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Travail forcé au Myanmar (Birmanie)

Rapport de la commission d'enquête instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 Organisation internationale du Travail
Genève, 2 juillet 1998


Annexe I

Eléments supplémentaires d'appréciation soumis par les plaignants en octobre 1996

Eléments supplémentaires d'appréciation présentés
en vertu de l'article 26 de la Constitution
de l'Organisation internationale du Travail
le 20 juin 1996 par les délégués travailleurs
à la Conférence internationale du Travail
de 1996 contre le gouvernement du Myanmar
pour non-respect de la convention n
o 29 de l'OIT
(31 octobre 1996)


Table des matières

Liste récapitulative des sources

I. RÉSUMÉ

A. Constatations de faits

B. Conclusions juridiques

II. ACTION MENÉE ANTÉRIEUREMENT
DANS LE CADRE DE L'OIT

A. Suivi mené par la commission d'experts et la Commission de la Conférence

B. La réclamation présentée en vertu de l'article 24

III. CONSTATS DES FAITS

A. Travail forcé à des fins publiques

B. Recours au travail forcé à des fins privées

C. La législation sur le travail forcé au Myanmar

IV. CONCLUSIONS DE DROIT

A. La pratique du travail forcé au Myanmar constitue une infraction de ce pays à ses obligations internationales en vertu de la convention no 29

B. La législation du Myanmar n'est pas conforme à la convention no 29

C. Aucune des exceptions prévues à l'article 2 de la convention ne s'applique

D. La notion de période de transition n'est pas applicable en l'espèce et, quand bien même elle le serait, le gouvernement du Myanmar ne pourrait prétendre respecter les garanties dont une telle période doit être assortie

V. CONCLUSIONS


Liste récapitulative des sources

Instruments de l'OIT

Constitution de l'Organisation internationale du Travail (1919).

Convention (no 29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930

Documents de la Commission de la Conférence: Comptes rendus des débats

Rapports de la commission d'experts

Etudes d'ensemble de la Commission d'experts sur le travail forcé

Rapports du Conseil d'administration

Autres documents de l'OIT

Documents des Nations Unies

Rapports du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar

Autres documents des Nations Unies

Déclaration universelle des droits de l'homme, résolution 217A de l'Assemblée générale des Nations Unies, document des Nations Unies A/810 (1948)

Pacte international relatif aux droits civils et politiques, résolution 2200 de l'Assemblée générale des Nations Unies, adoptée le 16 décembre 1966 et entrée en vigueur le 23 mars 1976, 21e session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, supplément no 16, document des Nations Unies A/6316

Rapport du Rapporteur spécial sur la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/31 (6 janv. 1994)

Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/7 (7 déc. 1993)

Législation et réglementation du Myanmar

Loi de 1908 sur les villages, in Burma Code, vol. VI (1979) (versions anglaise et birmane)

Loi de 1907 sur les villes, in Burma Code, vol. VI (1979) (versions anglaise et birmane)

Code pénal, in Burma Code, vol. VIII (1979)

Loi du SLORC no 4/93

Loi du SLORC no 1/92

Directive secrète du SLORC no 125

Directive secrète du SLORC no 82

Déclarations du gouvernement aux Nations Unies

Déclaration de Son Excellence U Ohn Gyaw, chef de la délégation de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, New York (3 oct. 1995)

Lettre du représentant permanent de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève en date du 18 mars 1996, mémorandum d'observations et de commentaires concernant le document E/CN.4/1996/65 du 5 février 1996 ayant trait à l'Union du Myanmar, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996)

Mémorandum d'observations et de commentaires présenté par l'Ambassadeur de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996)

Note verbale de la Mission permanente de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève en date du 4 novembre 1994 contenant la réponse au rapport du Rapporteur spécial, 1994, reproduite dans le rapport provisoire du Rapporteur spécial contenu dans le document des Nations Unies A/49/594/Add.1 (28 oct. 1994)

Décisions internationales

Essais nucléaires (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France). Arrêt du 20 décembre 1976, rapports de la CIJ

Conflits de frontière, arrêt, rapports de la CIJ, 1986

Traités

Nicolas Valticos, Le droit international du travail (1979)

Rapports de missions d'enquête

Amnesty International

Anti-Slavery International

Article 19

Australian Council for Overseas Aid

Asia Watch

Burma Action Group

EarthRights International and Southeast Asian Information Network

Human Rights Watch/Asia

Images Asia

Commissions internationale de juristes

Comité de juristes pour les droits de l'homme

US Committee for Refugees

United States Department of State

Autres sources

John Doe I., etc. et coll., contre Unocal Corp. et coll. Docket no 96-6959 LGB (CD Cal.), plainte portée devant la Cour fédérale des Etats-Unis le 3 octobre 1996

Le gouvernement de coalition nationale de l'Union birmane et la Fédération des syndicats de la Birmanie contre Unocal Inc

Réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Myanmar (anciennement la Birmanie), par la Confédération internationale des syndicats libres le 25 janvier 1993 au Directeur général du Bureau international du Travail pour violations de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par la Birmanie en 1955

Lettre de Beth Stephens, Center for Constitutional Rights, datée du 21 mars 1995 à M. Roger Beach, CEO, Unocal Corporation

«More information construction of Yangon-Mandalay Union Highway», Myanmar News Agency, 23 Jan. 1996

Jeremy Mark, «Western firms remain hesitant about investing in Burma, in contrast to Asians' enthusiasm». Asian Wall Street Journal, semaine du 4 septembre 1995

David Ivanovich, «Protesters crash Unocal meeting», Houston Chronicle, 23 mai 1995

«Burma using forced labour on tourist projects», New York Times, 17 juillet 1994


I. RÉSUMÉ

Sont réunies dans le présent document les éléments supplémentaires d'appréciation à l'appui de la plainte présentée le 20 juin 1996 par les délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail de 1996 contre le gouvernement du Myanmar en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour non-exécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par ce pays en 1955. Les travaux que l'OIT a consacrés jusque-là à cette question recouvrent plus de trente années de suivi par la commission d'experts, deux paragraphes spéciaux de la Commission de la Conférence, les constats d'inexécution de la convention établis par un comité constitué pour examiner une réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT («Comité de l'article 24»), suivis de l'adoption, par le Conseil d'administration de l'OIT, des conclusions de ce comité.

A. Constatations de faits

Le Myanmar a, de longue date, une pratique diffuse d'imposition de travail forcé sur son territoire. Cette pratique, qui touche des centaines de milliers d'habitants du pays, se traduit l'utilisation d'une main-d'œuvre forcée à des fins publiques tout autant que pour des intérêts privés. Le travail est imposé à des hommes, à des femmes et à des enfants de villages et de villes de différentes parties du pays ainsi qu'à des prisonniers. Parallèlement au travail forcé, le gouvernement militaire du Myanmar («le gouvernement» ou SLORC (Conseil d'Etat pour la restauration de la loi et de l'ordre publics)) fait subir à nombre de travailleurs forcés de graves préjudices corporels, y compris à caractère sexuel, en l'espèce de voies de fait, de viols, d'exécutions et de privation délibérée du minimum nécessaire en matière d'alimentation, d'eau, de repos, d'hébergement et d'accès à des soins médicaux.

Le Myanmar recourt à des pratiques de travail forcé à des fins publiques sous les formes suivants: 1) portage, déminage, prestations sexuelles pour les militaires; 2) ouvrages de construction et autres ouvrages de développement et d'infrastructure à forte intensité de main-d'œuvre ne bénéficiant et, le plus souvent, se révélant préjudiciables pour les populations dont le travail est exigé; et 3) travaux lourds dans le cadre d'ouvrages militaires. Le Myanmar a également recours à la pratique du travail forcé pour des intérêts privés, dans les objectifs suivants: 1) promouvoir le développement des entreprises à risque commun, notamment pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays; 2) encourager l'investissement privé dans le développement des infrastructures, les travaux publics et les projets touristiques; et 3) servir les intérêts commerciaux particuliers de membres de l'armée du Myanmar.

Deux lois actuellement en vigueur au Myanmar autorisent l'imposition d'un travail forcé ou obligatoire à la population et prévoient des amendes et des peines d'emprisonnement à l'encontre de ceux qui s'y soustraient. Ces deux instruments, qui sont la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes, ne rentrent pas dans le champ d'application d'une loi apparemment en vigueur qualifiant de délit au pénal l'exigence «illégale» d'un travail. D'autres directives militaires secrètes récemment révélées légitiment implicitement les pratiques de travail forcé dans le cadre de projets de développement du fait qu'elles demandent instamment que la main-d'œuvre forcée perçoive un salaire et qu'il soit mis un terme aux «tourments et souffrances» liés à des «incidents regrettables» dans le cadre du travail forcé.

B. Conclusions juridiques

Sur le plan de l'application effective de la convention no 29, le Myanmar est totalement défaillant. Il recourt délibérément à la pratique du travail forcé au sens de la convention et commet, dans ce contexte, de graves atteintes aux droits de l'homme. Il a refusé d'abroger les lois autorisant la pratique du travail forcé, de même qu'il a refusé de qualifier de manière satisfaisante de délit au pénal l'imposition de travail forcé. Il a en outre refusé de veiller à ce que les sanctions prévues par la législation soient, d'une part, réellement adaptées et, d'autre part, strictement appliquées, comme le prévoit la convention.

Le gouvernement a cherché à présenter les arrestations et l'imposition d'un travail forcé sous la menace de représailles, pratiques attentatoires, amendes et peines d'emprisonnement comme une contribution volontaire de la part de la population du Myanmar, qui serait conforme à la tradition culturelle bouddhiste. Les faits prouvent que, d'une part, des minorités non bouddhistes sont parfois soumises de manière disproportionnée à des obligations de travail forcé et, d'autre part, que la pratique du travail forcé se fonde sur la menace de sanctions légales et sur le recours à la contrainte physique.

Le gouvernement a déclaré son intention de ne recourir, désormais, qu'aux forces armées dans le cadre de ce qu'il qualifie selon ses propres termes de «grands projets de développement collectif». Cette déclaration n'apporte aucune garantie à l'effet que le gouvernement cessera de recourir au travail forcé dans le cadre d'autres ouvrages, y compris pour les services auxiliaires et de portage pour l'armée, ni que le travail forcé dans le cadre de «grands ouvrages» ne risque pas de reprendre à tout moment.

Aucune des pratiques de travail forcé du Myanmar ne rentre dans la définition de l'une quelconque des dérogations à l'interdiction générale du recours au travail forcé ou obligatoire stipulée par la convention. De fait, les pratiques du Myanmar ne correspondent à aucune des cinq exceptions - assez strictes - que prévoit la convention: service militaire obligatoire; obligations civiques normales; travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation judiciaire; travail ou service exigé dans les cas de force majeure; et menus travaux de villages. De plus, qu'un travailleur forcé soit rémunéré ou non n'a aucune incidence quant à déterminer si la pratique en cause rentre dans l'un des cinq exceptions envisageables, même si le gouvernement a voulu défendre ses pratiques en alléguant que les travailleurs forcés sont rémunérés.

Il n'y a pas de période transitoire qui dispenserait le Myanmar de satisfaire à l'obligation que lui prescrit la convention no 29 de supprimer le travail forcé sous toutes ses formes. La commission constituée par l'OIT pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution au sujet du portage obligatoire au Myanmar a établi qu'aucune période transitoire de cette nature ne s'applique. Ce constat est largement appuyé en fait comme en droit. Les quarante années écoulées depuis la ratification de la convention par le Myanmar constituent un délai plus que suffisant pour procéder aux modifications requises de la législation et de la pratique afin de rendre l'une et l'autre conformes à la convention. De plus, le gouvernement admet lui-même qu'aucune période transitoire ne s'applique, cette reconnaissance ayant été exprimée dans le cadre de la procédure exercée sur le fondement de l'article 24 et, récemment, dans les observations qu'il a adressées aux Nations Unies à propos de rapports sur les pratiques de travail forcé.

Enfin, même dans le cas où une telle période transitoire s'appliquerait, les faits démontreraient qu'aucune des conditions ou garanties à respecter au cours d'une telle période ne l'ont été par le Myanmar. Le travail forcé est utilisé à des fins privées; il est recouru à une main-d'œuvre forcée de manière large et systématique, comme composante ordinaire du budget de l'Etat; et les pratiques de travail forcé ne se limitent aucunement à des mesures d'exception. Les autres manquements par rapport aux conditions et garanties prévues par les dispositions transitoires de la convention sont la réglementation inadéquate ou inexistante des pratiques de travail forcé; le fait que le travail ne serve pas les intérêts directs et majeurs de la collectivité à laquelle il est imposé et qu'il n'a pas non plus un caractère de nécessité urgente; le fait que ce travail constitue une contrainte trop lourde pour la population; le fait que le travail forcé est pratiqué à titre d'impôt sans aucune des sauvegardes prévues par la convention, notamment la faculté, pour les travailleurs forcés, de demeurer sur leur lieu de résidence habituelle et de préserver leur religion, leur vie sociale et leur agriculture; l'enrôlement de femmes, d'enfants et d'hommes de plus de 45 ans; le fait que le travail forcé ne soit pas limité à 60 jours par an; l'absence de taux de rémunération en espèces correspondant aux taux en vigueur pour le travail libre et le non-respect du nombre d'heures de travail hebdomadaire et du repos hebdomadaire; la non-application de la législation en matière d'indemnisation des travailleurs et, en tout état de cause, le non-respect de l'obligation d'assurer la subsistance d'un travailleur devenu invalide dans le cadre d'un travail forcé; le fait de ne pas garantir que les personnes soumises au travail forcé ne soient pas transférées dans des régions où les conditions de nourriture et de climat sont tellement différentes que leur santé peut en être affectée ou bien, dans le cas où un tel transfert est nécessaire, sans assurer l'adaptation progressive des travailleurs aux nouvelles conditions; le fait de ne pas garantir, pour les périodes prolongées de travail forcé, des soins médicaux et des moyens de subsistance appropriés pour les familles des travailleurs ni de prévoir la prise en charge du coût du transport des travailleurs jusqu'au lieu de travail et retour; le fait de ne pas avoir aboli le portage obligatoire «dans le plus bref délai possible» après la ratification.

Sur la base des faits tels qu'ils ont été présentés et de la discussion de la législation évoquée dans le cadre de cette plainte, les plaignants prient instamment le Conseil d'administration de constituer une commission d'enquête, qui sera chargée d'examiner cette plainte et de faire rapport sur la situation au Myanmar. Les plaignants recommandent en outre que, si une telle commission d'enquête est établie, elle insiste sur une procédure propre à garantir la sécurité des témoins et de leurs familles. Les plaignants demandent que la commission d'enquête dresse un constat des faits et en tire des conclusions juridiques allant dans le sens de la plainte et recommandent que le Myanmar prenne des mesures correctrices immédiates afin de se conformer à la convention no 29 et en respecter les termes.


II. ACTION MENÉE ANTÉRIEUREMENT
DANS LE CADRE DE L'OIT

Le Myanmar a ratifié la convention (no 29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930 (ci-après désignée la «convention no 29»), le 4 mars 1955(1). Le non-respect par le Myanmar de ses obligations par rapport à la convention no 29 fait depuis longtemps l'objet de commentaires de la part de la Commission d'experts sur l'application des conventions et recommandations (ci-après désignée la «commission d'experts») et de la Commission de la Conférence internationale du Travail sur l'application des normes (ci-après désignée la «Commission de la Conférence»)(2).

A. Suivi mené par la commission d'experts
et la Commission de la Conférence

1. La commission d'experts

Depuis plus de 30 ans, la commission d'experts examine le respect, par le Myanmar, de ses obligations au titre de la convention no 29. Dans les années soixante, elle a abordé les pratiques suivies par le gouvernement en vertu de la loi no 9 de 1894 sur les prisons, de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes(3). En 1968, le gouvernement a déclaré que les lois sur les villages et sur les villes n'étaient plus en vigueur et qu'il envisageait l'adoption d'une nouvelle législation interdisant le travail forcé ou obligatoire. Il a précisé en outre que le travail forcé n'était pas utilisé à des fins publiques dans le pays(4). Par la suite, l'examen périodique de la situation du pays n'a fait apparaître aucun changement substantiel, que ce soit en droit ou en pratique. En 1991, la commission d'experts a été saisie d'un rapport de la CISL contenant des allégations précises sur les pratiques de portage forcé, allégations auxquelles le gouvernement n'a pas répondu(5).

En 1993, la CISL a engagé une procédure de réclamation sur le fondement de l'article 24 de la Constitution de l'OIT à propos de la pratique de portage forcé au Myanmar («réclamation en vertu de l'article 24»)(6). La commission d'experts a, en conséquence, suspendu l'examen de cet aspect des pratiques de travail forcé au Myanmar. Elle a également prié le gouvernement de faire ses commentaires sur les pratiques de travail forcé autres que les pratiques de portage alléguées dans le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar désigné par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies(7).

En 1995, le comité constitué en vertu de l'article 24 a recommandé que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes soient modifiées ou abrogées et que l'action de suivi nécessaire soit assurée, en prévoyant notamment une répression stricte à l'égard de ceux qui auraient encore recours au travail forcé. La commission d'experts a exprimé l'espoir que le gouvernement prendrait des mesures correctives; elle a noté en outre que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes permettaient d'imposer du travail forcé.

Le gouvernement du Myanmar n'ayant pas soumis de rapport conformément à l'article 22 de la Constitution de l'OIT, la commission d'experts s'est saisie de la réponse du gouvernement au comité constitué en vertu de l'article 24. Dans cette réponse, le gouvernement déclare qu'il n'y a pas de travail forcé au Myanmar, mais qu'une tradition culturelle solidement ancrée veut que chacun offre volontairement son travail dans les conditions prévues à l'article 2 2) e) de la convention no 29(8). La commission a fait observer que les travaux en question doivent être de «menus travaux» et qu'ils doivent être accomplis «dans l'intérêt direct de la collectivité» et non se rapporter à des ouvrages «destinés à une communauté plus large». Elle a ajouté que «la construction d'une voie ferrée ne semble répondre ni à l'un ni à l'autre de ces critères» et que la persistance «des dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes permettent difficilement de dire que les résidents effectuant un travail à la demande des autorités le font volontairement»(9).

En 1996, la commission d'experts réitérait ses précédentes constatations concernant la loi sur les villages et la loi sur les villes, réaffirmant qu'à son avis ces instruments permettent d'imposer un travail forcé au sens prévu par la convention no 29. Elle prenait note avec préoccupation de la réponse faite par le gouvernement à la demande que la Commission de la Conférence lui avait adressée en 1995, en le priant de prendre des mesures correctives et de fournir un rapport détaillé(10). La commission faisait observer en outre que, depuis 1967, le gouvernement déclare que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont tombées en désuétude et qu'il est question de les modifier ou de les abroger. La commission faisait en outre observer que: «dans son dernier rapport, le gouvernement persiste à entretenir la confusion entre travail obligatoire et travail volontaire et ne donne aucune indication, quelle qu'elle soit, quant à des mesures concrètes qui auraient été prises pour abolir, tant dans la législation que dans la pratique, le pouvoir d'imposer un travail obligatoire»(11). Elle priait le gouvernement du Myanmar de fournir des précisions complètes à la Conférence internationale du Travail à sa 83e session, en juin 1996.

2. La Commission de la Conférence

Au cours des cinq dernières années, le gouvernement du Myanmar a été invité trois fois à s'exprimer devant la Commission de la Conférence au sujet de ses obligations au titre de la convention no 29. A deux reprises, le non-respect de ses obligations a fait l'objet de paragraphes spéciaux dans le rapport de la Commission de la Conférence.

En 1992, la Commission de la Conférence a noté que le gouvernement n'avait pas fait parvenir à temps son rapport dû en vertu de l'article 22 et le priait de faire rapport au Bureau dans les meilleurs délais(12). Un représentant gouvernemental a déclaré devant cette commission que: 1) il n'y avait pas de coercition en ce qui concerne l'emploi des travailleurs au Myanmar; 2) que les porteurs travaillant pour l'armée le faisaient librement; 3) que leur recrutement et leur emploi étaient conformes à l'article 8, paragraphe 1 n), de la loi de 1908 sur les villages et à l'article 7, paragraphe 1 m), de la loi de 1907 sur les villes; 4) que leur recrutement obéissait à certains critères; 5) que les porteurs n'étaient pas maltraités ni affectés à des tâches militaires; 6) qu'ils avaient droit, entre autres choses, au même traitement médical que les militaires en cas de lésions corporelles; et 7) qu'une législation exhaustive et complexe s'opposait de manière effective à la pratique du travail forcé sur le terrain.

En 1995, la Commission de la Conférence a «prié le gouvernement d'abroger sans délai les dispositions juridiques de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes afin de rendre ces instruments conformes, tant à la lettre qu'à l'esprit de la convention no 29, de mettre un terme aux pratiques de travail forcé sur le terrain, de prévoir et appliquer des sanctions exemplaires contre le recours à cette pratique et de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts sur les mesures législatives et pratiques adoptées dans un souci de conformité avec la convention no 29». Ce cas a fait l'objet d'un paragraphe spécial dans le rapport de la Commission de la Conférence(13).

En 1996, la Commission de la Conférence a adopté à nouveau un paragraphe spécial dans lequel «elle demande, une nouvelle fois, fermement au gouvernement d'abroger formellement et de toute urgence les dispositions légales et d'abandonner toutes les pratiques qui sont contraires à la convention. Elle demande au gouvernement de prescrire des sanctions véritablement dissuasives contre tous ceux qui recourent au travail forcé»(14). Dans un paragraphe spécial distinct, la Commission de la Conférence «a constaté avec une grande préoccupation» un défaut continu d'éliminer de sérieuses carences(15).

B. La réclamation présentée en vertu de l'article 24

Par lettre du 25 janvier 1993, la CISL a présenté une réclamation en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar(16). Le Conseil d'administration a constitué un comité chargé d'examiner cette réclamation, lequel a rendu son rapport le 7 novembre 1994(17). Les recommandations du comité chargé d'examiner la réclamation ont ensuite été adoptées par le Conseil d'administration en novembre 1994(18).

La CISL allègue que le gouvernement du Myanmar a enfreint la convention no 29 en institutionnalisant «le recours des commandants militaires au travail forcé par le recrutement forcé et l'exploitation de porteurs»(19). Se fondant sur des rapports dignes de foi, la CISL déclare que des hommes, des femmes et des enfants sont couramment raflés par la police et l'armée pour accomplir des services de portage dans des conditions pénibles et attentatoires: alimentation insuffisante, absence de soins médicaux, affectation au déminage, soumission à des viols ainsi qu'à des exécutions extrajudiciaires. La CISL allègue en outre que: 1) la pratique du portage forcé au Myanmar correspond bien au travail forcé ou obligatoire tel que le définit la convention no 29; 2) aucune des exceptions prévues par la convention n'est applicable en la matière; 3) le Myanmar ne se trouve pas dans une période transitoire envisagée par la convention no 29; 4) aucune des garanties ou conditions devant assortir le recours au travail forcé pendant une période transitoire n'est satisfaite par le gouvernement du Myanmar; et 5) le gouvernement du Myanmar a fait défaut à l'obligation que lui impose l'article 25 de la convention no 29 de sanctionner ceux qui imposent à autrui du travail forcé(20).

Le gouvernement du Myanmar a adressé au comité constitué en vertu de l'article 24(21) deux communications affirmant que: 1) il n'est pas question de pratiques de travail forcé ou d'esclavage, mais d'une contribution volontaire de la main-d'œuvre, conformément à une tradition millénaire; 2) les militaires recrutent et emploient des porteurs dans le cadre de leurs campagnes contre des groupes insurrectionnels près des frontières, conformément aux dispositions pertinentes de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes; 3) les diverses allégations relatives au caractère abusif du travail de portage et des conditions dans lesquelles ce travail s'effectue sont dénuées de tout fondement et les soins médicaux sont assurés en cas de nécessité; et 4) les conditions et garanties prévues aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention no 29 sont pleinement satisfaites(22).

Le comité constitué en vertu de l'article 24 a formulé les constatations et recommandations suivantes:

  1. la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes ménagent la possibilité d'imposer un travail forcé sous la menace, en violation de la convention no 29(23);
  2. le gouvernement du Myanmar n'a pas «fourni d'indications qui feraient entrer le portage obligatoire dans le champ de l'une des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention»(24);
  3. le gouvernement du Myanmar n'invoque pas, dans ses réponses à la réclamation présentée en vertu de l'article 24, la notion de période transitoire. Cette ligne de conduite est conforme à la position qu'il a prise dans ses rapports soumis en application de l'article 22 de la Constitution de l'OIT concernant le respect de ses obligations telles qu'elles découlent de la convention no 29. Dans ces rapports, le gouvernement affirme constamment que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont des instruments tombés en désuétude datant de l'époque coloniale et que les pouvoirs qu'elles confèrent ne sont plus exercés depuis longtemps(25);
  4. le respect des obligations découlant de l'article 25 de la convention no 29 prescrirait d'abroger immédiatement les dispositions en cause de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes et, de même, d'instituer des poursuites pénales à l'encontre de ceux qui recourent au travail forcé par la coercition. Le comité constitué en vertu de l'article 24 a fait observer que «ce point paraît d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires»(26).


III. CONSTATS DES FAITS

L'Union du Myanmar recourt de manière largement étendue à la pratique du travail forcé à des fins publiques ainsi que pour des intérêts privés. Rentrent dans les fins publiques documentées dans la présente section: 1) le portage, le combat, le déminage et les prestations sexuelles pour les militaires; 2) les projets de développement et d'infrastructure réalisés au détriment de la population en général; et 3) les ouvrages militaires. Comme on le démontre ci-après, le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé à des fins privées afin de: 1) promouvoir le développement des entreprises à risque commun, notamment pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays; 2) encourager l'investissement privé dans l'industrie du tourisme; et 3) servir les intérêts commerciaux particuliers de membres de l'armée du Myanmar. Comme examiné dans la présente partie, la législation actuelle du Myanmar autorise l'imposition d'un travail forcé ou obligatoire sous peine de sanctions. Cette législation prime sur toute directive gouvernementale qui tendrait à réprimer des pratiques attentatoires liées au travail forcé dans le cadre de projets de développement ainsi que toute législation qualifiant de délit pouvant être poursuivi au pénal l'imposition du travail forcé.

A. Travail forcé à des fins publiques

1. Le gouvernement du Myanmar recourt
au travail forcé pour le portage, le combat,
le déminage et les prestations sexuelles
pour les militaires

Les opérations militaires du Myanmar se caractérisent par une utilisation continuelle, largement répandue et systématique de la population civile pour des tâches de portage. Parallèlement au portage, le travail forcé concerne également le déminage, le combat et les prestations sexuelles pour les militaires. Dans une étude solidement documentée, il est constaté que «la réquisition de centaines de milliers de porteurs (y compris appartenant à la majorité birmane) a été signalée dans chaque Etat ou circonscription administrative de la Birmanie peuplée par des minorités ethniques»(27).

La pratique actuelle du portage forcé au service de l'armée du Myanmar (appelée en birman «Tatmedaw») a des liens historiques avec l'époque de l'occupation japonaise et du régime colonial britannique(28). Le gouvernement du Myanmar a nié de diverses manières l'existence de la pratique et a prétendu que, lorsque des opérations de portage ont lieu, elles s'effectuent selon des conditions strictes, conformément à la législation, les personnes concernées s'étant librement offertes pour cette tâche(29). Malgré ces affirmations, «il est indéniable que, en l'absence de routes ou moyens de transport appropriés, des milliers de villageois sont contraints de transporter les armes et les équipements destinés à toutes les opérations militaires majeures»(30). Depuis 1988, d'anciens cadres de l'armée ont confirmé que «pour la plupart des opérations militaires menées dans les zones de conflit, il est réquisitionné en moyenne un porteur par soldat en mission»(31).

La plupart des personnes mobilisées comme porteurs ont été contraintes de le faire par divers procédés établis et corroborés par des sources indépendantes et fiables(32). Les chefs de village sont couramment avisés du contingent de porteurs à fournir et ont juridiquement l'obligation de fournir ce contingent(33). La seule échappatoire consiste à acquitter auprès du commandement militaire local des sommes importantes appelées «taxes de portage». La rafle est un moyen courant d'obtenir des porteurs et, à moins d'avoir assez d'argent pour pouvoir être relâché par les soldats, il est impossible de se soustraire à la mission de portage. A côté de ces formes plus officielles ou organisées de mobilisation de civils pour des missions de portage, la population est couramment victime de rafles opérées par la police locale ou l'armée dans des lieux publics tels que les cinémas, les cafés, les salles de diffusion de vidéos et les gares. Les victimes sont chargées dans des camions et emmenées pour servir de porteurs. Dans certains cas, ces personnes sont amenées loin de leur lieu de capture afin de les dissuader de s'enfuir. Comme le note le Rapporteur spécial des Nations Unies: «nombre de victimes de telles opérations ... sont des paysans, des femmes, des travailleurs journaliers ou d'autres civils sans défense n'ayant pas assez d'argent pour s'épargner de mauvais traitements par des libéralités»(34).

Les réquisitions pour service semblent être arbitraires et largement répandues. Un homme explique avoir été arrêté souvent pour travailler comme porteur, ce qui lui interdisait d'accomplir son travail ordinaire de transporteur de marchandises: «en une année, j'ai été réquisitionné comme porteur peut-être dix fois, parfois pendant dix jours, parfois pendant deux mois...»(35). Si le SLORC entreprend une opération de grande envergure, les chefs militaires réquisitionnent des centaines de milliers de personnes comme porteurs, sur la base des besoins prévus. Ces besoins sont calculés en tenant compte du fait avéré que nombre de porteurs s'échapperont dès qu'ils le pourront et devront donc être remplacés.

Une somme considérable de témoignages montrent qu'hommes, femmes, enfants et vieillards sont réquisitionnés comme porteurs, même si le SLORC prétend qu'il existe des restrictions et des conditions selon lesquelles les personnes sont admises à travailler comme porteurs(36). «L'armée réquisitionne régulièrement des porteurs sans discrimination ... lorsque les troupes ont besoin d'un grand nombre de porteurs, on réquisitionne également les femmes âgées de 15 à 60 ans»(37).

Parmi les civils contraints de servir comme porteurs pour les troupes du SLORC figurent également des condamnés. Les condamnés sont contraints de travailler les fers aux pieds et un traitement particulièrement dur leur est réservé(38). De nombreux détenus qui ont été réquisitionnés comme porteurs sont morts sur les lignes de front, souvent en conséquence des mauvais traitements infligés par les troupes du SLORC(39).

Des informations solidement étayées et des témoignages individuels démontrent le caractère attentatoire des conditions «de travail» auxquelles sont soumis les civils réquisitionnés comme porteurs. Ces porteurs acheminent, sous surveillance militaire, des charges de denrées alimentaires, de munitions et d'armes qui peuvent peser de 30 à 60 kilos. Ils accomplissent chaque jour de longues journées sans recevoir suffisamment de nourriture ou d'eau ni bénéficier de suffisamment de repos(40). Ils ont rarement accès à des soins médicaux, même si les maladies, dont la malaria, et les lésions corporelles résultant du travail forcé sont nombreuses. Les porteurs sont victimes non seulement de maladies, mais aussi de blessures subies au cours des combats ou des opérations de déminage(41), ainsi que de lésions résultant des charges excessives qu'ils doivent transporter. Lorsque, pour l'une de ces raisons, les porteurs ne sont plus en mesure de remplir leur office, les troupes du SLORC les abandonnent quand ils tombent d'épuisement, sans leur apporter le moindre soin médical ou toute autre forme d'assistance(42).

De nombreux porteurs sont battus ou subissent d'autres formes de sévices corporels de la part des troupes du SLORC, qui les abandonnent souvent avec des lésions graves. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le Myanmar a estimé que certaines des plus graves violations des droits de l'homme dont il ait eu connaissance se sont produites dans le cadre du portage forcé(43), les sévices subis revêtant la forme de coups(44), d'exécutions extrajudiciaires et sommaires(45), ainsi que de viols, y compris de viols collectifs de femmes réquisitionnées pour des missions de portage(46).

Il est de pratique courante chez les militaires d'infliger des coups de baguette ou de crosse de fusil à un porteur qui ne peut plus continuer(47). Des porteurs qui ont pu être entendu après s'être échappés déclarent avoir subi eux-mêmes et vu commettre des voies de fait. Ils décrivent des «sévices corporels et traitements inhumains depuis le moment de leur capture» ..., précisant que [la plupart] étaient roués de coups ... lorsqu'ils trébuchaient ou tombaient d'épuisement et que tous [ceux qui ont été entendus] ont «vu mourir des compagnons de peine»(48). De nuit, hommes et femmes étaient séparés. Beaucoup de femmes ont été violées de manière répétée par des soldats du SLORC, qui procédaient parfois de manière collective(49).

Les porteurs sont couramment utilisés à des fins militaires, nombre d'entre eux ayant péri du fait qu'ils étaient «mêlés aux soldats en tant que portefaix pour chaque colonne de marche et ont ainsi été amenés directement sur la ligne de front des combats»(50). Une fois parvenus sur la ligne de front, les porteurs sont souvent tenus d'accomplir un certain nombre de tâches militaires. C'est ainsi que, sans être eux-mêmes armés, ils sont placés en tête de colonne pour déclencher les mines et autres pièges explosifs ainsi que les embuscades. Comme l'a constaté un groupe d'investigation, «un aspect particulièrement révoltant du phénomène ... est la pratique suivie parfois par les militaires, qui consiste à utiliser des porteurs civils comme 'boucliers humains' dans le cadre d'opérations de première ligne»(51).

Assez souvent, les porteurs sont envoyés pour déminer les chemins et les champs où des mines ont été posées(52). Si, en soi, le recours à des enfants comme porteurs est déjà condamnable, il est encore plus révoltant de constater que le SLORC ne prémunit pas les enfants contre l'obligation d'accomplir des fonctions militaires après avoir été enrôlés comme porteurs(53).

2. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé
dans le cadre de projets de développement et de travaux
publics qui, non seulement ne servent pas les intérêts directs
de la communauté chargée de leur exécution, mais en fait
portent atteinte à l'existence de cette communauté
(54)

a) Les pratiques de travail forcé dans le cadre de projets
de développement sont largement répandues
et touchent des centaines de milliers de civils

L'utilisation largement répandue du travail forcé au Myanmar dans le cadre de projets de développement et de construction affecte l'existence d'un grand nombre de personnes -- hommes, femmes, enfants et vieillards. Le total des effectifs réquisitionnés pour les différents projets atteint plusieurs centaines de milliers(55). Le travail forcé est pratiqué au Myanmar dans le cadre d'un grand nombre de projets, y compris de développement des infrastructures et du tourisme(56). Les ouvrages généralement accomplis de cette manière recouvrent la construction de routes, de lignes de chemin de fer et d'aéroports(57). Le gouvernement militaire a contraint des milliers de personnes à «fournir le concours» de leur travail dans le cadre de projets de développement du tourisme conçus en vue de faire de l'année 1996 l'«année du tourisme au Myanmar»(58).

Des prisonniers de tout le pays sont aussi couramment réquisitionnés pour des ouvrages d'infrastructure(59). Ils sont employés pour la construction de routes, de même que pour casser des pierres à cette même fin. En général, ils sont établis dans des camps de travail situés aux abords du chantier. Les conditions d'existence dans ces camps sont dures, à quoi s'ajoute un travail pénible. De nombreux prisonniers meurent à la tâche. Selon certaines informations, des prisonniers politiques se trouveraient dans ces camps(60).

b) Le travail forcé dans le cadre de projets
de développement est systématique et organisé

Le travail forcé dans le cadre de projets de développement au Myanmar obéit à un schéma systématique et organisé; les éléments recueillis révèlent une intensification marquée du travail forcé ces derniers temps(61). S'il est vrai que des personnes ont été acheminées jusqu'à d'autres parties du pays pour des projets de réalisation basés sur un travail forcé, «en règle générale, les chantiers sont organisés sur la base d'un village ou d'une localité. Pour les chantiers locaux, chaque famille (ou bien chaque rue ou chaque quartier) reçoit du LORC de district [Conseil de restauration de la loi et de l'ordre public] l'ordre de fournir un certain nombre de travailleurs pour accomplir une certaine tâche, comme le concassage d'une certaine quantité de pierres ou le terrassement d'un tronçon de route»(62). Comme a pu le constater un membre d'une organisation s'occupant des droits de l'homme, «c'est en général ... au chef qu'il incombe de désigner telles familles pour travailler à telles périodes, selon un principe de rotation. Nul ne peut se soustraire à cette obligation; la seule échappatoire étant d'acquitter une amende élevée ('taxe de portage') ou bien fuir la zone»(63). Les fonds destinés à payer les travailleurs sont rarement disponibles et ne parviennent pratiquement jamais à ceux qui accomplissent le travail(64). Dans les cas où les villageois ne se sont pas enfuis et n'ont pas non plus obtempéré aux ordres, ils ont subi de dures représailles de la part des troupes locales du SLORC. Un chef de village a ainsi été roué de coups et soumis à la torture et des récalcitrants ont été menacés de mort(65).

c) Les conditions de travail inhumaines et les atteintes
aux droits de l'homme sont monnaie courante
dans le cadre des projets de développement

Le travail forcé accompli dans le cadre de projets est en soi pénible et épuisant, puisqu'il consiste en un travail manuel de creusement de fossés ou canaux, d'établissement de berges et de réalisation de routes, barrages et lignes de chemin de fer. Les journées sont longues, avec peu de repos et l'approvisionnement en eau et en nourriture est minime voire inexistant. Selon certaines informations, ces personnes auraient été contraintes de passer la nuit sur le chantier et de dormir couramment sur les routes en construction, par tous les temps(66). L'absence de soins médicaux est un facteur de maladies et autres problèmes sanitaires. Beaucoup de camps de travail forcé sont établis dans les zones où la malaria est endémique(67). Dans d'autres cas, le changement de climat a des conséquences funestes pour les populations montagnardes extraites de leur cadre habituel(68).

Comme pour les personnes réquisitionnées par le Tatmadaw pour servir de porteur, les atteintes flagrantes aux droits de l'homme dans le cadre du travail forcé imposé pour les projets de développement sont monnaie courante(69). Le Rapporteur spécial sur la situation au Myanmar indique que les pires atteintes aux droits de l'homme dont il ait eu connaissance se produisent dans le cadre de projets de développement basés sur le travail forcé ainsi que dans le cadre du portage forcé(70). Il a été signalé à de multiples reprises que les personnes contraintes de travailler dans le cadre de projets de constructions sont couramment victimes de voies de fait, tortures, enlèvements ou exécutions sommaires(71). Les femmes et les enfants sont soumis à ces mauvais traitements, au même titre que les hommes(72), et certaines travailleuses sont en outre victimes de viol, de nuit, par les soldats(73).

d) La pratique du travail forcé dans le cadre
de projets publics de développement et d'infrastructure
porte préjudice à la vie économique et sociale
de la population du Myanmar

La pratique du travail forcé se révèle destructrice pour la vie économique et sociale de la population qui en est victime. Comme le fait observer l'un des principaux organismes d'investigation, «la réquisition par la force de civils soumis obligatoirement à des tâches pour le compte des autorités militaires ... dissout la vie familiale et accule de nombreuses familles à une pauvreté encore plus profonde.»(74) dans un pays qui est déjà l'un des plus pauvres du monde. Dans l'Etat d'Arakan, par exemple, beaucoup de personnes sont des journaliers, pour qui le travail forcé non rémunéré auquel le SLORC les soumet vient aggraver le manque à gagner subit du fait du maigre travail rémunérateur qu'ils n'ont pas pu prendre(75). La vie familiale est anéantie en outre par le fait que les enfants sont contraints de satisfaire au contingent familial de travail forcé dans le cadre des projets, tandis que leurs parents recherchent du travail libre et rémunéré(76). Ainsi, les enfants sont privés d'éducation et n'ont pas d'enfance.

La contrainte des prestations à fournir par certains membres de la famille déplace de manière disproportionnée la charge de l'activité rémunératrice nécessaire à celle-ci; elle a une incidence négative sur l'économie rurale et, en conséquence, sur l'alimentation et la santé. Lorsque les hommes sont absents, réquisitionnés dans le cadre de projets basés sur le travail forcé, «les travaux agricoles doivent être accomplis par les femmes. Avec des effectifs éclaircis, il devient difficile pour la communauté de continuer de planter, entretenir les cultures et faire les récoltes. Les mauvaises récoltes, la malnutrition et la maladie en sont les conséquences.»(77). L'impact des pratiques de travail forcé sur la situation sanitaire des femmes et des enfants est considérable(78). Le fait est que, «la réquisition forcée de femmes, y compris de jeunes filles, de femmes enceintes et de femmes âgées pour des travaux obligatoires dans le cadre de projets gouvernementaux de construction ou même comme porteurs dans les zones de conflit ... a des incidences majeures pour l'ensemble de la société birmane sur le plan de la santé et sur le plan humanitaire puisque non seulement le travail forcé en soi a des conséquences extrêmement néfastes pour la santé, mais que c'est dans le cadre de l'accomplissement de ce travail forcé que sont commises les pires violations des droits de l'homme à l'égard des femmes, dont les viols et les atteintes à la vie.»(79). La pratique généralisée du viol anéantit la vie de l'individu, de la famille ainsi que du village(80).

e) Les projets de développement et d'infrastructure
pour lesquels le gouvernement recourt au travail forcé
ne bénéficient pas à la collectivité fournissant ce travail

Les bénéfices des projets de développement pour la collectivité à laquelle a été imposé le travail forcé sont illusoires voire inexistants(81). Dans bien des cas, des villages entiers sont déplacés de force pour que les chantiers puissent continuer(82). La plupart du temps, les routes et lignes de chemin de fer ainsi construites doivent bénéficier aux SLORC plutôt qu'à une communauté du Myanmar. Les routes et les lignes de chemin de fer sont destinées à l'acheminement des troupes vers les zones où le SLORC cherche à renforcer son emprise, ainsi qu'à faciliter le développement du tourisme(83). En tout état de cause, il est improbable que la construction de certaines parties de grands axes routiers puisse apporter quelque avantage que ce soit aux petites communautés; la pauvreté est telle que les populations locales n'ont pas les moyens financiers de se déplacer par la route ou le chemin de fer(84). Il existe un certain nombre de sources d'estimation de la valeur économique du travail forcé. Il s'agit des chiffres du gouvernement lui-même, tels qu'ils sont publiés dans son bulletin statistique intitulé Annual Review, ainsi que les données provenant des rapports de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. De plus, le gouvernement des Etats-Unis a publié un décompte précis de ce qu'il appelle «la valeur sur le marché d'une main-d'œuvre non rémunérée et essentiellement non volontaire employée ... dans le cadre de projets de travaux publics», essentiellement à la construction de routes et d'ouvrages d'art pour des projets locaux de développement. Selon le document intitulé Foreign economic trends report: Burma, publié par le Département d'Etat des Etats-Unis en juin 1996 et basé essentiellement sur la publication du gouvernement intitulé Annual Review, pour l'exercice financier 1994-95, la valeur sur le marché de ce travail a représenté approximativement 3,1 pour cent du produit intérieur brut, sur la base du taux de change officiel du kiat, la monnaie nationale(85). Au cours de cette même période, la part représentée par les «contributions de la population» au coût des projets de l'Etat a représenté 53,9 pour cent de la valeur totale des dépenses réalisées(86). En outre, les données économiques du SLORC font apparaître que les crédits économisés par ces programmes de travail forcé sont détournés vers le renforcement de dépenses militaires et autres, qui ne bénéficient pas à la population et ne répondent pas non plus à ses besoins essentiels. En fait, les données disponibles pour ces années révèlent que les dépenses publiques en acquisitions militaires se sont accrues en conséquence de la manne qu'a constitué pour le budget de l'Etat l'économie réalisée grâce au travail forcé dans les ouvrages publics(87).

3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé
pour la réalisation d'ouvrages militaires

Le travail forcé imposé à la population du Myanmar sert à la construction d'ouvrages militaires. On signale que des civils ont été contraints de travailler pour la construction de casernes pour l'armée et la police des frontières(88). Les autres types de travaux accomplis pour le compte de l'armée incluent la construction et l'entretien de routes militaires, de même que la construction de camps militaires et l'appui nécessaire à ces camps(89).

B. Recours au travail forcé à des fins privées

1. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé
pour promouvoir le développement des entreprises
à risques communs, notamment pour l'exploitation
des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays

Le gouvernement du Myanmar s'est efforcé d'attirer les investissements étrangers pour mettre en valeur ce que l'on présume être d'importantes réserves de gaz naturel et de pétrole dans le pays. Depuis 1992, des informations provenant de sources diverses corroborent uniformément le recours du gouvernement au travail forcé sur une vaste échelle dans les régions du Myanmar où s'effectue la prospection des ressources de pétrole et de gaz naturel, avec les ouvrages d'infrastructure que nécessitent ces opérations(90). La mise en valeur des réserves de pétrole et de gaz naturel inclut la réalisation du gazoduc de Yadana, au large de l'Etat de Mon ainsi que les forages de prospection dans la circonscription de Sagaing.

Le gazoduc de Yadana constitue le projet le plus ambitieux de développement et d'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du Myanmar. Sa réalisation s'effectue dans le cadre d'une entreprise à risques communs associant Total, compagnie pétrolière française, Unocal, compagnie pétrolière américaine et MOGE (Myanmar Oil and Gas Enterprises), société entièrement contrôlée par le SLORC(91). Selon des informations répandues et persistantes, la population vivant au voisinage du tracé du gazoduc est régulièrement réquisitionnée pour la réalisation du passage de ce gazoduc ainsi que des infrastructures associées(92). Des informations fiables faisant état d'atteintes aux droits de l'homme, notamment de tortures, de viols, d'exécutions sommaires et arbitraires et de déplacements forcés en raison du travail forcé ont été documentées et récemment confirmées en ce qui concerne 11 villages de la région(93). Ces éléments ne sont contestés ni par le gouvernement du Myanmar(94) ni par les compagnies pétrolières associées au projet(95).

La réalisation des 160 kilomètres de la ligne de chemin de fer de Ye à Tavoy, en rapport, y a-t-il lieu de croire, avec la mise en valeur des réserves de gaz naturel et l'installation du gazoduc, a eu pour conséquences un déplacement de population Mon et Karen ayant fui le travail forcé(96). Dans cette mesure, tout au moins, la ligne de chemin de fer semble avoir un rapport avec la construction du gazoduc, et sa réalisation profite aux compagnies pétrolières privées participant à cette entreprise à risques communs.

Par ailleurs, une compagnie coréenne, la Yukong Oil Company, a procédé à des forages exploratoires près du village de Htaw Tha, dans la circonscription de Sagaing. Les personnes qui ont été réquisitionnées pour la construction d'une route entre Manywa et Khamti ont signalé qu'un poste de police a été constitué dans la zone et que des hommes, des femmes et des enfants travaillant dans cette zone y apportent jour et nuit des provisions pour la garde policière et pour les travailleurs(97).

2. Recours au travail forcé pour le profit
d'investisseurs privés dans des travaux
de développement, des travaux publics
et des projets touristiques

Comme indiqué antérieurement, le recours généralisé au travail forcé sur une échelle importante contribue au développement de l'infrastructure touristique(98). De plus, le gouvernement a, depuis peu, pour pratique d'inviter des investisseurs locaux à participer à la réalisation d'axes routiers et de lignes de chemin de fer avec, comme argument le retour sur les investissements, l'instauration éventuelle d'un péage sur l'utilisation des routes(99). Le gouvernement a annoncé que la privatisation du développement des infrastructures «s'inscrit dans les projets de création d'emplois pour la population»(100), stratégie qui inclut apparemment la réalisation de projets de développement «par le gouvernement, comptant sur la participation de la population locale sous la forme d'une contribution en travail...»(101). Au Myanmar, l'essentiel des profits réalisés dans l'industrie du tourisme sont dégagés par les lignes aériennes et l'hôtellerie, secteurs qui appartiennent partiellement à des sociétés étrangères de Hong-kong, de la Malaisie, de Singapour et de la Thaïlande(102). Ces sociétés ont annoncé des bénéfices en conséquence des profits réalisés en 1996, à l'occasion de l'année du tourisme au Myanmar, en partie grâce au travail accompli par des travailleurs forcés dans le cadre des projets destinés à attirer le tourisme(103).

3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé
pour servir les intérêts commerciaux particuliers
de membres des forces armées

Il est couramment signalé que les officiers du Tatmadaw ont des intérêts dans diverses entreprises commerciales qui leur appartiennent, notamment dans l'élevage des crevettes, la riziculture et la pisciculture, la sylviculture et la foresterie. En observant la diversité des formes que revêt le travail forcé dans le cadre de travaux publics, on constate que les militaires réquisitionnent couramment des populations civiles pour des services répondant à leurs intérêts commerciaux propres. Par exemple, dans le district de Mergui-Tavoy, on a signalé que des populations Karen ont été contraintes de travailler sans rémunération sur une grande plantation de caoutchouc, de même qu'à la réalisation de digues pour des bassins d'élevage de crevettes; non moins de 13 000 personnes auraient été contraintes de travailler dans le cadre de tels projets(104).

C. La législation sur le travail forcé au Myanmar

1. La législation du Myanmar permet d'imposer
un travail forcé ou obligatoire sous la menace
de sanctions

Deux lois actuellement en vigueur au Myanmar, la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes, permettent d'imposer sous la menace de sanctions du travail forcé ou obligatoire. Ces lois autorisent la réquisition pour le portage, le transport ou d'autres services par les troupes gouvernementales, la police et les fonctionnaires «dans l'accomplissement de leur mission d'intérêt public». Elles prévoient des amendes et, dans le cas de la première, une peine d'emprisonnement allant jusqu'à un mois en cas de défaillance. Elles permettent en outre une discrimination fondée sur les classes dans la sélection des «classes laborieuses» destinées à de tels travaux. A la différence de la version anglaise citée ci-après, la version explicative en birman de ces lois ne ménagerait aucune «excuse raisonnable» pouvant soustraire l'intéressé aux sanctions encourues(105).

La version anglaise des passages pertinents de la loi 1908 sur les villages a la teneur suivante:

La version anglaise des parties pertinentes de la loi de 1907 sur les villes dispose:

En 1995, le gouvernement du Myanmar a admis que «les deux lois ne sont plus conformes aux conditions en vigueur dans le pays, outre qu'elles ne sont pas conformes non plus aux dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé de 1930»(107). Cette déclaration semblait être l'acceptation des conclusions et recommandations de l'OIT tendant à ce que, cette situation étant constatée depuis quelque 34 ans, ces lois soient abrogées(108). Or même s'il a abrogé, ces dernières années, quelque 150 lois(109), le gouvernement du Myanmar n'a pas encore abrogé ces deux instruments, qui autorisent le travail forcé(110).

2. Le gouvernement du Myanmar a pris des directives
qui légitiment la pratique du travail forcé
dans le cadre de projets de développement

Deux récentes directives gouvernementales entérinent l'extension de la pratique du travail forcé dans le cadre de projets de développement et tendent à maintenir cette pratique dans des circonstances spécifiques(111). La directive no 125, datée du 2 juin 1995, correspond à une instruction émanant du président du SLORC, junte militaire exerçant son emprise sur le pays, à tous les conseils d'Etat/de division pour la restauration de la loi et de l'ordre public. Cette directive devait donc avoir une diffusion nationale. Selon le Rapporteur spécial, par cette directive, le SLORC interdit, dans le cadre de projets nationaux de développement, les contributions de travail qui ne seraient rémunérées et précise que «pour obtenir les prestations nécessaires de la part de la population locale, celle-ci doit percevoir son juste dû». En outre, cette directive prescrit aux autorités concernées d'«éviter les incidents regrettables», mention qui apparaît dans le contexte des «tourments et souffrances infligés aux populations des zones rurales...».

L'autre directive, no 82, se présente comme étant d'application plus étroite. Datée du 27 avril 1995 et adressée par le président du SLORC aux présidents du LORC de la division de Yangon et au ministère de l'Agriculture, elle enjoint ses destinataires de «mettre un terme à la pratique consistant à obtenir du travail de la population locale sans compensation financière» telle qu'elle a cours dans le cadre de la réalisation des barrages de la division de Yangon.

Ni l'une ni l'autre des directives n'abroge, de par sa teneur, l'une quelconque des dispositions de la loi de 1908 sur les villages ou de la loi de 1907 sur les villes autorisant le travail forcé et, assurément, ces deux directives servent à légitimer la pratique du travail forcé en permettant d'y recourir moyennant rémunération et en évitant les «incidents regrettables». Aucune de ces deux directives ne prévoit de sanctions en cas d'infraction à leurs dispositions. En outre, comme le constatait le Rapporteur spécial plusieurs mois après leur publication, elles n'ont «toujours pas été rendues publiques et ne sont donc pas accessibles à ceux auxquels elles s'appliqueraient ni à ceux qui protègent les droits des personnes accusées d'avoir enfreint la législation»(112).

3. Les lois autorisant le travail forcé au Myanmar
ne rentrent pas dans le champ d'application
d'un instrument pénal réprimant l'imposition
«illégale» d'un travail forcé ou obligatoire

Il se peut qu'un instrument pénal soit en vigueur au Myanmar, qui qualifie d'«illégal» le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire et punit ce fait comme un délit pénal. L'article 374 du code pénal dispose:

«374.  Quiconque contraint illégalement toute personne à travailler contre sa volonté sera puni d'une peine d'emprisonnement (ou bien d'une peine dont la durée pourra atteindre un an, ou bien d'une amende, ou encore des deux peines).»(113).

Dans leur teneur, la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes peuvent être lues comme une autorisation légale de contraindre au travail, ce qui placent ces deux instruments hors du champ d'application de cet instrument pénal.


IV. CONCLUSIONS DE DROIT

A. La pratique du travail forcé au Myanmar
constitue une infraction de ce pays
à ses obligations internationales en vertu
de la convention n
o 29

1. Le recours au travail forcé par le Myanmar
constitue une infraction à ses obligations
en vertu de la convention n
o 29

Les faits démontrent qu'«un travail ou des services» sont exigés d'individus, au Myanmar, «sous la menace d'une peine», ce qu'interdit la convention no 29. On doit entendre par peine à la fois les sanctions prévues par la législation et celles qui sont infligées dans la réalité. Ce terme recouvre la menace réelle ou le fait lui-même de faire subir une perte pécuniaire, un préjudice individuel ou une souffrance physique, par décision administrative ou par décision judiciaire, ou par tout autre exercice d'un pouvoir officiel manifeste. La peine n'est pas limitée aux sanctions pénales, elle inclut toute perte de droits ou de privilèges(114). Ceci indique qu'une interprétation large et poussée est appropriée, de manière à mieux parvenir à l'objectif de la convention consistant à supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible(115).

Les pratiques susvisées ayant cours au Myanmar s'effectuent toutes «sous la menace d'une peine», au sens de la convention. Comme le gouvernement l'admet lui-même, les services de portage sont imposés en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, lesquelles prévoient des sanctions pénales en cas de non-prestation de ce travail ou de ces services, selon des modalités qu'elles définissent elles-mêmes(116). De plus, le travail ou les services autres que le portage sont imposés par la contrainte ou la menace de la contrainte, y compris en ce qui concerne les projets de développement, les projets touristiques, les prestations sexuelles et le travail pour des intérêts privés. Les faits prouvent que, pour l'essentiel, ce travail s'assortit d'une détention, de voies de fait, de tortures et autres atteintes physiques. Les services sexuels imposés aux femmes birmanes en l'espèce du viol sont obtenus par la contrainte ou la menace de la contrainte(117). En outre, un travail accompli dans des circonstances telles que la seule échappatoire à son accomplissement soit le paiement d'une amende ou bien d'une somme destinée à couvrir l'engagement d'un travailleur de remplacement s'accomplit sous la menace d'une peine.

Les faits prouvent en outre que, dans les cas d'espèce, les individus accomplissant le travail ou les services ne se sont pas offerts de leur plein gré. Sur un plan juridique, un travail obtenu par la contrainte juridique ne peut pas être considéré comme ayant été fourni de plein gré. Les prestations sexuelles imposées aux femmes birmanes par le fait du viol et qui a pour conséquence une perte, un préjudice et une souffrance physique n'est pas, ex hypothesi, assurée de leur plein gré par les personnes concernées. On ne peut pas considérer non plus que le travail accompli par des condamnés, ou par des enfants (en particulier l'exploitation la plus caractérisée du travail d'enfants)(118), soit accompli de leur plein gré par les intéressés.

Aucune rémunération perçue par les personnes accomplissant le travail ou les services en question ne peut être prise en considération pour trancher la question de savoir si le travail ou les services ont été accomplis par les intéressés de leur plein gré. Il appert que la convention prévoit que paiement et contrainte peuvent survenir simultanément. En définissant les garanties et conditions dont le recours au travail forcé devait s'entourer, dans le cadre du régime de transition désormais échu(119), la convention prévoit à son article 14 des taux et des modes de rémunération stricts en espèces, sauf dans le cas où le travail forcé ou obligatoire est demandé à titre d'impôt, dans les conditions spécifiées à l'article 10, désormais révolues(120).

Contrairement à ce qu'affirme le gouvernement du Myanmar, le travail n'est pas fourni à titre de contribution volontaire par la population, conformément aux traditions culturelles bouddhistes. Les faits démontrent que les individus sont contraints de travailler, sous la menace de peines, et qu'ils sont couramment réquisitionnés pour accomplir ce travail. Les faits prouvent également que les musulmans Rohingyas, les chrétiens Karen et les autres ethnies essentiellement non bouddhistes sont appelés à fournir du travail forcé(121). L'extension de la pratique coloniale par la junte militaire a altéré le tissu économique et social des villages, faisant ainsi violence aux traditions culturelles.

Le gouvernement du Myanmar a récemment déclaré devant la Commission de la Conférence que, étant parvenu à des cessez-le-feu avec 15 des 16 groupes insurrectionnels, désormais seuls des membres des forces armées seront utilisés dans le cadre des «grands projets de développement»(122). Or cette affirmation ne suffit aucunement à démontrer que la convention no 29 est respectée. Le qualificatif restrictif de «principaux» précédant l'expression «projets de développement collectif» implique que le travail forcé continuera d'avoir cours dans le cadre d'autres projets. En outre, les faits prouvent que, lorsqu'il s'agit de services pour l'armée, il est encore recouru au travail forcé de la population pour la construction de casernement de même que pour des services tels que le portage, l'approvisionnement en nourriture et les missions de messagerie(123). De plus, le Tatmadaw, qui doit conserver ses prérogatives militaires tout en recevant de nouvelles attributions en matière de développement(124), ne semble pas disposer des effectifs nécessaires pour assumer des tâches de l'ampleur apparemment requise par les projets de développement du SLORC; les chiffres disponibles permettent d'établir que, jusqu'à présent, plus de 800 000 personnes ont été soumises à du travail forcé(125). Enfin, la position du gouvernement n'offre aucune garantie durable du respect de la convention no 29 non plus que de l'exemption de la population du Myanmar du travail forcé. La législation et les directives autorisant le travail forcé restent en vigueur, et ceux qui tentent de s'y soustraire peuvent, à tout moment, être ramenés pour combattre ou assumer d'autres tâches.

Que la loi de 1908 sur les villages ou la loi de 1907 sur les villes soient expressément invoquées ou non, le seul fait qu'elles restent en vigueur permet difficilement de se persuader que toute contribution sous forme de travail est consentie, en fait, de plein gré(126). En fait, le comité constitué en vertu de l'article 24 a fait observer à cet égard que «l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par des responsables locaux ou militaires»(127). Les directives secrètes émises dans le courant de l'année 1995(128) d'une manière implicite reconnaissent et continuent d'autoriser le travail forcé au Myanmar. Les statistiques économiques et les chiffres du budget publiés par le gouvernement du Myanmar lui-même attestent du rôle considérable et sans cesse croissant des «contributions de la population» dans ses plans de développement(129). En l'absence de tout élément convaincant permettant d'établir que les «contributions de la population» constituent effectivement un travail fourni de plein gré, ou convenablement rémunéré, ces chiffres doivent être considérés comme l'aveu que le travail forcé a cours au Myanmar sur une vaste échelle.

2. Le Myanmar viole la convention no 29
par le fait qu'il n'a pas totalement supprimé
le recours au travail forcé à des fins privées

Les faits prouvent que le Myanmar viole de manière flagrante son obligation immédiate d'éliminer complètement le travail forcé à des fins privées. Il impose du travail forcé à la population dans le cadre de sa mise en valeur, par entreprise à risques communs, les ressources pétrolières et de gaz naturel(130), et de ses projets de développement des infrastructures (routes et lignes de chemin de fer)(131) et de l'industrie du tourisme(132). D'autres éléments prouvent que des membres des forces armées recourent en toute impunité au travail forcé pour servir leurs intérêts commerciaux propres(133). Or si une forme de travail forcé ou obligatoire au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées existe, le Membre est tenu de supprimer «complètement» ledit travail forcé ou obligatoire dès la date de l'entrée en vigueur de la convention no 29(134), et ne devra pas imposer ou laisser imposer un tel travail forcé ou obligatoire(135).

3. Le fait que le Myanmar ne poursuive ni ne punisse
dans la pratique ceux qui imposent le travail forcé
constitue une violation, par ce pays, de ses obligations
en vertu de la convention n
o 29

Aucun élément convaincant n'atteste de mesures décisives que le gouvernement du Myanmar aurait prises pour mettre un terme à la pratique du travail forcé. Les poursuites qui seraient engagées sur le fondement du Code pénal, en s'appuyant sur ses termes mêmes, ne pourraient s'étendre au travail forcé imposé en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes. L'émission de directives secrètes, quant à elle, a pour effet non pas de mettre un terme à cette pratique comme on le prétend, mais de légitimer celle-ci en traitant des conditions dans lesquelles un tel travail forcé peut être imposé(136). Aucun élément disponible n'atteste d'une tentative quelconque d'exercer des poursuites à l'encontre d'une personne ou d'un organisme coupable d'avoir imposé du travail forcé.

B. La législation du Myanmar n'est pas conforme
à la convention n
o 29

1. Le gouvernement du Myanmar enfreint ses obligations
en vertu de la convention n
o 29 du fait qu'il n'a ni modifié
ni abrogé sa législation permettant d'imposer le travail forcé

Le gouvernement du Myanmar a admis que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes(137) «ne sont pas ... conformes aux dispositions de la convention de l'OIT»(138), et qu'il n'a toujours pas abrogé ou modifié ces instruments. Rien n'indique non plus que cette situation ait changé depuis que le gouvernement a fait une déclaration dans ce sens, dans le «Memorandum of Observations» adressé aux Nations Unies en mars 1996(139).

Depuis 1967, le gouvernement du Myanmar déclare dans ses rapports dus au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT que ces lois sont tombées en désuétude et doivent être abrogées. Plus récemment, cependant, le gouvernement indique qu'il s'appuie sur ces instruments pour autoriser au moins la pratique du portage(140). Ce faisant, il prétend s'appuyer sur une législation dont le BIT a condamné à de nombreuses reprises le caractère contraire aux obligations du Myanmar en vertu de la convention no 29(141), et qui devrait être rendue conforme à cette convention no 29 et suivie de mesures propres «à garantir que l'abrogation formelle de la faculté d'imposer le travail obligatoire soit effectivement respectée dans la pratique et que ceux qui recourent au recrutement de main-d'œuvre par la contrainte soient punis»(142).

2. Le gouvernement du Myanmar ne respecte pas
ses obligations au titre de la convention n
o 29
du fait qu'il ne respecte pas entièrement l'article 25

Le gouvernement du Myanmar n'a ni qualifié convenablement au pénal le recours au travail forcé ni prévu de sanctions adéquates à cet égard, comme le prévoit la convention. L'article 25 de cet instrument prescrit à tout Etat partie de rendre punissable, en tant que délit pénal, le recours au travail forcé, de prévoir des sanctions «réellement efficaces» et de veiller à ce qu'elles soient strictement appliquées. La commission d'experts a établi clairement que le respect de l'article 25 de la convention no 29 nécessite que la législation soit rendue publique(143), dans le cadre d'une démarche systématique(144), énonçant des objectifs clairs ainsi qu'une stratégie bien définie et s'inscrivant dans un cadre juridique exhaustif(145). La législation visée à l'article 25 de la convention doit s'appliquer à tous les secteurs de production économique et d'activité industrielle(146).

Les directives secrètes émises par le SLORC au cours de l'année 1995(147) concernant le recours au travail obligatoire ne satisfont pas aux obligations découlant de l'article 25. De par leur teneur, ces directives secrètes ne qualifient pas de délit pénal l'imposition du portage ou de toute autre forme de travail forcé ou obligatoire, non plus qu'elles ne tendent à abroger la loi de 1908 sur les villages ou la loi de 1907 sur les villes. Elles tendent simplement à légitimer la pratique du travail forcé ou obligatoire en définissant les conditions dans lesquelles celui-ci peut être imposé. Aucune de ces conditions ne répond d'ailleurs aux exceptions prévues par la convention, sous son article 2(148). La directive no 82(149) ne concerne que l'irrigation et ne s'applique apparemment qu'à la division de Yangon. Enfin, ces directives secrètes ne prévoient aucune sanction en cas de non-respect de leurs dispositions et, de toute façon, se veulent secrètes, de sorte qu'il n'est pas concevable qu'elles soient portées à la connaissance de la population qu'elles sont réputées protéger.

L'article 347 du Code pénal, qui semble avoir été abrogé, ne satisfait pas non plus à l'article 25 de la convention no 29 du fait qu'il limite expressément le délit qu'il caractérise à la seule imposition illégale du travail forcé. De ce fait, les décisions prises en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes et, pour autant qu'on puisse l'établir, en application des récentes directives secrètes ou autres textes de cette nature, ne rentreraient pas dans le champ d'application de cet article.

C. Aucune des exceptions prévues à l'article 2
de la convention ne s'applique

Aucune des pratiques de travail forcé au Myanmar ne correspond à l'une des exceptions prévues à l'article 2 à l'interdiction générale du recours au travail forcé ou obligatoire qu'impose la convention. Cet article prévoit en effet cinq cas d'exceptions rigoureusement définis, discutés ci-après: a) le service militaire obligatoire; b) les obligations civiques normales des citoyens; c) le travail exigé en conséquence d'une condamnation prononcée par décision judiciaire; d) les cas de force majeure dans lesquels la population est en danger; et e) les menus travaux de village. En outre, le gouvernement prétend que ces pratiques relèvent de telles exceptions du fait que les travailleurs forcés sont -- ou ont le droit d'être -- rémunérés. Or, selon l'article 2 2) de la convention, qu'un travailleur forcé soit rémunéré ne fait aucune différence quant à déterminer si la pratique relève ou non de l'une des exceptions prévues(150).

1. Les pratiques de travail forcé ne constituent pas un travail
ou un service «exigé en vertu des lois sur le service militaire
obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement
militaire» conformément à l'article 2 2) 
a)

La pratique du travail forcé au Myanmar ne correspond pas à l'exception prévue à l'article 2 2) a) concernant les «travaux d'un caractère purement militaire». Le gouvernement du Myanmar a toujours affirmé que le recrutement dans l'armée revêt un caractère absolument volontaire(151). Par conséquent, il paraît douteux qu'il s'agisse de «travaux d'un caractère purement militaire» au sens de cet article de la convention no 29, de sorte que «tout travail ou service exigé ... pour des travaux d'un caractère purement militaire» de la part de personnes qui ne se sont pas offertes volontairement ne rentre pas dans cette exception. Les civils contraints de servir de porteurs et accomplissant des tâches militaires en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, sous la menace ou par l'usage de la force, sont ipso facto des non-volontaires(152).

2. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar ne rentre pas
dans les obligations civiques normales des citoyens,
au sens de l'article 2 2) 
b) de la convention

Le travail forcé au Myanmar ne saurait être assimilé à l'exception prévue à l'article 2 2) b) relative aux «obligations civiques normales des citoyens». Cette exception vise des aspects tels que l'obligation de siéger dans un jury, le devoir d'assister une personne en danger ou d'aider à assurer le respect de la loi et de l'ordre public(153). La nature et l'extension du travail forcé ou obligatoire au Myanmar n'ont absolument rien à voir avec de telles exceptions, compte tenu des efforts individuels, des dangers, des préjudices et autres atteintes qu'implique le travail forcé au Myanmar(154).

3. Le travail imposé aux prisonniers ne satisfait pas
aux strictes prescriptions de l'article 2 2) 
c)

Le travail forcé des prisonniers au Myanmar ne satisfait pas aux prescriptions strictes de l'article 2 2) c). Selon cet article, le travail imposé aux prisonniers en conséquence de leur condamnation ne peut être concédé ou mis à disposition de particuliers sans le libre consentement du prisonnier lui-même(155). Cet article prévoit en outre que ce travail résulte d'une «condamnation prononcée par décision judiciaire» et vise «à ne permettre l'imposition du travail pénitentiaire que sous réserve de l'observation des garanties prescrites par les principes généraux du droit reconnu par la communauté des nations, tels que la présomption d'innocence, l'égalité devant la loi, la régularité et l'impartialité de la procédure, l'indépendance et l'impartialité des tribunaux, les garanties nécessaires à la défense, la non-rétroactivité et la spécialité de la loi pénale»(156).

Des informations confirmées montrent que les procédures de condamnation pénale au Myanmar sont loin de satisfaire aux normes admises en la matière, tant en ce qui concerne les tribunaux militaires que les tribunaux «civils» institués par l'administration du SLORC(157). Dans bien des cas, les condamnations sont prononcées à l'issue de procédures sommaires ou de procès qui sont loin de satisfaire aux normes internationalement reconnues de respect des procédures, notamment de la présomption d'innocence, du droit de l'accusé à la défense et aux autres garanties nécessaires à une défense adéquate(158). Dans certains cas, les condamnations sont prononcées sans même qu'il y ait un procès(159). Les personnes condamnées par des tribunaux militaires ou par des tribunaux civils de ce type ne peuvent être considérées comme étant sous le coup d'une «condamnation prononcée par une décision judiciaire» au sens de l'article 2 2) c), et toute imposition de travail forcé à ces personnes ne répond pas aux prescriptions de cette exception.

En outre, aucun élément ne démontre qu'un prisonnier travaillant dans un camp de travail au Myanmar ait le choix de travailler ou non, sans considération de l'entité pour laquelle ce travail est effectué. De plus, le travail accompli dans le cadre de projets d'infrastructure en rapport avec des investissements privés, comme le gazoduc de Yadana, ne peut être admis comme une exception prévue dans ces circonstances.

4. Il n'existe pas de force majeure, au sens de l'article 2 2) d),
qui permettrait le recours au travail forcé et obligatoire
tel qu'il se pratique actuellement au Myanmar

Les circonstances dans le cadre desquelles le travail se pratique au Myanmar ne satisfont pas au critère d'exception visé à l'article 2 2) d). Dans cet article, la notion de force majeure implique «un événement soudain et imprévu qui appelle une intervention immédiate»(160), «mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population». Il n'existe pas, non plus qu'il n'a existé, au Myanmar, une telle force majeure rentrant dans le cadre de l'article 2 2) d). La nature des insurrections armées n'est pas «soudaine» ni «imprévue», mais plutôt la conséquence d'une guerre civile qui perdure depuis plus de 40 ans. Les insurrections en soi n'ont pas pour conséquence de mettre en danger la population elle-même, mais plutôt de menacer l'emprise politique de la junte dans les zones de conflit(161).

Même si l'on admettait que la nature des conflits armés dans les régions périphériques rentre dans les termes de l'article 2 2) d), il n'en resterait pas moins que le travail forcé et obligatoire tel qu'il se pratique au Myanmar n'est pas conforme aux conditions prévues par cet article. Cet article prévoit en effet que ce travail doit se limiter à «ce qui est strictement nécessaire» pour faire face aux événements et pendant la seule durée de ceux-ci(162). Or, bien au contraire, le caractère généralisé et systématique du travail forcé ou obligatoire au Myanmar est sans commune mesure avec les insurrections, et il dure depuis des décennies. De plus, le travail forcé au Myanmar va bien au-delà de ce que les circonstances rendraient strictement nécessaire. Par exemple, les travaux d'infrastructure et de développement du tourisme n'ont rien à voir avec un état d'urgence répondant à une insurrection armée, non plus que les prestations sexuelles imposées par le fait du viol n'ont de rapport avec une réaction admissible en cas de guerre.

5. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar
excède largement la notion de «menus travaux
de village» visés à l'article 2 2) 
e)

Le travail forcé et obligatoire au Myanmar ne correspond pas non plus à ce que vise l'article 2 2) e). En effet, comme cet article le prévoit, les menus travaux de village doivent effectivement être «menus» et consister, par exemple, en travaux d'entretien ou en construction d'écoles, et servir les intérêts directs de la collectivité qui les accomplit et non une entité plus vaste; Ils doivent être entrepris après consultation de cette collectivité ou de ses représentants sur le bien-fondé de ces travaux(163). Au Myanmar, par contre, ces travaux sont généralement de grande envergure plutôt que mineurs. Il s'agit de chantiers de construction de routes, de berges et de barrages, étalés sur des jours et parfois des semaines entières. Le travail forcé s'effectue généralement pour le compte d'entités autres que le public, c'est-à-dire l'armée ou les intérêts privés. Lorsque ce travail a des objectifs d'intérêts publics, comme le développement d'infrastructures, les avantages pour la communauté locale en sont diffus et, au mieux, hypothétiques, du fait que les retombées concernent une collectivité beaucoup plus vaste que celle qui accomplit les travaux(164). Le fait est que la commission d'experts n'a pas voulu admettre que des ouvrages d'une envergure telle que la réalisation de lignes de chemin de fer se conçoivent comme satisfaisant aux critères de cet article(165). Ni les membres de la collectivité concernée ni ses représentants ne sont consultés sur le bien-fondé des travaux en question. Bien au contraire, les faits démontrent que lorsque les représentants de la collectivité entrent en jeu, il s'agit, pour des chefs de village, de réquisitionner sur ordre des membres de cette collectivité pour le travail, les personnes concernées étant littéralement forcées de travailler puisqu'elles sont capturées et enlevées à leur milieu pour être soumises au travail.

D. La notion de période de transition
n'est pas applicable en l'espèce et,
quand bien même elle le serait, le gouvernement
du Myanmar ne pourrait prétendre respecter
les garanties dont une telle période doit être assortie

1. Le BIT a constaté que la notion de période
transitoire ne saurait être invoquée pour exonérer
le gouvernement du Myanmar de son obligation,
en vertu de la convention n
o 29, d'éliminer
le travail forcé sous toutes ses formes

Il a été établi par le comité constitué en vertu de l'article 24 de la Constitution qu'il n'était pas question dans ce cas, de période transitoire(166). Si la commission d'enquête est libre de procéder de novo à ses propres constats des faits et du droit, les conclusions du comité constitué en vertu de l'article 24 devraient acquérir un poids considérable et être suivies(167).

2. La notion de période transitoire ne s'applique
dans le cas du Myanmar ni en fait ni en droit

Les quarante années écoulées depuis la ratification de la convention no 29 par le Myanmar, en 1955(168), constituent un délai plus que suffisant pour procéder aux modifications de législation et aux changements de pratiques qui peuvent être nécessaires au cours d'une période de transition. La brièveté de la période de transition, telle que l'entend la convention, ressort de l'obligation de supprimer immédiatement certaines formes de travail forcé ainsi que des conditions et limitations strictes s'appliquant à toute forme de travail forcé imposée au cours d'une telle période de transition; elle ressort également des termes eux-mêmes(169) de la convention no 29, qui prévoient, à l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de son entrée en vigueur, que soit examinée la possibilité de supprimer sans nouveau délai le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes.

La notion de période transitoire, ainsi que les garanties entourant les conditions dans lesquelles le travail forcé ou obligatoire pourra encore être employé pendant cette période transitoire(170) «visait particulièrement certaines pratiques coloniales»(171). D'ores et déjà, en 1968, «ceux des pays liés par la convention qui sont toujours à même d'invoquer les dispositions transitoires de l'instrument sont relativement peu nombreux»(172). En 1979, il était rare que les dispositions transitoires soient invoquées «pour justifier le maintien de contraintes au travail»(173). La loi 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont des lois coloniales qui n'ont jamais été abolies après l'accession de la Birmanie à l'indépendance. La jurisprudence et les études d'ensemble de la commission d'experts étayent l'avis selon lequel ces lois ne sont pas conformes à la conception ou à l'interprétation de la convention no 29 par la majorité des Etats qui l'ont ratifiée.

3. Le Myanmar est lié par sa déclaration à l'effet
qu'il ne s'applique pas de période transitoire

Le gouvernement du Myanmar a, devant le comité constitué en vertu de l'article 24, pris pour position que la période transitoire ne s'applique pas(174). Cette position peut être considérée comme une déclaration créant une obligation qui s'y attache. Dans l'affaire des essais nucléaires, la Cour internationale de justice a considéré qu'une déclaration concernant une situation de droit ou de fait, en l'espèce d'un acte unilatéral d'un Etat, peut créer des obligations qui sont contraignantes à l'égard de cet Etat vis-à-vis de la communauté internationale erga omnes, sans qu'il soit nécessaire qu'aucun autre Etat n'ait accepté cet acte(175). Qu'un tel acte ait, ou non, cet effet, dépend des circonstances dans lesquelles il survient ainsi que de l'intention de l'auteur de la déclaration. Dans l'affaire dont la Cour internationale de justice a été saisie, la déclaration unilatérale par la France de ne plus procéder à des essais atmosphériques, prononcée non loin de la Cour internationale de justice et dans des circonstances litigieuses, a donné naissance à l'obligation de se tenir à cette déclaration: le gouvernement français devait forcément supposer que les autres Etats prendraient note de cette déclaration et s'attendraient à ce qu'elle soit suivie d'effet(176). En appréciant l'intention de l'Etat qui fait la déclaration, une interprétation restrictive s'impose lorsque le contenu de cette déclaration tend à limiter la liberté d'action future de cet Etat(177). De plus, il est plus vraisemblable qu'un Etat souhaite se lier par une déclaration lorsqu'il ne peut se lier par le moyen ordinaire d'un accord formel(178).

Dans le cas d'espèce, on peut considérer que le gouvernement du Myanmar est lié par ses actes unilatéraux de confirmation de l'application de la convention no 29, dont les autres Etats ont pris note. Le gouvernement n'a pas invoqué la période transitoire comme justification de la pratique du portage forcé, objet de la réclamation présentée par la CISL sur le fondement de l'article 24 de la Constitution de l'OIT. Subséquemment, le comité constitué en vertu de l'article 24(179) a établi qu'il n'est plus question de périodes transitoires en ce qui concerne le Myanmar. Ceci est conforme à la position prise par le gouvernement du Myanmar dans les rapports qu'il fournit à la commission d'experts en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT à propos des obligations que lui prescrit la convention no 29 depuis l'année 1967(180). Ces actes du gouvernement du Myanmar sont des actes unilatéraux, ayant pour effet de limiter, pour l'avenir, sa liberté par rapport à la convention no 29; ils concernent une question qui ne se prêterait pas à un accord formel avec un autre Etat ou un groupe d'Etats. En conséquence, le Myanmar, ayant fait une déclaration devant la communauté internationale, à travers sa réponse au comité constitué en vertu de l'article 24, peut désormais être tenu comptable de cette déclaration par la communauté internationale à travers le BIT.

4. En tout état de cause, aucune des conditions
ou garanties prescrites dans le cadre d'une période
transitoire n'est satisfaite par le Myanmar

Les faits sur lesquels cette affaire repose prouve que, même si une période transitoire avait cours, les pratiques de travail forcé au Myanmar ne satisfont pas aux conditions et garanties prescrites par la convention. L'article 1 2) prévoit que, pendant la période transitoire, il peut être recouru au travail obligatoire uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées aux articles qui suivent(181). La pratique du travail forcé au Myanmar fait violence aux principes fondamentaux de l'article 1 2): les faits prouvent que le travail forcé est imposé au profit de particuliers, de compagnies et de personnes morales privées(182); que le travail forcé est pratiqué de manière extensive et systématique et rentre en fait dans les aspects budgétaires du programme de développement du gouvernement; que le recours au travail forcé ne se limite aucunement à une mesure exceptionnelle(183). En outre, aucune des conditions et garanties énoncées subséquemment n'est satisfaite.

Articles 8, 23 et 24 de la convention(184). En tant qu'administration militaire, le SLORC et ses délégations locales ne satisfont pas à la définition prescrite des «autorités civiles supérieures». Parmi les textes promulgués concernant l'utilisation du travail forcé, ceux qui sont accessibles publiquement, comme la loi sur les villages, la loi sur les villes et les directives «secrètes» révélées, ne prévoient aucun moyen de réclamation pour les personnes assujetties au travail forcé et n'expriment non plus aucune garantie que de telles réclamations seraient prises en considération(185). En outre, aucun élément n'atteste d'une volonté de faire respecter les normes régissant les conditions dans lesquelles le travail forcé est imposé.

Article 9 de la convention(186). Aucun élément ne permet de penser qu'une autorité, civile ou autre, n'ait pris les assurances ou n'ait eu pour mission de prendre les assurances visées dans la partie préliminaire de cet article avant que le travail forcé ne soit imposé. En réalité, les faits prouvent que le travail forcé a été imposé dans des circonstances contraires. Le travail effectué n'est pas «d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter». Plutôt, le travail forcé imposé à la population (routes, lignes de chemin de fer) sert des intérêts publics très généraux; ou bien des intérêts purement personnels (prestations sexuelles) ou encore les intérêts de personnes morales privées (exploitation du gaz naturel et du pétrole en entreprise à risque commun, projets touristiques); il sert enfin à l'armée, pour ses opérations propres de lutte contre l'insurrection ou pour ses intérêts commerciaux privés(187). Aucune des formes de travail forcé imposée à la population du Myanmar ne répond à une nécessité imminente(188). Aucun élément ne prouve que le SLORC ou le Tatmadaw, que ce soit l'un ou l'autre, n'ait jamais cherché à se procurer une main-d'œuvre volontaire pour l'accomplissement des tâches qu'ils ont fait assurer par travail forcé, et rien n'atteste non plus qu'il y ait eu rémunération. Les travaux et services imposés constituent injustement un lourd fardeau pour la population du Myanmar. Des droits sont exigés de personnes pauvres pour éviter le travail forcé; des agriculteurs et des pêcheurs sont contraints de laisser leur métier pendant de longues périodes, ce qui perturbe les cycles de semailles et de récoltes et désorganise la vie de la famille tandis que ses membres en sont éloignés pour accomplir ce travail. Les enfants n'ont plus ni éducation ni enfance. En ce qui concerne les viols, le préjudice physique et psychologique, de même que le préjudice social, est incommensurable(189).

Article 10 de la convention(190). Du fait que, pour échapper au travail forcé, la population doit payer des redevances, on peut considérer que le travail forcé est imposé à titre d'impôt, en violation de l'article 10 2). Comme les stipulations de l'article 10 2) a)-c) sont identiques à celles de l'article 9 a)-c), les arguments développés à propos de l'un sont valables pour l'autre. De nombreux travailleurs sont contraints de se déplacer sur de longues distances pour se rendre à des camps de travail ou bien pour faire du portage. Aucune concession n'est faite, non plus, quant aux exigences de la religion, de la vie sociale et de l'agriculture.

Article 11(191). Les faits prouvent que l'article 11 1) est régulièrement enfreint(192). Beaucoup d'enfants, de femmes et de personnes âgées sont réquisitionnés dans le cadre de chantiers ou pour le portage. A l'évidence, il n'est procédé à aucun examen médical préalable; aucune catégorie n'est exemptée, non plus qu'il n'est veillé à maintenir un certain nombre d'adultes valides dans la collectivité, ni au respect des liens conjugaux et familiaux.

Article 12(193). Les faits démontrent que, loin de chercher à réglementer la durée pour laquelle les personnes sont assujetties au travail forcé, c'est plutôt le contraire(194). Selon des informations fiables, dans certaines régions, la population est soumise au travail forcé deux semaines par mois. De nombreuses personnes sont assujetties de manière répétée au travail forcé bien qu'elles aient acquitté leur taxe de portage et satisfait aux autres exigences. Assurément, aucune attestation de service n'est délivrée, et il n'apparaît pas non plus que l'on s'efforce de répartir le fardeau que constitue le travail forcé.

Articles 13 et 14(195). Les faits prouvent que la pratique du travail forcé au Myanmar constitue une violation régulière des articles 13 et 14 de la convention. Le nombre d'heures exigé est excessif, la rémunération est minime quand elle n'est pas inexistante, de même que les périodes de repos.

Article 15(196). Alors que le gouvernement du Myanmar a affirmé périodiquement que la législation concernant l'indemnisation des travailleurs s'applique au travail fourni par la population «à titre de contribution»(197), des informations fiables et corroborées par des sources indépendantes, de même que des constats de médecine légale et d'autres preuves matérielles prouvent que les personnes assujetties sont abandonnées à la mort à la suite de lésions subies au cours du travail, qu'il n'y a pas d'assistance en cas de maladie et que les coups, les viols et les exécutions sommaires sont monnaie courante(198).

Article 16(199). Contrairement aux dispositions de l'article 16, il est accordé bien peu d'importance au maintien de la population assujettie au travail forcé dans la zone de résidence habituelle, et encore bien moins à une acclimatation progressive à d'autres régions.

Article 17(200). Comme nous l'avons vu ci-dessus, il n'est prévu aucun contrôle médical préalable non plus qu'une couverture médicale pendant les travaux; dans la plupart des cas, les travailleurs se déplacent à leurs propres frais et doivent faire face eux -mêmes aux conséquences de toute lésion subie en cours d'emploi. Rien n'est fait non plus pour assurer la subsistance des autres membres de la famille des travailleurs.

Article 18(201). La pratique du portage forcé au Myanmar constitue l'une des violations les plus flagrantes des obligations prescrites par la convention no 29. Le portage est accompli sans aucun égard pour la santé ou le bien-être des travailleurs qui y sont assujettis, non plus que pour la collectivité d'origine de ces porteurs; aucune des autres sauvegardes prévues par l'article 18 n'est observée non plus(202).


V. CONCLUSIONS

Sur la base des constatations de faits et des arguments de droit développés ci-avant, les plaignants considèrent que:

  1. Les faits démontrent amplement que le travail forcé au Myanmar est très étendu, prévu par la législation et pratiqué sans aucune perspective de prévention ou de répression à l'égard de ceux qui imposent du travail forcé aux citoyens du Myanmar. Le gouvernement du Myanmar viole donc de manière flagrante la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.
  2. Les multiples constatations antérieures faites par les différents organes du mécanisme de contrôle de l'OIT n'ont pas amené d'amélioration quant au respect de la convention. La question du non-respect, par le gouvernement du Myanmar, de ses obligations au titre de la convention no 29 a été abondamment discutée par la commission d'experts, la Commission de la Conférence ainsi que le Comité constitué pour examiner la réclamation présentée en vertu de l'article 29 de la Constitution de l'OIT. En dépit des avis exprimés par ces organes, le gouvernement du Myanmar persiste à entretenir la confusion entre travail forcé et travail volontaire et à ne pas éliminer les graves lacunes qui ont été constatées dans sa législation et dans sa pratique.
  3. Compte tenu de ces éléments, les plaignants considèrent que la constitution d'une commission d'enquête est appropriée et justifiée.
  4. Les plaignants considèrent que la sécurité des personnes témoignant devant la commission d'enquête est de la plus haute importance. Il doit donc être veillé à ce que toute personne témoignant de sa propre initiative ou à la demande de l'une quelconque des parties soit protégée contre toute atteinte, représailles ou discrimination à raison de ses déclarations devant la commission d'enquête. Les mêmes sauvegardes doivent être prévues en ce qui concerne les familles et les proches des témoins.
  5. Les plaignants expriment l'espoir que, dans le cadre de toute audition ou visite sur les lieux, la commission d'enquête aura accès sans obstacle et de manière confidentielle aux témoins, pourra garantir leur anonymat lorsque cela sera nécessaire et garantir le caractère privé et confidentiel de toute audition de témoins ou de toute communication avec ceux-ci. Pour toutes les activités que la commission d'enquête mènera au Myanmar même, les sauvegardes consisteront à obtenir et contrôler que le gouvernement du Myanmar veille à ce que des assurances crédibles soient données par les niveaux élevés ou locaux de commandement quant à l'abstention de toutes représailles à l'égard des témoins.
  6. Les plaignants demandent que la commission d'enquête considère, en tant que de besoin, la nécessité que le gouvernement prenne des mesures correctrices immédiates et, à cette fin:
    1. abroge ou modifie immédiatement la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes;
    2. applique immédiatement des dispositions pénales contre toutes les pratiques de travail forcé contraires à la convention no 29;
    3. procède avec diligence aux enquêtes et poursuites pénales conformément aux normes internationalement reconnues à l'encontre de quiconque, membres de l'armée compris, recourt au travail forcé en violation de la convention no 29, notamment en ce qui concerne tous les délits mis au jour au cours de l'enquête de l'OIT;
    4. prévoit une réparation adéquate à l'égard des villages et des familles ayant subi des pertes en vies humaines et d'autres préjudices sur le plan de la santé, de la propriété et de l'activité économique au cours de l'imposition du travail forcé;
    5. applique une législation ou une réglementation permettant que les plaintes de personnes alléguant un assujettissement au travail forcé puissent être formulées, examinées et traitées par les autorités compétentes.


1.  Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 5), liste des ratifications par convention et par pays (Genève, 1995), p. 46.

2.  Le manquement du Myanmar à ses obligations au titre de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, a également fait l'objet de commentaires de la part de la commission d'experts et de la Commission de la Conférence. Voir, par exemple, les paragraphes 166 à 169 du Compte rendu provisoire de la Commission de l'application des normes de la 83e session de la Conférence internationale du Travail (Genève, 1996).

3.  Conférence internationale du Travail, 48e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1964), p. 71.

4.  Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1968), p. 57.

5.  Conférence internationale du Travail, 78e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1991), p. 134 (à cette occasion, la commission d'experts exprimait l'espoir que le gouvernement du Myanmar réponde de manière détaillée aux questions soulevées); Conférence internationale du Travail, 79e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1992), p. 134 (la commission d'experts réitérait ses commentaires de 1991 compte tenu du fait qu'aucun rapport n'avait été reçu du gouvernement).

6.  Pour plus de détails sur la procédure fondée sur l'article 24, voir infra notes 16 à 26 et texte correspondant.

7.  Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1993, document des Nations Unies E/CN.4/1993/37 (17 fév. 1993) («Rapport du Rapporteur spécial, 1993»); Conférence internationale du Travail, 80e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1993) («RCE, 1993»), p. 122.

8.  Cet article exclut de la définition du travail forcé les «menus travaux de village», exécutés dans l'intérêt direct de la collectivité. Voir ci-après notes 163 à 165 et texte correspondant.

9.  Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1995) (RCE, 1995), pp. 112 à 115.

10.  Le rapport du gouvernement se référait simplement à l'article 2 2) b) (excluant de la définition de travail forcé tout travail faisant partie des obligations civiques normales des citoyens -- voir infra notes 153 et 154 et texte correspondant) et à l'article 2 2) d) (excluant de la définition de travail forcé le travail exigé en cas de force majeure -- voir infra notes 160 à 162 et texte correspondant), affirmant que la notion de «travail forcé» n'est pas applicable aux dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, instruments qui, de toute façon, sont périmés et font l'objet d'une révision.

11.  Conférence internationale du Travail, 83e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1996) (RCE, 1996), p. 93. Voir également, d'une manière générale, les pages 91 à 93.

12.  Conférence internationale du Travail, 79e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1992), pp. 27/41.

13.  Conférence internationale du Travail, 82e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1995), paragr. 139 (RCE, 1996), voir supra note 11 et p. 93 du rapport III (partie 4A) de 1996.

14.  Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), paragr. 165.

15.  Idem, paragr. 169.

16.  Réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Myanmar (anciennement la Birmanie), pour ses violations de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (convention no 29 de l'Organisation internationale du Travail), ratifiée par la Birmanie en 1955. Le Directeur général du Bureau international du Travail a été saisi le 25 janvier 1993 de cette réclamation par la Confédération internationale des syndicats libres (dossier CISL -- Réclamation en vertu de l'article 24).

17.  Voir, d'une manière générale: BIT, Conseil d'administration, rapport du Directeur général, deuxième rapport supplémentaire, rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération internationale des syndicats libres en vertu de l'article 24 de la Constitution, alléguant l'inexécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar (Genève, novembre 1994), document GB.261/13/7 («rapport établi conformément à l'article 24»).

18.  BIT, Conseil d'administration, procès verbaux de la 261e session, document GB.261/PV(Rev.) (Genève, nov. 1994), paragr. 61; (RCE, 1996), voir note 11 précédente relative au rapport III (partie 4A), p. 93.

19.  Réclamation présentée en vertu de l'article 24, voir note 16 ci-dessus, note au point 6.

20.  Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 17 ci-dessus, paragr. 12, 14-19.

21.  Idem, paragr. 42 (communications de mai et d'octobre 1993).

22.  Idem, paragr. 20, 21, 25-40 et 48, respectivement.

23.  Idem, paragr. 48.

24.  Idem, paragr. 49.

25.  Idem, paragr. 50. Sur la base de ces éléments, ayant acquis la conviction qu'il n'est pas question de période transitoire dans le cas du Myanmar, le comité constitué en vertu de l'article 24 n'a pas examiné la question de savoir si le portage forcé serait conforme aux garanties prévues aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention no 29. Idem, paragr. 51.

26.  Idem, paragr. 52.

27.  Anti-Slavery International: Ethnic groups in Burma (Londres, 1994( (Ethnic groups), p. 91.

28.  Australian Council for Overseas Aid: Slave labour in Burma: An examination of the SLORC's forced labour policies (mai 1996) (ACFOA), pp. 28-29; Ethnic groups, voir p. 91 de la référence mentionnée sous la note 27.

29.  Voir également commentaires du gouvernement du Myanmar adressés au comité constitué en vertu de l'article 24, notes 21 et 22 supra et paragr. 20 à 41 du texte correspondant.

30.  Ethnic groups, p. 89 de la référence citée sous la note 27 ci-dessus.

31.  Idem.

32.  Pour une description générale de la pratique du portage forcé, voir par exemple Amnestie internationale: Myanmar: The climate of fear continues - Members of ethnic minorities and political prisoners still targeted, AI: ASA 16/06/93 (octobre 1993) («Climate of fear»), pp. 13-21; Human Rights Watch/Asia: Abuses linked to the fall of Manerplaw, vol. 7, no 5 (mars 1995) («Manerplaw»), p. 12. «Divers rapports, photographies, enregistrements vidéos et éléments matériels de preuves attestés par le Rapporteur spécial indiquent que les pratiques du travail forcé et du portage obligatoire ... sont encore largement répandues au Myanmar...». Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1996, document des Nations Unies E/CN.4/1996/65 (5 fév. 1996) («Rapport du Rapporteur spécial, 1996»), paragr. 173.

33.  Pour plus de détails sur la législation, voir notes 105 à 110 infra et texte correspondant.

34.  Rapport du Rapporteur spécial, 1996, voir paragr. 173 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus.

35.  Amnesty International: Myanmar: No place to hide; Killings. Abductions against ethnic Karen villagers and refugees, AI: ASA 16/13/95 (juin 1995) («No place to hide»), p. 25.

36.  Voir notes 21 et 22 ci-dessus et texte correspondant (commentaires du gouvernement du Myanmar adressés au comité constitué en vertu de l'article 24).

37.  Ethnic groups, voir chap. III de la référence citée sous la note 27 (mères de famille et femmes enceintes contraintes de travailler comme porteuses); et Images Asia: No childhood at all: A report on child soldiers in Burma (mai 1996), p. 6 (enfants réquisitionnés comme porteurs).

38.  Amnesty International: Portering and forced labour: Amnesty International's concerns, AI: ASA 16/42/96 (sept. 1996), pp. 2 et 3, Amnesty International: Conditions in prisons and labour camps, AI: ASA 16/22/95 (sept. 1995) («Conditions carcérales»), pp. 1, 6.

39.  Conditions carcérales, voir pp. 1, 6 de la référence mentionnée sous la note 38 ci-dessus.

40.  Voir, par exemple, Amnesty International: Myanmar: Human rights after seven years of military rule, AI: ASA 16/23/95 (oct. 1995) («Seven years»), pp. 24-25; No place to hide, p. 27 de la référence mentionnée sous la note 25 ci-dessus; Amnesty International: Human rights still denied, AI: ASA 16/18/94 (nov. 1994) («Denied»), pp. 14-21.

41.  Voir notes 50 à 53 ci-après et texte correspondant.

42.  Voir, par exemple, Asia Watch: Burma: Rape, forced labour and religious persecution in North Arakan State (mai 1992) («Arakan State»), p. 13.

43.  Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1995, document des Nations Unies E/CN.4/1995/65 (12 janv. 1995) («Rapport du Rapporteur spécial, 1995»; Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/57 (16 fév. 1994) («Rapport du Rapporteur spécial, 1994», paragr. 49; voir également Rapport du Rapporteur spécial, 1996, paragr. 114 et 115 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus; Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1993, paragr. 79-84, 101-104, 135-138, 222, 228, 229, 231-233.

44.  Rapport du Rapporteur spécial sur la torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/31 (6 janv. 1994), paragr. 401.

45.  Voir également Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/7 (7 déc. 1993), paragr. 448.

46.  Voir également Climate of fear, p. 21 de la référence mentionnée sous la note 32.

47.  Rapport du Rapporteur spécial sur la torture, voir note 41 ci-dessus.

48.  Human Rights Watch/Asia: Entrenchment or reform? Human rights developments and the need for continued pressure, vol. 7, no 10 (juillet 1995) («Entrenchment»), p. 21. La relation ci-après d'un ancien porteur sur la mort d'un autre, son voisin au village, est représentative des traitements infligés aux porteurs par les troupes du SLORC: «J'entendis Tun Shwe dire au soldat qui le suivait, un homme du rang appartenant au bataillon 531: 'Ne me tuez pas, je ferais de mon mieux pour arriver à destination. Maintenant, je ne peux pas porter ma charge, je ne peux pas marcher, mais je vais essayer. Ne me punissez pas, ne me tuez pas'. Dès que Tun Shwe eut prononcé ces mots, le soldat le tua d'une balle de G-4 tirée dans le dos à environ quatre mètres, de sorte que ses viscères apparurent. Après cette exécution, chacun resta muet. Les soldats se contentèrent de dire aux autres porteurs: 'Avancez, avancez' tout comme s'ils avaient conduit du bétail.» («No place to hide»), p. 29 de la référence mentionnée sous la note 35 ci-dessus.

49.  Climate of fear, pp. 20-21 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus (jeunes filles de 16 et 17 ans appartenant à des minorités ethniques réquisitionnées pour le portage et violées). Un organisme s'occupant des droits de l'homme ayant entendu un certain nombre de réfugiés dans un camp établi en Thaïlande signale que les femmes ayant été réquisitionnées pour le portage déclarent souvent avoir été violées: «quatre victimes, âgées de 17 à 42 ans, déclarent avoir été enlevées sur leur lieu de résidence ou à proximité dans la localité de Kammamaung. Elles déclarent avoir été violées par les militaires au cours de missions de travail obligatoire de 22 jours consistant à acheminer des obus d'artillerie jusqu'au front, pour l'assaut mené par Tatmadaw sur Manerplaw.» («Ethnic groups»), p. 113 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

50.  Ethnic groups, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 27.

51.  Article 19: Burma: Beyond the law, août 1996 («Beyond the law»), p. 50. Par exemple, dans le cadre d'une offensive du SLORC contre l'Union nationale Karen et l'armée Mong Tai, menée de novembre 1994 à juin 1995, des milliers de porteurs ont été vus en première ligne, des centaines ayant été tués («Entrenchment»), p. 21 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus.

52.  Par exemple, un vieux chef karen du district de Thaton a perdu une jambe après avoir été attaché à une corde puis contraint par le SLORC de trouver un chemin à travers un champ de mines (Ethnic groups), pp. 29-30 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

53.  Dans un cas notoire signalé en 1991, deux fillettes d'une dizaine d'années fréquentant la Papun High School, dans l'Etat de Karen, Naw Aye Hia et Ne Law Win, ont été tuées en marchant sur des mines après avoir été enrôlées de force comme porteurs («Ethnic groups»), p. 117 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

54.  Rapport du Rapporteur spécial, 1996, paragr. 141 à 144 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus; «Des rapports détaillés, des photographies, des enregistrements vidéos et différents éléments matériels de preuve attestés par le Rapporteur spécial indiquent qu'il est apparemment recouru à des pratiques de travail forcé ... dans le contexte de programmes de développement ... de nombreuses victimes de ces actes sont des populations appartenant à des minorités ethniques. Il s'agit en particulier de paysans, de femmes, de travailleurs journaliers et autres civils sans intention belliqueuse...». Ibid., paragr. 173.

55.  RCE, 1995, paragr. 2, p. 109 de la référence mentionnée sous la note 9 ci-dessus (le gouvernement du Myanmar signale «799 447 personnes travaillant» à titre «de contribution volontaire» à la réalisation de la voie de chemin de fer Aungbon-Loikow); New light of Myanmar, 15 déc. 1993, cité dans Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus (il déclare que 921 753 personnes contribuent à la réalisation de la ligne de chemin de fer Pokokku-Manywa); Beyond the law, p. 49 de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus (des centaines de milliers de personnes touchées); Entrenchment, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus (depuis 1992, on estime à environ deux millions le nombre de personnes contraintes de travailler sans rémunération à la réalisation de routes, lignes de chemin de fer et ponts sur tout le territoire); Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus (citation du Working People's Daily du 8 mai 1992 faisant état de plus de 300 000 personnes contribuant «à titre volontaire» à la réalisation de la ligne de chemin de fer Aungbon-Loikow).

56.  Pour une discussion plus approfondie sur le travail forcé et le tourisme, voir notes 102 et 103 ci-après et texte correspondant.

57.  En 1995, le gouvernement du Myanmar a admis la «contribution au travail» de populations dans le cadre de sept nouveaux projets de lignes de chemin de fer. Lettre du Représentant permanent de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève datée du 18 mars 1996 ayant pour objet un mémorandum d'observations et de commentaires concernant le document E/CN.4/1996/65 du 5 fév. 1996 relatif à l'Union du Myanmar, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996) («Memorandum of Observations»), p. 21; Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus. On citera à titre d'exemple de projets de développement impliquant un recours au travail forcé une ligne de chemin de fer allant de Ye à Tavoy, dans la circonscription de Tenasserim, célèbre pour avoir nécessité la réquisition de dizaines de milliers de civils soumis à du travail forcé; Seven years, pp. 25-26 de la référence mentionnée sous la note 40 ci-dessus. Article 19: Paradise lost? The suppression of environmental rights and freedom of expression in Burma (Londres, sept. 1994) («Paradise lost»), p. 6; et voir discussion des notes 90 à 97 ci-après concernant la prospection des réserves de gaz et de pétrole et le texte correspondant; construction d'une route dans l'Etat d'Arakan, région particulièrement sous-développée qui a connu, ces dernières années, l'exode puis le retour de quelque 250 000 musulmans de l'ethnie Rohingya; Climate of fear, note 32 ci-dessus; la population locale Rohingya subit régulièrement de manière disproportionnée des enrôlements de force (Beyond the law, p. 49 de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus) au fur et à mesure que le développement nécessite une plus forte emprise de la part du SLORC; et une route allant de Putao à Sumprabum dans l'Etat de Kachin, à la réalisation de laquelle 3 000 personnes étaient contraintes de travailler fin 1994, Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus. Pour une représentation cartographique des différents projets de construction réalisés au Myanmar en recourant au travail forcé, voir ACFOA, note 28 ci-dessus, appendices A et B.

58.  Voir, par exemple, «Burma using forced labour on tourist projects», New York Times, 17 juillet 1994. On peut citer au nombre de tels projets le curage des douves du Palais d'or à Mandalay; des informations concourantes permettent d'établir que des milliers de civils ont été réquisitionnés par le SLORC pour curer les douves à la main: voir par exemple The Bangkok Post du 22 janvier 1995; la construction d'aéroports, souvent réalisée, d'après ce que l'on a pu constater, par une main-d'œuvre forcée; non moins de 30 000 personnes auraient été employées sans être rémunérées pour réaliser l'aéroport de Bassein (The Guardian, Londres, le 12 juillet 1994); et un barrage au lac Inlayl, réalisé en rapport avec un projet de développement touristique à Moebye, sur la rivière Biluchaung; des villageois et d'autres civils ont été réquisitionnés pour nettoyer le lac à la main.

59.  En 1996, le gouvernement du Myanmar a admis que des détenus «fournissent leur travail sur des chantiers» et, donnant une idée de l'étendue de cette pratique, a déclaré que «plus de 23 000 personnes ... ont vu leur peine réduite d'au moins un tiers» en conséquence: Mémorandum d'observations, p. 21 de la référence mentionnée sous la note 37 ci-dessus.

60.  Conditions dans les prisons et les camps de travail, note 38 ci-dessus. C'est ainsi que, par exemple, un moine de Mandalay âgé de 51 ans serait mort de malnutrition et de malaria le 18 novembre 1994 après avoir travaillé dans une zone infestée. Il avait été arrêté pour avoir participé au mouvement prodémocratique de 1988-89 et condamné à cinq ans de travaux forcés dans l'Etat de Kachin. Idem, p. 3.

61.  Département d'Etat des Nations Unies, Foreign economic trends report: Burma (juin 1996) («Economic trends»), p. 88. («Les éléments dont on dispose portent à croire que l'utilisation de main-d'œuvre non rémunérée [par le gouvernement] dans le cadre de projets régionaux et nationaux, de même que dans le cadre de projets de développement rural de niveau local, s'est considérablement intensifiée»).

62.  Ethnic groups, p. 86 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

63.  Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus.

64.  Voir, par exemple, Human Rights Watch/Asia: Burma: The Rohingya Muslims, ending a cycle of exodus? Vol. 8, no 9(C) (sept. 1996), p. 30.

65.  Voir, par exemple, Beyond the law, p.50 de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus; Climate of fear, p. 13 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus.

66.  Voir, par exemple, Paradise lost, p. 20 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

67.  Voir, par exemple, Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 68 ci-dessus (de nombreuses personnes seraient mortes de malaria au cours de la réalisation par le travail forcé d'une route à Patao).

68.  Dans un entretien publié par le Bangkok Post du 18 octobre 1992, le lieutenant-colonel Than Han, du programme de développement des zones frontalières, expliquait que les montagnards souffrent du changement climatique lorsqu'ils descendent travailler dans les plaines: «Ils transpirent énormément, perdent du poids et ont des problèmes de santé.» Ethnic groups, p. 88 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

69.  Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires s'est déclaré préoccupé par «les informations persistantes faisant état de recours arbitraire et excessif à la force de la part des membres des forces de sécurité, qui semblent jouir d'une totale impunité», voir note 45 ci-dessus.

70.  Rapport du Rapporteur spécial, 1995, paragr. 230 de la référence mentionnée sous la note 43 ci-dessus.

71.  «Les personnes âgées et infirmes sont particulièrement vulnérables; il arrive qu'elles soient battues lorsqu'elles prennent un peu de répit ou qu'on estime qu'elles travaillent trop lentement.» Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus.

72.  «Dans la région du Nord-Ouest, un ... visiteur de l'Etat de Chin signale que sur le chantier de la ligne de chemin de fer Pakoku-Kalemyo une femme a été tuée pour s'être arrêtée deux fois de travailler afin de nourrir son bébé. Cette femme avait été contrainte d'emmener avec elle son bébé sur le chantier du fait que tous ses proches avaient également été réquisitionnés.» Idem.

73.  Une chrétienne de l'ethnie Karen originaire de la localité de Kyaukkyi ayant réussi à s'enfuir en Thaïlande déclare avoir été violée sous la menace d'un couteau par un sergent supervisant le travail de son équipe chargée de creuser des fossés. Voir Ethnic groups, p. 113 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

74.  Idem, p. 84.

75.  Rohingyas, p. 30 de la référence mentionnée sous la note 64 ci-dessus.

76.  Idem.

77.  ACFOA, p. 9 de la référence mentionnée sous la note 28 ci-dessus.

78.  Cf. article 19: Fatal silence? Freedom of expression and the right to health in Burma («Health») (Londres, juillet 1996), p. 107 (l'UNICEF estime la mortalité maternelle au Myanmar à 140 pour 100 000, en raison du manque d'accès à l'information sur la santé de la reproduction ainsi que du caractère illégal de l'avortement; 50 pour cent des décès maternels résulteraient d'avortements illégaux).

79.  Idem, p. 103.

80.  Voir, par exemple, Climate of fear, p. 20 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus.

81.  Paradise lost, p. 6 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

82.  Voir, par exemple, Seven years, p. 26 et 27 de la référence mentionnée sous la note 40 ci-dessus; Human rights still denied, p. 17 et 18 de la référence mentionnée sous la note 40 ci-dessus; Rohingyas, p. 32 de la référence mentionnée sous la note 64 ci-dessus.

83.  Voir, par exemple, Rohingyas, p. 29 de la référence mentionnée sous la note 64 ci-dessus ( près de 2 000 kilomètres de routes doivent être construites dans l'Etat d'Arakan pour faciliter les déplacements militaires et le développement du tourisme).

84.  Voir également RCE, 1995, note 9 ci-dessus et texte correspondant (avis de la commission d'experts selon laquelle les chantiers de construction de routes et de lignes de chemin de fer ne correspondent pas à des «menus travaux de village» au sens de la convention no 29).

85.  Economic trends, p. 87 de la référence mentionnée sous la note 61 ci-dessus.

86.  Ce pourcentage est vraisemblablement minoré, du fait que les chiffres officiels semblent évaluer les «contributions de la population» sur la base du taux officiel de rémunération journalière. Si les chiffres étaient réajustés pour correspondre aux taux du marché, la valeur de ces «contributions de la population» atteindrait pratiquement 75 pour cent pour les années en question; idem.

87.  Les crédits en devises octroyés par le SLORC aux forces armées trouvent leur expression dans un contrat de 1,2 milliard de dollars entre le Myanmar et la Chine pour l'acquisition d'armements en 1994; voir également Paradise lost? p. 6 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus; Economic trends, p. 22 et 27 de la référence mentionnée sous la note 61 ci-dessus (la Chine est l'un des principaux fournisseurs d'acquisitions militaires; les dépenses d'importations pour la défense sont passées de 20 millions de dollars pour les années 1988 et 1989 à 390 millions de dollars en 1991).

88.  Voir, par exemple, Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus; Earth Rights international and Southeast Asian Information Network: Total denial (juillet 1996) («Total denial»), p. 33 (réalisation de casernes militaires sur l'île de Heinze, en liaison avec la réalisation du gazoduc de Yadana; voir ci-après notes 90 à 96 et texte correspondant); la population de l'Etat d'Arakan a elle aussi été réquisitionnée pour la construction de casernes pour le NaSaKa, une unité de la police des frontières; Rohingyas, p. 29 de la référence mentionnée sous la note 64 ci-dessus.

89.  Voir, par exemple, idem, p. 36 (réalisation de casernes à proximité du tracé du gazoduc); Manerplaw, pp. 12-14 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus (villageois réquisitionnés par l'armée pour la réalisation de latrines et pour des tâches de cuisine et de jardinage ainsi que de coupe de bambous); Amnesty International: Myanmar: Human rights violation against Muslims in the Rakhine (Arakan) State, AI: ASA 16/06/92 (oct. 1992) («violations des droits de l'homme»), p. 6 (des Musulmans déclarent avoir travaillé sous la contrainte à la réalisation de camps militaires, à la construction ou à l'amélioration de routes entre les camps et, à l'intérieur des camps, à la garde de troupeaux, à la réalisation de bunkers et de latrines ainsi qu'au blanchissage des uniformes des militaires).

90.  Voir, par exemple, Ethnic groups, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus (depuis 1992, plus de 30 000 personnes auraient été réquisitionnées pour la construction de la ligne de chemin de fer Ye-Tavoy).

91.  Paradise lost?, pp. 16-20 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus. Un gazoduc doit être construit à partir d'un site de la mer d'Andaman, pour longer l'île de Heinze, traverser ensuite sur près de 100 kilomètres la circonscription de Tenasserim avant d'entrer en Thaïlande, lieu de consommation finale du gaz. Voir, par exemple, Total denial, p. 1 de la référence mentionnée sous la note 88.

92.  La réalisation du tracé du gazoduc a consisté essentiellement à défricher la jungle à la main. Les travaux d'infrastructure associés incluent la réalisation de casernes dans le voisinage pour loger les bataillons du SLORC affectés à la région pour assurer la sécurité du gazoduc. Idem.

93.  Voir, par exemple, John Doe I., etc. et. al. v. Unocal Corp. et. al., numéro d'archives 96-6959 LGB (C.D. Cal.), plainte portée devant la Cour fédérale des Etats-Unis, 3 octobre 1996, paragr. 37-182; National Coalition Government of the Union of Burma and the Federation of Trade Unions of Burma v. Unocal, Inc. (plaidoiries établies par anticipation de la démonstration du caractère prépondérant des preuves produites). Voir également lettre datée du 21 mars 1995, adressée par Beth Stephen, du Center for Constitutional Rights, à M. Roger Beach, CEO, Unocal Corporation, p. 2.

94.  Memorandum of Observations, pp. 20 et 21 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus (il n'y a pas de travail forcé au Myanmar; la population fournit son travail à titre bénévole).

95.  Voir, par exemple, Total denial, p. 9 de la référence mentionnée sous la note 88 ci-dessus.

96.  Paradise lost?, p. 19 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus; il a été constaté des «divergences considérables» entre les divers organismes dénonçant des pratiques de travail forcé dans la région, et les compagnies pétrolières associées au projet, de même qu'en ce qui concerne le rapport entre la ligne de chemin de fer et le gazoduc. Il n'en reste pas moins, en tout état de cause, que l'achèvement de la ligne de chemin de fer facilitera les transports de troupes du SLORC et l'acheminement de leurs équipements dans la région, la partie déjà réalisée étant utilisée à cette fin; Total denial, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 88 ci-dessus.

97.  Ethnic groups, pp. 88-89 de la référence mentionnée sous la note 27 ci-dessus.

98.  Voir notes 56 à 58 ci-dessus et texte correspondant.

99.  Memorandum of Observations, p. 16 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus; «autres informations concernant la réalisation de l'axe routier Yangon-Mandalay», Myanmar News Agency, 23 janv. 1996.

100.  Memorandum of Observations, p. 16 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

101.  Idem, p. 20 (partie intitulée «Contribution traditionnelle sous forme de travail», en rapport avec l'obtention de grâces par des «contributions sous la forme de travail»); pratiques que l'OIT assimile au travail forcé. Voir notes 12 à 26 ci-dessus et texte correspondant.

102.  Paradise lost?, p. 24 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus. Au 15 juillet 1995, les investissements étrangers comptabilisés dans le secteur de l'hôtellerie et du tourisme au Myanmar venaient au deuxième rang, immédiatement après le secteur du gaz et du pétrole; Jeremy Mark, «Western firms remain hesitant about investing in Burma in contrast to Asians' enthusiasm», Asian Wall Street Journal, semaine du 4 sept. 1995, pp. 1, 8.

103.  Voir, par exemple, Burma Action Group: Burma. The alternative guide (janv. 1996), p. 21, référence aux annexes III et IV.

104.  N. Chan: «A culture of coercion», Burma Issues, janv. 1995, pp. 2-3.

105.  Voir loi de 1908 sur les villages, s. 12 (chapeau) et loi de 1907 sur les villes, s. 9A, notes 106 à 110 ci-après et texte correspondant. Les plaignants s'appuient sur une source extrêmement fiable et produiront des exemplaires desdites lois dès que ceux-ci seront disponibles.

106.  Loi de 1908 sur les villages, in Burma Code, vol. VI (1979) (partie pertinente) (c'est nous qui soulignons).

107.  Memorandum of Observations, p. 22 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

108.  Voir notes 12 à 26 ci-dessus et texte correspondant.

109.  Le 19 février 1992, le SLORC a annoncé dans le New light of Myanmar l'abrogation d'un grand nombre de lois, ayant constaté qu'elles «n'étaient plus conformes à une situation qui avait changé, qu'elles n'étaient plus appliquées depuis très longtemps et qu'il n'existait aucune raison pour qu'elles le soient à l'avenir...» Conseil d'Etat pour la restauration de la loi et de l'ordre public, loi no 1/92, The Working People's daily, 20 fév. 1992, pp. 1, 7 et 8. La liste de quelque 137 lois était jointe en annexe. La loi no 4/93 du SLORC annonçait de même l'abrogation de 14 autres lois, The Working People's Daily, 1er avril 1993, pp. 1, 6. En mars 1996, le SLORC annonçait que 151 lois avaient été abrogées, 35 lois «anciennes» et 78 lois «subsidiaires» étaient également déclarées abrogées et remplacées par de nouveaux instruments, Memorandum of Observations, p. 18 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

110.  En 1996, le gouvernement déclarait avoir «engagé le processus de modification de ces deux instruments...», Memorandum of Observations, p. 22 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus; cette déclaration a ensuite été expliquée par un représentant du gouvernement devant la Commission de la Conférence en juin, lequel a indiqué qu'un comité constitué pour superviser la révision de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes s'était réuni trois fois l'année précédente, en conséquence de quoi un projet de nouvelle législation unifiée avait été soumis à l'organe central de contrôle de la législation pour approbation, Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire (Genève, 1996, p. 14/56); voir également la discussion relative à la procédure de la Commission de la Conférence, notes 13 à 15 ci-dessus et texte correspondant. La teneur de ce projet de législation n'a pas été révélée. Voir également la déclaration du gouvernement à la commission d'experts en 1968, note 4 ci-dessus et texte correspondant.

111.  Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le Myanmar a obtenu copie de certaines directives secrètes concernant la pratique du travail forcé lorsqu'il s'est rendu sur place en 1995, rapport du Rapporteur spécial, 1996, add. 2, 3 de la référence mentionnée sous la note 32 ci-dessus.

112.  Idem, paragr. 141.

113.  Burma Code, vol. VIII (1979) (partie pertinente) (c'est nous qui soulignons).

114.  Conférence internationale du Travail, 14e session, Genève, 1930, Compte rendu des travaux, p. 691, mentionné dans Conférence internationale du Travail, 65e session, rapport III (partie 4B), rapport de la commission d'experts, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1979) («Etude d'ensemble de 1979»), paragr. 21, note 3; et dans Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 4), rapport de la commission d'experts, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1968) («Etude d'ensemble de 1968»), paragr. 27, note 3.

115.  Selon les termes de l'article 1 1) de cette convention. En outre, le terme de «peine» doit être compris en association et à la lumière de l'autre partie de la définition du «travail forcé ou obligatoire», selon laquelle l'individu accomplissant ledit travail ou lesdits services ne s'est pas offert pour cela de son plein gré, voir article 2 1) de la convention.

116.  Loi de 1908 sur les villages, s. 12, loi de 1907 sur les villes, s. 9A. Les dispositions pertinentes sont citées in extenso dans la partie III.C.1 ci-dessus. La commission d'experts et la Commission de la Conférence ont dit l'une et l'autre que l'existence et l'application de ces lois sont incompatibles avec les obligations du Myanmar en vertu de la convention no 29. Voir notes 5 à 15 ci-dessus et texte correspondant.

117.  Voir RCE, 1996, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 11 ci-dessus (cas du Japon: conditions dans lesquelles des Coréennes destinées à servir de «chair à plaisir» ont été contraintes de fournir des prestations sexuelles pendant la seconde guerre mondiale, ces conditions étant assimilables à «un esclavage sexuel», lequel rentre dans ce qu'interdit la convention no 29; les femmes en question auraient eu droit à des salaires et à d'autres prestations au titre de l'emploi).

118.  Voir, par exemple, «Le travail des enfants», document du BIT GB.265/2 (Genève, 1996), paragr. 32 (la convention no 29 «donne à l'OIT la possibilité d'examiner les pratiques en matière de travail des enfants qui correspondent à un travail forcé au sens de la convention»; c'est ce qu'elle fait «depuis une dizaine d'années»).

119.  Voir discussion dans la partie IV.D.4 ci-après.

120.  Quant à l'incidence du paiement sur les exceptions visées à l'article 2 2), voir note 150 ci-après et texte correspondant.

121.  US Committee for Refugees, mission de l'USCR au Bangladesh (20 juin-1er  juillet 1996) (Washington, DC, 1996) (des réfugiés originaires de l'Etat d'Arakan, parvenus récemment au Bangladesh signalent que les Rohingyas sont assujettis de manière disproportionnée au travail forcé et que ces périodes de travail forcé atteignent plusieurs semaines par mois, réduisant en conséquence le temps qui leur reste pour travailler leurs terres); Beyond the law, pp. 46 à 49 de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus; Amnesty International: Myanmar: Human rights still denied, AI: ASA 16/8/94 (nov. 1994), pp. 15-17.

122.  Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes, Genève 1996, pp. 14/56-14/58.

123.  Voir discussion sous les notes 88 et 89 ci-dessus et texte correspondant.

124.  Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), pp. 14/61-14/63.

125.  A ce jour, de 800 000 personnes (déclaration des délégués travailleurs à la Commission de la Conférence, 1996, ibid., p, 14/60) à 2 millions de personnes (estimation de Human Rights Watch/Asia: Entrenchment, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 48 ci-dessus) ont été soumises au travail forcé.

126.  RCE, 1993, note 7 ci-dessus, cas du Myanmar, paragr. 3; RCE, 1996, note 11 ci-dessus, paragr. 3; voir également note 9 ci-dessus et texte correspondant.

127.  Rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 52, de la référence mentionnée sous la note 17 ci-dessus.

128.  Voir notes 11 et 12 ci-dessus et texte correspondant.

129.  Voir notes 85-87 ci-dessus et texte correspondant.

130.  Voir notes 90-97 ci-dessus et texte correspondant.

131.  Voir note 57 ci-dessus et texte correspondant.

132.  Voir note 58 ci-dessus et texte correspondant.

133.  Voir note 104 ci-dessus et texte correspondant.

134.  Art. 4 2) de la convention no 29.

135.  Art. 4 1) de la convention no 29.

136.  La teneur des directives secrètes est discutée sous les notes 111 et 112 ci-dessus et dans le texte correspondant.

137.  Voir notes 105-110 ci-dessus et texte correspondant.

138.  Memorandum of Observations, p. 22, de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

139.  Ibid., pour ce qui concerne la difficulté d'étudier la législation actuelle du Myanmar, voir Beyond the law, pp. 3-4, de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus.

140.  Voir, par exemple, Memorandum of Observations, paragr. 20-23, de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus; communications du gouvernement du Myanmar au comité constitué en vertu de l'article 24, voir paragr. 24 de la référence mentionnée sous la note 17 ci-dessus; note verbale en date du 4 novembre 1994 de la Mission permanente de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève contenant la réponse au rapport du Rapporteur spécial, 1994 (note 43 ci-dessus), reproduite dans le rapport provisoire du Rapporteur spécial, document des Nations Unies A/49/594/Add.1 (28 oct. 1994), paragr. 3 (aux paragraphes 24 à 28 de sa note verbale, le gouvernement réitère sa position selon laquelle le recrutement des porteurs serait conforme à la législation, ils seraient bien traités et une réglementation existerait en la matière).

141.  Voir la discussion correspondante dans la partie III ci-dessus.

142.  Voir, d'une manière générale, OIT, Conseil d'administration, procès-verbaux de la 261e session, document GB.261/PV(Rev.) (Genève, nov. 1994), paragr. 61.

143.  Conférence internationale du Travail, 75e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1988) («RCE, 1988»), p. 79 (cas du Burundi: mesures à prendre pour assurer que la population est informée de l'abrogation de la législation qui permettait jusque-là d'imposer du travail forcé). Voir RCE, 1993, p. 116, de la référence mentionnée sous la note 7 ci-dessus (cas du Libéria: la persistance du travail forcé après l'abrogation de la législation qui l'autorisait jusque-là démontre la nécessité d'assurer la publicité des instruments abrogateurs).

144.  RCE, 1993, p. 98, de la référence mentionnée sous la note 7 ci-dessus (cas du Brésil: le gouvernement était prié de prendre des mesures systématiques, adaptées à «l'immensité du territoire et aux difficultés qui en résultent...»).

145.  Conférence internationale du Travail, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1994), p. 148 (cas de la Thaïlande: le gouvernement était prié de prendre des initiatives sur le plan législatif contre l'extension du travail des enfants dans un «cadre juridique exhaustif»).

146.  Ibid., p. 119, cas du Libéria (le gouvernement doit concourir au strict respect de l'interdiction du travail forcé en assurant une inspection du travail adéquate, notamment dans le secteurs réputés pour être touchés par ce problème).

147.  Voir notes 111, 112 ci-dessus et texte correspondant.

148.  Voir notes 150-165 ci-après et texte correspondant.

149.  Voir note 112 ci-dessus et texte correspondant.

150.  En exceptant certains types de travaux qui seraient autrement considérés comme «travail forcé ou obligatoire», l'article 2 2) reste muet quant à la question du paiement. Ce silence signifie la non-pertinence de la question du paiement quant à déterminer si tel type de pratique constitue une exception envisagée par la convention. Voir également la discussion relative à la relation entre paiement et coercition, sous les notes 119 et 120 ci-dessus et dans le texte correspondant.

151.  Voir, par exemple, Memorandum of Observations, paragr. 10-11, de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus.

152.  Voir notes 32-34 ci-dessus et texte correspondant (procédés de réquisition pour le portage et autres pratiques de travail forcé).

153.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 34, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

154.  Voir, d'une manière générale, partie III ci-dessus (durée des missions, caractère pénible du travail ou du portage, participation à des activités militaires et au déminage, prestations sexuelles forcées, maladies et lésions corporelles graves ou mortelles).

155.  Les prisonniers peuvent choisir de travailler pour des particuliers, pour autant que la relation de travail entre le prisonnier et le particulier bénéficiaire soit comparable à la relation d'emploi librement conclue, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 97, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

156.  Ibid., paragr. 94 et note 4 (renvoyant à l'Etude d'ensemble de 1968 (note 114 ci-dessus), au paragr. 78 et se référant de même à la Déclaration universelle des droits de l'homme, à la résolution 217A de l'Assemblée générale des Nations Unies, aux articles 7 à 11 du document des Nations Unies A/810 (1948); ainsi qu'au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté par la résolution no 2200 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 16 décembre 1966 et entré en vigueur le 23 mars 1976, 21e session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, supp. no 16, document des Nations Unies A/6316, art. 14, 15).

157.  Pour une analyse du fonctionnement des tribunaux militaires, par rapport aux normes internationales auxquelles l'étude d'ensemble se réfère, se reporter à la note 114 ci-dessus: Lawyers Committee for Human Rights: Summary injustice: Military tribunals in Burma (avril 1991) («Summary injustice»); Beyond the law, pp. 34 à 40 de la référence mentionnée sous la note 51 ci-dessus (respect d'une procédure équitable selon les normes internationales par les tribunaux civils ou militaires du Myanmar); Commission internationale de juristes: The Burmese way: To where? Report of a mission to Myanmar (Genève, déc. 1991), pp. 37-54 (chap. 3: Le respect du droit et le système juridique, par rapport à la législation du SLORC et au système des tribunaux militaires).

158.  Voir, d'une manière générale, ibid.

159.  Voir, par exemple, Reuters, sept. 96, condamnation sur arrestation de l'aide de Aung San Suu Kyi, accessible sur Internet.

160.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 36, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

161.  Un seul groupe dissident est encore en conflit ouvert avec le gouvernement. Voir, par exemple, la déclaration de Son Excellence U Ohn Gyaw, président de la délégation de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, New York (3 oct. 1995), p. 5.

162.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 66, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus, renvoyant à l'Etude d'ensemble de 1968, paragr. 54, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

163.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 37, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

164.  RCE, 1988, p. 98, de la référence mentionnée sous la note 143 ci-dessus (cas de la Tanzanie: on ne saurait assimiler à de menus travaux de village le travail forcé, imposé par la législation, pour la réalisation d'un programme de développement agricole ou pastoral, la construction d'ouvrages ou de bâtiments destinés au bien-être social des résidents, l'établissement d'une industrie ou la construction d'un ouvrage d'utilité publique).

165.  Ibid.

166.  Rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 50-51, de la référence mentionnée sous la note 17 ci-dessus. La convention no 29 prévoit que les Membres peuvent encore recourir au travail forcé ou obligatoire après ratification de cet instrument «pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties» stipulées par les articles qui suivent, article 1 2). Ces garanties incluent les dispositions des articles 7 à 19 et 22 à 24 de la convention no 29, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

167.  Les débats des organes de contrôle de l'OIT sont, à juste titre, considérés comme une source de droit international du travail, à laquelle s'attache un certain poids. Voir, d'une manière générale, Valticos: Le droit international du travail (1979), pp. 61-62.

168.  Voir note 1 ci-dessus et texte correspondant.

169.  Article 1 3).

170.  Voir note 114 ci-dessus et texte correspondant.

171.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

172.  Etude d'ensemble de 1968, paragr. 22, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus (l'engagement en question consiste à supprimer le travail forcé ou obligatoire et, une fois que la convention est appliquée dans le pays, à ne pas introduire de nouvelles formes de travail forcé ni à rétablir celles qui ont été abolies).

173.  Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

174.  Voir note 25 ci-dessus et texte correspondant.

175.  Ou même tout acte d'acquiescement, à faire des essais nucléaires (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France), jugement du 20 décembre 1976, CIJ.

176.  Ibid., pp. 269-270, paragr. 50-51 et pp. 474-5, paragr. 52-53.

177.  Ibid., p. 267, paragr. 44 et pp. 472-3, paragr. 47.

178.  Conflit de frontières: arrêt, CIJ, 1986, p. 574, paragr. 40.

179.  Plus précisément, il n'est pas question d'une période transitoire dans ce cas; rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 50-51, de la référence mentionnée sous la note 17 ci-dessus.

180.  Ibid.

181.  Ces conditions et garanties pendant la période transitoire sont précisées aux articles 7 à 19 et 22 à 24 de la convention, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus; voir également Etude d'ensemble de 1968, paragr. 19 et 20, de la référence mentionnée sous la note 114 ci-dessus.

182.  Voir notes 90 à 104 ci-dessus et texte correspondant.

183.  Voir notes 85-87 ci-dessus et texte correspondant.

184.  L'article 8 prévoit que la responsabilité de toute décision de recourir au travail forcé, même si elle peut être déléguée, incombe aux autorités civiles supérieures. L'article 23 prévoit qu'une réglementation complète et précise sur l'emploi du travail forcé ou obligatoire doit être promulguée et que cette réglementation doit comporter des règles permettant à toute personne assujettie de présenter des réclamations. L'article 24 prévoit que les règlements concernant l'emploi du travail forcé ou obligatoire doivent être strictement appliqués au moyen de l'inspection.

185.  Voir notes 111 et 112 ci-dessus et texte correspondant.

186.  L'article 9 prévoit qu'avant de recourir au travail forcé, toute autorité ayant le droit d'imposer un tel travail doit d'abord s'assurer que ce travail est «important pour la collectivité appelée à l'exécuter» (article 9 a)); que le travail est d'une nécessité actuelle ou imminente (article 9 b)); qu'il a été impossible de se procurer la main-d'œuvre volontaire pour l'exécuter, malgré l'offre de salaires et de conditions de travail au moins égaux à ceux qui sont pratiqués dans le territoire intéressé (article 9 c)); et qu'il ne résultera pas de ce travail un fardeau trop lourd pour la population (article 9 d)).

187.  Voir, d'une manière générale, la partie III ci-avant.

188.  Voir discussion sous les notes 160-162 ci-dessus et texte correspondant concernant l'existence d'une force majeure, au sens de l'article 2 2) d).

189.  Voir notes 54-87 ci-dessus et texte correspondant.

190.  L'article 10 prévoit que le travail forcé ou obligatoire demandé à titre d'impôt doit être progressivement supprimé, sauf sous réserve des mêmes conditions que celles prévues à l'article 9. Voir notes 186-189 ci-dessus et texte correspondant. De plus, cet article prévoit que les travailleurs concernés ne doivent pas être obligés de s'éloigner du lieu de leur résidence habituelle et que ce travail soit organisé dans le respect des préceptes religieux et des exigences de la vie sociale et de l'agriculture (art. 10 d)e)).

191.  L'article 11 prévoit que seuls les adultes valides de sexe masculin de 18 à 45 ans pourront être assujettis au travail forcé; que leur aptitude au travail doit être déterminé par examen médical, que certaines catégories doivent être exemptées et que les besoins de la collectivité et de l'individu doivent être respectés.

192.  Voir, par exemple, note 36 ci-dessus et texte correspondant.

193.  L'article 12 prévoit que le travail forcé ne doit pas excéder 60 jours par an et que toute personne ayant été assujettie à ce travail doit obtenir une attestation pour la période correspondante.

194.  Voir note 35 ci-dessus et texte correspondant.

195.  L'article 13 prévoit que les horaires et les taux de rémunération devraient être les mêmes que ceux en usage pour le travail libre et qu'un jour de repos hebdomadaire doit être accordé. Sauf dans le cas du travail forcé conçu comme un impôt, conformément à l'article 10, le travail forcé doit être rémunéré aux taux en usage, et des précautions doivent être prises pour garantir que les personnes assujetties au travail forcé perçoivent leur salaire.

196.  L'article 15 prévoit que la législation sur l'indemnisation des travailleurs s'applique de même aux personnes assujetties au travail forcé et que, de toute façon, toute autorité employant un travailleur au travail forcé a l'obligation d'assurer sa subsistance en cas d'incapacité résultant de ce travail forcé.

197.  Voir, par exemple, rapport du comité constitué au titre de l'article 24, paragr. 41, de la référence mentionnée sous la note 17 ci-dessus (ce comité prenait note de l'affirmation du gouvernement du Myanmar selon laquelle la législation concernant l'indemnisation des travailleurs s'applique dans le cas des porteurs).

198.  Voir notes 43 à 49 ci-dessus et texte correspondant (les porteurs font l'objet d'atteintes flagrantes aux droits de l'homme), et notes 66 à 73 ci-dessus (les atteintes flagrantes aux droits de l'homme sont monnaie courante dans le cadre des projets de développement basés sur le travail forcé).

199.  L'article 16 prévoit que les personnes soumises au travail forcé ou obligatoire ne doivent pas être transférées dans des régions présentant un danger pour leur santé ou, lorsqu'un tel transfert ne peut être évité, qu'une adaptation progressive doit être prévue. Des mesures analogues doivent être prises dans le cas de personnes assujetties à un travail forcé auquel elles ne sont pas accoutumées.

200.  L'article 17 prévoit que, lorsque le travail forcé doit s'étendre sur une période prolongée, des mesures doivent être prises pour assurer la couverture médicale, la subsistance de la famille du travailleur, la prise en charge du coût de transport des travailleurs sur leur lieu de travail et retour (y compris le rapatriement sanitaire), ainsi que le maintien de ce droit pendant deux ans pour le travailleur désireux de rester sur place comme travailleur libre à l'expiration de sa période de travail forcé.

201.  L'article 18 prévoit que le travail forcé ou obligatoire pour le transport de personnes ou de marchandises «devra être supprimé dans le plus bref délai possible». Lorsque, pendant la période transitoire, il est fait recours au travail forcé à cette fin, des mesures doivent être prises pour préserver la santé des travailleurs; un règlement doit limiter la durée et la nature de la tâche à accomplir et des mesures doivent être prises pour garantir la subsistance de la collectivité d'où proviennent les travailleurs.

202.  Voir, d'une manière générale, les notes 27 à 53 ci-dessus et texte correspondant.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 21 février 2000.