L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
ILO-fr-strap

GB.275/4/1
275e session
Genève, juin 1999


316e rapport du Comité de la liberté syndicale (...suite)

Cas no 1773

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de l'Indonésie
présentée par
- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
- la Confédération mondiale du travail (CMT)
- le Serikat Buruh Sejahtera (SBSI) et
- l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation,
de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac
et des branches connexes (UITA)

Allégations: déni de reconnaissance d'un syndicat; ingérence
des pouvoirs publics dans les activités syndicales; harcèlement
et détention de syndicalistes

570. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de mars 1995, mars et novembre 1996, novembre 1997 et mai 1998. [Voir 297e rapport, paragr. 484 à 537, approuvé par le Conseil d'administration à sa 262e session (mars-avril 1995); 302e rapport, paragr. 447 à 479, approuvé par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996); 305e rapport, paragr. 327 à 371, approuvé par le Conseil d'administration à sa 267e session (novembre 1996); 308e rapport, paragr. 404 à 450, approuvé par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997); et 310e rapport, paragr. 432 à 473, approuvé par le Conseil d'administration à sa 272e session (juin 1998), respectivement où il a présenté des conclusions intérimaires.]

571. Le Serikat Buruh Sejahtera (SBSI) a présenté des informations supplémentaires dans une communication du 26 août 1998. La Confédération mondiale du travail (CMT) a fait de même dans une communication du 26 février 1999.

572. Le gouvernement a adressé ses observations dans des communications datées des 28 janvier et 11 mai 1999.

573. L'Indonésie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, en juin 1998. Elle a aussi ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

574. Lors de son précédent examen du cas, le comité était saisi de très graves allégations de violation continue des droits syndicaux en Indonésie, concernant le déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, l'ingérence persistante des autorités publiques, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales, et des restrictions à la négociation collective et à l'exercice du droit de grève. D'autres graves allégations portaient sur le meurtre, la disparition, l'arrestation et l'emprisonnement d'un certain nombre de dirigeants syndicaux et de travailleurs.

575. Le comité avait noté que les autorités indonésiennes avaient pris certaines mesures positives concernant la liberté syndicale. Cependant, la gravité des nouvelles allégations l'avait conduit à estimer que la situation générale des travailleurs en Indonésie continuait de se caractériser, en droit et en pratique, par de graves atteintes aux droits de l'homme et aux droits syndicaux ainsi qu'aux principes de la liberté syndicale.

576. A sa session de juin 1998, à la lumière des conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration a approuvé les recommandations suivantes:

B. Informations complémentaires fournies par les plaignants

577. Dans sa communication du 26 août 1998, le SBSI fournit des informations complémentaires sur les allégations suivantes: i) les violences physiques dont MM. Aryanto et Rozali ont fait l'objet; ii) les motifs de l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) le contenu du tract distribué par M. Farid Mu'adz concernant le droit de grève; iv) les actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo qui auraient été contraints de renoncer à leur affiliation au SBSI; v) les actes de vandalisme commis contre l'enseigne du SBSI à Medan et à Binjai. Le SBSI indique que les cas précités ont été réglés grâce aux vastes réformes qui ont démarré en juin 1998 en Indonésie. Il en résulte que les allégations y relatives n'ont plus de raison d'être.

578. Dans sa communication du 26 février 1999, la CMT déclare que, depuis la libération de Muchtar Pakpahan et d'autres dirigeants du SBSI, en mai 1998, la situation des droits syndicaux s'est un peu améliorée en Indonésie. Toutefois, la CMT et son syndicat affilié, le SBSI, demeurent préoccupés par la violation de ces droits dans certains domaines, notamment: l'ingérence permanente des militaires dans les conflits du travail, la lenteur de la procédure d'enregistrement, la difficulté pour les fonctionnaires d'exercer leurs droits et le maintien en détention de Dita Sari.

579. La CMT affirme qu'en dépit de la libération des dirigeants syndicaux majeurs, de la ratification de la convention de l'OIT no 87 et de la démocratisation en cours l'ingérence des militaires dans les relations professionnelles n'a pas changé, comme le montrent les exemples ci-après. Un conflit du travail a éclaté en février 1999 à Bekasi (Java-Ouest) dans l'établissement PT Indosentral Megah Garmen. Cette entreprise a fermé et la direction ne voulait pas verser les indemnités de licenciement prévues par la législation indonésienne. Pour régler le problème, il a été décidé de tenir des négociations, auxquelles les militaires ont été invités à participer, aux côtés de la direction et des travailleurs. Le climat d'intimidation créé par la présence des militaires n'a pas permis de dégager de solution. Les négociations ayant échoué, les travailleurs ont décidé de faire grève et l'armée est de nouveau intervenue. Par ailleurs, en février 1999, la direction de l'entreprise PT Gajah Tunggal (Tangerang, Java-Ouest) a essayé de restreindre le droit des travailleurs de s'organiser sous l'égide du SBSI. Des syndicalistes qui ont déclaré être membres de ce syndicat ont été licenciés. La direction a ensuite nommé le directeur de la production à la tête du FSPSI (syndicat contrôlé par le gouvernement). Ont ensuite eu lieu entre la délégation du SBSI et la direction des négociations, auxquels des agents civils chargés de renseignement militaire ont été invités à participer. La CMT estime que la participation de militaires aux relations professionnelles est contraire aux principes de la liberté syndicale et fait de simples conflits du travail des problèmes de sécurité nationale. Qui plus est, la participation et la seule présence de militaires aux discussions entre partenaires sociaux sont assimilables à une ingérence dans les affaires syndicales et à une tentative d'intimidation de syndicalistes dans l'exercice légitime de leurs fonctions.

580. En ce qui concerne la procédure d'enregistrement des syndicats, la CMT indique que des progrès ont été réalisés au niveau national. Toutefois, tant la CMT que le SBSI se déclarent préoccupés par la lenteur de la procédure et de la façon dont les syndicats locaux sont enregistrés au niveau de l'établissement. En ce qui concerne le délai d'enregistrement, les syndicats locaux affiliés au SBSI ont effectivement constaté que la procédure est excessivement longue et pleine d'embûches. Conformément au décret ministériel no 05/1998, les autorités indonésiennes sont censées répondre aux demandes d'enregistrement dans les quatorze jours suivant leur dépôt. Ce délai n'a pas été respecté pour les syndicats locaux du SBSI, dont les demandes d'enregistrement sont, pour certains, encore en attente. Ainsi, à Bandar Lampung (Sumatra-Sud), la question vient seulement d'être réglée. Les demandes concernaient notamment l'entreprise PT Sinar Laut (société de transport routier) et PT Andatu Lestari Plywood (fabricant de contreplaqué à Bandar Lampung). Les services du ministère de la Main-d'œuvre de la région de Lampung non seulement n'ont pas respecté le délai de quatorze jours, mais ont fait des difficultés (refus notamment) au SBSI avant de donner leur autorisation. A Jawa Timur (Java-Est), le SBSI est toujours en pourparlers pour obtenir l'enregistrement officiel de branches locales. Ainsi, l'entreprise PT Surya Amam Tunggal de Sidoarjo (exportation de crevettes) continue de refuser aux travailleurs le droit de s'affilier au SBSI au motif que la direction doit au préalable donner son consentement. L'affaire n'est toujours pas réglée. Tant le ministère de la Main-d'œuvre que les directeurs locaux des établissements font toutes sortes de difficultés au SBSI pour l'empêcher d'obtenir l'enregistrement des sections locales.

581. Par ailleurs, la CMT manifeste son inquiétude en ce qui concerne la législation et la pratique relatives à l'exercice du droit d'organisation des fonctionnaires. Après avoir ratifié la convention no 87, le gouvernement a déclaré que les fonctionnaires n'étaient plus obligés d'être membres de la KORPRI, l'organisation officielle des fonctionnaires, et qu'ils étaient donc libres de s'affilier à l'organisation de leur choix. Toutefois, la législation applicable à cette catégorie, toujours en vigueur, ne leur reconnaît pas le droit d'organisation, de sorte qu'ils ne savent pas quels sont leurs droits, et que ce qui est plus grave, dans plusieurs régions, ils ne peuvent se syndiquer. C'est le cas par exemple à Sidoarjo (Java-Est) où aucun syndicat d'enseignants n'est autorisé à fonctionner dans les écoles. En droit comme en pratique, les fonctionnaires, y compris les enseignants de l'école publique, ne peuvent s'affilier aux syndicats de leur choix. Or, comme tous les autres travailleurs, les fonctionnaires devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier sans autorisation préalable.

582. En conclusion, la CMT attire l'attention sur le fait que Mme Dita Sari est toujours détenue. La libération sans condition de tous les dirigeants syndicaux est nécessaire si l'Indonésie veut se conformer pleinement aux obligations qui lui incombent vis-à-vis de l'OIT.

C. Nouvelle réponse du gouvernement

Information sur la situation générale
des travailleurs et de leurs organisations
en Indonésie en ce qui concerne la liberté syndicale
(310e rapport, paragraphe 473 a))

583. Dans sa communication du 28 janvier 1999, le gouvernement déclare tout d'abord que, pour mieux permettre aux travailleurs d'exercer leur droit de s'organiser, il a ratifié la convention no 87 en juin 1998. Qui plus est, à la demande de la Commission de l'application des normes de la Conférence, une mission de contacts directs a eu lieu en Indonésie en août 1998 afin d'aider le gouvernement à mettre sa législation du travail en conformité avec les conventions nos 87 et 98. Il a été décidé, à l'issue de cette mission, de reporter à octobre 2000 l'entrée en vigueur de la loi no 25 de 1997 sur la main-d'œuvre, qui aurait dû prendre effet le 1er octobre 1998. Le gouvernement souligne que, conformément aux recommandations qui figurent dans le rapport de la mission de contacts directs, cette loi est en cours de révision et deux projets de loi, l'un sur les syndicats, l'autre sur le règlement des conflits du travail sont en cours d'élaboration conformément aux conventions nos 87 et 98 en consultation avec les partenaires sociaux et avec l'assistance technique du BIT. Concrètement, le gouvernement déclare que, le 16 juin 1998, le ministre de la Main-d'œuvre a adressé une lettre au ministre d'Etat pour la Coordination de la sécurité et les Affaires politiques lui demandant de faire le nécessaire pour que les militaires n'interviennent plus dans les conflits du travail. Par la suite, le ministre de la Coordination a envoyé des instructions aux organismes concernés dans le pays visant à ce que les militaires s'abstiennent d'intervenir dans les négociations collectives et le règlement des conflits du travail. Enfin, le gouvernement souligne que le processus de réforme (reformasi) en cours depuis juin 1998 dans toutes les sphères d'activité en Indonésie a débouché sur la création depuis décembre 1998 de 11 nouveaux syndicats, qui s'ajoutent au FSPSI et au SBSI. Ces syndicats, qui déploient leurs activités librement, sans ingérence de l'Etat, sont les suivants: 1) Fédération des syndicats indonésiens (Federasi Serikat Pekerja Seluruh Indonesia (FSPSI)); 2) Fédération des syndicats indonésiens de la Réforme (FSPSI Reformasi)); 3) Syndicat indonésien de la prospérité (Serikat Buruh Sejahtera Indonesia (SBSI)); 4) Fédération des syndicats démocratiques de travailleurs (Federasi Serikat Buruh Demokrasi Seluruh Indonesia (FSBDSI)); 5) Syndicat musulman (Serkat Buruh Muslimin indonésien (SARBUMUSI)); 6) Fédération des syndicats libres (Gabungan Serikat Pekarja Merdeka Indonesia (GASPERMINDO)); 7) Fraternité indonésienne des travailleurs musulmans (Persaudaraan Pekerja Muslimin Indonesia (PPMI)); 8) Fédération des syndicats de travailleurs des banques et établissements financiers (Federasi Organisasi Pekerja Keuangan dan Perbankan Indonesia (FOKUBA)); 9) Syndicat des travailleurs Marhaen (Kesatuan Buruh Marhaen (KBM)); 10) Syndicat national des travailleurs (Kesatuan Pekerja Nasional Indonesia (KPNI)); 11) Syndicat des travailleurs indonésiens (Kesatuan Buruh Kebangsaan Indonesia (KBKI)); 12) Syndicat des journalistes (Serikat Pewarta, Serikat Pekerja Kewartawanan Indonesia); 13) Syndicat indonésien des travailleurs du pétrole et de l'énergie (Serikat Pekerja Minyak dan Energi Indonesia).

Obstacles législatifs empêchant les travailleurs
de constituer des organisations de leur choix
(310e rapport, paragraphe 473 b))

584. Le gouvernement indique que, conformément à l'esprit de la réforme, les règlements ministériels nos 03/MEN/1993 et O1/MEN/1994 - relatifs à l'enregistrement des syndicats qui faisaient l'objet de précédents commentaires du comité - ont été abrogés et remplacés par le règlement ministériel PER-05/ MEN/1998 du 27 mai 1998 sur l'enregistrement des organisations de travailleurs. Ce règlement prévoit que les fédérations peuvent faire enregistrer leurs sections aux niveaux de l'établissement, du district ou de la province, simplement en présentant les statuts du syndicat ainsi que la liste de ses dirigeants. Il ne contient aucune exigence en ce qui concerne le nombre des affiliés ou des sections. Par ailleurs, le syndicat n'est plus tenu de fournir la liste des membres du syndicat à l'employeur. L'enregistrement s'en trouve considérablement facilité comme l'illustre le fait que désormais 13 syndicats sont enregistrés et exercent librement leurs activités.

Enregistrement du SBSI
(310e rapport, paragraphe 473 c))

585. Le gouvernement explique que le SBSI, de même que 12 autres syndicats, ont été enregistrés au niveau national. Par ailleurs, le SBSI compte 22 bureaux de branches enregistrés dans sept provinces.

Situation de l'entreprise Southern Cross
Textile Industry (310e rapport, paragraphe 473 d))

586. En ce qui concerne les allégations de discrimination antisyndicale à l'encontre de travailleurs de la Southern Cross Textile Industry (SCTI) qui se sont avérés être des membres du SBSI, le gouvernement indique que ceux qui ont été licenciés en avril 1993 ont reçu de l'entreprise des indemnités de licenciement allant de 3 859 000 à 5 millions de rupiahs.

Information sur la situation des travailleurs
qui ont participé aux événements d'avril 1994
à Medan (310e rapport, paragraphe 473 e))

587. Le gouvernement indique que MM. Muhamad Ali (PT Perindoni) et Mulyadi (PT Ganda Seribu), ainsi que MM. Icang et Suryandi, tous membres du SBSI, qui avaient été arrêtés et emprisonnés à la suite des événements d'avril 1994 à Medan, ont été libérés.

Enquête officielle sur le décès de Mme Marsinah
(310e rapport, paragraphe 473 f))

588. Le gouvernement réitère qu'il poursuit l'enquête sur le cas de Mme Marsinah, militante syndicale, décédée dans la province de Java-Est en mai 1993 à la suite de sa participation à une grève. Toutefois, il n'a toujours pas pu élucider les circonstances de sa mort. Des groupes de travail considérés comme spécialisés et indépendants ont été constitués à cette fin, mais leur travail n'a débouché encore sur aucun résultat. L'enquête menée par la Commission indonésienne des droits de l'homme n'a pas pu non plus faire la lumière sur ce cas.

Information relative à M. Muchtar Pakpahan
(310e rapport, paragraphe 473 g))

589. Le gouvernement indique que M. Muchtar Pakpahan a été amnistié en vertu du décret présidentiel no 80 du 25 mai 1998 et que les accusations portées contre lui en rapport avec les événements d'avril 1994 à Medan et ceux de juillet 1996 à Jakarta ont été retirées. M. Pakpahan, qui est président du SBSI, exerce librement ses activités syndicales légitimes comme il ressort du fait qu'il a participé à la Conférence internationale du Travail de juin 1998, à Genève, dans la délégation officielle de l'Indonésie à la Conférence.

Informations sur l'arrestation et la détention
de dirigeants du SBSI à la suite des événements
de juillet 1996 à Jakarta
(310e rapport, paragraphe 473 h))

590. Le gouvernement affirme que tous les dirigeants du SBSI qui avaient été arrêtés et détenus après les événements de juin 1996 à Jakarta ont été libérés, y compris les neuf membres du bureau de la branche de Riau emprisonnés au début d'août 1996, ainsi que M. Rekson Silaban, directeur du Département international du SBSI, qui a assisté aux 85e et 86e sessions de la Conférence internationale du Travail (Genève, juin 1997 et 1998). Qui plus est, tous les chefs d'accusation retenus contre ces personnes ont été abandonnés.

Détention de Mme Dita Sari et de M. Coen Pontoh
à la suite d'une grève (310e rapport, paragraphe 437 i))

591. Le gouvernement déclare que M. Coen Pontoh a été libéré en vertu du décret présidentiel no 105 du 23 juillet 1998 mais que Mme Dita Sari est encore en prison. Elle a été condamnée à quatre ans et demi d'emprisonnement le 22 avril 1997 et son recours auprès de la Cour suprême a été rejeté en novembre 1997. Le ministre de la Main-d'œuvre a adressé trois lettres au ministre de la Justice, en date des 31 août, 23 septembre et 25 novembre 1998, demandant sa libération. Le 18 décembre 1998, le ministre de la Main-d'œuvre a également adressé une lettre au Président lui demandant de faire libérer immédiatement Mme Dita Sari. Il a été informé qu'une proposition de mise en liberté conditionnelle lui a été faite mais qu'elle l'a refusée.

Licenciement par l'entreprise PT Pelangi Selaras
Internusa de 19 travailleurs contractuels
(310e rapport, paragraphe 473 j))

592. Le gouvernement explique que les dix-neuf travailleurs contractuels de l'entreprise PT Pelangi Selaras Internusa, qui ont été licenciés à Medan en juillet 1997, l'ont été non parce qu'ils étaient membres du SBSI mais parce qu'ils ne respectaient pas leur contrat de travail. La direction de l'entreprise a soumis à la Commission du règlement des conflits du travail une proposition visant à licencier ces travailleurs. Le 7 octobre 1997, celle-ci a décidé qu'il fallait les licencier sans les indemniser. Toutefois, à la demande des travailleurs, la direction, en signe de bonne volonté, leur a versé des indemnités comme a pu le constater le médiateur du bureau du ministère de la Main-d'œuvre à Medan. Les sommes suivantes ont été versées: 1) Mme Meri: 952 860 Rp; 2) Mme Tamiana: 794 560 Rp; 3) Mme Susi: 636 010 Rp; 4) Mme Sri Susilayani: 636 010 Rp; 5) Mme Yurnalis: 636 010 Rp; 6) Mme Kartini: 636 010 Rp; 7) Mme Lilis Sulistianingsih: 258 550 Rp; 8) Mme Wahyu NST: 258 550 Rp; 9) Mme Maini: 258 550 Rp; 10) Mme Kartika: 258 550 Rp; 11) Mme Asroni: 258 550 Rp; 12) Mme Ati Muliani: 258 550 Rp; 13) Mme Irma: 258 550 Rp; 14) Mme Sara: 258 550 Rp; 15) M me Sri Wahyuni: 258 550 Rp; 16) Mme Ari Masniari: 477 460 Rp; 17) M me Ima: 477 460 Rp; 18) Mme Marianti: 477 460 Rp; 19) Mme Mia: 477 460 Rp.

Détention alléguée de deux responsables
de l'UITA en septembre 1997
(310e rapport, paragraphe 473 k) i))

593. Le gouvernement affirme que la réunion organisée le 19 septembre 1997 par le SBSI était illégale car celui-ci n'en avait pas informé les forces de sécurité locales. Les deux responsables de l'UITA qui participaient à cette réunion ont été emmenés au poste de police où ils ont été interrogés puis enjoints de quitter le pays au motif de leurs activités illégales.

Arrestation et détention alléguées
de huit dirigeants du SBSI en mars 1998
(310e rapport, paragraphe 473 k) i))

594. Le gouvernement répond que huit dirigeants et militants du SBSI sont responsables d'avoir dirigé des manifestations non autorisées ou des réunions illégales au début de mars 1998. Il s'agit des personnes suivantes: Mme Farah Diba (directrice du Département du travail pour les femmes et les enfants); M. Yudi Rahmat (vice-président du SBSI); M. Yudi Hermanto (chef du bureau de branche du SBSI à Padang); M. Sukirman (membre du bureau de branche du SBSI à Lampung); M. Sanusi (membre du bureau de branche du SBSI à Tanjung Priok, Jakarta-Nord); MM. Seno, Mahmud et Sumantri (activistes du bureau de branche du SBSI à Serang). Ils ont été interrogés par la police puis libérés peu de temps après. Aucun d'eux n'a été emprisonné.

Nouvelles allégations de la CMT
en date du 26 février 1999

595. Dans sa communication du 11 mai 1999, le gouvernement répond aux diverses questions soulevées dans les nouvelles allégations de la CMT concernant l'ingérence continuelle des forces armées dans les différends du travail, les longs délais dans la procédure d'enregistrement des syndicats, ainsi que les droits syndicaux des fonctionnaires.

596. S'agissant des allégations concernant l'intervention des militaires durant un conflit de travail en février 1999 dans l'entreprise PT Indosentral Megah Garmen à Bekasi (Java-Ouest), le gouvernement déclare que le bureau local du ministère de la Main-d'œuvre a été informé que cette société avait cessé ses activités. Le 27 janvier 1999, des agents du bureau local du ministère ont invité les dirigeants de l'entreprise à payer aux travailleurs les salaires et diverses allocations dus, ainsi que leur indemnité de cessation d'emploi. Les dirigeants de l'entreprise et la section locale du SBSI Garteks ont convenu le 10 février 1999 qu'une indemnité de cessation d'emploi devrait être versée aux travailleurs licenciés, mais la direction de la société a déclaré par la suite que cette dernière n'avait pas assez de fonds pour la leur payer. La question fut donc renvoyée au Conseil du règlement des différends du travail qui, par décision du 11 février 1999, a condamné l'entreprise à payer l'indemnité de cessation d'emploi aux travailleurs. Celle-ci étant toujours incapable de payer, le SBSI a demandé au Tribunal du district de Bekasi d'ordonner l'exécution forcée de la décision du conseil. La direction de l'entreprise et les travailleurs ont repris les négociations le 8 mars 1999 pour aboutir le 18 mars à un accord stipulant que l'édifice appartenant à PT Indosentral Megah Garmen serait loué et les loyers affectés au paiement des indemnités de cessation d'emploi. Le gouvernement souligne toutefois que les militaires ne sont pas intervenus dans le processus de règlement du différend entre la société et les travailleurs, pas plus qu'ils ne l'ont fait dans l'entreprise PT Gajah Tunggal de Tangerang (Java-Ouest), où des travailleurs membres du SBSI auraient été licenciés en février 1999. Ces licenciements n'avaient aucun rapport avec leur affiliation syndicale, mais résultaient plutôt de graves actes d'indiscipline tels que l'introduction de feux d'artifice et d'explosifs dans l'établissement et le refus de mutations ou de rotations de poste exigées par la direction.

597. Le gouvernement traite ensuite des allégations de la CMT voulant que, même si des progrès ont été réalisés en matière d'enregistrement des syndicats indépendants au niveau national, l'enregistrement des syndicats locaux au niveau des entreprises reste excessivement long et compliqué. S'agissant de l'enregistrement des sections locales du SBSI à Bandar Lumpung (Sumatra Sud), le gouvernement indique que le premier syndicat constitué dans les sociétés PT Sinar Laut et PT Andatu Lestari Plywood fut le Syndicat indonésien des travailleurs du bois et de la foresterie (KAHUT SPSI). Le SBSI souhaitant également obtenir son accréditation dans ces entreprises, le bureau régional du ministère de la Main-d'œuvre lui a demandé de fournir une liste de ses membres, comme prévu par le règlement ministériel no 05/1998, afin de lui attribuer un numéro d'enregistrement. Toutefois, la section locale du SBSI s'y est refusée, ce qui explique les délais d'enregistrement. Le ministre de la Main-d'œuvre a néanmoins ordonné au bureau régional d'accepter la demande d'enregistrement de la section locale du SBSI, ce qui fut fait par la suite. S'agissant de l'enregistrement de la section locale du SBSI dans la société PT Surya Amam Tungal à Sidoarjo (Java-Est), le gouvernement explique que le syndicat local a demandé son enregistrement le 16 juillet 1998 au bureau du ministère de la Main-d'œuvre à Sidoarjo. Bien que ce bureau local ait envoyé le numéro d'enregistrement par courrier peu après le dépôt de la demande, les dirigeants de la section locale du SBSI ont informé le ministère qu'à la fin du mois d'août 1998 ils n'avaient toujours pas reçu ce numéro; le bureau local du ministère leur a donc émis un nouveau numéro que le syndicat a reçu le 9 septembre 1998. Le retard d'enregistrement dans ce cas résulte donc d'une mauvaise communication entre les parties. Le gouvernement souligne que la section locale du SBSI est maintenant établie dans l'entreprise PT Surya Amam Tunggal, où elle coexiste avec la section locale du SPSI. Le bureau local du ministère a tenu plusieurs séances d'information afin d'assurer que l'employeur n'entrave pas les activités des syndicats dans l'entreprise.

598. S'agissant du droit d'association des fonctionnaires, le gouvernement reconnaît que l'association des enseignants (PGRI) qui s'est constituée en 1993 à Sidoarjo (Java-Est) n'est toujours pas enregistrée en tant que syndicat. Toutefois, depuis la ratification de la convention no 87, les fonctionnaires sont maintenant libres, dans la pratique, de s'affilier à d'autres organisations que la KORPRI qui, de toute façon, n'est plus contrôlée par le gouvernement. Par conséquent, le ministère de l'Intérieur, qui supervise l'administration et le fonctionnement de la fonction publique, ainsi que le ministère du Travail continuent d'explorer, avec l'assistance technique du BIT, les mesures permettant d'assurer que la législation donne aux fonctionnaires, y compris les enseignants, le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier.

Remarques finales

599. Le gouvernement affirme qu'au cours de la période de réforme que connaît l'Indonésie, l'application des droits de l'homme et en particulier la protection des droits des travailleurs bénéficient d'une attention particulière. Tous les militants syndicaux, à l'exception de Mme Dira Sari, ont été libérés et les chefs d'accusation retenus contre eux ont été abandonnés. La liberté syndicale et la liberté d'expression ainsi que le droit d'organiser des réunions sont pleinement garantis, conformément à l'esprit de réforme. Enfin, ainsi qu'il a été mentionné ci-dessus, la loi no 25 de 1997 sur la main-d'œuvre est en cours de révision et deux projets de loi, l'un sur les syndicats, l'autre sur le règlement des conflits du travail, sont élaborés avec l'assistance technique du BIT.

D. Conclusions du comité

600. Le comité note que ce cas, qui a déjà été examiné à cinq reprises, traite de graves allégations d'atteintes aux droits syndicaux en Indonésie, notamment de l'arrêt et de l'emprisonnement de dirigeants et militants syndicaux, du déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, d'ingérence des autorités, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales, de divers actes de discrimination antisyndicale, y compris des licenciements et des restrictions à la grève et à la négociation collective.

601. Toutefois, le comité observe que, depuis son plus récent examen du cas en mai 1998 (310e rapport, paragr. 432 à 473), le gouvernement a pris une série de mesures qui ont contribué à améliorer la situation syndicale en Indonésie. Le comité note en particulier que le gouvernement a ratifié la convention no 87 en juin 1998 et qu'il a reçu une mission de contacts directs du BIT en août 1998; cette mission était chargée d'aider le gouvernement à veiller à ce que la législation du travail indonésienne soit mise en conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le comité note par ailleurs que, conformément aux recommandations énoncées dans le rapport de la mission, le gouvernement a entrepris de réviser sa législation du travail, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l'assistance technique du BIT. Dans les faits, tous les dirigeants et militants du SBSI ont été libérés de prison et les militaires ont reçu à tous les niveaux l'instruction de s'abstenir d'intervenir dans les conflits du travail. Le comité prend note avec intérêt de cette évolution et considère qu'elle représente une avancée significative sur la voie de la liberté syndicale en Indonésie. Il veut espérer que ce progrès se poursuivra de sorte que le système de relations professionnelles en vigueur en Indonésie puisse devenir pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale. Le comité propose de revoir point par point les différentes questions soulevées au cours de son précédent examen du cas à la lumière des événements récemment survenus dans le pays et qui se reflètent dans la réponse du gouvernement.

* * *

602. La dernière fois qu'il a examiné ce cas, le comité avait conclu que le règlement ministériel PER-03/MEN/1993, qui impose une situation de monopole syndical en subordonnant l'enregistrement d'un syndicat à l'approbation du SBSI, comprend des prescriptions si draconiennes qu'elles constituent une limitation majeure de la liberté syndicale et de la négociation collective. Le comité avait donc instamment demandé au gouvernement d'éliminer ce type d'obstacles (notamment l'article 2 a), b) et c) du règlement) afin de garantir que le droit des travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement soit pleinement reconnu en droit et en pratique.

603. Le comité note avec intérêt que le règlement ministériel PER-03/MEN/1993 a été abrogé et remplacé par le règlement ministériel PER-05/MEN/1998 du 27 mai 1998 sur l'enregistrement des organisations de travailleurs. L'article 2 de ce règlement prévoit que les syndicats doivent enregistrer leurs sections locales aux niveaux de l'établissement, du district ou de la province mais il n'énonce pas d'obligations concernant le nombre de membres ou de sections locales qu'une organisation doit avoir pour être enregistrée. Selon le gouvernement, ce règlement a facilité l'enregistrement des syndicats comme il ressort du fait que 13 syndicats ont été enregistrés depuis décembre 1998. Le comité note par ailleurs que, conformément aux recommandations faites par la mission de contacts directs qui s'est rendue en Indonésie en août 1998, la loi no 25 sur la main-d'œuvre (1997) - dont l'entrée en vigueur a été reportée à octobre 2000 - est en cours de révision et que deux projets de loi, l'un sur les syndicats, l'autre sur le règlement des conflits du travail, sont élaborés en conformité avec les conventions nos 87 et 98 et avec l'assistance technique du BIT. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ces aspects du cas.

604. En ce qui concerne le cas spécifique du SBSI qui cherche à obtenir son enregistrement depuis 1993, le comité a instamment prié le gouvernement à de précédentes occasions de prendre les mesures nécessaires pour que le SBSI soit enregistré sans délai de façon à ce qu'il puisse exercer ses activités syndicales légitimes. Le comité se félicite de ce que le SBSI a enfin obtenu l'enregistrement au niveau national. Il observe par ailleurs qu'il compte 22 sections locales enregistrées dans sept provinces.

605. En ce qui concerne la situation de M. Muchtar Pakpahan, le comité a instamment prié le gouvernement, au cours du précédent examen de ce cas, d'abandonner les poursuites engagées contre M. Pakpahan à la suite des événements d'avril 1994 à Medan, ainsi que de ceux de juillet 1996 à Jakarta, et de s'assurer qu'il pouvait exercer librement ses activités syndicales légitimes. Le comité note avec intérêt que, selon le gouvernement, M. Pakpahan a bénéficié de l'amnistie présidentielle le 25 mai 1998, à la suite de quoi toutes les charges retenues contre lui en relation avec les événements d'avril 1994 à Medan et de juillet 1996 à Jakarta ont été abandonnées. Qui plus est, en sa qualité de président du SBSI, M. Pakpahan exerce librement ses activités syndicales légitimes.

606. Au cours du précédent examen de ce cas, le comité avait instamment prié le gouvernement de veiller à ce que les seize travailleurs membres du SBSI qui avaient été licenciés de l'entreprise Southern Cross Textile Industry (SCTI) en avril 1993 soient réintégrés à leur poste et à ce qu'ils soient dûment indemnisés. [Voir 310e rapport, paragr. 460.] Le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle ces travailleurs ont reçu des indemnités allant de 3 859 000 Rp à 5 000 000 Rp.

607. En ce qui concerne le sort de MM. Muhamad Ali, Mulyadi, Icang et Suryandi, responsables du SBSI qui avaient été arrêtés et emprisonnés à la suite des événements d'avril 1994 survenus à Medan, le comité note que, selon le gouvernement, ils ont été libérés. Il note par ailleurs que tous les responsables du SBSI qui avaient été arrêtés, emprisonnés ou interrogés par la police à la suite des événements de juillet 1996 à Jakarta ont aussi été libérés. Le comité souhaite néanmoins rappeler que le harcèlement, l'arrestation ou l'emprisonnement de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à leurs activités de défense des droits syndicaux sont contraires aux principes de la liberté syndicale.

608. En ce qui concerne l'enquête sur l'homicide, en mai 1993, de Mme Marsinah, une militante syndicale, le comité déplore profondément que les circonstances de sa mort n'aient toujours pas été élucidées par l'enquête que le gouvernement mène depuis juin 1995. A cet égard, le comité attire l'attention du gouvernement sur le fait que l'absence de jugement contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable à l'exercice des activités syndicales. Qui plus est, l'assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l'ouverture d'enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles ils se sont produits, et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d'empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 51 et 55.] Notant avec regret que l'enquête diligentée par le gouvernement n'a pas à ce jour permis de jeter la moindre lumière sur cette affaire, le comité demande à nouveau au gouvernement d'ouvrir sans délai une enquête judiciaire indépendante sur l'homicide, commis il y a plus de six ans, sur la personne de Mme Marsinah, de façon à identifier et à punir les coupables. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue de la procédure.

609. Au cours de son précédent examen du cas, le comité avait instamment prié le gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle Mme Dita Sari et M. Coen Pontoh, dirigeants des syndicats indépendants Pusat Perjuangan Buruh Indonesia (PPBI) et Serikat Tani Nasional (STN), auraient été condamnés à de lourdes peines d'emprisonnement pour avoir participé à un mouvement de grève dans la ville de Surabaya le 8 juillet 1996. Le comité rappelle que cette grève était motivée par des revendications ouvrières typiques, ainsi que par la demande que les lois très strictes sur la sécurité soient abrogées et que les militaires cessent d'intervenir dans les conflits du travail. Toutefois, la police et l'armée sont intervenues et ont violemment mis fin à la grève; à la suite de quoi, Mme Dita Sari et M. Coen Pontoh ont été arrêtés et emprisonnés. Le comité note que, selon le gouvernement, M. Coen Pontoh a été relâché le 23 juillet 1998 après avoir bénéficié de l'amnistie présidentielle, mais que Mme Dita Sari est toujours en prison. Il note avec un profond regret qu'elle a été condamnée le 22 avril 1997 à quatre ans et demi d'emprisonnement. Le comité tient à souligner que la détention de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales, en particulier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 71.] Le comité insiste donc pour que Mme Dita Sari soit immédiatement libérée sans condition. A cet égard, le comité se félicite de ce que le ministre de la Main-d'œuvre ait écrit au ministre de la Justice à trois occasions ainsi qu'au Président pour demander la libération sans délai de Mme Dita Sari, et il espère que les autorités compétentes donneront effet à sa requête, conformément aux obligations internationales que le gouvernement a contractées en ratifiant la convention no 87.

610. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'entreprise PT Pelangi Selaras Internusa Medan aurait, le 11 juillet 1997, licencié 19 travailleurs contractuels en raison de leur appartenance au SBSI, le gouvernement répond que l'entreprise avait déjà mis fin à leur contrat. Toutefois, ceux-ci n'ont pas été licenciés en raison de leur appartenance au SBSI, mais parce qu'ils n'avaient pas respecté leurs contrats d'emploi. Tout en notant que ces dix-neuf travailleurs ont accepté l'indemnisation versée par l'entreprise, le comité souligne qu'il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contres les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant, en pratique, aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 707.]

611. En ce qui concerne la détention alléguée de deux responsables de l'UITA en septembre 1997, le gouvernement affirme que la réunion organisée par le SBSI le 19 septembre 1997 était illégale et que les deux responsables de l'UITA qui y participaient ont été amenés au poste de police, interrogés puis enjoints de quitter le pays au motif de leurs activités illégales. Rappelant que les deux responsables en question ne faisaient que participer au deuxième congrès du SBSI, dont la Fédération pour l'hôtellerie-restauration (Makanan, Minuman, Periwisat) est affiliée à l'UITA, le comité attire l'attention du gouvernement sur les principes selon lesquels la visite à des organisations syndicales nationales affiliées et la participation à leurs congrès sont des activités normales des organisations internationales de travailleurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 638.] Dans ces circonstances, le comité estime que les actions des responsables de l'UITA ne peuvent être qualifiées d'illégales.

612. En ce qui concerne l'arrestation et l'emprisonnement allégués de huit dirigeants et militants du SBSI en mars 1998, le gouvernement affirme que ces personnes (Mme Farah Diba, M. Yudi Rahmat, M. Yudi Hermanto, M. Sukirman, M. Sanusi, M. Seno, M. Mahmud et M. Sumantri) sont responsables d'avoir dirigé des manifestations non autorisées ou des réunions illégales au début de mars 1998. A cet égard, le comité rappelle qu'il ne faut pas que l'autorisation de tenir des réunions et manifestations publiques, ce qui constitue un droit syndical important, soit arbitrairement refusée. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 139.] Le gouvernement explique en outre que ces huit dirigeants et militants ont été interrogés par la police, puis tous libérés peu de temps après. Le comité souligne que les mesures privatives de liberté prises contre les dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 77.] Le comité prend néanmoins bonne note de ce que, ainsi que le déclare le gouvernement, en cette période de réforme qui est en cours en Indonésie, un soin particulier est accordé à la protection des droits des travailleurs et la liberté d'association et d'expression ainsi que le droit d'organiser des réunions sont garantis conformément à l'esprit de réforme.

613. En ce qui concerne les violations alléguées de la liberté syndicale dont le SBSI fait état dans sa communication du 11 juin 1996, le comité a demandé à l'organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires compte tenu des divergences importantes qui existent entre sa version et celle du gouvernement. Le comité note que le SBSI a envoyé un complément d'information sur les allégations suivantes: i) violence exercée contre MM. Aryanto et Rozali; ii) motifs justifiant l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) contenu du tract concernant le droit de grève distribué par M. Farid Mu'adz; iv) actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo, qui auraient été contraints de renoncer à leur affiliation au SBSI; v) les actes de vandalisme commis contre les bureaux du SBSI à Medan et à Binjai. Le comité prend note de la déclaration du SBSI selon laquelle ces questions ont été réglées grâce au vaste mouvement de réforme lancé en Indonésie en juin 1998, et les allégations susmentionnées n'ont plus de raison d'être. Par conséquent, le comité considère que cet aspect du cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.

614. En ce qui concerne les nouvelles allégations de la CMT sur l'intervention des militaires durant des conflits de travail dans les établissements PT Indosentral Megah Garmen et PT Gajah Tunggal, respectivement à Bekasi et Tangerang (Java-Ouest), le comité note que le gouvernement ne conteste pas que des différends mettant en cause le SBSI sont survenus dans les deux entreprises en février 1999, mais, en revanche, qu'il nie formellement toute intervention des militaires dans ces conflits. Etant donné la contradiction existant entre ces deux assertions, le comité rappelle qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et qu'il convient d'adopter toutes les mesures adéquates pour garantir que, quelle que soit la tendance syndicale, les droits syndicaux puissent s'exercer normalement dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et dans un climat exempt de violence, de pressions, de crainte et de menaces de tous ordres. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 35-36.]

615. S'agissant des nouvelles allégations de la CMT concernant la complexité et les délais excessifs de la procédure d'enregistrement des syndicats locaux au niveau des entreprises, le comité note que, selon le gouvernement, des délais sont effectivement survenus lors de l'enregistrement des sections locales du SBSI dans les sociétés PT Sinar Laut et PT Andatu Lestari Plywood à Bandar Lumpung (Sumatra Sud). Toutefois, cela résultait du fait que la section locale du SBSI a refusé de se plier aux exigences du règlement ministériel no 05/98. Le gouvernement souligne que la section locale du SBSI fut néanmoins enregistrée par la suite. En ce qui concerne l'entreprise PT Surya Amam Tungal à Sidoarjo (Java-Est), le retard d'enregistrement résultait d'une mauvaise communication entre le bureau régional du ministère de la Main-d'œuvre et le syndicat local. Le gouvernement souligne toutefois que des sections locales du SBSI sont maintenant en place dans ces trois entreprises, où elles coexistent avec les sections locales du SPSI. Cela étant, le comité rappelle que, s'il est vrai que les fondateurs d'un syndicat doivent respecter les formalités prévues dans la législation, ces formalités ne doivent pas être appliquées de manière à retarder ou à empêcher la formation des organisations professionnelles. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 248-249.]

616. S'agissant enfin des allégations de la CMT selon lesquelles les fonctionnaires en général, et les enseignants en particulier, ne bénéfécient pas du droit de s'affilier aux organisations de leur choix, le gouvernement reconnaît que l'association des enseignants (PGRI) qui s'est constituée en 1993 à Sidoarjo (Java-Est) n'est toujours pas enregistrée en tant que syndicat, mais allègue toutefois que, depuis la ratification de la convention no 87, les fonctionnaires sont maintenant libres, dans la pratique, de s'affilier aux organisations de leur choix. Le comité rappelle au gouvernement que les fonctionnaires, comme tous les travailleurs, doivent bénéficier du droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier, sans autorisation préalable, afin de promouvoir et de défendre leurs intérêts. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 213.] Le comité note à cet égard la déclaration du gouvernement selon laquelle les ministères de l'Intérieur et du Travail continuent d'explorer, avec l'assistance technique du BIT, les mesures permettant de s'assurer que la législation donne aux fonctionnaires, y compris les enseignants, le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ce cas.

Recommandations du comité

617. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Cas no 2000

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement du Maroc
présentée par
l'Union marocaine du travail (UMT)

Allégations: suspension d'un dirigeant syndical;
refus de dialogue avec les représentants syndicaux élus

618. Le 4 janvier 1999, l'Union marocaine du travail (UMT) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Maroc au nom de son affiliée, la Fédération nationale des travailleurs des transports.

619. Dans des communications datées respectivement des 11 mars et 1er avril 1999, le gouvernement a envoyé ses commentaires et observations sur cette plainte.

620. Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

621. Dans sa communication du 4 janvier 1999, la Fédération nationale des transports, affiliée à l'Union marocaine du travail, expose les faits suivants concernant l'Office d'exploitation des ports (ODEP), établissement public chargé de l'exploitation des ports du Maroc.

622. Selon l'organisation plaignante, le 6 décembre 1998, le personnel de l'ODEP affilié à l'UMT a organisé son congrès statutaire et procédé au renouvellement de ses instances dirigeantes. Le congrès a élu une commission administrative de 21 membres et un bureau de neuf membres. Conformément à la législation, le 16 décembre, le nouveau bureau s'est fait enregistrer auprès des autorités, puis a adressé son cahier de revendications au directeur général. Ces revendications portaient sur l'application effective du statut et des classifications de l'ODEP à l'ensemble du personnel, l'affiliation effective de tous à la Caisse nationale de sécurité sociale, une revalorisation du salaire et des primes.

623. Avant comme après l'envoi du cahier revendicatif, le directeur général de l'ODEP aurait marqué son refus radical de discuter avec le nouveau bureau syndical, refusant même de le recevoir. Pour bien souligner son choix, lors du conseil d'administration de l'ODEP tenu dans la semaine du 20 décembre, il aurait fait assister en tant que représentant du personnel M. Hijab, ex-secrétaire général de la Fédération UMT des personnels de l'ODEP, démis de ses fonctions par le vote du congrès du 6 décembre 1998. Selon la fédération plaignante, le directeur général aurait donc choisi lui-même son partenaire à la place de la fédération et du personnel et, avec une volonté d'intimidation évidente, il aurait prononcé le 28 décembre la suspension pour huit jours de M. Mustapha Dalil, délégué du personnel et délégué syndical, membre de la commission administrative issue du congrès du 6 décembre 1998.

624. Une grève générale de solidarité a eu lieu pour 48 heures dans l'ensemble du Maroc à compter du 5 janvier 1999. Le gouvernement marocain, par le biais du ministère de l'Equipement qui exerce sa tutelle et son contrôle sur l'ODEP et son directeur général, a observé sur cette affaire un mutisme total, ceci alors que l'activité portuaire de Casablanca qui est la plus importante du Maroc était complètement paralysée.

625. Toujours d'après les plaignants, cette attitude illustre la vacuité des allégations officielles sur le dialogue social au Maroc et confirme la poursuite d'une politique de répression antisyndicale, d'atteinte au libre exercice du droit syndical, de répression contre les syndicalistes et de discrimination flagrante contre l'Union marocaine du travail, ses structures et ses militants.

B. Réponse du gouvernement

626. Dans sa première communication du 11 mars 1999, le gouvernement indique, s'agissant de l'allégation de suspension de M. Dalil par l'Office de l'exploitation des ports (ODEP), que, selon les informations recueillies auprès de l'ODEP et contrairement aux allégations de l'UMT, M. Dalil n'étant élu ni comme délégué du personnel ni comme délégué syndical, il n'est investi d'aucun mandat représentatif. Comme il ressort du procès-verbal de la réunion tenue par la Fédération nationale des transports de l'Union marocaine du travail le 6 décembre 1998, dont le gouvernement joint copie, l'intéressé ne figure pas parmi les membres du nouveau bureau fédéral de l'UMT. Les allégations selon lesquelles il a été sanctionné pour des raisons syndicales sont en conséquence dénuées de tout fondement. La sanction qu'il s'est vu infliger consistant en une mise à pied de huit jours a été prononcée par son chef hiérarchique pour incitation avec violence à ne pas travailler et rixe sur le lieu de travail.

627. S'agissant de la participation de M. Hijab au conseil d'administration de l'ODEP, le gouvernement souligne que la participation des représentants du personnel aux travaux du conseil d'administration de l'ODEP est assurée en conformité avec les dispositions du décret no 84.844 du 10 Rajeb 1405 (1er avril 1985) pris pour l'application de la loi no 6.84 portant création de l'ODEP qui dispose que le conseil d'administration de cet organisme est composé, entre autres, «de deux représentants du personnel de l'Office de l'exploitation des ports désignés par le Premier ministre sur proposition du ministère chargé de l'Equipement». Le gouvernement poursuit en indiquant que M. Hijab, qui est délégué du personnel élu lors de l'élection du 3 octobre 1997, siège au conseil d'administration de l'ODEP en sa qualité de représentant élu du personnel et non en tant que représentant d'une centrale syndicale. Par ailleurs, le gouvernement convient que M. Hijab, comme le souligne l'organisation plaignante, a été «démis de ses fonctions par le vote du congrès du 6 décembre 1998». Mais le gouvernement explique que les convocations dudit conseil ont été lancées le 27 novembre 1998, soit dix jours avant la tenue du congrès le 6 décembre et 19 jours avant la notification du procès-verbal de ce congrès à la direction de l'ODEP. Par conséquent, l'interprétation donnée par l'UMT à la participation de M. Hijab au conseil d'administration de l'ODEP est une allégation non fondée comme le prouvent de façon irréfutable les faits mentionnés ci-dessus.

628. S'agissant de l'allégation de refus de dialogue avec la Fédération de l'UMT, le gouvernement précise que le dialogue social est une longue tradition au sein de l'ODEP. La concertation avec les partenaires a fait l'objet d'une circulaire datée du 15 juin 1993 dont il joint copie, instaurant un calendrier pour la tenue de réunions trimestrielles avec les syndicats au niveau local et de réunions semestrielles au niveau central avec chaque principale fédération syndicale. Cette structure de dialogue est dictée par le souci de séparer les problèmes ayant un caractère local des problèmes d'ordre général touchant tous les ports, et de distinguer les questions relevant des ports et celles relevant de la direction générale. La direction de l'ODEP a donc, dès réception du cahier de revendications du bureau local du syndical de l'UMT au port de Casablanca, assuré immédiatement la transmission du document à la direction d'exploitation dudit port qui est habilitée à l'examiner avec le syndicat concerné, conformément à la démarche expliquée ci-dessus. Le gouvernement fait en outre observer que la direction de l'ODEP affirme n'avoir reçu du nouveau bureau de la Fédération nationale des transports aucune demande d'audience depuis son élection le 6 novembre 1998. La plainte de l'UMT, explique le gouvernement, tend à semer la confusion dans les dates à ce sujet en prétendant que le cahier de revendications a été présenté par la Fédération nationale des transports le 16 décembre 1998, alors que celui-ci a été initié en fait par le bureau local du syndical de l'UMT qui en a fait le dépôt le 6 novembre 1998 soit 20 jours avant l'élection des instances dirigeantes de la Fédération nationale des transports. En tout état de cause, explique le gouvernement, le conflit social qui était à l'origine de cette plainte a été réglé suite à la signature d'un accord portant sur la revalorisation, sous réserve de l'approbation des administrations de tutelle, d'un certain nombre de primes allouées au personnel de l'ODEP, à savoir les primes de transport, de panier, de la fête Al.Adha, de l'Achoura et de scolarité.

629. S'agissant de l'allégation selon laquelle le gouvernement conduirait une politique de répression antisyndicale, le gouvernement affirme que la promotion de la liberté syndicale, du dialogue et de la concertation avec les partenaires sociaux figure au premier plan de ses préoccupations et constitue l'une des constantes de sa politique visant à assurer le respect des droits fondamentaux des travailleurs en général et du droit syndical en particulier. Il s'est engagé dans un processus de consultation avec les organisations syndicales accompagné d'un train de mesures qui prouvent l'irréversibilité de ses choix. Deux réunions au niveau du Premier ministre ont eu lieu avec les syndicats en 1998, suivies d'autres réunions avec le ministre du Développement social, de la Solidarité et de l'Emploi et de la Formation professionnelle au cours de la même période. Un séminaire national tripartite sur le dialogue social a été également organisé en collaboration avec le BIT au mois d'avril 1998 suivi d'un autre séminaire sur la liberté syndicale au mois de février 1999. Une commission tripartite a également été instituée pour examiner le projet de Code du travail avant qu'il soit soumis, pour adoption, aux instances compétentes. Celle-ci se réunit régulièrement depuis le 13 janvier 1999 avec la participation de toutes les centrales syndicales les plus représentatives.

630. Le gouvernement, qui prend note de l'absence de tout élément de preuves tangibles fournies par le syndicat plaignant à l'appui de ses assertions prétendant «la poursuite d'une politique de répression antisyndicale d'atteinte au libre exercice du droit syndical...», s'oppose fermement à ces allégations dénuées de tout fondement et prie le Comité de la liberté syndicale de bien vouloir en tenir compte dans ses recommandations.

631. Dans une communication ultérieure du 1er avril 1999, le gouvernement transmet copie de l'accord signé par l'Office de l'exploitation des ports et l'Union marocaine du travail suite au conflit collectif les ayant opposés au mois de décembre et ajoute que ce même accord a été également signé avec deux autres bureaux syndicaux affiliés aux autres syndicales les plus représentatives «la Confédération démocratique du travail et l'Union générale des travailleurs du Maroc».

632. Concernant les responsabilités syndicales de M. Dalil, le gouvernement indique à nouveau que, d'après le procès-verbal du 6 décembre 1998 transmis par l'UMT à l'ODEP et dont copie a été communiquée, l'intéressé n'est ni délégué du personnel, car n'étant pas élu lors des dernières élections, ni délégué syndical puisqu'il ne figure pas parmi les membres du bureau syndical de l'UMT cités dans le procès-verbal. Le gouvernement souligne que la direction de l'ODEP affirme n'avoir reçu de l'UMT aucune notification concernant la composition de la commission administrative issue, selon le syndicat plaignant, du congrès du 6 décembre 1998. L'ODEP n'ayant pas eu à prendre connaissance de la liste des membres de ladite commission ignore si M. Dalil en fait partie ou non. Les seuls responsables syndicaux dont les noms ont été communiqués à l'ODEP sont ceux cités dans le procès-verbal du 6 décembre 1998 mentionnés par le gouvernement dans sa première communication.

C. Conclusions du comité

633. Le comité note que le présent cas porte sur des allégations de suspension pour huit jours d'un dirigeant syndical et de refus d'un employeur de dialoguer avec un représentant syndical élu et désigné par la fédération plaignante pour présenter un cahier de revendications à l'employeur.

634. Sur certains points, les versions des plaignants et du gouvernement ne coïncident pas. Selon les plaignants, l'employeur objet du présent cas, à savoir l'Office d'exploitation des ports (ODEP), a ignoré les nouvelles instances dirigeantes de la Fédération nationale des transports élues lors du congrès statutaire du 6 décembre 1998 ainsi que le cahier de revendications présenté au directeur général de l'Office de l'exploitation des ports. Ainsi, la direction de l'ODEP a, le 20 décembre 1998, au cours du conseil d'administration, fait assister en tant que représentant du personnel M. Hijab, ex-secrétaire général démis de ses fonctions au congrès du 6 décembre, le choisissant comme partenaire à la place de la fédération et du personnel. Elle a en outre suspendu le 28 décembre, pour huit jours, M. Mustapha Dalil, délégué du personnel, délégué syndical et membre de la commission administrative issue de ce congrès.

635. En revanche, selon le gouvernement, l'ODEP a signé un accord sur la revalorisation des primes allouées au personnel avec l'ensemble des organisations syndicales. Le conseil d'administration de l'ODEP est composé, entre autres, de deux représentants du personnel de l'Office d'exploitation des ports désignés par le Premier ministre sur proposition du ministre chargé de l'Equipement. M. Hijab y siège en tant que délégué du personnel élu lors des élections du 3 octobre 1997 en sa qualité de représentant du personnel et non en tant que représentant d'une centrale syndicale. Le gouvernement convient que M. Hijab a été démis de ses fonctions lors du congrès du 6 décembre 1998, mais il explique que les convocations au conseil d'administration dataient du 27 novembre 1998, soit dix jours avant la tenue dudit congrès et 19 jours avant la notification du procès-verbal du congrès à la direction de l'ODEP.

636. Sur l'aspect du cas relatif à la situation syndicale de MM. Dalil et Hijab, le comité a pris connaissance du procès-verbal du congrès du 6 décembre 1998 joint à la réponse du gouvernement et observe que ce procès-verbal porte sur l'élection d'un bureau de neuf membres élus par l'assemblée générale des personnels de l'Office d'exploitation des ports où n'apparaissent ni M. Dalil ni M. Hijab. Le comité note aussi que le gouvernement indique que l'ODEP affirme n'avoir reçu aucune notification de la composition de la commission administrative élue lors du congrès du 6 décembre 1998. Par ailleurs, le plaignant n'a pas non plus fourni cette liste au BIT. Le comité rappelle que les organisations syndicales doivent avoir le droit d'être représentées par les délégués syndicaux qui ont été librement élus par les travailleurs.

637. En ce qui concerne la suspension de M. Dalil, le comité note que, selon le gouvernement, l'intéressé n'est ni délégué du personnel ni délégué syndical et ne figure pas parmi les neuf membres du nouveau bureau fédéral de l'UMT. La sanction qui a été infligée à M. Dalil de huit jours de mise à pied a été prononcée par son chef hiérarchique pour incitation avec violence à ne pas travailler, avec rixe sur le lieu de travail.

638. Sur ce dernier point, le comité souligne que les piquets de grève organisés dans le respect de la loi ne doivent pas voir leur action entravée par les autorités publiques, et que le seul fait de participer à un piquet de grève et d'inciter fermement, mais pacifiquement, les autres salariés à ne pas rejoindre leur poste de travail ne peut être considéré comme une action illégitime. Il en va toutefois autrement lorsque le piquet de grève s'accompagne de violence ou d'entrave à la liberté du travail par contraintes exercées sur les non-grévistes, actes qui, dans beaucoup de pays, sont punis par la loi pénale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 586.]

639. Enfin, sur le conflit du travail au sein de l'ODEP, le comité a pris connaissance avec intérêt de l'accord portant sur la revalorisation d'un certain nombre de primes signé par l'ODEP et par l'ensemble des organisations syndicales, y compris l'organisation plaignante, qui a mis fin au conflit du travail.

640. Tout en notant que d'après le gouvernement un accord entre les parties a mis fin au conflit du travail, le comité demande au gouvernement d'assurer qu'à l'avenir les convocations à siéger au conseil d'administration de l'ODEP seront envoyées aux représentants des travailleurs nouvellement élus.

Recommandation du comité

641. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:

Cas no 1996

Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement de l'Ouganda
présentée par
la Fédération internationale des travailleurs du textile,
de l'habillement et du cuir (FITTHC)

Allégations: refus de reconnaître des organisations syndicales

642. Dans une communication en date du 24 novembre 1998, la Fédération internationale des travailleurs du textile, de l'habillement et du cuir (FITTHC) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de l'Ouganda.

643. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 10 février 1999.

644. L'Ouganda n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

645. Dans sa plainte en date du 24 novembre 1998, la FITTHC soutient que le gouvernement de l'Ouganda n'a pas pris les dispositions nécessaires pour obliger les employeurs du secteur textile à respecter le droit syndical. Plus précisément, la FITTHC affirme que, malgré un total de 2 420 travailleurs affiliés répartis dans 16 usines, avec plus de 50 pour cent des effectifs dans 13 de ces usines (une liste des membres est jointe à la plainte et figure à l'annexe I du présent cas), son organisation affiliée, le Syndicat du textile, de l'habillement, du cuir et des secteurs connexes de l'Ouganda (UTGLAWU), n'est reconnue que dans une seule entreprise textile, la Uganda Fish-Net Manufacturers Ltd., qui compte 200 membres à jour dans leurs cotisations. Or cet employeur lui-même menace de suivre les autres et de ne plus reconnaître le syndicat.

646. La FITTHC fait remarquer que l'UTGLAWU est le seul syndicat opérant dans le secteur en Ouganda. Sans une reconnaissance formelle, il est impossible à ce syndicat de représenter les intérêts de ses membres. Aujourd'hui, compte tenu des changements structurels majeurs intervenus dans les industries du textile, de l'habillement et du cuir, les travailleurs des petites entreprises privées remplaçant les industries gérées par l'Etat ont plus que jamais besoin d'une représentation effective. Ceci est irréalisable en ce moment pour de nombreuses raisons à la fois juridiques et pratiques. S'agissant de la législation, si la liberté syndicale est garantie par la Constitution de 1995, le décret de 1976 sur les syndicats contient les dispositions restrictives suivantes: i) un nombre minimal de 1 000 membres pour la constitution d'un syndicat (art. 8(3)); enfin, ii) l'obligation pour le syndicat de représenter 51 pour cent des travailleurs pour être reconnu par l'employeur aux fins de la négociation collective (art. 19(1)(e)). Toutefois, le 9 septembre 1997, le ministre de la Justice/Procureur général, M. B. Katureebe, a donné une interprétation juridique indiquant que les dispositions susmentionnées du décret sur les syndicats sont frappées de nullité étant donné qu'elles restreignent les droits à la liberté syndicale garantis par la Constitution. (Le texte de la lettre du Procureur général est joint à la plainte et figure à l'annexe II du présent cas.)

647. S'agissant de la pratique concernant la représentation effective par un syndicat, la FITTHC affirme que les neuf entreprises textiles suivantes gérées par l'Etat se sont retirées de l'accord reconnaissant les syndicats à la suite de la privatisation:

Des conflits officiels ont été déclarés par l'UTGLAWU dans les entreprises suivantes: Nytil Picfare Ltd., Vitafoam Ltd., Leather Industries of Uganda (cas présenté le 2 janvier 1998 concernant 70 membres); Kimkoa Industry Ltd. (cas présenté le 8 décembre 1997 concernant 50 membres); Tuf Foam (Uganda) Ltd. (cas présenté le 2 décembre 1997 concernant 60 membres); enfin, Marine and Agro Export Processing Co. Ltd. (cas présenté le 2 décembre 1997 concernant 400 membres).

648. Selon la FITTHC, un cas en particulier a créé un précédent très dommageable. Nytil Picfare a refusé de traiter avec le syndicat depuis qu'elle a été privatisée en 1996. Suite à cette privatisation, plusieurs des 9 000 travailleurs ont été licenciés. Les travailleurs qui ont résisté ont fait l'objet de licenciements sommaires.

649. L'accord concernant la vente des biens de Nyanza Textile Industries Ltd. (NYTIL) à Nytil Picfare Ltd., négocié par le ministre d'Etat chargé des finances (privatisation), prévoit - et c'est regrettable - les conditions suivantes:

De l'avis de la FITTHC, ces clauses enfreignent les lois nationales sur le travail et appellent à une collaboration entre le gouvernement ougandais et les investisseurs de l'industrie privée.

650. Par ailleurs, la FITTHC fait valoir que, forte de cette clause figurant dans l'accord de vente, Nytil Picfare Ltd. a tout bonnement refusé de s'acquitter de ses obligations légales concernant la syndicalisation, en dépit du fait que le syndicat ait réussi à obtenir l'adhésion de 1 100 travailleurs actuellement employés par l'entreprise. La direction a même refusé de participer à des réunions convoquées par le ministère du Travail. Le Commissaire au travail, pour sa part, a fait valoir dans une lettre en date du 2 septembre 1998 que les questions relatives à l'entreprise Nytil Picfare Ltd. dépassent les compétences du ministère et sont traitées par le président lui-même. La Centrale nationale des syndicats, l'UTGLAWU et la FITTHC ont à de nombreuses reprises demandé au gouvernement de se prononcer en faveur de la reconnaissance des syndicats mais, malgré les assurances que toutes les mesures seraient prises pour régler la question de manière rapide et satisfaisante, la situation n'a pas évolué. Une fois encore, cette situation semble indiquer une collusion entre le gouvernement et des employeurs.

651. La FITTHC insiste sur le fait que la situation dans l'entreprise Nytil Picfare a encouragé d'autres entreprises à lui emboîter le pas. A titre d'exemple, M. B. Gopal, directeur de Leather Industries of Uganda Ltd., dans une lettre à l'UTGLAWU en date du 7 septembre 1998, déclare en toute clarté:

652. La FITTHC ajoute que, parmi les autres secteurs particulièrement touchés par le refus de la direction de reconnaître les syndicats à la suite de mesures d'ajustement structurel, on peut citer les transports ferroviaires et l'hôtellerie. En conclusion, l'organisation plaignante soutient que le refus du gouvernement d'obliger l'employeur à reconnaître un syndicat lorsque celui-ci satisfait à toutes les exigences légales constitue une violation des conventions nos 87 et 98 sur la liberté syndicale et le droit de négociation collective, et demande au Comité de la liberté syndicale d'ouvrir d'urgence une enquête.

B. Réponse du gouvernement

653. Le gouvernement affirme son attachement aux droits fondamentaux des travailleurs et au droit à la liberté syndicale en tant que fondement des autres droits. Cet attachement est exprimé dans les dispositions de la Constitution nationale de 1995. La liberté syndicale et le droit d'organisation et de négociation collective sont garantis par les articles 29(1)(e) et 40(3) de la Constitution. Cette position est reconnue dans la plainte.

654. Il est également vrai cependant que l'article 19(1)(e) du décret no 20 de 1976 sur les syndicats, qui prévoit qu'un syndicat doit avoir une majorité d'au moins 51 pour cent pour être reconnu par un employeur, n'est pas compatible avec la nouvelle Constitution de 1995. Ce problème a déjà été reconnu par le gouvernement et est actuellement traité dans le cadre du processus de réforme de la législation du travail auquel participe l'OIT.

655. Le gouvernement explique que les intentions et les objectifs de ses politiques de réforme économique, de privatisation et de ses programmes de désengagement ont visé à réadapter l'économie et à établir les bases de la croissance économique durable, du développement national et de la réduction de la pauvreté. En rapport avec ce qui précède, le gouvernement estime qu'il est important de faire ressortir que l'assertion de l'organisation plaignante selon laquelle 9 000 travailleurs ont perdu leur emploi en raison de la privatisation est fausse. Ces emplois n'ont pas été perdus à cause de la privatisation mais en raison d'une mauvaise gestion et d'un démembrement de l'actif. Les entreprises en question avaient cessé leurs opérations et avaient déjà été fermées. Dans la plupart des cas, ces entreprises auraient cessé de fonctionner depuis plus d'un an au moment du désengagement. A l'inverse donc, la cession de ces entreprises aux nouveaux propriétaires privés, qui les ont relancées, a rétabli les chances pour certains travailleurs de continuer à travailler, créant ainsi des membres potentiels pour le syndicat.

656. Le gouvernement fait ensuite remarquer que, sur les treize entreprises énumérées par l'organisation plaignante dans l'annexe I, seules quatre d'entre elles (NYTIL, African Textile Mills, Uganda Leather and Tanning Industry et Lango Development) ont été privatisées dans le cadre du programme de réforme et de désengagement du gouvernement. Cinq autres (MULCO, Uganda Garments (1973) Uganda Fish-Net Manufacturers, Uganda Blanket Manufacturers et Uganda Rayon Textiles) ont été remises entre les mains des anciens propriétaires dans le cadre de la loi de 1982 sur les biens des expatriés, tandis que deux d'entre elles (United Garments Industry Ltd. et Uganda Bags and Hessian Mills) ont été mises en redressement judiciaire et l'une d'entre elles (Blue Bird) n'était pas une entreprise publique. Il est donc inexact de la part de l'organisation plaignante de prétendre que le nombre de ses membres a été affecté principalement par la mise en œuvre du programme de désengagement du gouvernement.

657. S'agissant du cas de Nytil Picfare, le gouvernement indique que les dispositions citées dans l'accord pour la vente des actifs de Nytil à Nytil Picfare n'empêchent pas les travailleurs de se syndiquer en vertu des lois du travail. Nytil n'a pas été vendue comme entreprise prospère. Le gouvernement s'est contenté de vendre les actifs de Nytil à Nytil Picfare. En conséquence, il y a eu une nouvelle raison sociale, et la pratique normale serait pour le syndicat de passer un nouvel accord de reconnaissance avec la nouvelle entreprise. L'esprit et l'effet des dispositions citées étaient simplement de préciser et de souligner que Nytil, et non pas Nytil Picfare, resterait responsable des obligations vis-à-vis des travailleurs dans le cadre des accords avec le syndicat, y compris le règlement des indemnités de départ.

658. Le gouvernement estime en outre que l'assertion selon laquelle il y aurait eu collusion entre le gouvernement et les employeurs est malheureuse. Le problème de la non-reconnaissance des syndicats fait l'objet de la préoccupation de l'ensemble des partenaires sociaux. Le gouvernement a abordé la question dans des réunions tripartites régulières et a maintenu un dialogue régulier avec les employeurs concernés. Les interprétations demandées auprès du Procureur général et la révision de la législation du travail traduisent clairement la volonté réelle du gouvernement de se saisir de cette préoccupation. En outre, tandis que le gouvernement poursuit ses efforts à l'échelon national, le gouvernement et les partenaires sociaux auront inévitablement besoin d'une aide technique pour renforcer leurs capacités institutionnelles et sensibiliser les parties en présence.

659. En conclusion, le gouvernement réaffirme son engagement envers les droits fondamentaux des travailleurs et sa détermination à les promouvoir. Il incombe donc au gouvernement et aux partenaires sociaux de resserrer leurs efforts de collaboration en vue de trouver à l'amiable des solutions pour la protection et la promotion de la justice sociale.

C. Conclusions du comité

660. Le comité note que les allégations dans le présent cas sont à la fois de nature législative et factuelle en ce qui concerne le refus de reconnaissance de syndicats aux fins de la négociation collective.

661. S'agissant de l'aspect législatif du cas, l'organisation plaignante allègue que, tandis que la Constitution ougandaise garantit la liberté syndicale, le décret de 1976 sur les syndicats contient des dispositions rendant difficile pour un syndicat d'être reconnu par l'employeur aux fins de la négociation collective. Le comité note que le gouvernement ne réfute pas cette allégation. Au contraire, il reconnaît que les dispositions en question ne sont pas compatibles avec la Constitution ougandaise. Le comité, pour sa part, note que l'article 8(3) du décret de 1976 sur les syndicats dispose qu'«aucun syndicat ne pourra être enregistré s'il ne compte pas au minimum 1 000 membres enregistrés» et que l'article 19(1)(e) prévoit que «tout employeur sera tenu de reconnaître un syndicat enregistré auquel au moins 51 pour cent de ses salariés ont adhéré librement et pour lequel le greffier a délivré un certificat attestant que ce syndicat est l'organe de négociation avec qui l'employeur doit traiter pour les questions relatives à la relation entre l'employeur et ses salariés qui entrent dans le champ de l'affiliation du syndicat enregistré».

662. Le comité estime que les deux dispositions susmentionnées donnent lieu à deux séries distinctes de problèmes du point de vue de la liberté syndicale. S'agissant de l'exigence contenue dans l'article 8(3) du décret selon laquelle il faut au minimum 1 000 membres pour constituer un syndicat, le comité est d'avis que, s'il est vrai que les fondateurs d'un syndicat doivent respecter les formalités prévues par la législation, ces formalités, de leur côté, ne doivent pas être de nature à mettre en cause la liberté de constitution des organisations. En effet, le comité estime que la création d'un syndicat peut être considérablement gênée ou même rendue impossible lorsque la législation fixe le nombre minimal des membres d'un syndicat à un niveau manifestement trop élevé, ce qui est le cas, par exemple, lorsque la législation dispose qu'un syndicat doit compter au moins 50 membres fondateurs. Cependant, le nombre minimal de 20 membres fixé pour la création d'un syndicat ne semble pas exagéré ni, par conséquent, être en soi un obstacle à la constitution d'un syndicat. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 248, 255 et 256.] A la lumière de ce qui précède, le comité ne peut que conclure que le nombre minimal de membres requis dans l'article 18(3) du décret sur les syndicats risque de compromettre le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix sans autorisation préalable. Ceci risque d'autant plus d'arriver lorsque l'article 18(3) est lu conjointement avec l'article 19(1)(e) qui accorde des droits exclusifs de négociation à un syndicat représentant 51 pour cent des travailleurs concernés. Dans ce type de situation, le comité a déjà estimé que le critère du nombre minimal de 1 000 membres prévu par la loi pour obtenir des droits exclusifs de négociation risque de priver les travailleurs des petites unités de négociation ou d'unités dispersées dans de vastes zones géographiques du droit de constituer des organisations qui pourraient pleinement exercer leurs activités syndicales, le tout contrairement aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 832.]

663. Par ailleurs, s'il n'est pas nécessairement incompatible avec la convention no 98 de prévoir que le syndicat le plus représentatif dans une unité donnée sera l'agent exclusif de négociation au nom de cette unité, l'article 19(1)(e) du décret sur les syndicats oblige un employeur à reconnaître un syndicat aux fins de la négociation collective uniquement lorsque celui-ci représente une majorité absolue des travailleurs concernés. Le comité estime qu'une telle disposition n'encourage pas la négociation collective au sens de l'article 4 de la convention no 98, étant donné qu'il y a un risque que la négociation collective n'ait pas lieu au cas où le syndicat ne représenterait pas la majorité absolue des travailleurs concernés. Le comité estime donc que lorsque, dans le cadre d'un système de nomination d'un agent exclusif de négociation, aucun syndicat ne regroupe plus de 50 pour cent des travailleurs, les droits de négociation collective devraient cependant être accordés à tous les syndicats de cette unité, au moins au nom de leurs propres membres, ou ils devraient pouvoir négocier conjointement une négociation collective applicable à l'unité de négociation. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 831 et 833.]

664. Pour toutes les raisons susmentionnées, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les articles 8(3) et 19(1)(e) du décret de 1976 sur les syndicats soient mis en conformité avec les principes de la liberté syndicale énoncés dans les paragraphes précédents. Notant que le gouvernement reconnaît que ces dispositions ne sont pas compatibles avec la nouvelle Constitution ougandaise de 1995 et que des mesures pour régler ce problème sont actuellement adoptées dans le cadre du processus de réforme de la législation du travail qui a lieu actuellement dans le pays, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout développement en la matière.

665. S'agissant des aspects factuels de ce cas, le comité note que l'organisation plaignante soulève deux séries d'allégations. La première a trait au fait que, à la suite de la privatisation d'un certain nombre d'industries dans les années quatre-vingt-dix dans lesquelles l'organisation affiliée à l'organisation plaignante, le Syndicat du textile, de l'habillement, du cuir et des secteurs connexes de l'Ouganda (UTGLAWU) avait organisé les travailleurs; de nombreux travailleurs, y compris des membres de l'UTGLAWU, ont perdu leur emploi. Ceci expliquerait la différence entre le nombre actuel de membres de l'UTGLAWU par rapport au nombre total durant les années quatre-vingt (annexe I). Le gouvernement reconnaît que des travailleurs, y compris des membres de l'UTGLAWU, ont perdu leur emploi mais conteste que ceci a eu lieu à la suite de la privatisation. Selon lui, les pertes d'emplois ont eu lieu bien avant la privatisation, étant donné que les entreprises en question avaient cessé les opérations depuis plus d'un an au moment de la cession des actifs. Par ailleurs, seules quelques-unes des entreprises énumérées par l'organisation plaignante où les pertes d'emplois ont eu lieu ont été privatisées contrairement aux affirmations de l'organisation plaignante. A cet égard, le comité estime qu'il ne peut se prononcer sur les allégations concernant les programmes et les mesures de restructuration ou de rationalisation économique, que ceux-ci impliquent ou non des réductions de personnel ou des transferts d'entreprises ou des services du secteur public au secteur privé, que dans la mesure où ils ont donné lieu à des actes de discrimination ou d'ingérence antisyndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 935.] Dans le cas concret en présence, dans la mesure où tous les travailleurs anciennement employés par les entreprises privatisées dans le cadre du programme de réforme et de désengagement du gouvernement ont été touchés (qu'ils aient été ou non membres ou dirigeants de syndicats), le comité conclut que la question de la discrimination antisyndicale ne se pose pas en principe.

666. Le comité note que la deuxième allégation de nature factuelle a trait à la non-reconnaissance de l'UTGLAWU par la direction de plusieurs entreprises à la suite de la privatisation malgré le fait que les syndicats aient réussi à répondre aux sévères obligations énoncées dans le décret sur les syndicats au sujet de la reconnaissance des syndicats. L'organisation plaignante affirme en outre qu'une entreprise en particulier, la Nytil Picfare Ltd., qui emploie 1 100 membres de l'UTGLAWU, a non seulement refusé de reconnaître le syndicat, mais a même refusé de participer à des réunions convoquées par le ministère du Travail à cette fin. A la suite de cela, d'autres entreprises ont emboîté le pas à cette dernière et refusé de reconnaître le syndicat. Le comité note que le gouvernement, pour sa part, reconnaît que le problème de la non-reconnaissance des syndicats est pour lui un sujet de préoccupation et qu'il a essayé de régler ce problème lors de réunions tripartites et en poursuivant le dialogue avec les employeurs concernés. En outre, le processus de révision de la législation du travail est une autre indication claire de la volonté réelle du gouvernement de se saisir de cette préoccupation qu'il partage.

667. Le comité souhaiterait rappeler qu'il a toujours été d'avis qu'aucune disposition de l'article 4 de la convention no 98 n'impose à aucun gouvernement l'obligation de recourir à des mesures de contrainte pour obliger les parties à négocier avec une organisation déterminée, mesures qui auraient clairement pour effet de transformer le caractère de telles négociations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 846.] Par ailleurs, il a aussi adopté le point de vue selon lequel les employeurs, y compris les autorités publiques agissant en tant qu'employeurs, devraient reconnaître, aux fins de la négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs qu'ils occupent ou les organisations représentatives des travailleurs dans une branche particulière. Si le syndicat intéressé se révèle grouper la majorité des travailleurs, les autorités devraient prendre des mesures de conciliation appropriées en vue d'obtenir la reconnaissance, par l'employeur, de ce syndicat aux fins de la négociation collective. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 821, 823 et 824.] Dans la situation présente, le comité note que l'UTGLAWU est l'organisation la plus représentative, sinon la seule, de travailleurs dans le secteur textile de l'Ouganda. Le comité note en outre que le gouvernement semble avoir adopté un certain nombre de mesures de conciliation pour obtenir la reconnaissance par les employeurs de l'UTGLAWU à des fins de négociation collective, malheureusement sans résultat. Le comité ne peut que regretter cet état de fait qui constitue une violation flagrante de l'article 4 de la convention no 98 ratifiée par l'Ouganda. Notant que l'UTGLAWU a introduit des recours contre un certain nombre d'entreprises, à savoir Nytil Picfare Ltd., Vitafoam Ltd., Leather Industries of Uganda, Kimkoa Industry Ltd., Tuf Foam (Ouganda) Ltd., et Marine and Agro Export Processing Co. Ltd., pour obtenir la reconnaissance à des fins de négociation collective, le comité veut croire que les décisions rendues seront conformes aux principes de la négociation collective. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des diverses procédures judiciaires.

668. Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas en rapport avec l'application de la convention no 98.

669. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Annexe I


Nom de l'industrie/entreprise

Années quatre-vingt: nombre total de membres syndiqués


1. Nyanza Textile Industry Ltd. (NYTILI)

 6 500

2. MULCO

 3 500

3. African Textile Mills (ATM)

 2 000

4. Blue Bird

      60

5. Uganda Bags and Hessian Mills Ltd. (JUTE)

    600

6. Uganda Spinning Mills Ltd.

 2 000

7. Lango Development Co. Ltd-Lira

    350

8. Uganda Garments (1973) Ltd.

     80

9. Uganda Leather and Tanning Industry Ltd.

   300

10. Uganda Fish-Net Manufacturers Ltd.

   250

11. United Garments Industry Ltd.

   600

12. Uganda Blanket Manufacturers Ltd.

   400

13. Uganda Rayon Textiles Ltd.

   500

Nombre total de membres durant les années quatre-vingt

17140


Annexe II

Bureau du ministre de la Justice/Procureur général
P.O. Box 7183
Kampala
République de l'Ouganda

9 septembre 1997
Troisième vice-Premier ministre
Ministère du Travail et du Bien-être social
Crested Towers
Kampala

Cher collègue,

Interprétation juridique

Je me réfère à votre lettre M/LSW/32 vol. 1 en date du 22 août 1997.

Bien que les articles 8(3) et 19(1)(e) du décret no 20 de 1976 sur les syndicats prévoient un nombre minimal de 1 000 membres pour la constitution d'un syndicat et exigent 51 pour cent des travailleurs au minimum pour la reconnaissance d'un syndicat par un employeur, respectivement, lesdites dispositions doivent, conformément à l'article 273(1) de la Constitution, être interprétées d'une manière qui les rende conformes aux dispositions de la Constitution.

L'article 29(1)(e) de la Constitution prévoit que toute personne doit jouir du droit à la liberté syndicale qui doit comprendre la liberté de constituer des associations ou des syndicats, y compris des syndicats professionnels, et d'y adhérer. Ce droit est en outre renforcé par l'article 40(3) de la Constitution. Par ailleurs, l'article 36 de la Constitution prévoit que les minorités ont le droit de participer aux processus de prise de décisions.

Les articles 8(3) et 19(1)(e) dudit décret sur les syndicats sont incompatibles avec les articles 29(1)(e), 36 et 40(3) de la Constitution. L'article 2(2) de la Constitution prévoit la supériorité de la Constitution sur la loi ordinaire et que la loi incompatible est nulle et de nul effet.

Il apparaît clairement que les dispositions citées dudit décret sur les syndicats sont annulées, puisque, selon les termes mêmes des dispositions constitutionnelles susmentionnées, elles restreignent le droit des individus de constituer des syndicats ou d'y adhérer.

Veuillez agréer,

(Signé)   Bart M. Katureebe, S.C.,
Ministre de la Justice/Procureur général.

Cas no 1979

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement du Pérou
présentée par
la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP)

Allégations: licenciements antisyndicaux

670. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans des communications de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) en date des 16 juin, 4 août et 9 octobre 1998. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications des 6 octobre 1998 et 4 février 1999.

671. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

672. Dans ses communications en date du 16 juin, du 4 août et du 9 octobre 1998, la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) allègue le licenciement arbitraire en 1995 de 71 travailleurs de la Banque nationale, y compris les dirigeants du Syndicat national des travailleurs de la Banque nationale (SINATBAN), ainsi que des dirigeants nationaux et régionaux de la CGTP. Ultérieurement, 90 pour cent des travailleurs licenciés ont été réintégrés par décision judiciaire, mais une minorité d'entre eux, dont sept dirigeants du SINATBAN et de la CGTP, ne l'ont pas été par suite d'ingérences, d'obstacles et de retards fomentés par la Banque nationale avec la complicité des autorités judiciaires.

673. Concrètement, l'organisation plaignante signale que, en ce qui concerne MM. Marco Antonio Maravi Orellana, Pedro C. Reyes Saenz et Luis F. Cárdenas Campana, dirigeants syndicaux du SINATBAN, la juridiction de première instance avait ordonné leur réintégration, mais la juridiction de deuxième instance, statuant sur un appel interjeté par la Banque nationale, a annulé cette décision. Les trois dirigeants syndicaux en question ont à leur tour introduit un recours devant la Chambre constitutionnelle et sociale de la Cour suprême; on attend l'issue de cette procédure. En ce qui concerne M. Joaquín Gutierrez Madueño, vice-président de la CGTP, la Chambre du travail avait confirmé la décision de réintégration rendue en première instance mais, au stade de l'application, la juge provisoire du travail a modifié cette décision et ordonné le paiement d'une indemnité en lieu et place de la réintégration. Cette dernière décision a donné lieu à une plainte devant la Cour suprême dont on attend maintenant la décision.

674. L'organisation plaignante allègue que, en ce qui concerne M. Ronald Avila Candiotti, dirigeant national du SINATBAN, la Chambre du travail avait confirmé la décision de réintégration rendue en première instance, mais l'institution a formé un recours devant la Chambre constitutionnelle et sociale, qui n'a pas encore statué. Quant à M. Felipe Callacondo Durand, dirigeant national de la CGTP, la Banque nationale ayant fait appel de la décision favorable à sa réintégration rendue en première instance, la Chambre du travail a modifié cette décision de façon substantielle et refusé la réintégration. Qui plus est, l'organisation plaignante indique que, dans l'arrêt de la Cour supérieure de justice de Lima du 8 mai 1997, il est établi que le juge ne peut remplacer la réintégration par le paiement d'une indemnité, à moins que ce ne soit à la demande du travailleur, ce qui vaut pour le cas de M. Callacondo Durand. Dans le cas de M. Daniel B. Rosello Woolcott, dirigeant syndical du SINATBAN, qui avait engagé une action devant la juridiction du travail, l'affaire a été classée, le défendeur s'étant constamment abstenu de comparaître.

675. La CGTP allègue aussi les violations suivantes de la liberté syndicale: a) les autorités du Corps général des pompiers volontaires du Pérou refusent de négocier le cahier de revendications présenté par le Syndicat unique national des ouvriers et employés du Corps général des pompiers volontaires du Pérou, dont les dirigeants sont l'objet de brimades et d'actes hostiles de la part de ces autorités; b) les travailleurs de l'Université nationale Enrique Guzmán y Valle ont fait l'objet de licenciements massifs pour des motifs antisyndicaux, sous le prétexte de prétendues «évaluations»; c) les travailleurs syndiqués de la municipalité de Villa el Salvador sont victimes d'actes antisyndicaux tels que transferts indus et harcèlement, privation de leurs congés ou de l'octroi de temps libre pour les activités syndicales et refus de la retenue des cotisations syndicales; d) les dirigeants syndicaux de l'Université nationale Federico Villareal ont été licenciés pour des motifs antisyndicaux et les autorités ont perquisitionné dans le local syndical.

B. Réponse du gouvernement

676. Dans ses communications des 6 octobre 1998 et 4 février 1999, le gouvernement explique qu'il existe dans la législation nationale diverses dispositions qui protègent les travailleurs et leurs dirigeants contre les actes de discrimination antisyndicale et d'ingérence et que, conformément à la législation en vigueur, les travailleurs peuvent faire valoir par la voie légale tout droit auquel ils estiment qu'il est porté atteinte par des menaces ou des actes antisyndicaux. Le gouvernement précise que la CGTP elle-même reconnaît que les travailleurs lésés dans le présent cas ont usé des voies légales pour faire valoir les droits auxquels ils estimaient qu'il était porté atteinte et qui sont garantis par le pouvoir judiciaire. Il ajoute qu'il était inutile pour l'organisation plaignante de déposer une plainte devant l'OIT puisque la juridiction compétente a reconnu le droit des travailleurs en question. Enfin, il déclare que l'organisation plaignante n'apporte pas la preuve des actes de discrimination antisyndicale invoqués.

C. Conclusions du comité

677. Le comité observe que, dans le présent cas, l'organisation plaignante formule les allégations suivantes: a) licenciement arbitraire de sept dirigeants syndicaux en 1995 et refus de la Banque nationale de les réintégrer malgré une décision judiciaire favorable rendue en première instance; b) refus des autorités du Corps général des pompiers volontaires du Pérou de négocier le cahier de revendications présenté par le syndicat, dont les dirigeants font constamment l'objet de brimades et d'actes hostiles; c) licenciements massifs de travailleurs de l'Université nationale Enrique Guzmán y Valle pour des motifs antisyndicaux; d) actes antisyndicaux contre les travailleurs syndiqués de la municipalité de Villa el Salvador; e) licenciement pour motifs antisyndicaux des dirigeants du syndicat de l'Université nationale Federico Villareal et perquisition effectuée par les autorités dans le local syndical.

678. En ce qui concerne les allégations relatives à des licenciements arbitraires à la Banque nationale, le comité note que, si 90 pour cent des travailleurs licenciés ont été réintégrés, les cas non encore résolus concernent des dirigeants syndicaux, ce qui tend à indiquer que l'institution n'a pas l'intention de les réintégrer, surtout si l'on tient compte du fait que ces licenciements ont eu lieu il y a quatre ans (en 1995) et que, dans six des sept cas, la juridiction de première instance avait ordonné leur réintégration. A cet égard, le comité prie le gouvernement de lui envoyer le texte des décisions concernant les six recours en instance devant les tribunaux judiciaires dès qu'elles auront été rendues et il veut croire que les intéressés seront réintégrés immédiatement s'il est avéré qu'ils ont été victimes d'actes de discrimination antisyndicale.

679. Pour ce qui est des allégations de la CGTP concernant le refus des autorités de négocier le cahier de revendications présenté par le Syndicat unique national des ouvriers et des employés du Corps général des pompiers volontaires du Pérou, les licenciements massifs pour motifs antisyndicaux des travailleurs de l'Université nationale Enrique Guzmán y Valle, les actes antisyndicaux contre les travailleurs de la municipalité de Villa el Salvador, les licenciements pour motifs antisyndicaux des dirigeants syndicaux de l'Université nationale Federico Villareal et la perquisition effectuée dans le local syndical par les autorités, le comité prie l'organisation plaignante de fournir davantage de précisions à leur sujet.

Recommandations du comité

680. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Cas no 1972

Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement de la Pologne
présentée par
- l'Alliance générale des syndicats polonais (OPZZ)
- le Syndicat des employés municipaux de Varsovie (WZZPS) et
- le Syndicat «Sprawiedliwoc» dans la section auxiliaire
de la chancellerie du Premier ministre

Allégations: refus de consulter les organisations de travailleurs
avant l'adoption de textes législatifs; discrimination à l'encontre
de syndicats et licenciements de dirigeants syndicaux

681. Dans des communications datées du 19 mai et du 16 septembre 1998 (Alliance générale des syndicats polonais (OPZZ)) du 6 juin, du 27 et du 29 juillet, et du 10 septembre 1998 (Syndicat «Sprawiedliwoc») et du 3 août, du 4 septembre et du 1er octobre 1998 (Syndicat des employés municipaux de Varsovie (WZZPS)), ces syndicats ont présenté des plaintes contre le gouvernement de la Pologne, pour violations des droits syndicaux.

682. Dans des communications datées des 5 et 16 novembre et du 14 décembre 1998 ainsi que du 27 janvier 1999, le gouvernement a fourni ses observations concernant ces plaintes.

683. La Pologne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

Plainte de l'OPZZ

684. Dans ses communications datées du 19 mai et du 16 septembre 1998, l'Alliance générale des syndicats polonais (OPZZ) allègue que le gouvernement polonais est continuellement en train de violer le droit syndical, en particulier: 1) parce qu'il ne consulte pas l'OPZZ sur les projets de loi, comme l'exige l'article 19 de la loi polonaise sur les syndicats; 2) parce qu'il traite les syndicats d'une manière discriminatoire, en violation de l'article 1(3) de cette même loi.

685. En ce qui concerne le premier point, l'OPZZ explique qu'en dépit de la disposition de l'article 19(2) de la loi sur les syndicats du 23 mai 1991 le gouvernement a omis de soumettre à l'OPZZ pour consultation un projet de réglementation du ministre des Finances sur la fixation des prix du chauffage, qui est entré en vigueur en décembre 1997 et qui a eu pour résultat une augmentation radicale du prix du chauffage; le gouvernement n'a pas non plus consulté l'OPZZ sur un projet d'amendement à la réglementation susmentionnée. En outre, l'OPZZ se plaint de la réduction de la période de consultation de 30 jours prévue par l'article 19 de la loi sur les syndicats en ce qui concerne: un projet de réglementation du ministre des Finances, visant à amender la réglementation sur les règles et procédures spécifiques de l'octroi de prêts par le Fonds national du logement; un projet de loi sur l'isolation thermique; et un projet de réglementation du ministre de l'Intérieur et de l'Administration concernant le domaine spécifique de la vérification de la consommation d'énergie.

686. En outre, l'OPZZ mentionne une autre violation du gouvernement relative à son obligation de consulter les syndicats sur les projets de loi. L'OPZZ cite le cas d'une réduction de la période des consultations concernant un projet de loi sur la réforme de l'administration publique. Selon l'OPZZ, l'adoption de ce type de législation sans consultation et sans analyse économique comporte des risques économiques et sociaux.

687. A propos du deuxième point de la plainte, l'OPZZ a fait savoir que le gouvernement a refusé de se prêter à une procédure de règlement de conflits prévue par la loi du 23 mai 1991 sur le règlement des conflits collectifs, pour ce qui est des conflits initiés par ce même syndicat. L'OPZZ allègue que le gouvernement suit effectivement cette procédure de règlement des conflits collectifs mais seulement avec les autres syndicats, ce qui crée une discrimination entre les divers syndicats.

Plainte du WZZPS

688. Dans ses communications datées du 3 août, du 4 septembre et du 1er octobre 1998, le Syndicat des employés municipaux de Varsovie (WZZPS) a d'abord déclaré que le président de la ville de Varsovie, dans le cadre d'un conflit collectif avec le WZZPS, n'a pas entamé les négociations dans le délai prévu par la loi du 23 mai 1991 sur le règlement des conflits collectifs. Le WZZPS explique qu'il est entré en conflit collectif avec son employeur, à savoir le président de la ville de Varsovie, le 25 août 1997. Lorsque le délai prévu pour le règlement du conflit a expiré, le WZZPS a notifié le bureau du Procureur du district, conformément aux dispositions de la loi du 23 mai 1991. En réponse à sa notification, le WZZPS allègue que l'employeur a répondu favorablement à une demande d'un supérieur de la présidente du conseil du WZZPS concernant la cessation de son contrat d'emploi sans notification de procédures disciplinaires. La présidente du conseil du WZZPS, Mme Sikorka-Mrozek, a depuis porté plainte auprès du tribunal du travail.

689. Le WZZPS déclare en outre que le bureau de Mme Sikorka-Mrozek a également fait office de bureau principal officiel du syndicat. Le WZZPS affirme que dans ce bureau des caisses de livres ont été ouvertes sans son consentement et que des documents ont été examinés, puis empaquetés dans des boîtes en carton et rangés dans un placard. Le WZZPS explique encore qu'un grand nombre d'objets ont été perdus, y compris tous les sceaux du syndicat, et celui-ci a dû prier la police de mettre certains documents en lieu sûr. En outre, selon le plaignant, après que le bureau d'enregistrement ait été notifié à tort en janvier 1998 de la non-existence du WZZPS, le tribunal du canton, par une décision du 29 juin 1998, a refusé d'effacer le WZZPS du registre des syndicats. Enfin, le WZZPS déclare que pendant plusieurs mois il n'a pu s'acquitter d'aucune de ses fonctions statutaires et qu'à ce jour il n'est pas encore en mesure d'opérer sous son adresse légale.

Plainte du syndicat «Sprawiedliwoc»

690. Dans ses communications du 6 juin et du 27 juillet 1998, le plaignant explique que le syndicat «Sprawiedliwoc» a été créé le 15 mars 1998. Le 25 mars 1998, les documents appropriés ont été soumis au tribunal du canton aux fins de l'enregistrement du syndicat. Bien que l'article 32(1) de la loi de 1991 sur les syndicats prévoit une période de protection de six mois pour le comité fondateur du syndicat, le 30 mars 1998, M. Marek Grabowski, président du comité fondateur, a été notifié de la cessation de son contrat d'emploi en date du jour même où il avait informé le chef du personnel de la création du syndicat. Le plaignant mentionne également qu'à la suite d'une requête du syndicat OPZZ à l'Inspection nationale du travail à propos de cette question une enquête a été menée et l'Inspecteur du travail en chef a confirmé le 22 avril 1998 qu'il y avait eu violation de la loi sur les syndicats par l'employeur, à savoir la section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre.

691. Dans sa communication du 29 juillet 1998, le plaignant déclare que M. Grabowski est toujours sans emploi, qu'il a été privé de la possibilité de communiquer par téléphone avec les autres membres du syndicat et qu'on lui a interdit l'entrée des locaux syndicaux.

692. Dans sa communication du 10 septembre 1998, le plaignant fournit un exemplaire de la décision prise le 2 septembre 1998 par le tribunal du travail de district de Varsovie, aux termes de laquelle le tribunal demande la réintégration de M. Marek Grabowski dans la section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre sans changement pour lui ni de tâches ni de rémunération.

B. Réponse du gouvernement

Plainte de l'OPZZ

693. Dans une communication datée du 14 décembre 1998, le gouvernement reconnaît, en ce qui concerne la plainte présentée par l'Alliance générale des syndicats polonais (OPZZ), qu'aux termes de l'article 19 de la loi sur les syndicats et concernant des directives ou un projet de législation ou encore des réglementations il est tenu de consulter les organisations syndicales nationales sur les questions qui les intéressent. Or le gouvernement fait observer que, compte tenu de l'énorme volume des réformes qu'il a dû mener à bien et de l'ampleur des travaux législatifs qu'il a dû entreprendre, il lui arrive d'être obligé de demander aux partenaires sociaux de réduire la période des consultations; cependant, dans la vaste majorité des cas, la législation est adoptée après des consultations normales et de durée légale avec les partenaires sociaux.

694. En ce qui concerne les textes législatifs spécifiques auxquels il est fait référence dans la plainte, le gouvernement admet que le projet de réglementation du ministre des Finances sur la fixation des prix du chauffage n'a pas été soumis à une consultation avec les syndicats. Le gouvernement explique qu'il avait l'obligation de limiter l'augmentation probable des prix du chauffage étant donné qu'une libéralisation incontrôlée de ces prix aurait pu avoir des conséquences sociales néfastes. Comme il devait libérer les prix du chauffage conformément à la loi sur l'énergie d'avril 1997, la réglementation susmentionnée limitant l'augmentation du prix a dû être introduite sans délai car l'hiver arrivait.

695. Pour ce qui est du projet de réglementation amendant les procédures d'octroi de prêts du Fonds national du logement, le gouvernement admet une fois encore que le projet a été soumis aux organisations syndicales pour consultation le 19 janvier 1998, et qu'elles ont été priées de répondre au plus tard le 22 janvier 1998. Le gouvernement indique que la réduction de la période de consultation était justifiée car il s'efforçait de faire en sorte que la réglementation entre en vigueur dès le mois de mars (avant la fin de l'hiver), afin que les projets visant une production plus efficace des combustibles de chauffage puissent être financés et menés à bien au cours du printemps et de l'été. Le gouvernement fait également observer que l'OPZZ n'a jamais remis en question l'urgence de cette réglementation puisqu'elle a soumis ses commentaires le 20 janvier 1998.

696. Pour ce qui est du projet de loi de réforme de l'administration publique, le gouvernement explique que la nécessité de réduire le temps de consultations était attribuable, d'une part, au calendrier législatif très serré du Parlement et, d'autre part, au fait que ce projet de loi ne pouvait être finalisé avant l'adoption de certains autres, déterminant les domaines de compétence de nouveaux organes à créer du fait de la réforme de l'administration publique.

697. Enfin, pour ce qui est de la question de l'inégalité du traitement accordé aux syndicats, le gouvernement explique que la loi de 1991 sur le règlement des conflits collectifs ne lui permet pas d'être partie dans un de ces conflits. Cependant, il a passé des accords avec plusieurs organisations syndicales concernant les procédures de règlement en cas de conflit. En fait, le 29 mai 1992, il a signé un accord de ce type avec le syndicat «Solidarnosc». Cependant, le gouvernement indique que l'OPZZ n'a pas souhaité profiter de l'offre et qu'aucun accord n'a donc été signé avec ce syndicat, de sorte qu'il ne peut s'appuyer sur aucun antécédent juridique ou contractuel pour entrer dans des conflits collectifs avec le gouvernement.

Plainte du WZZPS

698. Dans une communication en date du 5 novembre 1998, le gouvernement a expliqué, à propos de la plainte présentée par le Syndicat des employés municipaux de Varsovie (WZZPS), que la première question sur laquelle porte le conflit collectif avec le président de la ville de Varsovie a été résolue le 2 octobre 1998. A cet égard, le gouvernement déclare qu'un accord a été conclu avec le plaignant devant le tribunal de district de la division du travail de Varsovie et que les parties ont convenu de mettre un terme au contrat d'emploi le 31 décembre 1998, à cause de l'élimination du poste de travail du plaignant, auquel d'ailleurs l'indemnité de licenciement a été entièrement versée.

699. En ce qui concerne la cessation du contrat d'emploi de la présidente du conseil du WZZPS, le gouvernement explique qu'elle a été effectuée en conformité avec l'article 52, paragraphe 1, du Code du travail, et que la décision a été prise par l'employeur de Mme Sikorka-Mrozek dont la conduite a été inacceptable puisqu'elle a utilisé ses congés maladie à d'autres fins que celles pour lesquelles ils étaient prévus. Pendant ces congés, Mme Sikorka-Mrozek menait à bien des activités syndicales sur le lieu de travail. Selon le gouvernement, Mme Sikorka-Mrozek, en tant que présidente du conseil du WZZPS, a décidé unilatéralement d'utiliser son poste de travail de la section de l'éducation du conseil du district de Zolibory dans le bureau 315 et d'en faire le bureau principal du syndicat. Son employeur a constaté le fait et l'a accepté afin d'assurer une coopération appropriée avec le syndicat. Cependant, compte tenu du comportement non coopératif de la présidente et du fait que son activité syndicale a entravé le travail de la section d'éducation, son employeur a proposé qu'elle utilise un autre bureau exclusivement à des fins syndicales. La présidente a refusé, prenant ensuite plusieurs mois de congé maladie et emportant avec elle la clé du bureau 315. Etant donné que des documents officiels se trouvaient dans ce bureau et que l'on ne pouvait plus y accéder, le travail de la section de l'éducation a été paralysé; le 6 octobre 1997, le bureau 315 a donc été ouvert par une commission, et la documentation syndicale qui s'y trouvait a été mise en sécurité. Mme Sikorka-Mrozek a porté plainte contre ces actions, et cette plainte a été rejetée une première fois par le Procureur du district et une deuxième fois en appel par le Procureur du canton. Le gouvernement mentionne également que Mme  Sikorka-Mrozek a depuis lors porté plainte auprès du tribunal du travail à propos de la cessation de son contrat d'emploi et qu'aucune décision n'a encore été prise en la matière.

Plainte du syndicat «Sprawiedliwoc»

700. Dans une communication datée du 6 novembre 1998, le gouvernement explique, en ce qui concerne la plainte présentée par le syndicat «Sprawiedliwoc», que, selon la section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre, M. Marek Grabowski, président du syndicat «Sprawiedliwoc», a créé ce syndicat et assumé la fonction de président afin de bénéficier d'une protection spéciale contre la réception d'une notification de cessation de son contrat d'emploi. La section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre déclare que du 9 janvier 1995 au 30 juin 1998 M. Grabowski était à la tête d'une section de publication et d'édition. Après une enquête interne menée le 13 mars 1998, M. Grabowski a été informé de l'évaluation négative du travail de sa section et de l'intention de son employeur de mettre un terme à son contrat d'emploi. Etant donné que M. Grabowski était en congé maladie entre le 17 mars et le 28 mars 1998, la notification de la cessation de son contrat ne lui a été soumise que le 30 mars 1998 (un lundi). Ce même jour, son employeur a été informé de la création du comité fondateur du syndicat «Sprawiedliwoc». Dans ce contexte, le gouvernement explique que M. Grabowski a porté plainte auprès du tribunal du travail et exigé que la notification de cessation de son contrat d'emploi soit annulée au vu de la protection à laquelle il avait droit selon la loi sur les syndicats.

701. Dans une communication en date du 27 janvier 1999, le gouvernement fait savoir que la section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre a interjeté un appel contre la décision du tribunal du travail du 2 septembre 1998 qui demandait la réinsertion de M. Grabowski.

C. Conclusions du comité

702. Le comité note que ce cas a trait à trois séries d'allégations présentées par trois plaignants différents et qu'il concerne, respectivement, le refus de consulter les organisations de travailleurs avant l'adoption de textes législatifs, la discrimination antisyndicale et le licenciement de dirigeants syndicaux.

Plainte de l'OPZZ

703. En ce qui concerne la première plainte, le comité note que le gouvernement reconnaît, dans tous les cas cités par le plaignant, qu'il n'a pas consulté les syndicats ou qu'il a réduit la période de consultation concernant divers projets de loi. Dans chaque cas, le gouvernement avance des raisons impératives afin de justifier le fait qu'il n'a pas respecté ses obligations de consultation avec les partenaires sociaux. Sur cet aspect du cas, le comité rappelle l'importance de la consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs lorsqu'il faut appliquer une législation qui touche à leurs intérêts. Tout en prenant bonne note des explications du gouvernement et du fait que, dans la grande majorité des cas, le principe de consultation semble avoir été respecté, le comité attire cependant l'attention du gouvernement sur les dispositions de la recommandation (no 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960, qui disposent que des mesures devraient être prises en vue de promouvoir une consultation et une collaboration efficaces entre les autorités publiques et les organisations d'employeurs et de travailleurs sans qu'aucune discrimination soit exercée à l'égard de ces dernières. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 928 et 929.] Le comité exprime l'espoir que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour respecter ces principes à l'avenir.

704. Pour ce qui est du deuxième aspect de la plainte de l'OPZZ, le comité note que, selon le gouvernement, il n'existe pas d'accord entre l'OPZZ et le gouvernement en ce qui concerne les procédures de règlement des conflits collectifs, tandis que de tels accords existent avec d'autres syndicats. Dans ces conditions, le comité ne peut qu'encourager les parties à entamer des négociations en vue de conclure un tel accord. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau touchant à cet aspect du cas.

Plainte du WZZPS

705. En ce qui concerne la plainte formulée par le WZZPS, le comité prend note, à partir des informations contenues dans le dossier, que le premier aspect de la plainte, qui porte sur une absence de négociation concernant un conflit du travail collectif, a été résolu lorsqu'un accord a été conclu avec le plaignant devant le tribunal de district de la division du travail de Varsovie.

706. En ce qui concerne le deuxième aspect de la plainte, à savoir la cessation du contrat d'emploi de Mme Sikorka-Mrozek et la violation des locaux syndicaux par l'employeur, le comité note les versions conflictuelles des deux parties. Le comité rappelle tout d'abord que l'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs, ainsi que les dirigeants syndicaux, doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi - licenciements, transferts, rétrogradations et autres actes préjudiciables. Cependant, le principe suivant lequel un travailleur ou un dirigeant syndical ne doit pas subir de préjudice en raison de ses activités syndicales n'implique pas nécessairement que le fait de détenir un mandat syndical doive conférer à son détenteur une immunité contre tout licenciement, quelles que puissent être les circonstances de celui-ci. Le comité a déjà fait observer par le passé que l'une des manières d'assurer la protection des délégués syndicaux est de prévoir que ces délégués ne peuvent être licenciés ni dans l'exercice de leurs fonctions, ni pendant un certain laps de temps suivant la fin de leur mandat, sauf évidemment en cas de faute grave. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 724, 725 et 727.] Le comité prend note du fait que le cas concernant Mme Sikorka-Mrozek n'a pas encore été jugé par le tribunal du travail. A cet égard, le comité prie le gouvernement de lui envoyer une copie du jugement dès qu'il sera rendu et, au cas où le tribunal aurait jugé que ce licenciement est lié à l'exercice d'activités syndicales légitimes, de s'assurer que Mme Sikorka-Mrozek soit réintégrée à son poste de travail et de tenir le comité informé des mesures prises à cet égard.

707. En ce qui concerne l'utilisation du bureau de Mme Sikorka-Mrozek dans la section de l'éducation en tant que bureau principal du syndicat et l'intrusion de son employeur dans ce bureau en son absence, le comité prend note des explications du gouvernement, mais il rappelle à nouveau l'importance qu'il attache au principe selon lequel les biens syndicaux devraient jouir d'une protection adéquate, et un contrôle judiciaire indépendant devrait être exercé par les autorités concernant l'occupation ou la mise sous scellés de locaux syndicaux étant donné les risques importants de paralysie que ces mesures font peser sur les activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 183-184.] Enfin, le comité prie le gouvernement de confirmer que le syndicat WZZPS peut exercer ses activités syndicales légitimes dans des locaux appropriés et de le tenir informé à cet égard.

Plainte du syndicat «Sprawiedliwoc»

708. En ce qui concerne la plainte présentée par le syndicat «Sprawiedliwoc», le comité note qu'à propos du licenciement de M. Marek Grabowski, président du comité fondateur de «Sprawiedliwoc», une décision en date du 2 septembre 1998 du tribunal du travail du district de Varsovie demande que M. Grabowski soit réintégré à son poste de travail aux mêmes conditions de travail et de rémunération dont il jouissait auparavant. Le comité note également que l'employeur de M. Grabowski, la section auxiliaire de la chancellerie du Premier ministre, a interjeté un appel contre cette décision du tribunal. L'employeur déclare que M. Grabowski a été licencié au seul motif de son incompétence et que la création d'un syndicat n'était qu'un prétexte pour obtenir une protection contre un licenciement imminent, alors que le plaignant souligne le fait qu'il a reçu sa notification de cessation de contrat d'emploi le jour même où il a informé son employeur de la création du syndicat «Sprawiedliwoc». Compte tenu du caractère contradictoire des motifs invoqués pour la cessation du contrat d'emploi de M. Grabowski, le comité ne peut que rappeler que nul ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d'emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 696.] Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats du jugement en appel de ce cas et de prendre les mesures nécessaires pour réintégrer M. Grabowski s'il est prouvé que son licenciement était de nature discriminatoire. Le comité prie également le gouvernement d'indiquer si le syndicat «Sprawiedliwoc» est en mesure d'exercer normalement ses activités.

Recommandations du comité

709. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 février 2000.