opinion publique d'apprécier de manière objective quelles en sont les retombées positives sur le plan social. Deux propositions, différentes quant à leur esprit et à leurs moyens, ont été avancées: un mécanisme favorisant l'émulation entre les Etats Membres, qui pourrait se présenter sous la forme d'un rapport périodique sur le progrès social dans le monde, et un mécanisme de label social global, fondé sur une convention adoptée par la Conférence et auquel les Etats seraient libres d'adhérer.

Un mécanisme d'émulation entre les Etats

(rapport pp. 25-30)

5. La première proposition visait la mise en place d'un mécanisme d'émulation du progrès social entre les Etats Membres de l'OIT fondé sur un certain nombre d'orientations utiles quant aux principes et priorités du progrès social dans l'économie mondialisée (autres que ceux relatifs aux droits fondamentaux qui font l'objet du premier document). La promotion de ces principes pourrait être encouragée à travers un instrument dont la forme serait à déterminer et dont le suivi pourrait prendre, par exemple, la forme d'un rapport périodique du Directeur général sur le progrès social dans le monde qui serait examiné, sur une base tripartite, par la Conférence internationale du Travail.

6. De nombreux pays (Brésil, Canada, République dominicaine, El Salvador, Espagne, Grèce, Guinée équatoriale, Haïti, Hongrie, Italie, Kenya, Namibie, Pays-Bas, Royaume-Uni, Sénégal, Turquie, Venezuela, PIEM), ainsi que quelques délégués des employeurs (France, Haïti, Inde, Japon, Philippines, OIE) et des travailleurs (Canada, Chypre, République de Corée, Ghana, Inde, Pérou, Philippines) ont appuyé cette proposition. Elle a fait l'objet de sérieuses réserves de la part de certains gouvernements (Bahreïn, Chine, Jamahiriya arabe libyenne, Singapour, pays non alignés) qui ont estimé que la question du progrès social dépend de la seule souveraineté des Etats et que l'OIT n'a pas à dicter aux Etats Membres le contenu ou le rythme de ce progrès. Les différentes propositions pratiques avancées dans le rapport n'ont pas été suffisamment débattues pour qu'il soit possible de tirer une quelconque conclusion sur les modalités de mise en œuvre de ce système, à l'exception notable de la publication d'un rapport périodique sur le progrès social dans le monde (gouvernements: Allemagne, Brésil, Equateur, Espagne, Italie, Japon, Maurice, Namibie, Nicaragua, Royaume-Uni, Tunisie, Uruguay, PIEM; travailleurs: Allemagne, Canada, Colombie, République de Corée, Haïti, Inde, Italie, Fédération de Russie, Uruguay).

7. La question qui se pose est de savoir si, à plus ou moins long terme, les principes et priorités du progrès social dans une économie interdépendante ne pourraient faire utilement l'objet d'une recommandation internationale du travail. Concrètement, la manière la plus simple de procéder serait de faire figurer cette possibilité, avec toutes les explications appropriées, parmi les questions réunies dans le portefeuille. Cela permettrait au Conseil d'y revenir, s'il le souhaite, au moment de son choix.

Le label social global

(rapport pp. 30-35)

8. L'objet de cette partie du rapport était d'attirer l'attention sur un phénomène que l'Organisation internationale du Travail ne peut se permettre d'ignorer parce qu'il peut apporter un renfort à la diffusion des principes contenus dans les normes, mais également parce qu'il peut mettre en question les normes elles-mêmes. L'hypothèse, très préliminaire, d'un label social global qui pourrait prendre la forme d'une convention a été avancée afin d'utiliser ce que ce phénomène des labels ou des codes de conduite peut avoir de positif, tout en excluant les aspects négatifs soulignés dans le rapport.

9. Cette question a fait l'objet de très nombreuses interventions. Un certain nombre de pays ont émis des réserves quant à cette proposition, estimant, pour les uns, qu'elle était un moyen de réintroduire une clause sociale qu'ils rejettent catégoriquement, pour les autres, que le mandat de l'OIT ne lui permettrait pas de soutenir l'action d'associations de consommateurs, dont les intentions seraient principalement protectionnistes (Algérie, Australie, Bahreïn, Bolivie, Chine, République de Corée, Costa Rica, Cuba, Egypte, Guatemala, Inde, République d'Iran, Jamahiriya arabe libyenne, Kenya, Malaisie, Maroc, Népal, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour, Soudan, Thaïlande, Venezuela, Viet Nam, Zambie, Zimbabwe, pays non-alignés). Plusieurs délégués des employeurs ont également fait part de leurs réticences (Allemagne, Australie, Bangladesh, Chili, Chine, République de Corée, Cuba, Egypte, Emirats arabes unis, Etats-Unis, Finlande, Inde, Islande, Kenya, Koweït, Maroc, Mexique, Népal, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Royaume-Uni, Turquie, Venezuela, OIE). D'autres pays ont approuvé la proposition en demandant qu'elle fasse l'objet d'un examen supplémentaire (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Lituanie, Luxembourg, Maurice, Mexique, Mongolie, Norvège, Philippines, République dominicaine, Suède, PIEM). Enfin, de nombreux délégués des travailleurs se sont prononcés en sa faveur (Allemagne, Belgique, Brésil, Chili, Chypre, Colombie, République de Corée, Costa Rica, Danemark, Espagne, Finlande, Inde, Italie, Norvège, Pérou, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Fédération de Russie, Slovaquie, Suède, Uruguay, CISA, CISL, CMT, FIET).

10. Il semble bien que l'expression «label social global» ait été mal comprise. La référence au caractère «global» du label social proposé indique que celui-ci doit couvrir un ensemble non dissociable de droits fondamentaux, sans être en rien censé s'appliquer obligatoirement à l'ensemble de la production d'un pays. L'idée était en réalité un système entièrement volontaire et multilatéral de reconnaissance mutuelle de labels sociaux entre Etats qui pourrait couvrir tout ou partie de leurs produits exportés selon ce qu'ils décideraient. Quoi qu'il en soit de ce malentendu, il est clair, comme cela a été souligné dans la réponse du Directeur général au débat, qu'un tel cadre multilatéral ne saurait voir le jour sans un très large consensus, qui fait aujourd'hui manifestement défaut. Il appartiendra au Conseil d'administration d'apprécier si et quand il pourrait être utile pour l'OIT de reprendre le débat sur cette question. Dans l'intervalle, le Bureau continuera de rassembler des informations sur les labels et les codes de conduite mis en place par diverses associations de consommateurs ou de travailleurs, ou par des ONG, sur leurs mécanismes de contrôle ainsi que sur leurs conséquences économiques et sociales. De telles informations sont du reste déjà mises, à sa demande, à la disposition du Groupe de travail sur la dimension sociale de la libéralisation du commerce international à la présente session du Conseil d'administration.

II. Améliorations à apporter à l'activité normative de l'OIT

(rapport pp. 37-67 et annexe)

11. La seconde partie du rapport du Directeur général proposait des améliorations à apporter à l'activité normative de l'OIT de façon à renforcer l'impact des normes afin de mieux répondre aux besoins.

12. Tous les orateurs (117) qui se sont exprimés sur l'ensemble de la seconde partie ont reconnu la nécessité de mieux cibler les normes pour faire en sorte qu'elles aient un meilleur impact. De nombreux délégués ont approuvé l'idée de rationaliser l'ensemble du processus d'élaboration des normes, depuis le choix des sujets jusqu'à la procédure de ratification, en passant par les différentes phases des travaux préparatoires et la procédure d'adoption dans les commissions. Un délégué des employeurs (OIE) a rappelé que tous ces arrangements ne devaient avoir qu'un but: faciliter l'accord tripartite qui est le meilleur garant de l'applicabilité des textes adoptés, donc de leur efficacité.

13. Certaines de ces propositions peuvent rapidement être mises en œuvre: elles requièrent des décisions de la part du Bureau qui peuvent être prises dès lors que le Bureau est sûr de l'assentiment des Membres. D'autres nécessitent des décisions du Conseil d'administration dans le prolongement des travaux de la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail. D'autres encore qui ont recueilli une large acceptation exigeront un examen supplémentaire par la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail avant que de pouvoir être examinées pour décision par le Conseil, leur mise en œuvre supposant, dans certains cas, des modifications du Règlement de la Conférence.

Le contenu des normes

(rapport pp. 39-51)

Eventail de choix et critères de choix

(rapport pp. 40-45)

14. La production de nouvelles normes devrait être plus sélective pour permettre une plus grande pertinence des normes et un meilleur impact. Des mesures ont déjà été prises à cet égard, et le Conseil d'administration aura à examiner le contenu et la forme d'un portefeuille de propositions de sujets de normes nouvelles régulièrement mis à jour. Il devrait disposer ainsi d'un panorama plus vaste des possibilités d'activités normatives lorsqu'il est appelé à déterminer l'ordre du jour de la Conférence et effectuer ses choix de manière stratégique au lieu d'être réduit à opter pour un sujet qui n'est pas mûr ou ne satisfait personne et qui s'avérera, au moment de sa discussion à la Conférence, source de conflits ou de frustrations et, plus tard, au stade des ratifications ou de la mise en œuvre, source de déceptions. Cependant, pour que ce portefeuille ne soit pas un simple catalogue élargi de sujets normatifs, il est nécessaire de pouvoir impliquer davantage l'ensemble des mandants, en utilisant, pour ce faire, les départements techniques et les structures décentralisées du Bureau. La question se pose également de savoir si les sujets figurant dans le futur portefeuille devraient répondre à certains critères, outre ceux qui ont été retenus dans la première étude en profondeur sur les normes (nombre de travailleurs affectés, intérêt pour les travailleurs des catégories économiques les plus défavorisées, gravité du problème) et, de manière plus spécifique, comporter une évaluation précise, pour chaque sujet envisagé, de la valeur ajoutée que le nouvel instrument apporterait aux instruments existants de l'OIT et au système juridique interne des Etats Membres de l'OIT.

15. Les références à la nécessité de prendre des mesures en la matière ont été nombreuses (57). En outre, quelques délégués des employeurs ont rappelé que le choix des normes internationales du travail devait respecter le caractère subsidiaire de la réglementation internationale par rapport à l'ordre juridique interne (Espagne, Etats-Unis, Japon, Malte, Pérou). Cette préoccupation rejoint celle de plusieurs gouvernements qui ont rappelé que les conventions devaient se borner à l'essentiel et laisser au législateur national une marge d'action dans l'application (Koweït, PIEM)

16. A la lumière de la discussion dont le projet de portefeuille doit faire l'objet à la présente session du Conseil d'administration, on verra sans doute plus clairement si les éléments permettant d'apprécier la valeur normative ajoutée des futures normes devraient à l'avenir figurer dans le portefeuille ou être fournis au Conseil seulement lorsqu'il est appelé à sélectionner dans ce portefeuille les questions susceptibles d'être inscrites à l'ordre du jour d'une session déterminée de la Conférence internationale du Travail.

Superposition ou regroupement d'instruments?

(rapport pp. 45-48)

17. L'adoption de normes par la Conférence a provoqué, avec le temps, une superposition d'instruments visant des sujets proches ou analogues. Or nombre de conventions et de recommandations relèvent d'une philosophie commune et comportent des dispositions identiques ou parallèles. Cette superposition, outre le risque de différences, voire de contradictions, affaiblit l'impact du dispositif commun. Le processus de révision des normes qui, après ceux de 1977 et de 1987, est de nouveau engagé par le Groupe de travail sur la politique de révision des normes en est au stade de l'identification des instruments à réviser. L'achèvement de ce processus prendra un certain temps. C'est la raison pour laquelle il a été proposé d'envisager pour chaque matière (emploi, politique sociale, relations professionnelles, etc.) un travail préliminaire de synthèse des instruments existants qui pourrait en donner une vision d'ensemble et, par exemple, dégager les principes généraux applicables à l'ensemble des travailleurs ou des secteurs des dispositions spécifiques à un secteur ou à une catégorie de travailleurs.

18. Quelques gouvernements (Australie, France, Gabon, Maurice, Mexique, Pologne, Roumanie) ainsi que des délégués des employeurs (Australie, Inde, Koweït) ont soutenu cette idée. Un délégué gouvernemental (Canada) a souhaité disposer d'une proposition chiffrée. Un autre délégué gouvernemental (France) a proposé que soit envisagée la consolidation des normes par grands domaines. Un délégué des employeurs (Malte) a interprété la proposition comme visant à établir un Code international du travail et s'y est opposé, car l'OIT devrait reconnaître le droit souverain des nations à promulguer une législation qui reflète les conditions nationales et le stade de développement de leur économie. Un délégué gouvernemental (République islamique d'Iran) a estimé que toute classification des normes risque d'entraîner une diminution de leur impact en mettant l'accent sur quelques-unes d'entre elles.

19. La mise en œuvre de cette suggestion est avant tout affaire de mobilisation des ressources et des compétences techniques nécessaires pour effectuer le travail préliminaire de synthèse, en commençant peut-être à titre expérimental par l'un des grands domaines normatifs évoqués ci-dessus. Le Conseil d'administration pourrait donc, si un intérêt se manifeste en ce sens, être saisi, à l'occasion de la discussion sur le programme et budget pour la prochaine période biennale, d'une proposition visant la rédaction d'un projet de synthèse tel que décrit ci-dessus.

Procédure de choix

(rapport pp. 50-51)

20. L'inscription définitive d'une question à l'ordre du jour de la Conférence en vue d'une action normative devrait être l'aboutissement d'un processus au cours duquel une vision plus nette du contenu éventuel de l'instrument envisagé, et donc de sa valeur normative ajoutée, pourrait se dégager. La constitution d'un portefeuille pourrait aider à améliorer la situation en permettant au fil des examens successifs de préciser le contour de l'instrument sur le sujet. Par ailleurs, les sujets considérés comme soulevant des questions techniques ou politiques complexes devraient pouvoir faire l'objet d'une discussion préliminaire à la Conférence visant à vérifier la viabilité normative du sujet et à donner des orientations concrètes pour la rédaction du questionnaire.

21. Ces propositions ont été appuyées par un certain nombre de gouvernements (France, Turquie, PIEM), de délégués des employeurs (Etats-Unis, Islande) et de délégués des travailleurs (France, Philippines).

22. En principe, il ne serait pas nécessaire, pour donner effet à ces idées, de procéder à de quelconques modifications du Règlement de la Conférence. Le Conseil d'administration pourrait simplement décider, au cas par cas, qu'il y a lieu d'inscrire la question qui pourrait éventuellement faire l'objet d'un instrument normatif d'abord à l'ordre du jour de la Conférence pour une discussion générale. Il devrait cependant être clair que cette discussion générale serait en réalité une discussion normative préliminaire «ciblée», dont le but serait de fournir des éléments précis pour la préparation du questionnaire pour d'éventuels instruments. Plutôt que de définir, à ce stade, une nouvelle procédure, il serait donc utile d'expérimenter cette idée dans des cas concrets en se fondant sur l'expérience acquise avec la révision de la convention no 96. Le Bureau pourrait donc proposer cette solution chaque fois que le sujet qui pourrait être inclus dans le portefeuille paraît s'y prêter. En outre, le Bureau se propose de signaler au Conseil d'administration, lors de la discussion de l'inscription d'un sujet normatif à l'ordre du jour de la Conférence, les questions techniques et politiques complexes qui pourraient donner lieu à une discussion préliminaire à la Conférence.

Le choix de la forme des instruments

(rapport pp. 51-60)

23. Les propositions qui ont été faites dans cette partie du rapport visent à permettre de mieux utiliser l'ensemble des moyens normatifs à disposition de l'Organisation, conventions et recommandations. D'une part, en ce qui concerne les conventions, bon nombre de gouvernements acceptent de voter pour une convention sans envisager sérieusement d'appuyer sa ratification devant l'autorité compétente. Il pourrait donc être proposé que, dans le cadre de l'article 19, paragraphe 5), de la Constitution et, parmi les questions auxquelles ils doivent répondre, les gouvernements, lorsqu'ils ont donné leur appui à la convention par leur vote à la Conférence, puissent être invités à indiquer les mesures spécifiques qu'ils ont prises pour en appuyer également la ratification. D'autre part, la question de l'augmentation du nombre de ratifications nécessaires pour l'entrée en vigueur des conventions qui a déjà fait l'objet d'un examen préalable par la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail pourrait être réexaminée. Enfin, si l'on veut que les recommandations trouvent leur place véritable, il est essentiel qu'elles puissent reprendre leur autonomie par rapport aux conventions et qu'elles fassent l'objet du suivi régulier prévu par la Constitution pour en vérifier l'application en même temps que la pertinence et ne conserver que celles qui soient vraiment d'actualité.

24. Dans leur ensemble, ces propositions ont fait l'objet d'une large approbation de la part des délégués gouvernementaux (Allemagne, Australie, Danemark, Lituanie, Luxembourg, Pologne, Roumanie, Turquie, Zambie, PIEM) et des délégués des employeurs (Autriche, Bénin, Danemark, Espagne, France, Inde, Islande, Japon, Luxembourg, Malte, Maroc, Pérou, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse). Les délégués des travailleurs ont exprimé de fortes réticences quant au fait de donner une plus grande priorité aux recommandations internationales du travail (Allemagne, France, Pays-Bas, Roumanie, Suède, CISL, CMT). Un délégué des travailleurs (Pays-Bas) a estimé qu'un mécanisme de suivi de la mise en œuvre des recommandations alourdirait inutilement la charge de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. Quelques délégués des travailleurs (Finlande, Roumanie, Suède) ont rappelé que la valeur des recommandations dépend de la façon dont elles sont mises en œuvre dans les Etats et contrôlées par les organes compétents de l'OIT.

25. La question de l'augmentation du nombre de ratifications nécessaires pour qu'une convention entre en vigueur appartient en dernier ressort à la Conférence internationale du Travail. Néanmoins, pour éclairer le choix de la Conférence quant à l'opportunité d'un relèvement du seuil de l'entrée en vigueur, la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail pourrait être invitée à revenir, le cas échéant, sur la question lors de l'une des futures sessions du Conseil.

26. De même, la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail pourrait être invitée à examiner si et de quelle manière les formulaires de rapports relatifs à l'application de l'article 19.5) de la Constitution pourraient être complétés pour demander aux gouvernements d'indiquer, lors de la soumission (art. 19.5 b) et c)) et, plus tard, lorsque le Conseil d'administration en décide ainsi en vertu de l'article 19.5 e), les raisons pour lesquelles la ratification d'une convention qui avait recueilli leur appui n'a pas abouti.

27. Sur la question de la forme des instruments, la mise en œuvre de la suggestion suppose d'abord l'adoption de recommandations autonomes. Les réformes indiquées ci-dessus devraient y aider. Toutefois, les recommandations autonomes n'auront sans doute pas de véritable attrait tant qu'elles ne comporteront pas un mécanisme de suivi réel et approprié. Le simple renvoi général à l'article 19.6 d) de la Constitution ne suffit sans doute pas à donner la garantie que tel sera le cas. C'est pourquoi on pourrait envisager d'incorporer dans le dispositif de la recommandation lui-même une clause spécifique de suivi qui serait ajustée à l'objet sur lequel elle porte (il existe certains précédents). Le modèle d'une telle clause pourrait être étudiée à la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail à l'une des prochaines sessions du Conseil d'administration (mars 1999?).

Le contenu des normes

(rapport pp. 61-63 + annexe)

28. Outre les effets attendus des mesures proposées ci-dessus sur le contenu général des normes, deux aspects de la procédure d'élaboration des normes pourraient être réexaminés de manière détaillée afin d'améliorer la qualité de leur contenu et de leur formulation des normes:

29. Ces propositions ont fait l'objet de quelques interventions de la part de gouvernements (Arabie saoudite, Canada, Chypre, France, Grèce, Luxembourg, Maurice, Suède, PIEM), de délégués des employeurs (Australie, France, Japon, Malte, Pérou, Portugal, Sénégal) et de délégués des travailleurs (Afrique du Sud, Brésil, Pologne) qui ont toutes été favorables. Un délégué des employeurs (Allemagne) a suggéré que la discussion des conventions soit étalée sur plusieurs sessions de la Conférence.

30. L'élaboration d'un «code de bonnes pratiques rédactionnelles» est une entreprise qui exige un travail préparatoire très méticuleux. mais qui pourrait être recommandée à la Conférence sans aucune modification des textes réglementaires. La Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail pourrait être saisie, à l'une de ses prochaines sessions (mars 1999), du projet d'un tel code qui pourrait couvrir notamment la rédaction des préambules, la manière de se référer à d'autres instruments, la manière d'éviter les redites entre une convention et la recommandation qui la complète ou entre différents instruments, le statut des clauses finales, etc.

31. La réforme du questionnaire pourrait en revanche exiger un amendement au Règlement de la Conférence, dont toutes les implications devraient être examinées avec soin. C'est pourquoi le Bureau se propose, après une étude complète de ces implications, de soumettre à la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail, également en mars 1999, éventuellement un document qui pourrait présenter les alternatives envisageables et, selon le cas, une révision de la procédure actuelle du questionnaire et des dispositions pertinentes du Règlement de la Conférence.

Evaluation d'ensemble ex post

(rapport pp. 63-67)

32. Cette proposition visait à permettre une évaluation d'ensemble de l'impact des instruments sur le plan juridique comme sur le plan économique et social, de manière à apprécier les progrès réalisés en direction de l'objectif des instruments et à relever les éventuels effets indirects ou pervers par rapport aux autres objectifs de l'OIT, comme le permettent les articles 19.5 e) et 19.6 d) de la Constitution, pour en tirer des enseignements appropriés pour l'action normative future. Cette évaluation globale différerait de l'exercice de révision des conventions internationales du travail qui est engagé par le Conseil d'administration à travers le Groupe de travail sur la révision des normes de la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail. Elle irait également au-delà des études d'ensemble préparées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur la base des dispositions susvisées, et exigerait aussi des moyens plus considérables.

33. De nombreux gouvernements (Arabie saoudite, Australie, Botswana, Canada, Chypre, Egypte, Finlande, Grèce, Luxembourg, Maurice, Royaume-Uni, Suède, PIEM), des délégués des employeurs (Australie, Danemark, Italie, Japon, République dominicaine, Sénégal) et des délégués des travailleurs (Afrique du Sud, Chili) ont approuvé ces propositions sans toujours se prononcer sur la forme qu'elles devraient revêtir. Un gouvernement (Australie) a avancé l'idée que l'évaluation des instruments incomberait à une nouvelle commission permanente de la Conférence.

34. Si le Conseil confirme l'intérêt manifesté pour le renforcement de la fonction d'évaluation, la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail pourrait être invitée à identifier un très petit nombre d'instruments qui pourraient faire l'objet d'une étude pilote d'impact à laquelle pourraient être associées, outre les gouvernements, les équipes multidisciplinaires décentralisées et les organisations d'employeurs et de travailleurs. Une telle étude pilote pourrait ensuite permettre de préciser le cadre de référence des futurs exercices d'évaluation. Des propositions pour une étude pilote pourraient être présentées lors d'une prochaine session de la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail.

III. Autres sujets évoqués dans les interventions

35. De nombreux orateurs se sont référés aux travaux entrepris par le Conseil d'administration en matière normative (notamment à l'exercice de révision des normes internationales du travail), qui doivent être poursuivis jusqu'à leur terme. Ces questions sont traitées par la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail et ne seront pas reprises dans ce document. Par ailleurs, en dehors des propositions contenues dans le rapport du Directeur général, de nombreuses suggestions ont été faites par les délégués à la Conférence en vue d'améliorer l'action normative de l'OIT.

Réexamen du fonctionnement des mécanismes de contrôle

36. Plusieurs gouvernements, délégués des employeurs et délégués des travailleurs ont soulevé la question du réexamen du fonctionnement des mécanismes de contrôle et de supervision dont dispose l'OIT en ce qui concerne les conventions ratifiées, dans le cadre de l'article 22 de la Constitution. Une question spécifique a, en outre, été posée en ce qui concerne la procédure applicable aux réclamations. Le Directeur général, dans sa réponse, a indiqué son intention de soumettre à la commission compétente du Conseil, le plus rapidement possible, une proposition d'amendement du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations au titre des articles 24 et 25 de la Constitution de l'OIT.

Coopération technique en matière de normes

37. Un grand nombre d'orateurs ont considéré que la coopération technique devait jouer un plus grand rôle dans la ratification et la mise en œuvre des conventions internationales du travail (gouvernements: Arabie saoudite, Côte d'Ivoire, Egypte, Inde, Koweït, Malaisie, Namibie, Oman, Ouganda, Pays-Bas, Soudan, Tchad, pays non alignés; employeurs: Argentine; travailleurs: Espagne, France, Thaïlande). Cette question fait l'objet d'un examen par le Conseil d'administration qui a demandé une évaluation de l'action des équipes multidisciplinaires en matière de normes internationales du travail. Il pourrait être envisagé de l'examiner ultérieurement sur une base régionale, lors des futures conférences régionales.

Lien entre le commerce international et les normes internationales du travail

38. Un grand nombre d'orateurs (pays non alignés, pays asiens, pays arabes, nombreux pays africains, pays latino-américains et centre-américains (avec des nuances sensibles)) ont indiqué leur refus de l'établissement d'un lien entre le commerce international et les normes internationales du travail. A l'inverse, des délégués des travailleurs (Allemagne, République tchèque, CISL, CMT) se sont prononcés en faveur de l'établissement d'une clause sociale dont le contenu serait fourni par les conventions fondamentales de l'OIT, estimant que les mesures proposées par le Directeur général dans son rapport ne sauraient s'y substituer.

Lien entre l'OMC et le BIT

39. Quelques orateurs se sont prononcés en faveur de l'établissement, de la poursuite, voire du renforcement de la coopération entre le secrétariat de l'OMC et le BIT dans le domaine de l'activité normative (gouvernements: Bahamas, Botswana, Luxembourg, Royaume-Uni; travailleurs: Allemagne, Danemark, République tchèque, TUAC). Il a été suggéré que le résultat des discussions de la Conférence soit présenté à l'OMC. Un délégué gouvernemental (Luxembourg) a rappelé à cet égard que toute l'action de réforme de l'activité normative n'est pas une fin en soi, mais doit s'inscrire dans la perspective de la coopération entre l'OIT et l'OMC. La Déclaration finale de Singapour demande aux secrétariats des deux organisations de continuer à coopérer.

Déclaration de principe tripartite sur les multinationales

40. Compte tenu du rôle joué par les entreprises multinationales dans la mondialisation de l'économie, un gouvernement (Belgique) et quelques délégués des travailleurs (FIET) ont demandé que des moyens suffisants soient mis en œuvre pour accroître l'efficacité pratique de cet instrument.

Instrument sur la diminution du temps de travail

41. Deux gouvernements (Argentine, Grèce) ont souhaité que la question d'un instrument contraignant sur la diminution concertée par tous les pays du temps de travail soit inscrite à une prochaine session de la Conférence internationale du Travail (88e session, 2000).

Système de contrôle du travail des enfants

42. Un gouvernement (Pays-Bas), se référant au consensus obtenu à la Conférence d'Amsterdam sur le travail des enfants, a demandé qu'un système de contrôle international du travail des enfants soit examiné et mis en place rapidement.

Problèmes relatifs aux microEtats

43. Plusieurs délégués gouvernementaux des microEtats (Bahamas, Barbade, Fidji) ont fait part des difficultés rencontrées dans l'application des normes internationales du travail. Ils ont demandé que les arrangements qui existent pour l'application des conventions des Nations Unies puissent s'appliquer aux conventions de l'OIT. Un délégué gouvernemental (Barbade) a suggéré également que soient introduites dans les conventions des dispositions transitoires qui permettraient, notamment aux microEtats, d'appliquer progressivement les dispositions des conventions.

Genève, le 15 octobre 1997.


1.  Document GB.270/3/1.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 21 février 2000.