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La liberté d’association et la reconnaissance effective du droit à la négociation collective

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Maroc

Moyens d’appréciation de la situation

Evaluation du cadre institutionnel

Le cadre institutionnel de l’exercice de la liberté d’association et du droit de négociation collective est défini par les textes ci-après:

– la Constitution du Royaume telle qu’elle a été modifiée;

– dahir du 18 hija 1367 (16 juillet 1957) sur les syndicats professionnels;

– décret du 15 rejeb 1377 (5 février 1958) relatif à l’exercice du droit syndical par les fonctionnaires

– dahir du 10 Joumada Il 1380 (29 novembre 1960) portant institution d’un conseil supérieur des conventions collectives;

– dahir du 24 novembre 1994 portant création du Conseil consultatif chargé du suivi du dialogue social;

– et dahir du 24 février 1958 portant statut général de la fonction publique.

Le principe de la liberté d’association est reconnu par la Constitution dont l’article 9 dispose que la Constitution garantit à tous les citoyens:

    • la liberté d’opinion, la liberté d’expression sous toutes ses formes et la liberté de réunion;
    • la liberté d’association et la liberté d’adhérer à toute organisation syndicale de leur choix.

En matière de négociation collective, l’article 3 de la Constitution énonce que "les organisations syndicales, les chambres professionnelles concourent à l’organisation et à la représentation des citoyens".

La Constitution stipule, par ailleurs, qu’aucune limitation à l’exercice des libertés énumérées ci-dessus ne peut être apportée que par la loi.

Pour la concrétisation des principes énoncés par la Constitution en la matière, le dahir du 16 juillet 1957 précité prévoit, en son article 2, le droit pour les personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes, concourant à l’établissement de produits déterminés, ou la même profession libérale de constituer librement des organisations de leur choix.

L’exercice du droit d’association par les fonctionnaires est reconnu par l’article 14 du dahir du 24 février 1958 qui leur reconnaît le droit d’exercer le droit syndical dans les conditions prévues par la législation en vigueur. Ce même article précise que l’appartenance ou la non-appartenance à un syndicat ne doit entraîner aucune conséquence en ce qui concerne le recrutement, l’avancement, l’affectation et d’une manière générale la situation des fonctionnaires.

La reconnaissance effective du droit à la négociation collective découle de l’application des dispositions des articles 1 et 2 du dahir du 17 avril 1957 relatif à la convention collective du travail qui énoncent expressément que les conventions collectives du travail, portant sur les conditions d’emploi et de travail, peuvent être conclues entre les représentants d’un ou plusieurs syndicats professionnels de travailleurs, d’une part, et un ou plusieurs employeurs ou leurs groupements professionnels, d’autre part.

L’exercice du droit d’organisation et de négociation collective est également reconnu en vertu d’instruments internationaux ratifiés par le Maroc, notamment:

– la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949;

– le Pacte international sur les droits économiques et sociaux, et

– la convention nº 11 de l’OIT sur la négociation collective.

Pour les travailleurs et les employeurs du secteur privé, il n’existe aucune exclusion ou limitation au droit de constituer des organisations syndicales et de s’y affilier et ou au droit à la négociation collective. Il en est de même pour les fonctionnaires et les travailleurs du secteur public ou semi-public. Bien que ces derniers ne sont pas assujettis aux dispositions du dahir de 1957 relatif à la convention collective, il n’en demeure pas moins qu’ils exercent effectivement le droit de négocier leurs conditions de travail dans le cadre des mécanismes prévus par la Déclaration commune du 1er août 1996 dont copie a été déjà communiquée au BIT.

Les seules exclusions prévues en matière d’exercice du droit syndical concernent les catégories de personnel ci-après:

– les fonctionnaires et agents exerçant une fonction comportant le droit d’utiliser une arme;

– les personnes relevant du statut particulier des administrateurs du ministère de l’Intérieur;

– les magistrats.

Concernant les conditions de mise en place d’organisations d’employeurs et de travailleurs, aucune autorisation préalable n’est exigée par la législation nationale en vigueur. La seule condition de forme prévue à ce sujet est le dépôt dans les bureaux de l’autorité compétente ou l’envoi à ladite autorité, par lettre recommandée avec accusé de réception, des documents désignés ci-après:

– les statuts du syndicat;

– la liste complète des personnes chargées à un titre quelconque de son administration ou de sa direction. Cette liste devrait indiquer les noms, prénoms, filiation, date et lieu de naissance, nationalité, profession et domicile des intéressés. Ceux-ci doivent être de nationalité marocaine, jouir de leurs droits civils et po1itiques.

Les pouvoirs publics ne peuvent en aucun cas intervenir dans le fonctionnement d’une organisation d’employeurs ou de travailleurs. Celles-ci jouissent en effet du droit absolu d’élaborer leurs statuts et de gérer librement leurs activités. L’article 19 du dahir du 16 juillet 1957 précise que "les syndicats professionnels peuvent librement se concerter pour l’étude et la défense de leurs intérêts communs". Ils ont également le droit d’acquérir à titre gratuit ou à titre onéreux des biens meubles ou immeubles. Ils ont par ailleurs le droit d’ester en justice et ne peuvent en aucun cas faire l’objet de dissolution ou de suspension que par voie judiciaire ou par une décision conforme à leurs statuts.

Comme indiquée ci-dessus, aucune catégorie d’organisations de travailleurs et aucune catégorie d’employeurs ne sont exclues des mécanismes et procédures mis en place pour assurer l’application effective du droit de négociation collective. La législation nationale ne prévoit pas d’autorisation préalable à la conclusion des conventions collectives. Toutefois, celles-ci doivent être déposées, sans frais, par la partie la plus diligente au secrétariat-greffe du tribunal compétent et au ministère chargé des questions du travail. Elles ne peuvent être appliquées qu’à l’expiration du troisième jour suivant celui de leur dépôt au ministère chargé du travail.

Les moyens de mise en œuvre du principe de la liberté d’association et de la reconnaissance effective du droit à la négociation collective consistent en:

– la mise en place d’un cadre institutionnel approprié favorable à l’exercice du droit syndical;

– la redynamisation du Conseil supérieur des conventions collectives;

– l’organisation de séminaires tripartites nationaux avec le concours du BIT sur la liberté syndicale et la négociation collective;

– la création du Conseil consultatif chargé du suivi du dialogue social;

– la mise en place de deux services administratifs au sein de la direction du travail chargés de promouvoir la négociation collective et d’animer le dialogue social dans les différentes branches d’activité économique;

– le suivi des relations professionnelles et le règlement des différends collectifs du travail dans le cadre des réunions régulières des commissions nationales et régionales d’enquête et de conciliation;

– et le soutien technique de l’inspection du travail à la conclusion des conventions collectives.

Evaluation de la situation dans la pratique

A la faveur des facilités accordées tant aux travailleurs qu’aux employeurs en matière de liberté syndicale, pas moins de 17 centrales syndicales, dont trois plus représentatives, ont été constituées. Elles sont implantées dans toutes les branches d’activité économique et prennent une part active aux réunions des commissions d’enquête et d’investigation ainsi qu’aux délibérations du Conseil consultatif chargé du suivi du dialogue social, du Conseil national de la jeunesse et de l’avenir, du Conseil consultatif des droits de l’homme et de la Commission nationale du dialogue social.

Il y a lieu de préciser, toutefois, qu’aucune donnée statistique précise sur le taux de syndicalisation et sur les tendances syndicales n’est actuellement disponible.

Les efforts déployés ou envisagés en vue
du respect, de la promotion et de la réalisation
de ces principes et droits

Les mesures envisagées à cette fin se focalisent sur la poursuite des objectifs suivants: assurer une pleine harmonie entre la législation nationale et les normes internationales concernant la liberté syndicale et le droit d’organisation et de négociation collective.

On peut citer à cet égard certaines dispositions prévues dans le projet de Code du travail et dans le projet de loi modifiant le dahir du 16 juillet 1957, lesquelles sont destinées à donner plein effet à la convention nº 98. Il s’agit notamment des dispositions visant à interdire toute discrimination fondée sur l’activité syndicale des travailleurs; proscrire les ingérences intersyndicales; garantir la liberté syndicale par l’application de sanctions appropriées en cas d’entrave à l’exercice du droit syndical.

Il y a lieu de souligner que le projet de loi cité ci-dessus est actuellement en discussion au Parlement; encourager la négociation collective en tant qu’instrument de développement des relations professionnelles.

En plus des initiatives déjà évoquées dans le présent rapport, d’autres mesures sont envisagées pour promouvoir la négociation collective. Elles peuvent être résumées comme suit:

– la mise en place d’un cadre institutionnel approprié pour le règlement des conflits collectifs du travail;

– le lancement de campagnes de sensibilisation à travers l’organisation de séminaires, de colloques et de tables rondes sur la négociation collective;

– le renforcement de la protection des représentants des travailleurs par la ratification des conventions pertinentes de l’OIT;

– la mise en place de deux comités techniques tripartites issus de la dernière réunion du Conseil supérieur des conventions collectives. Ces deux comités qui se réunissent régulièrement depuis le mois de mai 1999 ont pour mission l’examen des textes législatifs et réglementaires en vigueur en vue de leur modification éventuelle, et la proposition des mesures concrètes qui sont de nature à promouvoir et à vulgariser la négociation collective et

– la diffusion, prochainement, d’une circulaire destinée aux délégués provinciaux et préfectoraux de l’emploi pour les exhorter à provoquer des rencontres tripartites, à l’échelon local, en vue d’identifier les entreprises et les branches d’activité dont les rapports sociaux peuvent être réglementés par voie de conventions collectives.

Les organisations représentatives d’employeurs
et de travailleurs auxquelles copie du rapport
a été communiquée

Copie du présent rapport sera communiquée aux organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives ci-après: Confédération générale des entreprises du Maroc; Fédération des chambres de commerce, d’industrie et de services au Maroc; Confédération démocratique du travail; Union marocaine du travail; Union générale des travailleurs du Maroc.

Observations reçues des organisations
d’employeurs et de travailleurs

Aucune observation n’a été reçue.


Observations soumises au Bureau par la Confédération
internationale des syndicats libres (CISL)

Le Maroc n’a pas ratifié la convention nº 87 de l’OIT et ne paraît pas être en position de la ratifier dans un futur proche.

Dans le secteur privé, des syndicalistes sont licenciés, condamnés à des amendes et emprisonnés pour le simple fait d’appartenir à des syndicats, de mener des activités syndicales ou de partir en grève. Les employeurs sont régulièrement de mèche avec la police qui recourt souvent à la violence contre les grévistes. Des charges criminelles peuvent être, et sont souvent, retenues contre des grévistes pour "atteinte à la liberté du travail" et le gouvernement prend rarement des mesures contre les employeurs qui refusent de payer le salaire minimum et les contributions à la sécurité sociale, ferment illégalement des usines et exercent des représailles contre des syndicalistes. L’élection de dirigeants syndicaux dans une entreprise a même poussé la direction à appeler les forces de police sur place.

Depuis le début de septembre 1999, au moins 30 syndicalistes ont été arrêtés et ils ont été condamnés à la prison et au paiement des amendes, tandis qu’un grand nombre de syndicalistes ont été licenciés pour avoir participé à des grèves.

[Référence est faite aux informations de nature similaire à une plainte par rapport à différents types d’actions spécifiques de la police, et à la mise en détention de dirigeants et membres des syndicats.]

 

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Mise à jour par CG. Approuvée par NdW. Dernière modification: 5 Mai 2000.