GB.271/9 |
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NEUVIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR
309e rapport du Comité de la liberté syndicale
Table des matières
Cas no 1924 (Argentine): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de l'Argentine présentée par le Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur et
activités apparentées, national, provincial, municipal et privé (SCGVA)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1945 (Chili): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Chili présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1787 (Colombie): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de la Colombie présentée par la Confédération internationale des syndicats libres
(CISL), la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) et la Fédération syndicale mondiale (FSM)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement de la Colombie présentée par le Syndicat des travailleurs de l'entreprise Empresas
Varias Municipales de Medellín (EEVVMM)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement de la Colombie présentée par le Syndicat national des travailleurs d'Avianca
(SINTRAVA)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1865 (République de Corée): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de la République de Corée présentée par la Confédération coréenne des syndicats
(KCTU), la Fédération coréenne des travailleurs de l'industrie automobile (KAWF) et la Confédération
internationale des syndicats libres (CISL)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement de la Croatie présentée par l'Union des syndicats autonomes de Croatie
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1933 (Danemark): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Danemark présentée par l'Association des conducteurs de Århus
Conclusions du comité
Recommandation du comité
Cas nos 1851 et 1922 (Djibouti): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Djibouti présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL),
la Coordination intersyndicale Union djiboutienne du travail/ Union générale des travailleurs de Djibouti
(UDT/UGTD), l'Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA), l'Internationale de l'éducation (IE), le Syndicat
des enseignants du second degré (SYNESED) et le Syndicat des enseignants du primaire (SEP)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plaintes contre le gouvernement du Guatemala présentées par la Confédération internationale des syndicats libres
(CISL) et l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac
et des branches connexes (UITA)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement du Guatemala présentée par le Syndicat des travailleurs de l'Institut national de
l'électrification (STINDE)
Conclusions du comité
Recommandation du comité
Cas no 1940 (Maurice): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Maurice présentée par le Congrès du travail de Maurice (MLC)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1913 (Panama): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Panama présentée par la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
Conclusions du comité
Recommandation du comité
Plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni présentée par le Congrès des syndicats (TUC)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni (île de Man) présentée par le Conseil professionnel de l'île de Man
(IMTC)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Plainte contre le gouvernement du Soudan présentée par la Fédération (légitime) des syndicats de travailleurs du
Soudan (FSTS)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
Cas no 1812 (Venezuela): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Venezuela présentée par le Secrétariat international des syndicats des employés
des arts, de la communication et du spectacle/Fédération internationale des syndicats des travailleurs de l'audiovisuel
(ISETU/FISTAV)
Conclusions du comité
Recommandation du comité
Cas no 1828 (Venezuela): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Venezuela présentée par la Fédération des syndicats de pilotes de ligne
professionnels du Venezuela (FESPAVEN)
Conclusions du comité
Recommandation du comité
Plainte contre le gouvernement du Zimbabwe présentée par la Fédération internationale des employés, techniciens et
cadres (FIET)
Conclusions du comité
Recommandations du comité
1. Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail à Genève les 12, 13 et 19 mars 1998, sous la présidence de M. le professeur Max Rood.
2. Les membres de nationalité argentine, panaméenne et zimbabwéenne n'étaient pas présents lors de l'examen des cas relatifs à l'Argentine (cas no 1924), au Panama (cas no 1913) et au Zimbabwe (cas no 1937).
* * *
3. Le comité est actuellement saisi de 55 cas dans lesquels les plaintes ont été transmises aux gouvernements intéressés pour observations. A la présente session, le comité a examiné 20 cas quant au fond et a abouti à des conclusions définitives dans 15 cas et à des conclusions intérimaires dans 5 cas; les autres cas ont été ajournés pour les raisons indiquées aux paragraphes suivants.
Nouveaux cas
4. Le comité a ajourné à sa prochaine session l'examen des cas suivants: nos 1943 (Canada/Ontario), 1944 (Pérou), 1947 (Argentine), 1948 (Colombie), 1949 (Bahreïn), 1950 (Danemark), 1951 (Canada/Ontario), 1952 (Venezuela), 1953 (Argentine), 1954 (Côte d'Ivoire), 1955 (Colombie) et 1956 (Guinée-Bissau), car il attend les informations et observations des gouvernements concernés. Tous ces cas se réfèrent à des plaintes présentées depuis la dernière session du comité.
Observations attendues des gouvernements
5. Le comité attend encore les observations ou les informations des gouvernements sur les cas suivants: nos 1869 (Lettonie), 1873 (Barbade) et 1942 (Chine/Région administrative spéciale de Hong-kong).
Observations partielles reçues des gouvernements
6. Dans les cas nos 1835 (République tchèque), 1927 (Mexique), 1934 (Cambodge) et 1939 (Argentine), le gouvernement a envoyé des informations partielles sur les allégations formulées. Le comité demande à l'ensemble de ces gouvernements de compléter sans tarder leurs observations afin qu'il puisse examiner les cas en question en pleine connaissance de cause.
Observations reçues des gouvernements
7. En ce qui concerne les cas nos 1773 (Indonésie), 1867 (Argentine), 1880 (Pérou), 1887 (Argentine), 1888 (Ethiopie), 1906 (Pérou), 1914 (Philippines), 1928 (Canada/Manitoba), 1929 (France/Guyane), 1930 (Chine), 1931 (Panama), 1932 (Panama), 1941 (Chili) et 1946 (Chili), le comité a reçu tardivement les observations des gouvernements et se propose de les examiner à sa prochaine réunion.
Appels pressants
8. En ce qui concerne les cas nos 1884 (Swaziland) et 1935 (Nigéria), le comité observe que, en dépit du temps écoulé depuis le dépôt des plaintes ou le dernier examen de ces cas, il n'a pas reçu les observations des gouvernements concernés. Le comité attire l'attention des gouvernements en question sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvée par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de ces affaires, même si leurs informations et observations n'étaient pas reçues à temps. En conséquence, le comité prie instamment ces gouvernements de transmettre d'urgence leurs observations et informations.
Cas graves et urgents sur lesquels le comité attire
spécialement l'attention du Conseil d'administration
9. Le comité a considéré qu'il y avait lieu d'attirer spécialement l'attention du Conseil d'administration sur certains cas en raison de la gravité et de l'urgence des affaires en cause. Il s'agit des cas relatifs aux pays suivants: Colombie (cas no 1787), Nigéria (cas no 1793) et Soudan (cas no 1843).
Transmission de cas à la commission d'experts
10. Le comité signale à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations les aspects législatifs des cas suivants: Soudan (cas no 1843), Royaume-Uni (île de Man) (cas no 1912).
Suites données aux recommandations du comité
et du Conseil d'administration
Cas no 1900 (Canada)
11. Lors de son dernier examen de ce cas à sa session de novembre 1997, le comité a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, les travailleurs domestiques, les architectes, les dentistes, les arpenteurs-géomètres, les avocats et les médecins bénéficient tous de la protection nécessaire pour créer des organisations de leur choix et y adhérer, et il a invité le gouvernement à reconnaître à nouveau ces organisations, qui ne l'étaient plus en vertu de la loi 7. Le comité a demandé au gouvernement de veiller à ce que le droit de grève ne soit pas refusé aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux arpenteurs-géomètres et aux avocats, et d'assurer des garanties compensatoires correctes au cas où ce droit serait limité dans la profession médicale. Le comité a également invité le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour garantir l'accès de tous les travailleurs précités au mécanisme et aux procédures qui facilitent la négociation collective, et à rétablir les conventions collectives annulées précédemment en vertu de la loi 7. Enfin, le comité a invité le gouvernement à prendre des mesures en vue d'assurer une protection correcte des droits d'organisation et de négociation collective dans les services de l'industrie du bâtiment, et de le tenir informé à ce sujet. [Voir 308e rapport, paragr. 194.]
12. Dans une communication en date du 30 janvier 1998, le gouvernement fait savoir qu'un jugement a été rendu, le 9 décembre 1997, par le tribunal de l'Ontario au sujet de l'appel interjeté au nom de l'Union des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce (UFCW) demandant que la loi 7 soit déclarée anticonstitutionnelle au motif qu'elle viole la Charte canadienne des droits et libertés en abrogeant la loi sur les relations du travail agricole, 1994. Cet arrêt conclut que l'exclusion des travailleurs agricoles du système de relations du travail statutaire de l'Ontario ne viole pas leur liberté d'association ou leur droit à une protection égale et à des avantages égaux garantis par la Charte. L'UFCW a fait appel de ce jugement devant la cour d'appel de l'Ontario, et le gouvernement fait savoir qu'il tiendra le comité informé de l'évolution de ce cas.
13. Le gouvernement réitère que les caractéristiques uniques du secteur agricole, et la nature de l'emploi dans ce secteur, sont telles qu'elles posent d'importantes questions quant à la pertinence et au bien-fondé du régime de négociation collective envisagé par la loi sur les relations du travail, en particulier les mécanismes de résolution des différends dont dépendent les négociations collectives, à savoir le droit de grève et de lock-out, et l'arbitrage obligatoire. En Ontario, l'agriculture est majoritairement dominée par des exploitations familiales, et le secteur agricole se caractérise par des marges bénéficiaires extrêmement basses et des relations de travail non structurées fortement personnelles. Qui plus est, les employeurs de ce secteur dépendent des conditions climatiques, des variations saisonnières et produisent des produits fortement périssables. Partant, le gouvernement indique qu'il n'entend pas amender la législation en vue de supprimer l'exclusion des travailleurs agricoles de quelque système de relations du travail statutaire que ce soit.
14. En conclusion, le gouvernement réaffirme son profond engagement vis-à-vis de la négociation collective, tant dans le secteur public que privé de l'Ontario. La loi 7 a créé un équilibre de pouvoir correct entre les syndicats et les employeurs, et elle a facilité des négociations collectives productives, que le gouvernement considère comme un élément important de sa stratégie visant à renforcer l'économie et à créer des emplois.
15. Le comité prend note avec regret de ces informations. Cependant, il tient à réitérer les conclusions de ce cas relatives aux travailleurs agricoles faites dans son 270e rapport et dans les recommandations correspondantes. En outre, le comité constate avec préoccupation que le gouvernement n'a fourni d'informations, dans sa réponse à ses recommandations, que pour les travailleurs agricoles, et qu'aucune indication n'est donnée quant aux mesures prises en vue de garantir le droit syndical, le droit de grève (ou des garanties compensatoires correctes) et le droit de négociation collective aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux dentistes, aux arpenteurs-géomètres, aux avocats et aux médecins. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toute évolution concernant ces catégories de travailleurs, et d'indiquer si des mesures sont envisagées en vue de garantir les droits des travailleurs agricoles par le biais de la loi sur les relations de travail ou de tout autre moyen opportun.
Cas no 1910 (République démocratique du Congo)
16. A sa session de juin 1997, en examinant les allégations relatives à l'ingérence du gouvernement dans le processus de négociation collective de l'entreprise Marsavco-Zaïre, le comité a insisté sur l'importance qu'il attache au respect de l'article 4 de la convention no 98, et a invité le gouvernement à le tenir informé de l'issue des négociations dans l'entreprise en question. [Voir 307e rapport, paragr. 176 b).] Par une communication en date du 8 octobre 1997, le gouvernement actuel informe que le gouvernement du régime précédent avait déjà résolu la question avant l'avènement de la troisième République. De même, le gouvernement fait savoir que les droits du syndicat de l'entreprise concernée ont été rétablis conformément aux dispositions du Code du travail en vigueur. Le comité prend note de ces informations.
Cas no 1594 (Côte d'Ivoire)
17. A sa session de juin 1997, le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer si les travailleurs licenciés en 1993 à Irho-Lamé qui s'estimaient lésés avaient saisi les tribunaux afin d'être rétablis dans leurs droits et d'assurer que les élections sociales au port autonome d'Abidjan aient effectivement lieu immédiatement, et de le tenir informé des résultats des élections. [Voir 307e rapport, paragr. 23-25.] Dans une communication du 23 janvier 1998, le gouvernement explique que les travailleurs licenciés à Irho-Lamé n'ont pas saisi les tribunaux afin d'être rétablis dans leurs droits et il considère qu'il s'agit d'un dossier clos. Le comité prend note avec regret de cette information et insiste pour que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour assurer que les travailleurs en question soient réintégrés s'ils le désirent. Quant aux élections sociales au port autonome d'Abidjan, le gouvernement réitère les informations données précédemment selon lesquelles les syndicats de base estiment nécessaire d'élaborer une convention collective des dockers avant d'envisager les élections sociales, ce que six des sept syndicats de base présents ont confirmé lors d'une réunion tenue le 21 janvier 1998 dans les locaux du Syndicat des entrepreneurs manutentionnaires du port autonome d'Abidjan (SEMPA). Le comité demande à nouveau au gouvernement de tout mettre en œuvre pour que les élections sociales aient lieu au plus vite au port autonome d'Abidjan et d'assurer que les organisations de base affiliées à la centrale syndicale Dignité puissent y participer. Il demande une fois encore au gouvernement de le tenir informé des résultats des élections.
Cas no 1918 (Croatie)
18. Au cours de sa session de juin 1997, en analysant les allégations relatives à un différend sur la direction de la Confédération des syndicats indépendants de la Croatie (CITUC) et aux obstacles concernant l'enregistrement de cette organisation, le comité a invité le gouvernement à lui fournir davantage d'informations sur la compétence du tribunal administratif concernant le différend sur la direction de l'organisme et le refus d'enregistrer, à le tenir informé du développement de la procédure engagée devant le tribunal administratif et à lui fournir une copie de la décision du tribunal lorsqu'elle sera rendue. [Voir 307e rapport, paragr. 252.] Par une communication du 7 novembre 1997, le gouvernement envoie certaines informations relatives à la juridiction et à la compétence du tribunal administratif et il fait savoir que ce tribunal n'a pas encore rendu sa décision concernant le recours interjeté contre la décision du ministère du Travail et du Bien-être social sur le refus d'enregistrer la CITUC. De même, le gouvernement fait savoir qu'il a transmis au tribunal administratif la recommandation formulée par le comité. Le comité prend note de ces informations. Il exprime l'espoir de voir ce processus se clore prochainement et prie le gouvernement de lui fournir une copie de la décision dès qu'elle sera rendue.
Cas nos 1512 et 1539 (Guatemala)
19. Au cours de sa session de novembre 1997, le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé périodiquement des progrès accomplis par la Commission d'enquête historique au sujet des allégations, actuellement en instance, d'assassinat ou d'enlèvement de syndicalistes (1990-1994). [Voir 308e rapport, paragr. 394 b).] Dans une communication des 28 janvier et 26 février 1998, le gouvernement indique que cette commission siégera pendant six mois et présentera un rapport qui sera transmis au comité. Le comité prend note de ces informations et attend de recevoir le rapport mentionné.
Cas no 1890 (Inde)
20. A sa session de juin 1997, le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé des suites données à une demande présentée par l'employeur de M. L. Malwankar au tribunal du travail en vue d'obtenir l'approbation de son licenciement, président de Fort Aguada Beach Resort Employees' Union (FABREU), et de prendre les mesures nécessaires pour qu'il soit réintégré dans son poste de travail s'il le désire; de prendre des mesures appropriées pour s'assurer que les poursuites en cours demandées par le Beach Resort à l'encontre de 15 membres de FABREU, qui ont suivi la grève, soient abandonnées; d'abroger la déclaration d'utilité publique de l'industrie hôtelière; de prendre les mesures de conciliation appropriées pour obtenir la reconnaissance de FABREU par son employeur aux fins de la négociation collective. [Voir 307e rapport, paragr. 376.]
21. Dans sa communication du 6 février 1998, le gouvernement fait savoir que le tribunal du travail a été saisi du différend concernant M. Malwankar, mais que la procédure a été retardée car M. Malwankar a demandé sept ajournements. Dans l'attente du jugement, le gouvernement a donné l'assurance que toute décision favorable à M. Malwankar serait appliquée. S'agissant des quinze membres de FABREU soumis à des poursuites demandées par la direction, le gouvernement indique que sept d'entre eux sont suspendus dans l'attente des résultats de l'enquête et qu'ils perçoivent une indemnité de subsistance. Dans ces circonstances, le mécanisme de conciliation ne peut jouer car il ne s'agit pas d'un conflit du travail. Les huit autres membres ont reçu des ordres de transfert qu'ils ont refusés car ils ont invoqué en les recevant un conflit du travail et demandé leur retrait de ces ordres. Le gouvernement a reçu un rapport sur l'échec de la tentative de conciliation, d'autres mesures suivront. Entre-temps, le commissaire au travail a invité les représentants syndicaux à envisager l'éventualité d'un règlement à l'amiable. Le commissaire a proposé qu'ils acceptent leur nouvelle affectation pour demander ensuite à être réintégrés dans leur poste primitif, de la sorte il pourrait aborder à nouveau la question avec l'employeur. Cette proposition a été rejetée. Tout en exigeant la mise en œuvre intégrale de la recommandation du comité, le syndicat a fait savoir qu'il était prêt à entamer des discussions conjointes avec l'employeur.
22. Le gouvernement central indique également que déclarer une industrie d'utilité publique relève de la discrétion du gouvernement provincial concerné. C'est dans l'intérêt de la paix et de l'harmonie du tourisme, industrie clé de l'Etat de Goa, que le gouvernement a fait usage de ce pouvoir discrétionnaire; il convient de noter que déclarer une industrie d'utilité publique ne signifie pas y interdire la grève. Dans ces industries, la seule restriction en la matière est qu'un préavis de grève de quatorze jours doit être déposé. Enfin, s'agissant de la question de la reconnaissance de FABREU aux fins de la négociation collective, le gouvernement fait savoir que le commissaire au travail a examiné la question avec la direction qui a déclaré avoir reconnu Fort Aguada Association, car il s'agit d'un syndicat majoritaire. Par ailleurs, le gouvernement ajoute que FABREU a encore la faculté de saisir le ministère du Travail de plaintes indépendamment de son nouveau statut.
23. Le comité prend bonne note de ces informations. Il invite le gouvernement à continuer de le tenir informé des résultats de la procédure concernant le licenciement de M. Malwankar et, eu égard au fait que le comité a conclu lors de son examen précédent de ce cas que M. Malwankar a été licencié en raison de son statut de syndicaliste et de ses activités syndicales [voir 307e rapport, paragr. 369], il prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu'il soit réintégré dans son poste de travail s'il le désire. Au sujet des poursuites entamées par la direction vis-à-vis des quinze membres de FABREU, le comité, rappelant ses conclusions précédentes, selon lesquelles ses poursuites et ses ordres de transfert constituent une discrimination antisyndicale [voir 307e rapport, paragr. 372], prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu'elles soient abandonnées. S'agissant de la reconnaissance de FABREU en tant qu'agent de négociation collective, le comité rappelle qu'il a conclu précédemment, en se fondant sur des informations fournies tant par le gouvernement que par le plaignant, que FABREU était l'organisation la plus représentative de Fort Aguada Beach Resort. Le comité tient donc à nouveau à prier instamment le gouvernement de continuer à prendre toute mesure opportune en vue d'obtenir la reconnaissance par l'employeur de FABREU aux fins de la négociation collective, et de le tenir informé de l'évolution de la situation sur ce sujet.
Cas no 1920 (Liban)
24. A sa session de novembre 1997, le comité avait prié le gouvernement de préciser si un recours judiciaire concernant les résultats contestés des élections des dirigeants de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL) du 24 avril 1997 était effectivement en cours et de le tenir informé du résultat. Par ailleurs, au sujet de l'arrestation des dirigeants syndicaux, MM. Abou Rizk et Yasser Nehmi, et leur inculpation, le comité avait demandé avec insistance au gouvernement de faire tout ce qui est en son pouvoir pour que les charges retenues contre eux soient immédiatement abandonnées. [Voir 308e rapport, paragr. 525.]
25. Dans une communication en date du 9 janvier 1998, le gouvernement indique que le tribunal de première instance de Beyrouth a conclu, pour vices de forme, au rejet de la requête tendant à ce que les élections au sein de la CGTL soient annulées. La requête a été considérée irrecevable pour non-conformité avec la loi vu qu'il n'y a pas eu de décision des conseils exécutifs des syndicats plaignants d'introduire une action en justice.
26. Le comité prend note de ces informations. Il constate que le gouvernement ne fournit aucune information sur la situation de MM. Abou Rizk et Yasser Nehmi. Le comité doit à nouveau exprimer sa profonde préoccupation face aux poursuites judiciaires exercées contre ces deux dirigeants syndicaux, et ce d'autant plus que leur inculpation semble directement liée au fait qu'ils ont déposé une plainte devant le BIT. Le comité demande instamment au gouvernement de faire tout ce qui est en son pouvoir pour que les charges retenues contre eux soient immédiatement levées. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation à ce sujet
Cas no 1793 (Nigéria)
27. Lors de l'examen du cas en novembre 1997, le comité s'est trouvé dans l'obligation de déplorer profondément le fait que, depuis presque trois ans, le gouvernement a continuellement refusé de répondre aux demandes pressantes pour l'envoi d'une mission. Le comité a en outre observé qu'une nouvelle plainte avait été soumise contre le gouvernement du Nigéria alléguant l'adoption de nouveaux décrets antisyndicaux et la détention de syndicalistes (cas no 1935). Le comité avait donc réitéré dans les termes les plus forts les appels qui avaient été lancés au gouvernement pour indiquer d'urgence les dates les plus proches où une mission pourrait être reçue en vue d'examiner la situation syndicale au Nigéria. [Voir 308e rapport, paragr. 53-55.]
28. Dans une communication datée du 4 février 1998, le gouvernement a indiqué qu'il transmettait sa réponse concernant ce cas le 20 février 1998. Le 20 février 1998, le gouvernement a envoyé une lettre indiquant qu'il répondrait le 24 février 1998. Aucune information complémentaire n'a été reçue depuis lors.
29. Dans ces conditions, le comité se déclare outragé quant à la manière dont le gouvernement a de façon réitérée ignoré non seulement ses propres appels pour une mission en vue d'examiner la situation syndicale dans le pays et de rendre visite aux syndicalistes détenus sans jugement dont au moins un depuis plus de trois ans, mais aussi aux demandes pressantes formulées directement par le Conseil d'administration. La légèreté ainsi manifestée par le gouvernement ne peut être relevée par le comité qu'avec la plus grande préoccupation. Etant donné le manque persistant de coopération de la part du gouvernement dans cette affaire, le comité estime que d'autres types d'action devraient être pris en vue de favoriser l'accomplissement de progrès dans les très graves problèmes soulevés dans ce cas.
Cas no 1698 (Nouvelle-Zélande)
30. A sa réunion de juin 1997, le comité a pris note des informations fournies par le gouvernement au sujet d'un accord collectif visant à introduire la notion de négociation loyale dans la loi sur les contrats d'emploi (ECA). Il avait invité le gouvernement à le tenir informé de toutes les mesures qui seraient prises à l'avenir pour modifier l'article 63 e) à cet égard.
31. Dans une communication du 28 octobre 1997, le gouvernement indique qu'il continue à travailler sur la recherche des problèmes posés par la négociation, particulièrement sur la reconnaissance du représentant des salariés, que l'expérience dans l'application de l'ECA a révélés depuis sa mise en vigueur. Des options pour résoudre ces problèmes seront ensuite préparées et examinées par le gouvernement avant qu'une législation soit à l'étude. En ce qui concerne l'article 63 e), le gouvernement indique qu'aucune mesure n'a été examinée et qu'il a pour politique de ne pas permettre l'usage des grèves et des lock-out à l'appui de contrats conclus avec plusieurs employeurs. De tels contrats devraient résulter d'accords entre employeurs et employés, auxquels ils sont parvenus sans qu'il y ait recours aux actions de grève. Enfin, le gouvernement fournira des informations sur les cas récents concernant l'application de l'ECA.
32. Le comité prend note de ces informations. Il demande au gouvernement de le tenir informé de tout progrès réalisé dans l'introduction du concept de négociation loyale dans la législation. Au sujet de l'article 63 e) de l'ECA, tout en réaffirmant que la négociation des accords collectifs et donc de l'autonomie des partenaires à la négociation constitue un aspect fondamental des principes de la liberté syndicale [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1994, paragr. 844], le comité estime que cette question est distincte de celle de la légitimité d'une grève à l'appui d'un contrat conclu avec plusieurs employeurs. Le comité ne peut partager l'opinion exprimée par le gouvernement selon laquelle la nature volontaire de la négociation collective signifie qu'il ne peut être recouru à la grève pour appuyer les revendications légitimes des travailleurs. Il rappelle donc une fois encore les conclusions adoptées dans ce cas selon lesquelles la disposition qui interdit les grèves qui concernent le problème de l'application des contrats collectifs à plus d'un employeur est contraire aux principes de la liberté syndicale en matière de droit de grève. [Voir 292e rapport, paragr. 737.] Il demande à nouveau au gouvernement d'amender l'article 63 e) et de le tenir informé des mesures envisagées à cet égard.
Cas no 1891 (Roumanie)
33. A sa session de novembre 1997 [voir 308e rapport, paragr. 72 à 74], le comité a demandé au gouvernement de communiquer une copie de la loi nouvelle sur le règlement des conflits du travail, une fois qu'elle aura été adoptée, ainsi que d'indiquer si le Comité des droits de l'homme, constitué par le ministre de l'Intérieur, a été chargé d'enquêter sur les allégations soulevées spécifiquement dans ce cas, et de le tenir informé des résultats de ces investigations. Dans une communication datée du 21 janvier 1998, le gouvernement indique, une fois encore, que le projet de loi sur la réglementation des conflits de travail a été soumis aux partenaires sociaux et que le texte en sera communiqué au BIT dès qu'il sera adopté. Par ailleurs, il précise que le Comité des droits de l'homme n'a pas été saisi d'allégations concernant spécifiquement ce cas, mais que tout citoyen qui se considère lésé dans ses droits par un organe de police peut porter plainte devant ce comité, qui saisit le parquet militaire en cas d'infraction. Le comité prend note de ces informations. Il exprime à nouveau l'espoir qu'une nouvelle loi sur la réglementation des conflits du travail conforme aux principes de la liberté syndicale sera adoptée à brève échéance et que le gouvernement en communiquera copie le plus rapidement possible.
Cas no 1618 (Royaume-Uni)
34. A sa réunion de novembre 1997, le comité a prié instamment le gouvernement d'examiner la possibilité d'inclure dans la législation une protection expresse contre les pratiques de listes noires. [Voir 308e rapport, paragr. 75-77.]
35. Dans une communication en date du 9 février 1998, le gouvernement indique que, bien qu'il ne soit pas encore en mesure de savoir si la question des listes noires sera couverte, il a l'intention de publier un livre blanc sur l'équité au travail et plus particulièrement sur la reconnaissance syndicale dans la première partie de l'année. Ce livre blanc présentera les plans arrêtés par le gouvernement pour atteindre des normes minimales au travail, tout en conservant la flexibilité du marché du travail et en améliorant la compétitivité. Le gouvernement ajoute qu'il souhaite recueillir les observations des syndicats, et des organisations d'employeurs notamment, afin de garantir que ce livre blanc tienne compte de leurs points de vue.
36. Le comité prend note de ces informations. Il invite le gouvernement à le tenir informé des progrès réalisés dans l'incorporation, dans la législation, d'une disposition expresse sur la protection contre les pratiques de listes noires ou toute autre forme de discrimination fondée sur une affiliation ou des activités syndicales.
Cas no 1581 (Thaïlande)
37. A sa session de novembre 1997, le comité a prié à nouveau le gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis dans le sens de l'adoption du projet de loi sur les relations du travail dans les entreprises d'Etat, et il a exprimé l'espoir que la loi, dans sa forme finale, sera pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale. [Voir 308e rapport, paragr. 78-80.] Dans une communication en date du 5 février 1998, le gouvernement a fait savoir que le texte primitif de la loi examiné par la Chambre des représentants a été ensuite considérablement remanié par le Sénat. Il s'ensuit que la Chambre a repoussé la loi amendée qui, entre autres, prescrit un minimum de 35 pour cent d'adhérents aux fins de la formation d'un syndicat dans une entreprise d'Etat, limite le mandat du président du syndicat, stipule que les meetings généraux n'auront lieu que lors des jours chômés, et ne reconnaît pas le droit de former une fédération ou de s'affilier à une fédération du secteur privé. Selon le gouvernement, si la Chambre décide de rétablir la loi primitive ou la loi amendée -- par la suite -- par un comité mixte ad hoc formé de membres de la Chambre et de sénateurs, semblable texte sera considéré comme ayant été approuvé par le Parlement.
38. Le comité prend note de ces informations. Il se déclare profondément préoccupé de ce que les modifications apportées à la loi par le Sénat entraînent une dégradation des droits syndicaux pour les syndicats des entreprises étatiques qui va au-delà même de la situation créée par la loi existante -- critiquée en 1991 pour infraction aux principes de la liberté syndicale. [Voir 279e rapport, paragr. 441-482.] Le comité demande instamment au gouvernement que toutes les mesures nécessaires soient prises de façon que la loi, dans sa forme finale, soit conforme aux principes de la liberté syndicale et prie le gouvernement de le tenir informé de tout progrès réalisé à cet égard, et de communiquer copie de ce texte dès qu'il aura été adopté.
Cas no 1856 (Uruguay)
39. A sa session de mars 1996, le comité avait formulé la recommandation suivante à propos de ce cas: «Pour ce qui est du licenciement de 39 travailleurs, qui serait intervenu pour raisons financières quatre jours après la fin du conflit collectif à l'entreprise Perses S.A., le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête sur les motifs de ces licenciements et, s'il est démontré qu'il s'agissait de motifs antisyndicaux, de prendre les initiatives nécessaires pour que les intéressés soient réintégrés à leurs postes de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.» [Voir 302e rapport, paragr. 439.] A sa session de novembre 1996, le comité avait pris note des déclarations du gouvernement selon lesquelles l'Inspection générale du travail et de la sécurité sociale procédait à une enquête sur ces allégations. [Voir 305e rapport, paragr. 64 et 65.] Par la suite, dans une communication du 5 mars 1997, le gouvernement avait indiqué que l'enquête en était au stade de la réception et du rassemblement des preuves fournies par les parties intéressées, lesquelles consistaient fondamentalement en témoignages, d'où le fait qu'il n'y ait pas encore eu de conclusions définitives à ce sujet. Le gouvernement ajoutait que, dès que la procédure administrative serait parvenue à son terme, il informerait le comité de son issue.
40. A sa session de novembre 1997 [voir 308e rapport, paragr. 81 à 83], le comité avait pris note de ces informations et exprimé l'espoir que, l'enquête étant en cours depuis plus d'un an, les autorités administratives se prononceraient prochainement. Il avait demandé au gouvernement de prendre des mesures dans ce sens et attendait le résultat de l'enquête.
41. Dans sa communication du 21 janvier 1998, le gouvernement déclare que l'enquête sur les licenciements en question, visant à vérifier les points invoqués par chacune des parties, suit son cours, mais que seule l'entreprise incriminée, Perses S.A., s'est présentée, l'Association des fonctionnaires de Perses S.A. ne l'ayant pas fait. Le gouvernement ajoute que les pièces versées au dossier n'offrent pas suffisamment d'éléments pour qu'il soit possible de se prononcer de façon satisfaisante sur le contenu de la plainte et que, par conséquent, l'Inspection générale du travail et de la sécurité sociale a décidé de classer l'affaire.
42. Le comité prend note de ces informations et regrette que l'Association des fonctionnaires de Perses S.A. ne se soit pas présentée au cours de l'enquête demandée par le comité. Dans ces conditions, étant donné que les licenciements remontent à avril 1995 et vu le manque d'intérêt manifesté par l'organisation plaignante, le comité ne poursuivra pas l'examen de ces allégations.
Cas no 1886 (Uruguay)
43. A sa session de mai 1997, en examinant les allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale concernant la nomination des seuls travailleurs non affiliés au syndicat aux postes de direction de l'entreprise Lloyds Bank, le comité a demandé au gouvernement de lui communiquer le texte du jugement du tribunal portant sur le contentieux administratif en question, dès qu'il aura été prononcé. [Voir 307e rapport, paragr. 470 c).] Dans une communication du 23 janvier 1998, le gouvernement fait savoir que le cas n'a pas encore été jugé de façon définitive car la procédure se trouve actuellement au stade de la vérification du bien-fondé des allégations -- le plaignant et le tiers (Lloyds Bank Limited) devant présenter les leurs --, après quoi il devra être soumis au Procureur de l'Etat chargé du contentieux administratif. Enfin, le rapport sera étudié par les juges du tribunal, qui prononceront un jugement. Le gouvernement ajoute qu'il informera le comité, en temps voulu, des résultats du procès. Le comité prend acte de ces informations. Le comité exprime l'espoir que cette procédure judiciaire entamée approximativement il y a un an et huit mois (juin 1996) aboutira sous peu, et prie le gouvernement de lui envoyer copie du jugement dès qu'il aura été prononcé.
* * *
44. Finalement, en ce qui concerne les cas nos 1719 (Nicaragua), 1796 (Pérou), 1809 (Kenya),1819 (Chine), 1824 (El Salvador), 1826 (Philippines), 1834 (Kazakhstan), 1837 (Argentine), 1849 (Bélarus), 1850 (Congo), 1854 (Inde), 1863 (Guinée), 1864 (Paraguay), 1870 (Congo), 1877 (Maroc), 1883 (Kenya), 1894 (Mauritanie), 1903 (Pakistan), 1921 (Niger) et 1926 (Pérou), le comité demande aux gouvernements concernés de le tenir informé des développements relatifs aux affaires les concernant. Il espère que ces gouvernements fourniront rapidement les informations demandées. En outre, le comité vient de recevoir des informations concernant les cas nos 1785 (Pologne), 1813 (Pérou), 1878 (Pérou), 1895 (Venezuela), 1907 (Mexique) et 1908 (Ethiopie) qu'il examinera à sa prochaine session.
Plainte contre le gouvernement de l'Argentine
présentée par
le Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur
et activités apparentées, national, provincial,
municipal et privé (SCGVA)
Allégations: refus d'octroi du statut syndical
45. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication du Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur et activités apparentées, national, provincial et municipal et privé (SCGVA) du 1er avril 1997. Dans une communication ultérieure de juin 1997, l'organisation plaignante a présenté des informations complémentaires. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 9 octobre 1997 et 11 février 1998.
46. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
47. Dans ses communications du 1er avril et de juin 1997, le Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur et activités apparentées, national, provincial et municipal (SCGVA) affirme qu'il s'est constitué en 1990 (comme il ressort de ses statuts joints à la plainte) et que, en l'absence d'autre organisation syndicale regroupant les travailleurs du même domaine d'activité, il a, dès 1993, sollicité des autorités qu'elles lui octroient le statut syndical, mais sans succès. L'organisation plaignante décrit en détail les procédures administratives et judiciaires qu'il a, en pure perte, entreprises afin d'obtenir cette reconnaissance, et joint à sa plainte l'abondante documentation y afférente.
48. Enfin, l'organisation plaignante déclare qu'en 1994 le Syndicat uni d'ouvriers et d'employés de Córdoba (SUOEM) a fait appel devant les autorités administratives pour s'opposer à l'octroi du statut syndical au Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur et activités apparentées, national, provincial, municipal et privé (SCGVA).
B. Réponse du gouvernement
49. Dans ses communications des 9 octobre 1997 et 11 février 1998, le gouvernement déclare que l'organisation plaignante est inscrite au registre des syndicats depuis 1992, mais que le statut syndical ne lui a pas été accordé parce qu'elle n'a pas fait la preuve qu'elle est le syndicat le plus représentatif. Il joint à sa réponse un rapport de mars 1995 du ministère du Travail indiquant que ce statut n'a pas été octroyé à cette organisation du fait qu'elle ne répond pas à la disposition de l'article 25, alinéa b), de la loi no 23551 relative aux associations syndicales (à savoir regrouper plus de 20 pour cent des travailleurs qu'elle prétend représenter). Le gouvernement ajoute que, dans la province de Córdoba, le syndicat le plus représentatif à ce jour est le Syndicat uni d'ouvriers et d'employés de Córdoba (SUOEM), la quasi-totalité du personnel affecté aux chaudières, stérilisateurs, compresseurs, etc., étant des agents publics municipaux. Enfin, le gouvernement explique que l'organisation plaignante n'a pas non plus prétendu affilier les 20 pour cent des travailleurs qu'elle entend représenter.
C. Conclusions du comité
50. Le comité observe que les allégations portent sur le refus d'octroyer le statut syndical au Syndicat des conducteurs de générateurs de vapeur et activités apparentées, national, provincial, municipal et privé (SCGVA), sollicité par celui-ci depuis de nombreuses années, à savoir depuis 1993 (les organisations dotées du statut syndical sont les seules qui, conformément à la législation, jouissent du droit de négociation collective).
51. Le comité observe qu'il ressort de la réponse et la documentation envoyées par le gouvernement que le statut syndical n'a pas été octroyé à l'organisation plaignante pour les raisons suivantes: 1) elle ne regroupe pas plus de 20 pour cent des travailleurs et ne l'a pas démontré (comme l'exige, à l'article 25, alinéa b), la loi no 23551); 2) le syndicat le plus représentatif dans la province de Córdoba est, à ce jour, le Syndicat uni d'ouvriers et d'employés de Córdoba (SUOEM).
52. A ce sujet, s'agissant là d'une question de fait, le comité ne peut déterminer si, comme elle l'affirme, l'organisation plaignante regroupe plus de 20 pour cent des travailleurs de son secteur ou si elle est ou non la plus représentative; cela d'autant plus que le domaine d'activité et la sphère géographique dans lesquels l'organisation plaignante et le Syndicat uni d'ouvriers et d'employés de Córdoba (SUOEM) exercent leur droit de représentation n'apparaissent clairement ni des allégations ni de la réponse du gouvernement.
53. Dans ces conditions, vu le temps écoulé depuis la dernière vérification des pourcentages d'affiliation (1995) de l'organisation plaignante, le comité demande au gouvernement de procéder à une nouvelle vérification afin de déterminer lequel, du SCGVA ou du SUOEM, est le syndicat le plus représentatif. S'il s'avère que c'est l'organisation plaignante, le comité demande au gouvernement de lui octroyer le statut syndical qu'elle réclame depuis 1993.
54. Par ailleurs, le comité rappelle qu'il a déjà eu l'occasion de critiquer la disposition de la loi no 23551 de 1988 relative aux associations syndicales, laquelle exige d'un syndicat qui prétend obtenir le statut syndical de justifier d'un nombre de membres considérablement supérieur à celui de l'association déjà dotée de ce statut (art. 28) [voir 286e rapport, cas no 1551, paragr. 47 à 50], la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a déjà, elle aussi, fait part de ses objections à cette disposition [voir observation de la commission, rapport III, partie 1A, de 1998]; le comité demande donc au gouvernement de faire le nécessaire pour modifier cet article de manière que le critère de représentativité des syndicats se fonde simplement sur le caractère majoritaire du nombre de membres.
Recommandations du comité
55. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1945
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Chili
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: licenciements antisyndicaux et poursuites pénales
contre des syndicalistes
56. La présente plainte figure dans une communication datée du 6 novembre 1997 envoyée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL).
57. Le gouvernement a fait parvenir des observations dans une communication en date du 4 février 1998.
58. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
59. Dans sa communication en date du 6 novembre 1997, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue que, le 29 juillet 1997, l'entreprise d'électricité Rhona SA a mis fin, de façon unilatérale, au contrat de travail de M. Eduardo Araos Herrera, secrétaire du Syndicat national de Rhona SA et trésorier de la Fédération de la métallurgie (FETEM). Selon la CISL, ce licenciement viole les normes relatives au droit du travail sanctionnées par la législation du travail chilienne et, de ce fait, les organisations syndicales intéressées ont engagé une procédure judiciaire pour nullité du licenciement et saisi l'autorité administrative du travail d'une plainte afin d'obtenir la réintégration du dirigeant dans son poste. Toutefois, tribunaux et autorités administratives se sont vus dépassés par l'attitude de défi de la direction de Rhona SA qui a refusé de se plier à la décision de la Direction nationale du travail demandant la réintégration du dirigeant injustement licencié. De même, la CISL allègue que MM. Sergio Cea Valenzuela, Sergio Silva Pérez et Jorge Muñoz Llanos, dirigeants syndicaux de l'entreprise Brink's Chile, ont été injustement licenciés, alors qu'ils bénéficiaient de la protection prévue par le droit du travail, au motif de leurs activités visant à constituer un syndicat de travailleurs dans ladite entreprise.
60. Par ailleurs, la CISL allègue que le 13 mai 1997, lors d'une journée de protestation organisée par la Confédération des syndicats du secteur bancaire dans les galeries du Sénat de la République pour manifester le désaccord du secteur face au projet de loi visant à étendre la durée du travail aux samedis, dimanches et jours fériés, les travailleurs ont été violemment expulsés et que, par la suite, les dirigeants syndicaux, Luis Pereira, Nicolás Soto et Luis Mesina, ont été détenus. Peu après, ces dirigeants ont été libérés, mais, fait sans précédent, le Sénat a engagé une procédure pénale contre eux pour «manque de respect à l'autorité» avec, pour conséquence, l'instruction en cours d'une procédure judiciaire malgré les appels répétés lancés par les organisations syndicales et sociales en vue d'obtenir la cessation de cette action.
B. Réponse du gouvernement
61. Dans sa communication du 4 février 1998, le gouvernement déclare, au sujet du licenciement de M. Eduardo Araos Herrera, dirigeant du syndicat de l'entreprise Rhona SA et de la Fédération de la métallurgie (FETEM), que l'employeur a effectivement mis fin à son contrat de travail sans avoir obtenu d'autorisation préalable du tribunal compétent, comme le prévoit l'article 174 du Code du travail. L'employeur invoque pour motif de ce mode de licenciement que, à la date où il a eu lieu, la personne en question n'était pas dirigeant syndical. Les inspecteurs du travail de Viña del Mar se sont rendus chez Rhona SA et ils ont sommé l'employeur de réintégrer le travailleur et de respecter ses obligations contractuelles. Cependant, l'entreprise n'a pas suivi les instructions des inspecteurs du travail et a maintenu le licenciement sans réintégrer le travailleur. Face à cette situation, le dirigeant syndical en a appelé au tribunal du travail compétent, demandant l'annulation de son licenciement et sa réintégration dans l'entreprise. Cette procédure est actuellement en cours devant le tribunal du travail de Viña del Mar.
62. S'agissant du licenciement de MM. Sergio Cea Valenzuela, Sergio Silva Pérez et Jorge Muñoz Llanos, dirigeants du syndicat de l'établissement de l'entreprise Brink's Chile, région V, le gouvernement fait savoir que ce syndicat a été constitué le 10 mai 1996 et qu'il a élu les dirigeants précités. L'entreprise a refusé de les recevoir et les a licenciés. Le gouvernement ajoute que, comme ces travailleurs bénéficiaient de la protection syndicale et que l'entreprise n'avait pas obtenu d'autorisation préalable de licenciement du tribunal du travail compétent, les inspecteurs du travail de Viña del Mar se sont rendus chez Brink's Chile, région V, et ont ordonné de les réintégrer. L'entreprise n'a pas respecté ces instructions et s'est vu infliger plusieurs amendes pécuniaires. Devant cette situation, les travailleurs ont saisi le tribunal du travail de Viña del Mar de ce cas pour «pratiques antisyndicales». Cette plainte a été acceptée et a fait l'objet d'un jugement favorable aux travailleurs le 27 septembre 1997. Mais l'entreprise a interjeté appel devant le tribunal supérieur (cour d'appel), ce qui a provoqué la nullité du jugement précédent et ramené la procédure au stade de la production de preuves demandées par l'entreprise. Cette procédure est actuellement en cours devant le Premier tribunal du travail de Valparaíso.
63. Le gouvernement précise que la direction du travail et ses services, les inspections du travail, n'ont pas faculté de faire exécuter leurs décisions et peuvent seulement infliger des amendes pécuniaires. Il ressortit aux tribunaux du travail, après le prononcé d'un jugement ordinaire, d'ordonner la réintégration des travailleurs qui bénéficient de la protection syndicale et qui ont été licenciés.
64. Pour ce qui est de la détention et de la procédure judiciaire pour «manque de respect à l'autorité» de la part de MM. Luis Pereira Concha, Nicolás Soto Reyes et Luis Mesina Marín, dirigeants de la Confédération des syndicats bancaires, le gouvernement indique qu'il a consulté le Sénat de la République (branche du pouvoir législatif), dont le président a fait, le 10 octobre 1997, la communication suivante:
«Le mardi 13 mai 1997, dans l'après-midi, le Sénat siégeait en présence d'un important public dans les galeries. Il examinait, en particulier, le projet de loi portant modification de la loi générale sur les banques...
Pendant les interventions de certains sénateurs se sont produites dans le public, ... diverses manifestations tels des applaudissements, des quolibets ou des insultes, qui m'ont amené, en ma qualité de président en exercice du Sénat, à déclarer que les manifestations étaient interdites. Malgré cela, ... l'ordre a été tellement perturbé que je me suis vu obligé de suspendre la séance pour que la force publique fasse évacuer les galeries et que l'on puisse après cela reprendre la séance sans interruption.
Je dois préciser que l'on a proféré des termes ... grossiers adressés principalement à certains sénateurs, ... que les désordres visant à interrompre les orateurs ont consisté en des cris et des slogans ainsi que le lancement depuis les galeries dans la salle du Sénat de différents objets,...
Les gendarmes présents dans les galeries qui ont procédé à l'évacuation, ... ont identifié les principaux auteurs de ces désordres et de ces injures en la personne de MM. Nicolás Soto Reyes, Luis Fernando Mesina Marín et Luis Armando Pereira Concha,...»
65. Enfin, le gouvernement indique que tout autre précédent dont il viendrait à connaître serait communiqué comme il se doit.
C. Conclusions du comité
66. Pour ce qui est du licenciement de dirigeants syndicaux des entreprises Rhona SA (M. Araos Herrera) et Brink's (MM. Cea Valenzuela, Silva Pérez et Muñoz Llanos), alors qu'ils bénéficiaient de la protection syndicale, le comité prend acte que l'inspection du travail a ordonné la réintégration de ces travailleurs à leurs employeurs respectifs, qui l'ont refusée, et que, en conséquence de cela, ont été engagées des procédures judiciaires visant à réintégrer les licenciés, ces procédures sont actuellement en cours. A ce sujet, étant donné que la législation chilienne exige d'obtenir préalablement au licenciement de dirigeants syndicaux une autorisation judiciaire, et qu'elle n'a pas été demandée dans le cas présent, le comité regrette le licenciement des quatre syndicalistes mentionnés par le plaignant et rappelle que personne ne devrait être soumis à une discrimination dans l'emploi du fait de son affiliation ou de ses fonctions ou activités syndicales légitimes. Le comité souhaite rappeler que les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l'absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 749.] A cet égard, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement toutes les mesures possibles pour la réintégration des dirigeants syndicaux en cause. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures en cours.
67. S'agissant de l'évacuation du Sénat, de la détention des dirigeants syndicaux, Luis Pereira, Nicolás Soto et Luis Mesina, et de l'action pénale engagée à leur endroit pour «manque de respect à l'autorité», le comité prend note qu'ils sont tous trois actuellement en liberté dans l'attente du résultat de la procédure judiciaire. Le comité prend acte que, selon le gouvernement et le rapport envoyé par le président du Sénat, l'évacuation, la détention et la procédure pénale engagée contre ces personnes sont dues à des insultes grossières et répétées proférées à l'encontre de certains sénateurs lors de l'examen d'un projet de loi ainsi qu'à des désordres provoqués pour interrompre les orateurs, et ce en dépit d'un avertissement du président du Sénat. A cet égard, le comité rappelle qu'en exerçant leur liberté d'expression et en exprimant leurs opinions «les organisations syndicales ne devraient pas dépasser les limites convenables de la polémique et devraient s'abstenir d'excès de langage». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 152.] Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de la procédure en cours à l'encontre de ces dirigeants.
Recommandations du comité
68. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandation suivantes:
Cas no 1787
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
-- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
-- la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) et
-- la Fédération syndicale mondiale (FSM)
Allégations: assassinats et autres actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes et licenciements antisyndicaux
69. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de mars 1997. [Voir 306e rapport, paragr. 248 à 294.] La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a envoyé des informations complémentaires dans ses communications des 3 février, 2 avril, 5 mai, 24 juin, 16 et 23 juillet, 6 octobre et 6 novembre 1997 et 16 janvier 1998. La Fédération syndicale mondiale (FSM) a présenté des allégations ayant trait à ce cas dans sa communication du 23 janvier 1997. La Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) a envoyé des informations complémentaires dans sa communication du 6 août 1997.
70. Le gouvernement a envoyé des observations partielles par ses communications des 29 mai, 24 juillet et 16 décembre 1997 et du 13 février 1998.
71. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
72. Lors de l'examen antérieur du cas, au sujet des allégations relatives à des assassinats, disparitions et autres actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, ainsi qu'à des licenciements antisyndicaux, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 306e rapport, paragr. 294, alinéas g), h), i), j)]:
Assassinats
Tentatives d'homicide
Les syndicalistes Edgar Riaño, Darío Lotero, Luis Hernández et Monerge Sánchez.
Menaces de mort
Détention et perquisition de domicile
Luis David Rodríguez Pérez (ancien dirigeant du Syndicat national des travailleurs d'Incora -- SINTRADIN).
Perquisition au siège syndical, mise sur table d'écoutes,
surveillance de syndicalistes
Perquisition au siège de la Fédération syndicale unitaire de l'industrie agricole (FENSUAGRO), mise sur table d'écoutes du siège syndical et de ses adhérents et surveillance par des personnes armées du président de la Fédération, M. Luis Carlos Acero.
Disparitions
Agressions physiques et répression policière
B. Nouvelles allégations et informations complémentaires
73. Dans sa communication du 23 janvier 1997, la Fédération syndicale mondiale (FSM) allègue que M. Edgar Riaño, dirigeant de l'Union syndicale ouvrière (USO) -- section Huila --, a été arrêté de manière brutale à l'aube du 7 décembre 1996 sur ordre du Procureur général de la nation; deux heures plus tard, M. Gilberto Correño a été victime d'un attentat et a été sérieusement blessé. Deux jours plus tôt, M. Isidro Segundo Gil, secrétaire général du sous-comité exécutif de SINALTRAINAL et membre négociateur du cahier de revendications présenté à l'entreprise Coca-Cola, avait été assassiné sur son propre lieu de travail.
74. De plus, la FSM allègue que, durant ces premiers jours du mois de décembre 1996, des arrestations et des rafles policières ont été effectuées, cette fois-ci sur ordre exprès du Procureur général de la nation. Les syndicalistes affiliés à ECOPETROL, MM. Marcelino Buitrago, Felipe Mendoza, Monerge Sánchez, Guillermo Cárdenas, Rafael Estupiñán, Jorge Estupiñán, Hernán Vallejo, Luis Rodrigo Carreño, Leonardo Mosquera, Fabio Liévano, Elder Fernández, Gustavo Minorta et César Carrillo, ont été arrêtés de manière brutale.
75. Dans ses communications des 3 février, 2 avril, 5 mai, 4 et 24 juin, 16 et 23 juillet, 6 octobre, 6 novembre 1997 et 16 janvier 1998, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) présente les allégations suivantes:
Assassinats et disparitions de dirigeants
syndicaux et de syndicalistes
Menaces de mort contre des dirigeants syndicaux
et des syndicalistes et attentats contre des sièges
et des locaux syndicaux
Agressions physiques contre des dirigeants
syndicaux et des syndicalistes
76. Par une communication du 6 août 1997, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT), allègue que M. David Quintero Uribe, président du Syndicat des travailleurs de la coopérative multi-active du coton du département du César Ltda, a été assassiné le lundi 4 août à 18 h 30 à Aguachica (département du César).
C. Autres allégations
77. Dans une communication du 16 janvier 1998, la CISL allègue que, le 27 août 1997, le Syndicat national des employés de banques (UNEB) a soumis une liste de demandes à l'Association des banques regroupant 30 établissements du secteur bancaire, demande qui aurait bénéficié éventuellement à 40 000 travailleurs. Depuis cette date, l'Association a refusé d'agir en tant qu'intermédiaire avec ces trentes établissements financiers. Néanmoins, suite à des discussions, certaines ententes furent conclues entre l'Association des banques et l'UNEB. L'UNEB a continué de négocier avec chacun des établissements qui étaient représentés. L'UNEB, dans l'exercice légal de ses activités syndicales, a organisé différentes activités telles que des marches, des manifestations, des réunions d'information et, à travers ses publications, a fourni des informations sur les conflits et l'état des négociations.
78. La CISL précise que la réaction des employeurs de ces établissements bancaires, avec le soutien des forces de l'ordre, fut telle qu'elle a empêché le libre exercice du droit syndical et du droit à l'information. Des mesures répressives furent utilisées, telles que des agressions physiques, le blocage de dirigeants syndicaux dans des ascenseurs d'édifices, l'interdiction faite aux dirigeants syndicaux d'accéder aux endroits où ils pouvaient rencontrer les travailleurs afin de diffuser certaines informations, etc. Ces pratiques sont allées jusqu'à la détention arbitraire du dirigeant de l'UNEB, M. Carlos Romero, qui fut par la suite libéré. De plus, plusieurs dirigeants de l'UNEB ont reçu des menaces de mort par écrit ou par téléphone.
79. Selon la CISL, l'attitude répressive des employeurs fut particulièrement évidente à la Citibank et dans les banques Andino. Les dirigeants syndicaux, responsables d'informer les employés des développements du conflit et des négociations, furent empêchés d'entrer dans ces banques, souvent avec le soutien des forces de l'ordre. Cette obstruction était accompagnée de menaces de licenciements envers les travailleurs qui voulaient écouter l'information fournie par les dirigeants syndicaux ou qui voulaient exercer leurs droits syndicaux.
80. De plus, la Citibank a continuellement incité et même organisé les clients afin qu'ils agressent les dirigeants syndicaux qui se présentaient dans ses établissements pour informer les travailleurs. Ces mesures répressives ont eu le soutien total des forces de l'ordre qui, à plusieurs reprises, ont bousculé plusieurs dirigeants syndicaux en les expulsant de force. Les bureaux de la Citibank à Santa Fe de Bogota où la répression des activités syndicales s'est aggravée sont les succursales de Puente Aranda, Barrio Chico, Barrio Cedritos et Jimenez Avenue. Le 2 décembre 1997, le gérant de cette succursale a photographié des dirigeants syndicaux et travailleurs. L'utilisation de ces photographies demeure inconnue. La pratique de photographier et de faire des enregistrements sur vidéo est devenue courante et a déjà été utilisée par les banques de Sudameris et Anglo Colombiano.
D. Réponse du gouvernement
81. Dans ses communications du 29 mai et du 24 juillet 1997, le gouvernement fait savoir qu'il a été demandé au Procureur général de la nation d'ouvrir des enquêtes au sujet des allégations contenues dans la communication de la CISL du 5 mai 1997 pour identifier les auteurs des délits en question ou, au cas où ces enquêtes seraient déjà ouvertes, d'identifier les responsables et d'engager contre eux des poursuites pénales afin qu'ils répondent de leurs méfaits dans les délais prévus par la loi. Le gouvernement fournit notamment les informations suivantes:
E. Conclusions du comité
82. En premier lieu, avant d'analyser les allégations et les observations communiquées par le gouvernement, le comité souhaite de nouveau faire part de sa profonde préoccupation concernant les allégations qui se réfèrent en grande partie à des assassinats, disparitions, agressions physiques, arrestations et menaces de mort contre des dirigeants syndicaux, des syndicalistes et leurs proches, ainsi qu'à des perquisitions au siège de syndicats et au domicile de syndicalistes. A cet égard, le comité constate avec une profonde consternation que les organisations plaignantes ont présenté des allégations sur des actes de violence commis contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes quasiment tout au long de l'année 1997. Le comité déplore que, malgré la gravité de la situation, le gouvernement ne réponde qu'à un nombre très limité d'allégations. Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour remédier à cette situation.
83. De même, le comité relève, d'une part, que des actes de violence sont perpétrés contre des syndicalistes dans tout le pays et dans tous les secteurs d'activité et, d'autre part, que les victimes sont très souvent les dirigeants syndicaux et les syndicalistes du secteur agricole -- membres de FENSUAGRO ou de SINTRAINAGRO -- et de l'industrie pétrolière -- membres d'ECOPETROL ou de FEDEPETROL. Le comité regrette profondément de constater que, parmi les nouvelles allégations présentées, figure l'assassinat, en mars 1997, du secrétaire général de la Fédération nationale des syndicats de l'industrie agricole (FENSUAGRO), M. Victor Garzón, que la mission de contacts directs qui s'est rendue sur place en novembre 1996 avait rencontré et avec qui elle avait collaboré. Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures particulières pour mettre un terme à tous les actes de violence contre les syndicalistes, et particulièrement dans les secteurs où les organisations syndicales en question exercent leurs activités.
84. Le comité déplore que tout paraît indiquer que la violence antisyndicale n'a pas diminué et que l'impunité des auteurs des actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes continue. En effet, depuis le dernier examen de ce cas en novembre 1996, le gouvernement n'a fait savoir, dans aucun cas, que les auteurs de ces actes avaient été arrêtés, jugés et condamnés.
85. Compte tenu de la nature des allégations et de ce que dans le dernier rapport de mission de contacts directs il est indiqué que le Défenseur du peuple dans son rapport devant le Congrès de 1996 a déclaré «qu'il y a encore dans la force publique des éléments qui adoptent des comportements illégaux et arbitraires dans le cadre des activités militaires et de la police» et «qu'il y a encore des milliers de Colombiens qui sont terrorisés par l'action de groupes paramilitaires» [voir 306e rapport, p. 91 de la version française], le comité observe que la situation ne s'est pas améliorée depuis lors, et il signale que le gouvernement a pour responsabilité d'assurer que les forces de sécurité aient un comportement correct et qu'elles respectent les droits de l'homme, dans tous les cas et à tout moment. Le comité demande au gouvernement de garantir le respect de ces principes.
86. Ainsi, le comité souligne que «l'assassinat, la disparition ou les lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l'ouverture d'enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquels se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d'empêcher que de tels faits se reproduisent»; et que «l'absence de jugement contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, ce qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 51 et 55.]
87. Au sujet des informations complémentaires présentées sur les assassinats et la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, le comité note que le gouvernement déclare que des enquêtes judiciaires concernant les cas suivants ont été ouvertes: 1) Néstor Eduardo Galíndez Rodríguez (assassiné le 4 mars 1997); 2) Erieleth Barón Daza (assassinée le 3 mai 1997); 3) Jhon Fredy Arboleda Aguirre, William Alonso Suárez Gil et Eladio de Jesús Chaverra Rodríguez (assassinés entre le 11 février et le 7 mars 1997); 4) Luis Carlos Muñoz (assassiné le 7 mars 1997); 5) Nazareno de Jesús Rivera García (assassiné le 12 mars 1997); 6) Héctor Gómez (assassiné le 22 mars 1997); 7) Gilberto Casas Arboleda, Norberto Casas Arboleda, Alcides de Jesús Palacios Arboleda et Argiro de Jesús Betancur Espinosa (assassinés le 11 février 1997); 8) Bernardo Orrego Orrego (assassiné le 6 mars 1997); 9) José Bidoro Layton (assassiné le 25 mars 1997); 10) Magaly Peñaranda (assassinée le 27 juillet 1997); 11) David Quintero Uribe (assassiné le 4 août 1997); et 12) Eduardo Enrique Ramos Montiel (assassiné le 14 juillet 1997); 13) Libardo Cuéllar Navia (assassiné le 23 juillet 1997); 14) Wenceslao Varela Torrecilla (assassiné le 29 juillet 1997); 15) Abraham Figueria Bolaños (assassiné le 25 juillet 1997); 16) Edgar Camacho Bolaños (assassiné le 25 juillet 1997); et 17) Ramón Osorio (disparu le 15 avril 1997). Le comité prie le gouvernement de lui transmettre des informations sur les enquêtes judiciaires en cours.
88. De même, le comité regrette que le gouvernement ne lui ait pas fait part de l'état d'avancement des enquêtes judiciaires sur lesquelles il avait demandé à être tenu informé lors de sa session de novembre 1996. Il s'agit des enquêtes relatives aux assassinats et aux menaces de mort contre les dirigeants syndicaux et les syndicalistes suivants: 1) Antonio Moreno (12 août 1995); 2) Manual Ballesta (13 août 1995); 3) Francisco Mosquera Córdoba (février 1996); 4) Carlos Arroyo de Arco (février 1996); 5) Francisco Antonio Usuga (22 mars 1996); 6) Pedro Luis Bermúdez Jaramillo (6 juin 1995); 7) Armando Umanes Petro (23 mai 1996); 8) William Gustavo Jaimes Torres (28 août 1995); 9) Ernesto Fernández Pezter; 10) Jaime Eliacer Ojeda; 11) Alfonso Noguera; 12) Alvaro Hoyos Pabón (12 décembre 1995); 13) Libardo Antonio Acevedo (7 juillet 1996), et 14) Jairo Alfonso Gamboa López (menaces de mort). A cet égard, le comité prie de nouveau le gouvernement de le tenir informé du résultat de ces enquêtes.
89. De plus, le comité fait remarquer que le gouvernement n'a pas envoyé ses observations sur les nombreuses allégations demeurées en instance ou présentées en 1997 et 1998 qui se rapportent à des assassinats, disparitions, agressions physiques, arrestations et menaces de mort contre des dirigeants syndicaux, des syndicalistes et leurs proches. [Voir en annexe la liste complète des allégations au sujet desquelles le gouvernement n'a pas communiqué ses observations.] Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de communiquer sans tarder ses observations sur la totalité des allégations qui figurent dans l'annexe de ce cas. Le comité demande aussi au gouvernement de communiquer sans retard ses observations sur les allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale dans le secteur bancaire (voir la communication de la CISL du 16 janvier 1998).
90. Enfin, le comité prie de nouveau le gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures judiciaires en cours concernant les licenciements de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans les entreprises ALFAGARES SA et TEXTILIA LTD ainsi qu'au ministère des Finances.
Recommandations du comité
91. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Annexe
Allégations sur lesquelles le gouvernement n'a pas encore
communiqué ses observations
Assassinats et disparitions
Tentatives d'homicide
Menaces de mort
Détention et perquisition de domicile
Perquisition au siège syndical, mise sur table d'écoutes,
surveillance de syndicalistes
Perquisition au siège de la Fédération syndicale unitaire de l'industrie agricole (FENSUAGRO), mise sur table d'écoutes du siège syndical et de ses adhérents et surveillance par des personnes armées du président de la Fédération, M. Luis Carlos Acero.
Agressions physiques et répression policière
Cas no 1916
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
le Syndicat des travailleurs de l'entreprise
Empresas Varias Municipales de Medellín (EEVVMM)
Allégations: licenciements antisyndicaux consécutifs
à la déclaration d'illégalité d'une grève
92. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication du Syndicat des travailleurs de l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín (EEVVMM) du 18 novembre 1996. Le gouvernement a fait parvenir certaines observations dans sa communication du 23 juin 1997.
93. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
94. Dans sa communication du 18 novembre 1996, le Syndicat de travailleurs de l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín (EEVVMM) affirme que 209 travailleurs (dont tous les membres du comité directeur du syndicat, les membres de la commission des réclamations, de la commission de négociation, ainsi que ceux des trois comités directeurs précédents et de nombreux membres du syndicat) ont été licenciés par suite de la déclaration d'illégalité d'une grève qui s'est déroulée en février 1993 dans le cadre d'un conflit relatif à la négociation d'une convention collective dans l'entreprise de ramassage des ordures ménagères dite Empresas Varias Municipales de Medellín. Le 18 février 1993, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a déclaré cette grève illégale en se fondant sur les dispositions des articles 430, premier paragraphe, alinéas e) et f), et 450, alinéa a), du Code du travail, qui interdisent la grève dans les services publics. (L'organisation plaignante joint à sa plainte une copie de la décision administrative qui cite les passages pertinents de ces articles, notamment le premier paragraphe de l'article 430: «Conformément à la Constitution nationale, la grève dans les services publics est interdite. A cet effet, est considérée comme service public toute activité organisée visant à satisfaire des besoins d'intérêt général de façon régulière et continue, conformément à un régime juridique spécial, que ce service soit dispensé par l'Etat, directement ou indirectement, ou par des personnes privées; sont donc des services publics, notamment les activités suivantes: ... e) les ... places de marché ...; f) les activités de tous les services d'hygiène collective.»)
95. L'organisation plaignante affirme que tant le syndicat que les travailleurs lésés ont fait appel devant les autorités administratives et judiciaires, que ces démarches ont abouti en mars 1996 et que toutes les décisions et sentences concluent à la conformité des licenciements avec les normes du droit interne.
B. Réponse du gouvernement
96. Dans sa communication du 23 juin 1997, le gouvernement se réfère à des violations de certaines dispositions de la convention collective par l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín et à l'enquête administrative demandée à ce sujet par l'organisation plaignante en janvier 1993. Dans sa réponse, le gouvernement décrit dans le détail les suites données à cette affaire par les diverses instances administratives et judiciaires.
97. Ces observations présentées par le gouvernement étant sans rapport avec les allégations -- elles portent même sur des faits antérieurs aux faits allégués dans le présent cas --, le Bureau, dans une communication du 10 juillet 1997, a demandé au gouvernement de lui fournir des informations précises, mais depuis rien n'a été reçu.
C. Conclusions du comité
98. Le comité observe que, dans le présent cas, l'organisation plaignante affirme que 209 travailleurs de l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín (entreprise de ramassage des ordures ménagères) ont été licenciés -- dont tous les membres du comité directeur du syndicat, les membres de la commission des réclamations, de la commission de négociation et des trois comités directeurs précédents ainsi que de nombreux membres du syndicat -- par suite de la déclaration d'illégalité d'une grève qui s'est déroulée en février 1993 dans le cadre d'un conflit relatif à la négociation d'une convention collective. Le comité observe aussi que, le 18 février 1993, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a déclaré cette grève illégale en se fondant sur les dispositions des articles 430, premier paragraphe, alinéas e) et f), et 450, alinéa a), du Code du travail, qui interdisent la grève dans les services publics, considérés comme essentiels par le gouvernement (bien que le comité estime qu'ils ne le sont pas au sens strict du terme).
99. En premier lieu, le comité déplore que, dans sa réponse, le gouvernement ne se réfère pas spécifiquement aux licenciements intervenus par suite de la déclaration d'illégalité de la grève mais à d'autres problèmes (violations de dispositions de la convention collective par l'employeur, dont certaines sont antérieures aux faits allégués dans le présent cas) qui ne font pas l'objet des allégations. Le comité observe que, le 10 juillet 1997, le Bureau a demandé au gouvernement de lui fournir des informations précises sur les questions soulevées par l'organisation plaignante, et que, malgré cela, rien n'a encore été reçu.
100. En ce qui concerne la déclaration d'illégalité de la grève fondée sur le caractère essentiel du service de ramassage des ordures ménagères dispensé par l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín, le comité désire souligner que ce service n'est pas, au sens strict du terme, un service essentiel (à savoir un service dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne) qui puisse justifier une interdiction absolue de la grève; toutefois, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a indiqué que, compte tenu de ses caractéristiques, ce service peut devenir essentiel si la grève qui l'affecte dépasse une certaine durée ou prend une ampleur telle que la santé, la sécurité ou la vie de la population sont menacées. [Voir étude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 160.] En ce sens, le comité considère que, dans les cas où un service minimum obligatoire est admissible, comme dans le domaine du ramassage des ordures, des mesures devraient être prises pour garantir qu'un tel service minimum évite la mise en danger de la santé ou de la sécurité publique. Dans le présent cas, compte tenu de ces éléments, le comité déplore que la grève dans le secteur de l'enlèvement des ordures ménagères ait été déclarée illégale.
101. En outre, le comité rappelle que, depuis de nombreuses années, lorsqu'elle analyse la conformité de la législation de la Colombie avec la convention no 87, la commission d'experts critique les dispositions du Code du travail sur lesquelles s'est fondé le gouvernement pour déclarer la grève illégale; ces dispositions interdisent la grève dans un très large éventail de services publics qui ne sont pas nécessairement essentiels au sens strict du terme. [Voir observation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III, partie 1A, 1998.]
102. Par ailleurs, la grève ayant été déclarée illégale par l'autorité administrative, le comité souhaite signaler à l'attention du gouvernement que «la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance» [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 522], particulièrement dans le secteur public.
103. Dans ces conditions, le comité déplore les licenciements en masse qui ont été effectués et prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures pour réintégrer à leurs postes les dirigeants syndicaux, syndicalistes et travailleurs qui ont été renvoyés pour avoir participé à une grève en 1993 dans l'entreprise Empresas Varias Municipales de Medellín et, si cela était impossible, pour qu'une entière compensation leur soit allouée. Par ailleurs, il demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour qu'à l'avenir ce soit un organe indépendant et non l'autorité administrative qui se prononce sur la légalité des grèves. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises en ce sens.
104. Enfin, le comité, tout comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les dispositions du Code du travail (en particulier les articles 430 et 450) interdisant la grève dans un vaste éventail de services qui ne peuvent être considérés comme essentiels au sens strict du terme.
Recommandations du comité
105. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1925
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
le Syndicat national des travailleurs d'Avianca (SINTRAVA)
Allégations: actes de discrimination antisyndicale
106. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication du Syndicat national des travailleurs d'Avianca (SINTRAVA) datée du 31 mars 1997. Le gouvernement a fait part de ses observations dans des communications datées des 23 juin, 23 septembre et 23 décembre 1997.
107. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
108. Dans sa communication du 31 mars 1997, le Syndicat national des travailleurs d'Avianca (SINTRAVA) allègue que la direction de l'entreprise Avianca-Sam-Helicol mène campagne contre l'organisation syndicale. Concrètement, l'organisation plaignante dénonce: 1) le retrait de l'accréditation syndicale permanente, garantie par la convention et accordée à la sous-direction de l'organisation syndicale à Cundinamarca; 2) le licenciement des dirigeants syndicaux de cette même sous-direction, MM. Euclides Arandia, José Angel Cupita, Rubén Darío Leal, José Córdoba et Mme Rosalía Delgado; 3) le refus de reconnaître les membres du Bureau national comme représentants de SINTRAVA le 7 novembre 1995; 4) le licenciement des dirigeants syndicaux de la section de Barranquilla, MM. Luis Cruz et Gabriel San Juan; 5) le licenciement de 16 syndicalistes appartenant à l'équipe des «opérations» de l'aéroport Eldorado à Bogotá, qui ne sont pas parvenus à un arrangement économique avec l'entreprise; 6) la campagne menée par l'entreprise Avianca-Sam-Helicol, en dépit de la convention collective qu'elle a signée, pour tenter de faire accepter au personnel couvert par la convention collective les conditions de travail établies dans un statut dit du travailleur non syndiqué; 7) le fait que l'entreprise n'a pas prélevé les cotisations prévues par la convention à l'intention de SINTRAVA ni les cotisations syndicales ordinaires de 280 membres depuis le 15 décembre 1996 et qu'elle a dans certains cas retenu de manière illégale les cotisations perçues; et 8) l'application sélective, à l'égard des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, de l'article 140 du Code du travail, qui prévoit le versement du salaire en l'absence de service fourni en contrepartie.
B. Réponse du gouvernement
109. Dans sa communication du 23 juin 1997, le gouvernement déclare que le 10 février 1997 une enquête administrative a été ouverte concernant les différentes questions contenues dans cette affaire et que, le 12 février, ordre a été donné de présenter des preuves à l'appui de ces allégations. Il ajoute que dans le cadre de cette procédure il a également été demandé de faire le point sur les enquêtes menées pour des motifs analogues dans diverses circonscriptions régionales du travail. Finalement, les autorités administratives ont convoqué les parties à une réunion de conciliation le 6 juin 1997.
110. Dans sa communication du 23 septembre 1997, le gouvernement fait savoir que la réunion de conciliation s'est tenue le 17 juillet 1997 et que, faute d'un accord entre les parties, l'entreprise a demandé que les éléments de preuve soient présentés et l'organisation syndicale a réitéré les termes de sa demande. A cet égard, le gouvernement indique que les éléments de preuve ont déjà été reçus et qu'à la suite de leur examen une décision appropriée sera prise en la matière.
111. Enfin, dans sa communication du 23 décembre, le gouvernement fait savoir que les autorités administratives mènent des enquêtes en relation avec des plaintes pour non-respect de la convention collective et application de l'article 140 du Code du travail à certains travailleurs de l'entreprise. En outre, le gouvernement fait savoir que l'entreprise a été condamnée à une amende équivalant à 80 salaires minima légaux après qu'une enquête eut été effectuée à propos d'un statut que l'entreprise appliquait aux travailleurs, appelé statut «du travailleur non syndiqué».
C. Conclusions du comité
112. Le comité note que dans le présent cas les allégations portent sur divers actes de discrimination antisyndicale qui auraient été commis dans l'entreprise Avianca-Sam-Helicol. Concrètement, l'organisation plaignante dénonce: le retrait d'une accréditation syndicale prévue dans une convention collective; le licenciement de dirigeants syndicaux et de syndicalistes; le refus de reconnaissance comme représentants du SINTRAVA des membres du bureau national; la campagne menée pour que les travailleurs couverts par la convention collective acceptent des conditions de travail énoncées dans un statut dit du travailleur non syndiqué; le non-prélèvement des cotisations syndicales et la rétention illégale des cotisations perçues; l'application sélective, à l'égard des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, de l'article 140 du Code du travail (rémunération accordée en l'absence de travail fourni en contrepartie).
113. Le comité prend note que le gouvernement déclare dans sa réponse que: i) des enquêtes administratives concernant l'affaire en question ont été ouvertes; ii) les autorités administratives ont convoqué les parties à une réunion de conciliation, mais elles ne sont pas parvenues à un accord; iii) faute d'un accord, les éléments de preuve ont été reçus et une décision appropriée sera prise en la matière; iv) l'entreprise a été condamnée à une amende équivalant à 80 salaires minima légaux après qu'une enquête ait été menée à propos de l'application aux travailleurs d'un statut appelé statut «du travailleur non syndiqué»; et v) des enquêtes sont en cours concernant des plaintes pour non-respect de la convention collective par l'entreprise et pour l'application à certains travailleurs de l'article 140 du Code du travail (rémunération versée sans prestation de travail).
114. Le comité demande au gouvernement de communiquer la décision relative à la peine d'amende imposée à l'entreprise Avianca-Sam-Helicol et de confirmer qu'il a été mis fin à ce type de pratiques antisyndicales dans cette entreprise. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé de l'issue des investigations relatives à la violation de l'article 140 du Code du travail et espère que ces investigations seront menées à bien rapidement..
115. Le comité constate avec regret que dans sa réponse le gouvernement n'a pas abordé de manière concrète les autres allégations examinées ci-après et relatives aux licenciements antisyndicaux, à la non-reconnaissance de dirigeants syndicaux, au précompte ou non des cotisations syndicales et au refus du congé syndical.
116. Quant au licenciement des dirigeants syndicaux de la sous-direction de l'organisation syndicale à Cundinamarca, MM. Euclides Arandia, José Angel Cupita, Rubén Darío Leal, José Córdoba et Mme Rosalía Delgado, et des dirigeants syndicaux de la section de Barranquilla, MM. Luis Cruz et Gabriel San Juan, ainsi que des seize syndicalistes appartenant à l'équipe des «opérations» de l'aéroport Eldorado à Bogotá, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel «nul ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d'emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 696.] A cet égard, le comité demande au gouvernement de prendre sans plus tarder toutes les mesures nécessaires pour mener une enquête à ce sujet et, s'il était constaté que les dirigeants syndicaux et les syndicalistes lésés ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales, de leur condition de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes, ou pour des motifs antisyndicaux, de veiller à ce qu'ils soient réintégrés dans leurs postes de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
117. Quant au fait que l'entreprise n'a pas prélevé les cotisations prévues par la convention à l'intention de l'organisation plaignante ni les cotisations syndicales ordinaires de 280 membres depuis le 15 décembre 1996 et qu'elle a dans certains cas retenu de manière illégale les cotisations perçues, le comité, notant l'absence d'observations du gouvernement à propos de cette allégation, souligne que lors de l'examen d'allégations analogues il a fait remarquer que «le non-paiement des cotisations syndicales peut causer de graves difficultés aux organisations syndicales». [Voir 307e rapport du comité, cas no 1887 (Argentine), paragr. 85.] Il demande au gouvernement d'assurer que l'entreprise garantisse la rétention des cotisations syndicales conformément à l'article 400 du Code du travail et de le tenir informé à cet égard.
118. Enfin, en ce qui concerne les allégations relatives au retrait d'une accréditation syndicale permanente, garantie par la convention collective et accordée à la sous-direction de l'organisation syndicale à Cundinamarca, et au refus de reconnaître les membres du Bureau national comme représentants du Syndicat national des travailleurs d'Avianca (SINTRAVA) le 7 novembre 1995, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour qu'une enquête soit menée à ce sujet et, si ces allégations s'avéraient exactes, de faire le nécessaire pour que les dispositions énoncées dans la convention collective soient respectées. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
Recommandations du comité
119. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1865
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de la République de Corée
présentée par
-- la Confédération coréenne des syndicats (KCTU)
-- la Fédération coréenne des travailleurs
de l'industrie automobile (KAWF) et
-- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: arrestation et détention de dirigeants syndicaux,
refus du gouvernement d'enregistrer des organisations nouvellement créées, modifications à la législation du
travail contraires à la liberté syndicale
120. Le comité a déjà examiné ce cas à ses réunions de mai 1996 et de mars et juin 1997, et il a soumis à chaque occasion un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 304e rapport, paragr. 221 à 254, 306e rapport, paragr. 295 à 346, et 307e rapport, paragr. 177 à 236, approuvés par le Conseil d'administration, respectivement, à ses 266e, 268e et 269e sessions (juin 1996, mars et juin 1997).]
121. Depuis le dernier examen de ce cas, le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date des 15 octobre 1997 et 17 mars 1998.
122. En décembre 1997, le gouvernement a donné son accord pour recevoir une mission tripartite de haut niveau de l'OIT pour examiner les questions soulevées dans le cas no 1865. La mission s'est rendue en République de Corée du 9 au 13 février 1998. Le rapport de la mission est annexé au présent cas.
123. La République de Corée n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
124. Lors de son dernier examen de ce cas, le comité a pris acte que la loi d'amendement sur les syndicats et les relations de travail (ci-après loi d'amendement), promulguée le 13 mars 1997, contenait certaines modifications qui constituaient un progrès dans la mise en œuvre de ses recommandation. Toutefois, le comité a également noté que cette nouvelle loi n'a pas amendé certaines autres dispositions qu'il avait précédemment considérées comme contraires aux principes de la liberté syndicale, dont celles relatives à l'interdiction faite aux fonctionnaires et aux enseignants de fonder ou de s'affilier à une organisation de leur choix, l'illégalité du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise, l'interdiction du recours à la grève dans les services non essentiels et le déni du droit syndical aux travailleurs licenciés. La nouvelle loi offrant la possibilité d'instaurer le pluralisme syndical au niveau national et dans l'industrie, le comité a demandé au gouvernement d'enregistrer la Confédération coréenne des syndicats (KCTU), la Fédération des travailleurs de l'industrie automobile (KAWF) de la République de Corée, le Conseil national des travailleurs du métro (NCSWU) et la Fédération des syndicats du groupe Hyundai.
125. Le cas portait également sur des allégations de fait dont la détention de dirigeants et de membres de syndicats en raison de leurs activités syndicales, l'intervention de la police lors de manifestations syndicales et le harcèlement auquel a été soumise une délégation internationale envoyée en République de Corée.
126. A sa session de juin 1997, eu égard aux conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration a approuvé les recommandations suivantes:
B. Réponse du gouvernement
Droit syndical des fonctionnaires et enseignants
(307e rapport, paragraphe 236 a) i) et ii))
127. Dans sa communication en date du 15 octobre 1997, le gouvernement évoque en premier lieu les aspects législatifs du présent cas. S'agissant du droit syndical des fonctionnaires et enseignants, le gouvernement réitère son avis précédent selon lequel il convient de tenir pleinement compte de la situation unique de la République de Corée. Le parti au pouvoir et les deux partis d'opposition sont convenus d'étudier et de réexaminer encore ce point lorsqu'ils élaboraient les nouvelles lois du travail à l'Assemblée nationale en mars 1997. Le gouvernement fait donc savoir qu'il étudie de façon approfondie cette question et recueille une vaste gamme d'opinions auprès de toutes les parties concernées.
Possibilité de pluralisme syndical aux termes de la nouvelle loi
d'amendement sur les syndicats et les relations du travail
(TULRAA) (307e rapport, paragraphe 236 a) iv))
128. Au sujet de la recommandation antérieure du comité d'enregistrer la Confédération coréenne des syndicats (KCTU), la Fédération des travailleurs de l'automobile (KAWF) de la République de Corée, le Conseil national des travailleurs du métro (NCSWU) et la Fédération des syndicats du groupe Hyundai, le gouvernement déclare qu'au 30 septembre 1997 douze fédérations dont la KAWF, le NCSWU et la Fédération des syndicats du groupe Hyundai ont reçu des certificats d'enregistrement en qualité de syndicats. Ces douze fédérations sont groupées comme suit:
Pluralisme syndical au niveau de l'entreprise
(307e rapport, paragraphe 236 a) v))
129. Au sujet de la légalisation sans délai du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise, le gouvernement répond qu'en vertu des nouvelles lois la création de syndicats au niveau de l'entreprise sera permise après une période préparatoire de cinq ans (donc en l'an 2002). Le système syndical unique au niveau de l'entreprise existe depuis plusieurs décennies en République de Corée. La période préparatoire quinquennale est instaurée dans le souci d'éviter que le pluralisme syndical dans telle ou telle entreprise -- changement majeur par rapport à la méthode de négociation actuelle -- n'entraîne une instabilité dans les relations professionnelles, ne sème la confusion dans les négociations collectives ou ne provoque une montée des différends entre syndicats. Toutefois, le gouvernement fait valoir que les nouvelles lois reflètent son intention de permettre l'existence du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise dès que des mesures concrètes auront été prises pour limiter des effets secondaires de l'existence de syndicats multiples. Selon le gouvernement, il faudra instituer des méthodes et procédures appropriées de négociation collective dans le cadre d'un système syndical pluraliste après avoir consulté les organisations d'employeurs et de travailleurs et avoir étudié et examiné correctement cette question.
Interdiction d'intervention d'une tierce partie
(307e rapport, paragraphe 236 a) vi))
130. Le gouvernement fait savoir que travailleurs et employeurs peuvent recevoir l'assistance de qui que ce soit après notification préalable du ministère du Travail. Cette notification a pour seul but d'aider le gouvernement à recenser les personnes ou organisations qui assistent les syndicats ou employeurs. Dans certains cas, le nombre de conseillers déclarés est tellement grand qu'il défie le bon sens. Par exemple, il est arrivé à la Dongheung Electricity Co., installée à Inchon, de faire état de 84 560 conseillers alors que le syndicat ne comptait que 330 adhérents.
Nombre de conseillers en relations professionnelles déclarés (au mois d'août 1997)
Total |
Syndicats |
Employeurs |
|||||
|
|
||||||
Nombre de
syndicats et |
Nombre de conseillers déclarés |
Nombre de syndicats |
Nombre de conseillers |
Nombre de compagnies |
Nombre de conseillers |
||
174 |
675 230 |
171 |
675 215 |
3 |
15 |
||
Interdiction de recourir à la grève pendant une période arbitrale
(307e rapport, paragraphe 236 a) vii))
131. Le gouvernement fait savoir qu'il sera demandé un arbitrage à la commission des relations du travail dans les circonstances suivantes: suite à une demande émanant des deux parties concernées, suite à une demande d'une partie conforme aux dispositions d'une convention collective, ou lorsque le président de la commission des relations du travail décide de renvoyer un différend touchant un service essentiel à un arbitrage sur recommandation du comité extraordinaire de médiation composé par trois membres de la commission représentant les intérêts du public.
132. Le gouvernement ajoute qu'aucune grève ne sera déclenchée dans la quinzaine suivant la date de renvoi à arbitrage du conflit et que la sentence arbitrale prononcée par la commission des relations du travail aura la même valeur qu'une convention collective. La grève est considérée comme le dernier recours; partant, la présente mesure vise à renvoyer temporairement la grève en permettant une solution raisonnable et paisible des conflits du travail. Toutefois, même s'il est interdit de recourir à la grève durant l'arbitrage, il est loisible aux travailleurs et à la direction de régler un différend de leur propre gré et, si la sentence arbitrale n'est pas prononcée dans le laps de temps prévu, les travailleurs peuvent alors faire grève. Ceci signifie que l'arbitrage ne sape pas les fondements du droit à la grève. De plus, si une des parties concernées estime que la sentence arbitrale prononcée par la commission régionale des relations du travail est contraire à la loi ou ne ressortit pas à la commission, elle peut demander le renvoi du cas devant la commission centrale des relations du travail ou intenter une action devant un tribunal administratif.
Paiement des jours de grève
(307e rapport, paragraphe 236 a) ix))
133. Le gouvernement explique qu'il y a eu un nombre assez considérable de conflits du travail prolongés parce que les travailleurs exigeaient le paiement des jours de grève ou le proposaient comme préalable à la négociation et au règlement des conflits. Comme il semblait peu vraisemblable que ces pratiques cessent par suite d'une initiative due aux travailleurs et à leurs employeurs, les nouvelles lois précisent le principe juridique selon lequel l'employeur n'est pas tenu de verser de salaire pour la période pendant laquelle a lieu une grève, et que les syndicats ne peuvent entamer ou prolonger une grève au motif que les salaires n'ont pas été versés durant une grève. Le gouvernement ajoute que, selon le principe «pas de travail, pas de salaire», les travailleurs ne sont pas rémunérés lorsqu'ils ne travaillent pas. Ce principe s'inspire principalement des contrats de travail et est reconnu internationalement comme une norme juridique.
Affiliation syndicale des travailleurs licenciés
(307e rapport, paragraphe 236 a) x))
134. Le gouvernement remarque qu'en République de Corée presque tous les syndicats sont établis au niveau de l'entreprise; par conséquent, seuls les travailleurs employés par des sociétés ont qualité pour adhérer à leurs syndicats et, en principe, l'interprétation faite de la loi est qu'un travailleur licencié perd son affiliation au syndicat de la compagnie qui l'employait. Par ailleurs, la disposition qui stipule que les représentants syndicaux seront élus parmi les adhérents des syndicats a été respectée sans exception depuis la promulgation du Trade Union Act en 1953, et la pratique qui veut que les responsables syndicaux soient élus dans les rangs des adhérents est en vigueur tant au niveau du syndicat d'entreprise que dans les niveaux supérieurs de ces organisations.
135. Néanmoins, pour éviter que des employeurs n'entravent des activités syndicales par des actes antisyndicaux ou discriminatoires en licenciant abusivement des syndiqués, on a permis même à des travailleurs licenciés de conserver leur affiliation et de poursuivre leurs activités syndicales à condition de satisfaire à certaines conditions. La nouvelle loi prévoit qu'un travailleur licencié qui affirme que son licenciement est abusif et en saisit la commission des relations du travail (organe administratif doté d'un pouvoir judiciaire) peut conserver son affiliation jusqu'à ce que la Commission centrale des relations du travail (CLRC) ait statué. Si la CLRC prononce le caractère abusif du licenciement, le travailleur en question peut conserver son affiliation et s'acquitter de ses activités syndicales.
Enregistrement de la Confédération coréenne
des syndicats (KCTU) (307e rapport, paragraphe 236 a) xii))
136. Le gouvernement déclare qu'avec la TULRAA les dispositions interdisant le pluralisme syndical ont été supprimées et que les bases juridiques d'un enregistrement conforme de la KCTU sont donc posées. Cette dernière a soumis un rapport sur la création de syndicats au ministère du Travail (MOL) le 6 mai 1997, mais on y a jugé que le rapport contenait certaines imperfections juridiques. A titre d'exemple, la participation à la KCTU de responsables syndicaux déchus de leurs fonctions enfreint la section 23 1) de la TULRAA et l'affiliation à la KCTU d'organisations illégales tel le Syndicat coréen des professeurs et des travailleurs de l'enseignement (Chunkoyojo) et viole la section 10 2) de cette même loi. Le ministère du Travail a donné à la KCTU jusqu'au 28 mai pour se conformer à la loi, lui permettant ainsi de bénéficier du délai statutaire maximum de vingt jours. Mais, face à un refus de la KCTU, le ministère du Travail a dû renvoyer, le 30 mai 1997, le rapport de la KCTU sur la création de syndicats. A la suite de quoi, la KCTU a, le 4 juin 1997, interjeté appel de la décision du ministère du Travail auprès de l'instance administrative. La commission administrative d'appel, présidée par le Premier ministre, a été saisie du cas le 14 juin, mais elle a débouté la partie plaignante le 4 septembre. La KCTU a fait appel de la décision le 28 septembre 1997 auprès de la cour d'appel.
137. Cependant, même si la KCTU n'a pas reçu de certificat d'enregistrement, elle joue en fait son rôle d'organisme représentatif des adhérents en participant aux travaux de la commission présidentielle de réforme des relations du travail et à ceux de la commission des relations du travail: parmi les représentants des travailleurs nommés à la commission des relations du travail, on compte 71 adhérents à des syndicats affiliés à la KCTU.
Information relative à l'évolution de la situation
de M. Kim Im-shik (307e rapport, paragraphe 236 b) iii))
138. Le gouvernement communique que M. Kim Im-shik (président du Syndicat de l'industrie lourde du groupe Hyundai) a mené une grève illégale du 26 au 30 décembre 1996, gênant le fonctionnement de la Hyundai Heavy Industry Co. et provoquant des dommages pour un montant de 1,1 milliard de won. M. Kim a été arrêté le 18 janvier 1997 et accusé d'ingérence dans les affaires en vertu d'une disposition du Code pénal, il a été relâché le 22 janvier après examen de la légalité de sa détention.
Evolution de la situation des travailleurs détenus
(307e rapport, paragraphe 236 b) v))
139. Le gouvernement déclare que M. Song Ho-jun, qui aurait été jugé en première instance [voir l'annexe 4 de ce cas dans le 307e rapport], a été libéré après avoir été condamné avec sursis le 20 février 1997. MM. Cho, Myung-rae et Oh Jong-ryul qui purgeaient des peines de prison [voir l'annexe 3 de ce cas dans le 307e rapport] ont été libérés, respectivement, le 20 juin et le 4 septembre 1997 à l'expiration de leur peine. Le gouvernement affirme que la libération ou non des personnes actuellement soumises à une procédure relève du pouvoir judiciaire et qu'il n'est pas habilité à s'immiscer dans cette question. Enfin, dans une communication du 17 mars 1998, le gouvernement indique que M. Hwan, Y.-H., président du Syndicat de la Compagnie de textile de Corée, et M. Moon, S.D., président de la Confédération de classe, qui étaient mentionnés dans l'annexe III du cas dans le 307e rapport, ont été libérés le 13 mars 1998 en vertu d'une amnistie décrétée par le Président Kim Dae-Jung.
C. Conclusions du comité
140. Le comité prend note du rapport de la mission tripartite de haut niveau qui s'est rendue en République de Corée du 9 au 13 février 1998 et remercie les membres de la mission pour le travail effectué. Le comité remercie également le Président élu et les membres de son équipe de transition, les autorités, les partenaires sociaux et toutes les autres parties que la mission a rencontrées pour leur niveau élevé de coopération au cours de la visite dans le pays. Le comité prend note en outre de la réponse écrite fournie par le gouvernement dans une communication datée du 15 octobre 1997.
141. Lors de son examen antérieur du cas, le comité avait pris note de l'adoption par l'Assemblée nationale de la loi d'amendement sur les syndicats et les relations de travail (ci-après loi d'amendement) et de sa promulgation le 13 mars 1997. Tout en constatant que cette nouvelle loi contient certaines modifications qui constituent un progrès dans la mise en œuvre de ses recommandations, le comité a constaté que certaines dispositions qu'il avait considérées comme contraires aux principes de la liberté syndicale n'avaient pas été amendées.
142. A cet égard, le comité relève dans le rapport de mission, qu'une Commission tripartite composée de représentants du gouvernement, des employeurs et de deux centrales syndicales (la Fédération des syndicats coréens -- FKTU -- enregistrée et la Confédération coréenne des syndicats -- KCTU -- non encore enregistrée), ainsi que des membres du Parlement appartenant aux autres partis politiques a été établie le 15 janvier 1998 par le Président élu et son équipe de transition. Le Comité note avec intérêt que la Commission tripartite est convenue d'une série de réformes ayant trait aux problèmes économiques et sociaux, y compris ceux relatifs à la liberté syndicale. Le comité comprend, sur la base du rapport de mission, que les réformes proposées sur les problèmes de la liberté syndicale, si elles sont adoptées par l'Assemblée nationale, mettraient le système des relations professionnelles de la République de Corée plus en conformité avec les principes de la liberté syndicale et les recommandations antérieures du comité. En outre, ces réformes nécessitent pour être mises en œuvre, des modifications appropriées à la loi d'amendement. Le comité se propose de réexaminer le divers problèmes qu'il a soulevés au cours de l'examen antérieur du cas à la lumière des récents événements survenus dans le pays et reflétés dans le rapport de mission.
Allégations de droit
143. Le comité relève avec intérêt dans le rapport de mission que l'accord tripartite prévoit la légalisation des syndicats d'enseignants à compter du 1er juillet 1999. Ceci sera mené à bien en amendant les dispositions pertinentes des diverses lois qui privent les enseignants du secteur privé et du secteur public du droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier. Toutefois, le comité note avec préoccupation que quelques difficultés pourraient être rencontrées pendant la procédure législative en raison de l'opposition de certains membres du parti majoritaire à l'Assemblée nationale, le Grand parti national, qui estiment que les enseignants ne devraient pas bénéficier du droit syndical en raison de leur rôle et statut particuliers dans la société coréenne et en raison de l'image extrémiste du Syndicat des enseignants et des travailleurs coréens de l'éducation (CHUNKYOJO) toujours illégal. Il ressort cependant du rapport de mission que ces parlementaires souhaitent continuer les négociations sur ce problème et le comité encourage toutes les parties concernées à procéder ainsi. A ce sujet, le comité doit rappeler que les enseignants, comme les autres travailleurs sans distinction d'aucune sorte, doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur choix, sans autorisation préalable, pour la promotion et la défense de leurs intérêts professionnels. Le comité demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que le droit d'organisation des enseignants, tel qu'énoncé dans l'accord tripartite, soit reconnu aussitôt que possible et au plus tard dans la période de temps prévue dans l'accord. En outre, même si les enseignants peuvent constituer des «associations éducatives» depuis 1991 et discuter des conditions de travail avec les autorités, il ne semble pas que ces associations soient des syndicats au vrai sens du terme, c'est-à-dire agissant pour la défense et la promotion des intérêts de leurs membres. Ceci est reflété par le fait que CHUNKYOJO n'a pas été enregistré jusqu'à maintenant. Le comité demande donc au gouvernement d'enregistrer CHUNKYOJO aussitôt que le droit syndical des enseignants sera reconnu, afin qu'il puisse défendre et promouvoir légalement les intérêts de ses membres.
144. Au sujet de la question du droit d'organisation des fonctionnaires, le comité note avec intérêt que, selon le rapport de mission, la proposition avancée par le Commission tripartite d'accorder aux fonctionnaires le droit de former des associations professionnelles à été adoptée par l'Assemblée nationale en février 1998. Ceci signifie qu'à partir du 1er janvier 1999 les fonctionnaires auront le droit de constituer ces associations professionnelles par l'intermédiaire desquelles ils pourront discuter avec les autorités des questions relatives, en autres, à l'amélioration de l'environnement de travail et à la solution des différends. Toutefois, le comité note avec préoccupation que de larges catégories de fonctionnaires sont exclues du droit d'adhérer à ces associations professionnelles. Ainsi, les fonctionnaires des grades 1 à 5 seront exclus des associations en question tout comme les fonctionnaires appartenant à certains services tels que les pompiers et les policiers. Enfin, les fonctionnaires effectuant des travaux confidentiels ou employés dans les services du personnel, du budget et de la compatibilité, de la réception et de la distribution des marchandises, du contrôle des services généraux, dans les secrétariats, la sécurité des locaux, la conduite des voitures ou des ambulances ne seront pas non plus autorisés à adhérer à ces associations professionnelles. Au vu des restrictions ainsi apportées au droit de s'associer d'une large catégorie de fonctionnaires, le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe fondamental selon lequel tous les fonctionnaires publics, à la seule exception possible des forces armées et de la police, devraient pouvoir constituer des organisations de leur choix pour promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 206.] Le comité demande donc au gouvernement d'examiner l'extension du droit d'association reconnu à certaines catégories de fonctionnaires à compter du 1er janvier 1999, à toutes les catégories de fonctionnaires qui devraient bénéficier de ce droit conformément aux principes de la liberté syndicale.
145. Selon le rapport de mission, les catégories de fonctionnaires qui auront le droit de constituer des associations et de s'y affilier au 1er janvier 1999 se verront progressivement accorder le droit de constituer des syndicats et de s'y affilier. Le gouvernement indique que les syndicats seront autorisés pour les fonctionnaires quand la situation économique du pays se sera améliorée et quand un consensus national aura été atteint sur cette question. A ce sujet, le comité rappelle que le refus de reconnaître aux travailleurs du secteur public le droit qu'ont les travailleurs du secteur privé de constituer des syndicats, ce qui a pour résultat de priver leurs «associations» des avantages et privilèges attachés aux «syndicats» proprement dits, implique, dans le cas des travailleurs employés par le gouvernement et de leurs organisations, une discrimination par rapport aux travailleurs du secteur privé et à leurs organisations. Une telle situation pose la question de la compatibilité de ces distinctions avec les principes de la liberté syndicale en vertu desquels les travailleurs, «sans distinction d'aucune sorte», ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix et celui de s'y affilier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 216.] Pour ce qui est de la préoccupation du gouvernement sur la nécessité de maintenir la sécurité et la stabilité nationales, le comité rappelle que les forces armées et la police peuvent être exclues du droit syndical. Le comité rappelle en outre que le droit d'organisation n'implique pas nécessairement le droit de grève qui peut-être interdit dans les services publics qui sont des services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. Ceci est, par exemple, le cas des services de lutte contre l'incendie. En conséquence, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour reconnaître le plus rapidement possible le droit de constituer des syndicats et de s'y affilier à tous les fonctionnaires publics qui devraient bénéficier de ce droit conformément aux principes de la liberté syndicale.
146. Au sujet de l'introduction dans la législation de la possibilité du pluralisme syndical aux niveaux national et sectoriel, le comité note avec intérêt que le gouvernement dans sa réponse du 15 octobre 1997 mentionne l'enregistrement, aux termes de la loi de plusieurs fédérations, dont la Fédération de travailleurs coréens de l'automobile (KAWF), du Syndicat national des travailleurs du métropolitain (NCSWU) et de la Fédération des syndicats du groupe Hyundai. Le comité regrette cependant qu'en adoptant ces mesures pour reconnaître le pluralisme syndical le gouvernement n'a pas pris en compte immédiatement les organisations établies au niveau de l'entreprise pour lesquelles le pluralisme ne sera possible qu'en 2002. Il prend note des arguments avancés par le gouvernement pour justifier ce retard, en particulier l'instabilité des relations professionnelles et la confusion dans la négociation collective qui pourrait en résulter. Le comité est cependant d'avis que cette période supplémentaire pendant laquelle les principes de la liberté syndicale continueront à être sérieusement violés pourrait être évitée en mettant en place un système stable de négociation collective en conformité avec le pluralisme syndical. Le comité demande donc au gouvernement d'accélérer le processus de légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise et, à cette fin, de promouvoir la mise en œuvre d'un système stable de négociation collective. Le comité propose que cette question soit examinée au sein de la commission tripartite.
147. Au sujet de la levée de l'interdiction de l'intervention d'une tierce partie dans la négociation collective et les différends du travail, le comité prend note de l'information communiquée par le gouvernement selon laquelle le but de la notification de l'identité des tierces parties au ministère du Travail (art. 40 (1)(3) de la loi d'amendement) est simplement de faciliter l'identification par le gouvernement des personnes qui assistent les syndicats ou les employeurs. Le comité prend note en outre des informations détaillées fournies par le gouvernement sur le nombre total des tierces parties (675 230) assistant les 171 syndicats et les entreprises en 1997. Tout en constatant que le nombre de ces conseillers est très élevé, le comité relève dans le rapport de mission, que la KCTU en particulier a notifié le nom de nombreux conseillers au ministère du Travail parce que les personnes non notifiées ne peuvent intervenir dans la négociation collective ou ne peuvent même faire aucun commentaire sur un différend de travail aux termes de l'article 40 (2) de la loi d'amendement. Le comité estime que l'obligation de notification contenue à l'article 40 (1) (3) de la loi d'amendement est trop lourde et injustifiée pour les syndicats en particulier à la lumière de l'interdiction prévue à l'article 40 (2) de la loi d'amendement. En outre, il apparaît au comité que l'exigence de notification n'est pas une simple formalité puisque les personnes non notifiées intervenant dans la négociation collective sont passibles d'une peine maximum de trois années d'emprisonnement et/ou d'une amende de 30 millions de won (article 89 (1) de la loi d'amendement). Le comité considère que de telles dispositions entraînent de sérieux risques d'abus et constituent un grave danger pour la liberté syndicale. En conséquence, le comité demande au gouvernement d'abroger l'obligation de notification contenue à l'article 40 de la loi d'amendement ainsi que les sanctions prévues à l'article 89 (1) de cette même loi pour violation de l'interdiction faite aux personnes non notifiées au ministère du Travail d'intervenir dans la négociation collective et les différends du travail.
148. Le comité note que la loi d'amendement établit une distinction entre les services publics généraux et les services publics essentiels et qu'il ne peut être fait recours à l'arbitrage obligatoire que pour cette seconde catégorie de services publics, après recommandation du Comité spécial de médiation à cet effet (article 71 (2), 74 (1) et 62 (3) de la loi d'amendement). Le comité observe que les services essentiels sont les suivants: chemins de fer, services urbains d'autobus, électricité, fourniture de gaz, raffinerie et approvisionnement de pétrole, services hospitaliers, banques et télécommunications. Toutefois, les services urbains d'autobus et les banques (à l'exception de la Banque de Corée) ne seront considérés comme essentiels que jusqu'en l'an 2000.
149. Le comité rappelle à cet égard que l'imposition de l'arbitrage obligatoire lorsqu'il en résulte une interdiction du droit de grève devrait être limité aux services dont l'interruption risquerait de mettre en danger pour tout ou partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité des personnes. Le comité estime sur la base de cette définition que l'institut monétaire, les banques, les transports et le secteur du pétrole ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme. Ils constituent toutefois des secteurs où un service minimum négocié pourrait être assuré en cas de grève en vue de garantir que les besoins essentiels des consommateurs soient satisfaits. Le comité demande donc au gouvernement de modifier la liste des services publics essentiels contenus dans l'article 71 de la loi d'amendement dans le sens des conclusions formulées ci-dessus, afin que le droit de grève ne soit interdit que dans les services essentiels au sens strict du terme.
150. Le comité note que l'article 38 (1) de la loi d'amendement réglemente les piquets de grève sur les lieux de travail et que l'article 42 (1) concerne les actions collectives sous forme d'occupation des locaux. Selon le rapport de mission, les piquets de grève accompagnés de coercition sur les non grévistes sont considérés comme délits pénaux alors que les piquets sans usage de la violence sont considérés comme légaux. Il n'en est pas de même pour l'article 42 (1) de la loi d'amendement qui interdit toute «occupation des installations de production et autres lieux clés de fonctionnement de l'entreprise ou des actes équivalents tels que déterminés par décret présidentiel». Le comité estime à cet égard que certains types de grève, tels que les occupations d'entreprises ne devraient pas être considérés comme illégaux à moins qu'ils perdent leur caractère pacifique ou portent atteinte à la liberté du travail. Le comité demande donc au gouvernement de fournir des informations sur l'application pratique de l'article 42 (1) de la loi d'amendement relatif à l'interdiction de l'occupation des lieux de travail.
151. Au sujet du problème du paiement des salaires pendant les périodes de grève, le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle l'article 44 de la loi d'amendement énonce que les employeurs n'ont pas l'obligation de payer les salaires pendant les grèves et que les syndicats ne peuvent déclencher des grèves pour le paiement des salaires pendant les arrêts de travail. Ces informations confirment l'opinion du comité selon laquelle le paiement des salaires aux travailleurs pendant les périodes de grèves n'est ni exigé ni interdit aux termes de la nouvelle loi.
152. Au sujet du paiement des salaires des permanents syndicaux à temps plein, il ressort du rapport de mission que l'article 24 de la loi d'amendement interdit aux employeurs de rémunérer ces dirigeants à compter du 1er janvier 2002. Le comité observe que la KCTU estime que cette disposition aura des effets nuisibles sur le mouvement syndical en République de Corée, qui se caractérise principalement par l'existence de petits syndicats au niveau de l'entreprise, disposant de ressources très limitées. Pour sa part, la FKTU, est d'avis que cette disposition devrait être abrogée car ce problème devrait être réglé par les employeurs et les syndicats et non par la législation. Enfin, même si des représentants des entreprises n'apparaissent pas préoccupés par la pratique actuelle de rémunérer les permanents syndicaux à temps plein, d'autres ont des opinions fortement opposées, qui sont renforcées par l'appréhension que fait naître l'introduction du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise en 2002. Le comité estime que l'interdiction du paiement des salaires aux permanents syndicaux est une question qui ne devrait pas faire l'objet d'une intervention législative. En conséquence, il demande au gouvernement d'abroger l'article 24 2) de la loi d'amendement. Le comité note que ce problème controversé fera l'objet d'une seconde négociation au sein de la commission tripartite. Dans le contexte du nouveau climat de tripartisme et de coopération entre partenaires sociaux prévalant dans le pays, le comité veut croire que les discussions au sein de la Commission tripartite résoudront le problème en prenant en considération les préoccupations légitimes de toutes les parties concernées.
153. Au sujet des dispositions de la loi d'amendement concernant l'interdiction pour les travailleurs licenciés et privés d'emploi de maintenir leur affiliation syndicale et l'inéligibilité des non-membres des syndicats à des mandats syndicaux (articles 2 (4) (d) et 23 (1) de la loi d'amendement, respectivement), il ressort du rapport de mission que l'accord tripartite contient une proposition pour permettre aux travailleurs licenciés et privés d'emploi de maintenir leur affiliation syndicale au niveau sectoriel et régional. Le comité note que, bien que cette proposition eût dû être adoptée par l'Assemblée nationale à sa session extraordinaire de février 1998, celle-ci a décidé d'en ajourner la discussion à ses prochaines sessions et a adopté à la place une résolution déclarant que «l'Assemblée nationale examinera positivement la révision des lois pertinentes». A ce sujet, le comité rappelle que la détermination des conditions d''affiliation ou d'éligibilité aux directions syndicales est une question qui devrait être laissée à la discrétion des statuts des syndicats et que les autorités publiques devraient s'abstenir de toute intervention qui pourrait entraver l'exercice de ce droit par les organisations syndicales. Le comité demande donc au gouvernement d'abroger, comme prévu dans l'accord tripartite, les dispositions concernant l'interdiction pour les travailleurs licenciés et privés d'emploi de maintenir leur affiliation syndicale ainsi que l'éligibilité des non membres des syndicats aux directions syndicales (articles 2 (4) (d) et 23 (1) de la loi d'amendement).
154. Il ressort du rapport de mission que l'absence de statut légal de la KCTU n'est pas un problème majeur en pratique en termes d'organisation et d'activités et qu'elle exerce les fonctions d'une centrale nationale syndicale. Selon le rapport de mission, la KCTU fournit actuellement à ses syndicats affiliés des lignes directrices pour la négociation collective et les conseille directement sur les lieux de travail. La KCTU bénéficie aussi d'une exemption de responsabilité civile et pénale pour les actions collectives légitimes. Le comité note cependant qu'un problème concret découle du non enregistrement de la KCTU: elle n'est pas invitée par le gouvernement à participer aux travaux de la quarantaine de commissions tripartites consultatives et délibératives sur les questions du travail, ni aux programmes d'assistance aux syndicats. L'obstacle principal à l'enregistrement de la KCTU apparaît être l'affiliation de CHUNKYOJO, organisation illégale pour le moment. Notant toutefois que l'accord tripartite prévoit la légalisation des syndicats d'enseignants à compter du 1er juillet 1999, le comité demande au gouvernement d'assurer que la KCTU soit enregistrée en tant qu'organisation syndicale le plus rapidement possible et au plus tard dans ce laps de temps. En attendant, le comité demande au gouvernement d'assurer que la KCTU soit invitée à participer aux travaux des commissions tripartites consultatives et délibératives sur les questions du travail et aux programmes d'assistance aux syndicats dont elle est actuellement exclue.
155. En ce qui concerne les aspects législatifs du cas, le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises en vue de donner effet à ses recommandations.
Allégations de fait
156. Au sujet de la situation de M. Kwon Young-kil, ancien président de la KCTU, le comité observe dans le rapport de mission que, bien que le retrait du chef d'inculpation relatif à l'intervention d'une tierce partie soit attendu, M. Kwon est toujours poursuivi pour les autres charges retenues contre lui. Le comité note avec préoccupation que M. Kwon est toujours accusé d'avoir violé la loi sur les assemblées et manifestations publiques, la loi sur la circulation et la loi sur la collecte des contributions. Enfin, un chef d'inculpation relatif à l'intrusion dans des locaux privés à été retenu contre M. Kwon pour la tenue du Congrès constitutif de la KCTU à l'Université de Yonsai le 11 novembre 1995. Une nouvelle fois, le comité insiste fermement auprès du gouvernement pour qu'il fasse tout ce qui est en son pouvoir pour assurer la levée de toutes les charges encore en cours contre M. Kwon pour ses activités syndicales exercées avant les grèves de janvier 1997.
157. Le comité note que, selon le rapport de mission, deux dirigeants syndicaux mentionnés dans le présent cas -- M. Lee, C.C., président du Comité pour la démocratisation du Syndicat des travailleurs des chemins de fer, et M. Kim, Im-Shik, président du Syndicat de l'industrie lourde Hyundai -- ont été libérés. Le comité note également avec satisfaction que le gouvernement a annoncé par une communication du 17 mars 1998 que deux autres dirigeants syndicaux mentionnés dans la plainte, M. Hwan, Y.-H., président du Syndicat de la Compagnie de textile de Corée, et M. Moon, S.D., président de la Confédération de classe (Union de Séoul), ont été libérés le 13 mars 1998 en raison d'une amnistie décrétée par le Président. A cet égard, le comité est convaincu qu'un système stable de relations professionnelles ne pourra pas fonctionner harmonieusement dans le pays aussi longtemps que des syndicalistes seront soumis à des procédures judiciaires et à des détentions.
158. A ce sujet, le comité se félicite d'apprendre par le rapport de mission que le nouveau Président examine sérieusement l'octroi d'une amnistie pour toutes les personnes détenues pour violation des lois en matière de travail. Selon le rapport de mission, un total de 29 syndicalistes sont toujours en détention. Deux d'entre eux ont été condamné à des peines d'emprisonnement et 27 font encore l'objet de poursuites judiciaires. Le comité se félicite également des assurances données par les fonctionnaires du ministère de la Justice, tel qu'indiqué dans le rapport de mission, que le ministère essaiera d'assurer une instruction juste et rapide pour les 152 autres syndicalistes qui, bien que libres, sont soumis à des enquêtes par le ministère. Le comité considère que, dans le nouveau climat de tripartisme et de coopération entre les partenaires sociaux prévalant dans le pays, il est particulièrement approprié que les autorités continuent à prendre des mesures qui permettront la mise sur pied d'un nouveau système de relations professionnelles fondées sur un climat de confiance. Ceci implique en particulier la libération de tous les syndicalistes détenus pour leurs activités syndicales et le retrait des charges liées à de telles activités. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout développement concernant l'octroi d'une amnistie aux syndicalistes emprisonnés.
* * *
159. Le comité prend note avec intérêt de la volonté exprimée par les membres de l'équipe de transition du Président élu de ratifier les conventions nos 87 et 98 dans un proche avenir. A cet égard, le comité rappelle au gouvernement que l'assistance technique du BIT est à sa disposition s'il le souhaite en vue d'aider à résoudre les problèmes soulevés dans ce cas ainsi que d'autres questions concernant la liberté syndicale.
Recommandations du comité
160. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité, notant les progrès accomplis dans le domaine de la liberté syndicale et notant avec satisfaction la libération des quatre dirigeants syndicaux mentionnés dans la plainte, invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Annexe
Rapport de la mission tripartite de haut niveau
en République de Corée
(9-13 février 1998)
Cas no 1865
I. Introduction
A sa session de mars 1997, le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT a demandé au gouvernement de la République de Corée d'examiner la possibilité d'accueillir dans le pays une mission tripartite de haut niveau, afin de s'assurer que les révisions en cours dans la législation sur le travail soient en accord avec les principes de la liberté syndicale. La demande du comité a été faite dans le contexte de la plainte (cas no 1865) présentée devant le comité par la Confédération coréenne des syndicats (KCTU), la Fédération des travailleurs de l'industrie automobile de Corée (KAWF) et la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Le comité a examiné ce cas, qui concerne différentes allégations de violation de droits syndicaux en droit et en pratique, à ses sessions de juin 1996 et mars et juin 1997. [Voir les 304e, 306e et 307e rapports du comité, approuvés par le Conseil d'administration à ses 266e, 268e et 269e sessions, respectivement.]
En décembre 1997, le gouvernement a accepté d'accueillir une mission tripartite de haut niveau afin d'examiner les questions soulevées dans le cas no 1865, ainsi que d'autres questions liées à ce cas. La mission était composée des personnes suivantes: Dr L. Mishra (représentant gouvernemental, Inde), M. B. Noakes (représentant des employeurs, Australie) et M. U. Edström (représentant des travailleurs, Suède). Les membres de cette mission, qui se sont rendus en République de Corée du 9 au 13 février 1998, étaient accompagnés de M. Kari Tapiola, Directeur général adjoint du BIT; M. Bernard Gernigon, chef du service de la liberté syndicale; Mme Catherine Comtet, directrice du bureau du BIT à Bangkok et Mme Deepa Rishikesh, juriste au service de la liberté syndicale.
II. Déroulement de la mission
Durant sa visite en République de Corée, la mission a rencontré le Président élu, le ministre du Travail, le ministre de l'Education, le ministre adjoint de l'Administration publique, le ministre adjoint de la Justice ainsi que des hauts fonctionnaires de ces ministères. De plus, des rencontres ont eu lieu avec le chef de la section économique de l'équipe de transition du Président élu, ainsi qu'avec plusieurs membres du principal parti de l'opposition à l'Assemblée nationale (Parlement). La mission a également rencontré les représentants de la Fédération des employeurs coréens et les représentants des deux centrales syndicales de travailleurs, soit la Fédération coréenne des syndicats (FKTU), la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) et le Syndicat des enseignants et des travailleurs de l'éducation de la République de Corée (CHUNKYOSO) . La mission a également visité une entreprise, LG Electronics, où elle a pu rencontrer la direction et des délégués du personnel. La mission a aussi rencontré certains membres de la Fondation tripartite internationale du travail coréen (KOILAF) (une liste de toutes les personnes rencontrées par la mission se trouve en annexe de ce rapport). Enfin, la mission a effectué une visite officielle à Panmunjon (zone démilitarisée entre la Corée du Nord et la Corée du Sud).
III. Le contexte particulier dans lequel
la mission a eu lieu
Développements politiques et économiques
La mission a visité la République de Corée (Corée du Sud) au moment où le pays traverse des changements politiques et économiques majeurs. M. Kim Dae-Jung a été élu Président le 19 décembre 1997 lors de la victoire la plus serrée dans l'histoire politique du pays. L'élection de M. Kim représente la première victoire d'un candidat de l'opposition à la présidence depuis la création de ce pays et elle est intervenue au moment où la Corée du Sud devait faire face aux conséquences d'une crise économique et financière des plus graves. La plupart des observateurs estiment que la victoire de M. Kim et du Congrès national pour des nouvelles politiques a reflété le mécontentement des électeurs face à l'ancien régime, qui a été tenu pour responsable des problèmes économiques du pays qui comprenaient, entre autres, une grave crise d'endettement, un système bancaire déficient et des problèmes au niveau des conglomérats industriels (chaebols).
Afin de mieux saisir la complexité de la présente situation, il est nécessaire d'apporter certaines explications concernant le cadre politique et économique. Pour la plupart des observateurs, il apparaît qu'une des causes principales de cette crise est due aux pratiques suivies par les chaebols, qui représentent environ 40 à 45 pour cent du PNB. En particulier, le contrôle politique de plusieurs banques a eu pour résultat de permettre aux chaebols de profiter de contraintes budgétaires assouplies. Ceci, en plus de la forte concentration de la gestion et du droit de propriété entre les mains de quelques familles, a eu pour effet de ralentir la capacité d'adaptation des entreprises dans un environnement en pleine mutation. De plus, comme le système n'a jamais été considéré tout à fait transparent, il a été difficile pour les investisseurs étrangers d'évaluer correctement la situation financière de ces entreprises. Enfin, plusieurs chaebols étaient impliqués dans une grande variété de marchés, sans aucune considération pour les profits, les liquidités ou un échec potentiel.
La raison principale de la présente crise financière semble donc avoir été l'incapacité des chaebols de rembourser la dette extérieure, ceci conduisant à une grave crise dans la balance des paiements. Selon les statistiques officielles, entre 1993 (moment où Kim Young Sam est devenu Président) et 1997, la dette extérieure a doublé et équivalait à un montant de 140 milliards de dollars E.-U. Il est important de souligner qu'une large part de cette dette extérieure l'était sous forme de dette à court terme, estimée à 76 milliards de dollars E.-U. à la fin de 1997. La plus grande partie de cette dette a été contractée entre des emprunteurs du secteur privé (les chaebols) et des créditeurs du secteur privé (des banques étrangères privées, en particulier des banques japonaises). Le montant de la dette, ajouté à sa nature à court terme et le fait que les créditeurs étaient essentiellement des banques privées, a eu pour résultat de fragiliser l'économie de la République de Corée face à une soudaine crise de confiance des investisseurs. En rétrospective, les premiers signes de la crise sont apparus durant les premiers mois de 1997 lorsqu'une importante entreprise d'acier a fait faillite suite à des dettes de 6 milliards de dollars E.-U. Toutefois, cet incident n'a pas affecté la confiance des investisseurs avant la fin de l'année 1997, comme en ont témoigné les cotes de crédit élevées attribuées aux dettes coréennes par les agences de crédit internationales. Deux conglomérats majeurs ont épuisé leurs liquidités l'été dernier, ce qui, ajouté à la crise financière dans la région, a produit une fuite des capitaux en octobre, et les réserves de devises étrangères ont rapidement chuté. Une demande fut faite au Fonds monétaire international (FMI) de fournir une aide ponctuelle en novembre, et une entente portant sur un prêt de 55 milliards de dollars E.-U. fut finalement conclue.
Plusieurs conditions ont été attachées à ce prêt de 55 milliards de dollars E.-U. du FMI, notamment un resserrement des politiques macroéconomiques, la libéralisation des mouvements de capitaux étrangers, la modification du système actuel de contrôle corporatif, une refonte des directives sur l'emprunt destinées aux chaebols, une transparence accrue dans la gestion des chaebols ainsi que l'adoption de mesures favorisant la flexibilité du marché du travail et de la main-d'œuvre qui devraient faciliter les licenciements et amener une augmentation du chômage.
Il a été signalé à la mission durant sa visite qu'il serait probablement difficile au Président élu d'adopter certaines de ces mesures dans les prochains mois, puisque ses projets pourraient être bloqués par l'Assemblée nationale. En fait, le parti du Président élu, le Congrès national pour de nouvelles politiques, ne détient que 78 sièges à l'Assemblée nationale, contre 157 pour l'ancien parti au pouvoir, le Grand parti national (GNP). Même avec les 45 sièges de ses alliés, les libéraux démocrates unis (ULD), mené par M. Jong-pil, le NCNP ne détient toujours pas de majorité. Cette situation n'a fait que démontrer plus clairement les problèmes auxquels a dû faire face l'équipe de transition du Président élu, puisqu'elle a été appelée à prendre plusieurs décisions concernant les affaires du pays jusqu'à la prise de fonctions du Président, le 25 février 1998.
Climat social
Une des décisions les plus importantes prises par le Président élu et son équipe de transition durant la période précédant sa prise de fonctions a été de mettre sur pied une Commission tripartite le 15 janvier 1998, qui deviendra permanente après la prise de fonctions du Président. Cette commission était composée de représentants du gouvernement, des milieux d'affaires et des deux principales organisations syndicales, soit la Fédération des syndicats coréens (FKTU) qui est déjà enregistrée et qui compte environ 1,2 million de membres, et la Confédération des syndicats coréens (KCTU), qui n'est toujours pas enregistrée, et qui compte environ 600 000 membres. Cette commission était également composée de députés venant d'autres partis politiques au Parlement. (Une liste détaillée de tous les membres de cette Commission tripartite est annexée à ce rapport.) Le 6 février 1998, soit juste avant l'arrivée de la mission en Corée du Sud, la Commission tripartite a adopté un accord en vue de l'adoption et de la mise en œuvre d'une série de réformes dans le domaine économique et les secteurs liés au travail. Ces réformes s'attaquent aux problèmes économiques tels que l'accroissement de la flexibilité du marché du travail et de la main-d'œuvre, en prônant l'assouplissement des lois actuelles trop rigides en matière de sécurité de l'emploi et en introduisant des programmes d'aide pour les chômeurs et des augmentations des allocations à cet effet. En outre, ces réformes concernent également des questions importantes concernant la liberté syndicale, telles que le droit d'organisation des enseignants et des fonctionnaires, la légalisation des activités politiques pour les syndicats, le droit d'affiliation et la possibilité d'exercer des fonctions syndicales pour les travailleurs licenciés ou sans emploi au niveau de la branche et au niveau régional. Ces réformes, si elles sont mises en œuvre, nécessiteront des amendements à la législation actuelle, et en particulier à la loi d'amendement sur les syndicats et les relations professionnelles (loi d'amendement).
Bien que l'accord tripartite eût dû être signé par toutes les parties pendant le séjour de la mission en République de Corée, ceci n'a pas été possible à la suite d'événements imprévus. Dans la soirée du 9 février 1998, la direction de la KCTU, y compris son président par intérim, qui avait donné son accord à l'accord tripartite la semaine précédente, a dû démissionner face à l'opposition de 70 pour cent des membres de la KCTU qui venaient de se prononcer contre l'accord tripartite au cours d'un congrès extraordinaire. La KCTU, qui a nommé une unité d'urgence pour la diriger temporairement, a demandé la renégociation de certaines dispositions de l'accord tripartite. De plus, elle a appelé à une manifestation publique et à une grève générale illimitée devant débuter l'après-midi du 13 février 1998. Les objections principales de la KCTU concernant l'accord tripartite avaient trait aux dispositions relatives à l'assouplissement des conditions pour le licenciement des travailleurs sans aucune mention de projets de création d'emplois. Enfin, selon la KCTU, le fait que l'accord tripartite ne prévoyait que des fonds largement insuffisants pour les chômeurs ne pouvait que mener à une situation dramatique à la lumière des rapports faisant état d'environ 5 000 nouveaux licenciements de travailleurs par jour.
Toutefois, les autres partenaires sociaux, y compris la FKTU, ont rejeté les appels pour la renégociation de l'accord tripartite, en insistant sur le fait que cet accord était nécessaire au vu de la crise économique aiguë sévissant dans le pays. Finalement, l'unité d'urgence de la KCTU a décidé elle-même de retirer son appel à la grève générale dans la soirée du 12 février 1998, tout en continuant de demander la renégociation de certains points de l'entente. Cette décision fut attribuée principalement au fait qu'il existait de sérieux conflits internes à la KCTU concernant d'éventuelles perturbations pour fait de grève, particulièrement à un moment où l'opinion publique pouvait considérer cette action comme un facteur d'aggravation d'une situation économique déjà très volatile. De plus, la KCTU a semblé tenir compte des réalités liées à un gouvernement de transition qui est apparu beaucoup plus engagé en faveur des droits de l'homme et des travailleurs que les gouvernements précédents. Néanmoins, cet épisode a signifié clairement à la mission la fragilité de la paix sociale actuelle. Le dimanche 15 février 1998, une fois que la mission eut quitté la Corée du Sud, l'Assemblée nationale a voté une loi permettant les licenciements massifs de travailleurs dans les cas de restructuration d'entreprise comme les fusions ou acquisitions, ainsi que des lois traitant de faillite et de liquidations corporatives et autorisant des acquisitions forcées d'entreprises locales par des étrangers.
IV. Informations obtenues durant la mission
Pendant son séjour en Corée du Sud, la mission a tenté d'obtenir le plus d'informations possibles de la part des divers interlocuteurs sur les points énumérés ci-dessous et qui avaient été soulevés durant l'examen antérieur de la plainte actuellement en instance devant le Comité de la liberté syndicale (cas no 1865).
Questions de droit
Droit d'organisation des enseignants
La mission a été informée par des hauts fonctionnaires du ministère de l'Education que les conditions d'emploi des enseignants étaient actuellement régis par la loi sur les fonctionnaires publics, la loi sur les employés des gouvernements locaux, la loi sur les fonctionnaires de l'éducation et la loi sur les écoles privées. Les diverses dispositions de ces lois interdisent aux enseignants des écoles publiques et privées de constituer des organisations de leur choix et de s'affilier à ces organisations pour défendre leurs intérêts professionnels. Toutefois, une loi spéciale sur la promotion du statut des enseignants a été promulguée en 1991, laquelle permet aux enseignants de créer des associations éducatives afin de discuter, deux fois l'an, des conditions de travail avec les chefs de service au niveau local ou avec le ministre de l'Education au niveau national. En fait, ces associations éducatives incluent la Fédération coréenne des enseignants (KFTA) mais pas le Syndicat des enseignants et des travailleurs coréens de l'éducation (CHUNKYOJO) dont l'enregistrement fut demandé par le Comité de la liberté syndicale à plusieurs occasions au cours des dernières années.
Selon le ministre de l'Education, le fait que l'entente tripartite prévoit la légalisation des syndicats d'enseignants à partir de juillet 1999 se veut un élément très positif. Ceci pourra être fait en modifiant les lois actuelles durant la session régulière de l'Assemblée nationale à l'automne 1998. Le Président élu a toutefois informé la mission que certaines difficultés pourraient surgir durant le processus de légalisation des syndicats d'enseignants. En effet, cette proposition doit faire face à une vive opposition de la part du parti majoritaire à l'Assemblée nationale, le Grand parti national (GNP), et ce, surtout à cause de l'image extrémiste attribuée au CHUNKYOJO. Le point de vue du Président élu sur ce sujet était partagé par certains députés du GNP au Parlement qui ont informé la mission durant une réunion séparée que plusieurs membres de leur parti, en accord avec l'opinion publique, ne souscrivaient pas à l'idée que les enseignants puissent avoir le droit de se syndiquer. De plus, ils ont estimé que l'adoption de lois était la prérogative de l'Assemblée nationale. En conséquence, des représentants du GNP ont quitté la Commission tripartite vers la fin des négociations. Ils ont toutefois précisé à la mission qu'ils étaient prêts à poursuivre les négociations. Selon des hauts fonctionnaires du ministère de l'Education et selon le ministre lui-même, le problème d'accorder le droit d'organisation aux enseignants se posait surtout au vu de l'importance qu'accordent les parents et le public en général à l'éducation. Les Sud-Coréens ont une vision traditionnelle des enseignants pour qui ils éprouvent le plus grand respect. Ils ne comprennent pas pourquoi les enseignants ont besoin de former un syndicat puisqu'ils ne sont pas des travailleurs manuels mais plutôt des personnes engagées dans une activité intellectuelle. De plus, les Sud-Coréens estiment que le CHUNKYOJO est idéologiquement extrémiste et qu'en conséquence ils ne devraient pas obtenir le droit de se syndiquer.
Cette opinion a semblé contredite par des représentants du CHUNKYOJO et de la KCTU qui ont précisé à la mission que des récents sondages avaient démontré que 70 pour cent de la population et 90 pour cent des enseignants dans le pays soutenaient la légalisation des syndicats d'enseignants. De plus, les représentants du CHUNKYOJO et de la KCTU ont insisté sur le fait que la légalisation du CHUNKYOJO devrait se faire immédiatement et non en juillet 1999 puisque le droit d'organisation des enseignants est un droit fondamental et inconditionnel qui ne peut faire l'objet de compromis ou être lié à la question d'une loi autorisant les licenciements massifs de travailleurs. Ils en sont d'autant plus convaincus qu'en République de Corée les enseignants ont toujours travaillé dans des conditions déplorables sans aucun moyen d'obtenir satisfaction quant à leurs revendications. En outre, le gouvernement précédent s'était engagé à accorder la liberté syndicale aux enseignants au moment de devenir membre de l'OIT et de l'OCDE. Ils sont restés toutefois conscients que ce volet de l'entente tripartite ferait face à une certaine opposition à l'Assemblée nationale. Le CHUNKYOJO a d'ailleurs déclaré qu'il allait s'abstenir d'utiliser son droit à des actions collectives pour une certaine période de temps afin de respecter l'accord qui prévoyait sa légalisation.
Droit d'organisation des fonctionnaires
Le ministère de l'Administration publique a informé la mission que, en vertu de la législation actuelle, les fonctionnaires n'avaient pas le droit de se syndiquer, sauf pour les fonctionnaires qui sont engagés dans des travaux manuels au ministère de l'Information et des Communications, à l'Administration nationale des chemins de fer et au Centre national hospitalier. Ainsi, ces trois catégories de fonctionnaires ont formé des syndicats sur leur lieu de travail respectif et totalisent 54 017 membres.
Toutefois, le gouvernement a décidé d'octroyer le droit de constituer des organisations et de s'y affilier à d'autres catégories de fonctionnaires dans le cadre de la Commission tripartite qui doit soumettre un projet de loi à cet effet à l'Assemblée nationale à sa session de septembre 1998. Si l'Assemblée nationale adopte ce projet, les fonctionnaires obtiendront alors le droit de s'associer à partir du 1er janvier 1999. Par la suite, la mission a été informée que l'Assemblée nationale a adopté ce projet durant une session extraordinaire, le 15 février 1998. En termes concrets, ce droit d'organisation signifie que les fonctionnaires se verront octroyer le droit de constituer des associations professionnelles à travers lesquels ils pourront consulter les dirigeants de l'organisation sur des questions relatives à l'amélioration de leur environnement de travail, l'accroissement du rendement, le règlement de différends et la mise en œuvre de résolutions émanant de l'association. Toutefois, seules certaines catégories de fonctionnaires auront l'autorisation de s'affilier à ces associations professionnelles et elles seront limitées à un nombre maximum de 14 000. Ainsi, les fonctionnaires des niveaux un à cinq avec des fonctions d'autorité seront exclus de ces associations professionnelles et seuls les fonctionnaires des niveaux six à neuf (employés de soutien) seront autorisés à s'y affilier. De plus, les fonctionnaires qui appartiennent à certains services, par exemple les pompiers et les policiers ne seront pas autorisés à faire partie de ces associations. Enfin, les fonctionnaires impliqués dans des tâches confidentielles ou relevant du personnel, dans les finances et la comptabilité, dans la réception et la distribution de biens, dans le contrôle du personnel des services généraux, dans le travail de secrétariat, ceux devant assurer la sécurité des établissements ainsi que les chauffeurs d'autobus et d'ambulance, seront tous exclus des associations professionnelles.
La mission a également été informée que le gouvernement avait l'intention d'octroyer de façon progressive aux fonctionnaires le droit de constituer des syndicats et de s'y affilier, lorsque la situation économique du pays présenterait des signes d'amélioration et lorsqu'un consensus national existerait sur ce point. La raison invoquée par le gouvernement pour ne pas octroyer immédiatement aux fonctionnaires le droit de se syndiquer étant que, en tenant compte du fait que la Corée demeurait une nation divisée et exposée à une armistice fragile, les fonctionnaires se devaient d'assurer la stabilité et la sécurité de l'Etat. De plus, considérant les conditions économiques précaires dans lesquelles se trouvait le pays et le fait que la population considérait le gouvernement responsable de cette crise, ce dernier n'était pas en position d'accéder aux demandes même les plus raisonnables des syndicats.
Enfin, la Fédération coréenne des employeurs (KEF), la FKTU et la KCTU ont informé la mission qu'elles estimaient que le droit d'organisation des fonctionnaires devait être respecté.
Pluralisme syndical au niveau de l'entreprise
Le ministre du Travail a déclaré à la mission que la question de la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise n'avait pas été abordée dans le cadre de la Commission tripartite puisqu'il existait d'autres problèmes plus urgents. De plus, les syndicats n'avaient pas fait la demande pour que cette question soit traitée pendant les récentes négociations au sein de la commission. Le ministre a déclaré que la décision de reporter la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise jusqu'en 2002 avait été prise par le gouvernement afin de simplifier le processus de négociation collective au niveau de l'entreprise et non de le limiter. Ce délai devrait permettre aux syndicats de s'adapter au nouveau système de négociation collective et ainsi éviter toute confusion qui pourrait surgir, du moins dans la phase initiale, de la présence de deux ou plusieurs syndicats au niveau de l'entreprise.
Les représentants de la KEF ont informé la mission que le délai dans la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise était fondé sur le fait que la direction et les travailleurs avaient besoin de temps pour s'adapter à ce nouvel environnement afin d'éviter, une fois de plus, confusion et désordre non seulement entre la direction et les travailleurs, mais également entre les syndicats eux-mêmes. Durant cette période préparatoire, des arrangements devraient être conclus en vue d'établir une nouvelle structure pour la négociation collective afin de permettre à la direction de négocier avec l'organisation la plus représentative. Selon la KEF, ces arrangements s'avéreront nécessaires dans le contexte actuel de tension au niveau des relations professionnelles. Les syndicats au niveau national tentaient de faire des efforts afin d'élargir leur sphère d'influence au niveau de l'entreprise. En 1997, plus de 300 syndicats au niveau de l'entreprise ont délégué leurs droits de négociation à des syndicats au niveau national afin de renforcer leur pouvoir de négociation. Une compétition accrue au niveau national afin d'obtenir plus de soutien de la part des syndicats au niveau de l'entreprise en promettant de meilleures conditions de travail a eu pour effet d'affaiblir les relations industrielles et a provoqué un accroissement des tensions ainsi que des délais au niveau de la négociation collective.
Selon le président de la FKTU, son organisation souhaitait l'introduction immédiate du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise. Toutefois, cette question a été la source de nombreuses divergences durant la commission présidentielle sur la réforme des relations de travail, qui avait été créée le 9 mai 1996 et était composée de représentants de syndicats, des employeurs et des groupes d'intérêt public. Les employeurs, en particulier, s'étaient vivement opposés au pluralisme syndical au niveau de l'entreprise. Le président de la FKTU a néanmoins estimé que cette question se résoudrait sans problème avec le temps. Les représentants de la KCTU ont pour leur part estimé qu'il n'y aurait pas dû y avoir un tel délai pour la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise. Toutefois, ils ont précisé à la mission que la question de la multiplicité des syndicats avait été soulevée dans le passé suite aux doutes concernant la démocratie à l'intérieur même du mouvement syndical, puisque ce dernier avait déjà eu de nombreux contacts avec les employeurs et le gouvernement. Une fois qu'une vraie démocratie s'était installée dans le mouvement syndical, cette question n'avait plus été soulevée. De plus, il existe des problèmes d'ordre pratique pour les syndicats puisque ceux-ci ne bénéficient pas de ressources suffisantes pour constituer une organisation à l'intérieur d'une entreprise, lorsqu'il en existe déjà une.
Interdiction de l'intervention d'une tierce partie
lors de conflits professionnels
Les représentants du ministère du Travail ont informé la mission que l'interdiction de l'intervention d'une tierce partie dans le processus de négociation collective ou lors de conflits professionnels avait été levée et que la notification de l'identité de ces tierces parties au ministère du Travail (art. 40 de la loi d'amendement) ne répondait qu'à un objectif d'information concernant les personnes ou organisations de qui les syndicats ou employeurs pourraient souhaiter obtenir une quelconque assistance.
Les représentants de la KEF ont souligné à la mission qu'initialement les employeurs s'étaient opposés à la levée de l'interdiction de l'intervention d'une tierce partie lors de conflits professionnels par crainte que des militants extrémistes deviennent trop impliqués dans les conflits professionnels et prolongent ainsi lesdits conflits. Toutefois, la KEF a fait des concessions et a accepté la levée de cette interdiction durant la Commission présidentielle sur la réforme des relations professionnelles de 1997. Actuellement, les syndicats au niveau de l'entreprise peuvent recevoir une assistance des syndicats au niveau de la branche sans conditions préalables ainsi que celle d'une tierce partie, si cette dernière a été notifiée au ministère du Travail par le syndicat. Ainsi, toute personne a la possibilité d'intervenir durant la négociation collective et les conflits professionnels si une demande a été faite à cet effet par le syndicat concerné. Selon les représentants de la KEF, plusieurs syndicats auraient utilisé de façon excessive cette loi en notifiant de trop nombreuses personnes de qui ils espéraient un soutien pour la négociation collective ou un conflit professionnel. Environ 680 000 personnes auraient été notifiées afin d'apporter leur soutien à des syndicats dans 170 entreprises en 1997, soit une moyenne de 4 000 personnes par entreprise.
Le président de la FKTU a informé la mission qu'il n'était pas préoccupé par l'exigence de la notification de l'identité de tierces personnes au ministère du Travail: cette question en était une de confiance entre les parties concernées. Tout en confirmant qu'il n'existait dorénavant qu'une exigence de notification au ministère du Travail en vertu de l'article 40 de la loi d'amendement et que l'interdiction de l'intervention d'une tierce partie avait été levée, les représentants de la KCTU ont, pour leur part, insisté sur le fait que l'exigence de notification pouvait conduire à des abus puisqu'elle ouvrait la voie à un contrôle arbitraire de la part du gouvernement. Le soutien continu à la notification était basé sur une suspicion profonde qui existe dans les relations de travail et le manque de respect flagrant pour l'autonomie interne, la démocratie et la direction des syndicats. La KCTU a notifié les noms de plusieurs «conseillers» au ministère du Travail puisque l'absence de notification signifiait que les personnes non notifiées se voyaient empêchées de formuler quelque commentaire que ce soit, et même de prononcer un discours sur un conflit professionnel, et ce en vertu du deuxième paragraphe de l'article 40 de la loi d'amendement. Les personnes ne respectant pas cette interdiction peuvent être passibles d'une peine maximale de trois ans d'emprisonnement et/ou d'une amende de 30 millions de won (art. 89 1) de la loi d'amendement). Ainsi, selon la KCTU, cette nouvelle disposition (adoptée en mars 1997) équivalait au maintien de l'interdiction de l'intervention d'une tierce partie.
Recours à l'arbitrage obligatoire entraînant
l'interdiction du recours à la grève
Le ministère du Travail a attiré l'attention de la mission sur le fait que la liste des services essentiels publics (art. 71 2) de la loi d'amendement) était en fait rédigée de façon trop large puisque, pour tous différends dans ces services, il était possible de recourir à l'arbitrage obligatoire entraînant ainsi une interdiction du recours à la grève. Le ministre a en outre déclaré que cette question était à l'ordre du jour de la Commission tripartite et serait discutée pendant la deuxième phase de négociations qui devrait se terminer durant la première moitié de l'année 1998. Lors d'une réunion avec des représentants du ministère de la Justice, la mission a été informée que la grève imminente du syndicat des employés du métro de Séoul serait considérée comme illégale puisque le syndicat en question n'avait pas respecté les procédures en vigueur et parce que cette grève n'avait pas lieu dans le but de rechercher une amélioration des conditions de travail pour ces employés mais avait lieu plutôt pour des raisons sociopolitiques plus générales. Ces représentants ont toutefois confirmé à la mission que cette grève, qui a pu être évitée grâce à une solution négociée, aurait de toute façon été considérée comme illégale puisque le transport en métro est considéré comme un service essentiel pour lequel le droit de grève est interdit.
Les représentants de la KEF ont attiré l'attention de la mission sur le fait que la loi d'amendement constituait une amélioration par rapport aux lois antérieures puisque la liste des services publics essentiels énumérés dans la loi d'amendement et pour lesquels il existait une interdiction du recours à la grève était dorénavant beaucoup plus restreinte.
Cependant, le président de la FKTU a émis l'opinion que la liste des services publics essentiels énumérée dans la loi d'amendement était trop vaste et devrait se limiter aux stricts services essentiels. Les représentants de la KCTU ont partagé cette opinion, surtout que, selon eux, il est de pratique courante en République de Corée d'exercer un certain pouvoir discrétionnaire durant le cours d'une grève afin d'exclure de la grève les services vitaux d'un lieu de travail.
Interdiction de certaines modalités du droit de grève
(art. 38 1) et 42 1) de loi d'amendement)
L'article 38 1) de la loi d'amendement régit la participation à un piquet de grève alors que l'article 42 1) traite de l'occupation du lieu de travail.
Des représentants du ministère de la Justice ont informé la mission que la participation à un piquet de grève accompagnée de manœuvres d'obstruction au travail des non-grévistes constituait une ingérence dans les affaires de l'entreprise et était donc considérée comme un crime. Toutefois, lorsque les participants à un piquet de grève n'avaient pas recours à la violence, cette action était considérée comme légale.
Les représentants de la KEF ont informé la mission que la loi d'amendement interdisait aux grévistes l'occupation des installations de production. De plus, les grévistes n'étaient pas autorisés à bloquer l'accès des non-grévistes sur le lieu de travail. Ils ont donc estimé que ces mesures étaient destinées à protéger les installations de production ainsi que de garantir le droit au travail des non-grévistes.
Bien que le président de la FKTU ait estimé qu'il existait peu de restrictions concernant ces modalités du droit de grève, les représentants de la KCTU ont toutefois exprimé leur désaccord. En ce qui concerne la participation à un piquet de grève, selon la nouvelle loi, les grévistes se voient interdire l'utilisation de la «violence physique» ou de «menaces» afin de convaincre les non-grévistes de participer à la grève. Toutefois, à ce jour, la définition de ces termes reste très floue. Selon ces représentants, plusieurs situations dites de «violence» ne constituent pas de la violence à proprement parler: par exemple, des syndicalistes arborant des rubans rouges ou portant des vêtements ordinaires au lieu de leurs uniformes, ou des incidents avec la direction qui tente de les empêcher de se réunir, ont souvent été considérés comme de l'obstruction au niveau de l'entreprise et ont résulté en l'arrestation desdits syndicalistes. Ainsi, les représentants de la KCTU ont estimé que l'article 38 1) de la loi d'amendement pouvait donner lieu à des abus, qui ne pourraient qu'envenimer les relations professionnelles sur le lieu de travail. En ce qui concerne l'article 42 1) de la loi d'amendement, les représentants de la KCTU ont exprimé l'avis que l'interdiction de «l'occupation des installations de production et autres lieux clés de fonctionnement de l'entreprise ou des actes équivalents pouvant être déterminé par décret présidentiel» allait rendre impossible le recours à la grève à l'intérieur des entreprises. Cette disposition pourrait empêcher toute action de grève à l'intérieur d'une entreprise, à l'exception des terrains de sport de certaines entreprises, des cafétérias et des locaux syndicaux. Ainsi, des activités telles que des grèves sur le tas, des grèves du zèle ou l'occupation de l'entreprise ou du lieu de travail, qui se déroulent normalement dans les installations de production, pourraient être interprétées comme une «occupation interdite» au sens de la loi. En conséquence, les représentants de la KCTU ont souligné que l'application en pratique de ces dispositions allait vraisemblablement provoquer une augmentation drastique des arrestations et détentions de syndicalistes en raison de leurs activités syndicales puisque le non-respect de ces dispositions entraînait une peine d'emprisonnement maximale de trois ans et/ou une amende de 30 millions de won (art. 89 1) de la loi d'amendement).
Paiement des jours de grève
Les représentants de la KEF ont informé la mission que, en vertu de l'article 44 de la loi d'amendement, le paiement des jours de grève était possible lorsqu'il existait une entente à cet effet entre la direction et les syndicats. Ils ont néanmoins exprimé leur mécontentement face à cette disposition et ont estimé qu'elle devrait être modifiée afin d'interdire le paiement des jours de grève. Selon ces représentants, le principe de «pas de travail, pas de salaire» signifiait que toute demande de paiement des jours de grève par un syndicat avec l'accord de la direction devrait être interdite par la loi. En outre, tout paiement de la part de l'employeur dans ces circonstances devrait être considéré comme une pratique déloyale et sanctionnée par la loi.
Le président de la FKTU n'entrevoyait pour sa part aucun problème concernant cette disposition puisqu'elle impliquait que le paiement des jours de grève était une question qui se devait de faire l'objet d'un accord entre les parties concernées. Il a souligné qu'en pratique les employeurs avaient l'habitude de fournir une aide financière aux grévistes, même s'il ne s'agissait pas à proprement parler d'un salaire. Pour leur part, les représentants de la KCTU ont exprimé l'opinion que l'article 44 2) de la loi d'amendement, qui interdit aux syndicats d'avoir recours à des actions collectives afin d'obtenir le paiement de salaire durant la période de cette action collective, était inacceptable. Cette question devrait faire l'objet d'un accord entre les parties dans le cadre de la négociation collective et ne devrait pas être imposé par la loi. Cette orientation était d'autant plus inacceptable que toute violation de cette nouvelle disposition était passible d'une peine maximale de deux ans d'emprisonnement et/ou d'une amende ne pouvant dépasser 20 millions de won (art. 90 de la loi d'amendement).
Paiement de salaires aux permanents syndicaux
En ce qui concerne l'article 24 de la loi d'amendement qui interdit aux employeurs de rémunérer les permanents syndicaux à partir du 1er janvier 2002, des représentants du ministère du Travail ont informé la mission que cette question controversée allait faire l'objet d'un deuxième cycle de négociations dans le cadre de la Commission tripartite, laquelle devrait être complétée durant les six premiers mois de 1998.
La mission a été informée par les représentants de la KEF qu'à l'heure actuelle, les salaires des permanents syndicaux étaient payés par l'entreprise et que, dans certains cas, les syndicats exigeaient des primes supplémentaires pour activités syndicales. De plus, le nombre de permanents syndicaux était considérable puisqu'il représentait en moyenne un permanent pour 300 membres. Un exemple concret était celui de la compagnie Hyundai automobile, qui emploi 30 000 travailleurs et qui compte 70 permanents syndicaux et 100 à temps partiel. Bien que les employeurs aient considéré dans le passé que ces paiements étaient inappropriés, ils ont été contraints de négocier avec les syndicats, dans le cadre de la négociation collective, le nombre de ces permanents syndicaux. Toutefois, les employeurs sont dorénavant opposés à de tels paiements, particulièrement suite à l'introduction du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise en 2002, ce qui ne pourra qu'augmenter les charges financières des employeurs suite à l'augmentation anticipée (par trois) du nombre de représentants syndicaux. Les représentants de la KEF n'étaient pas de l'avis que cette question pouvait se résoudre dans le cadre de la négociation collective, et ce à cause du déséquilibre qui existe dans le pouvoir de négociation entre les employeurs et les syndicats en République de Corée, puisque ces derniers insisteront pour que ces paiements continuent.
Le président de la FKTU était d'avis que l'article 24 de la loi d'amendement devrait être abrogé puisque la question du paiement de salaire aux permanents syndicaux devrait être négociée entre la direction et les travailleurs et ne devrait pas être incluse dans la loi. Pour leur part, les représentants de la KCTU ont souligné que cette disposition aurait des répercussions désastreuses sur la situation actuelle puisque les syndicats d'entreprise de moins de 100 employés représentaient 63 pour cent de tous les syndicats en République de Corée et que les ressources financières mensuelles de ces syndicats étaient inférieures à un million de won. Le mouvement syndical était donc incapable de constituer un capital financier substantiel puisque toutes les «unités» syndicales en République de Corée étaient des syndicats au niveau de l'entreprise. Chaque syndicat étant une unité distincte avec son propre président et ses permanents syndicaux, il se devait de financer toutes ses activités avec les cotisations de ses membres.
Affiliation syndicale et exercice de charges syndicales
pour les travailleurs licenciés ou sans emploi
En ce qui concerne l'article 2 4) d) de la loi d'amendement sur la non-reconnaissance d'un syndicat lorsqu'il a accepté l'affiliation d'une personne qui n'est pas un travailleur, et l'article 23 1) en vertu duquel les dirigeants syndicaux doivent être élus parmi les membres du syndicat, les représentants du ministère du Travail ont informé la mission que la Commission tripartite était tombée d'accord sur plusieurs changements concernant cette question, ce qui représentait des progrès vers un respect accru des principes de la liberté syndicale. Selon la proposition élaborée dans l'accord tripartite, les chômeurs et les travailleurs licenciés auraient la possibilité de devenir ou de rester membres d'un syndicat (et ainsi d'exercer des charges syndicales) au niveau de la branche d'industrie ou régionale, mais pas d'un syndicat au niveau de l'entreprise. Cette proposition de la Commission tripartite devait être votée par l'Assemblée nationale à sa session spéciale de février 1998. Toutefois, la mission fut informée par la suite que le législateur avait décidé de discuter de cette question lors des prochaines séances de l'Assemblée nationale, en invoquant des discussions insuffisantes entre le parti au pouvoir et les parties d'opposition lors de la séance spéciale de l'Assemblée nationale. Le législateur a en effet publié une résolution à l'effet que «l'Assemblée nationale examinera de façon positive une révision des lois concernées».
Les représentants de la KCTU ont indiqué à la mission que l'accord tripartite prévoit la possibilité d'affiliation syndicale pour les travailleurs licenciés et privés d'emploi. Dans ces cas, ces travailleurs peuvent adhérer à un syndicat de branche ou régional (avec compétence géographique impérative) mais pas à un syndicat au niveau. Ceci représente une amélioration sur la législation actuelle aux termes de laquelle les travailleurs retraités ou licenciés ne pouvaient s'affilier à aucun syndicat, quel que soit son niveau. En réalité, l'une des raisons pour lesquelles les autorités ont refusé d'enregistrer le KCTU en tant que syndicat était le fait que certaines des personnes exerçant des charges syndicales avaient été licenciées par leur entreprise, les disqualifiant ainsi du statut de travailleur au regard de la loi d'amendement.
Enregistrement de la KCTU
Le ministre du Travail a informé la mission que l'absence de statut juridique pour la KCTU ne présentait pas de problèmes pratiques quant à son organisation et ses activités. Il a précisé que la KCTU était représentée à la Commission tripartite ainsi qu'à la Commission centrale des relations de travail. Le seul obstacle à l'enregistrement de la KCTU demeurait son affiliation avec la CHUNKYOJO, organisation toujours considérée comme illégale. Si la KCTU décidait d'expulser de ses rangs la CHUNKYOJO durant son congrès extraordinaire tenu ce jour-même, elle pourrait obtenir immédiatement son enregistrement. Par contre, si son congrès en décidait autrement, la KCTU ne pourra obtenir sa reconnaissance juridique qu'après le 1er juillet 1999 (date à laquelle la CHUNKYOJO deviendra une organisation légale).
Les représentants de la KEF ont attiré l'attention de la mission sur le fait que, en dépit de sa non-reconnaissance juridique, la KCTU assumait le rôle et les fonctions d'une centrale syndicale nationale. En effet, la KCTU a fourni à ses affiliés des directives annuelles concernant la négociation collective et leur a fourni de l'assistance sur leur lieu de travail. La KCTU a été également exemptée de poursuites civiles ou pénales pour ses activités syndicales légitimes.
Les représentants de la KCTU ont souligné à la mission que la question de la reconnaissance juridique de la KCTU était liée à son affiliation à la CHUNKYOJO et l'éligibilité à des fonctions syndicales de certains de ses représentants syndicaux. De leur avis, alors qu'il était possible de trouver éventuellement une solution sur le deuxième point (surtout depuis que l'accord tripartite permettait la possibilité d'affiliation à des travailleurs sans emploi), le premier point demeurait non négociable. La KCTU a soutenu vigoureusement que les enseignants avaient le droit de constituer une organisation pour défendre leurs intérêts et que cette organisation avait le droit de s'affilier librement à la KCTU. Les représentants de la KCTU ont également estimé que la non-reconnaissance juridique de la KCTU avait de nombreuses implications. Par exemple, en ce qui a trait à la participation de la KCTU à des organes sur l'élaboration de politiques, le gouvernement n'invitait jamais la KCTU à participer à de tels organes. En fait, il existerait plus de 40 comités tripartites traitant des questions du travail auxquels la KCTU n'a pu participer. Un autre problème du fait de la non-reconnaissance juridique de la KCTU est que celle-ci se voit privée d'une partie du budget du ministère du Travail destiné à fournir une aide aux syndicats sous forme de programmes sociaux, programmes d'éducation ou autres. Cette aide financière ne pouvant être distribuée aux affiliés au niveau de l'entreprise qu'à travers l'organisation centrale, la KCTU et ses affiliés se voyaient ainsi privés de cette forme d'assistance à cause de la nature illégale de cette dernière.
Questions de fait
Charges retenues contre M. Kwon Young-kil,
ancien président du KCTU
La mission a été informée par des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice que M. Kwon Young-kil, ancien président de la KCTU, a été arrêté le 18 décembre 1995 puis remis en liberté le 13 mars 1996. M. Kwon avait été accusé d'avoir violé les dispositions de la loi sur les différends du travail interdisant l'intervention des tierces parties, ainsi que la loi sur les assemblées et manifestations publiques, la loi sur la circulation et la loi sur la collecte des cotisations. Bien que le retrait du chef d'inculpation relatif à l'intervention d'une tierce partie soit attendu, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont confirmé que M. Kwon faisait toujours l'objet de poursuites pour les autres charges retenues contre lui.
Les représentants de la KCTU ont confirmé à la mission ce que les fonctionnaires du ministère de la Justice avaient déclaré. Ils croient toutefois qu'un autre chef d'inculpation d'introduction dans des locaux privés a été retenu contre M. Kwon le 11 novembre 1995 à l'auditorium de l'Université de Yon Sei.
Développements concernant la situation
des syndicalistes arrêtés ou détenus
Le chef de la Division économique II de l'équipe de transition du Président élu a informé la mission que le problème des syndicalistes arrêtés et détenus n'avait pas fait l'objet de négociations au sein de la Commission tripartite. Néanmoins, le Président élu a décidé d'examiner la situation avec plus de clémence que le précédent gouvernement. Il est donc très probable que les syndicalistes qui ont été arrêtés et accusés de violer les lois en relation avec les problèmes du travail seront relâchés dans un proche avenir, mais que la question se pose différemment pour les syndicalistes accusés d'avoir violé les lois pénales.
Des fonctionnaires du ministère de la Justice ont informé la mission de ce que 29 syndicalistes étaient actuellement détenus. Deux d'entre eux ont été condamnés et 27 sont poursuivis. Un autre groupe de 152 syndicalistes fait l'objet d'enquêtes par le ministère mais les intéressés n'ont pas été détenus. La mission a été en outre informée que le Président élu examinait sérieusement l'octroi d'une amnistie pour les syndicalistes condamnés par les tribunaux. En ce qui concerne les syndicalistes détenus mais toujours poursuivis, le ministère a indiqué que la question de leur libération est de la compétence d'une autorité judiciaire indépendante. En outre, au sujet des syndicalistes non détenus mais soumis à enquête, le ministère assuré la mission qu'il essaierait d'assurer une instruction juste et rapide qui aboutirait à la décision la plus clémente possible. Finalement, pour ce qui est de la situation de quatre syndicalistes détenus mentionnés dans le cas en instance devant le Comité de la liberté syndicale, le ministère a indiqué que M. Lee, C.E., président du Comité pour la démocratisation du syndicat des travailleurs des chemins de fer, ainsi que M. Kim, Im-shik, président du Syndicat de l'industrie lourde Hyundai, ont été relâchés. Seuls M. Hwan, Y.-H., président du Syndicat de la Compagnie de textile de Corée, et M. Moon, S.D., président de la Confédération de classe (Union de Séoul), sont toujours détenus. Finalement, le ministre du Travail a informé la mission qu'une ancienne dirigeante détenue du Syndicat des travailleurs hospitaliers, Mme Cha Soo Hwang (non mentionnée dans le cas) a été récemment relâchée.
La mission a été informée par des représentants de la KCTU qu'on avait constaté des progrès au fil des ans dans la manière dont le gouvernement avait traité les différends du travail, dans la mesure où le nombre de syndicalistes arrêtés avait décru (un tableau statistique des syndicalistes de 1988 à 1997 fourni par la KCTU est annexé au rapport). Ils ont néanmoins indiqué qu'il est encore fréquent d'arrêter des syndicalistes pour des motifs tels qu'obstruction aux affaires, chef d'inculpation extrêmement vague et sujet à abus et à applications arbitraires et qui ne peut que détériorer les relations professionnelles sur les lieux de travail. Enfin, les représentants de la KCTU ont informé la mission que 20 syndicalistes de cette confédération étaient actuellement détenus et deux étaient recherchés par la police.
V. Remarques finales
Tout d'abord, les membres de la mission tripartite voudraient remercier les autorités de la République de Corée, et particulièrement le Président élu et les membres de l'équipe de transition, le ministre du Travail, le ministre de l'Education et les fonctionnaires des ministères que la mission a rencontrés du ministère du Travail, la FEK, la FKTU, KCTU et toutes les autres parties que la mission a rencontrées pour l'esprit élevé de coopération dont les uns et les autres ont fait preuve. Les membres de la mission tripartite voudraient aussi exprimer leur reconnaissance pour l'assistance fournie par toutes les parties qui, grâce aux discussions tenues dans un climat extrêmement positif, leur a permis de comprendre pleinement la situation complexe de la République de Corée en matière de relations professionnelles. Ce climat positif a été rehaussé par l'accord tripartite qui a été conclu juste avant l'arrivée de la mission en République de Corée, sous les auspices de la Commission tripartite récemment créée à l'initiative du Président élu.
L'un des aspects les plus positifs de l'accord collectif est qu'il prévoit la reconnaissance du droit syndical des enseignants, problème de longue date en instance devant le Comité de la liberté syndicale. Il reste à voir, cependant, si cette proposition sera adoptée par l'Assemblée nationale, dont une partie provenant du Grand parti national semble, tout au moins pour l'instant, être opposée à cette reconnaissance. Il convient d'espérer que les négociations en cours entre les parties concernées conduiront à un résultat positif sur cette question en septembre 1998, particulièrement compte tenu du fait que l'organisation la plus directement concernée s'est engagée à ne pas avoir recours à des actions collectives pendant une certaine période de temps, en contrepartie de son enregistrement. La légalisation de cette organisation apparaît aussi comme l'obstacle majeur à l'enregistrement d'une des organisations centrales principales du pays, la KCTU. Pendant la période de transition vers cet enregistrement, le gouvernement devrait examiner la possibilité d'inviter les représentants de la KCTU à participer aux travaux de la quarantaine de commissions consultatives et délibératives tripartites sur les questions de travail, dont elle est actuellement exclue.
L'accord tripartite introduit aussi la possibilité pour les fonctionnaires de constituer des associations à partir du 1er janvier 1999. Le gouvernement a exprimé son intention d'autoriser la création de syndicats à un stade ultérieur. Il convient de se féliciter que cette proposition a déjà été adoptée par l'Assemblée nationale le 15 février 1998. La mission a noté les vues exprimées par les autorités en ce qui concerne les questions liées à la sécurité publique et l'ordre public qu'elle a d'ailleurs pu observer lors de sa visite à Panmunjon. Toutefois, les membres de la mission estiment que le droit de s'associer (et éventuellement de se syndiquer) des fonctionnaires pourrait être considérablement renforcé en autorisant plusieurs catégories de fonctionnaires actuellement exclues des associations professionnelles à y avoir accès, d'autant que beaucoup de ces catégories ne semblent pas exercer de responsabilités en matière de sécurité et de stabilité nationales (raison majeure pour laquelle les fonctionnaires ont été exclus du droit syndical jusqu'à maintenant).
Les membres de la mission se sont félicités d'apprendre que le Président élu examinait sérieusement l'octroi d'une amnistie pour les personnes détenues pour violation des lois en matière de travail. Le fait que le ministre de la Justice prévoit de s'occuper équitablement, rapidement et avec clémence de la situation de 152 syndicalistes qui font l'objet d'enquêtes par le ministre constitue aussi une information dont il convient de se féliciter. Dans le nouveau contexte de tripartisme et de coopération entre partenaires sociaux, il est particulièrement approprié que les autorités poursuivent les mesures qui permettront la construction d'un nouveau système de relations professionnelles fondé sur un climat de confiance. Ceci implique en particulier la libération de tous les syndicalistes détenus pour leurs activités syndicales.
La mission a été aussi satisfaite d'obtenir la confirmation de toutes les parties concernées que le paiement des salaires aux travailleurs pour les périodes de grève n'est ni obligatoire ni interdite dans la législation en vigueur. En outre, le fait que la plupart des institutions rencontrées s'accordent à estimer que la liste des services publics essentiels actuellement contenue dans la législation est trop large et que l'étendue de cette liste sera discutée au prochain ordre du jour de la Commission tripartite constitue un autre développement positif puisque les membres de la mission considèrent que l'interdiction de la grève résultant du recours à l'arbitrage obligatoire devrait être limitée aux services essentiels au sens strict du terme.
Le problème de la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise sans aucun retard supplémentaire n'a pas été retenu comme sujet de discussion au sein de la Commission tripartite. Certaines des parties que la mission a rencontrées, particulièrement les syndicats, bien que préoccupées que ce pluralisme ne sera permis que dans quatre ans, semblent néanmoins considérer que ceci ne constitue pas le problème le plus pressant. Il faut cependant espérer que la possibilité du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise, une question qui devrait être laissée à la discrétion des syndicats eux-mêmes, sera mise en place aussitôt que possible.
Ceci vaut aussi pour l'abrogation de la loi d'amendement concernant l'impossibilité pour les travailleurs licenciés de maintenir leur affiliation syndicale ainsi que pour l'inéligibilité des non-membres des syndicats aux directions syndicales. Les membres de la mission ont été informés d'une proposition contenue dans l'accord tripartite de permettre aux travailleurs licenciés et privés d'emploi de maintenir leur affiliation syndicale au niveau de la branche d'industrie ou au niveau régional. Cette proposition devait être adoptée par l'Assemblée nationale à sa session extraordinaire de février 1998, mais les membres de la mission ont été informés par la suite que l'Assemblée a décidé d'ajourner la discussion de cette question aux sessions à venir et a adopté à la place une résolution déclarant que l'Assemblée nationale examinera positivement la révision des lois pertinentes. Il faut espérer que cette révision des dispositions correspondantes de la loi d'amendement interviendra dans un proche avenir car cette question peut poser des problèmes de liberté syndicale.
Un autre sujet de controverse est celui du paiement des salaires aux permanents syndicaux à temps plein. Aux termes de la loi d'amendement, il est interdit aux employeurs de rémunérer les permanents syndicaux à temps plein à compter du 1er janvier 2002. La KCTU estime toutefois que les effets de cette disposition seraient catastrophiques pour le mouvement syndical de la République de Corée qui est principalement caractérisé par des petits syndicats d'entreprise. La FKTU considère que cette question devrait être laissée à la négociation entre employeurs et travailleurs. Les membres de la mission sont conscients que cette question fera l'objet d'un second cycle de négociation au sein de la Commission tripartite. Les membres de la mission notent que, si au moins certains représentants des entreprises n'apparaissent pas préoccupés par la pratique actuelle, d'autres ont des opinions fortement opposées et renforcées par l'appréhension que fait naître la légalisation du pluralisme syndical au niveau de l'entreprise. Il faut espérer qu'une solution sera trouvée, dans le contexte du nouveau climat de tripartisme et de coopération pour répondre aux diverses préoccupations exprimées à cet égard.
Bien que l'interdiction antérieure d'intervention des tierces parties dans la négociation collective ait été levée, les membres de la mission ont été informés de l'obligation contenue dans la loi d'amendement de notifier l'identité des tierces parties au ministère du Travail. Même si le nombre des conseillers déclarés par une des organisations centrales semble être excessif, les membres de la mission ont appris que l'absence de notification entraîne, pour les personnes non notifiées, l'interdiction de faire quelque commentaire que ce soit au sujet du différend du travail en cause.
Dans le contexte du nouveau système de relations professionnelles, les membres de la mission estiment que cette exigence de notification est trop lourde pour les syndicats. En outre, il est préoccupant de constater que les personnes dont le nom n'est pas notifié encourent des peines de trois ans de prison et/ou de 13 millions de won d'amende. Ces sanctions semblent être beaucoup trop excessives et leur application en pratique pourrait avoir des effets très négatifs sur les relations professionnelles dans le pays.
D'une manière générale, il a été porté à l'attention de la mission que certaines dispositions de la loi d'amendement prévoient de très sévères sanctions. Ceci est, par exemple, le cas en ce qui concerne la violation de l'interdiction de certains types d'action directe tels que l'occupation des locaux (dans ce cas aussi, les peines encourues sont de trois ans de prison et/ou d'une amende de 30 millions de won). D'autres dispositions prévoient une peine de deux ans de prison et d'une amende de 20 millions de won pour violation de l'interdiction de revendiquer le paiement des jours de grève. Ces sanctions excessives constituent un obstacle à la tentative d'établir un nouveau système de relations professionnelles fondé sur un climat de confiance.
Finalement, les membres de la mission ont pu constater que certaines dispositions de la loi d'amendement réglementent de manière trop détaillée des questions qui devraient normalement être réglées dans les statuts des syndicats. D'autres dispositions donnent aux autorités un pouvoir beaucoup trop discrétionnaire pour prendre des décisions dans certains domaines qui ne devraient pas être de leur ressort. A cet égard, il convient de rappeler au gouvernement que l'assistance technique du BIT est à sa disposition, s'il le souhaite, pour aider à remédier à cette situation ainsi qu'à d'autres questions soulevées pendant la mission. Les membres de la mission ont été très réconfortés à cet égard d'entendre le Président élu et les membres de son équipe de transition endosser l'opinion de la mission sur l'importance du tripartisme à tous les niveaux. Ils ont été également encouragés par la volonté exprimée par un porte-parole de l'équipe de transition de ratifier la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, dans un proche avenir. Les membres de la mission sont encouragés par les progrès réalisés en matière de liberté syndicale. Ils sont confiants que des progrès continueront et que le système de relations professionnelles existant en République de Corée sera progressivement mis en pleine conformité avec les principes de la liberté syndicale. Cette confiance est renforcée par l'engagement expressément formulé par le Président et le gouvernement envers les droits de l'homme dont les droits syndicaux ainsi qu'envers la justice sociale.
Genève, le 11 mars 199
(Signé) L. Mishra.
B. Noakes.
U. Edström.
Annexe I
Liste des personnes rencontrées par la mission
Président élu et membres de l'équipe de transition:
Son Excellence, M. Kim Dae-Jung, Président élu
M. Choi, Myung-Hun, chef de la Division de l'économie II
M. Kim, Yong-Dal, conseiller du chef de la Division de l'économie II, équipe de transition du Président élu
Ministère du Travail |
|
M. Lee, Ki-Ho: |
ministre du Travail |
Dr Park, Chung-Kyu: |
directeur général pour la Coopération internationale du travail |
M. Cho, Jeong-Ho: |
directeur général de la Division des politiques internationales du travail |
M. Chung, Jong-Soo: |
directeur général de la Division des politiques du travail |
M. Sin, Jae-Myun: |
directeur général de la Coopération en gestion du travail |
M. Song, Bong-Keun: |
directeur de la Division des syndicats |
M. Chung, Hyoung-Woo: |
directeur adjoint de la Division des politiques internationales du travail |
M. Lee, Dae-Joong: |
directeur adjoint du Bureau pour la coopération internationale du travail |
Ministère de l'Education |
|
M. Lee, Myung-Hyun: |
ministre de l'Education |
M. Park, Chun-Bong: |
directeur général du Bureau pour les politiques sur les enseignants |
M. Kim, Doo-Sik: |
directeur du Bureau pour les politiques sur les enseignants |
M. Hong, Won-Il: |
fonctionnaire du Département pour les politiques sur les enseignants |
M. Youn, Young Kyou: |
membre du Conseil de la ville de Gwangju sur l'éducation |
Ministère de l'Administration publique |
|
M. Woo, Kun Min: |
ministre adjoint de l'Administration publique |
M. Chae, Il Byung: |
inspecteur général du Département des services publics |
M. Cheong, Sang Suok: |
directeur adjoint du Département des services publics |
M. Lee, Sang Soo: |
haut fonctionnaire du Département des services publics |
Ministère de la Justice |
|
M. Won, Chung-Il: |
ministre adjoint de la Justice |
M. Kang, Shin-Wook: |
sous-ministre, Bureau des affaires juridiques |
M. Lim, An-Sik: |
directeur de la Division du personnel |
M. Shin, Dong-Hyun: |
directeur adjoint de la Division du personnel |
M. Moon, Sung-Woo: |
directeur de la 3e division du bureau du Procureur général |
Mme Choi, Yoon-Hee: |
Procureur général, ministère de la Justice |
Députés au Parlement du parti d'opposition Grand parti national |
|
M. Hong, Moon-Jong: |
membre de la Commission sur l'éducation et député à l'Assemblée nationale |
M. Har, Kyoung-Kun: |
président de l'élaboration des politiques, député à l'Assemblée nationale |
M. Lee, Kang-Hee: |
membre de la Commission sur les questions de travail, député à l'Assemblée nationale |
M. Kim, Moon-Soo: |
membre sur les questions de travail, député à l'Assemblée nationale |
M. Han, Young-Ae: |
leader parlementaire adjoint, membre de la Commission sur l'environnement et les questions de travail, député à l'Assemblée nationale |
Organisations d'employeurs |
|
Fédération des employeurs coréens |
|
M. Kim, Chang-Sung: |
président |
M. Cho, Nam-Hong: |
vice-président |
M. Kim, Young-Vae: |
directeur |
M. Lee, Dong-Eung: |
directeur |
Fédération des industries coréennes |
|
M. Sohn, Byung-Doo: |
vice-président |
Organisations de travailleurs |
|
Fédération des syndicats coréens |
|
M. Park, In-Sang: |
président |
M. Kim, Yoo-Koun: |
vice-président |
M. Lee, Nam-Soon: |
secrétaire général |
M. Park, Hun-Soo: |
président de la Fédération des syndicats de travailleurs de l'industrie chimique |
M. Noh, Jin-Kwi: |
directeur du Bureau pour l'élaboration des politiques |
M. Lee, Kwang-Hwan: |
directeur du Bureau de la coopération externe |
M. Lee, Jung-Sik: |
directeur du Département de la coordination et de la planification |
M. Choi, Dae-Yul: |
directeur du Département des relations publiques et de l'information |
M. Ahn, Pong-Sul: |
directeur du Département des affaires internationales |
Confédération des syndicats coréens |
|
M. Dan, Byung-Ho: |
président de l'Unité d'urgence |
M. Lee, Dong-Jin: |
membre de l'exécutif central |
M. Yoon, Young Mo: |
secrétaire pour les affaires internationales |
Le syndicat des enseignants et des travailleurs coréens de l'éducation |
|
M. Kim, Kui-Sik: |
président |
M. Lee, Dong-Jin: |
président de la Commission de solidarité |
Mme Chung, Hae-Suk: |
membre du Comité exécutif, ancien président |
Fondation internationale coréenne du travail |
|
M. Kim, Woo-Joong: |
président du groupe Daewoo |
M. Koo, Ul-Hoe: |
secrétaire général |
Bureau exécutif |
|
M. Lee Nam-Soon |
(secrétaire général de la Fédération des syndicats coréens) |
M. Choo, Won-Suh |
(président de la Fédération des syndicats des travailleurs des milieux bancaires et financiers) |
M. Kang, Sung-Chun |
(président de la Fédération des travailleurs des transports et de l'automobile) |
M. Cho, Nam-Hong |
(vice-président de la Fédération des employeurs coréens) |
M. Kim, Hee-Chull |
(président de la Compagnie Byuck San) |
M. Woo, Sung |
(sous-ministre au ministère du Travail) |
M. Park, Jeang-Kyu |
(directeur général, Bureau de la coopération internationale du travail du MOL) |
Mme Song, Kyung-Jin |
(directeur, Département de la coopération internationale) |
Annexe II
Membres de la Commission tripartite
Président:
M. Han, G.O., vice-président, Congrès national pour de nouvelles politiques (NCNP)
Secrétaire exécutif:
M. Cho, S.J., député à l'Assemblée nationale, NCNP
Représentants des travailleurs:
M. Park, I.S., président de la Fédération des syndicats croéens (FKTU)
M. Bae, S.B., premier vice-président (président ad-intérim), Confédération des syndicats coréens (KCTU)
Représentants des employeurs:
M. Choi, J.H., président, Fédération des industries coréennes
M. Kim, C.S., président, Fédération des employeurs coréens
Représentants du gouvernement:
M. Lim, C.Y., Vice Premier ministre et ministre des Finances et de l'Economie
M. Lee, K.H., ministre du Travail
Assemblée nationale (partis politiques):
M. Lee, G.K., député de l'Assemblée natiionale, Libéraux démocrates unis (ULD)
M. Chung, S.G., député à l'Assemblée nationale (NCNP)
M. Lee, K.H., député à l'Assemblée nationale, Grand parti national (GNP)
Annexe III
Information fournie par la KCTU sur la situation générale
des syndicalistes emprisonnés, 1988-1997
Nombre total de syndicalistes emprisonnés = 2 484.
Nombre total de syndicalistes emprisonnés
Année |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Nombre |
80 |
611 |
492 |
515 |
275 |
46 |
161 |
170 |
95 |
35 |
Cas no 1938
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la Croatie
présentée par
l'Union des syndicats autonomes de Croatie
Allégations: ingérence dans les activités syndicales
et les biens syndicaux
161. Dans une communication en date du 4 septembre 1997, l'Union des syndicats autonomes de Croatie (UATUC) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement de la Croatie.
162. En réponse à ces allégations, le gouvernement a fourni des informations et observations dans une communication en date du 29 octobre 1997.
163. La Croatie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
164. Dans sa communication en date du 4 septembre 1997, l'Union des syndicats autonomes de Croatie (UATUC) allègue qu'en raison de l'adoption le 18 juin 1997 de la loi sur les associations, qui traite notamment de la répartition des biens syndicaux, le gouvernement a violé les principes de liberté syndicale en s'ingérant dans les activités syndicales et les biens syndicaux.
165. L'organisation plaignante note que les syndicats ne sont pas visés par la loi sur les associations, sauf au titre de l'article 38 intitulé «Biens des organisations sociales». L'alinéa 4 de l'article 38 autorise l'utilisation des biens immeubles par les associations qui ont succédé légalement aux anciennes organisations sociales qui avaient le droit de gérer ou d'utiliser ces biens. Ces associations ne sont toutefois pas autorisées à louer ni vendre ces biens ni à en disposer. Au titre de l'alinéa 5, les dispositions de l'alinéa 4 sont applicables spécifiquement aux biens immobiliers que l'Union des syndicats autonomes de Croatie et les syndicats enregistrés comme organisations sociales étaient autorisés à gérer ou utiliser. L'alinéa 6, qui constitue la principale cause de préoccupation de l'organisation plaignante, stipule ce qui suit:
Les syndicats visés à l'alinéa 5 du présent article sont autorisés à conclure un accord, dans les 180 jours suivant la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sur la méthode de répartition des biens immobiliers visés à l'alinéa 5 de cet article. Chaque syndicat deviendra propriétaire des biens immobiliers qui lui seront confiés au titre de l'accord. Si les syndicats ne parvenaient pas à un accord sur la répartition de ces biens immobiliers dans les six mois, lesdits biens deviendront, à la date d'expiration du délai, propriété de la République de Croatie, alors que le gouvernement de la République de Croatie ou un ministère que celui-ci aura choisi transférera, sur la base des critères définis par le Parlement de la République de Croatie, les droits de propriété de ces biens immobiliers aux syndicats visés à l'alinéa 4 du présent article dans un délai d'un an à partir de la date de définition des critères par le Parlement.
166. D'après l'alinéa 9 de l'article 38, les syndicats enregistrés en tant qu'organisations sociales jusqu'à l'entrée en vigueur du Code du travail sont tenus de soumettre au gouvernement, dans un délai de 60 jours à partir de la date d'entrée en vigueur de la loi sur les associations, la liste de tous les biens immobiliers qu'ils sont autorisés à gérer ou utiliser. Faute de quoi, conformément à l'alinéa 10, ils perdent le droit de propriété sur ces biens immobiliers au titre des alinéas 3 et 6 de l'article 38. L'alinéa 11 a trait aux éléments d'actifs mobiliers et stipule que les anciennes organisations sociales autorisées à utiliser ou gérer ces éléments en deviennent propriétaires le jour de l'entrée en vigueur de la loi.
167. L'organisation plaignante avance que par le biais de la loi sur les associations, l'objectif du gouvernement est de nationaliser temporairement les biens privés des syndicats qui avaient été acquis avec les cotisations des membres et les contributions volontaires avant le début de la deuxième guerre mondiale. Elle note en outre que, sous le régime socialiste, la propriété a été d'abord traitée comme un bien social et que, par la suite, elle est devenue légalement bien social. Toutefois, avant le régime socialiste, la propriété avait été enregistrée comme propriété privée des syndicats. Si le nombre de propriétés concernées est relativement faible (une vingtaine de bâtiments ou de bureaux syndicaux), celles-ci sont néanmoins essentielles pour la survie et la liberté d'activité des syndicats. L'organisation plaignante avance que toute tentative de l'Etat en vue de retirer ces biens, même de manière temporaire, constitue une violation flagrante des conventions nos 87 et 98, de la Constitution de la Croatie et du Code du travail.
168. L'organisation plaignante s'inquiète particulièrement de l'alinéa 6 de l'article 38 qui accorde aux syndicats six mois seulement pour parvenir à un accord sur la répartition des biens. En l'absence d'accord, ceux-ci sont retirés aux syndicats et deviennent propriété de l'Etat jusqu'à ce qu'ils soient rendus aux syndicats selon des critères que le Parlement devra définir. Si le texte de loi prévoit la répartition des biens dans un délai d'un an à partir de la date de définition des critères, il ne donne aucun calendrier au Parlement pour la définition des critères de sorte qu'il est possible de retarder indéfiniment la restitution des biens. D'après l'organisation plaignante, cette situation pourrait engendrer des conflits entre les syndicats et par là affaiblir le mouvement syndical, pousser les médias sous contrôle du gouvernement, à discréditer les syndicats et entraîner un renforcement des syndicats sous la domination des autorités ou des employeurs. La loi ne prévoit pas non plus de critères clairs de répartition. L'organisation plaignante émet l'hypothèse que l'intention du gouvernement est de définir, par l'intermédiaire du Parlement, ses propres critères pour la répartition des biens syndicaux et de ne restituer ceux-ci qu'aux syndicats dominés par les autorités ou les employeurs.
169. L'organisation plaignante souligne qu'on peut douter des véritables motifs du gouvernement à prendre la loi sur les associations, compte tenu que le gouvernement est conscient du fait que les trois confédérations syndicales croatiennes (l'Union des syndicats autonomes de Croatie, l'Association croatienne des syndicats et la Confédération des syndicats indépendants de Croatie) sont parvenues à un accord le 18 mai 1993, sous les auspices de la Confédération européenne des syndicats, en vue de lancer le processus de répartition des biens syndicaux. Cet accord prévoit notamment un moratoire de deux ans pour la répartition des biens syndicaux suivi de la conclusion d'un nouvel accord mettant au point la répartition définitive, conformément aux critères qui auront été convenus. Lors de son congrès extraordinaire tenu le 29 mars 1996, l'Union des syndicats autonomes de Croatie a adopté une déclaration encourageant la répartition des biens syndicaux en Croatie.
170. Le 14 mai 1997, l'Union des syndicats autonomes de Croatie a transmis au gouvernement les amendements proposés au projet de loi sur les associations demandant que les syndicats en soient exclus. Le même jour, le Conseil de l'UATUC a envoyé au Premier ministre et aux membres du Parlement une lettre exposant une proposition de répartition des biens syndicaux. Les amendements proposés ont été rejetés et la loi a été adoptée malgré les objections formulées par de nombreuses organisations syndicales étrangères, y compris la Confédération internationale des syndicats libres et la Confédération européenne des syndicats.
171. Le 29 juillet 1997, l'organisation plaignante a présenté une requête devant la Cour constitutionnelle de la République de Croatie visant à engager une procédure de mise en cause de la constitutionnalité de l'article 38, alinéas 5, 6, 9 et 10, de la loi sur les associations. D'après l'organisation plaignante, la cour a repoussé l'ouverture de la procédure.
B. Réponse du gouvernement
172. En réponse à ces allégations, le gouvernement, dans sa communication du 29 octobre 1997, note qu'au cours de la période allant de 1991 à la promulgation de la loi sur les associations le gouvernement ne souhaitait en aucune manière influencer la répartition des biens sur lesquels les anciennes organisations sociopolitiques -- Confédération des syndicats de Croatie et syndicats enregistrés comme organisations sociales -- avaient un droit de disposition ou d'utilisation mais aucun droit de propriété jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur le travail.
173. Le gouvernement explique qu'en République de Croatie on compte 23 fédérations ou confédérations enregistrées et environ 180 syndicats qui ne sont pas tous affiliés à des organisations centrales. Selon le gouvernement, tous les syndicats se sont efforcés dans des négociations avec l'UATUC de régler la question de la répartition des biens syndicaux, et des procès ont été intentés à ce sujet. La question n'ayant pas été réglée, le gouvernement estime que certains syndicats qui n'ont pas l'usage des biens en question se trouvent défavorisés; ces organisations sont d'avis qu'on les empêche d'être sur un pied d'égalité avec les syndicats qui utilisent les biens et disposent donc d'une base économique plus solide. Ils ont exercé des pressions sur le gouvernement et le Parlement pour que ceux-ci interviennent et règlent la question.
174. De ce fait, le gouvernement a promulgué l'article 38 de sa loi sur les associations. Le gouvernement ne souhaitant pas décider immédiatement de la répartition des biens, la loi prévoit un délai de 180 jours pendant lequel les syndicats devront négocier entre eux. S'ils se mettent d'accord, la propriété des biens sera telle que décidée par les négociations. Si les syndicats ne parviennent pas à un accord, et dans ce cas seulement, le Parlement décidera des conditions de transfert de la propriété.
175. Que la répartition des biens et la décision en matière de propriété soient déterminées par le biais de négociations ou dans les conditions décidées par le Parlement, les syndicats sont autorisés, selon la déclaration du gouvernement, à continuer à faire usage des biens afin que leurs activités n'en soient pas gênées. La répartition des biens permettra à d'autres syndicats, qui jusqu'à présent n'ont pu en faire usage, de fonctionner sur un pied d'égalité.
176. En conclusion, le gouvernement estime que, l'Union des syndicats autonomes de Croatie ayant demandé a la Cour constitutionnelle de statuer sur la constitutionnalité de l'article 38 de la loi sur les associations, il ne souhaite pas préjuger de la décision de la Haute Cour.
C. Conclusions du comité
177. Le comité note que les allégations de violation de la liberté syndicale sont liées dans le cas présent à la promulgation récente de la loi sur les associations qui prévoit la répartition par le gouvernement des biens immobiliers entre les syndicats si ceux-ci ne parviennent pas à un accord. L'organisation plaignante avance qu'il s'agit d'une ingérence illégale dans les activités syndicales et les biens syndicaux.
178. Premièrement, pour ce qui est de la remarque du gouvernement qui indiquait que, la Cour constitutionnelle étant saisie de la question, il ne veut pas préjuger de la décision, le comité rappelle que, si le recours à la procédure judiciaire interne, quel qu'en soit le résultat, constitue un élément qui doit certes être pris en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, quatrième édition, 1996, annexe 1, paragr. 33.]
179. Quant au fond du cas, le comité note que, d'après l'organisation plaignante, cette affaire concerne des biens immobiliers qui appartenaient aux syndicats avant la deuxième guerre mondiale. Ils sont par la suite devenus propriété sociale, les syndicats enregistrés comme organisations sociales ayant sur ces biens un droit d'utilisation et de disposition mais non de propriété. La répartition et la propriété de ces biens sont maintenant régies par la loi sur les associations qui prévoit que les syndicats devront parvenir à un accord dans un délai de six mois, faute de quoi ces biens immobiliers deviendront propriété de la République de Croatie. Dans cette éventualité, la législation prévoit que le Parlement devra définir des critères de répartition et que le gouvernement sera alors chargé de transférer la propriété des biens aux syndicats dans un délai d'un an.
180. Le comité note en outre que la question de la répartition des biens autrefois propriété des syndicats préoccupe depuis quelque temps le mouvement syndical croate. Des négociations ont été entamées entre trois confédérations en 1993 mais aucun accord définitif ne semble avoir été conclu; toutefois, l'organisation plaignante a adopté une «déclaration sur les biens syndicaux» encourageant la répartition de ces biens et a présenté une proposition s'y rapportant au gouvernement.
181. Concernant la répartition et la propriété des biens anciennement biens privés des syndicats, le comité rappelle que le principe général à appliquer dans des situations semblables est que les biens doivent être placés provisoirement en dépôt et répartis, en définitive, entre les anciens membres de l'organisation propriétaire ou transférés à l'organisation qui lui succède, c'est-à-dire à l'organisation ou aux organisations qui poursuivent les buts pour lesquels les syndicats dissous se sont constitués et les poursuivent dans le même esprit. [Voir Recueil de décisions, op. cit., paragr. 684.] Toutefois, le comité note que plus de cinquante années se sont écoulées depuis la date à laquelle les biens en question appartenaient aux syndicats. Le comité reconnaît que ce délai pourrait entraîner un certain nombre de difficultés dans la répartition des biens. [Voir cas no 1869 (Lettonie), 308e rapport, paragr. 481 à 500.] Il rappelle qu'il appartient au gouvernement et aux syndicats de coopérer pour parvenir à un arrangement respectant les principes de liberté syndicale, et acceptable par les parties concernées, afin que les syndicats puissent mener à bien leurs activités en pleine indépendance et sur un pied d'égalité.
182. Le comité note que, dans le cas présent, la décision relative à la répartition des biens appartenant autrefois aux syndicats a été, dans un premier temps, laissée à la négociation des syndicats concernés. Il note que la question de la répartition et de la propriété de ces biens préoccupe les syndicats depuis un certain nombre d'années et que trois confédérations au moins, y compris l'organisation plaignante, se sont efforcées, apparemment sans succès, de parvenir à un accord concernant la répartition des biens depuis 1993. Toutefois, compte tenu de la complexité de la question et des difficultés qui pourraient se poser en raison du nombre important de syndicats concernés, dont certains ne sont pas affiliés aux confédérations qui se sont efforcées de parvenir à un accord, le comité estime que la période de négociation de six mois prévue par la loi pourrait ne pas être suffisante. Il demande donc au gouvernement de prolonger ce délai si aucun accord n'est conclu dans les six mois afin que les parties concernées bénéficient de chances convenables de parvenir à un accord, et de le tenir informé de l'évolution de la situation.
183. Le comité prend note des préoccupations exprimées par l'organisation plaignante en ce qui concerne l'absence de critères prévus par la loi au cas où les syndicats ne pourraient pas parvenir à un accord et l'absence de délai pour l'établissement de ces critères, de même que l'assurance donnée par le gouvernement selon lequel, au cas où le Parlement doive fixer des critères de division, les syndicats auront le droit de continuer à utiliser les biens afin que leurs activités ne soient pas gênées en attendant la décision finale en matière de propriété. Le comité espère que le gouvernement fixera les critères en consultation avec les syndicats concernés et établira un délai précis et raisonnable pour la répartition des biens, une fois achevée la période de négociation; il demande également à être tenu informé de l'évolution de la situation à cet égard.
184. Enfin, notant que les points soulevés dans ce cas sont soumis à la Cour constitutionnelle, le comité demande au gouvernement de lui transmettre une copie de la décision dès que celle-ci aura été rendue.
Recommandations du comité
185. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1933
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Danemark
présentée par
l'Association des conducteurs de Århus
Allégations: protection insuffisante
contre la discrimination antisyndicale
186. Dans une communication datée du 9 juillet 1997, l'Association des conducteurs de Århus a soumis une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Danemark.
187. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 12 janvier 1998.
188. Le Danemark a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations de l'organisation plaignante
189. Dans sa communication datée du 9 juillet 1997, l'Association des conducteurs de Århus a soumis une plainte contre le gouvernement du Danemark pour violation des conventions nos 98 et 135.
190. La plainte a trait au licenciement en 1996 de M. Louie Andersen de son emploi auprès de Århus Renholningsselkab. L'organisation plaignante explique, pour exposer le contexte général, que la municipalité de Århus a conclu un contrat de vingt ans avec la société privée Århus Renholningsselkab pour le ramassage des ordures.
191. En automne 1995, Århus Renholningsselkab et la municipalité de Århus ont entrepris un projet en vue de la mise en place d'un nouveau système de ramassage des ordures appelé «Système 2000». Dans le cadre de ce projet, un dirigeant de district de Århus Renholningsselkab a convenu avec trois employés du district 66 qu'ils réuniraient des documents sur des irrégularités commises dans le district en prenant des photographies. Cet accord est devenu effectif le 15 novembre 1995 et est resté en vigueur jusqu'au 4 décembre 1995, moment auquel les employés en question ont informé Århus Renholningsselkab que leur représentant de travailleurs, M. Louie Andersen, leur avait donné l'ordre de ne plus réunir des documents car il souhaitait discuter de cette affaire au cours de la réunion des représentants des travailleurs. Lors de cette réunion, tenue le 5 décembre 1995, M. Andersen a déclaré qu'il n'était pas satisfait du système.
192. Le 28 novembre 1995, l'inspection du travail de la région de Århus a donné, en vertu de la loi danoise sur l'environnement de travail, l'ordre à Århus Renholningsselkab de prendre des mesures adéquates pour assurer la sécurité et la santé des travailleurs durant le vidage des poubelles. Cette directive est devenue effective le ler janvier 1996, et a fait l'objet d'une discussion lors de la réunion du Comité de sécurité de Århus Renholningsselkab le 7 décembre 1995, au cours de laquelle il a été décidé de prendre note de ladite directive.
193. Dans une lettre du 12 décembre 1995, Århus Renholningsselkab a par conséquent informé les employés que la directive devait être respectée à partir du 1er janvier 1996, et que tout refus de se conformer à cette directive impliquerait la cessation immédiate du contrat de travail.
194. Le 19 décembre 1995, les équipes ont signalé à la société que 170 poubelles n'avaient pas été vidées parce que les employés avaient observé la directive de l'inspection du travail, ce qui signifiait en fait que la durée du travail prévue par la convention collective applicable n'était plus suffisante en raison de la capacité réduite des équipes. Århus Renholningsselkab a alors demandé aux employés d'achever le travail, ce qu'ils refusèrent de faire.
195. Par la suite, une conversation téléphonique entre M. Allan Larsen de Århus Renholningsselkab et le représentant des travailleurs, M. Andersen, devait révéler que les employés avaient discuté de la question avec M. Andersen et que ce dernier avait conseillé aux employés de ne pas terminer le travail. Le lendemain, le 20 décembre 1995, vers 14 h 20, l'équipe a signalé à la société que le travail journalier habituel ne pouvait être achevé.
196. Après une réunion qui eut lieu entre Århus Renholningsselkab, M. Andersen et son adjoint, Gert Jensen, la société donna l'ordre aux éboueurs d'achever le travail qu'ils avaient refusé de faire.
197. Par la suite, Århus Renholningsselkab a allégué que M. Andersen, tant durant la réunion dans le bureau de M. Larsen que directement devant les employés, avait donné aux employés l'ordre de ne pas terminer le travail parce que ce travail n'était pas prévu par une convention collective. La société a par conséquent demandé à l'Association des conducteurs d'engager des procédures d'arbitrage afin qu'une décision soit prise au sujet du licenciement de M. Andersen.
198. Le 22 janvier 1996, la cour d'arbitrage a décidé que Århus Renholningsselskab avait le droit de licencier M. Andersen, en constatant, entre autres, que ce dernier avait activement empiété sur le droit de l'employeur de réglementer l'exécution du travail.
199. Selon l'organisation plaignante, le problème particulier dans ce cas est de savoir si les conseils donnés par M. Andersen à ses collègues allaient au-delà des activités légitimes d'un représentant des travailleurs. D'une part, il y a l'intérêt de Århus Renholdningsselkab de défendre le droit que lui confère la loi danoise de décider de l'exécution du travail. D'autre part, il y a le droit légitime des travailleurs d'être informés par le représentant des travailleurs de leurs droits et obligations découlant de la convention collective, particulièrement dans les circonstances données, puisqu'en vertu d'une directive de l'inspection du travail un travail supplémentaire devait être effectué et qu'il y avait lieu de douter qu'un tel travail fût prévu par la convention collective en question.
200. De plus, l'organisation plaignante a exprimé son regret que la décision de la cour d'arbitrage n'indique pas les limites de la liberté d'expression de M. Andersen, et ne contribue par conséquent pas à clarifier les règles applicables; au contraire, cette décision n'a eu pour effet que d'accroître l'incertitude quant à l'issue de cas futurs.
201. L'organisation plaignante allègue par conséquent que la décision de la cour d'arbitrage n'implique pas que les conventions collectives en question offraient à M. Andersen une protection efficace contre la discrimination antisyndicale.
202. En ce qui concerne la convention no 135, l'organisation plaignante allègue qu'un exposé détaillé des motifs de la décision est d'une importance vitale pour une protection efficace des procédures judiciaires dans les cas de licenciements de représentants des travailleurs, étant donné qu'une telle protection n'est pas assurée si les règles applicables ne peuvent pas être connues et prévues.
203. L'organisation plaignante ajoute que la liberté d'expression de M. Andersen a également été violée et elle conclut qu'un représentant des travailleurs a pour droit fondamental d'informer ses collègues du contenu de la convention collective en vertu de laquelle ils effectuent leur travail, et qu'il y a donc eu une violation de la Constitution de l'OIT et des droits syndicaux fondamentaux.
B. Réponse du gouvernement
204. Dans sa communication datée du 12 janvier 1998, le gouvernement déclare que Århus Renholningsselkab avait l'intention de licencier le représentant des travailleurs, M. Andersen, à la fin de décembre 1995, en raison de son rôle dans les arrêts de travail qui avaient eu lieu durant ce mois. La procédure spéciale pour le licenciement d'un représentant des travailleurs a été engagée et, comme les deux parties n'ont pas pu se mettre d'accord sur le fait qu'il y avait des raisons impératives de licencier le représentant des travailleurs, la cas a été soumis à un arbitrage du travail. La cour d'arbitrage a déclaré dans sa sentence du 22 janvier 1996 que Louie Andersen avait incontestablement manqué gravement à ses obligations de représentant des travailleurs et qu'elle était arrivée à la conclusion que son employeur -- Århus Renholningsselkab -- était en droit de le licencier pour des raisons impératives.
205. Au Danemark, il n'y a pas de législation relative aux représentants des travailleurs. Les règles applicables aux représentants des travailleurs, y compris en ce qui concerne leur protection spéciale contre un licenciement, sont énoncées dans les conventions collectives, et sont complétées dans certains cas par des dispositions de la Convention générale. Le fait que les règles concernant les représentants des travailleurs soient basées exclusivement sur des accords conclus entre les partenaires sociaux est une tradition qui est presque aussi ancienne que le système de négociation collective.
206. Aujourd'hui, pratiquement toutes les conventions collectives contiennent des règles concernant les représentants des travailleurs, mais ces règles ont également trait à l'élection, à l'éligibilité et aux tâches des représentants des travailleurs. Les représentants des travailleurs bénéficient d'une protection spéciale contre les licenciements qui va au-delà de la protection contre les licenciements dont jouissent les autres employés. La règle principale est qu'un représentant des travailleurs ne peut être licencié que pour des raisons impératives. Le licenciement ne devient effectif que lorsque les organisations ont eu la possibilité de le soumettre à des procédures spéciales de règlement des conflits. Il découle qu'une rupture du contrat de travail d'un représentant des travailleurs n'est possible qu'au moment où ces procédures sont terminées, à moins que le licenciement soit dû à l'absence ou à l'insuffisance de travail.
207. Dans le présent cas, la cour d'arbitrage a exposé les faits comme suit:
a) Projet pilote pour le ramassage des ordures ménagères
208. Le 5 décembre 1995, M. Andersen a arrêté un projet pilote qui faisait partie de la mise en place d'un nouveau système pour le ramassage des ordures. Il semble notamment, d'après le procès-verbal d'une réunion avec la direction qui a été organisée le lendemain -- le 5 décembre 1995 --, que la direction n'a pas pu accepter cette démarche de M. Andersen. La direction était d'avis que le représentant des travailleurs aurait du contacter la direction s'il était mécontent, et cette dernière aurait alors pu interrompre le travail. Il semble par ailleurs que ce soit la deuxième fois en peu de temps que le représentant des travailleurs ait interrompu le déroulement des opérations de travail. De plus, la direction avait informé M. Andersen qu'elle estimait qu'il s'agissait d'un problème grave qui pourrait avoir des conséquences s'il devait se poser à nouveau.
b) Directive du service de l'environnement du travail
209. Le 28 novembre 1995, le service régional de l'environnement du travail a émis une directive à l'endroit de la société lui demandant de prendre des mesures pour assurer un ramassage sûr et adéquat des poubelles en plastique pour que les employés ne soient pas exposés à des efforts corporels nocifs. Cette directive a pris effet le ler janvier 1996, et, lors de son examen par une réunion du Comité de sécurité tenue le 7 décembre 1995, il avait été décidé de respecter ladite directive. Le 19 décembre 1995, une des équipes devait encore procéder à 170 ramassages. La direction a demandé à l'équipe d'achever le travail, mais l'équipe a refusé de le faire. Au cours d'une conversation téléphonique ultérieure entre la direction et M. Andersen, il est apparu clairement que M. Andersen avait dit à l'équipe de ne pas terminer le travail.
210. De nouveau, le 20 décembre 1995, plusieurs équipes annoncèrent à la fin de la journée de travail normale que le travail n'était pas terminé. La direction a d'abord demandé aux employés de se rendre sur place et de terminer le travail, conformément aux dispositions relatives à l'exécution d'un travail rémunéré aux pièces énoncées dans la convention collective, mais ceux-ci refusèrent. Par la suite, la direction donna de nouveau aux employés l'instruction de terminer le travail, mais ceux-ci refusèrent à nouveau. Une fois ces instructions données, le représentant des travailleurs est intervenu et a stoppé l'exécution du travail. (Selon le gouvernement, il ressort des faits tels qu'ils sont décrits dans la sentence que les parties n'ont pas pu se mettre d'accord sur cette phase des événements.) Par lettres datées des 20 et 22 décembre 1995, la société a informé l'Association des conducteurs qu'elle considérait ce cas comme une violation de la convention collective en vigueur et qu'elle demandait que l'affaire soit traitée conformément aux procédures spéciales de règlement des conflits du travail. Le tribunal du travail a décidé par la suite que les arrêts du travail constituaient une violation de la convention collective.
c) Procédures de licenciement
211. Le 28 décembre, l'association des employeurs a demandé à «Specialarbejderforbundet» (l'organisation des employés et des représentants de travailleurs) d'engager des procédures au sujet du licenciement de M. Andersen. La raison du licenciement était que, les 20, 21 et 22 décembre 1995, le représentant des travailleurs avait dit aux employés de rentrer chez eux à 14 heures en dépit du fait que la direction eût donné aux employés l'instruction de terminer le ramassage journalier des ordures.
212. La sentence déclare que la durée du travail est normalement de 6 heures à 15 h 30, sauf, pour le vendredi, de 6 heures à 14 h 30. Si l'accomplissement du travail rend nécessaire une prolongation de la durée du travail au-delà de 15 h 30, et de 15 heures le vendredi, le bureau de la société doit en être informé une demi-heure à l'avance. La société estime qu'il ne fait pas de doute que les employés avaient pour tâche d'effectuer le travail qui leur incombait en vertu de la convention collective et que M. Andersen s'est ingéré dans ses prérogatives de gestion quand il a arrêté l'exécution du travail. La direction considère qu'en agissant ainsi il a commis une faute grave dans l'accomplissement de ses tâches de représentant des travailleurs.
213. D'après les déclarations du représentant des travailleurs, il semble qu'il ne considérait pas le travail comme étant prévu par la convention collective et que les employés n'avaient pas pour tâche de travailler plus de trente-sept heures par semaine.
214. Dans sa décision, la cour d'arbitrage est arrivée à la conclusion:
que M. Andersen s'était activement ingéré le 19 décembre dans le droit de gestion de l'employeur, ce qui avait eu
pour conséquence que l'équipe concernée n'avait pas terminé son travail ce jour-là;
que M. Andersen, par les déclarations relatives à la convention collective qu'il a faites durant la réunion avec ses
collègues le 20 décembre, avait directement influencé ces employés dans leur décision de ne pas travailler après 14
heures; et
que M. Andersen, l'après-midi du même jour, s'est activement opposé à l'ordre de la direction d'achever le travail.
La cour d'arbitrage a par conséquent décidé qu'il était coupable d'une faute flagrante dans l'accomplissement de ses
tâches de représentant des travailleurs et qu'il existait donc des raisons impératives de le licencier.
215. Dans le système danois, les organisations du marché du travail sont chargées de convenir des salaires et des conditions de travail, y compris des règles relatives aux représentants des travailleurs, et l'Etat a introduit une législation principalement en vue d'assurer un système de tribunaux impartiaux et indépendants pouvant assister les partenaires dans leur travail. D'après la tradition en matière de droit du travail au Danemark, le tribunal du travail prend d'abord connaissance des cas de violation des conventions collectives, mais les conflits relatifs à l'interprétation des conventions collectives sont réglés par un arbitrage du travail. Les parties concernées par un arbitrage du travail sont normalement les parties à la convention collective en question. Habituellement, deux arbitres sont désignés par chaque partie et un surarbitre neutre est également désigné conjointement par les parties. Le surarbitre désigné est souvent un juge de la Cour suprême danoise, et dans des cas particuliers les parties peuvent choisir d'élire plusieurs surarbitres. (Dans le présent cas, trois juges de la Cour suprême ont été désignés comme surarbitres.) La philosophie sous-jacente de cette composition du conseil d'arbitrage est que les partenaires sociaux eux-mêmes sont le mieux placés pour savoir comment leur convention collective devrait être interprétée. Si les membres du conseil d'arbitrage n'arrivent pas à un accord, le cas peut est tranché par le surarbitre neutre.
216. A la lumière de ce qui précède, le gouvernement est d'avis que les conseils et les activités de M. Andersen outrepassaient les limites des activités des représentants des travailleurs. M. Andersen était effectivement protégé par la convention collective ainsi que par les règles supplémentaires de règlement des conflits du travail et par la Convention générale conclue entre DA et LO.
217. M. Andersen n'a pas été licencié parce qu'il a donné des conseils sur l'interprétation de la convention collective à ses collègues, mais parce ce qu'il est intervenu directement et a incité ses collègues à ne pas respecter un ordre de terminer le travail journalier qui venait d'être donné par la direction. M. Andersen avait déjà été averti par la direction que, s'il cherchait par ses agissements à influencer ses collègues afin que ceux-ci n'effectuent pas le travail au lieu de se rendre lui-même à la direction pour négocier la question, des conséquences en résulteraient pour lui, si les faits devaient se répéter.
218. En conclusion, le gouvernement estime que les règles danoises sur la protection de la liberté syndicale et les représentants des travailleurs sont parfaitement conformes à ses obligations découlant de la convention no 98. M. Andersen a été licencié parce qu'il n'a pas cherché à régler le conflit sur l'interprétation de la convention collective par des procédures et un mécanisme institué pour régler de tels conflits -- avec l'assistance de son syndicat en cas de besoin. Il a, au contraire, convaincu activement ses collègues de ne pas faire le travail que la direction leur avait ordonné d'effectuer, ce qui constitue une raison impérative de licenciement.
C. Conclusions du comité
219. Le comité note que les allégations dans ce cas ont trait au licenciement d'un représentant des travailleurs en violation des principes de liberté syndicale relatifs à la protection contre la discrimination antisyndicale, de la liberté d'expression et d'une protection effective des représentants de travailleurs.
220. Selon les informations fournies par l'organisation plaignante et le gouvernement, il existe apparemment un accord général sur les éléments de fait du cas, à l'exception de la question de savoir si le représentant des travailleurs, M. Andersen, est intervenu et a stoppé l'exécution du travail quand la direction a donné pour la deuxième fois aux employés des instructions pour qu'ils achèvent le travail qu'ils n'avaient pas pu terminer le 20 décembre. Après l'échec des procédures de conciliation, le cas a été soumis à une cour d'arbitrage, conformément à la convention collective. En ce qui concerne la question de fait susmentionnée, la cour d'arbitrage a conclu que M. Andersen, par ses déclarations relatives à la convention collective faites au cours de la réunion avec ses collègues le 20 décembre, les a directement influencés dans leur décision de ne pas travailler après 14 heures, et qu'il s'est activement opposé à l'exécution de l'ordre d'achever le travail. La cour d'arbitrage a conclu qu'une telle action justifiait l'invocation de raisons «impératives» de licenciement aux termes de la convention collective en vigueur.
221. L'organisation plaignante affirme que M. Andersen n'exerçait que des activités légitimes d'un représentant des travailleurs quand il a émis des doutes quant à la question de savoir si le travail que l'on exigeait des employés était bien prévu par la convention collective. Le gouvernement relève l'objection de l'employeur qui fait valoir que M. Andersen n'a pas respecté les procédures spécifiques existantes pour l'interprétation des conventions collectives. Le gouvernement ajoute que le tribunal du travail a décidé par la suite que les arrêts du travail constituaient une violation de la convention collective.
222. Le comité note en outre que, au Danemark, il existe des mécanismes pour l'examen des cas de violation de conventions collectives, le tribunal du travail, et pour le règlement des conflits relatifs à l'interprétation de conventions collectives, l'arbitrage du travail. Lors de la constitution des cours d'arbitrage, chaque partie désigne un arbitre, puis elles désignent conjointement un surarbitre neutre. De plus, ces mécanismes ne sont pas seulement rendus applicables par les dispositions sur le règlement des conflits du travail, mais aussi par les conventions collectives du premier niveau et par la Convention générale entre DA et LO. Le comité doit par conséquent conclure qu'une protection suffisante contre la discrimination antisyndicale existe dans le mécanisme indépendant qui a été établi en consultation avec les partenaires sociaux, et confirmé par les conventions collectives, et que ce mécanisme a été utilisé correctement dans le présent cas. Le comité estime par conséquent que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
Recommandation du comité
223. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
Cas nos 1851 et 1922
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Djibouti
présentée par
-- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
-- la Coordination intersyndicale Union djiboutienne du travail/
Union générale des travailleurs de Djibouti (UDT/UGTD)
-- l'Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA)
-- l'Internationale de l'éducation (IE)
-- le Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et
-- le Syndicat des enseignants du primaire (SEP)
Allégations: arrestations, licenciements, suspensions et radiations de syndicalistes à la suite de grève, fermeture de locaux syndicaux
224. Le comité a examiné le cas no 1851 à deux reprises, à ses sessions de juin 1996 et de juin 1997. [Voir les rapports du comité approuvés par le Conseil d'administration à ses 266e et 269e sessions, mai-juin 1996 et 1997, au cours desquelles il a formulé des conclusions intérimaires, 304e rapport, paragr. 255 à 286, et 307e rapport, paragr. 253 à 272 respectivement.]
225. Le cas no 1922 présenté par l'Internationale de l'éducation (EI), le Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et le Syndicat des enseignants du primaire (SEP) est contenu dans une communication du 4 avril 1997.
226. Face à la gravité des allégations présentées dans ces deux cas, à sa session de mai-juin 1997, le Comité de la liberté syndicale a demandé au gouvernement d'accepter la visite sur place d'une mission de contacts directs. [Voir 307e rapport, paragr. 272.]
227. Le gouvernement ayant donné son consentement à la venue de la mission, dès le mois d'août 1997, pour qu'elle ait lieu au début de 1998, des dispositions ont été prises à cet effet. Le Directeur général a désigné le professeur Jean-Maurice Verdier, membre de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, comme son représentant pour effectuer cette mission, qui s'est tenue à Djibouti du 11 au 18 janvier 1998. Au cours de cette mission de contacts directs, le représentant du Directeur général était accompagné par Mme A.-J. Pouyat, haut fonctionnaire du Service de la liberté syndicale, ainsi que par Mme M. Guillio, chargée de programme, et de M. C. Kompier, expert associé pour les normes internationales du travail, au bureau de zone de l'OIT à Addis-Abeba. Ce bureau avait pris les contacts utiles pour assurer le bon déroulement de la mission. Le rapport de mission figure en annexe à la fin du présent rapport.
228. Djibouti a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Situation antérieure à la mission
229. Les allégations dans le cas no 1851 se référaient aux arrestations, licenciements massifs, suspensions et radiations de militants et de dirigeants syndicaux de nombreux secteurs d'activité (chemins de fer, aéroport, électricité, postes et télécommunications, santé, eau et enseignement) à la suite d'une grève de protestation déclenchée en septembre 1995 contre une loi de finance qui portait lourdement atteinte au niveau de vie des travailleurs. Par la suite, d'autres grèves déclenchées par les enseignants au cours de l'année 1996 pour protester contre les retards accumulés dans le paiement des arriérés de salaires avaient été à nouveau suivies d'arrestations et de licenciements massifs d'un très grand nombre d'enseignants (400 enseignants auraient été radiés par une note de service du ministère de l'Education et 180 instituteurs suppléants auraient été licenciés le 28 janvier 1996 pour avoir participé à une grève), ainsi que de la suspension puis de la radiation d'enseignants fonctionnaires dirigeants du SYNESED et de nouvelles arrestations contre une manifestation de solidarité des enseignants à l'égard des radiations de leurs camarades grévistes. Parallèlement, une organisation syndicale acquise à la cause du gouvernement, le Congrès djiboutien du travail (CODJITRA), a été créée et, en mai 1996, les locaux de l'Union générale des travailleurs de Djibouti (UGTD) ont été fermés par les forces de sécurité. En outre, les cotisations syndicales des syndicats de base (postes et télécommunications (OPT) et électricité (SEED)) ont été gelées, et l'avocat de la coordination intersyndicale UDT/UGTD, Maître Mohamed Aref, a été suspendu de ses fonctions et inculpé.
230. Le cas no 1922 présenté par l'Internationale de l'éducation (EI), le Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et le Syndicat des enseignants du primaire (SEP) se rapportait également aux mesures de représailles antisyndicales qui avaient frappé des enseignants au cours des événements qui s'étaient déroulés en 1995, en 1996 et en 1997.
231. Lors de son dernier examen du cas no 1851, le comité avait regretté que le gouvernement n'ait pas fourni de réponse concrète et détaillée aux allégations, ce d'autant plus que les mesures répressives qui avaient frappé les militants et les dirigeants syndicaux n'avaient pas été levées, mais qu'au contraire elles s'étaient aggravées. Il avait demandé instamment au gouvernement de libérer les syndicalistes arrêtés pour fait de grève en août et en septembre 1995 qui seraient encore détenus et dont il avait donné la liste à l'annexe I de son rapport, de le tenir informé du sort des dirigeants qui feraient l'objet de poursuites judiciaires et de communiquer le texte des jugements rendus. Il avait aussi demandé au gouvernement de fournir des informations sur les licenciements, suspensions et radiations de grévistes en 1995, 1996 et 1997, dont il avait donné la liste à l'annexe II de son rapport, et l'avait exhorté à prendre des mesures pour lever immédiatement les sanctions massives qui avaient frappé les grévistes et pour les réintégrer dans leur poste de travail. Il avait également demandé au gouvernement de rétablir les dirigeants syndicaux dans leurs fonctions, de mettre un terme à la fermeture du local de l'UGTD par les forces de l'ordre, estimant que cette mesure constitue une sérieuse entrave à l'exercice des droits syndicaux, et de lever le gel des cotisations syndicales du Syndicat des employés de l'Office des postes et télécommunications (OPT) et du Syndicat des employés de l'électricité de Djibouti (SEED). Par ailleurs, il avait demandé au gouvernement de fournir ses commentaires au sujet de la création alléguée d'une organisation syndicale acquise à sa cause, le Congrès djiboutien du travail (CODJITRA), de la radiation alléguée de cinq dirigeants d'un syndicat d'enseignants en février 1997, ainsi que de la déportation de 500 personnes dans un camp suite à une manifestation, et de la suspension de l'avocat de la coordination intersyndicale UDT/UGTD, Maître Mohamed Aref.
B. Conclusions du comité
232. Compte tenu de ce que les informations recueillies par le représentant du Directeur général au cours de la mission de contacts directs figurent en annexe au présent rapport, le comité se propose de formuler directement ses conclusions sur les divers aspects des cas relatifs à Djibouti actuellement en instance.
233. Le comité estime, tout d'abord, que le rapport détaillé du représentant du Directeur général prouve l'utilité de telles missions pour un examen approfondi et objectif des plaintes.
234. Le comité note avec intérêt l'esprit de coopération dont a fait preuve le gouvernement dans cette affaire et les facilités qui ont été accordées sans réserve à la mission. Il exprime le ferme espoir que le gouvernement continuera à agir dans le même esprit. Le comité relève notamment, avec satisfaction, que la mission a pu obtenir toutes les informations désirées et rencontré toutes les personnes avec lesquelles elle souhaitait s'entretenir pour le bon accomplissement de sa tâche.
235. Sur le fond des affaires en instance, s'agissant des arrestations et des détentions de syndicalistes, le comité note avec intérêt qu'il n'y a plus actuellement de personnes détenues pour des faits intéressant l'exercice de la liberté syndicale ou le droit de grève, ni de poursuites judiciaires pour les mêmes raisons, sous réserve d'un appel interjeté par le secrétaire général adjoint de l'UGTD concernant sa condamnation à trois mois de prison et 60 000 francs d'amende pour outrage. L'intéressé ayant fait appel de sa condamnation n'a toutefois pas exécuté sa peine. Quant aux poursuites judiciaires intentées contre les enseignants du secondaire, dirigeants du SYNESED, elles ont été abandonnées. Il n'en demeure pas moins que de très nombreuses personnes ont été mises en garde à vue dans le centre de détention de Nagad pendant 72 heures à la suite de mouvements de grève ou de manifestations de solidarité en 1995, 1996 et 1997 pour, selon les autorités gouvernementales, trouble de l'ordre public, qu'elles n'ont été libérées souvent qu'à la suite de l'intervention personnelle du ministre de l'Education nationale et qu'un dirigeant syndical a été condamné à trois mois de prison et à une amende pour outrage dès la première grève de 1995, sans toutefois qu'il ait exécuté sa peine.
236. Dans ces conditions, le comité rappelle l'importance qu'il attache au droit de grève qui est un corollaire indissociable du droit d'association syndicale protégé par la convention no 87. Il souligne que l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l'exercice d'activités syndicales légitimes, même si c'est pour une courte période, constituent une violation des principes de la liberté syndicale [voir paragr. 70, Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996] et que les condamnations pénales de dirigeants syndicaux pour le simple fait d'avoir appelé leurs militants à un mouvement de grève légitime ne sont pas compatibles avec la liberté syndicale. Le comité demande au gouvernement, à l'avenir, de respecter ces principes.
237. Au sujet des mesures de licenciements massifs qui ont frappé les grévistes dans l'enseignement, le comité note également que les 400 radiations d'instituteurs alléguées par la CISL et la coordination intersyndicale UDT/UGTD concernaient en réalité des chômeurs utilisés en remplacement temporaire d'enseignants grévistes recrutés durant la grève pour assurer la garde des enfants qui n'ont pas été maintenus en emploi. Il note aussi que la plupart des 180 instituteurs grévistes licenciés après les grèves ainsi que les grévistes d'autres secteurs de l'activité économique ont été repris à la satisfaction des organisations syndicales. Le comité observe cependant que, selon les représentants des travailleurs, ces réintégrations dans l'enseignement, notamment, sont intervenues après que les intéressés aient dû s'engager par écrit à ne pas adhérer à un syndicat, ce que les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont fermement nié. Sur ce dernier point, le comité insiste sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel les déclarations de loyauté ou autre engagement de même nature ne devraient pas être imposées pour obtenir la réintégration dans l'emploi, et il insiste auprès du gouvernement pour que soient abrogées de telles déclarations.
238. Le comité observe par ailleurs avec un profond regret que, d'après les informations recueillies par la mission, la totalité des hauts dirigeants de la coordination intersyndicale UDT/UGTD et plusieurs hauts dirigeants du SYNESED et du SEP sont toujours privés de leur emploi, ou même radiés pour cinq d'entre eux, de la fonction publique, à la suite des actions de grève et des manifestations pacifiques de 1995, 1996 et 1997. De plus, le comité relève que les autorités gouvernementales du ministère de la Fonction publique ont déclaré à la mission que seuls les enseignants fonctionnaires en activité pouvaient appartenir aux deux syndicats d'enseignants, le SYNESED et le SEP. Force est donc de constater que les dirigeants syndicaux licenciés dans l'enseignement et que les fonctionnaires enseignants radiés de la fonction publique ainsi que les employés grévistes des chemins de fer, de l'aéroport, de l'électricité de Djibouti et de la poste ne sont plus reconnus par les autorités comme des dirigeants syndicaux élus susceptibles de défendre et de promouvoir les intérêts de leurs mandants. A ce sujet, le comité rappelle que la perte de qualité de syndicaliste résultant d'un licenciement pour fait de grève n'est pas conforme aux principes de la liberté syndicale. [Voir le cas no 1266 Burkina Faso, 246e rapport, paragr. 164.]
239. Le comité note que le gouvernement a déclaré que certains enseignants grévistes avaient quitté le pays, mais il a indiqué qu'il ne s'opposerait pas à la reprise comme contractuels des enseignants radiés s'ils en font la demande.
240. Le comité exprime le ferme espoir que le gouvernement remplira le calendrier de rencontres dont le début a été fixé lors de la réunion tenue au cours de la mission de contacts directs au ministère du Travail avec les organisations syndicales, en vue d'examiner les mesures à prendre pour que soient rapportés ou annulés les licenciements des dirigeants syndicaux licenciés et pour qu'ils soient réintégrés le plus rapidement possible dans leur poste de travail et dans leurs fonctions. Il s'agit en particulier de MM. Ahmed Djama Egueh, Aden Mohamed Abdou, respectivement président et secrétaire général de l'UDT, de MM. Kamil Diraneh Hared et Mohamed Doubad Wais, secrétaires généraux de l'UGTD, de M. Habib Ahmed Doualleh, secrétaire général du Syndicat des employés de l'électricité, M. Abdillahi Aden Ali, responsable de la coordination intersyndicale, ainsi que de trois syndicalistes des chemins de fer, MM. Houssein Dirieh Gouled, Ahmed Elmi Fod et Moussa Wais Ibrahim. Tous ces dirigeants et militants syndicaux ont été licenciés depuis le mois de septembre 1995 à la suite de la grève de protestation contre la politique économique et sociale du gouvernement, il y a deux ans et demi. Le comité invite également le gouvernement à tout mettre en œuvre pour que les cinq enseignants fonctionnaires titulaires de l'enseignement secondaire radiés de la fonction publique, en février 1997, et les deux enseignants du primaire révoqués en 1996, nommément désignés par les plaignants, soient réintégrés dans leur poste et dans leurs fonctions s'ils en font la demande.
241. Au sujet du gel des cotisations syndicales, le comité note avec intérêt que les banques qui détenaient les avoirs du Syndicat des employés de l'Office des postes et des télécommunications (OPT) et du Syndicat des employés de l'électricité de Djibouti (SEED) ont restitué les cotisations syndicales aux dirigeants de ces syndicats.
242. Au sujet de la création d'une organisation syndicale acquise à la cause du gouvernement, le Congrès djiboutien du travail (CODJITRA), le comité note que la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence internationale du Travail de juin 1997 a estimé à l'unanimité que les pouvoirs du délégué des travailleurs de Djibouti, M. Mohamoud Ali Boulaleh, secrétaire général du Congrès djiboutien du travail, désigné par arrêté gouvernemental no 97/086/CAB en tant que représentant des travailleurs de Djibouti à la Conférence internationale du Travail de juin 1997, devraient être invalidés. Elle indiquait notamment: «Les éléments dont dispose actuellement la commission indique que le délégué travailleur a été choisi au sein de l'organisation, étroitement liée au gouvernement, au détriment de l'organisation qui apparaît indiscutablement comme la plus représentative à Djibouti, en violation de l'article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l'OIT. (Compte rendu provisoire, 85e session, Genève 1997, VII D)». Dans le cas où existe une étroite relation entre un syndicat et les autorités publiques, le comité a toujours souligné l'importance qu'il attache à la résolution de 1952 concernant l'indépendance du mouvement syndical et a demandé instamment au gouvernement de s'abstenir de faire preuve de favoritisme ou, au contraire, de discrimination à l'égard d'un syndicat donné, et d'adopter une attitude neutre lorsqu'il traite avec les organisations d'employeurs et de travailleurs afin qu'elles soient toutes placées sur un pied d'égalité. [Voir op. cit., paragr. 305.]
243. S'agissant du local de l'UGTD fermé par les forces de l'ordre depuis le 7 mai 1996, le comité note avec satisfaction qu'au cours de la réunion tenue dans le bureau du ministre du Travail avec les représentants des organisations syndicales en présence de la mission le ministre du Travail a chargé le directeur du travail d'en remettre les clés au porte-parole de la coordination intersyndicale UDT/UGTD et que la remise a été effectuée le jour même, le 15 janvier 1998.
244. Toutefois, le comité observe avec préoccupation que, selon les informations recueillies par la mission auprès des représentants des travailleurs, le 7 juillet 1997, un huissier de justice et des policiers en uniforme ont forcé la porte du domicile privé du président de l'UDT, M. Egueh, également secrétaire général du Syndicat des employés de l'aéroport, et qu'ils ont emporté les archives syndicales de l'UDT, alors que la justice avait donné gain de cause à M. Egueh sur la question de son logement.
245. Le comité rappelle l'importance du principe de l'inviolabilité des biens syndicaux. Il attire en conséquence l'attention du gouvernement sur le fait que toute descente au siège d'un syndicat ainsi qu'au domicile de syndicalistes sans mandat judiciaire constitue une très grave violation de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 175.] Le comité invite le gouvernement à restituer au plus vite les archives syndicales de l'UDT et à le tenir informé des mesures prises à cet égard.
246. Au sujet de la suspension de Maître Aref, avocat des organisations syndicales, le comité observe que la version des plaignants et du gouvernement sont en partie contradictoires. D'après les informations recueillies par la mission, le gouvernement estime que Maître Aref a été suspendu pour des faits autres que la défense des intérêts des militants syndicaux. Il serait poursuivi pénalement pour s'être constitué défenseur d'une société de droit privé à Djibouti et de la partie adverse, une société de droit britannique dans un même procès. L'affaire le concernant devrait être jugée au mois de mars 1998. En attendant, le Barreau de Djibouti lui a interdit temporairement d'exercer la profession d'avocat. Maître Ali Dimi, bâtonnier de l'ordre des avocats de Djibouti, a fait état des mêmes causes pour la poursuite pénale. En revanche, les représentants des travailleurs contestent vigoureusement cette version des faits et estiment que Maître Aref fait l'objet de sanctions pour les avoir défendus et que, depuis lors, aucun avocat de Djibouti n'ose prendre la défense des syndicalistes, d'autant que les plaintes déposées par ces derniers auprès du ministère public restent sans suite. Selon le rapport d'une organisation de droits de l'homme adressé à la mission par Maître Aref, une réclamation purement disciplinaire avait été déposée par un cabinet d'avocats londonien en mars 1995, mais elle était restée sans suite pendant plus d'un an, après les explications fournies par Maître Aref au bâtonnier et au cabinet d'avocats londonien. Puis Maître Aref a été inculpé pour escroquerie le 23 janvier 1997 et cité à comparaître devant le tribunal correctionnel le 6 octobre 1997 sans avoir pu obtenir de précision sur les charges retenues contre lui. Parallèlement, le Conseil de l'ordre des avocats de Djibouti lui a interdit provisoirement d'exercer ses fonctions depuis février 1997, soit deux ans après la réclamation disciplinaire du cabinet britannique. Maître Aref a introduit un recours devant la Cour d'appel contre la décision d'interdiction provisoire d'exercer la profession d'avocat qui le frappe ainsi qu'un pourvoi devant la Cour suprême soulevant des moyens de nullité de la procédure pénale engagée contre lui. Les procédures pénales et disciplinaires engagées à son encontre auraient été menées dans des conditions contraires à la présomption d'innocence et au respect des droits de la défense, en vue de l'empêcher d'exercer son activité de défenseur en justice.
247. Le comité relève avec préoccupation que, selon les représentants des travailleurs rencontrés par la mission depuis que Maître Aref a fait l'objet de sanctions, aucun avocat à Djibouti n'ose prendre la défense des syndicalistes et que les plaintes déposées par ces derniers restent sans suite. Le comité insiste donc sur l'importance du principe selon lequel les garanties de procédure judiciaire régulière ne doivent pas seulement être exprimées dans la législation mais elles doivent être appliquées dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 107.] Le comité demande au gouvernement d'exercer la plus grande vigilance dans la promotion et la défense de la liberté syndicale et de prendre les mesures nécessaires pour que soient instruites les plaintes déposées par les organisations syndicales ou les syndicalistes ainsi que celles déposées par Maître Aref, et de communiquer le texte des décisions de justice rendues au sujet de la situation disciplinaire et pénale de Maître Aref, avocat défenseur des syndicalistes.
248. Le comité observe par ailleurs, d'après les informations recueillies par la mission, que la révision du Code du travail est actuellement en cours en consultation avec les représentants des employeurs. Le comité rappelle l'importance de la consultation de l'ensemble des partenaires sociaux, y compris des représentants des travailleurs, lors de l'élaboration des législations sociales et la disponibilité de l'assistance technique du BIT pour la révision de la législation du travail en cours.
249. Le comité a été informé que, depuis le retour de la mission, un Séminaire national tripartite sur la révision du Code du travail s'est tenu à Djibouti et qu'une représentante du Service des relations professionnelles du BIT a pu y participer. Le comité prend note de cette information avec intérêt.
250. De même que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans son observation de décembre 1997, le comité exprime le ferme espoir qu'une législation conforme aux principes de la liberté syndicale sera adoptée et que la révision en cours de la législation du travail permettra de modifier le décret du 10 septembre 1983 afin de circonscrire les larges pouvoirs du Président de la République de réquisitionner les fonctionnaires indispensables à la vie de la nation et au bon fonctionnement des services publics essentiels, aux cas dans lesquels, de l'avis des organes de contrôle, les restrictions, voire les interdictions, à l'exercice du droit de grève sont admissibles, à savoir à l'égard des fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, ou en cas de crise nationale aiguë, et de lever les restrictions relatives aux élections syndicales contenues dans l'article 6 du Code du travail qui réservent l'exercice des fonctions syndicales aux nationaux pour permettre aux étrangers d'accéder aux fonctions syndicales, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays afin d'assurer l'application de l'article 3 de la convention no 87.
Recommandations du comité
251. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Annexe
Rapport sur une mission de contacts directs
effectuée à Djibouti
(11-18 janvier 1998)
Par des communications datées des 19 septembre et 9 décembre 1995, et des 28 janvier et 12 mars 1996, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), l'intersyndicale, Union djiboutienne du travail/Union générale des travailleurs de Djibouti (UDT/UGTD), et l'Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA) ont présenté des plaintes en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de Djibouti (cas no 1851).
Sur la base des plaintes relatives au cas no 1851, des informations complémentaires envoyées par les organisations plaignantes en mars 1997 et des réponses écrites fournies par le gouvernement en février 1996 et mai 1997, le Comité de la liberté syndicale a examiné ce cas à deux reprises (en mai-juin 1996 et en mai-juin 1997) et abouti à chacune de ses réunions à des conclusions intérimaires (voir 304e rapport, paragr. 255 à 286, et 307e rapport, paragr. 253 à 272, approuvés par le Conseil d'administration à ses 266e et 269e sessions respectivement).
Par ailleurs, l'Internationale de l'éducation (EI) a présenté une autre plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de Djibouti, par une communication datée du 4 avril 1997 (cas no 1922).
A sa session de mai-juin 1997, le Comité de la liberté syndicale a demandé au gouvernement d'accepter la visite sur place d'une mission de contacts directs (voir 307e rapport, paragr. 272).
Dans une communication du 30 août 1997, le gouvernement a indiqué qu'il souhaitait que la mission de contacts directs concernant les cas nos 1851 et 1922 ait lieu au début de 1998. Le 10 décembre 1997, le ministre du Travail et de la Formation professionnelle a adressé une communication au Directeur général du BIT acceptant la venue de la mission de contacts directs dans le cadre des cas en instance devant le comité.
Le Directeur général a désigné le professeur Jean-Maurice Verdier, membre de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, pour effectuer cette mission qui a eu lieu du 11 au 18 janvier 1998. Le professeur Verdier était accompagné de Mme Pouyat, haut fonctionnaire du Service de la liberté syndicale, et de deux fonctionnaires du bureau du BIT à Addis-Abeba, Mme Martine Guilio, chargée de programme, et M. Coen Kompier, expert associé pour les normes internationales du travail, qui avaient pris les contacts nécessaires pour préparer la mission et en assurer le bon déroulement.
Le déroulement de la mission
Au cours de son séjour à Djibouti, la mission a eu des entretiens avec, entre autres personnalités, le ministre du Travail et de la Formation professionnelle, M. Mohamed Ali Mohamed, de hauts fonctionnaires des ministères du Travail, de la Justice, de l'Education nationale, de la Fonction publique, de hauts dirigeants représentant les travailleurs de la coordination intersyndicale, Union djiboutienne du travail/Union générale des travailleurs de Djibouti (UDT/UGTD), du Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et du Syndicat des enseignants du primaire (SEP), ainsi que de hauts dirigeants de l'Union syndicale interentreprises (USIE) et le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Djibouti, Maître Ali Dini.
La mission tient à souligner qu'elle a bénéficié de la plus grande coopération de toutes les personnes avec lesquelles elle s'est entretenue. Elle a pu accomplir sa tâche en toute liberté et en toute indépendance et a reçu du gouvernement de Djibouti toutes les facilités nécessaires à la meilleure réalisation de la mission.
Etat des cas en instance devant
le Comité de la liberté syndicale
S'agissant du cas no 1851, le comité avait noté que les allégations de fond faisaient état tout d'abord du fait que les deux centrales de travailleurs de Djibouti, regroupées en une intersyndicale, UDT/UGTD, avaient déclenché une grève en septembre 1995 pour protester contre un projet de loi de finances qui, selon les plaignants, avait un impact catastrophique sur le niveau de vie des travailleurs, ainsi que contre le refus du gouvernement de dialoguer avec les syndicats à propos de l'élaboration de cette loi. La grève aurait duré deux jours et elle aurait été suivie par plusieurs secteurs d'activité. Elle aurait eu pour conséquence de nombreuses arrestations et des condamnations de dirigeants et de militants syndicaux, ainsi que des licenciements massifs, des suspensions et des radiations, surtout dans les secteurs de l'enseignement (400 enseignants notamment), du chemin de fer djibouto-éthiopien, de l'aéroport, de l'électricité, des postes et télécommunications, de la santé et de l'eau. Par la suite, une autre grève, déclenchée en janvier 1996 par les enseignants contre le retard dans le paiement des arriérés de salaires, aurait été suivie de l'arrestation de 230 enseignants, dont 217 auraient été rapidement libérés, et du licenciement de 180 instituteurs suppléants. Treize enseignants arrêtés auraient été déférés devant un tribunal, puis élargis grâce à l'intervention de leurs avocats. Parallèlement, une organisation syndicale acquise à la cause du gouvernement, le Congrès djiboutien du travail (CODJITRA), aurait été créé ultérieurement, les locaux de l'UGTD auraient été fermés par les forces de sécurité, les dirigeants syndicaux auraient été démis de leurs fonctions, les cotisations syndicales des syndicats de base (postes et télécommunications et électricité) auraient été gelées et l'avocat de l'intersyndicale UDT/UGDT (Maître Mohamed Aref) aurait été suspendu de ses fonctions et inculpé.
Le gouvernement avait, dans sa réponse écrite, assuré le comité de son attachement aux syndicats et à la démocratie, mais il avait dénoncé les troubles sociaux graves qui avaient secoué le pays et qui l'avaient conduit à faire intervenir la police pour rétablir l'ordre. Il avait insisté sur le fait que le Président de la République n'avait pas suspendu la Constitution et qu'il avait privilégié la conciliation, la médiation et l'arbitrage en tant que mode de règlement pacifique des conflits, la Constitution reconnaissant le droit syndical et le droit de grève. Néanmoins, les licenciements qui avaient été prononcés faisaient suite à des absences au travail, à des atteintes à la liberté du travail et à des activités purement politiques. S'agissant du siège des syndicats, le gouvernement avait expliqué que l'immeuble des syndicats appartenait à l'Etat, mais que l'UGTD avait refusé de les partager et de signer une convention avec l'UDT sur les conditions et les modalités d'utilisation desdits locaux, comme le gouvernement l'avait invitée à le faire.
Lors de son dernier examen du cas no 1851 en mai-juin 1997, le Comité de la liberté syndicale avait demandé au gouvernement de libérer les syndicalistes arrêtés pour faits de grève, de le tenir informé du sort des dirigeants qui faisaient encore l'objet de poursuites judiciaires ainsi que de lui communiquer le texte des jugements rendus en la matière. Il avait, en outre, demandé au gouvernement de réintégrer dans leur poste de travail les dirigeants et les membres des syndicats licenciés, suspendus ou radiés pour avoir participé à des grèves en 1995, 1996 et 1997. Il avait aussi insisté sur la nécessité de rétablir dans leurs fonctions syndicales les dirigeants syndicaux suspendus, de lever immédiatement les scellés sur le local de l'UGTD et le gel des cotisations syndicales du Syndicat des employés de l'Office des postes et des télécommunications (OPT) et du Syndicat des employés de l'électricité de Djibouti (SEED). Enfin, il avait demandé au gouvernement de commenter les dernières allégations des plaignants concernant la création d'une organisation syndicale acquise à sa cause: le Congrès djiboutien du travail; la radiation, le 16 février 1997, de cinq dirigeants du Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED); la déportation et l'incarcération dans un camp de police situé à 10 km de la capitale de 500 personnes à la suite d'une manifestation pacifique organisée pour protester contre la radiation des cinq dirigeants en question, et la suspension de l'avocat de l'intersyndicale UDT/UGTD, Maître Mohamed Aref.
Pour ce qui est du cas no 1922, l'Internationale de l'éducation (EI), le Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et le Syndicat des enseignants du primaire (SEP) ont critiqué, dans une communication du 4 avril 1997, la situation syndicale dans l'enseignement au regard des conventions nos 87 et 98, ratifiées par Djibouti. Ils ont expliqué que ces deux syndicats, fondés respectivement en 1994 et en 1995, étaient parvenus le 9 juin 1996 à un accord avec le gouvernement au sujet des arriérés de salaires des enseignants qui depuis deux ans étaient payés partiellement et irrégulièrement après avoir menacé de faire grève, et l'avoir fait a plusieurs reprises tout en restant prêts à négocier avec le gouvernement. Ce jour-là, en effet, le ministre de l'Education nationale avait promis au secrétaire général de l'Union djiboutienne du travail (UDT), à laquelle les deux syndicats sont affiliés, de répondre à leurs revendications après la levée du boycott, et les syndicats lui avaient fait confiance. Les revendications des enseignants portaient encore sur la demande de paiement des arriérés de salaires de quatre mois, le retrait d'un décret supprimant le droit au logement des enseignants, la réintégration dans leur poste de travail des responsables et des militants syndicaux. Le gouvernement n'aurait toutefois pas respecté l'accord et, à la rentrée des classes, les 14 et 15 septembre 1996, la grève a recommencé. La répression se serait alors intensifiée et des manifestations pacifiques auraient été réprimées avec violence. Le ministre de l'Education nationale aurait, le 16 septembre 1996, sanctionné et muté dans les régions reculées du pays les responsables syndicaux du SEP et du SYNESED. Nombre d'instituteurs auraient été radiés. Le 5 octobre, une manifestation pacifique organisée par le SYNESED, à l'occasion de la Journée mondiale des enseignants, aurait été réprimée violemment par les forces de l'ordre. Plusieurs personnes auraient été blessées, dont une grièvement. Soixante enseignants auraient été arrêtés et transférés au centre de détention de Nagad. Le 17 novembre, une note de service no 185/96/DGEN a interdit aux enseignants suspendus l'accès aux établissements scolaires et d'organiser des réunions. A partir du 4 décembre 1996, les enseignants ont déclenché des grèves échelonnées de deux jours, suivies de deux jours de cours, tout en demandant au ministre de l'Education nationale de reprendre le dialogue avec le SEP et le SYNESED. Le 16 février 1997, le Conseil de discipline de la fonction publique a révoqué cinq professeurs dirigeants du SYNESED qui avaient été suspendus, ce qui a conduit à une nouvelle manifestation de solidarité réprimée avec force. Des centaines d'enseignants auraient été envoyés au camp de détention de Nagad puis libérés dans le désert sans eau ni nourriture au début du mois de mars 1997. Depuis lors, le ministre de l'Education nationale aurait constitué, à partir du 4 mars 1997, une commission composée de deux enseignants par établissement, en dehors du syndicat, pour chercher à résoudre les difficultés. Les plaignants indiquent que l'avocat des militants syndicaux enseignants, Maître Mohammed Aref, aurait été suspendu de ses fonctions. Ils demandent la levée des sanctions, l'application des accords collectifs conclus en juin 1996 et le paiement des arriérés de salaires.
Informations recueillies pendant la mission
Situation politique et économique
La République de Djibouti est un pays de 23 000 km2, d'une population estimée à 600 000 habitants, dont le taux de croissance naturelle est de 3 pour cent par an. Les deux tiers des habitants se concentrent dans la capitale, Djibouti. L'arrière-pays, semi-désertique, offre très peu de terres arables, et l'agriculture connaît de ce fait de sérieuses contraintes liées à la terre et à l'eau. L'économie est très largement fondée sur les services axés sur le port, la voie ferrée, la fonction publique et la garnison militaire française, soit 76 pour cent du produit intérieur brut (PIB). Entre 1983 et 1987, de graves sécheresses ont affecté le pays. Les pertes lourdes en bétail, principale ressource des populations nomades, ont entraîné un afflux de réfugiés vers les zones urbaines, où le chômage est déjà élevé. Enfin, l'économie a été sérieusement perturbée entre 1991 et 1994 à cause de la guerre civile ayant opposé le gouvernement aux forces du Front pour la restauration de l'unité et la démocratie (FRUD), représentant la rébellion afar.
Le conflit a pris fin en décembre 1994, date à laquelle le gouvernement de Djibouti a signé un accord de paix avec certains éléments du FRUD.
En septembre 1992, un référendum visant à modifier la Constitution a institué le multipartisme. En avril 1997 s'est tenu le premier congrès du FRUD. Au cours de ce congrès, le FRUD a réalisé sa transformation en parti politique légal, devenant ainsi la quatrième force politique du pays.
Djibouti figure parmi les pays les moins avancés de la planète (PMA) et occupe la 164e place (sur 174) dans le classement établi par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en fonction de l'indicateur de développement humain (IDH).
Le taux d'alphabétisme est parmi le plus bas du monde (44 pour cent). L'éducation formelle est prodiguée essentiellement dans les centres urbains. Il n'y a pas d'universités et la formation professionnelle y est peu développée. Tous les secteurs de l'économie souffrent d'une pénurie en main-d'œuvre qualifiée.
L'espérance de vie a été estimée à quarante-huit ans en 1993, avec un taux de mortalité infantile de 114 pour 1 000.
Les perspectives de développement de Djibouti dépendent beaucoup de sa capacité à devenir un centre de services et de transit de biens pour la sous-région.
La Constitution du 4 septembre 1992 confère aux travailleurs le droit de créer des syndicats et de faire grève en son article 15.
Quatre partis politiques sont autorisés. Il s'agit du Rassemblement populaire pour le progrès (RPP), actuellement au pouvoir, du Parti national démocratique (PND), du Parti pour le renouveau démocratique (PRD), récemment scindé en deux dont l'une des composantes n'est pas légale, d'après les autorités gouvernementales, les principaux responsables ayant été évincés de leur poste, malgré des plaintes déposées mais restées sans suite, et du Front pour la restauration de l'unité et la démocratie (FRUD). Enfin, toujours d'après les autorités gouvernementales, le Groupe pour la démocratie et la République (GDR) est une formation politique illégale à laquelle appartient un ancien directeur du Cabinet du Président de la République, M. Ismael Guedi Hared, en fonction depuis de nombreuses années à la présidence de la République, aujourd'hui écarté du pouvoir après avoir été condamné comme opposant politique.
Soixante-cinq députés viennent d'être élus le 19 décembre 1997 à l'Assemblée législative, et un récent remaniement ministériel a eu lieu le 28 décembre 1997. Ainsi, le ministre du Travail et de la Formation professionnelle, M. Osman Robleh Daach, en fonction lors des événements, objet des plaintes, a été appelé à d'autres fonctions ministérielles. L'actuel ministre du Travail et de la Formation professionnelle, M. Mohamed Ali Mohamed, qui était ministre des Finances et auteur de la loi de finances, contestée par les organisations de travailleurs plaignantes en 1995 ne vient d'être nommé dans ses nouvelles fonctions que le 28 décembre 1997.
Selon les représentants des travailleurs rencontrés par la mission, la loi de finances rectificative de 1995, objet de la plainte initiale, a été déclarée inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel trois mois après avoir été adoptée.
Arrestation, détention, poursuites judiciaires
Lorsque la mission est arrivée à Djibouti, les autorités gouvernementales et les représentants des travailleurs ont confirmé qu'aucun syndicaliste n'était actuellement détenu et que pratiquement aucune poursuite judiciaire n'était en instance à l'encontre de militants et de dirigeants syndicaux. Seul M. Mohamed Doubad Wais, secrétaire général adjoint de l'UGTD et secrétaire général du Syndicat des employés de l'Office des postes et des télécommunications (OPT), a été condamné le 14 septembre 1995 par le tribunal de première instance de Djibouti, à l'audience de flagrant délit pour outrage à l'égard du ministre du Travail, à une peine de trois mois de prison et 60 000 francs djiboutiens d'amende ferme. Cependant, l'intéressé ayant interjeté appel, la peine n'a pas été exécutée. Quant aux poursuites judiciaires intentées contre les enseignants du secondaire, dirigeants du SYNESED, elles ont effectivement été abandonnées.
S'agissant des arrestations massives de militants et de dirigeants syndicaux intervenues au cours des années récentes lors des différents conflits du travail et des manifestations syndicales, les autorités gouvernementales du ministère de la Justice ont expliqué que le ministre de la Justice était désormais chargé des droits de l'homme. Les affaires qui sont venues devant les juridictions concernant les troubles de l'ordre public n'ont pas conduit à des condamnations. Les arrestations qui sont intervenues n'ont jamais dépassé la durée légale de la garde à vue, qui est de soixante-douze heures à Djibouti, et qui peut être portée à huit jours en dehors de la ville.
S'agissant du centre de détention de Nagad, les autorités gouvernementales ont expliqué qu'il s'agit d'un centre où sont détenues provisoirement les personnes en situation de séjour illégal avant leur expulsion du pays. Elles ont toutefois convenu que le centre a pu dépasser sa destination d'origine. Les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont admis que des arrestations ont eu lieu pour troubles de l'ordre public, mais elles ont indiqué que les problèmes avaient été réglés dans les soixante-douze heures à la suite de l'intervention personnelle du ministre de l'Education nationale.
Au sujet des perquisitions sans mandat judiciaire qui seraient intervenues, les autorités gouvernementales du ministère de la Justice ont incriminé un manque général de connaissances et assuré que les autorités judiciaires peuvent se saisir d'elles-mêmes de telles violations. En tout état de cause, ont-elles indiqué, les personnes qui en seraient victimes doivent porter plainte. Elles ont expliqué que l'état de droit doit s'apprendre. Dans l'opinion publique, sous la période coloniale, le juge pénal avait un caractère éminemment répressif. Les justiciables doivent savoir que désormais le juge pénal a un rôle de protection des citoyens.
Sur ce point, les représentants des travailleurs ont souligné que ces derniers, et en particulier les membres des syndicats, n'étaient pas incités à faire confiance à la justice, les plaintes déposées par eux étant restées sans suite.
D'une manière générale, les autorités gouvernementales du ministère de la Justice ont rappelé que la Constitution, le Code du travail et le Statut de la fonction publique reconnaissent le droit syndical et le droit de grève aux travailleurs et aux fonctionnaires, mais que les problèmes d'application des textes existent, notamment à cause du manque de dialogue. Depuis 1977, date de l'indépendance, le mouvement syndical et le mouvement politique n'étaient pas indépendants. Un mouvement syndical indépendant a surgi après l'adoption de la nouvelle Constitution en 1992, mais les pouvoirs publics n'ont pas changé. Auparavant, les dirigeants syndicaux étaient nommés par les pouvoirs publics. Ainsi, le secrétaire général de l'UGTD était membre du Parlement et ne disposait d'aucune indépendance vis-à-vis de l'exécutif. Les autorités publiques ont eu des difficultés à comprendre que les syndicats puissent se révolter contre les pouvoirs publics. La tolérance des pouvoirs publics par rapport à l'action syndicale est nécessaire, mais les syndicats doivent également apprendre à se comporter conformément à la loi.
Licenciements, mutations, sanctions,
radiations pour faits de grève
Lors de son arrivée, les représentants des travailleurs ont remis à la mission la liste des dirigeants syndicaux encore licenciés, ou radiés, à la suite des grèves de protestation contre la politique économique et sociale du gouvernement de 1995, 1996 et 1997. Il s'agit de la haute direction de la coordination intersyndicale, UDT/UGTD, du secrétaire général du Syndicat de l'électricité, de la secrétaire générale du Syndicat des enseignants du secondaire et de plusieurs dirigeants et militants syndicaux des secteurs des chemins de fer et de l'enseignement primaire et secondaire. Ils ont rappelé qu'une grève légale avait été déclenchée contre le contenu d'une loi de finances rectificative par les deux centrales syndicales UDT/UGTD du 6 au 23 septembre 1995 conformément aux dispositions relatives au droit de grève garanti par la Constitution du 4 septembre 1992, et que toutes les mesures nécessaires avaient été prises pour assurer les services minimums tels que prévus par la réglementation dans les différents secteurs d'activité économique. Ils ont précisé que le 14 septembre 1995, un ordre de reprise du travail avait été imposé par la plus haute autorité de l'Etat et que des licenciements pour abandon de poste avaient frappé les dirigeants syndicaux dès le 12 septembre à la poste et à l'aéroport, et dès le 16 septembre aux chemins de fer.
Dirigeants syndicaux de l'intersyndicale UDT/UGTD
licenciés depuis septembre 1995
Enseignants du second degré suspendus depuis août 1996,
puis radiés de la fonction publique le 16 février 1997
Enseignants du primaire révoqués en 1996
Membres du Syndicat du chemin de fer de Djibouti-Ethiopie,
licenciés le 23 septembre 1995 pour agression contre
la personne d'un agent par décision de la Direction
des chemins de fer
D'après les représentants des travailleurs rencontrés par la mission, M. Kamil Diraneh Hared, Secrétaire général de l'UGTD a été licencié le 16 septembre 1995 par la Direction des chemins de fer de Djibouti pour absence de son poste de travail. Il a été repris par une note de service no 37/97 du 15 avril 1997 du directeur général des chemins de fer, et cette note a été annulée par une nouvelle note écrite du président et du vice-président du conseil d'administration des chemins de fer, respectivement ministres des Transports de Djibouti et d'Ethiopie, le 21 avril 1997. Le licenciement de l'intéressé est donc maintenu. Les autres syndicalistes, nommément désignés, figurant sur la liste contenue dans l'annexe II au 307e rapport du Comité de la liberté syndicale, qui ne sont pas mentionnés parmi les dirigeants syndicaux encore licenciés, ont été repris ou vivent en exil en France ou au Canada.
S'agissant du cas no 1922, les autorités gouvernementales du ministère du Travail ont indiqué à la mission qu'elles n'avaient pas reçu copie de la plainte de l'Internationale de l'éducation (EI) et des deux syndicats d'enseignants (SYNESED et SEP) plaignants dans cette affaire. La mission a donc remis en mains propres aux fonctionnaires de ce ministère une copie de ladite plainte.
La mission a, par ailleurs, rencontré les représentants des travailleurs et les autorités gouvernementales des ministères de l'Education nationale et de la Fonction publique à propos de cette affaire. Ces autorités ont indiqué que la plupart des enseignants contractuels de l'enseignement primaire et secondaire ont été réintégrés dans leur emploi. Elles ont convenu que cinq enseignants fonctionnaires, nommément désignés par les plaignants, ont été radiés de la fonction publique.
Les représentants des travailleurs ont fourni une note de service no 13861/95/MEN du 12 septembre 1995 faisant état de la radiation de tous les instituteurs suppléants qui n'avaient pas rejoint leur poste le 9 septembre 1995 et qui, de ce fait, ont été radiés de leurs fonctions le 13 septembre 1995. Cette note est signée par le ministre de l'Education nationale, M. Ahmed Guirreh Waberi. Ils ont par ailleurs précisé qu'une des fonctionnaires radiée, Mme Hassan Ali, secrétaire générale du SYNESED, suspendue de ses fonctions depuis le 15 août 1996 puis, comme les autres fonctionnaires, radiée de la fonction publique le 16 février 1997, a dû s'exiler en France où elle a rejoint son conjoint, enseignant coopérant français dont le contrat de travail à Djibouti n'a pas été renouvelé.
Selon les autorités gouvernementales, le contrat de travail de ce coopérant avait été renouvelé précédemment et arrivait normalement à expiration, les coopérants ne restant jamais en poste dans un pays plus de six ans.
Les représentants des travailleurs ont également précisé qu'une enseignante contractuelle, Mlle Khadija Aboulkader Abeba, a dû quitter le pays pour le Canada, qu'un enseignant, M. Abdourachid Ali Abdo, a changé de travail et que M. Farah Abdillahi, secrétaire général du SYNESED, muté dans un poste éloigné de la capitale, est revenu à Djibouti à la rentrée scolaire d'octobre 1997 après avoir dû produire un certificat médical faisant état d'un accident du travail, notamment d'une blessure au pied.
Concernant la radiation alléguée de 400 enseignants par une note de service du ministère de l'Education nationale, les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont nié qu'elle ait eu lieu. Elles ont expliqué qu'à la suite des grèves sauvages, qui s'étaient déroulées en 1996, environ 400 personnes, chômeurs sans emploi, ont été mobilisées pour remplacer les instituteurs titulaires et contractuels, grévistes, pendant la durée de la grève pour assurer la garde des enfants. Toutefois, à la satisfaction des syndicats, à l'issue des grèves, les enseignants du primaire et du secondaire, titulaires et contractuels, ont été repris dans leur poste, et les 400 personnes sans emploi, qui avaient été mobilisées ponctuellement pour les remplacer, n'ont pas été maintenues en emploi. Les représentants des travailleurs ont, dans l'ensemble, corroboré cette version des faits, ajoutant toutefois que des enseignants repris dans leur poste avaient dû s'engager par écrit à ne pas adhérer à un syndicat, ce qu'ont nié les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale.
Concernant le non-renouvellement allégué des contrats d'environ 180 instituteurs, maîtres auxiliaires, les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont indiqué que ces instituteurs ont été repris après trois semaines de grève à la suite de négociations avec le Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED). Cependant, elles ont expliqué que l'enseignement primaire comptant un millier d'enseignants, dont 400 suppléants instituteurs maîtres auxiliaires, des discussions ont été engagées avec le Syndicat des enseignants du primaire (SEP) à propos, notamment, de la titularisation des suppléants et des arriérés de salaires particulièrement lourds pour les suppléants. Les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont convenu que certains maîtres auxiliaires n'ont pas été renouvelés dans leur emploi non pas, selon elles, pour fait de grève, mais parce que les autorités souhaitaient que le recrutement des instituteurs suive la voie de la procédure normale de formation des maîtres, notamment en passant par l'Ecole normale d'instituteurs.
Les représentants des travailleurs ont indiqué qu'à la suite des grèves un certain nombre d'instituteurs maîtres auxiliaires, en fonction depuis de nombreuses années, parfois de très nombreuses années, n'ayant pas obtempéré à la demande des autorités de reprendre le travail, ont reçu une notification de rupture de leur contrat de travail et ils ont fourni la note de service du 12 septembre 1995 qui apportait la preuve de leurs dires. S'agissant de la titularisation des enseignants du primaire, les représentants des enseignants du primaire ne contestent pas le mode de recrutement dans ce secteur, mais ils réclament en vain, depuis des années, une formation adéquate pour les intéressés.
D'une manière générale, les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont expliqué que le système éducatif fonctionne, mais que les retards dans le paiement des salaires constituent un problème financier qui touche toutes les personnes qui émargent au budget de l'Etat, fonctionnaires ou contractuels des secteurs publics et parapublics. Sur ce point, le ministre du Travail a même indiqué à la mission que la masse salariale des dépenses publiques s'élève à 17 milliards de francs djiboutiens et que les recettes ne s'élèvent qu'à 12 ou 13 milliards de francs djiboutiens. En conséquence, les enseignants, qui représentent le troisième poste budgétaire après ceux de la Défense nationale et de l'intérieur, perçoivent leur salaire avec retard. Actuellement ils attendent deux mois d'arriérés de salaires pour 1995 et trois mois d'arriérés de salaires pour 1997. Les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont indiqué à la mission que ces arriérés de salaires ne sont pas du ressort du ministère de l'Education nationale, mais que le ministère fait tout son possible pour que les enseignants soient payés et qu'il souhaite pouvoir s'appuyer sur des syndicats forts, face notamment au ministère des Finances. Elles ont affirmé qu'à Djibouti, la tâche des enseignants est noble et respectée, mais il est exact que les professeurs travaillent dans des conditions difficiles. Il n'y a pas eu de mutations sanctions, le ministère s'efforçant simplement de répartir les enseignants sur l'ensemble du territoire. D'ailleurs, le secrétaire général du SYNESED, M. Farah Abdillali, qui avait été muté dans une province éloignée, est revenu en octobre 1997 à Djibouti après avoir présenté un certificat médical faisant état d'un accident du travail. Le ministère de l'Education nationale ne met pas en cause la compétence pédagogique des enseignants licenciés ou radiés; au contraire, il s'efforce de les réintégrer. Ainsi, les enseignants contractuels ont été repris. Deux des cinq enseignants radiés ont fait une demande de réintégration. Leur cas est en ce moment à l'étude.
Les autorités gouvernementales du ministère de l'Education nationale ont remis à la mission le texte d'une communication écrite que ce ministère avait adressé à l'Internationale de l'éducation (EI) le 6 avril 1997 en réponse à la plainte que cette organisation avait adressée conjointement au BIT et au ministre de l'Education nationale de Djibouti, soit deux jours après le dépôt de la plainte de EI au BIT. D'après cette communication, qui répond pour partie à la plainte contenue dans le cas no 1922, mais qui n'avait pas été portée à la connaissance du Comité de la liberté syndicale, le dialogue a repris avec le SEP; plusieurs rencontres ont fait progresser les négociations. Après deux semaines de grève, les enseignants ont repris les cours. Les enseignants sanctionnés pour abandon de poste ont été repris et même réintégrés dans la fonction publique.
S'agissant du dialogue avec le SYNESED, le ministre de l'Education nationale a lui-même effectué des tournées dans les établissements pour dialoguer avec les enseignants en vue d'une reprise du travail. A l'initiative d'une délégation de professeurs grévistes, du lycée d'Etat de Djibouti, une réunion entre les membres d'un commission d'enseignants (désignés par le syndicat) et la direction générale de l'Education nationale s'est tenue le 8 mars 1997. Six points ont été évoqués au cours de ladite réunion:
les trois professeurs ont été repris le 11 mars 1997 dans des établissements publics;
la décision de ce conseil étant souveraine, leur réintégration n'est pas du ressort du ministère de l'Education et le syndicat doit, s'il le souhaite, utiliser tous les recours légaux en vigueur dans le pays;
l'ajustement structurel imposé par le Fonds monétaire international pour assainir l'économie a obligé le ministère des Finances de séparer salaires et indemnités sur deux mandats différents. Salaires et indemnités ont donc été payés séparément, mais en même temps;
les salaires de la majorité des nouveaux professeurs ont été payés et quelques décisions sont en cours de règlement;
le syndicat refuse les retenues sur salaires; ces retenues sont liées à une absence du travail, en application des textes en vigueur. Cependant, il a été proposé aux syndicats soit d'élaborer un calendrier de rattrapage des cours pour boucler le programme à tous les niveaux, préalable au réexamen de l'application de ces retenues, soit d'échelonner les retenues, échelonnement qui est à l'étude;
ce droit a été limité dans les situations suivantes: manque de respect du préavis de quinze jours pour déclencher une grève; comportement inacceptable de certains délégués, par exemple lorsque le chef d'établissement n'est pas préalablement informé de l'affichage ou de la visite des délégués extérieurs, ou lorsque les non-grévistes se plaignent des provocations des grévistes dans la salle des professeurs. Les grévistes ont le droit de faire grève, mais les non-grévistes ont aussi le droit de ne pas faire grève. Enfin, l'incitation, à l'intérieur et à l'extérieur des établissements, des élèves à se solidariser avec les professeurs et à faire grève a contraint l'administration à prendre des mesures.
La communication écrite poursuit en indiquant que le ministre de l'Education nationale a appelé à la poursuite du dialogue et ajouté qu'après quatre semaines de grève les professeurs du secondaire ont repris le travail. Il a confirmé que des professeurs ont été arrêtés à l'extérieur des établissements suite aux troubles de l'ordre public, puis relâchés sur son intervention. Il a rappelé que le maintien de l'ordre public n'est pas du ressort de son ministère. Enfin, il a indiqué qu'une autre réunion entre les fonctionnaires de l'Education nationale et les syndicalistes a eu lieu le 25 mars 1997 où les questions de rejet de décisions de non-renouvellement de contrat concernant certains stagiaires, de logement, de salaire des révoqués, de liberté syndicale (circulation de délégués dans les établissements), de retenues sur salaire et de réintégration des révoqués ont été abordées.
Il semble à la mission que cette réunion n'ait pas débouché sur un procès-verbal de conciliation sur tous les points examinés lors de celle-ci, d'après les indications fournies par les représentants des travailleurs et corroborées par les autorités gouvernementales.
Sur la question des radiations, les autorités gouvernementales du ministère de la Fonction publique ont elles aussi expliqué que tous les agents de l'Etat avaient des arriérés de salaires, que des commissions de médiation, composées de représentants des ministères du Travail, de l'Enseignement et de la Fonction publique, avaient reçu les enseignants, qu'elles avaient écouté leurs revendications et fait droit à leurs demandes, sauf à celle relative aux arriérés de salaires qui concernaient l'ensemble des fonctionnaires et des employés des secteurs publics et parapublics. Les procès-verbaux de conciliation l'attestent. Mais les syndicats avaient fait de la désinformation. Les préavis de quinze jours, prévus par la loi, pour déclencher les grèves dans la fonction publique n'avaient pas toujours été respectés. Les autorités gouvernementales du ministère de la Fonction publique ont rappelé que les fonctionnaires étaient tenus à un devoir de réserve. Ils avaient cependant affiché des communiqués syndicaux dans des journaux d'opposition et fait boycotter des examens et des corrections d'examens, ce qui avait conduit à des suspensions en août 1996 et à la comparution de cinq enseignants fonctionnaires devant le Conseil de discipline de la fonction publique, qui rend des décisions motivées, en février 1997. Le Conseil de discipline, composé de six membres et présidé par le ministre de la Fonction publique, avait entendu le rapporteur désigné par les deux parties et avait rendu, à huis clos, par des décisions adoptées à la majorité des voix dans les cinq cas proposant la radiation des intéressés à la présidence de la République. Dans un cas au moins, la décision avait été adoptée avec la voix prépondérante du président après partage des voix. La radiation a donc été prononcée par le Président de la République en février 1997. Les recours devant le tribunal administratif ne sont plus possibles, le délai de forclusion de trois mois pour faire appel ayant été épuisé. Les autorités gouvernementales du ministère de la Fonction publique ont néanmoins indiqué qu'elles ne s'opposeraient pas à la reprise des enseignants radiés comme contractuels si une demande leur était adressée en ce sens. Elles ont toutefois exclu la possibilité d'une réintégration des intéressés en tant que fonctionnaires, ce qui aura selon elles pour incidence qu'ils ne pourront pas être réélus à la direction syndicale du SYNESED, le syndicat des enseignants de fonctionnaires.
Les représentants des travailleurs enseignants du SYNESED ont indiqué sur ce point à la mission que les conseils de discipline qui les avaient radiés ne comportaient pas d'enseignants et qu'ils n'avaient pas reçu la notification formelle de leur radiation, raison pour laquelle ils n'avaient pas pu saisir le tribunal administratif d'un recours en appel sur ces radiations. Par ailleurs, ils ont indiqué à la mission que les statuts du SEP et du SYNESED, dont ils ont remis copie à la mission, permettent à tous les enseignants du primaire et du secondaire de Djibouti, qu'ils soient ou non fonctionnaires, d'adhérer à ces syndicats.
Gel des cotisations syndicales
Les représentants des travailleurs ont indiqué à la mission que les banques privées, où se trouvaient les avoirs du Syndicat des employés de l'Office des postes et des télécommunications (OPT), et du Syndicat des employés de l'Electricité de Djibouti (SEED), ont restitué aux dirigeants syndicaux de ces syndicats les cotisations des travailleurs.
Congrès djiboutien du travail (CODJITRA)
Les représentants des travailleurs ont indiqué à la mission que cette centrale, nouvellement créée, n'avait aucune audience dans le pays, qu'elle ne représentait qu'une seule personne: le dirigeant qui l'avait créée et qui était proche du gouvernement. Ils ont fourni à la mission des communiqués de presse de ladite centrale faisant état de son soutien aux mesures prises par le gouvernement et de la désignation par arrêté du gouvernement no 97/086/CAB, en tant que représentant des travailleurs de Djibouti à la Conférence internationale du Travail de juin 1997, de son secrétaire général, M. Mohamoud Ali Boulaleh. Ils ont également fourni à la mission la décision de la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence internationale du Travail de juin 1997, estimant à l'unanimité que les pouvoirs du délégué des travailleurs de Djibouti devraient être invalidés. La Commission de vérification des pouvoirs y indiquait notamment:
Les éléments dont dispose actuellement la commission indiquent que le délégué travailleur a été choisi au sein de l'organisation, étroitement liée au gouvernement, au détriment de l'organisation des travailleurs qui apparaît indiscutablement comme la plus représentative à Djibouti, en violation de l'article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l'OIT (Compte rendu provisoire, 85e session, Genève, 1997, VII D).
Les représentants des travailleurs ont également fourni à la mission un autre communiqué de presse du CODJITRA rédigé notamment comme suit:
Le CODJITRA est une institution sociale, forte et démocratique, qui partage les mêmes idéaux que les dirigeants actuels, donc proche du parti au pouvoir, en l'occurrence le Rassemblement populaire pour le progrès (RPP).
Le communiqué conclut que «le contenu du rapport de la Commission de vérification des pouvoirs de la 85e session de la Conférence internationale du Travail et du 307e rapport du Comité de la liberté syndicale constitue une violation grave des articles 2 et 3 de la convention no 87 de l'OIT».
Locaux syndicaux
Les représentants des travailleurs ont expliqué à la mission que les locaux de l'UGTD étaient toujours fermés. Ils avaient souhaité, dans un premier temps, obtenir un local séparé pour l'UDT mais depuis, les représentants de l'UGTD et de l'UDT étaient parfaitement d'accord pour partager ce local qui avait été construit en 1958 pour les gens de mer par la Confédération française Force Ouvrière (CGT-FO). Le gouvernement avait cherché à imposer à l'UGTD et à l'UDT des conditions inacceptables concernant l'usage des locaux syndicaux, comportant un grand nombre d'interdits. Ils ont indiqué qu'ils souhaitaient obtenir la levée des scellés du siège syndical sans condition et dans l'état initial de l'immeuble. Ils ont rappelé en effet que, ainsi, la coordination intersyndicale, UDT/UGTD, pourrait tenir des réunions syndicales sans devoir demander d'autorisation au ministère de l'Intérieur et se la voir refuser.
Par ailleurs, les représentants des travailleurs ont expliqué que, le 7 juillet 1997, un huissier de justice et des policiers en uniforme avaient forcé la porte du domicile privé du président de l'UDT, coprésident de l'intersyndicale, M. Egueh, secrétaire général du Syndicat des employés de l'aéroport, emportant notamment les archives syndicales de l'UDT, alors que la justice avait donné gain de cause à M. Egueh sur la question de son logement.
Suspension de Maître Aref, avocat des organisations syndicales,
et poursuites judiciaires le concernant
Concernant la suspension dont fait l'objet Maître Mohamed Aref, les autorités gouvernementales du ministère de la Justice ont indiqué à la mission que l'intéressé a été suspendu pour des faits autres que la défense des intérêts des militants syndicaux. Il serait actuellement poursuivi pénalement pour s'être constitué défenseur d'une société privée à Djibouti et de la partie adverse, une société de droit britannique, dans un même procès. L'affaire le concernant n'a pas été jugée, elle devait l'être en janvier 1998, mais elle a été reportée au mois de mars 1998. En attendant, le Barreau de Djibouti lui a interdit, temporairement, d'exercer la profession d'avocat. Maître Ali Dini, Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Djibouti, a fait état des mêmes causes pour la poursuite pénale.
Les représentants des travailleurs contestent vigoureusement cette version des faits; ils estiment que Maître Aref fait l'objet de sanctions pour les avoir défendus et que, depuis lors, aucun avocat à Djibouti n'ose prendre la défense des syndicalistes, d'autant plus que les plaintes déposées par ces derniers auprès du ministère public restent sans suite.
Des documents de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) et de la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA) ont été adressés par Maître Aref à la mission corroborant les indications fournies par les représentants des travailleurs.
Dans la lettre en date du 26 janvier 1996 adressée au Président de la République de Djibouti, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) fait état d'informations concernant des menaces et des tracasseries administratives et policières à l'égard de Maître Aref, destinées à l'intimider et à le pousser à abandonner certaines affaires en cours, et s'inquiète d'une paralysie du système judiciaire du fait que des plaintes déposées par Maître Aref auprès du Procureur de la République n'ont pas donné lieu aux enquêtes nécessaires à l'instruction du dossier.
Le rapport établi par la mission d'observation judiciaire effectuée à Djibouti du 4 au 11 octobre 1997 pour la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA) mentionne les difficultés rencontrées à son arrivée par l'avocat chargé de la mission (tentative de refoulement) qui a pu ensuite rencontrer de nombreux représentants de la vie politique et sociale de Djibouti, plusieurs magistrats et recueillir de nombreuses informations. Relatant par ailleurs de multiples atteintes aux droits de l'homme et aux libertés à Djibouti, il fait état de graves irrégularités et violations de principes élémentaires garantissant un procès équitable commises au cours des procès concernant quatre parlementaires et le Président du Conseil constitutionnel (révoqué après avoir présidé la séance au cours de laquelle le Conseil avait estimé viciée la procédure de levée de l'immunité de ces parlementaires), pour lesquels Maître Aref avait été sollicité comme défenseur, le Conseil de l'Union interparlementaire réuni au Caire en septembre 1997 ayant exprimé sa profonde préoccupation à cet égard.
Selon le rapport, Maître Aref lui-même, défenseur actif des droits de l'homme, a été inculpé pour escroquerie le 23 janvier 1997. Une réclamation purement disciplinaire avait été déposée par un cabinet d'avocats londonien en mars 1995 mais était restée plus d'un an sans suite après les explications fournies par Maître Aref au Bâtonnier et au cabinet d'avocats; puis il a été cité à comparaître pour tentative d'escroquerie devant le tribunal correctionnel à l'audience du 6 octobre 1997, sans avoir pu obtenir de précisions sur les faits retenus comme charges contre lui lors de l'audience antérieure de première comparution, depuis laquelle aucun acte d'instruction n'a été diligenté par le magistrat instructeur. Un avocat parisien sollicité par Maître Aref pour sa défense a été refoulé et a dû aussitôt regagner la France. Au cours de l'audience, le cabinet londonien et le ministère public demandaient le renvoi de l'affaire, que le tribunal a décidé sur le champ malgré l'opposition des défenseurs de Maître Aref, le Procureur de la République (sur l'intervention d'un avocat parisien) informant par la suite le tribunal que l'affaire était renvoyée jusqu'à décision de la Cour suprême sur un pourvoi de Maître Aref soulevant des moyens de nullité de la procédure, toujours pendant devant la Cour suprême.
Sur le plan disciplinaire, le Conseil de l'Ordre des avocats de Djibouti avait décidé en février 1997, près de deux ans après la réclamation disciplinaire du cabinet britannique, d'interdire provisoirement à Maître Aref d'exercer ses fonctions d'avocat, dans l'attente de poursuites disciplinaires, décision contre laquelle il a formé un recours devant la Cour d'appel. En outre, l'avocat désigné par le Conseil de l'Ordre en qualité d'administrateur de son cabinet a informé la mission d'observation judiciaire que toutes les juridictions de Djibouti refusaient qu'il se constitue en cette qualité pour de nouveaux dossiers, bien qu'aucun texte en vigueur à Djibouti n'autorise une juridiction à refuser la constitution d'un avocat représenté par l'administrateur de son cabinet dûment mandaté par le Conseil de l'Ordre (ce qui serait de nature à entraîner la disparition de ce cabinet).
Le rapport de la FNUJA conclut que les procédures pénales et disciplinaires engagées à l'encontre de Maître Aref ont été menées dans des conditions contraires à la présomption d'innocence et au respect des droits de la défense, en vue de l'empêcher d'exercer son activité de défenseur en justice.
Elections sociales
Les représentants des travailleurs ont indiqué à la mission qu'ils souhaitaient la tenue, à brève échéance, des élections sociales dans les entreprises et des élections syndicales afin d'être à même de participer pleinement au dialogue et à la concertation sociale en tant que partenaire social incontournable. Ils souhaitaient ainsi pouvoir désigner un représentant des travailleurs au tribunal du travail et des représentants des travailleurs dans les conseils d'administration des entreprises publiques et parapubliques et à la Commission consultative du travail. A cet égard, ils ont rappelé en particulier leur ferme souhait d'être consultés lors de la révision du Code du travail en cours.
Les représentants des employeurs rencontrés par la mission ont indiqué, pour leur part, que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle les avait consultés dans le cadre de la révision du Code du travail en cours, en particulier sur la question du titre III sur le contrat de travail ainsi que sur les autres modifications envisagées du code. Ils souhaitent que les représentants des travailleurs puissent à nouveau siéger dans les conseils d'administration, mais actuellement les dirigeants de l'UDT/UGTD ne représentent pas, selon eux, l'ensemble des travailleurs. Ils se sont donc également montrés favorables à la tenue des élections sociales.
Réunions entre le ministre du Travail et les hauts
représentants syndicaux de l'UDT/UGTD au ministère du Travail
La mission avait demandé et a obtenu qu'une réunion de haut niveau ait lieu sous la présidence du ministre du Travail avec cinq dirigeants syndicaux de la coordination intersyndicale, UDT/UGTD. Lors de cette réunion, les représentants des travailleurs ont manifesté leur intention de voir le dialogue reprendre avec les autorités afin de pouvoir participer pleinement à la concertation sociale dans le pays. Le ministre du Travail a accepté de faire remettre à la coordination intersyndicale les clés des locaux syndicaux, fermés depuis le 7 mai 1996 sur intervention de la police. Le porte-parole de la coordination intersyndicale, UDT/UGTD, a donc déclaré par écrit avoir reçu les clés des locaux syndicaux le 15 janvier 1998. Le ministre a précisé, sur le point essentiel des revendications des dirigeants syndicaux, à savoir la réintégration dans leurs emplois et fonctions des membres de la haute direction des deux centrales ainsi que des syndicats d'enseignants du primaire et du secondaire, qu'un début de calendrier allait se mettre en place pour discuter de ces questions. Il a donné rendez-vous aux dirigeants syndicaux concernés pour une nouvelle réunion trois jours après la fin du Ramadan pour l'Aïd El Fitr, expliquant qu'il venait de prendre ses fonctions et qu'il était nécessaire qu'il puisse disposer d'un certain temps pour se concerter avec les autres membres du gouvernement sur ces questions importantes. Les représentants des travailleurs ont accepté ce nouveau délai dans l'espoir d'obtenir la réintégration dans leurs emplois et fonctions des dirigeants syndicaux licenciés ou radiés et la reconnaissance légale, pleine et entière, des organisations syndicales, à savoir de la coordination intersyndicale, UDT/UGTD, et du SYNESED et du SEP.
Communication écrite du gouvernement
Les autorités gouvernementales du ministère du Travail et de la Formation professionnelle ont assuré à la mission qu'une communication écrite en réponse aux deux cas en instance serait envoyée prochainement au Comité de la liberté syndicale.
Résultats obtenus, assurances données par les autorités et perspectives d'avenir
La mission a pu constater, malgré un contexte général demeuré à bien des égards répressif, à la fois que la situation s'était déjà clarifiée avant son arrivée sur certains points, en particulier sur les détentions et certaines poursuites judiciaires, mais qu'elle demeurait hypothéquée par une quasi totale absence de dialogue entre les autorités gouvernementales et administratives et les organisations syndicales, de sorte que les problèmes graves concernant les licenciements de dirigeants syndicaux et les radiations d'enseignants, ainsi que la fermeture et la privation des locaux syndicaux et du matériel syndical, restaient sans solution depuis un temps déjà long.
A cet égard, la mission de contacts directs peut être considérée comme une bonne initiative et paraît avoir déjà porté des fruits dans la mesure où un dialogue vient de s'établir entre le ministre du Travail et les représentants des organisations syndicales et où l'accord auquel ceux-ci sont parvenus sera respecté et suivi d'effets.
Résultats obtenus et assurances données par les autorités
Un accord de contenu limité, mais de portée plus ample, a en effet été conclu à l'issue de la réunion commune suggérée par la mission, aussitôt acceptée par le ministre du Travail et proposée par celui-ci aux organisations syndicales.
Cette réunion, tenue dans le bureau du ministre du Travail, rassemblant celui-ci et ses proches collaborateurs, les représentants des organisations syndicales, en présence de la mission, a certainement constitué le temps fort de celle-ci du fait qu'y a été manifesté la volonté d'établir un dialogue et d'expliquer et de comprendre les points de vue et les positions respectifs.
Le représentant du Directeur général pouvait se féliciter d'emblée de la tenue de cette réunion, susceptible de dissiper des incompréhensions et des malentendus. D'autant plus que les problèmes à résoudre ne procèdent pas des textes et réglementations en vigueur, conformes aux principes de la liberté syndicale, mais concernent l'application de ces textes. Celle-ci devrait permettre, dans le contexte des changements politiques et économiques que vient de connaître la République de Djibouti, qui sollicite des aides, de constater que le principe de la liberté syndicale y est respecté et qu'une vie syndicale normale peut s'y rétablir non seulement grâce à la réintégration des syndicalistes licenciés ou radiés, mais par l'organisation des élections de représentants des travailleurs dans les entreprises, dans les conditions légales qui exigent la possibilité de la participation des syndicats; une préparation de ce rétablissement serait possible grâce à une session tripartite de formation à laquelle pourrait participer le BIT.
Les représentants des syndicats ont vu dans cette réunion un pas positif leur permettant de ne plus être considérés comme des organisations subversives, mais comme des partenaires sociaux exerçant leurs droits et s'acquittant de leurs devoirs en vue du développement économique et social du pays. Aussi demandent-ils en priorité le rétablissement dans leurs emplois et fonctions, et donc dans leurs droits, des dirigeants syndicaux licenciés, sous prétexte d'abandon de poste, quelques jours après avoir exercé leur droit de grève constitutionnellement reconnu, alors qu'ils ont agi dans le cadre de la loi et de leur rôle de dirigeants syndicaux et qu'ils n'ont pas été réintégrés bien que la loi de finances (relative au Plan d'ajustement structurel), objet du conflit, ait été retirée trois mois plus tard pour inconstitutionnalité. Ils demandent aussi la reconnaissance légale des organisations syndicales existantes et de leurs dirigeants, quelle que soit leur situation personnelle, et souhaitent des élections sociales dans les entreprises ainsi que la création d'une commission de concertation sociale pour la mise en œuvre du Plan d'ajustement structurel. Le mouvement syndical a besoin de formation et aussi de se restructurer. Quant au problème des locaux, il devrait pouvoir trouver une solution simple et rapide.
Le ministre du Travail a déclaré qu'il est prêt à examiner les situations dans lesquelles sont intervenus les licenciements, dont il pense que les motifs étaient autres que d'ordre syndical et concernaient non des faits de grève mais des absences répétées au travail. Nouveau à ce ministère, il ne dispose pas de toutes les données de la question, les faits remontant à deux ans et demi; il lui faut du temps et il demande aux syndicalistes de lui donner les outils lui permettant de revoir ce problème sans a priori, et de travailler à réduire les préjugés de part et d'autre et à dissiper l'impression de certains selon laquelle les syndicalistes ont voulu jouer un rôle politique. Il y a une absence de culture syndicale et de compréhension du rôle des syndicats. Un dialogue sans a priori doit permettre de faire avancer les choses, et le ministre entend s'y employer, les syndicats devant de leur côté tenir compte des changements réalisés et en cours à Djibouti dans le sens du multipartisme et du pluralisme syndical.
Le ministre propose alors aux représentants des organisations syndicales un début de calendrier de rencontres destinées à permettre d'examiner les problèmes; rendez-vous est pris pour une première rencontre le troisième jour après la fin du ramadan.
Quant aux locaux syndicaux, fermés par la police depuis le 7 mai 1996, le ministre charge le directeur du travail d'en remettre les clés au porte-parole de l'intersyndicale UGTD/UDT; la remise en est effectuée le jour même (15 janvier 1998).
Enfin, en ce qui concerne les enseignants licenciés ou radiés, le ministre du Travail prendra contact avec les autorités gouvernementales compétentes, et en particulier avec le ministre de l'Education nationale qui a déjà fait effectuer la reprise de certains d'entre eux.
Perspectives d'avenir
Elle a rappelé aussi la disponibilité constante du BIT pour assister le gouvernement dans la révision du Code du travail actuellement en cours.
Paris, le 30 janvier 1998.
M. Jean-Maurice Verdier
Mme Anna-Juliette Pouyat
Liste des personnes rencontrées
pendant la mission
Autorités gouvernementales
Ministère du Travail et de la Formation professionnelle
M. Mohamed Ali Mohamed, ministre du Travail et de la Formation professionnelle
M. Iwad Hassan, secrétaire général
M. Gérard Karche, conseiller technique
M. Abdi Ilmi Achkir, directeur du travail
M. Guedi Absiye Houssein, inspecteur du travail et des lois sociales
M. Arbahim Ali, directeur de l'Organisme de protection sociale
Mme Osman Fatouma, responsable du service juridique
Ministère de la Justice
M. Abdi Ismael Hersi, directeur général des affaires judiciaires
Ministère de l'Education nationale
M. Areitha, conseiller technique
M. Fathi Chamsam, chef de service en charge de l'enseignement du second degré
Ministère de la Fonction publique
M. Yacin Ahmed Liban, directeur
Présidence de la République
M. Amin A. Robleh, secrétaire général du gouvernement
Représentants des travailleurs
Coordination intersyndicale -- Union générale des travailleurs
de Djibouti/Union djiboutienne du travail (UGTD/UDT)
M. Kamil Diraneh Hared, licencié pour abandon de poste le 16 septembre 1995: secrétaire général de l'Union générale des travailleurs de Djibouti (UGTD), secrétaire général du Syndicat des cheminots, coprésident de la coordination intersyndicale
M. Ahmed Djama Egueh, licencié pour abandon de poste le 12 septembre 1995: président de l'Union djiboutienne du travail (UDT), dirigeant du Syndicat des employés de l'aéroport international de Djibouti, coprésident de la coordination intersyndicale
M. Aden Mohamed Abdou, licencié pour abandon du poste le 12 septembre 1995: secrétaire général de l'UDT, dirigeant du Syndicat des employés de l'Electricité de Djibouti (SEED), porte-parole de la coordination intersyndicale
M. Mohamed Doubad Wais, licencié pour abandon de poste le 12 septembre 1995: secrétaire général adjoint de l'UGTD, secrétaire général du Syndicat des employés de l'Office des postes et télécommunications (OPT), membre du comité de la coordination intersyndicale
ainsi que plusieurs dirigeants syndicaux du Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED) et du Syndicat des enseignants du primaire (SEP), notamment:
Syndicat des enseignants du second degré (SYNESED)
M. Soulaiman Ahmad Mohamed, secrétaire général adjoint de l'UDT, ex-secrétaire général du SYNESED, suspendu de ses fonctions le 15 août 1996, puis radié de la fonction publique le 16 février 1997
M. Farah Abdillahi Miguil, secrétaire général du SYNESED
M. Osman Miguil Waiss, secrétaire général adjoint
M. Ali Mohamed Dimbia, secrétaire à la documentation
M. Hassan Isman Doubad, commissaire aux comptes
M. Elmi Youssof Weiss, ex-délégué syndical, agent contractuel de l'enseignement, contrat non renouvelé, puis réintégré
Mlle Mallyoun Benoit Frumence, secrétaire chargée de la documentation, suspendue de ses fonctions le 15 août 1996, radiée de la fonction publique le 16 février 1997
Syndicat des enseignants du primaire (SEP)
M. Mohamed Ali Djama, ex-secrétaire général adjoint du SEP, suspendu de ses fonctions le 15 août 1996, radié de la fonction publique le 16 janvier 1997
M. Abdoul Fatah Hassan, ex-secrétaire général du (SEP), secrétaire à l'organisation
Représentants des employeurs
M. Saïd Omar Moussa, président de l'Union syndicale interentreprises (USIE)
M. Jean-Philippe Delarue, USIE
Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD)
M. Teoufik Ben Amara, Représentant résident
Autre personnalité
Maître Ali Dini, avocat, Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Djibouti
Cas no 1876
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plaintes contre le gouvernement du Guatemala
présentées par
-- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et
-- l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation,
de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac
et des branches connexes (UITA)
Allégations: menaces et actes de discrimination antisyndicale
252. Le comité a examiné ce cas et formulé ses conclusions intérimaires à plusieurs reprises, la dernière fois à sa réunion de novembre 1997. [Voir 308e rapport, paragr. 363 à 394, approuvé par le Conseil d'administration à sa 270e réunion (novembre 1997).]
253. Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations par communication du 28 janvier 1998.
254. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur des cas
255. Lors du dernier examen du cas par le comité (novembre 1997), diverses allégations relatives à des menaces et des actes de violence contre des syndicalistes, ainsi qu'à des actes de discrimination antisyndicale. Au sujet desdites allégations, le comité a formulé les conclusions et recommandations suivantes [voir 308e rapport, paragr. 390 à 394]:
Le comité prie également le gouvernement de le tenir informé des enquêtes portant sur la surveillance dont le local de l'UITA aurait fait l'objet, de la part d'inconnus, le 23 août 1993. En ce qui concerne le cas no 1876, le comité prend note de la demande d'ouverture d'une procédure judiciaire sur l'emprisonnement des syndicalistes Eswin Rocael Ruiz Zacarías, Edwin Tulio Enríquez García et Belarmino González de León; il note également que la famille de Edwin Rolando Yoc (enlevé puis libéré ultérieurement) se réserve la possibilité de porter formellement plainte. Le comité note que les dirigeants syndicaux Jorge Galindo, Danilo Aguilar, Félix Hernández et Juan Francisco Alfaro Mijangos n'ont pas porté plainte pour les menaces de mort dont ils auraient fait l'objet et exercent normalement leur activité syndicale, de même que le dirigeant syndical Víctor Durán. Il constate qu'en ce qui concerne les dirigeants syndicaux Débora Guzmán et Vilma Cristina le gouvernement se borne à émettre des hypothèses. Dans ces conditions, réitérant sa précédente recommandation, le comité demande à être tenu informé des enquêtes ouvertes sur les menaces ou actes d'agression dont les dirigeants syndicaux précités auraient fait l'objet et suggère au gouvernement d'informer tous les dirigeants syndicaux qui ne l'ont pas fait de la possibilité de porter officiellement plainte, s'ils le désirent, devant les autorités compétentes.
Le comité note également que le gouvernement demande la création d'une commission technique régionale chargée d'enquêter sur les cas d'actes de violence contre des syndicalistes. Il exprime l'espoir que ladite commission technique régionale sera, à bref délai, en mesure de se rendre dans le pays pour accélérer l'éclaircissement des allégations en instance.
En ce qui concerne les allégations d'actes de discrimination, le comité prend note des déclarations du gouvernement concernant le cours des procédures judiciaires, administratives ou de médiation portant sur l'entreprise Corporación Textil Internacional, l'exploitation agricole El Salto, l'entreprise «Embotelladora Mariposa SA» ainsi que l'exploitation agricole Las Delicias. Le comité souligne combien il importe de remédier à tous les actes de discrimination antisyndicale et prie le gouvernement de le tenir informé du cours de ces procédures. Il prie également le gouvernement de lui fournir des informations sur le cours de la procédure judiciaire concernant le licenciement de plusieurs dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'hôpital San Juan de Dios.
Enfin, le comité prie le gouvernement de lui communiquer ses observations en réponse aux informations complémentaires envoyées par la CISL le 18 juillet 1997, qui sont reproduites ci-après. [Voir 308e rapport, paragr. 369 à 373.]
La CISL dénonce la décision de licenciement prise par l'entreprise portuaire «Quetzal» à l'encontre de MM. Juan José Morales Moscoso et Everildo Revolorio Torres, respectivement secrétaire général et secrétaire aux questions de conflits du syndicat unique des travailleurs de cette entreprise et membres, l'un et l'autre, du comité exécutif de la Confédération de l'unité syndicale du Guatemala (CUSG).
Dans le cas de M. Revolorio Torres, aucune explication valable n'a été donnée, si ce n'est que cette mesure résultait de la réorganisation administrative de l'entreprise. Malgré les démarches accomplies, l'inefficacité des tribunaux du travail a rendu la réintégration, à laquelle l'intéressé avait droit, impossible à obtenir. Cette affaire a été évoquée auprès du ministère du Travail, qui s'est montré désireux de voir ce problème réglé conformément au droit. Ce point de vue semble néanmoins avoir été ignoré par l'administrateur de l'entreprise.
Le cas de M. Morales Moscoso est beaucoup plus grave, puisque celui-ci a été accusé au pénal de non-accomplissement de ses devoirs et d'abandon de son poste par le fait de sa participation au XIVe Congrès continental de l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs de la CISL en tant que délégué officiel de la Confédération de l'unité syndicale du Guatemala (CUSG). Selon l'administrateur de l'entreprise, ce syndicaliste aurait assisté à cette manifestation sans aucune autorisation, ce qui est totalement faux puisque l'intéressé s'était entretenu personnellement avec ce fonctionnaire. La CUSG avait en outre envoyé à l'entreprise une lettre concernant la participation de M. Morales Moscoso au congrès. Selon la CISL, le directeur administratif de l'entreprise portuaire exerce des pressions à l'encontre de M. Morales Moscoso en l'incitant à renoncer à son emploi en échange d'un retrait de plainte pénale, manœuvre qui tend à affaiblir l'organisation syndicale et qui est contraire au droit.
Selon la CISL, des situations analogues se sont présentées au Syndicat de l'Institut national de l'électrification (STINDE), où des dirigeants syndicaux en exercice ou d'anciens dirigeants ont été licenciés sous prétexte que la convention collective sur les conditions de travail ne leur était plus applicable. Dans les deux cas, les deux entreprises se trouveraient assignées en justice, de sorte qu'elles ne pouvaient pas licencier de travailleurs sans autorisation préalable du juge; qui plus est, la loi interdit le licenciement de dirigeants syndicaux. [Les allégations relatives à ces questions présentées par le STINDE sont examinées dans le présent rapport du comité dans le cadre du cas no 1936.]
B. Réponse du gouvernement
256. Dans sa communication du 28 janvier 1998, le gouvernement envoie des documents signés par les dirigeants syndicaux Débora Guzmán et Félix Hernández adressés au ministère public et demandant que les enquêtes les concernant prennent fin car il n'y a plus aucun intérêt à les poursuivre. Le gouvernement ajoute que des enquêtes judiciaires sont en cours sur le viol dont a été victime la syndicaliste Vilma Cristina González. Le gouvernement déclare par ailleurs qu'un fonctionnaire du ministère du Travail a eu un entretien avec le secrétaire général de l'UITA au Guatemala, et que ce dernier a affirmé qu'il n'avait pas connaissance de la surveillance alléguée dont le local de l'UITA aurait fait l'objet, par des inconnus, en août 1993. Le gouvernement ajoute qu'aucune plainte à ce sujet n'a été déposée auprès du ministère public. En outre, le gouvernement déclare qu'il attend la visite d'une commission technique régionale de l'OIT pour l'éclaircissement du présent cas, en regrettant que les plaignants et même les victimes y aient si peu collaboré et n'aient même pas déposé plainte. Quant aux allégations relatives au licenciement des dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'hôpital San Juan de Dios, le gouvernement indique que le syndicaliste Gunder Isaías Yoc Orozco n'a pas été licencié (il joint des preuves à l'appui en annexe) et que le dirigeant syndical Carmelino Isauro Lucas Díaz a été réintégré dans son poste.
257. Quant à la décision de l'entreprise portuaire Quetzal de licencier Juan José Moscoso et Everildo Revolorio Torres, le gouvernement signale que le conflit a été porté devant les tribunaux et qu'il communiquera la sentence définitive au comité. Selon la documentation envoyée par le gouvernement, M. Morales Moscoso était dirigeant et une autorisation judiciaire était nécessaire pour le licencier; tel ne serait pas le cas pour M. Revolorio, qui a été licencié pour des fautes de travail.
C. Conclusions du comité
258. Pour ce qui est des allégations de menaces de mort ou d'agressions contre des syndicalistes, le comité prend note que les syndicalistes Débora Guzmán et Félix Hernández ont demandé que les enquêtes les concernant soient considérées comme terminées et que les syndicalistes Jorge Galindo, Danilo Aguilar, Juan Francisco Alfaro et Víctor Durán n'ont toujours pas porté plainte pour les menaces de mort alléguées par l'organisation plaignante. A cet égard, le comité ne poursuivra l'examen de ces allégations que si les organisations plaignantes envoient des informations complémentaires. Le comité prend note par ailleurs que des enquêtes judiciaires ont été ouvertes sur le viol dont a été victime la syndicaliste Vilma Cristina González et demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de ces enquêtes. Le comité prie également le gouvernement de le ternir informé des enquêtes sur la détention des syndicalistes Eswin Rocael Ruiz Zacarías, Edwin Tulio Enríquez García et Belarmino González de León, car le gouvernement n'a pas communiqué de nouvelles informations sur ces questions.
259. En ce qui concerne les allégations relatives à la discrimination antisyndicale, le comité prend note du fait que, selon le gouvernement, le syndicaliste Gunder Isaías Yoc Orozco n'a pas été licencié et que le dirigeant syndical Isauro Lucas Díaz a été réintégré dans son poste de travail (dans les deux cas les intéressés sont affiliés au Syndicat des travailleurs de l'hôpital San Juan de Dios). Par ailleurs, en raison de l'absence de nouvelles informations du gouvernement sur d'autres allégations, le comité réitère ses conclusions antérieures dans lesquelles il a pris note des déclarations du gouvernement concernant le cours des procédures judiciaires, administratives ou de médiation portant sur l'entreprise Corporación Textil Internacional, l'exploitation agricole El Salto, l'entreprise «Embotelladora Mariposa SA» ainsi que l'exploitation agricole Las Delicias, il a souligné combien il importe de remédier à tous les actes de discrimination antisyndicale et a prié le gouvernement de le tenir informé du cours de ces procédures. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour la réintégration dans leur poste de travail des travailleurs licenciés s'il était avéré qu'ils ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales.
260. Enfin, en ce qui concerne la décision de l'entreprise portuaire Quetzal de licencier les dirigeants syndicaux Juan José Morales Moscoso et Everildo Revolorio Torres, le comité prend note que ce dernier ne serait pas, selon le gouvernement, dirigeant syndical et aurait été licencié pour des fautes de travail (le gouvernement ne précise pas la nature desdites fautes ni le motif du licenciement de M. Morales Moscoso). Le comité prend également note du fait que les deux licenciements ont été portés devant les autorités judiciaires. D'une façon générale, le comité rappelle que personne ne devrait être l'objet de discrimination en matière d'emploi à cause de son affiliation, ou de ses fonctions ou activités syndicales légitimes, et il prie le gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures en cours qui concernent le licenciement des syndicalistes mentionnés. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour la réintégration dans leur poste de travail des travailleurs licenciés s'il était avéré qu'ils ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales.
Recommandations du comité
261. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1936
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Guatemala
présentée par
le Syndicat des travailleurs de l'Institut national
de l'électrification (STINDE)
Allégations: actes de discrimination antisyndicale durant
le processus de négociation collective
262. La plainte figure dans les communications du Syndicat des travailleurs de l'Institut national de l'électrification du 30 mai et d'août 1997.
263. Le gouvernement a envoyé ses observations par communication du 28 janvier 1998.
264. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
265. Dans ses communications du 30 mai et d'août 1997, le Syndicat des travailleurs de l'Institut national de l'électrification (STINDE) allègue que, ce syndicat et l'institut ayant dénoncé leur convention collective en avril 1997, le gérant de l'institut, avant qu'une nouvelle convention eût été négociée, a destitué le conseil paritaire (qui examine les conflits du travail) et a refusé de délivrer des congés syndicaux aux dirigeants des vingt-trois sections du syndicat et aux affiliés qui devaient participer à deux assemblées générales. Le STINDE relève toutefois qu'en vertu du Code du travail, tant qu'une nouvelle convention collective n'est pas négociée, les droits énoncés par la convention antérieure restent en vigueur.
266. Par ailleurs, le STINDE allègue que l'administration de l'institut a engagé une procédure de licenciement contre les dirigeants syndicaux Luis Chinchilla, Walter Clara, Arturo López Cárdenas et Carlos Sierra. De plus, l'institut a porté plainte contre huit dirigeants du STINDE en les accusant d'avoir contaminé l'environnement, manqué de respect envers l'autorité et proféré des menaces. De son côté, le syndicat a porté plainte contre le gérant de l'institut pour délits contre l'environnement et trafic de stupéfiants.
B. Réponse du gouvernement
267. Dans sa communication du 28 janvier 1998, le gouvernement déclare qu'il y a effectivement eu un problème d'application de la convention collective sur les conditions de travail, ce qui a eu pour conséquence que les relations entre les travailleurs et les organes responsables de l'Institut national d'électrification (INDE) étaient tendues. Quand le ministère du Travail a eu connaissance du problème, il est intervenu pour essayer de mettre les partenaires d'accord et, à cette fin, il est resté en contact permanent avec le ministère de l'Energie et des Mines, et des responsables de l'INDE et du STINDE.
268. Le gouvernement ajoute que les démarches ont abouti et que l'attitude et la bonne volonté des parties concernées ont permis de mener à bonne fin la discussion et la négociation de la nouvelle convention collective sur les conditions de travail. La situation qui est l'objet de la plainte a par conséquent pu être résolue de manière satisfaisante.
269. Le gouvernement joint une copie d'une communication du directeur général de l'INDE (entré en fonctions en novembre 1997, après le dépôt de la plainte), dans laquelle il confirme la négociation de la nouvelle convention collective et se réfère aux procédures judiciaires engagées par l'institut et par le syndicat dans les termes suivants:
Dans le cadre des procédures judiciaires relatives à des questions de travail qui ont été engagées par les deux parties, l'INDE et le STINDE, il est devenu manifeste que lesdites parties ont la volonté de chercher les moyens adéquats pour que l'application de la nouvelle convention collective puisse intervenir dans un climat de compréhension, d'harmonie et de respect réciproque. Pour ce qui est des procédures judiciaires engagées au pénal, il convient de préciser que ces procédures judiciaires ont un caractère strictement personnel, et non pas institutionnel, et qu'il incombe aux intéressés de prendre des décisions à ce sujet. Néanmoins, comme ces procédures ne sont pas institutionnelles et que les intéressés ont témoigné de leur bonne volonté, ces procédures semblent totalement sans objet.
C. Conclusions du comité
270. Le comité observe que, dans le présent cas, l'organisation plaignante a allégué qu'après la dénonciation de la convention collective existant entre le syndicat plaignant et l'Institut national d'électrification, ce dernier: 1) en violation des normes de l'ancienne convention collective qui étaient toujours applicables, a refusé d'accorder des congés syndicaux aux dirigeants et aux affiliés, a destitué le conseil paritaire (chargé d'examiner les conflits du travail); 2) a engagé une procédure de licenciement contre quatre dirigeants syndicaux et a porté plainte contre huit dirigeants syndicaux en les accusant d'avoir contaminé l'environnement, manqué de respect à leurs supérieurs et proféré des menaces.
271. Le comité note que selon le gouvernement le conflit collectif a pris fin avec la négociation d'une nouvelle convention collective, résolvant ainsi de manière satisfaisante la situation qui est l'objet de la plainte. Le comité comprend que les points résolus concernent les congés syndicaux et le rétablissement du conseil paritaire. Le comité observe néanmoins que, pour ce qui est des procédures judiciaires portant sur l'intention de licencier quatre dirigeants syndicaux et des procédures relatives aux délits commis (introduites à la fois par l'institut et par le syndicat), les informations du gouvernement relèvent certes la bonne volonté des parties de trouver des moyens d'améliorer le cadre d'application de la nouvelle convention collective (en vue du règlement des conflits du travail relatifs aux licenciements) et font valoir que les procédures pénales semblent par conséquent totalement sans objet, mais qu'il n'est pas possible de conclure que ces questions sont déjà résolues. Le comité prie par conséquent le gouvernement -- vu le climat de relations professionnelles actuellement favorable -- de confirmer que toutes les procédures en matière de travail et les procédures pénales ont été abandonnées.
Recommandation du comité
272. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité prie le gouvernement -- étant donné le climat de relations professionnelles actuellement favorable -- de confirmer que les procédures en matière de travail et les procédures pénales concernant le syndicat plaignant et l'Institut national d'électrification ont été abandonnées.
Cas no 1940
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Maurice
présentée par
le Congrès du travail de Maurice (MLC)
Allégations: poursuites à l'encontre de dirigeants syndicaux et voies de fait
sur la personne de syndicalistes au cours d'une manifestation
273. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication du Congrès du travail de Maurice (MLC) du 7 octobre 1997.
274. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 29 janvier 1998.
275. Maurice n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, en revanche elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
276. Dans sa communication du 7 octobre 1997, le Congrès du travail de Maurice (MLC) a dénoncé la décision des autorités policières de Maurice de poursuivre en justice 11 dirigeants syndicaux sur les recommandations du Procureur général de l'Etat. Ces poursuites auraient été engagées suite à la manifestation du 26 juin 1996 organisée à Port-Louis par le mouvement syndical.
277. Le plaignant allègue que le mouvement syndical a écrit au Préfet de police le 12 juin 1996 pour demander l'autorisation d'organiser une manifestation pacifique le 26 juin 1996. Selon lui, le Préfet aurait dû répondre dans les quarante-huit heures en application de la loi sur les rassemblements publics, mais la réponse n'est parvenue que douze heures avant le début prévu de la manifestation. A la suite du refus d'autorisation de la manifestation communiqué par écrit en date du 25 juin 1996, les syndicats nationaux ont décidé d'abandonner la manifestation, mais les représentants syndicaux devaient se rendre le lendemain à Port-Louis, au Champ de Mars, étant donné qu'ils ne pouvaient pas faire savoir à leurs membres que la manifestation avait été interdite. Selon le MLC, quelque 2 000 personnes se sont rassemblées le 26 juin 1996 au Champ de Mars, où les dirigeants syndicaux leur ont fait part de la décision du Préfet de police d'interdire la manifestation. Aux dires du MLC, alors que les gens rentraient chez eux et que les syndicalistes voulaient remettre une lettre au Premier ministre, les policiers ont circonscrit le centre-ville, empêchant les dirigeants syndicaux et les gens de se déplacer et ils ont même brutalisé certains syndicalistes à coups de matraques.
278. Le MLC allègue ensuite que quatorze mois après ces incidents, la police s'est rendue dans les locaux du MLC pour informer le secrétaire général que lui-même et dix autres dirigeants syndicaux allaient faire l'objet de poursuite eu égard aux événements du 26 juin 1996 et que leurs passeports leur seraient retirés. Selon le MLC, à la suite de la visite des policiers dans les locaux du syndicat, le gouvernement a promis d'enquêter sur cette affaire, mais à ce jour, ils n'ont eu connaissance d'aucune enquête, ni d'aucun mandat.
B. Réponse du gouvernement
279. Dans sa communication du 29 janvier 1998, le gouvernement réfute la plupart des allégations du MLC concernant les événements du 26 juin 1996 ainsi que les événements qui ont suivi. Le gouvernement déclare tout d'abord qu'il confirme que la Conférence générale des travailleurs a envoyé une demande au Préfet de police le 12 juin 1996, mais qu'il y a répondu par une lettre datée du 24 juin 1996, délivrée par un coursier de la police qui l'a remise à un responsable de la Conférence générale des travailleurs le 25 juin 1996. En tout état de cause, le gouvernement fait valoir que la Conférence générale des travailleurs n'avait pas le droit, conformément à la section 3(2) de la loi sur les rassemblements publics, 1991, d'annoncer la tenue du rassemblement sans autorisation préalable du Préfet de police.
280. Le gouvernement affirme que les dirigeants syndicaux ont pris la parole devant la foule rassemblée au Champ de Mars, bien qu'ils aient été avertis sur place que le rassemblement était illégal. Il déclare ensuite que la foule s'est dirigée vers l'Assemblée nationale dans le but de remettre une lettre au Premier ministre. Tandis que les dirigeants syndicaux étaient admis à déposer la lettre au poste de police situé à l'entrée, l'unité d'appui spéciale de la police et les officiers ont formé un cordon le long de la rue qui jouxte la Cour suprême afin d'empêcher la foule d'avancer vers la Maison du gouvernement sans faire usage de la force. En outre, le gouvernement déclare qu'en vertu de la section 8(i) de la loi sur les rassemblements publics, 1991, ces derniers ne sont pas autorisés à Port-Louis les jours où l'Assemblée nationale se réunit et siège, ce qui était en fait le cas ce jour-là.
281. Le gouvernement poursuit en déclarant qu'à la suite de la «manifestation illégale» qui a été organisée le 26 juin 1996, en violation des dispositions de la loi sur les rassemblements publics, 1991, la police a mené une enquête qui a ensuite été soumise au Procureur général de l'Etat pour qu'il prenne les mesures nécessaires. Le 31 juillet 1997, le Procureur général a recommandé que 11 dirigeants syndicaux soient poursuivis pour «avoir tenu une réunion publique dans le quartier de Port-Louis un jour de session de l'Assemblée nationale, en violation des sections 8(1), 8(4) et 18 de la loi sur les rassemblements publics, 1991». Le gouvernement déclare que, compte tenu de la décision du Procureur général, la police a contacté le secrétaire général du MLC et l'a informé que, conformément aux dispositions du règlement 14 de la réglementation sur les passeports, 1969, ses collègues et lui-même devraient restituer leurs passeports. Toutefois, le gouvernement allègue que par la suite ils n'ont pas été empêchés de quitter le pays et n'ont pas été dépossédés de leurs passeports.
282. Enfin, le gouvernement déclare que cette affaire a fait l'objet d'une enquête, qui a révélé que la police avait agi conformément au règlement 14 de la réglementation sur les passeports, 1969, bien que dans le cas présent le secrétaire général du MLC ait seulement été informé verbalement du fait que son passeport pourrait être confisqué, ce qui n'a à aucun moment été le cas.
C. Conclusions du comité
283. Le comité note que dans le cas présent le MLC dénonce les poursuites engagées contre 11 dirigeants syndicaux à la suite d'une manifestation de protestation organisée le 26 juin 1996 par la Conférence générale des travailleurs. Le comité prend également en compte les allégations selon lesquelles il aurait été fait usage de la force à l'encontre de syndicalistes au cours de cette manifestation.
284. Le comité note tout d'abord que le gouvernement réfute la plupart des allégations présentées par le MLC en ce qui concerne le délai de 48 heures qui devait être respecté pour autoriser ou interdire la manifestation du 26 juin 1996, ainsi que les événements qui ont eu lieu ce jour-là. Alors que le MLC affirme que le refus d'autoriser la manifestation n'a été reçu que 12 heures avant le début de celle-ci, prévue le 26 juin 1996, le gouvernement fait valoir que sa réponse était datée du 24 juin. Il admet toutefois que ladite réponse n'a été envoyée que le 25 juin 1996. Dans ces conditions, le comité ne peut que déplorer le fait que bien que la demande d'autorisation pour la manifestation ait été faite le 12 juin 1996, le préfet de police a mis presque deux semaines à communiquer sa réponse, alors qu'il devait sans doute savoir d'avance qu'il interdirait cette marche puisqu'il allègue que son refus était motivé par le fait que l'Assemblée générale siégerait ce jour-là. Dans ces circonstances, le comité reconnaît qu'il était clairement impossible que le MLC annule la manifestation dans un délai aussi court. Le comité rappelle que les droits syndicaux comprennent le droit de tenir des manifestations publiques. Si, pour éviter des désordres, les autorités décident d'interdire une manifestation dans les quartiers les plus fréquentés d'une ville, une telle interdiction ne constitue pas un obstacle à l'exercice des droits syndicaux, mais les autorités devraient s'efforcer de s'entendre avec les organisateurs de la manifestation afin de permettre sa tenue en un autre lieu où des désordres ne seraient pas à craindre. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 136.]
285. Quant aux événements du 26 juin 1996, le comité ne peut que noter que les informations fournies par les deux parties sur le déroulement des faits -- depuis la manifestation, jusqu'à la remise de la lettre au Premier ministre, en passant par l'usage de la violence à l'encontre des syndicalistes -- sont fondamentalement contradictoires.
286. En ce qui concerne les allégations d'usage de la force à l'encontre de syndicalistes au cours de la manifestation, le comité réaffirme énergiquement que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l'ordre public serait sérieusement menacé. L'intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace contre l'ordre public qu'il convient de contrôler, et le gouvernement devrait prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d'éviter les excès de violence dans le contrôle des manifestations qui pourraient troubler l'ordre public.
287. Pour ce qui est des allégations concernant les investigations de la police et postérieurement les poursuites engagées contre 11 dirigeants syndicaux à la suite des événements du 26 juin 1996, le comité souligne avec force que les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux. En outre, en ce qui concerne l'allégation selon laquelle les intéressés ont été informés de l'ouverture de procédures seulement quatorze mois après les événements du 26 juin 1996, le comité rappelle l'importance qu'il attache à ce que les procédures soient menées à bien rapidement. A cet égard, le comité demande au gouvernement de lui faire savoir si les poursuites ont réellement eu lieu et si tel est le cas de faire tout son possible pour s'assurer que les charges qui pèsent contre les 11 dirigeants syndicaux soient retirées sans plus tarder.
Recommandations du comité
288. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Plainte contre le gouvernement du Panama
présentée par
la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
Allégations: licenciements consécutifs à une grève
dans le secteur du trafic aérien
289. La plainte figure dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) en date du 4 décembre 1996. Le gouvernement a fait connaître ses observations dans des communications des 12 et 25 mars et du 27 mai 1997.
290. Lors de sa session de mai-juin 1997, le comité a décidé de demander des informations complémentaires à l'organisation plaignante et au gouvernement pour pouvoir se prononcer sur les allégations en toute connaissance de cause. Le gouvernement a fait parvenir un complément d'information dans une communication datée du 7 octobre 1997, tandis que l'organisation plaignante n'a pas envoyé de nouvelles informations.
291. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
292. Dans sa communication du 4 décembre 1996, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) affirme que, depuis 1984, les contrôleurs aériens panaméens revendiquent la promulgation d'une loi destinée à réglementer dans le détail leurs conditions d'emploi et de travail (grille salariale, retraite, responsabilités, etc.). De sa propre initiative, l'Association panaméenne des contrôleurs de la navigation aérienne (APACTA) a présenté une proposition de loi à la Commission des communications et des transports de l'Assemblée législative. Mais cette initiative n'a pas débouché en son temps sur des résultats concrets. Plusieurs années plus tard, le gouvernement du Panama a décidé de s'attaquer au problème. A cette fin, il a créé une commission chargée d'analyser la proposition de loi des contrôleurs panaméens. Après avoir examiné la proposition, cette commission, qui est tripartite, a présenté son rapport et le projet révisé au ministre de l'Intérieur et de la Justice qui devait en saisir le Conseil des ministres le 8 août 1996. Aucune instance gouvernementale n'a formulé d'objections à la proposition à quelque stade que ce soit de la procédure. Cependant, la loi n'a pas été promulguée alors que les problèmes auxquels se heurtent les contrôleurs de la navigation aérienne persistent.
293. La CLAT ajoute que, face à cette situation, le 14 novembre 1996, les contrôleurs aériens de l'APACTA se sont mis en grève. Leurs revendications étaient les suivantes: 1) approbation par le pouvoir exécutif de la proposition de loi susmentionnée; 2) traitement équitable et garanties minimales correspondant aux fonctions et responsabilités exercées; 3) meilleures conditions de travail permettant d'assurer un service à la fois sûr et efficace (les contrôleurs réclamaient en particulier des mesures propres à atténuer le stress lié à l'exercice de hautes responsabilités, qui suppose de maintenir la position assise de façon prolongée et d'être confiné dans un lieu de travail inadéquat, d'où des problèmes de santé -- pharyngites à répétition -- compte tenu de la nécessité de parler sans interruption pendant de longs moments); 4) adoption par l'exécutif de la grille salariale exposée au chapitre 3 du projet (date limite: 1er janvier 1997); la CLAT signale à cet égard que les contrôleurs aériens panaméens sont les moins bien payés de toute l'Amérique latine, alors qu'ils travaillent à un rythme intensif, qu'ils sont soumis à un stress très fort et qu'ils assument de lourdes responsabilités; leurs salaires varient entre 650 et 810 dollars des Etats-Unis; 5) dispositions spéciales concernant la retraite. A l'heure actuelle, il n'existe pas de loi particulière permettant aux contrôleurs de la navigation aérienne du Panama de prendre leur retraite avant l'âge où leurs capacités physiques et mentales sont à ce point diminuées qu'ils ne peuvent plus exercer sans mettre en péril la sécurité et l'efficacité du service; en tant que fonctionnaires, les contrôleurs panaméens sont assujettis à la loi générale de la Caisse d'assurance sociale qui fixe l'âge de la retraite à 60 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes.
294. La CLAT ajoute que, le 20 novembre 1996, les contrôleurs, au lendemain de l'arrêt partiel de travail qu'ils avaient observé pour obtenir une réglementation légale appropriée, ont été démis de leurs fonctions et remplacés par 94 contrôleurs étrangers, qui évidemment ne connaissent pas bien les conditions spécifiques de la navigation aérienne au Panama, en particulier les conditions climatiques et géographiques. Cela ne va pas sans risque pour la sécurité de la navigation aérienne dans le pays. Selon la CLAT, l'analyse de l'évolution du conflit depuis 1984 montre que les contrôleurs aériens ont toujours été ouverts à la négociation de conditions de travail plus justes et conformes aux responsabilités qu'ils exercent et à leur niveau de spécialisation. Leur lutte ne vise pas simplement à défendre leurs intérêts mais aussi à améliorer la sécurité des passagers qui transitent sur le territoire panaméen. Dans un rapport de 1987, le BIT reconnaît que les conditions de travail des contrôleurs aériens panaméens laissent sérieusement à désirer. Pour toutes ces raisons, la CLAT estime que leurs revendications sont totalement légitimes et que la lenteur du gouvernement à légiférer sur le statut de ces travailleurs ainsi que le licenciement de 94 d'entre eux constituent des actes graves qui portent directement atteinte à la liberté syndicale.
B. Réponse du gouvernement
295. Dans ses communications des 12 et 25 mars et du 27 mai 1997, le gouvernement déclare que la Direction de l'aéronautique civile (DAC) est dotée d'un statut juridique spécifique, de ressources propres et d'une administration pleinement autonome et qu'elle est assujettie aux dispositions constitutionnelles et légales du pays. Conformément aux dispositions en vigueur, la Direction de l'aéronautique civile a comme organe suprême un comité directeur présidé par le ministre de l'Intérieur et de la Justice et dont sont aussi membres le ministre des Finances et du Trésor, le ministre du Commerce et de l'Industrie, le Contrôleur général des comptes de la République et le directeur général de la DAC. De par sa position géographique, la République du Panama est un important centre de contrôle de la navigation aérienne internationale -- contrôle des signaux radar, tours de contrôle, services d'information par différentes fréquences radio -- et des opérations intérieures. Par décision des autorités nationales et conformément aux réglementations internationales qui découlent des traités ratifiés par le Panama, le contrôle de la navigation aérienne est considéré comme un service essentiel. C'est pourquoi la législation pénale en vigueur (Code pénal) qualifie de délit et punit en tant que tel tout acte faisant obstacle à cette activité. Conformément aux dispositions légales qui régissent son fonctionnement, le comité directeur de la Direction de l'aéronautique civile a approuvé, le 6 juillet 1981, le statut du personnel qui fixe les droits et devoirs du personnel administratif et technique de l'institution dans tous ses établissements ainsi que les interdictions et mesures disciplinaires applicables, et qui définit des règles de procédure pour diverses actions du personnel. L'entrée en vigueur du statut a été fixée au 1er septembre 1981.
296. Se référant aux allégations, le gouvernement explique qu'à partir de 1984 les contrôleurs de la navigation aérienne qui ont qualité de fonctionnaires ont exprimé le vœu qu'une législation détermine des conditions de travail spéciales en leur faveur -- progression automatique des salaires, régime de retraite, définition des responsabilités. En octobre 1993, l'un des membres du corps des contrôleurs de la navigation aérienne au service de la Direction de l'aéronautique civile, M. Claudio Dutary, qui à l'époque présidait la Commission des contrôleurs de la navigation aérienne, de son initiative propre, a soumis à la Commission des communications et des transports de l'Assemblée législative une proposition de loi comprenant 40 articles et des considérants. Mais, l'assemblée n'ayant pas réservé un accueil favorable à ce projet, celui-ci est resté sans suite. La Constitution consacre l'indépendance des trois pouvoirs -- exécutif, législatif et judiciaire -- et l'Assemblée législative est donc pleinement habilitée à se prononcer pour ou contre les projets qui lui sont soumis.
297. Le gouvernement ajoute qu'un an après avoir accédé à la présidence de la République, M. Ernesto Pérez Balladares, actuel Président du Panama et chef de l'exécutif, en réponse à une requête présentée par l'Association panaméenne des contrôleurs de la navigation aérienne (APACTA) -- association civile de fonctionnaires -- en octobre 1995, a donné au ministre de l'Intérieur et de la Justice et à la Direction de l'aéronautique civile l'instruction de créer une commission tripartite chargée d'analyser une proposition en vue d'élaborer un avant-projet de loi visant à régir l'activité de ces fonctionnaires. Les contrôleurs aériens étaient représentés dans cette commission par l'APACTA, association de caractère civil créée dans le but d'améliorer la navigation aérienne. La commission tripartite s'est réunie huit fois d'avril à juin 1996 pour réviser, examiner et approuver diverses questions: comités techniques, fonctions, qualités et compétences requises, responsabilités civile, administrative et pénale des contrôleurs aériens. Ont aussi été examinés d'autres aspects de caractère général concernant l'activité et les normes relatives à l'échelle salariale, aux retraites, au retrait de licence, etc. Des comptes rendus de ces débats ont été rédigés chaque fois. Certaines questions restées en suspens -- grille salariale, retraites --, qui faisaient partie des revendications exprimées par les contrôleurs aériens en tant que fonctionnaires, ont été renvoyées à des consultations supplémentaires. Au cours des réunions, il y a eu des échanges de notes, d'opinions et d'observations concernant un avant-projet de loi à soumettre à l'Assemblée législative, ainsi que des conversations entre les représentants de l'APACTA, de la Direction de l'aéronautique civile, du ministère de l'Intérieur et de la Justice, du Contrôleur général des comptes de la République et du ministère de la Planification et de la Politique économique. En dépit de ce dialogue entre les principaux responsables de la question et de la volonté affirmée du Président de la République, M. Ernesto Pérez Balladares, de trouver une solution définitive aux problèmes et de concrétiser le projet de loi en question, le 14 novembre 1996 les contrôleurs de la navigation aérienne, sans argument de poids ni raison justifiée, ont annoncé qu'ils suspendaient leurs activités à partir de ce jour en leur qualité d'agents de l'Etat.
298. Le gouvernement précise que, vu le communiqué de l'APACTA, la Direction de l'aéronautique civile a convoqué une réunion, le 18 novembre 1996, jour où elle a pris connaissance des dispositions prises par l'APACTA. Au cours de cette réunion, la représentation du ministère de la Planification et de la Politique économique a signalé à l'APACTA la nécessité d'adapter l'avant-projet de loi, promettant de donner une réponse dans la semaine. L'après-midi du 18 novembre, l'APACTA a présenté un ultimatum qui a pris effet sous prétexte que l'avant-projet de loi n'avait pas été approuvé par le gouvernement. Le pays s'est donc trouvé privé de communications aériennes, du fait de l'arrêt total du service public. Les préjudices pour l'Etat et les particuliers, gravissimes, ont été estimés à des millions par jour pour les secteurs touchés. Il convient de signaler que le ministère du Travail n'est pas intervenu, parce que sa compétence se limite au Code du travail, lequel ne s'applique pas en général aux services publics. L'APACTA est une association d'agents de l'Etat dont les statuts et le règlement relèvent du Code civil qui prétend obtenir l'adoption d'un projet de loi qui, en devenant loi de la République, concrétiserait les principes et les normes auxquels ses membres aspirent.
299. Le gouvernement indique que la grave faute commise par les contrôleurs aériens (seuls 22 des 94 contrôleurs aériens se sont présentés à leur travail) de l'unique institution nationale qui fournit des services essentiels pour la sécurité de la navigation aérienne nationale et internationale a conduit le directeur général de l'aéronautique civile, usant des facultés que lui confèrent la loi organique de l'institution ainsi que le règlement interne du personnel de la DAC, en vigueur depuis 1981, à démettre de leur poste les 72 fonctionnaires qui ont favorisé, motivé, appuyé l'arrêt massif du travail et y ont participé, arrêt à la fois intempestif et préjudiciable, les prestations qui leur étaient dues leur ayant été versées plus tard. L'article 65 de la Constitution dispose que l'Etat peut imposer des restrictions spéciales à la grève dans les services publics, et le Code du travail exige que ces services soient assurés en cas de grève légalement décrétée. En abandonnant leur poste le 19 novembre 1996, les contrôleurs de la navigation aérienne ont mis en danger la sécurité des aéronefs et la vie des passagers et de la population en général, ce qui en outre a causé de graves préjudices économiques. La Direction de l'aéronautique civile n'a pas pu offrir avec la sécurité, l'efficacité, la qualité et la rapidité requises ses services de communication aérienne, de radar, de radio et de contrôle de la navigation aux compagnies aériennes domestiques et internationales qui les utilisent quotidiennement. Il y a lieu de signaler que la législation panaméenne qui régit les agents de l'Etat indique (à l'article 152 (paragr. 6, 13 et 14 de la loi no 9 de 1994) qui s'applique à tous les agents de l'Etat conformément aux dispositions de l'article 135 de cette loi) que «peut être directement démis de ses fonctions» tout agent de l'Etat qui sans justification refuse de s'acquitter de son service, ou s'en acquitte mal ou avec retard; qui ne se présente pas à son poste ou qui le quitte avant d'être remplacé; qui fomente ou participe à une grève interdite ou déclarée illégale ou qui n'assure pas le service minimum requis en cas de grève légale. Dans ses articles 238, 241 et 341, le Code pénal dispose que toute personne qui met en danger la sécurité des moyens de transport aérien ou qui empêche ou entrave le fonctionnement normal d'un tel service public sans qu'il y ait eu cessation légale de l'activité commet un délit passible de prison. L'action des contrôleurs aériens a causé de graves préjudices aux compagnies aériennes, aux usagers et à l'économie nationale, et leur abandon de poste est en totale contravention avec la législation en vigueur. Le ministère public a ouvert une enquête concernant les délits qui auraient été commis (actes contre les moyens de transport et de communication, association illicite en vue de commettre un délit, abus d'autorité et infraction imputables à des agents de l'Etat) par les contrôleurs aériens.
300. Le gouvernement rappelle que le Comité de la liberté syndicale, dans des cas analogues, a considéré que le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans les services essentiels au sens strict du terme (c'est-à-dire les services dont l'interruption pourrait mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l'ensemble ou une partie de la population) et que le contrôle de la navigation aérienne est un service essentiel. En conclusion, le gouvernement signale que la République du Panama a toujours respecté les conventions qu'elle a ratifiées, parmi lesquelles les conventions nos 87 et 98, et qu'elle est également signataire de la Convention de l'aviation civile internationale, adoptée par la loi no 52 du 30 novembre 1959; cette dernière impose de lourdes responsabilités aux parties contractantes en matière de sécurité aérienne, laquelle a été mise en danger par l'action des contrôleurs.
301. Le gouvernement fait également mention des faits qu'il qualifie d'extrêmement graves, survenus le jour de la grève au Centre de contrôle radar de Balboa et qui sont imputables aux grévistes; plus précisément, ces derniers ont enlevé tous les matériels d'instruction et d'information (documents, formulaires, annuaires téléphoniques, etc.) et ont modifié les codes d'accès au système radar, qui de ce fait n'a pu être utilisé pendant les vingt-quatre heures qui ont suivi, mettant en danger des vies humaines et des biens. C'est pourquoi il n'a pas été possible d'offrir le service du contrôle de la circulation aérienne; seul un service de base d'information de vol a pu être assuré. L'attitude des grévistes a donné lieu à des conflits concernant le trafic en transit. Par ailleurs, du 20 au 22 novembre 1996, les représentants des grévistes (dirigeants de l'APACTA) se sont vu proposer un nouvel horaire de travail qui aurait permis aux contrôleurs d'être réintégrés dans leurs postes de travail, mais ceux-ci ont décidé de poursuivre la grève; ces représentants ont néanmoins déclaré à leurs adhérents qu'ils n'avaient aucune raison de se présenter sur leur lieu de travail vu qu'ils avaient été licenciés.
C. Informations complémentaires du gouvernement
302. Dans sa communication du 7 octobre 1997, le gouvernement fournit les informations suivantes:
D. Conclusions du comité
303. Le comité observe que dans le présent cas l'organisation plaignante dénonce le licenciement de nombreux contrôleurs de la navigation aérienne qui avaient déclenché une grève afin d'obtenir une réglementation légale adéquate de leurs conditions de travail à la suite de la non-adoption d'un projet de loi élaboré par une commission tripartite pour donner suite aux revendications d'amélioration de leurs conditions de travail que l'APACTA demandait depuis des années.
304. Le comité observe que le gouvernement souligne les aspects suivants: 1) il s'agissait d'un avant-projet de loi; 2) la commission tripartite avait laissé en suspens certaines questions (grilles salariales, retraites); 3) les parties continuaient de se consulter à propos de l'avant-projet; 4) la Direction de l'aéronautique civile s'était engagée le 18 novembre 1996 à donner une réponse à l'APACTA dans la semaine mais, le lendemain, les contrôleurs aériens ont suspendu toutes leurs activités dans le pays; 5) quoi qu'il en soit, l'adoption des lois relève de l'Assemblée législative qui agit en toute indépendance du pouvoir exécutif; 6) compte tenu de la gravité de la faute commise (qui est clairement contraire à la législation en vigueur et qui a mis en danger (notamment par la modification des codes d'accès au système radar) la sécurité et la vie des passagers des aéronefs et a causé de très graves préjudices, y compris financiers), une sanction conforme à la législation a été appliquée, à savoir le licenciement direct des 72 fonctionnaires ayant abandonné leur poste; 7) le contrôle de la navigation aérienne est considéré dans la législation nationale comme une activité essentielle comportant l'interdiction de la grève, et les traités internationaux ratifiés par le Panama imposent de lourdes obligations en matière de sécurité aérienne.
305. A cet égard, le comité a considéré que le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans les services essentiels au sens strict du terme (c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne) et que le contrôle de la navigation aérienne est un service essentiel. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 526 et 544.] Dans le présent cas, l'organisation plaignante n'ayant pas envoyé les informations complémentaires qui lui avaient été demandées, s'agissant d'un service essentiel et vu que, pendant la grève d'après le gouvernement, les codes d'accès au système radar ont été modifiés et que les contrôleurs se sont vu proposer une réintégration dans leurs postes, qu'ils ont refusée, le comité considère que, la sécurité de la population ayant été mise en danger, il ne peut demander au gouvernement de donner suite à la demande de réintégration des licenciés dans leurs postes de travail, qui a été formulée par l'organisation plaignante.
306. En revanche, le comité observe que, selon les indications du gouvernement, il n'existe pas dans la législation de procédures compensatoires (par exemple de conciliation ou d'arbitrage) auxquelles des agents de l'Etat (en l'occurrence les contrôleurs aériens), qui sont privés du droit de grève pourraient recourir en cas de conflit avec leurs employeurs. A cet égard, le comité rappelle que «les employés privés du droit de grève parce qu'ils rendent des services essentiels doivent bénéficier de garanties appropriées destinées à sauvegarder leurs intérêts: par exemple, interdiction correspondante du droit de lock-out, établissement d'une procédure paritaire de conciliation et, seulement lorsque la conciliation échoue, institution d'une procédure paritaire d'arbitrage». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 551.] Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour introduire dans la législation des dispositions en la matière.
Recommandation du comité
307. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Rappelant que «les employés privés du droit de grève parce qu'ils rendent des services essentiels doivent bénéficier de garanties appropriées destinées à sauvegarder leurs intérêts: par exemple, interdiction correspondante du droit de lock-out, établissement d'une procédure paritaire de conciliation et, seulement lorsque la conciliation échoue, institution d'une procédure paritaire d'arbitrage», le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour introduire dans la législation des dispositions en la matière.
Cas no 1852
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni
présentée par
le Congrès des syndicats (TUC)
Allégations: actes d'ingérence et de discrimination antisyndicale
de l'employeur
308. Le comité a déjà examiné ce cas à sa session de mai-juin 1996, où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 304e rapport, paragr. 474-498, approuvé par le Conseil d'administration à sa 266e session (juin 1996).]
309. Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations sur ce cas dans des communications datées du 4 mars et du 18 décembre 1997.
310. Le Royaume-Uni a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Examen antérieur du cas
311. Le Congrès des syndicats (TUC) allègue que la loi et la pratique britanniques demeurent incompatibles avec les obligations découlant de la ratification de la convention no 98, notamment en ce qui concerne l'absence de protection des travailleurs contre la discrimination au moment de l'embauche et la discrimination antisyndicale dans l'emploi. Le TUC allègue en particulier des mesures d'intimidation à l'encontre de membres syndicaux dans l'entreprise Co-Steel de Sheerness (Angleterre) visant à ne plus reconnaître comme représentatifs les syndicats affiliés au TUC, la Confédération des industries mécaniques (ISTC) (qui était le syndicat majoritaire) et le Syndicat unifié du génie civil et de l'électricité, ainsi que l'absence de tout recours juridique.
312. Pour sa part, le gouvernement affirme que la législation générale sur l'emploi est pleinement conforme aux exigences de la convention no 98 et rappelle, en renvoyant à l'article 146 de la loi (récapitulative) de 1992 sur les syndicats et les relations du travail (TULRA), que la législation du Royaume-Uni assure une protection étendue et efficace contre la discrimination dans l'emploi pour appartenance à un syndicat, ajoutant que, si l'article 13 de la loi de 1993 sur la réforme syndicale et les droits en matière d'emploi (TURER) a été modifié, c'est pour que la loi ne puisse pas être utilisée contre des employeurs qui prennent des mesures raisonnables pour modifier leurs mécanismes de négociation.
313. Lors de sa session de juin 1996, le Conseil d'administration a approuvé, au vu des conclusions intérimaires du comité, les recommandations suivantes:
B. Nouvelles observations du gouvernement
Réponse du 4 mars 1997 (ancien gouvernement)
314. Répondant aux recommandations intérimaires du comité, le gouvernement s'est déclaré convaincu que ni la convention no 87 ni la convention no 98 n'obligeaient un Etat à prendre des mesures pour enquêter sur les mécanismes de relations professionnelles internes des entreprises ou à leur demander des comptes pour violations des lois internes qui assurent le respect des dispositions de ces conventions. Il a toutefois joint à sa réponse une lettre que la Co-Steel avait fournie de sa propre initiative à la Confédération de l'industrie britannique (CBI) pour les points soulevés par le TUC. Le gouvernement réaffirme que la législation du Royaume-Uni assure aux membres des syndicats une protection efficace contre la discrimination. Toute personne qui estime avoir fait l'objet d'une discrimination pour appartenance ou activités syndicales peut demander réparation en portant plainte devant un tribunal du travail. Le gouvernement ajoute qu'à sa connaissance aucune plainte de ce genre n'a été déposée à l'encontre de la Co-Steel.
315. Le gouvernement souligne que les Etats ne peuvent ni forcer les employeurs à ne pas violer les principes de la liberté syndicale qui assurent le respect des dispositions des conventions ni forcer les travailleurs à demander réparation lorsque ces principes sont violés. Le gouvernement est absolument convaincu qu'il respecte les dispositions des conventions en fournissant un cadre de droits qui protège le droit des travailleurs à ne pas faire l'objet d'une discrimination pour raisons syndicales, et qui offre aux travailleurs des moyens de recours suffisants lorsque ces principes sont violés. Si les allégations de discrimination pour des motifs d'appartenance syndicale présentées dans cette plainte étaient fondées, même si le gouvernement souligne que la Co-Steel les rejette, les travailleurs concernés auraient eu de bonnes raisons de se plaindre auprès d'un tribunal du travail. Le gouvernement s'efforce de faire connaître les droits civils des travailleurs en publiant des dépliants que l'on peut trouver un peu partout dans les bureaux de main-d'œuvre du pays. Il ne saurait donc être tenu pour responsable du choix fait par les travailleurs de ne pas utiliser les moyens de recours juridique qui sont mis à leur disposition.
316. Pour ce qui est de la protection des travailleurs contre les actes préjudiciables motivés par l'appartenance syndicale, le gouvernement précise que l'article 146 de la loi TULRA assimile le fait de menacer un travailleur de licenciement s'il ne renonce pas à son affiliation syndicale à une mesure préjudiciable autre que le licenciement prise pour l'empêcher ou le dissuader d'appartenir à un syndicat. Les amendements apportés à l'article 148 par l'article 13 de la loi de 1993 ne peuvent pas s'appliquer car il est évident que c'est uniquement pour décourager l'affiliation syndicale que l'on oblige des travailleurs à conclure un contrat qui interdit toute appartenance syndicale et qu'on les menace de licenciement s'ils refusent d'obtempérer. Il ne semble pas non plus y avoir d'allégations d'incitations aux travailleurs, comme dans les affaires Wilson et Palmer.
317. Selon l'article 149 de la loi TULRA, l'indemnité qui peut être accordée à une personne dont la plainte pour violation de l'article 146 est déclarée recevable ne se limite pas à la perte financière encourue, et le montant de cette indemnité n'est pas limité. Tout en précisant qu'aucun recours juridique ne peut garantir que le droit en cause ne sera jamais violé, le gouvernement estime qu'un tel recours suffit à dissuader les employeurs d'enfreindre les droits que l'article 146 accorde aux salariés.
318. A eux deux, les articles 146 et 152 de la loi TULRA ont pour effet que toute disposition d'un contrat qui interdit l'appartenance syndicale est en pratique nulle et non avenue. En vertu de l'article 152, il est déloyal de licencier un travailleur en raison de son appartenance ou de sa décision de s'affilier à un syndicat. Autrement dit, si un travailleur de la Co-Steel qui est soumis à une disposition qui interdit l'affiliation syndicale devient ou redevient membre de l'ISTC ou de tout autre syndicat, et si, de ce fait, il est licencié ou fait l'objet d'une autre mesure préjudiciable, il lui est loisible de déposer plainte devant un tribunal du travail, cette plainte ayant toutes les chances d'aboutir. L'indemnité qui lui sera accordée sera probablement importante. Les articles 146 et 152 protègent également contre le licenciement et contre les autres mesures prises contre les travailleurs qui participent aux activités syndicales à un «moment approprié». Dans le cas d'un syndicat qui n'est pas reconnu, comme l'ISTC, les «moments appropriés» désignent pour le moins toutes les heures qui ne correspondant pas à des heures de travail et pendant lesquelles le travailleur ne se trouve pas dans les locaux de l'employeur.
319. Le gouvernement conclut que si les travailleurs de la Co-Steel ont été menacés de licenciement ou de toute autre sanction en cas de participation à des réunions syndicales pendant leurs heures de loisirs, ou de participation à des manifestations syndicales comme celles mentionnées dans les allégations, ils peuvent toujours déposer plainte devant un tribunal, cette plainte ayant toutes les chances d'aboutir.
320. Pour ce qui est de l'article 13 de la loi TURER, le gouvernement déclare que les dispositions de cet article n'ont aucun rapport avec les allégations qui sont présentées dans le cas d'espèce. Le droit de s'affilier à un syndicat n'implique pas le droit d'obtenir que ce syndicat négocie avec les employeurs de questions telles que les conditions de travail. La loi sur les mesures autres que le licenciement a été conçue dès le départ comme une loi portant sur les droits individuels des travailleurs, et non sur des questions de négociation collective. Si le gouvernement a introduit l'article 13 c'est pour s'assurer qu'une disposition qui protège les individus contre la discrimination motivée par l'appartenance syndicale n'a pas pour effet pervers d'empêcher les employeurs de modifier leurs mécanismes de représentation collective (mot souligné par le gouvernement). Les mesures prises par un employeur pour modifier les mécanismes de négociation avec un syndicat n'équivalent pas en soi à des mesures prises pour dissuader les travailleurs de s'affilier à un syndicat ou leur porter préjudice pour cette raison.
321. Le gouvernement affirme qu'il a mis au point des méthodes volontaristes de détermination des salaires très élaborées dans lesquelles la négociation collective continue à occuper une place importante. Toutefois, comme, au Royaume-Uni, les relations professionnelles reposent sur le volontarisme, soutenu par des droits individuels en matière d'emploi garantis par la loi, le gouvernement n'a pas à intervenir en forçant les employeurs à garder des systèmes de négociation collective qui ne leur paraissent plus répondre à leurs besoins. Par conséquent, c'est aux employeurs qu'il appartient, compte tenu de leur situation et des besoins de leur entreprise, de reconnaître ou non, ou de continuer à reconnaître ou non, un syndicat à des fins de négociation collective. Il peut arriver qu'une entreprise cesse de reconnaître un syndicat, même si cela n'arrive pas très souvent. La décision de retrait de la reconnaissance prise par la Co-Steel ne peut pas être considérée comme fondamentalement contraire aux pratiques et traditions des relations professionnelles du Royaume-Uni ou à la législation de ce pays.
322. Pour ce qui est de la déclaration du comité concernant l'article 13, à savoir que cet article «risque d'aboutir à une situation de nature à décourager aisément et effectivement la négociation collective plutôt que de l'encourager», le gouvernement souligne une fois de plus que l'article 13 est neutre (mot souligné par le gouvernement), dans la mesure où il laisse aux employeurs la possibilité d'encourager, ou de décourager, la négociation collective. La négociation collective demeure une option qui est à la disposition des employeurs et des organisations d'employeurs et de travailleurs qui souhaitent définir les conditions d'emploi par le biais d'une convention collective. Les salaires et les conditions de travail sont déterminés par la négociation collective, du moins en partie, pour près de 50 pour cent des travailleurs.
323. Enfin, le gouvernement ajoute que la législation du Royaume-Uni prévoit des mécanismes qui sont financés par le gouvernement et qui permettent d'encourager et d'établir un mécanisme de négociation collective lorsque l'employeur et le syndicat sont d'accord sur le principe que la négociation collective est un bon moyen de déterminer les conditions de travail des travailleurs. C'est ainsi que le gouvernement finance un service d'arbitrage et de conciliation connu sous le nom d'ACAS. L'existence de ce service apporte un appui à la négociation collective dans la mesure où les parties savent qu'un service impartial et indépendant est à leur disposition en cas de différends. Ce service peut aussi aider les employeurs et les travailleurs à modifier leur mécanisme de négociation collective ou à en créer un lorsque les deux parties optent librement pour cette approche.
324. En conclusion, le gouvernement réitère fermement qu'il n'a contrevenu à aucune des obligations qui lui incombent en vertu des conventions nos 87 et 98, et soutient une fois de plus que cette plainte devrait être rejetée par le comité.
325. La lettre adressée par la Co-Steel à la Confédération de l'industrie britannique explique qu'en 1992 la direction a adopté une nouvelle approche des relations professionnelles qui englobe l'ensemble du personnel de l'entreprise, celle-ci optant en conséquence pour la non-reconnaissance des syndicats à des fins de négociation. Ce retrait de la reconnaissance s'est fait conformément à la législation du travail du Royaume-Uni. La conclusion de nouveaux contrats de travail n'empêche pas les travailleurs qui souhaitent rester membres du syndicat de le faire. Par conséquent, selon la politique de l'entreprise, les travailleurs sont libres d'appartenir ou non à un syndicat.
326. La Co-Steel déclare que c'est pour faciliter la participation de la direction et des travailleurs à d'autres formes de relations professionnelles, de plus en plus demandées, qu'elle a pris cette décision. Elle précise qu'elle n'a manifesté aucune hostilité à l'égard des syndicats à ce moment-là et qu'elle n'en manifeste encore aucune aujourd'hui. Elle ne s'est jamais opposée à ce que des dirigeants syndicaux distribuent des tracts ou des journaux aux travailleurs qui entrent ou qui quittent leur travail. Elle ne s'est jamais opposée non plus à ce que des travailleurs lisent des documents du syndicat au travail. Par ailleurs, elle n'a jamais été citée devant un tribunal du travail pour des questions de droits d'appartenance syndicale.
327. La Co-Steel ajoute que, pendant les années où l'ISTC était reconnue, il y avait eu un certain nombre de problèmes. Elle affirme que le syndicat a perdu du terrain et de l'influence en 1974, date à laquelle trois syndicats d'atelier ont rompu la convention d'atelier créant un syndicat unique que l'ISTC avait réussi à obtenir en 1972. En 1977, bien qu'ayant utilisé le Service consultatif d'arbitrage et de conciliation (ACAS), l'ISTC n'a pas réussi à se faire reconnaître par vote pour le personnel d'encadrement et le personnel administratif.
328. Pour ce qui est des allégations précises présentées par l'organisation plaignante au sujet de l'ISTC, la Co-Steel a fourni les informations suivantes:
329. Pour ce qui est du contexte, en 1988, la Co-Steel, qui cherchait à mettre en place un nouveau mécanisme de relations professionnelles, a adopté, avec l'accord du comité représentatif paritaire du syndicat de l'entreprise (mais sans l'accord ni le consentement des dirigeants de l'ISTC extérieurs à l'entreprise), une approche entièrement nouvelle. Selon la Co-Steel, les travailleurs ont si bien accueilli cette nouvelle approche que les syndicats ont fini par être marginalisés et inutiles. Les travailleurs se sont de plus en plus désintéressés du syndicalisme, et beaucoup ont quitté les syndicats alors que très peu devenaient membres. En 1991, les effectifs de l'ensemble des syndicats de l'entreprise étaient au plus bas, avec 61 pour cent seulement. En avril 1992, l'entreprise avait cessé de reconnaître les quatre syndicats. Chaque travailleur se vit offrir de nouveaux contrats personnels, et 99,9 pour cent des travailleurs touchant un salaire horaire avaient accepté ces contrats au bout de vingt jours.
330. La Co-Steel conclut en disant qu'elle a pris une nouvelle direction et que des moyens ont été mis en place pour que l'entreprise devienne hautement performante et capable de s'adapter à l'environnement toujours plus compétitif du prochain millénaire (tout cela dans le cadre juridique actuel des relations professionnelles au Royaume-Uni).
331. Elle se dit également prête à recevoir la visite de membres de l'OIT si nécessaire.
Réponse du 18 décembre 1997
(nouveau gouvernement)
332. Dans sa communication du 18 décembre 1997, le gouvernement a fait savoir que le ministre d'Etat du Commerce et de l'Industrie avait rencontré le secrétaire général de la Confédération des industries mécaniques pour entendre son point de vue sur cette affaire. Lors de cette rencontre, l'ISTC a déclaré au ministre que ses membres continuaient de rencontrer de sérieux problèmes dans l'exercice de leurs droits syndicaux. Le ministre a fait part de la détermination du gouvernement à faire en sorte que les individus soient libres d'appartenir ou non à un syndicat et qu'un syndicat soit reconnu à des fins de négociations lorsque la majorité des travailleurs concernés votent en faveur de cette reconnaissance.
333. Il est également précisé que le ministère du Commerce et de l'Industrie est en train de préparer un Livre blanc sur l'équité au travail qui doit sortir d'ici juin 1998. On y trouvera des propositions qui permettront d'élaborer des normes décentes au travail tout en maintenant un marché du travail qui s'adapte et en améliorant la compétitivité, l'accent étant mis sur la reconnaissance des syndicats. Les partenaires sociaux ont apporté leur contribution à l'élaboration de ce Livre blanc, et l'ISTC a accepté de fournir des informations sur les expériences de ses membres au sein de la Co-Steel. Le gouvernement a précisé qu'après la publication de ce rapport l'ISTC aura encore une occasion de faire connaître son point de vue avant l'élaboration définitive du texte de loi.
334. Enfin, le gouvernement a transmis d'autres éléments d'information que lui a fournis la Co-Steel et qui réitèrent les informations données ci-dessus.
C. Conclusions du comité
335. Premièrement, tout en notant avec intérêt les mesures prises par le ministre d'Etat du Commerce et de l'Industrie pour rencontrer les dirigeants de la Confédération des industries mécaniques (ISTC) et pour connaître leur point de vue sur la situation de la Co-Steel, le comité note avec regret qu'aucune mesure n'a été prise pour ouvrir une enquête approfondie sur les allégations précises de tactiques antisyndicales, ainsi qu'il a été demandé dans les recommandations formulées à propos de ce cas lorsqu'il a été examiné pour la première fois. [Voir 304e rapport, paragr. 498 b).] L'absence d'enquête approfondie sur cette affaire est d'autant plus problématique qu'il y a très souvent contradiction entre la vision des faits présentés par l'organisation plaignante et celle de la Co-Steel. Par conséquent, le comité se doit de rappeler que, pour les allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale, les autorités compétentes en matière de travail doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatés. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 754.]
336. Toutefois, alors que la Co-Steel a admis les faits tels qu'ils sont présentés par le TUC, le comité estime qu'il peut procéder à l'examen quant au fond de la plainte sur ces points. Il rappelle les allégations de l'organisation plaignante, à savoir que, devant les efforts déployés par la direction pour proposer en 1992 de nouveaux contrats qui, selon l'organisation plaignante, prévoient l'obligation de renoncer à l'appartenance syndicale, l'ISTC a organisé des réunions de branche pour savoir si les travailleurs de la Co-Steel souhaitaient que leurs salaires et leurs conditions de travail continuent à être déterminés par voie de négociation collective et s'ils souhaitaient que l'ISTC les représente à cet effet. L'organisation plaignante a fait savoir que sur les 442 personnes qui avaient droit de vote, 348 (soit 78,74 pour cent) ont opté pour la négociation collective et pour une représentation par l'ISTC. La Co-Steel précise dans la lettre qu'elle a adressée à la CBI que la législation britannique n'oblige pas les entreprises à tenir compte des résultats du scrutin et que, devant le déclin, en 1991, des effectifs de l'ensemble des syndicats de l'entreprise (pas plus de 61 pour cent), l'entreprise avait simplement décidé de ne plus reconnaître l'ISTC et les trois autres syndicats. Toutefois, la Co-Steel n'a pas réfuté les résultats du scrutin de 1992 mentionnés dans les obligations.
337. Tout en gardant à l'esprit que la négociation collective ne peut être efficace que si elle est volontaire et si elle n'implique aucun recours à des mesures de contrainte qui en modifieraient le caractère volontaire, le comité estime que les autorités compétentes devraient, dans tous les cas, prendre des mesures pour procéder à la vérification en toute objectivité de toute demande d'un syndicat prétendant représenter la majorité des travailleurs d'une entreprise, pour autant qu'une telle demande semble plausible et, s'il s'avère que le syndicat en question est bien le syndicat majoritaire, prendre les mesures de conciliation appropriées pour obtenir sa reconnaissance par l'employeur de ces syndicats aux fins de négociation collective. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 845 et 824.] Tout en retenant des observations faites par le gouvernement que la négociation collective demeure une option à la disposition de l'employeur, le comité estime, compte tenu des faits à sa disposition dans le cas d'espèce, que la Co-Steel a court-circuité l'organisation représentative et qu'elle a entamé des négociations individuelles directes avec ses salariés, d'une manière contraire au principe selon lequel la négociation collective entre employeurs et organisations de travailleurs devrait être encouragée et favorisée. Le comité note avec intérêt l'information fournie par le gouvernement, à savoir qu'un Livre blanc sur l'équité au travail et insistant sur la reconnaissance des syndicats est en préparation. Le comité espère que le texte de loi qui pourrait en résulter aura pour effet d'encourager la reconnaissance par l'employeur des organisations de travailleurs représentatives et prie le gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard.
338. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle l'ISTC se serait vu refuser l'accès aux lieux de travail de la Co-Steel, le comité retient des informations qui lui ont été fournies par le précédent gouvernement que la législation du Royaume-Uni n'oblige pas les entreprises à garantir aux représentants syndicaux un tel accès et que les membres peuvent de toute façon se rencontrer à l'extérieur de l'entreprise. A cet égard, le comité se doit de rappeler une fois de plus, comme il l'a fait lors de son premier examen de cette affaire, que les représentants des travailleurs doivent disposer des facilités nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, y compris le droit de pénétrer dans les lieux de travail. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 957.] Le comité souligne également que les gouvernements devraient garantir aux représentants syndicaux l'accès aux lieux de travail, en respectant pleinement les droits de propriété et les droits de la direction, afin que les syndicats puissent communiquer avec les travailleurs dans le but de les informer des avantages que la syndicalisation peut présenter pour eux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 954.] En conséquence, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre à l'ISTC un accès raisonnable à l'entreprise Co-Steel pour entrer en contact avec ses membres confirmés et potentiels. Il demande au gouvernement de le tenir informé en la matière.
339. Le comité note également que la loi n'oblige pas la Co-Steel à communiquer avec l'ISTC. Compte tenu, en particulier, du caractère apparemment représentatif de l'ISTC, ainsi que l'a montré le scrutin de 1992, le comité souhaite une fois de plus rappeler que, d'après la recommandation (no 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971, les représentants des travailleurs devraient avoir accès sans retard injustifié à la direction de l'entreprise et auprès des représentants de la direction autorisés à prendre des décisions lorsque cela est nécessaire pour le bon exercice de leurs fonctions.
340. Pour ce qui est de la manifestation organisée par le TUC à Sheerness pour soutenir le droit à une représentation sur le lieu de travail, le comité retient des informations fournies par le gouvernement que la Co-Steel a précisé qu'elle n'avait dit à aucun de ses salariés que sa participation à cette manifestation risquait de compromettre son emploi et qu'elle avait simplement fait placarder une notice demandant à tous d'éviter d'y participer. A cet égard, le comité se doit de rappeler que le droit d'organiser des réunions publiques est un aspect important des droits syndicaux [voir Recueil, op. cit., paragr. 464] et que cette activité est d'autant plus légitime que, dans le cas d'espèce, elle avait pour but spécifique de traiter la question syndicale manifestement légitime du droit à une représentation. Le comité estime que le fait de faire placarder une notice suggérant aux travailleurs de la Co-Steel de ne pas participer à une telle manifestation peut être compris comme une menace adressée aux travailleurs en question pour les empêcher d'exercer leurs droits syndicaux à cet égard, et constitue, par conséquent, une ingérence dans ce domaine. Il prie le gouvernement de faire en sorte que cela ne se reproduise plus.
341. Enfin, pour ce qui est de l'argument du gouvernement antérieur concernant la pertinence de l'article 13 de la loi TURER, le comité se voit dans l'obligation de dire que, en l'absence d'une réponse plus détaillée concernant les faits reposant sur une enquête approfondie et indépendante, il n'est pas en mesure de juger de la pertinence de l'article 13 pour l'affaire en cause. Il tient toutefois à rappeler que c'est le gouvernement qui a soulevé la question de l'article 13 dans sa première réponse à cette plainte et que les conclusions formulées par le comité reposent entièrement sur les conclusions qu'il a formulées dans un cas précédent où il était reproché au gouvernement britannique de violer la liberté syndicale [voir 294e rapport, cas no 1730], et dans lequel il avait invité le gouvernement à reconsidérer l'article 13 avec les partenaires sociaux, cet article ne pouvant guère être considéré comme une mesure visant à encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi, comme prévu par l'article 4 de la convention no 98 (ratifiée par le Royaume-Uni). Le comité rappelle à cet égard que l'article 13 ordonne à un tribunal qui examine une plainte contre une mesure autre qu'un licenciement prise par un employeur afin d'empêcher ou de dissuader un travailleur de rester ou de devenir membre d'un syndicat indépendant, de tenir compte en premier lieu du but de l'employeur, qui est de modifier ses relations avec ses salariés, et que le comité avait conclu que cet article limitait considérablement la marge d'appréciation du tribunal chargé de décider si une telle mesure est contraire à l'article 146 concernant les mesures autres que le licenciement. [Voir 294e rapport, cas no 1730, paragr. 199.] Le comité ne pense pas que les effets que pourrait avoir l'article 13 ont changé à cet égard, et prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier cet article afin qu'il assure aux organisations de travailleurs une protection adéquate contre tout acte d'ingérence de la part de l'employeur et afin qu'il n'ait pas pour effet, dans la pratique, de décourager la négociation collective. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
Recommandations du comité
342. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1912
Rapport où le comité demande a être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni (île de Man)
présentée par
le Conseil professionnel de l'île de Man (IMTC)
Allégations: ingérence dans les actions de revendication (sit-in);
discrimination antisyndicale; licenciement d'un syndicaliste
343. Le Conseil professionnel de l'île de Man (IMTC) a présenté une plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni (île de Man) dans une communication en date du 18 décembre 1996 alléguant des violations des conventions nos 87 et 98. Il a fait parvenir des informations complémentaires dans une communication du 27 janvier 1997. En réponse à ces allégations, le gouvernement a transmis ses observations dans des communications des 4 mars et 17 juillet 1997 ainsi que du 23 janvier 1998.
344. La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, (1949), ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ont été déclarées applicables à l'île de Man.
A. Allégations de l'organisation plaignante
345. Dans sa communication du 18 décembre 1996, l'organisation plaignante allègue que le gouvernement, par l'intermédiaire du Service mannois de l'électricité (Manx Electricity Authority (MEA)), un service public, a violé l'article 3 de la convention no 87 en menaçant de licencier des travailleurs ayant participé à un sit-in s'ils ne reprenaient pas immédiatement le travail. Elle affirme en outre que l'objectif général énoncé dans les conventions nos 87 et 98 n'a pas été respecté, le MEA ayant essayé d'empêcher le Syndicat des transports et industries diverses (TGWU) de représenter et de protéger ses membres.
346. Selon l'organisation plaignante, un conflit impliquant des travailleurs de la Division de la production d'électricité de la centrale de Pulrose a éclaté en juin 1996, conflit ayant entraîné la participation des travailleurs à un sit-in à Pulrose, dans une salle de réunions située hors des lieux de travail. Le conflit, qui avait débuté le 12 juin à 22 heures et s'est poursuivi jusqu'au 13 juin, touchait environ 25 travailleurs, essentiellement des membres du TGWU, quoique dans un premier temps un petit nombre de membres du Syndicat unifié du génie civil et de l'électricité eussent également été concernés. D'après le Conseil professionnel de l'île de Man, les membres du TGWU avaient été consultés conformément aux dispositions de la loi de 1991 sur les syndicats. Le 13 juin 1996, peu après midi, un responsable de la direction a fait savoir aux travailleurs participant au sit-in que, s'ils ne reprenaient pas immédiatement le travail, ils seraient considérés comme ayant rompu eux-mêmes leur contrat de travail.
347. Pour appuyer son allégation selon laquelle le MEA aurait eu l'intention de limiter la faculté du TGWU de représenter et protéger ses membres, l'organisation plaignante souligne que des menaces de représailles ont été formulées à l'encontre de personnes ayant participé à une activité syndicale légitime et que, par la suite, le premier représentant du syndicat TGWU, M. Volante, a été congédié.
348. L'organisation plaignante affirme que les dispositions légales ont été respectées et que le syndicat était conscient de l'importance vitale de la production d'électricité pour la communauté d'une petite île. Au début, le personnel essentiel affecté à la commande des commutateurs est resté à son poste et le syndicat a indiqué qu'à tout moment au cours du conflit les travailleurs étaient prêts à intervenir.
B. Réponse du gouvernement
349. Dans ses réponses des 4 mars et 17 juillet 1997 ainsi que du 23 janvier 1998, le gouvernement explique que le Service mannois de l'électricité (MEA) est chargé de produire et de distribuer de l'électricité dans toute l'île grâce à ses trois centrales électriques ainsi qu'à une petite usine hydroélectrique. Le MEA est un service public, créé en application de la loi de 1987 sur les services publics, qui assume la responsabilité de ses propres politiques et pratiques en matière d'emploi et de relations professionnelles. Un accord sur les conditions de travail a été négocié avec les trois syndicats qui sont les interlocuteurs du MEA: le Syndicat des transports et industries diverses (TGWU), le Syndicat unifié du génie civil et de l'électricité (AEEU) et l'Association des ingénieurs et des cadres (EMA). Les limites légales à l'indépendance du MEA sont fixées par la loi de 1987 sur les services publics et par la loi de 1996 sur les services de l'électricité.
350. En ce qui concerne le conflit, le gouvernement signale qu'un nouvel accord sur les conditions de travail, négocié et convenu avec les syndicats reconnus, a été signé le ler mars 1995, avec effet rétroactif au ler avril 1994. Ce nouvel accord ne prévoit plus le paiement des déplacements avant le début de la journée de travail. Le 2 mars 1995, les salariés ont reçu un nouveau contrat de travail, deux brochures expliquant en détail l'accord négocié et une lettre indiquant comme lieu de travail l'île de Man (et non tel ou tel site). Selon le TGWU, le motif du conflit portait sur le fait que les travailleurs devaient se rendre en dehors des heures de travail et par leurs propres moyens dans des endroits différents au début de chaque journée de travail.
351. Le gouvernement déclare tout d'abord que les procédures internes convenues n'ont pas été épuisées. Selon le gouvernement, ces procédures internes complémentaires qui auraient pu être utilisées avaient été acceptées au préalable par tous les syndicats, y compris le TGWU. Le gouvernement explique que l'accord sur les conditions de travail du Service mannois de l'électricité (MEA) contient une «Procédure permettant d'éviter les conflits» aux termes de laquelle les désaccords entre le MEA et n'importe quel syndicat reconnu doivent être examinés par un Sous-Comité des conflits devant être créé et se composer de trois responsables du MEA et, au maximum, de deux responsables à plein temps des syndicats non impliqués dans le conflit. Si le Sous-Comité des conflits lui-même ne peut régler le conflit, il existe une procédure en vertu de laquelle le cas doit être renvoyé au Conseil de négociation conjoint (JNC), dont les parties constituantes sont le MEA et les syndicats reconnus. La constitution du JNC comprend une «Procédure de règlement des différends» spécifique. Dans les cas où le JNC ne parvient pas à résoudre lui-même un conflit dont il est saisi, il existe une disposition prévoyant soit la conciliation soit un arbitrage par équité, l'arbitre devant trancher en faveur de l'une ou de l'autre partie.
352. Le gouvernement déclare que le MEA était disposé à utiliser ces diverses procédures internes pour régler le conflit mais que le TGWU a refusé d'épuiser les procédures qui avaient été acceptées par toutes les parties et qu'il a choisi d'organiser un vote au scrutin secret, comme prévu par la loi sur les syndicats de 1991. Conformément à la législation, les questions relatives à la grève ou à toute autre action de revendication doivent être libellées dans des termes rappelant aux travailleurs que ces actions entraînent la rupture de leur contrat de travail. Si un grand nombre de travailleurs ont voté en faveur de la grève, une forte majorité d'entre eux s'est prononcée pour une action autre que la grève.
353. Le 4 juin 1996, le TGWU a décidé que l'action revendicative consisterait, pour le personnel affecté de jour aux travaux d'entretien, à refuser de se rendre d'une centrale électrique à une autre, même si un moyen de transport lui est fourni. Le 11 juin, à 11 h 45, le responsable de district du TGWU a annoncé au fonctionnaire chargé des relations professionnelles, qui avait fait office à titre indépendant de président des débats entre le TGWU et le MEA, que l'action de revendication prendrait immédiatement effet. Ledit fonctionnaire a transmis cette information par télécopie au MEA à 12 h 15. Le gouvernement affirme que les membres de la direction n'ont pas tous été immédiatement informés de l'existence de cette action syndicale. Par ailleurs, on n'a pas pu déterminer avec certitude s'il s'agissait d'une action autorisée ou non.
354. Le 12 juin 1996, l'action faisant l'objet de la plainte quant au fond a débuté. Le directeur du service de l'entretien a demandé à M. Volante, un monteur, et à M. Harrison, un aide-monteur, de se rendre dans une autre centrale électrique pendant les heures de travail dues au MEA pour effectuer un travail, en utilisant un moyen de transport du service. Le gouvernement déclare que MM. Volante et Harrison ont reçu l'instruction de transporter un élément de la centrale de Pulrose à la centrale de Peel et de le monter dans un moteur qui était tombé en panne. Le supérieur a estimé que l'exécution de ce travail avait la priorité sur le travail que les intéressés étaient en train d'effectuer et que ce travail était considéré comme urgent pour le MEA. Les deux salariés ont refusé. M. Volante a dit au directeur du service de l'entretien qu'«il ne travaillait pas pour des sous-traitants» et qu'«il y avait un conflit au sujet des déplacements». Le directeur du service de l'entretien, qui a prétendu ne pas être au courant de la décision de déclencher la grève, a fait observer aux intéressés que s'ils n'obéissaient pas ils resteraient sans travail dans leur propre centrale et ne seraient probablement pas payés. Les travailleurs en question ont cru qu'ils avaient été suspendus, bien que le gouvernement prétende que ce n'était pas le cas. MM. Volante et Harrison ayant signalé l'incident à leurs collègues, la grève a été organisée dans deux centrales électriques.
355. Le gouvernement déclare que les membres du TGWU qui initialement n'avaient pas pris part au «sit-in» ont essayé d'empêcher la remise en état de la centrale en se tenant en faction devant l'entrée avant de se retirer à la cantine et qu'ils n'ont pas contribué au fonctionnement de la centrale. Le gouvernement affirme en outre que le MEA n'a absolument pas été informé par le TGWU que des membres de cette organisation travaillaient ou étaient disposés à travailler pendant le conflit. Comme les membres du TGWU ne représentent qu'une partie du personnel, le travail urgent a pu continuer d'être effectué. Le gouvernement relève également que les autres syndicats reconnus n'étaient pas en conflit avec le MEA et n'ont pas participé au sit-in et que, par ailleurs, certains membres du TGWU n'étaient pas d'accord avec les décisions prises par leur syndicat et ont continué à travailler.
356. Par la suite, MM. Volante et Harrison ont reçu des instructions écrites leur demandant d'aller à l'autre centrale, et précisant qu'ils seraient suspendus s'ils n'obtempéraient pas. Comme ils persistaient dans leur refus, ils ont été avertis par écrit qu'ils étaient suspendus, avec salaire, en attendant que leur cas soit traité selon les procédures disciplinaires internes. Comme ils refusaient une nouvelle fois de satisfaire à une injonction de quitter les lieux, ils ont alors été informés que leur persistance dans leur attitude serait considérée comme une autre violation du règlement du personnel.
357. Le 13 juin 1996, le fonctionnaire chargé des relations professionnelles a rappelé aux travailleurs impliqués dans le sit-in que, conformément aux décisions prises par leur vote, cette action revendicative constituait une violation de leur contrat de travail. Par la suite, un membre de la direction les a aussi avertis de ce fait, ajoutant qu'ils seraient considérés comme ayant rompu eux-mêmes leur contrat de travail s'ils ne reprenaient pas immédiatement leurs activités. Les intéressés ont alors rejoint leur poste et MM. Volante et Harrison ont quitté les lieux.
358. MM. Volante et Harrison sont passés devant un conseil de discipline qui les a licenciés. Ils ont fait appel de cette décision auprès du directeur général du MEA, qui a confirmé le licenciement de M. Volante mais modifié la sanction contre M. Harrison. Selon le directeur général, la différence de traitement était due à leurs antécédents disciplinaires et au fait que M. Volante était le monteur alors que M. Harrison était seulement son aide. Celui-ci a été rétrogradé et muté sur un autre site.
359. Conformément à la procédure disciplinaire interne convenue, dans le cas de M. Volante, un autre appel a été interjeté devant une personne indépendante, un arbitre mandaté par le Service de consultation, de conciliation et d'arbitrage (ACAS) assisté de deux assesseurs sans droit de vote. Cette personne indépendante a confirmé le licenciement. Le gouvernement résume ensuite les raisons pour lesquelles la personne indépendante a confirmé le licenciement de M. Volante, et notamment le fait que M. Volante n'a pas informé le directeur du service de l'entretien que son refus de se rendre dans l'autre centrale était dû à l'existence d'une action revendicative, qu'il n'a pas cherché à savoir si le directeur du service de l'entretien l'avait suspendu, et qu'il a refusé de quitter la centrale. Le gouvernement a joint une copie de la décision à sa communication du 4 mars 1997. Dans sa communication du 17 juillet 1997, le gouvernement a informé le comité que le différend ne sera pas examiné par le tribunal du travail car l'affaire a été réglée par conciliation le 15 mai 1997. Le conflit originel entre le MEA et le TGWU concernant les déplacements avant le début de la journée de travail a été réglé en application des procédures internes.
360. Dans ses commentaires sur les faits, le gouvernement prétend que le conflit initial auquel le TGWU était partie était infondé et que, en tout état de cause, il aurait fallu recourir au mécanisme de règlement des différends convenu pour régler ce conflit. Le gouvernement a joint à sa communication copie de l'accord sur la procédure permettant d'éviter les conflits. En outre, il soutient que le TGWU n'a pas épuisé les procédures de règlements des conflits prévues par la loi de 1985 sur les différends du travail, qu'il n'a pour ainsi dire pas donné de préavis de grève et qu'il n'a pas établi clairement si cette action était autorisée ou non.
361. A propos de la menace de licenciement des personnes ayant participé au sit-in, le gouvernement affirme que «la question de savoir si ‹l'intimidation, les menaces ou les représailles›... sont des termes qui décrivent avec exactitude les propos tenus par le MEA lorsqu'il a rappelé à son personnel qu'il était lié par un contrat est une question d'interprétation...». Il ajoute que, le soir du 12 juin 1996, M. Volante a menacé implicitement de recourir à la violence à l'encontre du directeur de la production.
362. Le gouvernement fait état de textes législatifs récents qui, à son avis renforcent la protection des travailleurs, notamment la loi de 1991 sur l'emploi, en vertu de laquelle un salarié licencié pour avoir participé à une grève autorisée ou non peut porter plainte pour licenciement injustifié, à condition qu'un ou plusieurs autres salariés ayant participé à cette action le jour où le plaignant a été congédié n'aient pas été eux-mêmes licenciés ou que, contrairement au plaignant, une ou plusieurs de ces personnes aient reçu des offres de réengagement dans un délai de trois mois. En vertu de la loi de 1991 sur les syndicats, les travailleurs prenant part à une grève ne sont pas tenus de verser des dommages-intérêts à leur employeur au motif qu'ils ont rompu leur contrat de travail. Enfin, le gouvernement mentionne la loi de 1985 sur les différends du travail, qui prévoit que les différends collectifs du travail doivent être portés devant le service des relations professionnelles, qui est un organe indépendant, aux fins d'un éventuel règlement.
C. Conclusions du comité
363. Le comité constate que le présent cas porte sur des allégations de violation du droit d'un syndicat d'organiser sa gestion et ses activités et de formuler son programme d'action. Il relève également des problèmes de discrimination antisyndicale, en particulier le licenciement et la rétrogradation ainsi que le transfert de personnes ayant participé à des activités syndicales légitimes.
364. Le premier problème a trait au fait que les procédures internes convenues pour le règlement des conflits n'ont pas été épuisées. Le comité note que le TGWU n'a pas tenu compte de plusieurs procédures internes complémentaires qui auraient pu être utilisées pour éviter et régler le conflit. A cet égard, le comité rappelle que l'on ne saurait considérer comme attentatoire à la liberté syndicale une législation prévoyant le recours aux procédures de conciliation et d'arbitrage (volontaire) dans les conflits collectifs en tant que condition préalable à une déclaration de grève, pour autant que le recours à l'arbitrage ne présente pas un caractère obligatoire et n'empêche pas, en pratique, le recours à la grève. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 500.] Le comité estime que dans ce cas le mécanisme de règlement des conflits convenu aurait dû être utilisé par le TGWU pour résoudre le différend.
365. Deuxièmement, et bien qu'aucune des parties n'y ait fait référence, le comité rappelle que par le passé il a considéré les services d'électricité comme des services essentiels. Le comité a exprimé à plusieurs reprises le point de vue selon lequel le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 536 et 544.] A cet égard, le comité note que dans ce cas particulier les grèves dans les centrales sont autorisées par la législation nationale. Se référant à la plainte du gouvernement qui déclare qu'aucun préavis d'action revendicative n'a été donné, le comité rappelle que l'imposition d'un préavis n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale dans les services d'intérêt social ou public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 504.] Le comité estime qu'un tel préavis, tout particulièrement dans des services essentiels, aurait dû être donné.
366. En ce qui concerne les allégations de discrimination antisyndicale formulées dans la plainte, trois questions se posent: premièrement, la façon dont M. Harrison a été traité -- rétrogradation et mutation résultant de sa conduite lors de l'action revendicative -- constitue-t-elle une discrimination antisyndicale? Deuxièmement, le licenciement de M. Volante, dirigeant syndical, pour sa conduite lors de l'action revendicative, constitue-t-il une discrimination antisyndicale? Troisièmement, les travailleurs participant à une action revendicative bénéficient-ils d'une protection efficace?
367. En ce qui concerne la situation de M. Volante, le comité note que l'affaire a été réglée par conciliation entre M. Volante et le MEA. Dans ces circonstances, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi. En ce qui concerne la situation de M. Harrison, le comité note que sa rétrogradation et son transfert sont intervenus après son refus de respecter les ordres écrits du directeur du service d'entretien. Le comité est d'avis que, dans de tels cas, les sanctions devraient être proportionnelles à la faute commise. En tenant compte de toutes les circonstances du cas, y compris le fait que M. Harisson a été rétrogradé et muté dans un autre site pendant longtemps, le comité invite instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le plus tôt possible la restitution à M. Harrison de son ancien grade et de son ancien emploi.
368. Quant à la protection plus générale des travailleurs qui prennent part à une action de revendication, le comité note que le gouvernement souligne dans sa réponse que, en vertu de l'article 49 du projet de loi de 1991 sur l'emploi, les travailleurs sont protégés contre tout licenciement sélectif et contre tout refus sélectif de réengagement. Toutefois, le comité note que cette disposition n'assure pas une protection suffisante car elle permet encore à un employeur de licencier tout son personnel et de réembaucher des employés sur une base discriminatoire à condition de laisser écouler un délai de trois mois entre le licenciement et la réembauche. Le Comité de la liberté syndicale se rallie à la commission d'experts qui est d'avis que cette disposition n'assure pas aux travailleurs une protection adéquate aux fins de la convention: i) parce qu'elle permet encore à un employeur de licencier tout son personnel, même s'il a déclaré un lock-out ou provoqué une grève par son attitude parfaitement déraisonnable; et ii) parce qu'un employeur peut réembaucher des employés sur une base discriminatoire, à condition de laisser écouler un délai de trois mois entre le licenciement des travailleurs ‹victimes› de ses tactiques de réembauche». La commission a donc demandé au gouvernement d'adopter des mesures législatives de protection contre les licenciements, discriminatoires ou non, et les autres formes de traitement discriminatoire -- telles que le transfert, la rétrogradation ou le retrait des droits acquis --, imposés pour faits de grève et actions assimilées afin de donner effet aux principes mentionnés ci-dessus.
369. Par conséquent, le comité prie instamment le gouvernement de modifier la législation pertinente en vue d'assurer une protection contre les licenciements et autres actes préjudiciables en raison de la participation à une action revendicative. Le comité porte cet aspect du cas à l'attention de la commission d'experts.
Recommandations du comité
370. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1843
Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Soudan
présentée par
la Fédération (légitime) des syndicats de travailleurs
du Soudan (FSTS)
Allégations: morts violentes et arrestations de syndicalistes,
ingérence du gouvernement
371. Le comité a examiné ce cas à sa session de mars 1997, au cours de laquelle il a formulé des conclusions intérimaires. [Voir 306e rapport, paragr. 601 à 618, approuvé par le Conseil d'administration à sa 268e session (juin 1997).] A sa session de mai-juin 1997, le comité, en l'absence d'observations qu'il avait demandées au gouvernement, a décidé d'ajourner l'examen de ce cas. [Voir 307e rapport, paragr. 5.] A sa session de novembre 1997, le comité a adressé un appel pressant au gouvernement pour qu'il envoie ses observations. [Voir 308e rapport, paragr. 9.]
372. Dans une communication du 10 janvier 1998, la Fédération (légitime) des syndicats de travailleurs du Soudan (FSTS) a présenté de nouvelles allégations relatives à d'autres violations des droits syndicaux par le gouvernement.
373. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 19 février 1998.
374. Le Soudan n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
375. La Fédération (légitime) des syndicats de travailleurs du Soudan (FSTS) a présenté des allégations selon lesquelles un grand nombre de syndicalistes auraient été licenciés à la suite de décisions administratives du gouvernement. D'après la FSTS, plus de 95 000 travailleurs ont perdu leur emploi à la suite de décisions contre lesquelles il est impossible de faire appel. De plus, la FSTS a allégué que beaucoup de travailleurs sont victimes de tortures ou de mauvais traitements. En outre, l'organisation plaignante affirme que l'abrogation de la loi sur les syndicats de 1986 et son remplacement par la loi de 1992 ont notamment eu pour conséquences la dissolution des syndicats existant à ce moment, la légalisation de l'ingérence du gouvernement dans les affaires syndicales, ainsi que l'arrestation et la détention de responsables syndicaux, souvent accompagnées d'actes de torture. Enfin, la FSTS fait valoir que l'instance d'appel créée par l'arrêté ministériel no 723 pour le réexamen des plaintes de travailleurs licenciés injustement n'est pas impartiale ou objective.
376. Le gouvernement, de son côté, a envoyé des informations partielles dans lesquelles il indique seulement que les travailleurs licenciés ont perdu leur emploi après la réorganisation ou la liquidation d'entreprises déficitaires, ou dont les résultats étaient considérés comme insatisfaisants. Au sujet de l'arrêté ministériel no 723, le gouvernement a affirmé que 76 pour cent des plaignants ont été réintégrés dans leur poste de travail ou ont reçu une augmentation de l'indemnité initialement versée à la fin de leur emploi. Enfin, le gouvernement a soutenu qu'aucun syndicaliste n'est détenu au Soudan puisque la loi ne l'autorise pas.
377. A sa session de juin 1997, au vu des conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration a approuvé les recommandations suivantes:
B. Nouvelles allégations de l'organisation plaignante
378. Dans sa communication du 10 janvier 1998, l'organisation plaignante déclare qu'en 1997 les agressions contre les principaux dirigeants syndicaux se sont poursuivies, ces dirigeants restant les cibles de détentions et d'actes de torture. La FSTS cite, par exemple, les détentions de Osman Abdel Gadir, président du Syndicat des professions du textile de la ville de Medani, Daoud Suliaman, secrétaire du Syndicat du Nil Bleu, et le syndicaliste Ahmed Ali. En outre, la FSTS affirme que, en 1997, les autorités ont continué à procéder à des licenciements massifs de travailleurs et ont poursuivi leur ingérence, notamment sous la forme de pratiques de fraude lors des élections syndicales.
C. Nouvelle réponse du gouvernement
379. Dans sa communication du 19 février 1998, le gouvernement déclare en premier lieu que, concernant la situation des syndicalistes mentionnés dans les annexes I, II et III du rapport précédent du comité, certaines de ces personnes ne sont plus actives dans le mouvement syndical depuis vingt ans, tandis que d'autres ont volontairement mis fin à leur emploi. Le gouvernement fournit ensuite six noms qui d'après lui font partie de ces catégories.
380. En ce qui concerne les licenciements de 95 000 syndicalistes, le gouvernement affirme que, puisque la main-d'œuvre dans le secteur public n'excède pas 600 000 travailleurs, le nombre de travailleurs licenciés cité dans la plainte est nécessairement exagéré. Le gouvernement poursuit en expliquant que, bien que de nombreux travailleurs aient perdu leur emploi suite à des programmes de restructuration de l'économie, ceci a été fait en pleine conformité avec la loi et avec l'appui de la commission tripartite.
381. En ce qui a trait à l'arrestation et la détention de syndicalistes, le gouvernement réitère ses déclarations antérieures, à savoir qu'aucune arrestation n'est faite pour des motifs liés aux activités syndicales. Enfin, en ce qui concerne les graves incompatibilités existant entre la loi de 1992 sur les syndicats et les principes de la liberté syndicale, le gouvernement déclare qu'afin d'être à jour avec les nouveaux développements la Conférence générale de la Fédération des syndicats des travailleurs soudanais, qui s'est réunie en février 1997, a adopté une recommandation en vue de l'adoption d'une nouvelle loi sur les syndicats et qui tiendrait compte des observations formulées par le BIT et les partenaires sociaux.
D. Conclusions du comité
382. Le comité rappelle que ce cas a trait à de très graves allégations de violations des droits syndicaux au Soudan, et plus particulièrement à des mesures de représailles antisyndicales, y compris l'arrestation de syndicalistes et des actes de violence commis contre eux. A la lumière des nouvelles allégations présentées par la FSTS, le comité note avec beaucoup de préoccupation qu'il semble que le gouvernement n'ait pris aucune mesure pour mettre en oeuvre les recommandations que le comité a faites dans son rapport intérimaire.
383. Au sujet des licenciements massifs de syndicalistes, le comité regrette vivement que le gouvernement n'ait fourni que des informations très partielles sur la situation des travailleurs dont le nom figure dans les annexes I, II et III du rapport intérimaire. De plus, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas précisé quelle suite a été donnée aux recommandations de l'instance d'appel. A cet égard, le comité note avec beaucoup de préoccupation que, selon l'organisation plaignante, les autorités ont continué à licencier massivement des travailleurs en 1997 dans le cadre de leur politique de privatisation. Le comité prie instamment le gouvernement de traiter ces questions et de fournir d'urgence les informations précédemment demandées et de le tenir informé des mesures envisagées ou prises à cet égard.
384. Quant aux très graves allégations d'arrestations et de détentions de syndicalistes, souvent accompagnées d'actes de torture, le comité ne peut que noter, une fois de plus, avec beaucoup de préoccupation que le gouvernement ne fournit aucune information à ce sujet, tout particulièrement en ce qui concerne les cas de M. Mohamed Babiki, M. Yousif Hussain, M. Abdel Moniem Suliman et M. Abdel Moniem Rahma. En outre, le comité exprime sa grande préoccupation au sujet des nouvelles allégations concernant les détentions et les actes de torture dont auraient été victimes M. Osman Abdel Gadir, M. Daoud Suliaman et M. Ahmed Ali. Le comité insiste sur le fait que les droits des organisations de travailleurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu'il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. Le comité rappelle que, dans des cas allégués de tortures ou de mauvais traitements de prisonniers, les gouvernements devraient enquêter sur les plaintes de cette nature pour que des mesures qui s'imposent, y compris la réparation des préjudices subis, soient prises et que des sanctions soient infligées aux responsables pour veiller à ce qu'aucun détenu ne subisse ce genre de traitement. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, paragr. 47 et 57.] Par conséquent, le comité demande instamment au gouvernement: a) d'ouvrir une enquête afin d'établir les circonstances exactes dans lesquelles M. Mohamed Babiki, secrétaire général du Syndicat général des employés, et l'ingénieur Yousif Hussain ont été torturés, les raisons pour lesquelles M. Osman Abdel Gadir, président du Syndicat des professions du textile de la ville de Medani, Daoud Suliaman, secrétaire du Syndicat du Nil Bleu, et le syndicaliste Ahmed Ali sont détenus, et les circonstances exactes dans lesquelles ils ont été torturés, ainsi que d'ouvrir une enquête sur les causes de la mort de M. Abdel Moniem Suliman, membre du comité exécutif du Syndicat des enseignants (qui est décédé en 1990), et de M. Abdel Moniem Rahma, membre du Syndicat des employés des transports (qui est décédé en 1995); et b) de prendre les mesures qui s'imposent pour que des procédures judiciaires soient engagées contre les responsables et pour réparer le préjudice subi. Le comité insiste pour que le gouvernement fournisse des informations à cet égard le plus rapidement possible et demande à être tenu informé à cet égard.
385. Enfin, se référant à ses conclusions antérieures dans ce cas et en tenant compte des nouvelles allégations d'ingérence du gouvernement dans les affaires syndicales, le comité, tout en prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles la Confédération générale de la Fédération des syndicats des travailleurs soudanais a recommandé en février 1997 d'adopter une nouvelle législation sur les syndicats, ne peut que souligner de nouveau que de nombreuses et graves incompatibilités existent entre la loi sur les syndicats de 1992 et les principes de la liberté syndicale et demande par conséquent au gouvernement de réviser sa législation le plus rapidement possible; une fois de plus, il signale à l'attention de la commission d'experts les aspects législatifs de ce cas en ce qui concerne l'application de la convention no 98, ratifiée par le Soudan.
Recommandations du comité
386. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Cas no 1812
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Venezuela
présentée par
le Secrétariat international des syndicats des employés des arts,
de la communication et du spectacle/
Fédération internationale des syndicats des travailleurs
de l'audiovisuel (ISETU/FISTAV)
Allégations: ingérence patronale à l'occasion
de la création d'un syndicat
387. Le comité a examiné le présent cas à ses sessions de mars 1996 et de juillet 1997 et il a présenté à ces occasions des rapports intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 302e rapport, paragr. 519 à 534, et 307e rapport, paragr. 471 à 479, approuvés par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996) et à sa 269e session (juin 1997).]
388. Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations par des communications du 20 mai 1997 et du 20 janvier 1998.
389. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
390. L'examen antérieur du cas en juin 1997 [voir 307e rapport, paragr. 471 à 479] a laissé en suspens les allégations selon lesquelles la direction de l'entreprise de radiodiffusion CORAVEN-RCTV aurait soutenu la création d'un nouveau syndicat, le Syndicat national des travailleurs de l'industrie radiotélévisée CORAVEN-RCTV (SINATRAINCORATEL), syndicat que les autorités ont reconnu au bout de quinze jours, c'est-à-dire très rapidement, par diverses pratiques antisyndicales (représentants de l'entreprise présents à la réunion constitutive du nouveau syndicat, menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres de ce syndicat, négociation d'une convention collective moins favorable aux travailleurs affiliés au nouveau syndicat, alors que la précédente était encore en vigueur -- l'organisation plaignante parle d'une annulation unilatérale par l'entreprise de la précédente convention collective --, etc.). De plus, les autorités administratives auraient commis des irrégularités dans la procédure d'enregistrement de ce syndicat (il n'y a pas eu d'assemblée constitutive à proprement parler et les dirigeants du nouveau syndicat appartenaient au syndicat qui existait déjà (Syndicat professionnel des travailleurs de la radio, du théâtre, du cinéma, de la télévision et autres moyens de communication du district fédéral et de l'Etat de Miranda (SRTVA). Le SRTVA a présenté plusieurs recours contre ces pratiques.
391. Dans sa communication du 20 mai 1997, le gouvernement a déclaré que le ministère du Travail avait rejeté deux recours administratifs intentés par le SRTVA contre l'enregistrement du SINATRAINCORATEL et que le SRTVA pouvait intenter un recours judiciaire dans un délai de six mois à compter de la dernière décision (3 janvier 1996). Le gouvernement a déclaré être incompétent pour déclarer l'annulation de l'enregistrement d'une organisation syndicale, car ceci équivaudrait à une dissolution par voie administrative, ce qui est contraire à la convention no 87. S'il s'avérait que le SINATRAINCORATEL a été créé sous ingérence patronale, les intéressés devraient alors avoir recours à l'organe juridictionnel compétent.
392. Le comité a demandé au gouvernement d'indiquer si le syndicat SRTVA avait présenté un recours devant l'autorité judiciaire sur les allégations relatives à l'ingérence de la direction de l'entreprise CORAVEN-RCTV dans la création et l'exercice des activités du SINATRAINCORATEL et, dans l'affirmative, de l'informer du résultat du jugement en question. De plus, le comité a souligné que le ministère du Travail avait mis très longtemps (de mars 1994 à janvier 1996) pour se prononcer sur le recours en nullité intenté par le syndicat SRTVA concernant la création du nouveau syndicat sous ingérence patronale (SINATRAINCORATEL) et il a exprimé l'espoir que l'autorité judiciaire pourrait se prononcer dans un bref délai.
B. Réponse du gouvernement
393. Dans ses communications du 20 mai 1997 et du 20 janvier 1998, le gouvernement envoie copie des divers recours administratifs intentés par le SRTVA depuis février 1994, recours qui ont été rejetés, et il indique que le ministère du Travail est incompétent pour déclarer l'annulation de l'enregistrement d'une organisation syndicale comme le SINATRAINCORATEL, ce que demande l'organisation plaignante, car ceci équivaudrait à une dissolution par voie administrative, laquelle est interdite par la convention no 87 et la législation nationale.
394. Le gouvernement ajoute que, le 29 juillet 1996, le SRTVA a intenté devant la Cour suprême de justice une action en amparo ainsi qu'un recours en nullité pour inconstitutionnalité contre la décision administrative prise, le 24 janvier 1994, par la Direction de l'inspection générale et des relations professionnelles du ministère du Travail, décision en vertu de laquelle a été enregistré le SINATRAINCORATEL, et que, à ce jour, la chambre politico-administrative de la Cour suprême de justice ne s'est pas prononcée à ce sujet. Le gouvernement souligne toutefois que la Cour suprême n'est pas compétente dans cette affaire et que les intéressés auraient dû saisir la juridiction du contentieux administratif.
395. Le gouvernement indique que l'on ne saurait alléguer que l'inscription ou l'enregistrement du SINATRAINCORATEL est contestable. Dans le cas présent, il s'agit d'un conflit entre les membres d'un même syndicat qui a conduit au démantèlement de ce syndicat et à la création d'un syndicat parallèle, ce que permet la loi dans le cadre de la liberté syndicale; s'y opposer constituerait assurément une ingérence dans l'exercice de ce droit de la part des travailleurs qui refusent d'accepter l'existence d'un autre syndicat dans leur secteur d'activité. A ce sujet, la Constitution nationale indique que les organisations de travailleurs ou d'employeurs ne doivent se conformer qu'aux dispositions légales qui portent sur leur existence et leur fonctionnement. Seul le législateur a la faculté de fixer les conditions de création et de fonctionnement des organisations syndicales, et la législation se borne à énoncer les dispositions formelles que doivent respecter les organisations syndicales et l'administration compétente. A ce propos, comme il ressort du dossier administratif à ce sujet, il n'est pas vrai que l'enregistrement du syndicat ait été contraire à la loi, étant donné que la Direction de l'inspection nationale et des relations professionnelles a estimé que la création de l'organisation syndicale en question satisfaisait à toutes les conditions prévues par la loi, raison pour laquelle il a été décidé de l'enregistrer. Comme l'indique la décision relative au recours administratif susmentionné, l'assemblée constitutive s'est tenue le 8 décembre 1993 et, le 21 décembre, 319 travailleurs se sont réunis pour élire le conseil de direction. S'il est vrai que cette réunion a eu lieu dans un local appartenant à l'employeur, on ne peut pas pour autant en déduire que la volonté de créer un syndicat ne se soit pas librement manifestée.
396. Le gouvernement explique que la création de plusieurs syndicats dans un même secteur d'activité ne fait que démontrer le libre exercice de la liberté syndicale, lequel traduit dans les faits le principe de pluralisme syndical, principe selon lequel toute ingérence dans cet exercice est interdite par la loi. Par ailleurs, le gouvernement insiste sur le fait que ce ne sont pas seulement les employeurs et l'Etat qui sont susceptibles, par leurs actes, de porter atteinte à ce droit mais, plus souvent qu'on ne le pense, ce sont les organisations de travailleurs elles-mêmes qui commettent les pratiques antisyndicales que l'on dénonce si souvent.
397. En ce qui concerne «l'acte de complaisance» que, selon les plaignants, la Direction de l'inspection nationale et des relations professionnelles aurait commis en enregistrant le syndicat en un «temps record», le gouvernement indique que l'enregistrement s'est fait dans le délai de trente jours prévu par la loi organique du travail (article 425). On ne saurait considérer que la diligence dont l'administration a fait preuve est contraire à la loi car d'autres syndicats ont été enregistrés dans les mêmes délais.
398. Quant au fait que certains des fondateurs du nouveau syndicat faisaient partie du comité d'entreprise du syndicat plaignant et que, selon les statuts de ce syndicat, ils ne pouvaient pas créer un autre syndicat, il convient de signaler que, quoi qu'il en soit, le syndicat plaignant aurait dû saisir le tribunal disciplinaire de ces faits et appliquer aux fondateurs en question les sanctions prévues dans ses statuts. En effet, il s'agit là d'un problème interne du syndicat qui n'est pas du ressort de l'administration compétente.
399. A propos de l'allégation selon laquelle le nouveau syndicat aurait négocié une convention collective, l'autorité qui a statué sur le premier recours administratif indique, à propos de la convention collective qui était déjà en vigueur, qu'il incombe à l'inspection du travail de veiller au respect du principe d'intangibilité de la convention collective. Le gouvernement indique qu'il est vrai que le dossier d'enregistrement du nouveau syndicat ne précise pas le domicile des travailleurs affiliés, mais qu'il ne s'agit pas là d'un élément essentiel et qu'il peut être pleinement corrigé ou validé.
C. Conclusions du comité
400. Le comité observe que, dans la présente plainte, l'organisation plaignante s'oppose à l'enregistrement d'un syndicat (SINATRAINCORATEL) -- lequel a été enregistré très rapidement par les autorités, en dépit de plusieurs irrégularités -- au motif qu'il existait déjà un syndicat (le SRTVA) dans l'entreprise de radiodiffusion CORAVEN-RCTV, et que cette entreprise publique a soutenu la création du nouveau syndicat par diverses pratiques antisyndicales (représentants de l'entreprise présents à la réunion constitutive du nouveau syndicat, menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres de ce syndicat, négociation d'une nouvelle convention collective avec le nouveau syndicat, alors que la précédente, qui était encore en vigueur, a été annulée par l'entreprise, etc.); selon le plaignant, il n'y a pas eu d'assemblée constitutive proprement dite, et les membres de la direction du nouveau syndicat appartenaient à l'ancien syndicat.
401. A ce sujet, le comité prend note du fait que le gouvernement déclare: 1) une fois constitué le nouveau syndicat, 319 travailleurs se sont réunis quinze jours plus tard pour élire le conseil de direction; 2) dans ce cas, la liberté syndicale a traduit dans les faits le pluralisme syndical qui est consacré par la législation; 3) le nouveau syndicat a satisfait à toutes les conditions prévues par la loi; 4) le nouveau syndicat n'a pas été enregistré en un temps record mais dans les délais prévus par la loi; 5) le fait que le nouveau syndicat compte des dirigeants de l'ancien syndicat est sans incidence; 6) quant au fait qu'une convention collective était déjà en vigueur, c'est à l'inspection du travail qu'il incombe de veiller au respect du principe d'intangibilité de la convention collective; 7) l'objet du présent cas est un conflit entre les membres d'un syndicat, conflit qui a donné lieu à la création d'un nouveau syndicat.
402. Le comité observe que les déclarations du gouvernement et les allégations en question sont contradictoires en ce qui concerne la légalité de l'enregistrement du nouveau syndicat. Le comité observe également que la réponse du gouvernement ne contient pas d'observations sur la prétendue présence de représentants de l'entreprise dans l'assemblée constitutive du nouveau syndicat, ni sur les prétendues menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres du nouveau syndicat. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de présenter ses observations sur ces allégations pour lui permettre de se prononcer en connaissance de cause.
Recommandation du comité
403. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Observant que les déclarations du gouvernement et les allégations sont contradictoires en ce qui concerne la légalité de l'enregistrement du nouveau syndicat, et que la réponse du gouvernement ne contient pas d'observations sur les allégations relatives à la présence de représentants de l'entreprise dans l'assemblée constitutive du nouveau syndicat, ni sur les allégations concernant les menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres du nouveau syndicat, le comité prie le gouvernement de présenter ses observations sur ces allégations pour lui permettre de se prononcer en connaissance de cause.
Plainte contre le gouvernement du Venezuela
présentée par
la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels
du Venezuela (FESPAVEN)
Allégations: recours à la sous-traitance à des fins antisyndicales
404. La plainte figure dans une communication de la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels du Venezuela (FESPAVEN) datée du 5 avril 1995. La FESPAVEN a envoyé des informations complémentaires par une communication en date du 27 mai 1996.
405. Le gouvernement a transmis ses observations sur les allégations dans une communication en date du 20 mai 1997.
406. A sa réunion de juin 1997, le comité a décidé de demander des informations supplémentaires à la fédération plaignante afin de pouvoir se prononcer sur la recevabilité de la plainte. Cependant, aucune information n'a été reçue de la fédération plaignante à cet égard.
407. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
408. Dans ses communications des 5 avril 1995 et 27 mai 1996, la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels du Venezuela (FESPAVEN) déclare que la réglementation juridique des relations de travail dans les compagnies d'aviation comme Avensa, qui occupent des pilotes et des hôtesses de l'air, correspond aux normes établies par la loi organique du travail. Chaque membre du personnel est lié à la compagnie d'aviation par un contrat de travail individuel et jouit en outre des avantages des conventions collectives, lesquelles ont pu être établies grâce à l'existence de syndicats regroupant les différentes catégories de travailleurs. Or Avensa a constitué une entreprise -- avec ses propres actionnaires et son propre président -- dénommée Servivensa, qui paraît être une filiale d'Avensa créée dans l'intention retorse de bafouer les droits des travailleurs. Il convient de souligner que cette entreprise a été constituée avec un capital de 100 000 bolívares, ce qui est étrange pour une compagnie d'aviation. Et surtout, ce qui est encore plus curieux, elle ne n'a pas de personnel navigant. Pour que ses avions puissent circuler, il faut à chaque fois mettre en branle un dispositif de trois entreprises commerciales, jusqu'à ce que l'on atteigne les travailleurs du transport aérien.
409. L'organisation plaignante explique que Servivensa (entreprise créée par Avensa) obtient son personnel navigant auprès d'une compagnie pourvoyeuse de «main-d'œuvre» dénommée SAJG.SA ; cependant, SAJG.SA ne dispose pas elle-même de personnel navigant, mais détient une liste de prestataires de services (aviateurs, personnel de cabine), qui ne sont pas non plus des travailleurs du transport aérien, mais des sociétés qui rassemblent des pilotes et des chefs de cabine, à la fois actionnaires et travailleurs. Ce dernier point est capital pour comprendre ce qui se passe réellement: le pilote ou le steward qui souhaite travailler chez Servivensa (ou naviguer sur des avions de cette compagnie) doit constituer une société, de sorte que lorsqu'il monte à bord il est, en apparence, envoyé par une société (la sienne) à SAJG.SA, laquelle l'envoie à Servivensa.
410. D'après l'organisation plaignante, ceci a pour conséquence que Servivensa prétend ne pas avoir de relations de travail avec son personnel navigant. Par conséquent, elle ne verse pas les prestations légales, son personnel n'a pas à être affilié au régime de sécurité sociale obligatoire et les journées de travail peuvent avoir une durée illimitée. De même, les travailleurs ne sont pas considérés comme tels, mais comme des entreprises commerciales et, partant, ils ne peuvent ni se syndiquer ni négocier collectivement. Ils doivent payer leurs uniformes, supporter les frais des nuits passées hors de leur domicile, ne sont pas couverts par une assurance, etc. Leur rémunération est un genre de forfait. De la sorte, la convention collective en vigueur est remplacée par des contrats commerciaux individuels, et l'Association syndicale des pilotes d'Avensa (ASPA) ainsi que l'Association des hôtesses de l'air syndiquées d'Avensa (ADAS) sont éliminées.
411. Tout ceci s'accompagne de pressions en tous genres de la part des représentants d'Avensa afin d'obliger les pilotes à constituer un front pour remplacer les comités directeurs de l'ASPA et de l'ADAS par des personnes de confiance d'Avensa, qui assumeront la transition vers l'embauche individuelle. Ainsi, le 15 février 1995, le gérant de la sécurité de l'entreprise, accompagné d'un groupe de pilotes et d'hôtesses de l'air jouissant de la confiance de l'employeur, s'est rendu en empruntant des véhicules de la compagnie à une assemblée tenue conjointement par l'ASPA et l'ADAS à Caracas. Le représentant de l'employeur a déclaré sans vergogne à l'assistance que l'entreprise n'acceptait pas de négocier avec les directions syndicales légitimement constituées, puis a immédiatement quitté la salle et contraint un groupe d'affiliés à faire de même en les menaçant de licenciement et de mesures discriminatoires s'ils appuyaient le syndicat.
412. Selon l'organisation plaignante, cette politique contraire aux intérêts des travailleurs a déjà réussi à neutraliser le mouvement syndical moyennant l'aval d'un comité directeur de l'ASPA; elle permet à Avensa de faire ce qu'elle veut sans que les autorités n'interviennent. Pour le moment, les comités directeurs de l'ASPA se sont transformés en employeurs en créant une organisation dénommée ASPA Rent Crew, qui offre sans vergogne les services de quelques pilotes, lesquels accompliraient selon eux le service sans donner lieu à des obligations au regard du travail et en marge de la gestion syndicale et de la négociation collective. En ce cas, les dirigeants syndicaux se placent en dehors du champ d'application de la loi organique du travail. Cette gestion favorise l'employeur.
413. L'organisation plaignante mentionne, à titre d'exemple, le cas éloquent des commandants de bord Vicente Grisanti et Herrman Alexandre, dont le nombre d'heures de vol a été réduit et qui reçoivent à présent un salaire de base mensuel sans les augmentations salariales auxquelles donne lieu le pilotage par lui-même, parce qu'ils n'acceptent pas la politique de l'entreprise et qu'ils s'opposent à la dégradation du droit collectif. Depuis la mi-décembre 1995, ces pilotes ne peuvent mener leurs activités syndicales parce que la situation anormale qui sévit chez Avensa les en empêche, et ils peuvent encore moins diriger l'ASPA, les circonstances ne le permettant plus. Ces pilotes sont membres de la FESPAVEN et ont insisté pour que la législation du travail soit appliquée et ont refusé de se transformer en sociétés anonymes.
414. Enfin, l'organisation plaignante envoie un rapport d'une commission spéciale de la Chambre des députés, de février 1995, concernant les questions dont il est fait état, où il est signalé en particulier que pour éviter l'application des conventions collectives en vigueur le groupe Avensa-Servivensa a remplacé l'engagement de ses travailleurs par une relation de travail qui consiste à obliger les équipages d'une compagnie d'aviation (Servivensa) à constituer des entreprises commerciales. Selon ce rapport, le système de travail en vigueur chez Servivensa entraîne une régression des conditions de travail, car il remplace l'engagement dans le cadre de la convention collective par une convention individuelle entre l'employeur et le travailleur.
B. Réponse du gouvernement
415. Dans sa communication en date du 20 mai 1997, le gouvernement envoie un rapport du conseiller juridique du ministère du Travail concernant la nature juridique de la prestation personnelle de service des pilotes et hôtesses au sein de l'entreprise Servivensa. Le rapport indique qu'il existe une pratique de simulations ayant pour principal objectif d'éviter l'application de la loi du travail et de la sécurité sociale, en concluant des contrats autres que des contrats de travail (généralement civils ou commerciaux) ou en obligeant les travailleurs à créer des entreprises par lesquelles ils agissent. Le droit du travail a des mécanismes efficaces afin de démanteler de telles pratiques. L'absence de contrainte exercée par Servivensa sur les pilotes et les hôtesses afin de conclure les contrats commerciaux mentionnés ne dénature pas les conclusions indiquées. Selon le rapport, la constitution de Servivensa -- filiale d'Avensa -- avec l'objectif d'exécuter les mêmes activités que cette dernière entreprise, opérant sur les mêmes trajets et offrant le support technique sur ces vols, et la conclusion de contrats de travail de nature commerciale simulée constituent une pratique antisyndicale efficace. Ainsi, les actionnaires d'Avensa, agissant à travers Servivensa, garantissent l'exécution des activités de transport aérien de personnes et de biens, sans que ces activités ne soient visées par la législation du travail et de la sécurité sociale. Cette procédure, en outre d'éviter l'exercice d'activités syndicales au sein de cette dernière entreprise, porte atteinte à la négociation collective efficace et ignore l'existence même de l'organisation syndicale au sein d'Avensa.
416. Le gouvernement déclare qu'un représentant patronal, auquel avait été octroyé un droit de parole, avec l'assentiment de ASPA et ADAS, était présent à l'Assemblée syndicale à laquelle se réfère FESPAVEN. Dans ces circonstances, il ne peut être question d'ingérence de la part de l'employeur, même s'il a pu, en exerçant son droit de parole, faire des commentaires qui pourraient s'avérer préjudiciables aux organisations syndicales. Dans ce cas, les représentants syndicaux ont pu -- s'ils l'ont estimé approprié -- réfuter les commentaires prononcés.
C. Conclusions du comité
417. Le comité observe que dans le présent cas l'organisation plaignante allègue: 1) que les contrats de travail des pilotes et du personnel navigant d'Avensa et la convention collective sont remplacés par des contrats individuels à caractère commercial, ce qui sape la négociation collective et les syndicats ASPA et ADAS; 2) que des représentants de l'entreprise Avensa se sont ingérés dans des réunions syndicales afin de faire pression sur les affiliés pour conclure des contrats commerciaux individuels et accepter une direction syndicale favorable aux objectifs d'Avensa; 3) que deux pilotes qui n'acceptent pas le système d'engagement individuel mentionné auraient été victimes de mesures discriminatoires. Le comité a pris note de la réponse du gouvernement.
418. Le comité rappelle que l'Association syndicale des pilotes d'Avensa (ASPA) et l'Association des hôtesses de l'air syndiquées d'Avensa (ADAS), affiliées à l'organisation plaignante (FESPAVEN), avaient présenté la plainte conjointement avec la FESPAVEN, mais qu'elles l'ont retirée par la suite ainsi qu'il est indiqué dans leurs communications respectives datées des 8 février et 23 janvier 1996. Dans ces conditions, avant de décider d'examiner le cas quant au fond, le comité avait estimé qu'il devait déterminer si la FESPAVEN continuait à avoir un intérêt direct pour les questions qu'elle avait soumises au comité [voir Procédure pour l'examen des plaintes en violation de la liberté syndicale, paragr. 34] alors que ses organisations affiliées se sont retirées de la procédure, compte tenu notamment du fait que la FESPAVEN indiquait que les comités directeurs de l'ASPA et de l'ADAS «se sont transformés en employeurs en créant une organisation dénommée ASPA Rent Crew». Le comité observe que le Bureau a demandé à la FESPAVEN, dans une communication du 27 juin 1997, de lui faire savoir si l'ASPA et l'ADAS demeurent ses affiliées et de spécifier toutes les organisations syndicales qu'elle regroupe, ainsi que le nombre de pilotes et d'hôtesses de l'air qu'elle représente. Le comité observe également que la fédération plaignante n'a pas fourni les informations qui lui avaient été demandées.
419. Dans ces conditions, bien que le gouvernement reconnaisse dans sa réponse l'existence de pratiques antisyndicales et contraires à la négociation collective, le comité estime que, la fédération plaignante n'ayant pas fourni les informations supplémentaires qui lui étaient demandées pour pouvoir se prononcer sur la recevabilité de la plainte, il n'est pas en mesure, dans ces conditions, de poursuivre l'examen du présent cas.
Recommandation du comité
420. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider qu'il n'est pas en mesure de poursuivre l'examen du cas.
Cas no 1937
Rapport où le comité demande à être
tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Zimbabwe
présentée par
la Fédération internationale des employés,
techniciens et cadres (FIET)
Allégations: violations du droit de grève et licenciements antisyndicaux
421. Dans une communication datée du 9 septembre 1997, la Fédération internationale des employés, techniciens et cadres (FIET) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Zimbabwe.
422. Le gouvernement a fait part de ses observations dans une communication datée du 5 novembre 1997.
423. Le Zimbabwe n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
424. Dans sa communication datée du 9 septembre 1997, la FIET déclare que les salariés de la Standard Chartered Bank ont fait grève le 23 avril 1997, pour protester contre l'introduction inacceptable, par décision unilatérale, d'un nouveau système de prime lié au rendement. Ce système de prime avait déjà provoqué un conflit en 1995. La grève avait alors été annulée lorsque la direction locale de la banque avait accepté de mettre en place un système de prime intérimaire, étant entendu que les modalités du système définitif feraient l'objet de nouvelles discussions et d'un accord avec un syndicat affilié à la FIET, le Zimbabwe Banks and Allied Workers' Union, ZIBAWU (Syndicat des travailleurs des banques et métiers apparentés du Zimbabwe). Selon l'organisation plaignante, le système a finalement été introduit par la banque en l'absence de négociations suffisantes, et il a été imposé aux salariés.
425. Après le début de la grève, la banque a demandé au ministère de la Fonction publique, du Travail et du Bien-être de prendre un arrêté. Le ministère a accédé à cette demande le 25 avril et a décrété que les travailleurs devaient reprendre le travail et que la banque était autorisée à prendre des mesures disciplinaires à l'encontre des grévistes.
426. Selon la FIET, la banque, forte de cet arrêté, a entrepris une chasse aux sorcières parmi les travailleurs qui avaient pris part à la grève et elle a licencié sommairement 365 salariés qui avaient fait grève. Ces derniers ont été informés que, s'ils souhaitaient retrouver leur emploi, ils devaient présenter une demande et accepter des contrats temporaires, à des conditions d'emploi inférieures et des indemnités sensiblement moins élevées que celles qui étaient les leurs auparavant. Certains travailleurs se sont vu offrir du travail en d'autres lieux, souvent très loin de chez eux. L'organisation plaignante ajoute que la direction de la banque au Zimbabwe et à Londres a rejeté plusieurs tentatives de la FIET et du ZIBAWU visant à résoudre le conflit.
427. Les mesures prises par la banque sont le résultat de l'arrêté pris par le ministère à l'encontre d'une grève motivée et légitime, décidée par le syndicat et ses membres. L'organisation plaignante conclut que les mesures prises par le ministère constituent des violations des conventions nos 87 et 98 et qu'elles ont empêché une activité syndicale légitime.
B. Réponse du gouvernement
428. Par une communication datée du 5 novembre 1997, le gouvernement fait valoir que la plainte, fondée sur l'arrêté pris en vertu de la loi sur les relations professionnelles, chapitre 28:01, 1996, par le ministère de la Fonction publique, du Travail et du Bien-être du Zimbabwe, n'est pas contraire aux dispositions des conventions nos 87 et 98 et ne soulève aucune question à cet égard. Les deux parties, à savoir les employeurs et les travailleurs, ont simplement exercé leurs droits, conformément à la législation du pays.
429. Le gouvernement ajoute que l'OIT a été saisie de la plainte avant même l'épuisement des procédures prévues par la législation nationale; en effet, la question est encore devant le Tribunal de première instance du Zimbabwe, car les travailleurs ont interjeté appel contre l'action de l'employeur.
430. Dans le cadre de la législation du travail, l'article 104 de la loi sur le travail permet aux travailleurs, aux comités de travailleurs et aux syndicats de faire grève dans la poursuite d'objectifs licites; l'article 108 précise qu'ils ne peuvent être poursuivis en justice de ce fait. En d'autres termes, un syndicat, un comité de travailleurs ou un travailleur ne peuvent être poursuivis sur la base de pertes financières ou autres provoquées par une grève légale, non plus qu'un travailleur ne peut être licencié au motif de participation à une grève légale.
431. Le gouvernement indique que, le 2 avril 1997, les salariés de la Standard Chartered Bank ont donné à leur employeur un préavis de grève de 14 jours si leurs revendications n'étaient pas satisfaites.
432. Le 3 avril 1997, l'employeur a informé le ministère et a demandé son aide afin de résoudre le conflit conformément à la loi. L'article 93 de la loi sur les relations professionnelles prévoit que tout travailleur ou employeur partie à un conflit peut porter plainte auprès d'un fonctionnaire chargé des questions professionnelles. Ce dernier peut recourir à la conciliation ou soumettre le différend à l'arbitrage volontaire si les parties y consentent, ou à l'arbitrage obligatoire du Tribunal du travail si aucun accord n'intervient à l'issue de l'arbitrage volontaire.
433. Selon le gouvernement, les parties se sont réunies à quatre reprises, sous la présidence d'un fonctionnaire chargé des questions professionnelles les 11, 16, 21 et 22 avril 1997, en vue de chercher une solution par voie de conciliation. Les quatre revendications principales des travailleurs étaient les suivantes:
434. Au cours des réunions, trois de ces quatre revendications ont pu être satisfaites par la conciliation, mais la question portant sur la répartition des bénéfices n'a pas pu être résolue.
435. Le 22 avril 1997, les parties, n'ayant pu se mettre d'accord par l'arbitrage volontaire, sont convenues que le fonctionnaire chargé des questions professionnelles devait renvoyer la question du système de répartition des bénéfices à l'arbitrage obligatoire du Tribunal du travail, et que chacune des parties rédigerait son mémoire en vue de l'audience. Le 23 avril 1997, les salariés de la Standard Chartered Bank se sont mis en grève.
436. Une réunion a eu lieu le 24 avril au ministère du Travail durant laquelle le ministère a demandé aux travailleurs et aux employeurs de faire valoir leurs objections éventuelles à un arrêté mettant fin à la grève, compte tenu de l'accord intervenu sur le renvoi de la question à l'arbitrage obligatoire du Tribunal du travail.
437. Le jour suivant, le fonctionnaire ayant entendu les deux parties a pris un arrêté disposant que, puisque la question était à présent renvoyée au Tribunal du travail et que, d'entente avec le tribunal, l'audience aurait lieu à une date rapprochée: i) les travailleurs étaient tenus de mettre fin à la grève; et ii) l'employeur était habilité à prendre des mesures disciplinaires conformes au code de conduite de l'entreprise à l'encontre de tout travailleur qui ne respecterait pas l'arrêté.
438. Le 26 avril 1997, la Standard Chartered Bank a communiqué l'arrêté à chaque travailleur en leur demandant de reprendre le travail le 28 avril sous peine de mesures disciplinaires.
439. Les travailleurs ont contesté l'arrêté auprès du Tribunal de première instance, invoquant que le Tribunal du travail n'avait pas été dûment saisi de l'affaire.
440. Le Tribunal de première instance a jugé que le fonctionnaire chargé des questions professionnelles devait faire parvenir aux avocats du demandeur et du défendeur une déclaration relative aux questions renvoyées à l'arbitrage, le 2 mai 1997 à 10 heures du matin au plus tard. Ainsi fut fait.
441. Pendant ce temps, la direction a procédé à des audiences en vertu du code de conduite de l'entreprise en ce qui concerne les salariés qui n'avaient pas repris le travail le 28 avril; elle a pris la décision de les licencier le 3 mai 1997.
442. Les salariés ont contesté cette décision auprès du Tribunal de première instance le 12 mai et l'affaire est encore en suspens.
443. En outre, le gouvernement déclare que le Tribunal du travail a prononcé le jugement suivant sur la question de la répartition des bénéfices: le demandeur ou les travailleurs n'ont droit à aucune prime additionnelle autre que celles qui ont déjà été versées pour l'année financière qui s'est terminée le 31 décembre 1996. Aux termes de la loi, les travailleurs auraient pu interjeter un appel auprès de la Cour suprême contre cette décision, mais ils ne l'ont pas fait.
444. Par conséquent, le gouvernement réaffirme sa position selon laquelle il n'y a eu violation ni de la convention no 87 ni de la convention no 98.
C. Conclusions du comité
445. Le comité note que, dans ce cas, les allégations portent sur le renvoi d'un conflit du travail à l'arbitrage obligatoire par le ministère de la Fonction publique, du Travail et du Bien-être (ci-après, ministère du Travail) et sur la prise d'un arrêté mettant un terme à une grève et autorisant l'employeur à prendre des mesures disciplinaires à l'égard de tout travailleur qui la poursuivrait; cet arrêté s'est traduit par un licenciement massif dans la Standard Chartered Bank.
446. Le comité note que, selon le gouvernement, il n'y a pas eu violation de la liberté syndicale, puisque employeurs et travailleurs ne faisaient qu'exercer les droits qui leur sont conférés par la législation nationale. Le gouvernement ajoute qu'un appel interjeté par les travailleurs concernant les mesures prises à leur encontre par les employeurs est encore en suspens auprès du Tribunal de première instance. Le comité souhaite rappeler tout d'abord que bien que le recours à la procédure judiciaire interne constitue un élément qui doit, certes, être pris en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, annexe I, paragr. 33.]
447. En ce qui concerne le fond des allégations, le comité note que le Syndicat des travailleurs des banques et des métiers apparentés du Zimbabwe (ZIBAWU) a déposé un préavis de grève le 2 avril 1997. Le jour suivant, la Standard Chartered Bank (ci-après: la banque) a demandé au ministère du Travail de prendre un arrêté (show cause order) appelant les parties à faire valoir leurs arguments en faveur ou contre un arrêté ordonnant la fin d'une action collective (conformément à l'article 106 de la loi sur les relations professionnelles telle que révisée en 1996). Des réunions d'arbitrage visant à résoudre le conflit ont eu lieu du 11 au 22 avril. Certaines revendications des travailleurs ont pu être satisfaites, mais la question du système de répartition des bénéfices de l'entreprise est demeurée sans solution. Selon le gouvernement, les parties n'ont pas pu s'entendre sur le renvoi de la question à l'arbitrage volontaire, mais elles ont accepté que le fonctionnaire chargé des questions professionnelles soumette l'affaire à l'arbitrage obligatoire du Tribunal du travail. Le comité note cependant que rien n'indique, dans la plainte, que le syndicat a accepté l'arbitrage obligatoire, et de toute manière l'article 98 de la loi sur les relations professionnelles permet au fonctionnaire chargé des questions professionnelles de renvoyer un conflit à l'arbitrage obligatoire, indépendamment de l'opinion des parties.
448. La grève a commencé le 23 avril et la banque a immédiatement demandé au ministère de prendre un arrêté, ce qu'il a fait le 25 avril. En vertu de l'article 107 de la loi sur les relations professionnelles, le ministre a autorité pour prendre un arrêté ordonnant qu'une action collective soit ajournée, suspendue, qu'il y soit mis fin ou que son ampleur soit réduite. En outre, faute de solution, le fonctionnaire du ministère, conformément aux dispositions de la loi relatives à la définition des conflits du travail, peut renvoyer le conflit à une autre instance. En vertu de l'article 107 5) a), le ministre peut autoriser le licenciement de certains salariés ou catégories de salariés qui participeraient à une action collective illégale, ou la suspension, avec ou sans rémunération, pendant une période déterminée.
449. L'arrêté pris le 25 avril sommait les travailleurs de reprendre le travail à midi le même jour; il précisait qu'ils ne seraient pas payés pour la durée de la grève, que l'employeur était autorisé à prendre toute mesure disciplinaire qu'il estimerait nécessaire à l'encontre de tout salarié qui ne respecterait pas l'arrêté et que le conflit était renvoyé à l'arbitrage obligatoire en vertu des articles 98, 99 et 100 de la loi sur les relations professionnelles de 1996. A la suite de quoi, la banque a procédé au licenciement sommaire de 365 salariés au motif qu'ils avaient déserté leur poste de travail. Selon l'organisation plaignante, la banque a fait savoir aux travailleurs en grève que, pour retrouver leur emploi, ils devraient présenter une demande et accepter des contrats temporaires assortis de conditions d'emploi et d'indemnités beaucoup moins favorables que celles dont ils avaient joui jusqu'alors. (L'organisation plaignante a annexé à sa plainte des échantillons de lettres de licenciement et les conditions de réemploi des travailleurs licenciés.)
450. Premièrement, le comité note que la question du système de la répartition des bénéfices de l'entreprise a été renvoyée à l'arbitrage obligatoire à deux reprises. D'abord, le gouvernement indique que, puisqu'il a été impossible de résoudre cette question par la conciliation, le fonctionnaire chargé des questions professionnelles a décidé de renvoyer la question à l'arbitrage obligatoire. Deuxièmement, l'arrêté du 25 avril mettait un terme à la grève et renvoyait la question du système de répartition des bénéfices à l'arbitrage obligatoire. A cet égard, le comité a souligné que l'imposition de l'arbitrage obligatoire n'est admissible qu'en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme ou en cas de crise nationale aiguë. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, paragr. 517.] Le comité a déjà estimé que les banques ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 545.] Le comité regrette que les articles 98, 99, 100, 106 et 107 de la loi sur les relations professionnelles accordent aux autorités du travail le pouvoir de renvoyer les conflits à l'arbitrage obligatoire chaque fois qu'elles le jugent approprié, et il demande instamment au gouvernement d'amender ces dispositions afin que l'arbitrage obligatoire ne puisse être imposé que lorsque les services essentiels sont en cause et en cas de crise nationale aiguë; il demande au gouvernement de le tenir informé des progrès réalisés à cet égard.
451. Deuxièmement, en ce qui concerne le licenciement massif des travailleurs qui ont fait grève, le comité note, que selon le gouvernement, le Tribunal de première instance a été saisi de l'appel interjeté par les travailleurs et que l'affaire est encore en suspens. Cependant, le comité note avec regret que ces licenciements sont le résultat de l'autorisation octroyée par l'arrêté ministériel à l'employeur de prendre toutes les mesures disciplinaires qu'il jugerait appropriées. Le comité se doit de rappeler que le licenciement de travailleurs pour fait de grève légitime constitue une discrimination en matière d'emploi. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 704.] Le comité prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs qui ont été licenciés au motif de leur participation à la grève de la Standard Chartered Bank en avril 1997 soient réintégrés dans leurs emplois, aux mêmes conditions et avec les mêmes indemnités que celles qui étaient les leurs avant la grève. En outre, étant donné que l'article 107 5) de la loi sur les relations professionnelles permet d'habiliter l'employeur, par arrêté, à licencier ou suspendre pendant une période déterminée les salariés qui ont participé à une action collective légitime ou illégitime et à licencier les salariés qui ont participé à une action collective illégitime, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour amender cette disposition afin que les travailleurs ne puissent être victimes de discrimination dans leur emploi lorsqu'ils exercent une activité syndicale légitime. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des progrès réalisés, d'une part, en ce qui concerne la réintégration des travailleurs licenciés à la Standard Chartered Bank et, d'autre part, en ce qui concerne l'amendement de l'article 107 5) de la loi sur les relations professionnelles.
Recommandations du comité
452. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Genève, le 19 mars 1998.
Max Rood,
Président.
Points appelant une décision:
paragraphe 55; |
paragraphe 223; |
paragraphe 370; |
paragraphe 68; |
paragraphe 251; |
paragraphe 386; |
paragraphe 91; |
paragraphe 261 |
paragraphe 403; |
paragraphe 105; |
paragraphe 272; |
paragraphe 420; |
paragraphe 119; |
paragraphe 288; |
paragraphe 452. |
paragraphe 160; |
paragraphe 307; |
|
paragraphe 185; |
paragraphe 342; |
|
1. Les dates figurant entre parenthèses sont celles du jour de délivrance des certificats d'enregistrement.