L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
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GB.277/2/1
277e ession
Genève, mars 2000


DEUXIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

Date, lieu et ordre du jour
de la 90
e session (2002)
de la Conférence

Table des matières

Date

Lieu

Ordre du jour


Date

1.    Conformément aux dispositions adoptées par le Conseil d'administration à sa 254e session (novembre 1992);[1], il est proposé que la 90esession (2002) de la Conférence internationale du Travail s'ouvre le mardi 4 juin 2002.

Lieu

2.    Il est proposé que la session se tienne à Genève.

Ordre du jour

3.    La Conférence sera saisie des questions inscrites d'office, à savoir:

4.    L'ordre du jour de la 89e session (2001) de la Conférence, tel qu'établi par le Conseil d'administration à sa 274e session (mars 1999), comprend les trois questions suivantes:

  1. Sécurité et santé dans l'agriculture (deuxième discussion).
  2. Promotion des coopératives (première discussion).
  3. Sécurité sociale - Questions, défis et perspectives (discussion générale).

5.    Au cours de sa session de novembre 1999, le Conseil d'administration a demandé au Bureau de lui faire rapport à sa présente session sur trois questions préliminaires: le calendrier des décisions relatives à l'inscription de questions à l'ordre du jour de la Conférence pour discussion générale, la question de la protection des travailleurs se trouvant dans des situations identifiées par la Commission du travail en sous-traitance, et la procédure relative à la question concernant la promotion des coopératives.

6.    Calendrier des décisions. La procédure actuelle prévoit que toutes les questions inscrites à l'ordre du jour de la Conférence sont choisies par le Conseil d'administration plus de deux ans à l'avance, c'est-à-dire en mars 2000 pour une discussion devant se tenir en juin 2002. Ce délai très long est à l'évidence nécessaire pour les questions normatives, dont la préparation requiert normalement au moins 26 mois à partir du moment où la décision est prise par le Conseil d'administration. Par conséquent, le calendrier des décisions concernant les questions normatives ne devrait pas être modifié et, si le Conseil d'administration souhaite inscrire une telle question à l'ordre du jour de la Conférence de 2002, il doit prendre sa décision en mars 2000.

7.    Cependant, plusieurs membres du Conseil d'administration ont évoqué, en novembre 1999, la possibilité de retarder les décisions en ce qui concerne les questions pour discussion générale. Pouvoir choisir une question pour discussion générale à une date plus proche de la tenue de la session de la Conférence à laquelle elle sera discutée permettrait en effet de choisir des thèmes d'une plus grande actualité. Il ne fait pas de doute que la préparation des questions pour discussion générale offre plus de souplesse que celle des questions normatives. Selon le règlement de la Conférence, la préparation des questions qui feront l'objet d'une discussion générale suppose l'élaboration d'un rapport qui doit parvenir aux gouvernements au plus tard deux mois avant l'ouverture de la session de la Conférence à laquelle elles doivent être discutées;[2]. Plusieurs mois sont nécessaires pour traduire, éditer et imprimer le rapport. Toutefois, ce qui prend le plus de temps est d'organiser des consultations régionales et d'en incorporer les résultats dans le rapport. Selon la pratique actuelle du Bureau, ces consultations sont menées régulièrement pour solliciter et refléter l'avis des mandants de façon plus universelle. Si le Conseil d'administration considère que ces consultations régionales sont utiles et devraient être poursuivies, il conviendrait de noter qu'il faut huit mois pour les organiser, préparer le rapport et le communiquer à temps aux gouvernements. Par conséquent, il serait possible de retarder la décision visant à inscrire une question pour discussion générale à l'ordre du jour de la Conférence, mais au plus tard jusqu'à la prochaine session du Conseil d'administration, c'est-à-dire en novembre de la même année.

8.    Dans certains cas, des questions choisies par le Conseil d'administration pour discussion générale peuvent ultérieurement faire l'objet d'une action normative. Ces questions sont régies par les mêmes règles que les autres questions faisant l'objet d'une discussion générale en ce qui concerne la première discussion. Toutefois, une action normative ultérieure sur la même question ne peut normalement avoir lieu que trois ans après la première discussion;[3].

9.    En résumé, le Conseil d'administration est invité à examiner s'il souhaite modifier le calendrier des décisions visant à inscrire des questions pour discussion générale à l'ordre du jour de la Conférence. Dans l'affirmative, les questions proposées seraient classées en deux catégories:

10.    Protection des travailleurs se trouvant dans les situations identifiées par la Commission du travail en sous-traitance. Comme rappelé à la session de novembre 1999 du Conseil d'administration, celui-ci a été invité, par une résolution de la Conférence de 1998, à inscrire cette question à l'ordre du jour d'une session future de la Conférence internationale «en vue de l'adoption possible d'une convention complétée par une recommandation, […] de façon que ce processus soit mené à son terme dans un délai qui ne dépasse pas quatre ans [c'est-à-dire 2002] à compter de cette année»;[4]. Cette résolution implique:

Par conséquent, le Conseil d'administration, à sa présente session, devrait envisager la possibilité d'inscrire la question de la protection des travailleurs se trouvant dans les situations identifiées par la Commission du travail en sous-traitance à l'ordre du jour de la Conférence de 2002.

11.    La résolution de la Conférence donne instruction au Conseil d'administration de poursuivre l'examen des questions découlant des travaux de la Commission de la Conférence sur le travail en sous-traitance, qui s'est tenue en 1998. A cet égard, le Conseil d'administration a demandé au Bureau de lui faire rapport sur l'état d'avancement des travaux à sa présente session.

12.    En ce qui concerne l'état d'avancement des travaux il faut signaler que, depuis 1998, le Bureau a commandité 27 études nationales sur le besoin de protection des travailleurs se trouvant dans des situations spécifiques;[5]. Les résultats de ces études ont été examinés au cours de cinq réunions régionales informelles;[6]. Il semble que ces travaux préparatoires confirment la nécessité d'aborder le problème important qu'est la protection insuffisante de travailleurs se trouvant dans certaines situations et la possibilité de le faire par une action normative de la Conférence. Ce travail prépare aussi la réunion d'experts sur les travailleurs se trouvant dans des situations où ils ont besoin de protection, qui, conformément à la décision prise par le Conseil d'administration à sa 275esession (juin 1999);[7], aura lieu du 15 au 19 mai 2000. La réunion discutera également du titre de cette question.

13.    Dans ces conditions, le Conseil d'administration est invité à procéder en deux étapes. Conformément à la résolution de la Conférence de 1998, il devrait, à sa présente session, inscrire la question de la protection des travailleurs se trouvant dans les situations identifiées par la Commission du travail en sous-traitance (sous ce titre provisoire) à l'ordre du jour de la 90e session de la Conférence. A sa 278e session (juin 2000) et, si nécessaire, à sa 279e session (novembre 2000), le Conseil d'administration aura la possibilité d'examiner les recommandations de la réunion d'experts qui se sera tenue en mai et de prendre la décision finale au sujet du travail préparatoire ultérieur. Quant au titre de la question à l'ordre du jour, qui émane de la résolution de la Conférence, le Conseil d'administration pourrait le modifier, en juin ou plus tard, compte tenu des résultats de la réunion d'experts.

14.    Promotion des coopératives. Conformément à la décision prise par le Conseil d'administration en mars 1999 d'examiner cette question en première discussion lors de la 89e session (2001) de la Conférence, une deuxième discussion aura lieu à ce sujet en 2002. En novembre 1999, la question s'est posée de savoir si le Conseil d'administration pourrait décider à ce stade que cette question devrait être préparée conformément à la procédure de simple discussion. Le Bureau, conformément à la décision de mars 1999, a déjà préparé et transmis aux gouvernements le rapport préliminaire et le questionnaire requis en vertu de la procédure de double discussion;[8]. Ce rapport et ce questionnaire ne visent pas et ne peuvent viser le même objectif que le rapport succinct qui aurait été établi si une procédure de simple discussion avait été adoptée;[9]. Il ne serait donc pas possible de préparer la question de la promotion des coopératives en vue d'une simple discussion à temps pour la 89e session de la Conférence (2001). Qui plus est, les préparatifs entrepris jusqu'à présent ont révélé plusieurs problèmes techniques que la Conférence devra examiner de près au cours de deux sessions différentes en vue de parvenir à un consensus. Il s'agit notamment des questions suivantes: limitation possible des prérogatives de l'Etat en matière de gestion des entreprises coopératives; égalité de traitement entre les coopératives et d'autres formes d'entreprises; suppression des subventions et des privilèges fiscaux; privatisation des services d'appui aux coopératives tels que formation à la gestion, consultation technique, comptabilité et mobilisation des investissements.

15.    Une question normative sur la promotion des coopératives serait donc inscrite à l'ordre du jour de la Conférence de 2002 en vue d'une deuxième discussion. Par ailleurs, conformément à la résolution de 1998 de la Conférence, devrait aussi figurer à l'ordre du jour de cette session la question de la protection des travailleurs se trouvant dans les situations identifiées par la Commission du travail en sous-traitance et constituerait en principe une deuxième question normative. Etant donné que normalement la Conférence ne traite que de deux questions normatives à la même session, en suivant cette pratique le Conseil d'administration devrait choisir une question pour discussion générale afin de compléter l'ordre du jour de la session de 2002 de la Conférence. Il pourrait le faire à sa présente session ou, s'il décide de modifier le calendrier des décisions relatives à l'inscription à l'ordre du jour de questions pour discussion générale (voir paragraphes 6-9 ci-dessus), choisir cette question à sa 279e session (novembre 2000) et ainsi compléter l'ordre du jour de la Conférence de 2002.

16.    Sous réserve des considérations ci-dessus, on rappellera qu'à sa 276esession (novembre 1999), le Conseil d'administration a examiné le portefeuille de propositions lors de sa discussion préliminaire sur l'ordre du jour de la Conférence de 2002;[10]. Il a établi une liste restreinte de questions (pour action normative et pour discussion générale) devant faire l'objet d'un examen plus approfondi à sa présente session, et a décidé de demander des rapports sur la législation et la pratique ou des propositions plus détaillées sur les six questions suivantes:

17.    On se rappellera que les questions 1, 2, 4 et 6 a) et b) ont fait l'objet de propositions faites antérieurement au Conseil d'administration, et la dernière fois à sa 274e session (mars 1999);[11]. Les questions 1 et 2 demeurent pour ainsi dire inchangées mais, par commodité, elles sont reproduites dans le présent document. La question 4 a été modifiée à la lumière des débats du Conseil d'administration en novembre 1999, et la question 6 l'a été conformément à la proposition sur le même sujet contenue dans le portefeuille en novembre 1999. Les questions 3 et 5 font pour la première fois l'objet d'une proposition détaillée au Conseil d'administration.

18.    Le type d'action qui pourrait être choisi en fonction de cette liste devrait tenir compte des observations du paragraphe 15 ci-dessus. Comme indiqué, les questions 1 et 6 a) et b) sont soumises en vue d'une action normative, et les questions 2, 3, 4 et 5 en vue d'une discussion générale. En ce qui concerne la dernière, l'un des points pour discussion concerne la possibilité d'une action normative.

19.    L'attention du Conseil d'administration est attirée sur le fait que le Bureau propose aussi d'inscrire à l'ordre du jour de la 90e session de la Conférence (2002) la question du retrait de 20 recommandations obsolètes. Cette question est examinée dans un document séparé [12].

20.    Le Conseil d'administration est donc invité:

1.      Nouvelles dispositions concernant
la discrimination dans l'emploi
et la profession - Extension des critères de discrimination prohibés par l'article 1 de la convention nº 111

Résumé

Dans son étude spéciale de 1996 sur la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, la commission d'experts a conclu qu'un certain nombre de motifs pour lesquels la discrimination est interdite dans d'autres normes de l'OIT, dans d'autres normes internationales, et surtout dans les législations nationales, ne sont pas couverts par cette convention. Or la convention n111 constitue le principal instrument de l'OIT dans le domaine de la lutte contre la discrimination. Il est donc recommandé que le Conseil d'administration envisage l'adoption d'un protocole, qui ne porterait pas révision de la convention en tant que telle mais qui permettrait aux pays l'ayant ratifiée d'accepter formellement des critères additionnels sur la base desquels la discrimination serait interdite. Cela renforcerait la protection offerte par l'OIT contre la discrimination, et permettrait d'harmoniser les normes de l'OIT avec des instruments internationaux plus récents dans le domaine des droits de l'homme adoptés par d'autres organisations et avec une pratique nationale en évolution. Une proposition tendant à adopter un protocole permettant aux pays de prendre des dispositions pour renverser la charge de la preuve, dans certaines circonstances, dans les cas de discrimination alléguée, n'a pas reçu un accueil favorable au cours des discussions au Conseil d'administration et n'est pas reprise à ce stade.

Introduction

21.    Dans son étude spéciale de 1996 sur la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a recommandé qu'on examine la possibilité d'adopter un protocole additionnel à la convention qui introduirait des critères supplémentaires sur la base desquels la discrimination serait interdite en vertu de la convention, afin de tenir compte des changements intervenus dans ce domaine qui sont reflétés dans les législations nationales, et en y incluant des critères qui figurent déjà dans d'autres conventions de l'OIT;[13].

22.    La commission d'experts n'a pas proposé de réviser la convention, mais d'y ajouter un protocole qui pourrait être ratifié en sus de cette convention soit par les pays qui l'ont déjà ratifiée, soit au moment de la ratification. La convention no 111, l'une des normes fondamentales de l'OIT, resterait inchangée. Il semble y avoir un accord général sur le fait que la démarche consistant à reprendre et à élargir les critères sur la base desquels la discrimination devrait être interdite dans l'emploi et la profession aurait la préférence si ce sujet était traité.

Etat de la législation et de la pratique nationales

23.    La convention no 111 fait obligation aux Etats qui l'ont ratifiée de prendre des mesures pour lutter contre la discrimination dans l'emploi et la profession fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale. Cependant, la commission a estimé qu'il existait suffisamment d'éléments dans la législation nationale sur la discrimination ou dans d'autres conventions de l'OIT pour justifier l'adoption d'un protocole qui permettrait aux Etats de souscrire des obligations supplémentaires fondées sur tout ou partie des critères suivants (énumérés par ordre alphabétique): âge, état de santé, fortune, handicap, langue, nationalité, orientation sexuelle, responsabilités familiales et situation matrimoniale. Des indications sont données ci-après sur la façon dont ces critères sont traités dans la législation et la pratique nationales.

Age

24.    L'âge est un critère très fréquemment mentionné dans les législations nationales récentes. Il se trouve par exemple en Nouvelle-Zélande dans l'article 21 de la loi sur les droits de l'homme du 1er février 1994; en Croatie, il est prévu à l'article 2 de la loi sur le travail de 1995; l'article 23(3) de la nouvelle Constitution de la République d'Equateur adoptée le 5 juin 1998 énonce l'égalité des droits et des chances, ainsi que les libertés reconnues à tous les individus, sans discrimination, notamment sur la base de l'âge; ce critère se trouve également à l'article 5 du Code du travail du Niger de juin 1996, à l'article 26 de la loi organique sur le travail de 1997 du Venezuela, à l'article 4 du Code du travail de Côte d'Ivoire ou à l'article 246 du Code du travail du Tchad. En France, en vertu de l'article L.122-14-11 du Code du travail, une disposition prévoyant une rupture de plein droit du contrat de travail d'un salarié en raison de son âge ou du fait qu'il serait en droit de bénéficier d'une pension de vieillesse serait nulle. La situation est analogue aux Etats-Unis en vertu de décisions judiciaires, érigées ultérieurement en dispositions législatives. L'Australie, selon les rapports du gouvernement sur l'application de la convention no 111, étudie la possibilité de prévenir toute discrimination fondée sur l'âge.

Etat de santé

25.    L'état de santé ne devrait pas être un motif acceptable de refus d'un emploi ou de licenciement, en l'absence d'une relation très stricte entre l'Etat de santé présent du travailleur et les exigences professionnelles normales requises pour l'exercice d'un emploi donné. Des mesures de différents types ont été adoptées à cet égard suivant les pays:

Handicap

26.    De plus en plus de pays ont adopté des mesures visant à protéger les handicapés et à promouvoir l'égalité de chances entre eux et les autres travailleurs. Le Code du travail du Gabon, entré en vigueur en 1995, contient par exemple en son chapitre 5 une série de dispositions pour la protection des handicapés. D'autres mesures de protection spécifiques des droits des travailleurs handicapés se trouvent dans certaines législations nationales. En Nouvelle-Zélande, il s'agit de mesures pour la protection de l'emploi des personnes handicapées contenues dans les lois sur les personnes handicapées de 1960 et de 1975. En Pologne, on peut citer la loi de 1991 sur l'emploi et la réadaptation professionnelles des handicapés. Plusieurs pays, dont l'Equateur, l'Espagne, le Koweït, le Niger et la Suède, prévoient une législation interdisant de faire une discrimination en matière d'emploi et de profession en raison du handicap.

Orientation sexuelle

27.    On observe que, de plus en plus, les Etats Membres se dotent de dispositions législatives protégeant spécifiquement les travailleurs susceptibles de faire l'objet d'une discrimination au motif de leur orientation sexuelle. Des constitutions interdisent explicitement la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. On trouve de telles interdictions dans la Constitution provisoire de l'Afrique du Sud, dans la Constitution de l'Allemagneainsi que dans les lois fondamentales des Länderde Brandebourg et de Thuringe. L'article 23(3) de la nouvelle Constitution de l'Equateur adoptée le 5 juin 1998 énonce l'égalité des droits et des chances ainsi que les libertés reconnues à tous les individus, sans discrimination notamment sur la base de l'orientation sexuelle. Une législation interdisant explicitement la discrimination fondée sur le critère de l'orientation sexuelle existe notamment au Danemark, en France et en Nouvelle-Zélande. Aux Pays-Bas, la loi renforce les sanctions pénales punissant notamment tout acte public de haine ou de discrimination motivé par des inclinations sexuelles. En Australie, la loi sur les relations de travail de 1988 cite expressément la nécessité de prévenir et d'éliminer toute discrimination fondée sur les préférences sexuelles.

Champ d'application d'autres normes

28.    La commission d'experts a aussi accordé une grande attention, dans l'étude spéciale, à la question des critères additionnels de discrimination qui figurent dans d'autres normes de l'OIT. Bien qu'elle soit le principal instrument de l'OIT en matière de prévention contre la discrimination, la convention no 111 n'aborde pas de nombreux domaines dans lesquels les normes de l'OIT offrent la protection la plus solide - souvent la seule - du droit international. Il s'agit notamment de l'âge;[14], de la nationalité;[15], de l'appartenance syndicale;[16], du handicap;[17]et des responsabilités familiales;[18]. L'adoption d'un protocole approprié permettrait de renforcer cette protection et améliorerait la cohérence des activités de conseil et de contrôle de l'OIT en la matière. C'est peut-être là un point particulièrement important dans le contexte du travail de révision de ces normes que l'OIT a entrepris pour en faire un ensemble plus cohérent.

29.    Par exemple, la convention (no 158) sur le licenciement, 1982, qui a été adoptée après la convention no 111, interdit le licenciement pour des motifs tels que la race, la couleur, le sexe, l'état matrimonial, les responsabilités familiales, la grossesse, la religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale, l'origine sociale ou l'absence de travail pendant le congé de maternité. La convention (no 156) sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales recommande la protection des personnes contre la discrimination, telle que définie dans la convention no111, sur la base de leurs responsabilités familiales.

30.    Enfin, les normes sur les droits de l'homme qui ont été adoptées par d'autres organisations internationales depuis l'adoption de la convention de l'OIT en 1958 ont élargi la protection apportée en matière de discrimination par la législation internationale, sans que la convention la plus importante de l'OIT sur ce sujet ne couvre tous ces critères;[19]. La commission d'experts a déclaré que «afin d'être cohérent avec la législation internationale sur les droits de l'homme, il conviendrait de tenir compte de cette législation lors de l'examen de la présente convention». Parmi ces autres instruments, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ICESCR) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ICCPR), tous deux adoptés en 1966 et désormais largement ratifiés, contiennent tous deux le paragraphe suivant:

Conclusions

31.    Le Conseil d'administration est par conséquent invité à réexaminer la proposition de la commission d'experts d'examiner un protocole à la convention no 111 énonçant d'éventuels critères additionnels de discrimination. La commission a recommandé au Conseil d'administration et à la Conférence d'examiner deux solutions possibles. La première consisterait à permettre aux Etats de ratifier le protocole et de choisir ceux des critères additionnels énumérés dans celui-ci qu'ils souhaiteraient accepter en tant qu'obligation supplémentaire au titre de la convention (voir la liste indicative figurant plus haut). La seconde consisterait à adopter un «noyau dur» de critères qui devraient être acceptés lors de la ratification du protocole, tout en laissant les Etats libres d'accepter d'autres critères figurant dans la liste, formule qui a été accueillie favorablement par la plupart de ceux qui l'avaient mentionnée lors de consultations antérieures. La commission a considéré que cela devrait être fait sans modifier l'instrument existant, simplement en adoptant un protocole qui pourrait être ratifié librement.

32.    La commission d'experts a aussi noté qu'il existe déjà dans la convention no 111 une disposition permettant au gouvernement de souscrire des obligations en vertu de critères autres que ceux énumérés dans la convention. L'article 1, paragraphe 1 b), dispose que la définition de la discrimination peut être modifiée de façon à inclure toute autre distinction, exclusion ou préférence qui pourra être déterminée par le Membre intéressé après consultation des organisations représentatives des employeurs et des travailleurs. Certains orateurs lors de précédentes consultations auraient préféré que l'on suive cette voie, mais la commission d'experts a proposé le protocole, qui lui a paru un meilleur moyen de permettre aux Etats d'élargir les critères qui figurent dans la convention. On peut aussi noter que la suggestion faite aux gouvernements par la commission d'experts d'avoir recours au paragraphe 1 b)de l'article 1 n'a pas encore reçu un accueil favorable.

33.    On peut concevoir que le protocole différerait de l'article 1, paragraphe 1 b), sur plusieurs points importants. Il convient de noter que le texte de la convention n'indique pas clairement la manière dont la détermination susvisée devrait être prise ou communiquée à la commission d'experts, alors qu'un protocole, au contraire, serait clairement ouvert à une ratification expresse. Une fois adopté, le protocole devrait être soumis aux autorités compétentes de tous les Etats Membres de la même manière que les conventions et recommandations, de sorte qu'il devrait faire l'objet d'un examen officiel de la part des gouvernements. Les gouvernements qui ont ratifié la convention ne sont pas tenus de procéder à des consultations officielles sur les critères de discrimination prévus par la convention no 111, et il apparaît en fait qu'ils ne le font pas.

34.    Pour les gouvernements, la ratification du protocole constituerait une obligation internationale ainsi qu'un engagement public de respecter les critères qu'ils ont acceptés, engagement autour duquel pourraient s'articuler les mesures prises contre la discrimination dans l'emploi et la profession. Moyennant des modalités diverses pour les différents systèmes juridiques nationaux, cette ratification permettrait d'inscrire les critères retenus dans la législation nationale et les engagements internationaux d'une manière que ne permettrait pas une déclaration volontaire au titre de l'article 1 de la convention. Enfin, il n'y a pas de contradiction entre la formule du protocole additionnel et celle des déclarations additionnelles faites en vertu de l'article 1 de la convention - ces deux approches sont compatibles et pourraient se compléter si les gouvernements envisageaient de recourir à la procédure prévue par la convention.

2.      Emploi des femmes

Résumé

Les femmes ont réalisé des avancées considérables sur le marché du travail; dans de nombreux pays, elles représentent désormais près de la moitié de la population active. Toutefois, les marchés du travail masculin et féminin demeurent très fortement cloisonnés. Près de la moitié des travailleurs dans le monde exercent des métiers répondant à des stéréotypes sexuels. Un nombre extrêmement élevé de femmes sont reléguées dans les «emplois féminins» - situés au bas de l'échelle hiérarchique, souvent précaires, dangereux et mal rémunérés - que les hommes refusent toujours de faire. Même pour un travail analogue, le salaire des femmes est en général de 20 à 30 pour cent inférieur à celui des hommes. Si un plus grand nombre de femmes occupent des postes de cadre moyen, elles sont loin d'avoir investi les conseils d'administration ou les parlements où que ce soit dans le monde. Seul un nombre infime d'entre elles parvient encore de nos jours à atteindre les plus hauts échelons de la hiérarchie. Si elles souhaitent aussi fonder une famille, leurs chances de réussite s'amenuisent encore. Tenter de concilier responsabilités professionnelles, familiales et civiques demande une énergie et une volonté exceptionnelles. La baisse des taux de natalité dans certains pays industrialisés peut s'expliquer par le fait que les femmes privilégient leur carrière au détriment de la création d'un foyer, car elles ne se sentent pas en mesure de faire face au double fardeau de responsabilités que cela implique. Dans tous les pays, l'entrée des femmes sur le marché du travail a eu un profond retentissement sur la vie des hommes. Le modèle traditionnel du chef de famille pourvoyeur de revenus est remis en question dans le monde entier. Les hommes et les femmes doivent faire face au nouvel état de fait que constitue le travail des femmes et des mères de famille, qui nécessite d'urgence une répartition plus équitable des soins à donner aux enfants et des responsabilités familiales et communautaires. La lutte contre la discrimination fondée sur le sexe dans le domaine de l'emploi et de la profession n'a donc pas seulement pour objet de faire respecter un droit fondamental, elle entraînera aussi une modification profonde des sociétés et des économies futures et aura une incidence sur la qualité de vie des femmes et des hommes. L'OIT peut exercer une influence déterminante sur la direction que prendront ces évolutions.

Part croissante des femmes
dans la population active

35.    L'un des phénomènes les plus frappants du XXe siècle aura été l'augmentation considérable du nombre de femmes qui exercent une activité rémunérée. Avec la mondialisation, les progrès révolutionnaires dans les techniques de l'information et de la communication et la croissance des économies de services modernes, le taux d'activité des femmes a non seulement augmenté, mais il a connu une croissance supérieure à celui des hommes. Depuis 1980, la croissance de la main-d'œuvre féminine a été considérablement plus rapide que celle de la main-d'œuvre masculine dans toutes les régions du monde à l'exception de l'Afrique.

36.    Il est essentiel de comprendre toutefois la dynamique qui anime l'accroissement de la participation des femmes à la main-d'œuvre - à la fois parce que les différences de conditions entre les hommes et les femmes ont eu une incidence sur la manière dont les pays ont fait face aux mutations rapides de l'économie mondiale et parce que les relations entre les sexes ont elles-mêmes été transformées par les forces économiques libérées par la mondialisation. Nous examinerons ci-après les conséquences qu'ont eues ces mutations sur les aspects quantitatif et qualitatif de l'emploi des hommes et des femmes.

37.    Tout d'abord, pour répondre à la montée de la concurrence étrangère et à la volatilité des marchés de produit, les entreprises se sont efforcées dans le monde entier, d'une part, d'abaisser leurs coûts, principalement ceux liés à la main-d'œuvre et, de l'autre, d'améliorer leur capacité d'adaptation à l'évolution rapide de la conjoncture commerciale et de la demande des consommateurs. Cela s'est traduit par des investissements dans les nouvelles technologies, un transfert des formes de production à forte intensité de main-d'œuvre vers le secteur informel ou leur délocalisation dans des pays où la main-d'œuvre est bon marché, et une réorganisation de la production dans l'entreprise. Les nouvelles techniques de production ont demandé une modification de la structure des qualifications et des emplois. Dans certains secteurs, des pays ont enregistré un déclin de la proportion d'emplois demandant la connaissance d'un métier, l'exercice d'un apprentissage ou l'acquisition, en cours d'emploi et sur une longue période, des compétences nécessaires, or ce type d'emplois était traditionnellement réservé aux hommes. Un autre élément clé a été la tendance à la polarisation des compétences: un petit noyau de travailleurs possédant des compétences hautement spécialisées est entouré d'un grand nombre de travailleurs n'ayant besoin d'acquérir qu'une formation minimale par le biais de modules d'apprentissage des techniques requises dans l'entreprise, pour lequel l'habileté manuelle, la docilité, la minutie et la capacité à apprendre par cœur tendent à être les qualités les plus recherchées - or celles-ci sont en règle générale considérées comme typiquement «féminines». En raison de cette polarisation des compétences, les entreprises font davantage appel au marché du travail externe qu'au marché du travail interne, car les travailleurs ayant acquis une longue expérience à leur service présentent moins d'intérêt pour elles. Ainsi, l'une des raisons traditionnellement invoquées pour opérer une discrimination contre les femmes - à savoir le fait qu'elles ne restent pas longtemps dans le même emploi - a perdu de sa pertinence. En fait, les employeurs qui font appel à une main-d'œuvre occasionnelle ou temporaire et opèrent d'importants roulements d'effectifs peuvent préférer employer des femmes.

38.    Deuxièmement, la réorganisation de la production s'est accompagnée d'un affaiblissement de la réglementation protectrice et des institutions régissant le marché du travail, où l'ont voit des entraves au libre fonctionnement de ce marché. L'un des résultats de cette déréglementation a été la perte de pouvoir du personnel «intégré», à savoir les travailleurs syndiqués (masculins) occupant des emplois stables à plein temps. Puisqu'il est désormais plus facile de licencier les travailleurs et de «comprimer» les effectifs, les entreprises peuvent avoir recours aux marchés du travail externes et remplacer les travailleurs permanents par une main-d'œuvre bon marché. La plupart des nouveaux emplois sont atypiques, souvent précaires. Les activités économiques informelles, la sous-traitance, le travail à temps partiel, le travail à domicile, le travail à compte propre sont des formes de travail qui ont proliféré, entraînant une baisse du taux de syndicalisation. Elles ont aussi engendré une augmentation des taux d'activité des femmes.

39.    Troisièmement, la précarisation accrue du marché du travail a donné naissance à une demande de travailleuses migrantes dans certains secteurs, même lorsque le chômage augmente dans le pays hôte. Dans plusieurs pays développés, les emplois les plus mal payés, salissants, difficiles, voire dangereux - tels que le travail aux pièces et le travail posté dans les petites et moyennes entreprises et parfois dans les ateliers clandestins, les travaux de nettoyage, le service domestique et le travail dans les restaurants -, tendent à être occupés par des travailleuses migrantes. Cela tient au fait que les travailleurs locaux méprisent ces emplois ou que les travailleuses migrantes sont embauchées de préférence à eux parce qu'elles sont plus dociles et travaillent pour des salaires moins élevés, exigent moins d'avantages sociaux et insistent moins sur le respect de leurs autres droits en tant que travailleuses. L'un des phénomènes récents les plus frappants a été la féminisation de la main-d'œuvre migrante temporaire en provenance d'Asie, les femmes se déplaçant de plus en plus à titre indépendant comme migrantes économiques autonomes et non plus comme personnes à la charge des migrants masculins. Avec la prolifération des débouchés dans les emplois majoritairement féminins, ce sont les femmes asiatiques plutôt que les hommes qui quittent famille et domicile pour subvenir aux besoins des leurs. La possibilité d'employer des domestiques migrantes libère les femmes locales de leurs responsabilités familiales et leur permet de chercher un emploi en dehors de chez elles.

40.    Quatrièmement, dans les pays industrialisés et les pays en transition, bien que pour des raisons différentes, le déclin du salaire réel perçu par une grande partie de la main-d'œuvre a entraîné une perte de revenu compensée par une augmentation de la main-d'œuvre disponible. A cela s'ajoute le fait que, dans de nombreux pays, la diminution des prestations sociales, ou le resserrement des critères y ouvrant droit, a entraîné une baisse du nombre de bénéficiaires: cela a accentué l'effet «travailleur supplémentaire», davantage de femmes étant contraintes d'entrer sur le marché du travail et d'y rester en raison de l'insécurité accrue de leurs revenus. L'abrogation des législations ou instruments portant fixation des salaires minima, ou l'application moins rigoureuse des dispositions en vigueur en la matière, a aussi favorisé la croissance des emplois très faiblement rémunérés, et le versement d'un salaire individuel plutôt que d'un salaire familial a encouragé l'embauche des femmes.

41.    Cinquièmement, dans les pays en développement, la mondialisation des échanges commerciaux et des flux de produits et de capitaux a eu des répercussions profondes. L'une d'entre elles est le fait maintenant bien reconnu que dans ces pays le moteur de l'industrialisation a été tout autant la disponibilité de la main-d'œuvre féminine que les exportations. En effet, les entreprises ont très largement fait appel à la main-d'œuvre féminine bon marché pour réduire leurs coûts afin de faire face à la concurrence. Il est également manifeste désormais que la proportion de femmes travaillant dans les industries d'exportation, en particulier les industries de fabrication de produits destinés à l'exportation, fluctue suivant les périodes. La baisse des effectifs féminins est liée à la diversification des lignes de produits exportés en faveur de produits à plus forte valeur ajoutée, plus fortement technicisés et demandant d'importants investissements en capitaux. Il semble que, quand la qualité des emplois et le niveau des salaires augmentent, les femmes tendent à en être exclues. Une autre conséquence importante a été la forte proportion de travailleuses employées dans le secteur des services financiers internationaux, surtout pour les travaux peu qualifiés, tels que l'introduction des données, mais également de plus en plus dans des services demandant plus de qualifications pour répondre aux exigences des clients, tels que la conception de logiciels, la programmation informatique et les services bancaires et d'assurance.

42.    Enfin, il convient de reconnaître que la mutation des structures familiales a eu un impact sur l'emploi des femmes. Un certain nombre de phénomènes, notamment l'éclatement de la famille élargie, la mobilité accrue des populations, l'érosion de la famille nucléaire traditionnelle, l'augmentation du nombre des foyers monoparentaux, de ceux ayant à leur tête une femme et des familles monoparentales, ont entraîné, dans une certaine mesure, une augmentation de la main-d'œuvre féminine. Dans certains pays, l'existence de structures d'accueil des enfants a également encouragé les femmes à conserver leur emploi salarié ou à en chercher un. Dans de nombreux cas, il est bien entendu difficile de décider si c'est l'évolution des relations familiales qui est à l'origine d'une hausse de la demande d'emploi de la part des femmes ou si c'est le fait que les femmes travaillent qui est à l'origine de certaines de ces mutations.

La qualité des emplois offerts aux femmes
s'est-elle améliorée?

43.    Le fait que dans certains pays les femmes représentent désormais près de la moitié de la population active pourrait amener à conclure qu'elles occupent, à l'instar des hommes, des emplois très divers. Or si la ségrégation sexuelle des emplois tend à disparaître dans certaines régions du monde, dans l'ensemble, les choix offerts aux femmes sur le marché du travail sont encore très limités. Ce marché reste très fortement cloisonné suivant les sexes, et les femmes tendent à occuper un petit nombre d'emplois, qui ont tous pour point commun d'être relativement médiocres du point de vue du salaire, de leur statut hiérarchique, du pouvoir de décision qu'ils comportent et des possibilités de promotion qu'ils ouvrent. Ces emplois tendent également à présenter des caractéristiques tout à fait conformes aux préjugés sexistes ambiants. Les emplois majoritairement masculins sont plus de sept fois plus nombreux que les emplois majoritairement féminins, et leur valeur ajoutée tend à être beaucoup plus élevée.

44.    Au fil du temps, les femmes ont conquis une part plus importante des emplois administratifs et de gestion, mais en règle générale elles occupent des postes d'agents de maîtrise ou de cadres moyens, principalement dans des secteurs tels que les soins médicaux et de santé, les relations personnelles et sociales et l'enseignement, qui se situent dans le prolongement de leur rôle traditionnel à l'intérieur de la famille. Qu'il s'agisse des entreprises, des professions libérales, de l'enseignement supérieur ou de la politique, les échelons professionnels les plus élevés sont partout encore presque exclusivement occupés par des hommes. Depuis les années soixante-dix on utilise l'expression «plafond de verre» pour décrire les barrières invisibles qui interdisent aux femmes l'accès aux postes supérieurs et pour illustrer le fait qu'en l'absence de raisons objectives permettant d'expliquer pourquoi les femmes ne parviennent pas à atteindre les plus hauts échelons de la hiérarchie au même titre que les hommes, force est de conclure qu'il existe un élément intrinsèquement injuste dans la structure organisationnelle des entreprises et des institutions ainsi que dans la société. Les femmes peuvent constater que les fonctions exercées au-delà du plafond de verre répondent à leurs compétences mais pourtant demeurent hors de leur portée.

45.    Au lieu de s'acharner à tenter de briser cet obstacle, un nombre croissant de femmes créent leurs propres entreprises. Aux Etats-Unis, un tiers des petites et moyennes entreprises sont à l'heure actuelle gérées par des femmes. Au Brésil, on estime qu'elles administrent plus de 50 pour cent des micro et petites entreprises. Les femmes entrepreneurs sont désormais des acteurs importants dans la croissance des petites et moyennes entreprises dans le monde entier. Toutefois, créer sa propre affaire n'est pas nécessairement une activité lucrative. Même aux Etats-Unis, on a pu constater que les femmes exerçant une activité indépendante à plein temps gagnaient seulement 50 pour cent par heure en moyenne de ce que gagnent les femmes salariées travaillant à plein temps. Cela dit, par rapport à la rigidité de l'organisation du travail en entreprise, la souplesse d'un emploi indépendant offre à beaucoup de femmes une solution à leur principal problème, à savoir concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale.

46.    Lorsqu'elles veulent créer ou agrandir leur entreprise, les femmes doivent surmonter plus d'obstacles que les hommes. L'une des difficultés majeures qu'elles rencontrent dans les pays occidentaux est d'être prises au sérieux et de convaincre les hommes de travailler pour elles. Dans les pays en développement et les économies en transition, elles sont victimes de discrimination de la part des créanciers, des fournisseurs et des clients. Leur accès au crédit est limité du fait qu'elles ne sont pas en mesure d'offrir des garanties et en raison de la taille et de la nature de leurs entreprises. Partant, celles-ci tendent à être petites au départ, à s'agrandir lentement et à être plus vulnérables que celles créées par des hommes. L'un des autres obstacles qu'elles doivent surmonter est l'absence de réseaux susceptibles de leur fournir un soutien et des informations sur les débouchés, les nouvelles tendances et la conjoncture économique. Les associations d'entrepreneurs dominées par les hommes sont bien établies et pas toujours accueillantes envers les femmes.

47.    La majorité des femmes, en particulier dans les pays en développement, ont trouvé du travail parce qu'elles étaient disposées à occuper des «emplois de femmes» - c'est-à-dire des emplois atypiques, souvent précaires et mal rémunérés - que les économies de service modernes semblent créer en quantité toujours croissante et que les hommes ne sont pas encore disposés à occuper. Elles constituent de plus en plus fréquemment une main-d'œuvre «d'appoint» (dont les emplois ne sont pas prévus pour durer) dans un nombre très limité d'industries dans lesquelles elles occupent des emplois provisoires ou occasionnels, aux horaires irréguliers ou inhabituels ou dans le cadre d'un contrat aux pièces. Elles sont moins rémunérées que leurs homologues permanents et, en règle générale, elles ne sont couvertes ni par la législation du travail, ni par la sécurité sociale, ni par les dispositions des conventions collectives. Le nombre de travailleuses à temps partiel a également augmenté de manière considérable et, en règle générale, elles sont considérées comme étant moins motivées et moins importantes que les employés à plein temps et elles sont traitées en conséquence. Bien entendu, certaines femmes choisissent de travailler à temps partiel pour concilier travail et famille, mais la plupart du temps elles n'ont pas d'autre choix. Il n'en demeure pas moins qu'en règle générale ces formes d'emploi souples répondent davantage aux besoins des employeurs qui souhaitent réduire leurs coûts qu'elles ne satisfont aux aspirations des femmes désireuses de trouver un emploi de qualité.

48.    Dans les emplois très féminisés, les niveaux de salaire tendent à être faibles. Les femmes étant majoritairement concentrées dans des emplois peu rémunérés, il n'est pas surprenant qu'en dépit de l'adoption de plus en plus fréquente de lois prescrivant l'égalité des salaires il existe toujours un écart considérable entre les salaires masculins et les salaires féminins. Même pour un travail analogue, les femmes tendent à gagner de 20 à 30 pour cent de moins que les hommes. Cet écart s'est resserré dans une certaine mesure, en particulier pour les femmes cadre supérieur sans enfants. Mais, dès qu'elles commencent à avoir des enfants, le revenu relatif des femmes accuse une baisse, et plus elles ont d'enfants plus leur salaire diminue du fait de la perte de revenus qu'elles subissent lorsqu'elles s'arrêtent de travailler pour s'en occuper, parce qu'elles perdent leurs chances d'être promues et, enfin, parce qu'elles doivent souvent accepter d'occuper un emploi moins qualifié pour revenir sur le marché du travail.

49.    Il est indéniable que les femmes ont réalisé de grandes avancées sur le marché du travail, mais l'examen de leur situation et de leurs conditions de travail amène nécessairement à conclure qu'elles ont encore un long chemin à parcourir. Les progrès vers la réalisation de l'égalité de chances et de traitement entre les hommes et les femmes sont loin d'avoir été continus ou soutenus. Certes, en période de croissance économique et de prospérité, le principe de l'égalité ne fait pas seulement l'objet de vœux pieux et des ressources sont effectivement consacrées à la lutte contre la discrimination sexuelle. Toutefois, pendant les périodes de transition, de récession ou de marasme économique, ces efforts se relâchent et les mesures permettant aux femmes de mieux équilibrer leurs responsabilités professionnelles et familiales sont les premières à être abandonnées. De plus, en période de crise économique, les femmes sont moins enclines à introduire des recours si elles sont victimes de discrimination par crainte de représailles qui pourraient se traduire par leur licenciement. Malgré cela les femmes sont toujours parmi les premières à perdre leur emploi. La reconnaissance épisodique du droit à l'égalité de chances et de traitement, bien qu'il s'agisse de l'un des droits les plus fondamentaux de la personne, a pour conséquence que les progrès vers l'égalité des sexes sont lents et irréguliers. On note parfois même des retours en arrière manifestes. De nouveaux groupes de plus en plus nombreux de personnes extrêmement vulnérables sont en train d'émerger: les groupes de femmes les plus pauvres, y compris les femmes chefs de famille, les migrantes et les femmes autochtones qui semblent impuissantes à échapper de manière significative et durable aux fléaux de la discrimination et de la marginalisation.

Instruction et formation: un rôle clé

50.    Le Rapport sur l'emploi dans le monde, 1998-99 relève un certain nombre de raisons expliquant pourquoi l'amélioration des emplois occupés par les femmes est essentiellement subordonnée à l'instruction et la formation qu'elles reçoivent et qui leur permettent:

51.    Les taux de scolarisation des filles et des femmes dans l'enseignement scolaire et postsecondaire ont augmenté dans la plupart des pays au cours de ces dernières décennies, bien que d'importantes disparités demeurent. Les jeunes filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons à l'école, mais l'un des problèmes les plus graves est le fait que l'enseignement qu'elles reçoivent tend, en raison de son caractère général, à ne pas les former à un métier. Une autre source d'inquiétude est le fait que des facteurs tels que les restrictions budgétaires et la réémergence d'attitudes religieuses fondamentalistes dans les pays pauvres a toujours pour conséquence que les parents investissent moins dans l'éducation des filles que dans celle des garçons et que les taux d'abandon scolaire féminin sont plus élevés.

52.    Toutefois, c'est dans l'acquisition de compétences professionnelles que les résultats de la discrimination se font le plus gravement sentir. Le Rapport sur l'emploi dans le monde met en relief le fait que, par rapport aux hommes, les femmes ont moins accès à i) la formation professionnelle; ii) la formation sur le lieu de travail;iii) l'apprentissage à vie; iv) les programmes de formation destinés aux chômeurs; v) la formation aux nouvelles technologies; et vi) la formation aux techniques de gestion d'entreprise. L'adoption de politiques, visant à encourager l'apprentissage permanent et à ouvrir de nouvelles voies pour l'amélioration de leurs compétences au bénéfice de travailleuses occupant des emplois atypiques et de celles dont les emplois offrent peu de possibilités de formation, peut jouer un rôle très important pour assurer la réussite des femmes sur le marché du travail. Etant donné que, de plus en plus fréquemment, ce n'est pas tant le niveau mais le type d'instruction et de formation que les hommes et les femmes reçoivent qui compte, il importe d'encourager et de soutenir les femmes et les jeunes filles pour qu'elles entreprennent des études dans des domaines non traditionnels et plus particulièrement dans des domaines d'avenir.

53.    Toutefois, le rapport insiste également sur le fait que les politiques de formation ne suffisent pas, à elles seules, à faire évoluer le marché du travail: «il est clair que la formation est nécessaire mais non pas suffisante pour élargir le choix des femmes sur le marché du travail». Il est bien entendu impératif que des mesures soient également prises pour assurer l'égalité des chances et de traitement dans l'accès à l'emploi en général et à certaines professions en particulier.

Eradiquer la discrimination fondée sur le sexe
et améliorer les possibilités d'emploi pour les femmes (et pour les hommes)

54.    L'emploi des femmes a des répercussions bénéfiques incalculables pour la société dans son ensemble, notamment parce qu'il favorise une meilleure utilisation des ressources humaines et parce que les femmes contribuent ainsi à la croissance économique nationale, à la lutte contre la pauvreté et au financement des régimes de sécurité sociale. Il incombe donc aux gouvernements de prendre des mesures rigoureuses pour mettre un terme à la discrimination fondée sur le sexe. Les conventions relatives aux travailleuses - la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et la convention (no 100) sur l'égalité de rémunération, 1951 - sont parmi celles qui ont été le plus largement ratifiées. Malheureusement, leur mise en application au niveau national est souvent inefficace pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, le cadre législatif est fréquemment inadéquat. Le BIT reçoit beaucoup de demandes de la part des gouvernements et des partenaires sociaux sollicitant des conseils sur la manière d'élaborer une législation nationale conforme aux normes internationales mais qui demeure adaptée à la situation interne du pays, et sur la manière de créer un environnement propice à l'application effective de cette législation. Ainsi, de nombreux pays ne peuvent pas mettre en application la convention no 100 parce qu'ils ne disposent pas localement du savoir-faire leur permettant de mettre en place des systèmes d'évaluation des emplois et parce que les statistiques ventilées par sexe relatives au marché du travail sont inadéquates. Deuxièmement, les mécanismes d'application nationaux sont insuffisants, en particulier dans les pays où le système des relations du travail est peu développé et où les femmes sont sous-représentées aux échelons supérieurs où se prennent les décisions. L'attachement au principe de l'égalité et la volonté politique de le voir se concrétiser tendent à fluctuer en fonction des conditions économiques et sociales. Troisièmement, les travailleuses elles-mêmes n'ont souvent pas connaissance de leurs droits et obligations légales ou sont trop intimidées ou bien n'ont ni les moyens ni le pouvoir de faire respecter leurs droits.

55.    Pour créer un environnement favorisant l'emploi des femmes, il importe également que les gouvernements modifient leurs régimes fiscal et de sécurité sociale. Les mesures incitatives ou dissuasives qu'ils mettent en place peuvent considérablement influer sur la manière dont les gens organisent leur vie. Pour permettre aux femmes de choisir librement de travailler, l'assise des régimes fiscaux et de sécurité sociale doit être l'individu plutôt que la cellule familiale. Les gouvernements doivent également examiner la manière dont ils peuvent faciliter la tâche des femmes qui souhaitent concilier travail et enfants (et soins aux personnes âgées): ces mesures revêtent un caractère plus urgent dans les nombreux pays où les taux de natalité ont considérablement baissé alors que la proportion de personnes âgées a augmenté.

56.    Les entreprises doivent être convaincues qu'il est bon pour leurs affaires d'employer et de promouvoir des femmes et de mettre en œuvre des politiques favorables à leur formation et à la famille afin qu'elles puissent donner la pleine mesure de leurs capacités. Il est donc important de recueillir et d'examiner des données concrètes. Les femmes ayant de plus en plus fréquemment un niveau d'éducation aussi bon, voire meilleur, que celui des hommes, une entreprise limiterait ses possibilités de choix à seulement la moitié des candidats les plus brillants et les plus compétents si elle ne recrutait que des hommes; si elle emploie déjà des femmes et a investi dans la valorisation de leurs compétences, il est économiquement judicieux de les conserver à son service en leur offrant, par exemple, la possibilité de prendre des congés de maternité ou d'adopter des horaires souples plutôt que de courir le risque de les perdre et d'avoir à recruter et à former de nouveaux travailleurs; les manières de procéder et le comportement des femmes sont des atouts pour les entreprises; le fait d'accorder un traitement équitable aux travailleuses est aussi un élément positif du point de vue des relations publiques, d'autant plus que les femmes sont d'importants consommateurs de produits et de services.

57.    Désormais, de plus en plus d'entreprises mettent en œuvre des politiques profamiliales. Il reste toutefois à convaincre les employeurs, en particulier dans les petites entreprises, que ces politiques sont rentables. Il est également important de veiller à ce qu'elles ne concernent pas exclusivement les femmes; cela pourrait en effet donner lieu en retour à des recours pour discrimination, étant donné que les hommes ont eux aussi des familles. Il est nécessaire d'encourager non seulement les femmes mais aussi les hommes à tirer profit de ces politiques sans craindre que cela soit interprété comme un manque d'intérêt envers leur travail ou que cela justifie un refus de promotion.

58.    Le BIT a apporté ses conseils pour l'élaboration de politiques ainsi qu'une aide en matière de coopération technique pour la mise en œuvre de mesures complètes et intégrées visant à promouvoir des emplois en plus grand nombre et de meilleure qualité à l'intention de groupes importants de travailleuses employées dans le secteur informel. Ainsi, les programmes visant à aider ces groupes vulnérables de travailleuses comportent des éléments de formation destinés non seulement à leur faire acquérir des compétences génératrices de revenus mais également à leur enseigner la gestion d'entreprise, à les sensibiliser à leur condition, à leur inculquer des notions élémentaires de droit, à leur apprendre à se mobiliser et à s'organiser en groupes, et comment avoir accès au crédit, aux marchés et à d'autres réseaux de soutien, etc. Les programmes ont également pour objectif de garantir que les emplois productifs et rémunérateurs offerts aux femmes se traduisent directement par une amélioration du bien-être de leur famille, par des rapports plus égalitaires entre les sexes, par la scolarisation des enfants et la diminution du travail de ces derniers. L'heure est venue de procéder à une évaluation des expériences multidisciplinaires conduites par les divers départements techniques du BIT et du Programme international de l'OIT pour des emplois en plus grand nombre et de meilleure qualité pour les femmes puis de diffuser plus largement les «bonnes pratiques» qui peuvent en être dégagées.

59.    Enfin, les politiques visant à promouvoir véritablement l'égalité entre les sexes doivent également s'adresser aux hommes - qui constituent l'autre moitié de la main-d'œuvre et du corps social. La rapidité avec laquelle les femmes sont entrées massivement sur le marché du travail est telle que l'évolution des comportements sociaux, des normes et des institutions n'a pas suivi au même rythme. Dans beaucoup de pays, le modèle social qui se reflète dans la législation (par exemple en matière de sécurité sociale et de fiscalité) et dans l'opinion populaire repose encore sur la notion que l'homme est le pourvoyeur de revenus de la famille alors que la femme reste au foyer ou apporte un revenu d'appoint, or la réalité est très différente. Les hommes (et les femmes également) doivent s'habituer au fait qu'il existe des femmes patrons, qu'ils ont tous des collègues féminins, qu'il existe des mères qui travaillent, des couples dans lesquels les deux travaillent, et les hommes doivent être prêts à accomplir une part plus importante des tâches domestiques. Il faut présenter aux jeunes garçons (et aux jeunes filles) de nouveaux modèles auxquels ils puissent s'identifier pour faire face à ces mutations sociales.

Points pouvant faire l'objet d'une discussion
générale à la Conférence

60.    L'inscription d'une question relative à l'emploi des femmes à l'ordre du jour de la Conférence serait importante pour au moins deux raisons: 1) à la lumière du suivi de la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail; et 2) en tant qu'élément faisant partie intégrante du mandat de l'OIT concernant la promotion de l'emploi.

61.    Si le Conseil d'administration décide d'inscrire cette question à l'ordre du jour, la Conférence voudra peut-être examiner certains des points suivants:

3.      Le secteur informel

Résumé

Le secteur informel s'est développé à une vitesse surprenante ces dernières années, tant dans les pays en développement que dans les pays en transition, et même dans les pays avancés. Dans les pays en développement, cette progression a été alimentée par les programmes d'ajustement structurel et les réformes économiques, et dans les pays avancés par la recherche de solutions qui permettent d'accroître la productivité et la compétitivité aux moindres frais, comme l'externalisation et la sous-traitance. Avec la mondialisation, les frontières nationales s'effacent devant la recherche d'une main-d'œuvre flexible et bon marché, mettant l'OIT, les gouvernements et les partenaires sociaux face à deux nouveaux défis: limiter les effets négatifs de ce processus et assurer un travail décent à tous les travailleurs.

En appliquant au secteur informel les normes du travail fondamentales dont il est question dans la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, on peut lutter contre les graves atteintes aux droits fondamentaux que connaît ce secteur. Cela implique, dans certains cas, une réforme de la législation en vigueur, pour qu'elle s'applique à tous les travailleurs et, dans d'autres cas, l'adoption de nouveaux textes de lois. L'élaboration d'un nouvel instrument international qui consacre ces principes, et qui serve de cadre aux gouvernements qui entendent les appliquer au secteur informel est encore une autre possibilité à envisager.

Pour promouvoir de meilleures conditions de travail dans le secteur informel, il faut absolument soutenir l'organisation et la représentation des travailleurs du secteur informel. Il reste à préciser le rôle que les gouvernements et les organisations de travailleurs et d'employeurs peuvent jouer dans l'effort d'organisation et de représentation des travailleurs du secteur informel et/ou dans la formation d'alliances avec des organismes représentatifs indépendants.

Le concept de travail décent suppose d'une part la volonté d'étendre la protection sociale au secteur informel et le souci de promouvoir des méthodes et des conditions de travail sans danger dans ce secteur. Par-delà les questions d'équité et de droits de l'homme qu'elle soulève, la protection sociale est étroitement liée à la productivité. Il reste encore beaucoup à faire pour amener les régimes publics et privés à assurer une couverture aux travailleurs du secteur informel, tout en recherchant d'autres systèmes, des systèmes de protection de base qui soient fondés sur la solidarité mutuelle. Dans tous ces domaines, il s'agira d'obtenir la portée suffisante pour avoir un impact important sur ce segment, si vaste et hétérogène dans la plupart des économies

Politique macroéconomique
et politique sectorielle

62.    Au cours des dernières décennies du XXe siècle, on a assisté à un développement explosif du secteur informel, tant dans les pays en développement, où cela était particulièrement sensible, que dans les économies en transition à partir de la fin des années quatre-vingt, et même de manière moins perceptible dans les pays avancés, surtout dans les années quatre-vingt-dix. En 1962, lorsque l'OIT a défini ce terme à l'occasion de la mission au Kenya, en vue de l'élaboration d'une stratégie de l'emploi, 10 pour cent à peine de la main-d'œuvre travaillait dans le secteur informel, proportion qui, vers 1997 était estimée à plus de 63,4 pour cent. En Inde, les statistiques officielles situent cette proportion à 91,7 pour cent. En Afrique, 90 pour cent au moins de tous les emplois qui ont été créés dans les années quatre-vingt-dix relèvent du secteur informel. Dans certains pays d'Amérique latine, où la croissance économique du secteur structuré s'est faite sans création d'emplois, ce pourcentage serait de 100 pour cent. Les femmes constituent dans tous les pays une part importante de la main-d'œuvre du secteur informel. Les jeunes y sont, eux aussi, surreprésentés. Alors qu'autrefois on pensait que ce phénomène était un phénomène transitoire propre aux pays en développement essentiellement, et que le secteur informel pourrait être absorbé progressivement dans le secteur structuré, aujourd'hui on assiste de toute évidence au mouvement inverse, avec l'«informalisation» du secteur formel dans beaucoup de pays, indépendamment de leur niveau de développement.

63.    Tout cela s'explique par une conjonction de facteurs qui ont permis au secteur informel de se développer rapidement dans toutes les régions du globe. En particulier, la mise en œuvre des programmes d'ajustement structurel dans les pays en développement dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix a entraîné des licenciements massifs dans le secteur public et formel, ainsi qu'un processus de privatisation et de libéralisation, toutes choses qui ont provoqué le développement du secteur informel ainsi que des changements et des réajustements profonds dans l'équilibre et la composition des économies urbaines et rurales. L'effondrement des économies planifiées dans les pays en transition a lui aussi permis l'émergence soudaine d'un secteur informel prépondérant, même si dans ce cas les facteurs et les conséquences sont bien souvent différents. En Asie de l'Est, la crise économique du milieu des années quatre-vingt-dix a renversé la tendance à la structuration du secteur informel, qui avait marqué les années quatre-vingt et le début des années quatre-vingt-dix et qui avait semblé en annoncer la mort éventuelle. En effet, ce secteur s'est tout à coup transformé en éponge, absorbant des milliers de personnes qui se sont retrouvées sans travail au lendemain de cette crise. L'ampleur du secteur informel et la diversité qui le caractérise dans la plupart des pays obligent l'Etat à faire un effort pour trouver le juste milieu entre approches microéconomiques et approches macroéconomiques, entre croissance économique et protection sociale et entre le souci de promouvoir les activités du secteur informel et la nécessité de contenir leur croissance.

64.    En plus de ces transformations constatées au niveau national, on mentionnera la rapidité avec laquelle le processus de mondialisation a évolué, traversant les frontières nationales et les niveaux de développement technologique à un rythme sans précédent. L'externalisation et la sous-traitance apparaissent aujourd'hui comme des moyens normaux d'accroître l'efficacité tout en réduisant les coûts. Ces pratiques ont permis à des entreprises multinationales, mais aussi à des industries, des secteurs et des services nationaux bien établis, de transférer leurs activités de production, d'assemblage, d'emballage et même de commercialisation, et ce souvent en direction des pays en développement. Ce mouvement coïncide avec les efforts déployés par ces derniers pour attirer les investissements commerciaux et les investissements directs étrangers en créant des zones de libre-échange et des zones franches d'exportation, le plus souvent en accordant avantages fiscaux et dérogations vis-à-vis de la législation nationale en vigueur. Dans les pays avancés, les réductions d'effectifs, l'externalisation et la sous-traitance ont contribué au développement rapide du travail à domicile, surtout avec les technologies de l'information. L'informalisation entraîne souvent une réduction de la couverture sociale et un accroissement de l'insécurité de l'emploi dus à l'absence de contrats de travail effectifs. Le développement rapide des technologies de l'information dans le monde entier a permis de sous-traiter le travail, et surtout les travaux répétitifs, aux pays en développement, parfois jusqu'au niveau des villages.

65.    La mondialisation de l'économie, la libéralisation des échanges et la rapidité des progrès technologiques - qui contraignent beaucoup de pays aujourd'hui à modifier leurs structures de l'emploi et leur mode d'organisation du travail pour faire face à la concurrence - se traduisent aussi parfois par des normes de sécurité et de santé insuffisantes et par une détérioration de l'environnement, surtout dans le cas du secteur informel. Pour beaucoup de personnes qui relèvent de ce secteur, le foyer et le lieu de travail ne font qu'un. La majorité des travailleurs du secteur informel urbain vivent dans des quartiers pauvres, sans aucun accès à des services de santé et de bien-être, même rudimentaires, et sans protection sociale, et travaillent dans un environnement malsain et nocif. Des conditions de vie et de travail difficiles prédisposent à la maladie et à toutes sortes de problèmes de santé. Santé et développement sont intimement liés et il ne peut y avoir de développement durable que si l'on protège les groupes les plus vulnérables, notamment les plus pauvres, et si l'on répond à leurs besoins essentiels en matière de santé.

66.    L'énorme potentiel de création d'emplois du secteur informel ne doit pas être négligé pour autant, ni le fait qu'il peut contribuer à la croissance économique. D'après une étude récente du BIT, près de 500 000 emplois auraient été créés ces dernières années en Inde dans le secteur informel, plus précisément dans l'industrie des logiciels et les services apparentés, et ces emplois répondraient dans l'ensemble au critère du travail décent en termes de salaire et de revenu, mais pas en termes de protection sociale. L'expansion de cette industrie dans les années à venir devrait entraîner la création de plus d'un million d'emplois. Rien qu'aux Etats-Unis, il y aurait 19,6 millions de travailleurs adultes qui font régulièrement la navette entre le domicile et le lieu de travail, et des millions d'autres qui travaillent chez eux de temps en temps. Beaucoup, sinon la plupart, de ces travailleurs ont un contrat de travail et une protection sociale comparables à ceux dont bénéficient les personnes qui travaillent dans un bureau, et le développement du travail à domicile ne correspond donc pas nécessairement au développement du secteur informel. Par ailleurs, ils évitent ainsi de perdre du temps dans les transports et peuvent aménager librement leur journée de travail, ce qui leur permet d'assumer leurs responsabilités familiales, sans parler des autres avantages que n'ont pas leurs homologues qui travaillent dans un bureau. L'informalisation du secteur formel, surtout dans les pays avancés, peut donc aussi se traduire par des emplois de qualité pour ceux qui travaillent pour leur propre compte et qui, finalement, peuvent s'en trouver mieux que dans leur emploi précédent. Dans les années à venir, l'OIT et ses mandants devront, pour ce qui est des questions macroéconomiques touchant au secteur informel, œuvrer en faveur de la création d'un environnement favorable dans lequel chaque travailleur jouirait du droit à un travail décent.

67.    Le caractère hétérogène et changeant du secteur informel pose depuis toujours des problèmes de concept et de définition auxquels viennent s'ajouter les différences d'objectifs de ceux qui se sont employés à le définir. La terminologie varie en fonction de l'aspect à examiner. C'est ainsi qu'en statistique il est nécessaire de préciser les objectifs visés, et de déterminer en conséquence l'unité d'observation ou la terminologie à utiliser. Lorsque les unités d'observation choisies sont des unités de production, on utilise les termes «secteur informel» ou «emploi dans le secteur informel», conformément au système de comptabilité nationale, pour lequel le secteur informel n'est rien d'autre qu'un sous-secteur d'un secteur institutionnel connu sous le nom de «ménages». En revanche, lorsque ce sont les individus ou les emplois qui sont pris comme unités d'observation, on parle alors d'«emploi informel» ou d'«emploi dans une relation de travail informelle». Par ailleurs, les syndicats ont adopté récemment une définition répondant à leurs besoins qui distingue trois grands groupes dans la main-d'œuvre du secteur informel, à savoir: les propriétaires ou exploitants de micro-entreprises, y compris les agriculteurs, qui emploient parfois quelques travailleurs ou apprentis; les personnes travaillant pour leur propre compte, à savoir les travailleurs indépendants proprement dits, les marchands ambulants et les petits paysans; les salariés à plein temps ou occasionnels, groupe qui comprend les travailleurs rémunérés occupés à plein temps, occasionnellement ou sous contrat, ainsi que les travailleurs non rémunérés, les travailleurs à domicile et les domestiques. Les syndicats estiment qu'ils devraient, dans leurs efforts de recrutement et d'offre de services aux travailleurs du secteur informel, se concentrer sur ces deux derniers groupes. Les employeurs, quant à eux, s'intéressent plutôt aux propriétaires ou exploitants de micro-entreprises. Face aux changements qu'ont subis la nature et la composition des économies rurales et urbaines, les chercheurs et les experts du développement ont tendance à rejeter l'idée d'une dichotomie secteur formel/secteur informel, pour ne plus y voir que des éléments d'une seule et même dynamique du développement économique, préférant de ce fait les termes «économie informelle» et «emploi informel», qu'ils situent sur un continuum formel-informel qui ne permet pas de distinguer deux secteurs de façon aussi catégorique.

Normes internationales du travail

68.    De toute évidence, les droits fondamentaux tels qu'ils sont consacrés par les normes internationales fondamentales sont souvent bafoués dans le secteur informel. Les participants au Colloque international sur les syndicats et le secteur informel du BIT (Genève, 18-22 octobre 1999)[21] ont reproché aux gouvernements et aux organisations financières internationales de ne pas accorder suffisamment d'attention ou de ressources à la transformation des activités du secteur informel en entreprises plus productives, mieux organisées et socialement responsables. La Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail de l'OIT (liberté syndicale, négociation collective, travail forcé, discrimination et travail des enfants), adoptée en 1998, ne fait aucune distinction entre l'économie formelle et l'économie informelle, et peut servir de tremplin à des initiatives dans ce domaine. Par fondamental - ou universel - nous entendons tout ce qui s'applique à tous les êtres humains. Si difficiles qu'ils puissent être à appliquer au secteur informel - c'est le cas de l'égalité de salaires ou du caractère inacceptable de la prostitution enfantine -, ces principes et ces droits ne doivent être ni ignorés ni considérés comme inatteignables. Les principes et droits fondamentaux au travail valent pour toutes les composantes de ce secteur. La campagne visant à promouvoir la Déclaration devrait, par conséquent, aider les gouvernements à en étendre les dispositions au secteur informel dans toutes ses manifestations, y compris la détérioration des droits dans les pays avancés sous l'effet de processus tels que l'informalisation du secteur moderne et l'accroissement de la flexibilité, mais aussi à relever les normes dans les pays en développement, où c'est parfois la grande majorité des travailleurs qui travaillent dans le secteur informel. Le rapport présenté par le Directeur général à la session de 1999 de la Conférence internationale du Travail, sous le titre de Un travail décent, reconnaît que tous les travailleurs ont des droits, qu'ils soient dans le secteur formel ou dans le secteur informel. L'OIT peut apporter une aide dans le processus d'élaboration et d'application des normes au niveau national pour défendre la cause du travail décent dans le secteur informel. Cela implique dans certains cas une réforme de la législation nationale du travail pour s'assurer que la législation et la réglementation en vigueur s'appliquent de manière efficace à tous les «travailleurs», et pas seulement aux «salariés» ayant un contrat de travail en bonne et due forme.

69.    En plus des efforts qui sont faits pour étendre les principes des normes fondamentales du travail au secteur informel, on mentionnera un certain nombre d'instruments de l'OIT qui concernent tout particulièrement la promotion du travail décent dans ce secteur. En relation étroite avec le principe de la liberté syndicale, évoqué dans cette Déclaration, il convient de citer, par exemple, la convention (nº 141) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975, et la recommandation (nº 149) qui l'accompagne. On retiendra également pour certains aspects du travail dans ce secteur la convention (nº 131) sur la fixation des salaires minima, 1970, la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, la convention (nº 177) sur le travail à domicile, 1996, et la recommandation (nº 184) qui l'accompagne, et la convention (nº 81) sur l'inspection du travail, 1947 [et Protocole, 1995], et la convention (nº 150) sur l'administration du travail, 1978. On n'oubliera pas pour autant les instruments promotionnels, qui peuvent être des plus utiles dans un premier temps. C'est le cas de la convention (nº 122) sur la politique de l'emploi, 1964, et de la recommandation (nº 169) qui l'accompagne, qui visent à promouvoir le plein emploi, productif et librement choisi, ainsi que de la recommandation (nº 189) sur la création d'emplois dans les petites et moyennes entreprises, 1998. Ce groupe d'instruments promotionnels décrit les mesures macroéconomiques qui pourraient aider à promouvoir le travail décent dans le secteur informel, comme le développement des entreprises, et donne des exemples des actions à entreprendre par les gouvernements pour résoudre les problèmes qui se posent dans le secteur informel.

70.    L'élaboration d'un nouvel instrument qui énonce ces principes et qui serve de cadre aux gouvernements qui entendent les appliquer au secteur informel, que ce soit dans certains segments, comme les marchands ambulants, ou dans toutes ses composantes, est une autre possibilité à envisager. Cet instrument pourrait prendre la forme d'une recommandation, d'une série de conclusions émanant des débats ou d'une réunion d'experts qui serait chargée de concevoir un code de conduite destiné aux pays où le secteur informel emploie une main-d'œuvre très importante. Le principal objectif serait d'éliminer les violations flagrantes des principes et droits fondamentaux au travail dont sont victimes les travailleurs du secteur informel et de promouvoir en leur faveur le concept de travail décent.

Organisation et représentation

71.    Une fois la liberté syndicale et le droit à la négociation collective reconnus comme faisant partie des principes et droits fondamentaux au travail, se pose la question de l'organisation et de la représentation des travailleurs du secteur informel. Beaucoup, sinon la plupart, de ces travailleurs n'ont ni relation de travail bien définie ni contrat de travail en bonne et due forme. La convention nº 141 et la recommandation nº 149 sur les organisations de travailleurs ruraux constituent une base pour l'organisation des travailleurs ruraux qui ne font pas partie du secteur formel, «qu'il s'agisse de salariés ou de personnes travaillant à leur propre compte». Toutefois, cela ne concerne pas les millions de travailleurs qui font partie du secteur informel urbain. Le Colloque international sur les syndicats et le secteur informel reconnaît que «l'important déplacement de la main-d'œuvre vers le secteur informel soulève des questions majeures pour les syndicats et constitue pour eux un des défis essentiels d'aujourd'hui». Or, pour organiser les travailleurs du secteur informel, il faut leur fournir les structures de représentation qui leur permettront de faire connaître leurs besoins fondamentaux et leurs préoccupations et de défendre leurs intérêts collectivement. Le colloque reconnaît que les syndicats doivent faire plus que de répondre aux besoins des travailleurs du secteur informel par des activités ad hoc et qu'ils doivent être capables d'offrir à ces travailleurs des avantages tangibles, et d'améliorer leur protection. Une liste de 20 recommandations a été dressée pour les guider dans cette tâche. Le secteur informel comprenant un pourcentage extrêmement élevé de femmes et de jeunes, l'égalité entre les sexes et la représentation des jeunes figurent en bonne place dans leurs programmes d'activité.

72.    Le rôle que les employeurs peuvent jouer est moins bien défini. Beaucoup d'organisations d'employeurs ont offert aux opérateurs du secteur informel, et surtout aux micro-entreprises et petites entreprises, des services tels que le Programme Gérez mieux votre entreprise (GERME), une formation et des services consultatifs juridiques. L'accroissement de la flexibilité de la main-d'œuvre et son informalisation présentent certes des avantages pour beaucoup d'employeurs, mais ceux-ci se disent également préoccupés par la concurrence déloyale que leur font les entreprises non réglementées, l'absence de contrôle de qualité pour les produits du secteur informel et l'application inégale d'une législation du travail qui est censée promouvoir un emploi décent. Pour l'instant, ils semblent s'intéresser essentiellement à l'identification des «sous-secteurs dynamiques» qui ont un potentiel de création d'emplois et qui gagneraient à renforcer leurs relations avec les entreprises du secteur formel.

73.    L'organisation et la représentation des travailleurs du secteur informel présentent, de toute évidence, à la fois des difficultés nombreuses et des avantages pour les organisations classiques de travailleurs et d'employeurs. L'organisation des travailleurs du secteur informel par les partenaires sociaux a le mérite, pour ces derniers, de renforcer leur représentativité et, par voie de conséquence, leur droit de parler au nom de tous les travailleurs. Quant aux travailleurs du secteur informel, les avantages qu'ils en tirent sont la visibilité, la légitimité et la sécurité. Toutefois, ils ont souvent intérêt à se tourner plutôt vers des organismes représentatifs indépendants. Les organisations de travailleurs et d'employeurs peuvent aider les opérateurs du secteur informel à s'organiser en groupes de «communauté d'intérêts». L'OIT et son Programme in focus concernant le dialogue social peuvent aider à identifier les opérateurs du secteur informel qui peuvent être organisés ainsi et l'aide à leur apporter. Reste ensuite à préciser le type de liens et d'alliances à établir entre les organisations du secteur informel et les organisations d'employeurs et de travailleurs dans l'intérêt de tous.

74.    Le gouvernement a lui aussi un rôle très important à jouer dans la création d'un environnement favorable à l'organisation et la représentation des travailleurs du secteur informel. Etant le plus souvent sans relations de travail, les travailleurs du secteur informel sont contraints, pour défendre leurs intérêts et besoins les plus vitaux, de négocier avec les autorités locales, qu'il s'agisse de se faire inscrire, de se faire délivrer une carte d'identité ou de se faire octroyer un espace pour des activités de production, un commerce ou des services. Il faut également élargir l'accès des travailleurs du secteur informel à des services de base tels que la sécurité sociale, les services de santé et de sécurité, la mise à niveau des compétences et des techniques, les systèmes de microcrédit et d'épargne et les services commerciaux. Parmi les structures institutionnelles et organisationnelles qui sont en mesure de fournir ces services figurent, dans certains cas, les organisations de travailleurs et d'employeurs et les organismes représentatifs indépendants, qu'ils soient régionaux ou sectoriels.

75.    Cette question d'organisation et de représentation a aussi une dimension mondiale qui prend de plus en plus d'importance. Des alliances nationales de marchands ambulants et de travailleurs à domicile sont en train de former des alliances internationales (StreetNet et HomeNet, respectivement) pour défendre leurs programmes d'activité. Se référant à la Déclaration tripartite de principes sur les entreprises multinationales et la politique sociale (1977) de l'OIT, le Colloque international sur les syndicats et le secteur informel a demandé aux gouvernements de faciliter l'accès à l'information sur les circuits de production et les processus de sous-traitance, que le travail soit sous-traité dans le pays de l'entreprise ou qu'il soit en définitive effectué dans d'autres pays. Il a demandé, par ailleurs, aux syndicats de développer la coopération internationale entre centrales syndicales, et à la coopération syndicale internationale visant à améliorer les conditions de travail dans le secteur informel de se concentrer sur quatre domaines: promotion d'un lien entre normes du travail et politique commerciale; négociation et application de codes de conduite; élaboration et mise en œuvre d'accords-cadres entre les organisations syndicales internationales et les sociétés multinationales; programmes d'étiquetage social.

Protection sociale

76.    Plus de la moitié de la population mondiale vit aujourd'hui en marge de toute protection sociale officielle, et ces exclus font partie, pour la plupart, du secteur informel. En plus des questions d'équité et de droits de l'homme qu'elle soulève, la protection sociale est étroitement liée à la productivité. Les journées de travail perdues pour cause de maladie, d'accident ou de lésion, sans parler des frais médicaux, contribuent énormément à la pauvreté, en particulier dans les pays où les subventions étatiques ont été réduites ou supprimées à cause des mesures d'ajustement structurel et de privatisation, mais aussi dans les pays industrialisés où le coût de la santé est élevé. Le Colloque international sur les syndicats et le secteur informel a recommandé de promouvoir l'adoption de régimes de protection sociale équitables et universels et, à défaut, de systèmes d'assurance mutuelle au niveau local, ce pour un coût qui puisse être couvert par les travailleurs eux-mêmes, leurs éventuels employeurs et l'Etat, afin de réduire les inégalités de revenu et de protéger tous les membres de la société. Lors d'un atelier international sur la protection sociale organisé par le BIT en décembre 1999 avec la collaboration de WIEGO[22] et de la Banque mondiale, plusieurs autres modèles ont été présentés: systèmes d'assurance à but lucratif, systèmes semi-publics, régimes d'assurance-maladie transférables, systèmes liés aux institutions de microfinancement. Pour ces deux réunions, l'objectif final ou à long terme est d'étendre et d'adapter au secteur informel les régimes du secteur formel existants, qu'il s'agisse des systèmes de pensions officiels, des systèmes de pensions contributifs ou des systèmes d'assurances privés.

77.    Bien évidemment, il n'est pas facile d'étendre et d'adapter des régimes de sécurité sociale publics ou privés destinés à des travailleurs du secteur formel qui bénéficient d'une garantie de l'emploi et auxquels les employeurs participent de façon importante aux travailleurs du secteur informel. Bien souvent ces travailleurs ne sont pas en mesure ou désireux d'y cotiser, surtout lorsqu'il s'agit de programmes à long terme tels que les régimes de pensions. La plupart des ménages du secteur informel consacrent déjà une part considérable de leur budget aux dépenses de santé et d'éducation, et beaucoup recherchent une protection pour les cas de décès et d'incapacité. Les systèmes locaux de solidarité répondent généralement à ces priorités. Les femmes du secteur informel accordent, elles aussi, la priorité aux prestations pour maternité et aux indemnités pour frais de garde des enfants. Bien que modestes par leur couverture et leur échelle, les systèmes de solidarité fondés sur le groupe présentent plusieurs avantages pour les travailleurs du secteur informel: en cotisant régulièrement ils évitent de se retrouver avec une facture importante du médecin et de s'endetter; en tant que groupe ils peuvent discuter les prix et la qualité des soins avec les fournisseurs de soins de santé privés; et, dans le cadre d'un groupe, ils sont plus disposés à consacrer une partie de leur budget à des activités de prévention et de promotion de la santé qui pourraient faire baisser le coût des services des soins. Toutefois, il ne peut y avoir de système autofinancé dans le secteur informel que s'il existe une association fondée sur la confiance et une administration capable de percevoir les cotisations et de verser des indemnités. Ces systèmes peuvent soit être gérés directement par des associations ou des organisations de travailleurs du secteur informel (comme les organisations de producteurs et d'employeurs, les coopératives et les associations de crédit), soit recourir à des intermédiaires comme les syndicats, les organisations non gouvernementales et les compagnies d'assurances privées. Le Programme de stratégies et techniques contre l'exclusion sociale et la pauvreté du BIT (STEP) est en train de recueillir et de diffuser des informations sur un certain nombre de systèmes qui existent déjà, mais on peut d'ores et déjà dire que la coopération technique et l'aide fournie dans ce domaine sont insuffisantes[23]. En effet, qu'ils soient publics, privés ou autofinancés, les régimes de sécurité sociale doivent traiter toute sortes de questions: problèmes administratifs, coûts, cotisations, subventions, etc.

78.    La question de la santé et de la sécurité au travail a elle aussi son importance dans le secteur informel. La productivité ne peut être accrue et les emplois être des emplois de qualité que si la prévention des accidents et des maladies et la protection de la santé et du bien-être des travailleurs font partie intégrante de l'organisation du travail et du processus de production. Cela est d'autant plus évident que le coût total des lésions et maladies et de l'incapacité est pris en compte dans le calcul du coût réel de la production. Dans les micro-entreprises du secteur informel, il y a aussi un lien étroit entre des mauvaises pratiques en matière de travail et de mauvaises conditions de travail. Les travaux dangereux nuisent non seulement à la santé des travailleurs du secteur informel, mais aussi à la productivité et donc au revenu de l'entreprise, ces travailleurs étant, du fait de leur état de santé, dans l'incapacité de travailler efficacement. Les micro-entrepreneurs sont très peu conscients des effets négatifs que peuvent avoir à long terme des conditions de travail mauvaises et dangereuses et très mal informés des mesures qui permettent de prévenir les accidents et les maladies et d'améliorer la protection des travailleurs et les pratiques de l'entreprise de manière à accroître leur productivité.

79.    L'état de santé au travail des travailleurs du secteur informel dépend de leurs conditions de travail, de leur état de santé général et du degré de dégradation de l'environnement. La manipulation des substances dangereuses, l'exposition à des températures extrêmes et à des maladies contagieuses, le manque d'équipement et d'outils appropriés, les problèmes d'éclairage et de ventilation, etc. se retrouvent tous dans le secteur informel, mais ce sont des problèmes que l'on peut souvent résoudre en apportant des améliorations peu coûteuses sur le lieu de travail, en formant le personnel, en s'occupant de la promotion de la santé et en informant les travailleurs. On est en train de préparer à l'intention des micro-entreprises du secteur informel et des petits exploitants agricoles des solutions pratiques, simples et durables pour améliorer les conditions de travail. Ces solutions nouvelles s'appuient sur l'expérience qu'on a accumulée dans beaucoup de régions et de pays en utilisant la méthode du Programme sur les améliorations du travail dans les petites entreprises (WISE), une méthode axée sur des améliorations peu coûteuses et étroitement liées à la productivité et à d'autres objectifs de l'entreprise à apporter sur le lieu de travail et sur l'adaptation de ce programme aux micro-entreprises du secteur informel. A cet égard, on rappellera que lors de la session de la Conférence internationale du Travail de juin 2000 il y aura une première discussion sur d'éventuelles normes de sécurité et de santé dans l'agriculture, qui concernent également les petits exploitants agricoles.

80.    La productivité des travailleurs du secteur informel ne peut être augmentée que si l'on met au point des mesures qui conjuguent véritablement l'offre de services permettant aux micro-entreprises d'accroître leurs revenus et de services qui les aident à protéger leur santé et à améliorer leurs conditions de travail. Le défi de la protection de la santé et du bien-être des travailleurs du secteur informel ne pourra être relevé que si la question de la promotion de la santé, celle de la protection sociale et celle de la création d'emplois de qualité sont traitées ensemble dans le cadre d'une stratégie qui vise à améliorer les conditions de vie et de travail de base de la population urbaine pauvre, en recherchant un niveau de protection sociale plus élevé et un développement plus durable et équitable.

Points pouvant faire l'objet d'une discussion
générale à la Conférence

81.    Une discussion sur le rapport du Directeur général intitulé Le dilemme du secteur non structuré s'est tenue à la session de la Conférence internationale du Travail de 1991. Depuis lors, le BIT a mené dans ce domaine des travaux importants sur les questions de statistique et de définition, la politique macroéconomique, les activités normatives et la coopération technique, y compris le développement des micro-entreprises, les questions sexospécifiques, la formation, l'organisation et la représentation des travailleurs, la protection sociale ainsi que la sécurité et la santé au travail.

82.    Une discussion générale sur le secteur informel serait aujourd'hui souhaitable, et ce pour trois raisons, à savoir: 1) l'importance que l'OIT et ses mandants attachent au concept de travail décent pour tous les travailleurs; 2) la nécessité d'assurer l'application à tous les travailleurs de la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail; et 3) la nécessité de mieux comprendre les nouvelles formes de travail qui apparaissent dans le secteur informel et de savoir comment agir sur les mécanismes qui sont à l'œuvre pour offrir des emplois plus nombreux et de meilleure qualité au niveau mondial. La surreprésentation des jeunes et des femmes dans le secteur informel est aussi à prendre en considération.

83.    Le Bureau envisage entre autres la possibilité de tenir une conférence distincte sur le secteur informel en 2002 (30e anniversaire de la mission globale de l'OIT au Kenya, qui a permis de cerner et de développer le concept de secteur informel) si les conclusions de la discussion du Conseil d'administration sur cette question le permettent.

84.    Si le Conseil d'administration décide d'inscrire cette question à l'ordre du jour, la Conférence voudra sans doute se pencher notamment sur les points suivants:

4.      Investissement et emploi

Résumé

La mondialisation a accru l'importance de l'investissement privé au niveau national. Au niveau mondial, l'investissement étranger direct (IED), que les entreprises réservent à un petit nombre de pays, a largement remplacé l'investissement public, comme l'aide au développement. La part des investissements de portefeuille a augmenté. Ces tendances ont un impact considérable sur le niveau et la structure de la croissance économique, de l'emploi et de la répartition du revenu.

Ainsi qu'il a été précisé dans les conclusions du rapport intitulé «Politiques de l'emploi dans une économie mondialisée» soumis à la session de 1996 de la Conférence internationale du Travail, l'investissement est un élément crucial du processus de création d'emplois et de croissance de la production. Depuis lors, l'impact sur les marchés du travail, qui demeurent des marchés locaux, des marchés de capitaux, qui deviennent de plus en plus des marchés mondiaux, suscite de plus en plus de préoccupations.

Les gouvernements, les syndicats et les organisations d'employeurs disposent de plusieurs moyens pour encourager les investissements en général, et surtout ceux qui ont des effets positifs sur l'emploi, même si le rôle d'investisseur et de fournisseur de financements de l'Etat a nettement diminué. Les changements qui sont intervenus dans la composition, la localisation et les sources de financement des investissements ont influé sur le choix des moyens utilisés pour orienter les décisions prises essentiellement par des entreprises en matière d'investissement.

La discussion sur l'investissement et l'emploi se trouve motivée par la question sous-jacente des moyens à utiliser pour créer, grâce à l'investissement, des emplois en plus grand nombre et de meilleure qualité dans le contexte changeant de la prise de décisions, surtout dans les domaines où on en a le plus besoin: dans les pays les moins développés, dans les régions les moins développées à l'intérieur d'un même pays et dans les petites entreprises.

Le rôle des entreprises
dans l'investissement et l'emploi

Problématique

85.    Jusque vers 1985, l'investissement privé et l'investissement public ont suivi à peu près la même trajectoire. Depuis lors, le niveau de l'investissement privé dépasse celui de l'investissement public. Les privatisations, la déréglementation et la stabilisation de l'économie ont élargi les possibilités de croissance du secteur privé, et de nouveaux secteurs, comme l'infrastructure pour les services publics, les télécommunications et les transports, se sont ouverts à l'investissement privé. Le rôle des entreprises privées en tant qu'investisseurs et pourvoyeurs d'emplois a pris de l'importance.

86.    Au cours des vingt dernières années, et tout particulièrement dans les années quatre-vingt-dix, la production s'est progressivement orientée vers des produits et des services à plus forte intensité de savoir. D'après les estimations, la production se développera beaucoup plus vite dans ces secteurs et il s'ensuit que leur part dans la production totale s'accroîtra. Une grande partie de la valeur de biens tels que les automobiles procède aussi des logiciels informatiques et autres intrants incorporels. Les sociétés internationales à forte intensité de savoir ont démontré au début des années quatre-vingt-dix, à un moment où l'emploi reculait dans d'autres secteurs, leur capacité de créer des emplois.

87.    En ce qui concerne la disponibilité de ressources pour la recherche-développement (la R-D), les entreprises implantées uniquement sur le marché intérieur sont défavorisées: elles sont pour la plupart relativement petites et tributaires des biens et services produits par les sociétés internationales. Ces dernières années, la concurrence entre ces entreprises s'est intensifiée, les sociétés internationales s'étant efforcées de réduire le nombre de leurs sous-traitants principaux.

88.    La R-D est associée non seulement aux produits de forte technicité, mais aussi aux organisations à forte intensité de savoir. En général, les grandes sociétés internationales qui emploient des personnes ayant un haut niveau d'instruction sont dans le peloton de tête pour la mise en place de formes souples d'organisation du travail - gestion décentralisée, travail en équipe et rotation des postes, perfectionnement professionnel continu et recours à des systèmes de rémunération fondés sur les résultats et la qualité, etc. Les entreprises qui ont mis en place de telles innovations ont, si l'on en croit de nombreuses études comparatives, enregistré une amélioration de la productivité et de la rentabilité, ainsi que de leur aptitude à attirer et fidéliser des travailleurs hautement qualifiés.

Points pour la discussion

89.    Quelles sont les stratégies de survie des entreprises qui opèrent dans des secteurs à forte intensité de main-d'œuvre? Comment peut-on faire en sorte que ces entreprises s'orientent avec succès vers une meilleure utilisation de la technologie et du savoir-faire humain? Nombreuses sont les entreprises qui, ayant toujours été hautement capitalistiques, sont aux prises avec les mêmes problèmes, en particulier dans la production primaire. Il existe des projets locaux qui traitent de cette question, mais les idées et l'expérience tirées de ces projets ne sont guère exploitées, parce que les informations n'ont pas été rassemblées ni organisées de façon globale.

90.    Comment les entreprises qui mènent leur activité dans des régions où l'accès aux technologies modernes de l'information et de la communication est très restreint, en Afrique subsaharienne par exemple, peuvent-elles éviter d'être exclues du développement fondé sur l'intensité de savoir? Quelles sont les leçons à tirer de l'expérience des pays européens qui ne se sont pas inscrits dans le courant général de la mondialisation? Quel rôle, par exemple, ont joué l'investissement étranger direct (IED) et la promotion des investissements de l'étranger dans la création d'emplois pour la main-d'œuvre qualifiée?

91.    Quel est l'avenir des PME dans un environnement où la croissance - y compris la croissance des entreprises - paraît la condition sine qua non pour survivre? Croître est-il pour ces entreprises un objectif souhaitable ou indispensable? Si tel n'est pas le cas, quels sont les facteurs déterminants - technologie, organisation, conditions du marché - qui leur permettent de conserver leur petite taille tout en étant prospères dans différentes branches d'activité et régions?

Le rôle de l'Etat en tant qu'investisseur
et promoteur de l'investissement

Problématique

92.    Un peu partout dans le monde, le capitalisme d'Etat est en train de céder la place à la propriété privée, et les monopoles à la concurrence. Des programmes de privatisation massive ont été mis en œuvre dans la plupart des régions du monde, et l'Etat a assisté à une régression de son rôle de propriétaire des moyens de production et à une transformation de son rôle d'investisseur.

93.    Jusqu'au milieu des années quatre-vingt, l'investissement privé et l'investissement public ont suivi à peu près la même trajectoire. Depuis lors, le niveau des investissements privés a augmenté. Avec la privatisation des industries, la déréglementation et la stabilisation de l'économie ont accru les possibilités de croissance, et de nouveaux secteurs, dont celui de l'infrastructure, se sont ouverts à l'investissement privé.

94.    Aujourd'hui, ce sont de plus en plus les services sociaux, et surtout les ressources humaines, qui bénéficient des investissements publics. La mise en valeur des ressources humaines fournit d'excellentes possibilités d'investissement de par sa contribution à une croissance économique durable. On a ainsi pu constater une étroite corrélation entre le nombre des inscriptions scolaires et les taux de croissance moyens. Il ne saurait y avoir de croissance et d'emploi à long terme sans une population éduquée. Malgré cela, l'enseignement et la formation font partie des principales cibles des coupures budgétaires opérées dans beaucoup de pays avancés.

95.    D'investisseur, l'Etat est devenu promoteur de l'investissement privé: même lorsqu'un réseau et des services de télécommunications sont fournis par des sociétés privées, l'Etat est censé jouer un rôle de promotion et de développement pour faciliter et assurer l'afflux des investissements dans ce secteur. Ce rôle englobe la recherche-développement, les réseaux pilotes, la politique d'achat, l'infrastructure de base, etc. Les télécommunications constituent l'exemple type des industries sans lesquelles il ne saurait y avoir d'entreprises modernes en réseau tout en étant un secteur d'activité qui nécessite une infrastructure sophistiquée à partir de la connectivité physique brute. L'entreprise en réseau est l'unité réelle de fonctionnement de l'activité entrepreneuriale et se compose de différentes entreprises ou de segments d'entreprises, mais aussi de consultants et de travailleurs temporaires rattachés à des projets bien précis. Les agents du projet entrepreneurial constituent pour chaque projet une entreprise qui se définit par sa tâche et sa performance, et non par ses frontières juridiques.

96.    L'Etat alloue également des fonds publics aux investissements du secteur privé, que ce soit dans le cadre national ou à l'échelle internationale. Ce type de financement est généralement soumis à certaines conditions, comme la mise en place d'un programme d'ajustement.

97.    Au niveau national, différentes mesures d'encouragement à l'investissement sont prises dans le cadre de la création d'emplois: des dons ou des crédits d'un certain montant sont accordés pour les investissements destinés aux entreprises qui s'engagent à accroître l'emploi net d'un nombre moyen déterminé de postes à plein temps au cours d'une année budgétaire. Bien que leurs effets positifs à court terme soient évidents puisqu'il y a création d'emplois, ces formes d'encouragement sont sujettes à caution. Elles ne sont valables que si l'entreprise ne peut pas se permettre autrement de réaliser un investissement qui améliorerait véritablement sa performance.

98.    Il est de plus en plus admis que la compétitivité des petites et moyennes entreprises et leurs chances de survie sont étroitement tributaires de la qualité des réseaux d'entreprises ou entreprises-institutions dont elles font partie. C'est ce qui explique l'intérêt porté aux besoins des groupes d'entreprises, plutôt qu'à ceux des entreprises isolées. Les entreprises peuvent collaborer pour des questions telles que l'amélioration des produits ou la formation, et l'initiative peut venir soit des entreprises elles-mêmes, soit d'un organisme public, d'un institut de formation local ou, comme pour la Garment Industry Development Corporation de New York, d'un organisme tripartite. Ces groupes d'entreprises sont, de par leur nature, des groupes régionaux ou sous-régionaux, et en encourageant la création de groupes on peut aider le développement, l'investissement et l'emploi au niveau local.

99.    A l'échelle internationale, les dons et crédits font partie des programmes d'ajustement. Le choix des instruments à utiliser pour promouvoir la croissance et l'emploi est un élément important de la conception des programmes d'ajustement. Si, dans certains pays où ils ont été véritablement appliqués, ces programmes sont effectivement synonymes de croissance, dans bien des régions, seul le nombre des pauvres continue à augmenter, même avec un programme d'ajustement rigoureux. On reproche à ces programmes de ne tenir aucun compte des conditions et traditions locales: en Afrique, ils oublient souvent que la plupart des gens vivent dans des régions rurales et sont de petits propriétaires travaillant à leur compte, et les programmes d'ajustement qui font pencher la balance du côté du secteur rural et qui privilégient une croissance de l'agriculture à base très large offrent, par conséquent, la possibilité la plus immédiate d'atténuer la pauvreté et de promouvoir la croissance économique.

Points pour la discussion

100.    Les points suivants pourraient faire l'objet d'une discussion:

-      Arbitrage entre les différents rôles que joue l'Etat, comme la création d'un cadre macroéconomique solide; l'investissement public dans les ressources humaines; la promotion de l'investissement privé; le financement de l'investissement privé; les mesures spéciales à prendre pour aider les petites et moyennes entreprises à promouvoir les investissements créateurs d'emplois. Pour cet arbitrage, faut-il accorder la priorité aux rôles qui donnent le résultat souhaité à long terme de la manière la plus claire, ou à la recherche de rôles et de moyens nouveaux et expérimentaux?

-      Pour ce qui est des orientations à formuler pour les dépenses du secteur public qui facilitent l'investissement créateur d'emplois, quelles sont les perspectives à court et à long terme en ce qui concerne l'investissement des ressources publiques disponibles et les contributions à apporter par le secteur public et le secteur privé à l'offre de services essentiels ou pour répondre à la demande de différents services ayant un rapport avec l'investissement et l'emploi (éducation de base, formation, services d'emploi, etc.)?

-      S'agissant des orientations à formuler pour l'intervention de l'Etat dans l'investissement privé, l'Etat devrait-il se borner à créer l'infrastructure nécessaire ou intervenir au contraire plus directement dans la formation de capitaux privés? Quels sont les moyens d'intervention qui conviennent dans le cadre national et à l'échelle internationale, compte tenu de la politique suivie en matière de concurrence et d'autres politiques, ainsi que des différences culturelles, politiques et autres qui existent entre régions et Etats? Les programmes d'ajustement devraient-ils privilégier le soutien et le développement des structures existantes ou plutôt la création de nouvelles structures?

Ciblage des investissements

Problématique

101.    Dans pratiquement toutes les industries, on observe aujourd'hui dans le monde entier le déplacement de la production à forte intensité de main-d'œuvre vers une production à forte intensité de capital.

102.    Les avancées technologiques ont permis de trouver des solutions techniques pour différentes tâches qui se faisaient autrefois manuellement. Le caractère imprévisible de la conjoncture économique pour beaucoup d'entreprises les a rendues plus prudentes lorsqu'il s'agit de recruter des travailleurs.

103.    Pour une entreprise, la décision de recruter et la décision d'investir sont deux mécanismes similaires, en ce sens qu'il n'est souhaitable de recruter un travailleur que lorsque la valeur courante nette d'une telle décision est positive. L'entreprise doit comparer le coût d'un investissement dans la main-d'œuvre et celui d'un investissement en machines et en matériel. Dans bien des cas, la main-d'œuvre est plus flexible que les machines. L'augmentation des coûts unitaires de main-d'œuvre contribue à l'érosion de la compétitivité.

104.    La question clé dans la discussion sur les coûts de main-d'œuvre est celle de la flexibilité: la garantie de l'emploi nuit à la flexibilité du marché du travail; en général, elle réduit la flexibilité numérique, mais favorise la flexibilité fonctionnelle.

105.    Le degré de sécurité de l'emploi que les entreprises sont prêtes à assurer dépend en partie de l'importance de leur investissement en main-d'œuvre. L'entreprise sait bien qu'en assurant la sécurité de l'emploi elle accroît le rendement des investissements qu'elle a réalisés dans la formation de la main-d'œuvre et le développement des compétences, tant spécifiques que générales. Par conséquent, les travailleurs peu qualifiés sont plus vulnérables en période de crise dans le secteur concerné et dans la région.

106.    Outre la législation du travail et la négociation collective, la législation fiscale affecte les coûts de main-d'œuvre et l'emploi. Les charges sociales sont souvent plus lourdes à supporter que l'impôt sur le capital. Les charges sociales du salarié et de l'employeur, qui permettent de financer différents transferts sociaux, sont au centre de la discussion sur la relation entre fiscalité et création d'emplois. Les charges sociales augmentent le coût relatif de la main-d'œuvre et freinent le désir de création d'emplois des entreprises. En outre, les charges fiscales n'étant pas indexées sur les profits, elles pèsent lourdement sur l'entreprise en période de crise.

107.    L'importance des coûts de main-d'œuvre dans les pays développés fait partie des arguments qui sont avancés en faveur d'un investissement dans des technologies à forte intensité de capitaux et économes en main-d'œuvre et d'un transfert vers les pays à faible coût production. Cela a eu pour effet d'accroître le chômage structurel, dont le coût n'a fait qu'alourdir la charge fiscale, ce qui a entraîné une augmentation des taux de fiscalité, décourageant encore plus l'investissement et, par là-même, la création d'emplois.

108.    Les petites et moyennes entreprises sont à l'origine d'une grande partie des emplois créés, mais d'une partie beaucoup plus réduite de l'investissement. Cela est inévitable, compte tenu du fait que les industries à forte intensité de capital sont généralement composées de grosses entreprises. Toutefois, beaucoup de petites et moyennes entreprises ont besoin d'un niveau d'investissement plus élevé pour se développer, pour améliorer la qualité des produits et pour mieux faire face à la concurrence. Avec des investissements plus importants, on peut réduire l'inefficacité et le gaspillage dû aux faillites, et avec un équipement de meilleure qualité l'entreprise peut recruter des travailleurs plus qualifiés, contribuant ainsi à la généralisation d'une culture de la formation dans l'économie. Les petites et moyennes entreprises sont freinées, dans leur désir d'expansion et d'accroissement du profit, par un certain nombre d'obstacles comme les problèmes de commercialisation, d'achat et de localisation.

109.    Les charges patronales n'ont évidemment pas le même poids dans les petites entreprises et dans les grosses entreprises, et ce pour plusieurs raisons. En effet, ces charges représentent une partie beaucoup plus importante de la fiscalité totale dans les petites entreprises; les dépenses administratives y sont plus élevées; les petites entreprises sont généralement des entreprises à forte intensité de main-d'œuvre et ont tendance à recruter des travailleurs peu qualifiés et moins bien rémunérés; les effets à court terme de l'ajustement sur le marché peuvent peser plus lourdement sur le cash-flow des petites entreprises, et les charges sociales ne sont pas indexées sur le profit.

Points pour la discussion

110.    Parmi les points à discuter sous cette rubrique, il pourrait y avoir les points suivants:

-      Dans quel sens doit-on modifier la législation du travail et les conventions collectives si l'on veut que la réglementation assure une flexibilité suffisante au marché du travail sans violer les droits des travailleurs et sans réduire l'emploi?

-      Dans quel sens doit-on modifier la fiscalité si l'on veut réduire les coûts sans toucher pour autant au système de protection sociale? Quel est l'effet sur l'emploi du niveau et du type de fiscalité (par exemple, impôts sur le revenu, sur la consommation et sur la propriété, et cotisations d'assurance sociale)?

-      Dans quel sens doit-on modifier la réglementation si l'on veut qu'elle favorise la création d'emplois dans les petites et moyennes entreprises?

Localisation des investissements

Problématique

111.    Les décisions d'investissement et de production des entreprises se prennent aujourd'hui à l'échelle internationale. Les investisseurs fondent leurs décisions concernant les dépenses d'équipement sur le volume potentiel des ventes, le potentiel de matières brutes, la proximité à l'égard des clients, les demandes des clients, la structure du marché et des coûts et les conditions politiques et juridiques du moment.

112.    La mondialisation offre aux investisseurs sur les marchés de capitaux internationaux une gamme plus large de possibilités d'investissement, des rendements plus élevés pour leur épargne et une diversification plus poussée de leur portefeuille. Pour l'économie mondiale, la mondialisation favorise une meilleure répartition des ressources dans le monde et, de ce fait, plus de croissance, d'investissement et d'emplois dans le monde.

113.    Les investissements, y compris l'investissement étranger direct (IED) qui contribue directement à l'emploi, sont répartis de manière inégale entre les régions et les pays. Les pays et régions qui ne sont pas capables de participer à l'expansion du commerce international ou d'attirer des investissements privés importants courent le risque de se laisser distancer. Ce sont les pays et les régions qui ont le plus besoin des échanges, des investissements et de la croissance que la mondialisation pourrait apporter qui risquent le plus d'être marginalisés.

114.         Les pays en développement ont drainé 37 pour cent de l'IED en 1997, contre 17 pour cent au début de la décennie. Toutefois, parmi les pays en développement, l'IED se concentre sur un petit nombre de pays et de régions. Les principaux bénéficiaires en sont l'Asie de l'Est et le Pacifique, l'Amérique latine et les Caraïbes. Comparée à d'autres parties du monde, l'Afrique a encore un faible volume d'IED, ce qui est préoccupant. Entre 1991 et 1996, l'Afrique a obtenu moins de 5 pour cent de l'IED total destiné aux pays en développement.

115.    L'absence d'IED s'explique par diverses raisons, et on ne comprend pas encore vraiment la relation qui existe entre elles. En plus des raisons économiques, il y a des raisons politiques qui sont liées, à leur tour, à d'autres considérations économiques. L'instabilité politique et la méfiance à l'égard des gouvernements apparaissent souvent comme les grandes coupables. Un investisseur hésitera à s'engager si les réformes entreprises dans un pays ne lui paraissent pas encore bien enracinées, ou si l'investissement privé ne lui paraît pas être un objectif vraiment important pour le gouvernement. Certains observateurs font remarquer qu'il n'y a pas vraiment de secteur privé organisé dans ces pays. Enfin, les risques encourus par les investisseurs étrangers sont relativement élevés, et les résultats peu satisfaisants.

116.    Bien que les avantages de la mondialisation et de l'investissement direct étranger soient reconnus, la mondialisation suscite aussi des craintes. D'après certains, les entreprises multinationales auraient transféré des emplois des pays avancés vers les pays en développement décidant d'investir et de produire à des fins d'exportation dans des zones économiques spéciales, et les gouvernements auraient encouragé, avec la libéralisation du commerce, la substitution des biens produits dans le pays par des biens produits à l'étranger.

117.    Les zones économiques spéciales font partie des nombreux avantages qu'offrent les gouvernements pour attirer l'investissement étranger direct. En gros, on peut dire que les zones économiques spéciales, qui donnent un statut de libre-échange aux exportateurs, constituent une étape pratique pour les pays qui ne peuvent pas passer rapidement à un régime de libre-échange. Les zones de libre-échange et les zones franches sont des zones dans lesquelles les produits étrangers ou nationaux peuvent pénétrer sans formalités douanières ni paiement de droits de douane ou d'impôts indirects. Alors que les zones franches se spécialisent dans la fabrication de produits à des fins d'exportation, dans les zones de libre-échange il y a aussi importation. Toutefois, l'attitude adoptée à leur égard varie considérablement. Là où ils fonctionnent bien, en Asie de l'Est par exemple, ces systèmes contribuent énormément au succès des exportations de produits manufacturés. Or, ce succès est générateur non seulement de croissance économique, mais aussi d'un élan en faveur d'une libéralisation des échanges. Il faut toutefois préciser que les exploitants des zones économiques spéciales ont été accusés entre autres de violations des droits de l'homme.

118.    Plusieurs organisations régionales ayant pour but d'assurer l'intégration économique ont été créées pour orienter la mondialisation. En ce qui concerne l'intégration régionale, on peut signaler trois tendances. Tout d'abord, les zones de libre-échange finissent pas donner lieu à une intégration économique plus poussée. En outre, on constate soit le remplacement d'une entreprise par une nouvelle, soit l'ajout de nouveaux éléments à l'entreprise existante. Enfin, les zones d'intégration économique continuent à s'agrandir soit par la fusion de plusieurs entreprises, soit par l'admission de nouveaux membres dans les groupes existants. Les accords de coopération entre groupes régionaux sont de plus en plus nombreux.

Points pour la discussion

119.    Parmi les points à discuter sous cette rubrique, il pourrait y avoir les points suivants:

-      Comment peut-on créer, dans une économie mondialisée, les conditions qui permettraient à un pays d'attirer des investissements sans que cela nuise à un autre pays?

-      Comment faut-il organiser la coordination et les arbitrages entre les politiques et activités des organisations internationales (comme les institutions des Nations Unies), des organisations régionales d'intégration économique ou de libre-échange (Union européenne, ANASE, ALENA, CARICOM, MERCOSUR, ASACR, SADC, etc.) et des gouvernements nationaux si l'on veut éviter une répartition inégale des investissements étrangers directs et d'autres avantages qu'apporte la mondialisation? Est-ce que les pays devraient avoir quelques objectifs macroéconomiques communs, par exemple en ce qui concerne les taux d'intérêt ou les différents moyens à utiliser pour attirer l'investissement étranger direct?

-      De quelle manière les pays prospères devraient-ils aider les autres pays à créer un climat favorable à un investissement créateur d'emplois? Quels types de services consultatifs, de services d'aide et de services d'information faut-il pour l'élaboration des politiques, la rationalisation et le renforcement des mécanismes et des procédures administratives et pour la mise à jour de l'information concernant les tendances mondiales du marché et les politiques et pratiques d'autres pays?

Financement des investissements

Problématique

120.    Dans la plupart des pays en développement, les taux d'intérêts publics et privés sont beaucoup trop bas et ne permettent pas de financer les niveaux d'investissement prévus.

121.    Les capitaux privés ont supplanté l'aide officielle au développement comme principale source de financement externe des pays en développement, avec 85 pour cent du total en 1997, contre 41 pour cent seulement en 1990. Entre 1990 et 1997, les décaissements des organismes d'aide officiels ont diminué de 15 pour cent, après avoir atteint près de 60 pour cent des flux de ressources nets à long terme destinés aux pays en développement. Il y a également eu une diminution en termes absolus qui s'explique par un meilleur accès d'un nombre de plus en plus grand de pays en développement aux marchés financiers ainsi que par une baisse de la demande d'aide officielle destinée à financer l'investissement du secteur public comme les projets d'infrastructure.

122.    On remarquera, toutefois, que les flux privés d'investissement étranger direct se concentrent très fortement sur un tout petit nombre de pays, de secteurs et d'emprunteurs: 75 pour cent des flux de capitaux privés nets vont à une douzaine de pays, parmi lesquels on trouve les pays en développement les plus importants. Il y a donc plus de 100 pays en développement qui ont peu accès au financement privé. Même parmi les pays qui reçoivent des capitaux privés, seul un petit nombre de privilégiés peut obtenir des prêts, qui sont destinés essentiellement aux industries extractives, à l'infrastructure et au secteur financier.

123.    Cette concentration donne à penser que les banques de développement multilatérales devraient jouer un rôle plus sélectif dans le financement du développement au XXIe siècle et se concentrer sur les domaines qui ne sont pas financés convenablement par d'autres sources. Cela pose un problème à ces banques, car il ressort de certaines études sur l'efficacité de l'aide que, pour avoir davantage d'impact, elles doivent concentrer leur aide sur les pays dont les politiques et les institutions soutiennent suffisamment le développement. Ce sont aussi, en général, les pays qui intéressent le plus les investisseurs privés. Cela pose la question de savoir si les pays en développement qui ont suffisamment accès au financement privé ne devraient pas cesser de recevoir des prêts de ces banques. Par ailleurs, il sera probablement difficile de dire à partir de quel point il devrait en être ainsi, les différences de niveau de développement et d'accès au financement étant aussi importantes dans un même pays qu'entre ces différents pays: par exemple, il y a une très grosse différence de niveau de vie entre la Chine côtière et l'intérieur du pays, et entre São Paulo et Manaus.

124.    La demande de prêts fondés sur une politique, qui demeurent l'un des principaux moyens d'action de la Banque mondiale, continuera probablement à fluctuer. L'importance des plans de sauvetage a augmenté ces dernières années avec chaque grande crise. Avec la poursuite de la libéralisation, on pourrait observer une volatilité encore plus grande. Les banques de développement multilatérales pourraient ainsi garder leur rôle de prêteurs de dernier recours même lorsqu'elles auront cessé de jouer un rôle dans le financement de l'investissement.

125.    Le financement privé des investissements a radicalement changé de structure ces dernières années. Jusqu'ici, les transactions entre emprunteurs et épargnants passaient par les banques et les sociétés de placement, les banques prêtant les fonds des dépositaires directement aux entreprises, et les sociétés de placement fournissant les nouveaux titres émis aux investisseurs, aux fonds de pensions et aux compagnies d'assurance. Deux phénomènes importants sont venus modifier cette conception traditionnelle de l'intermédiation financière.

126.    Tout d'abord, du côté de l'offre, les institutions financières non bancaires ont lentement remis en question les atouts traditionnels des banques en facilitant la désintermédiation et en offrant des services financiers qui étaient jusque-là fournis presque exclusivement par les banques. Les banques d'investissement, les sociétés de placement, les gérants de fortune, les fonds communs de placement, les compagnies d'assurance, les sociétés de financement, les fonds de couverture et même les sociétés de télécommunications, de logiciels et de denrées alimentaires commencent à fournir des services qui ne sont pas différents de ceux que fournissaient les banques jusqu'ici.

127.    En ce qui concerne la demande, beaucoup de ménages ont court-circuité les dépôts bancaires et les sociétés de placement, préférant confier leur argent à des institutions qui sont mieux à même de diversifier les risques, de réduire la charge fiscale et de profiter des économies d'échelle. Cela a entraîné une augmentation spectaculaire en dimension et en sophistication des institutions qui ont pour fonction principale d'investir de l'argent, de plus en plus à l'échelle mondiale, pour le compte des ménages.

128.    Les secteurs financiers non bancaires des grandes économies avancées sont très importants. Dans les pays du G7, les compagnies d'assurance, les fonds de pensions, les sociétés d'investissement et d'autres investisseurs institutionnels non bancaires ont géré en 1995 des avoirs évalués à plus de 20 000 milliards de dollars des Etats-Unis, ce qui représente près de 110 pour cent du PIB de tous les pays du G7, ou plus de la moitié de la valeur de toutes les obligations et actions de ces pays, et 90 pour cent de tous les actifs des systèmes bancaires de ces pays. Les mouvements de capitaux financiers internationaux se sont énormément développés sous l'effet conjugué de la déréglementation financière et de l'innovation. Par exemple, les transactions transfrontières concernant les obligations et actions ont connu une ascension spectaculaire dans les grands pays industrialisés, passant de moins de 10 pour cent du PIB en 1980 à un pourcentage compris entre 150 et 250 pour cent en 1995.

129.    Bien que les investissements de portefeuille puissent apporter une contribution importante au financement du capital social d'une entreprise locale, les pays d'accueil ont exprimé quelques préoccupations, en particulier en ce qui concerne la volatilité de ces flux et leurs effets sur les taux de change et les taux d'intérêt. Les politiques fiscales ont souvent soutenu l'augmentation de la part des investissements de portefeuille.

130.    L'abondance des sources pousse les entreprises à utiliser les fonds extérieurs le moins possible. Les investissements sont maintenus à un niveau élevé, même lorsque le rendement est relativement bas.

131.    Depuis quelques années, on discute dans beaucoup de pays avancés de la question de savoir s'il faut augmenter le placement rentable des recettes du secteur public. La discussion a porté plus précisément sur les fonds de différents programmes d'assurance sociale, en particulier les fonds de sécurité sociale. Ces fonds sont normalement placés dans des secteurs qui sont considérés comme des investissements sûrs, comme les titres de l'Etat, qui sont essentiellement des obligations à long terme. Toutefois, ces fonds pourraient obtenir un rendement beaucoup plus élevé en investissant dans des actions. Il y a aussi, du moins en théorie, d'autres possibilités: le gouvernement ou tout autre décideur pourrait financer des investissements susceptibles de créer des emplois.

Points pour la discussion

132.    Parmi les points à discuter sous cette rubrique, il pourrait y avoir les points suivants:

-      Quel devrait être le rôle des banques de développement multilatérales et de l'aide publique au développement en général dans le financement des investissements dans les pays en développement? Comment peut-on avoir à la fois une aide efficace et un développement à long terme durable?

-      Quel type de filet de sécurité préventif faut-il adopter pour éviter des crises économiques majeures et réduire la nécessité, pour les banques de développement multilatérales, de mettre en place des plans de sauvetage? Les filets de sécurité devraient-ils supplanter ou renforcer quelque peu les capitaux privés, les mécanismes et le contrôle de fermeture? Quels types de risques ces filets de sécurité devraient-ils prendre en compte?

-      Faudrait-il rétablir le financement public des investissements, par exemple en commençant par investir l'excédent des fonds de sécurité sociale en grande partie sur les marchés de capitaux?

 

5.      Travailleurs migrants

Résumé

Les problèmes que posent les migrations internationales de main-d'œuvre deviennent de plus en plus complexes et variés et touchent un nombre de pays plus important que jamais. Les migrations clandestines soulèvent un nombre croissant de problèmes, d'autant que l'organisation des migrations contemporaines est en grande partie aux mains d'intermédiaires privés. Actuellement, les travailleurs migrants sont dans leur grande majorité admis purement à titre temporaire, ce qui les expose fréquemment à des traitements discriminatoires. Devant les déficiences et le déclin de l'application des normes de l'OIT dans ce domaine, le Conseil d'administration a prié à sa 267e session la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations d'entreprendre une étude générale sur l'état des législations et des pratiques. A l'issue de cette étude, il est apparu clairement à la commission qu'il était nécessaire d'ouvrir un débat général sur le sujet des travailleurs migrants lors d'une prochaine session de la Conférence internationale du Travail en vue d'examiner, et éventuellement de réviser, les instruments en vigueur.

133.    On estime de nos jours entre 40 et 45 millions le nombre de personnes ayant une activité économique dans un pays autre que le leur, avec ou sans autorisation, ces personnes étant accompagnées d'un nombre au moins égal de dépendants. Ne sont pas inclus dans ces estimations les millions de Russes, de Kazakhs, d'Ukrainiens et de ressortissants d'autres Etats de l'ex-URSS. La question des migrations de travailleurs touche un nombre de pays plus important que jamais, qu'il s'agisse de pays d'accueil ou d'origine ou les deux. Alors qu'en 1970 on comptait 64 pays parmi les principaux pays d'accueil ou d'origine, vingt ans plus tard on en dénombre 98. Au début des années quatre-vingt-dix, près d'une centaine de pays jouaient un rôle important en matière de migrations économiques internationales.

I.          Evolution des migrations internationales

A.        Nouvelles formes de migration de la main-d'œuvre

134.    Les migrations internationales de travailleurs sont plus diverses et plus complexes qu'au cours des décennies précédentes. Les agriculteurs ou paysans possédant peu de qualifications et quittant leurs terres à titre provisoire ou permanent à la recherche d'activités salariées constituent encore une proportion importante des migrants transfrontaliers. Les travailleurs qualifiés du secteur industriel ou du bâtiment;[24], qui se déplacent à titre individuel ou dans le cadre des mouvements de main-d'œuvre d'une entreprise et qui peuvent être rattachés à un projet spécifique ou exécuter des tâches récurrentes pour un entrepreneur, représentent une proportion croissante des migrants actuels, au même titre que les jeunes femmes qui occupent des emplois de domestiques ou d'aides auprès de personnes âgées dans des pays étrangers. Les dirigeants, techniciens et prestataires de services hautement qualifiés se déplacent dans le monde entier plus fréquemment qu'auparavant, tant au sein qu'en dehors des entreprises transnationales, mais leurs mouvements sont rarement recensés. Les jeunes accueillis comme stagiaires pour perfectionner leurs compétences dans des entreprises étrangères et qui peuvent, dans le cadre de leur mission, exécuter des tâches ordinaires font tout autant partie de la migration économique contemporaine que les entrepreneurs accueillis avec la promesse de pouvoir devenir ultérieurement citoyens du pays s'ils apportent suffisamment de fonds pour créer des emplois pour eux-mêmes et pour d'autres personnes. Aucune classification ne saurait nettement et de manière exhaustive refléter la variété des travailleurs migrants internationaux que l'on rencontre aujourd'hui. Les distinctions entre migrants temporaires et ceux qui sont installés en permanence sont elles-mêmes très floues.

135.    La mobilité transfrontalière croissante des travailleurs est la résultante d'un ensemble de facteurs;[25]. L'intensification du commerce et des investissements est indéniablement l'un des plus importants mais, à ce jour, elle n'a eu d'incidence que sur un petit nombre de pays en développement d'Asie et d'Amérique latine. Du fait que beaucoup de pays pauvres n'ont pas encore bénéficié d'une augmentation des flux de capitaux, le creusement des écarts de revenus entre le nord et le sud au cours des trois dernières décennies a probablement contribué à accentuer les pressions migratoires. L'abaissement du coût des transports, lié à la circulation accrue des informations ainsi qu'à l'élargissement des réseaux personnels et institutionnels, facilite sans aucun doute la mobilité des personnes. A ces éléments, on peut ajouter les mutations d'ordre politique telles que l'effondrement de l'ex-URSS, qui a levé certains des obstacles qui entravaient autrefois leur libre mouvement. Enfin, il semblerait que la croissance du secteur informel soit associée à une plus grande absorption de main-d'œuvre étrangère dans les pays industrialisés. Toutefois, ce ne sont pas les grandes entreprises qui recrutent en général les travailleurs étrangers, mais les secteurs où la concurrence est très vive, par exemple dans les petits ateliers de fabrication, chez les sous-traitants du secteur du bâtiment, dans les magasins de détail, dans les services faiblement technicisés et dans l'agriculture, c'est-à-dire les secteurs où la faiblesse des salaires et le peu de qualifications requises n'attirent pas les ressortissants nationaux.

B.        Problèmes et dilemmes politiques

136.    Beaucoup des nouveaux problèmes et dilemmes politiques ont vu le jour avec la croissance et l'émergence de nouvelles formes de migration de la main-d'œuvre. Les plus importants sont notamment:

1.        Migrations clandestines et emploi illégal
de travailleurs migrants sans papiers

137.    Les statistiques sur les migrations illégales sont par nature peu abondantes, mais on estime que jusqu'à un quart de l'ensemble des travailleurs migrants internationaux travaillent sans posséder les papiers ou l'autorisation de travailler requis par la loi. Si certains d'entre eux sont dans des situations privilégiées en raison de la rareté des compétences qu'ils possèdent ou de leur niveau d'éducation, la plupart des autres sont des travailleurs ordinaires qui sont exploités tant du point de vue de l'infériorité des salaires qu'ils perçoivent que des longues heures de travail qu'ils doivent fournir. Le «traité» des jeunes femmes employées dans l'industrie du sexe orchestrée par des mafias criminelles transnationales compte parmi les formes les plus préoccupantes de migration clandestine. Le nombre de personnes admises légalement, mais non à des fins d'emploi, est tout aussi important, de même que celui des personnes autorisées à travailler pendant un certain temps mais qui restent au-delà des délais autorisés. Dans certaines régions, le phénomène le plus important est l'emploi de non-ressortissants résultant simplement du démembrement des Etats ainsi que l'arrivée sur le marché du travail d'étrangers autorisés seulement à «transiter» par le territoire de l'Etat.

2.         Commercialisation des processus migratoires

138.    Le fait que les activités de recrutement soient devenues des opérations commerciales entre les mains d'intermédiaires privés percevant des commissions a beaucoup contribué à faire croître la mobilité internationale de la main-d'œuvre de toutes catégories. Les agences de recrutement commerciales parviennent à établir des passerelles entre les marchés nationaux de main-d'œuvre quand les Etats autorisent les mouvements de travailleurs. Elles ont des moyens particulièrement efficaces de déceler promptement les pénuries de main-d'œuvre qualifiée, de localiser la main-d'œuvre susceptible d'y remédier et d'offrir des solutions à la fois souples et adaptées à la complexité grandissante des économies. Leurs activités ont permis en effet de combler les lacunes en matière d'informations et de surmonter les obstacles institutionnels cloisonnant les marchés nationaux de main-d'œuvre. En raison de la réticence manifestée par de nombreux pays accueillant des travailleurs migrants devant la conclusion d'accords bilatéraux avec les pays d'origine des migrants, il existe très peu d'exemples de processus de migration de main-d'œuvre organisés sous les auspices des services de l'emploi public ou étatique.

139.    Dans les pays où les activités des intermédiaires privés ne sont pas contrôlées de manière efficace, on a pu constater, toutefois, de nombreux problèmes très graves, et notamment les abus dont sont victimes les travailleurs qui se voient offrir des emplois fictifs ou ne correspondant pas à leur description et reçoivent des informations mensongères ou erronées sur leurs conditions de travail, les commissions exorbitantes extorquées auprès des travailleurs candidats à l'émigration, leur détention dans les pays de destination et leur déportation parce que les documents de voyage et les visas d'entrée établis par les agents sont des faux et leur licenciement prématuré suite à de fausses déclarations sur leurs qualifications. Beaucoup plus graves dans leurs conséquences sont les fraudes ou escroqueries qui constituent une violation des lois et règlements régissant les migrations, car elles placent les travailleurs en situation irrégulière dans les pays d'accueil.

3.         Sous-protection de l'emploi

140.    Un grand nombre de travailleurs migrants, en particulier des femmes, occupent des emplois dans des secteurs où les conditions sont très en deçà des normes internationales et nationales du fait que les autorités nationales y exercent rarement un contrôle efficace. Ainsi, dans beaucoup de pays, il n'existe aucun système d'inspection des conditions d'emploi des travailleurs domestiques ou des aides familiales. Les employées de maison étrangères logées par la famille travaillent fréquemment un nombre d'heures supérieur aux horaires normaux, mais les heures supplémentaires effectuées sont rarement payées. Des problèmes plus graves ont été signalés dans le cas des «artistes», dont l'emploi dans certains pays est fréquemment contrôlé par des agents, dont certains ont des liens avec le milieu. Lorsque ces personnes sont autorisées à émigrer en qualité d'«artistes», elles courent le risque de ne pas être couvertes par la législation du travail et, par conséquent, n'ont aucun recours légal en cas de traitement abusif ou de mauvais traitement. Des situations semblables se présentent en particulier dans le secteur agricole qui, dans certains pays, fait appel à beaucoup de travailleurs migrants.

4.         Expansion des migrations temporaires à des fins d'emploi

141.    L'augmentation et la diversification récentes des migrations temporaires ont donné naissance à certains problèmes en matière d'égalité de traitement, de sécurité sociale, de sécurité de l'emploi, de mobilité professionnelle, de logement et de regroupement des familles. Beaucoup de ces problèmes sont déjà réglés par la législation en vigueur en ce qui concerne les travailleurs migrants installés définitivement, mais la majeure partie des nouveaux migrants est constituée de travailleurs qui sont amenés dans le pays à titre temporaire, comme dans le cas des travailleurs agricoles saisonniers, des travailleurs engagés pour certains projets (par exemple des chantiers de construction), des stagiaires qui en fait effectuent un travail normal, des prestataires de services internationaux engagés par des entrepreneurs pour effectuer des travaux de conception ou de réparation et d'entretien ainsi que des travailleurs affectés à certaines tâches particulières. L'admission à titre temporaire de travailleurs migrants étrangers présente indéniablement pour le pays accueillant des avantages à court et à long terme. Ces avantages;[26] découlent notamment du fait que les postes vacants peuvent être remplis immédiatement; que les pressions à la hausse sur les rémunérations et les salaires sont moindres et que, parallèlement, les dépenses d'infrastructure en termes de logements ou d'écoles destinés aux migrants sont considérablement inférieures à celles qu'il faut engager pour les ressortissants du pays, etc.

142.    Les mouvements transfrontaliers de prestataires de services internationaux prennent de l'ampleur, en particulier depuis la libéralisation des échanges résultant du Cycle de l'Uruguay. Parmi les personnes qui offrent des services dans un pays où elles ne résident pas habituellement, on compte notamment les travailleurs indépendants ou à leur propre compte;[27], qui offrent des services de consultants, conseils, encadrement, formation, etc. et ne travaillent pas à la production de biens au sens traditionnel du terme. Parmi les travailleurs ayant une affectation particulière, on peut citer les universitaires, les artistes, les gens du spectacle, les athlètes et les cadres moyens qui se déplacent à l'intérieur des sociétés multinationales. Les artistes et les gens du spectacle sont souvent des travailleurs indépendants sous contrat avec un agent ou un sponsor plutôt qu'avec un employeur au sens traditionnel du terme.

143.    L'admission des travailleurs étrangers pour des emplois temporaires pose un certain nombre de problèmes. Ils sont inhérents à une situation où plusieurs régimes juridiques nationaux ou internationaux régissent les activités économiques de personnes qui résident dans un pays et contractent un engagement pour la fourniture de services dans un autre pays pour une période de temps donnée. L'égalité de traitement pose souvent problème, qu'il s'agisse de traitements et salaires, de couverture sociale ou de mobilité sur le marché du travail. Dans certains cas, la législation du travail ne s'applique pas aux travailleurs saisonniers étrangers. Les travailleurs migrants temporaires sont en règle générale liés aux employeurs - ils n'ont pas le droit de changer d'emploi ou d'employeur. La question de savoir à qui incombe la responsabilité du logement des travailleurs pose problème. Les travailleurs étrangers temporaires peuvent également ne pas être au bénéfice des régimes de sécurité sociale nationaux ou, lorsque cela ne pose pas un problème, leurs droits dans le pays d'accueil ou lorsqu'ils rentrent dans leur pays d'origine peuvent différer considérablement et laisser beaucoup à désirer.

5.         Taux de chômage élevé

144.    Les travailleurs immigrés installés dans certains pays industrialisés y sont de plus en plus marginalisés, notamment en raison de la baisse des possibilités d'emploi dans l'industrie et des discriminations dont ils font l'objet;[28]. Le taux de chômage parmi les minorités ethniques, en particulier chez les jeunes, atteint parfois le double, voire le triple de celui que connaissent les ressortissants nationaux appartenant aux mêmes groupes d'âge et ayant le même niveau d'éducation. Les recherches entreprises par le Bureau en collaboration avec des institutions de recherche locale dans ces pays ont confirmé que les pratiques discriminatoires en matière de recrutement expliquent pour une très large part les mauvaises performances de ces catégories sur le marché du travail;[29].

II.         Vers une stratégie globale de l'OIT

A.        Protection des travailleurs migrants:
activités de l'OIT

1.         Activités normatives

145.    La protection des travailleurs employés dans un pays autre que leur pays d'origine occupe depuis toujours une place importante dans les activités de l'OIT[30] car, plus que tous les autres travailleurs, ils sont susceptibles d'être exploités, en particulier lorsqu'ils sont en situation irrégulière ou victimes de trafiquants de main-d'œuvre. Bien que la totalité des instruments de l'OIT leur soient applicables comme à l'ensemble des travailleurs, l'OIT a adopté plusieurs normes présentant pour eux un intérêt particulier, à savoir: la convention (nº 97) et la recommandation (nº 86) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, et la convention (nº 143) et la recommandation (nº 151) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975[31]. La convention de 1949, qui est un jalon important en matière de législation sur les migrations internationales, est née de la tourmente qui a suivi la guerre en Europe et d'un désir de faciliter le transfert des excédents de main-d'œuvre de ce continent vers d'autres. La convention de 1975 représente la première tentative de la communauté internationale pour résoudre le problème des mouvements migratoires illicites et de l'emploi illicite. Elle avait également pour but de promouvoir une plus grande égalité de chances et de traitement pour les migrants licites en matière d'emploi et de profession. La convention nº 97 a, à ce jour, été ratifiée par 41 Etats Membres et la convention nº 143 par 18 Etats Membres.

2.         Etude d'ensemble de 1998

146.    Le faible nombre des ratifications des instruments de l'OIT relatifs aux travailleurs migrants et le déclin du taux de ratifications ont été deux des éléments relevés lors de l'étude réalisée par le Groupe de travail sur la politique de révision des normes. Cet examen a abouti à la décision prise par le Conseil d'administration à sa 267e session (novembre 1996) de prier la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations d'entreprendre une étude d'ensemble[32] de la législation et la pratique des Etats Membres concernant les conventions nos 97 et 143 et les recommandations correspondantes. Notons que c'était la première fois qu'une étude d'ensemble était entreprise dans l'intention précise d'examiner à nouveau «la possibilité d'inscrire la question des travailleurs migrants pour discussion générale à l'ordre du jour d'une prochaine session de la Conférence, en vue également de préciser les besoins éventuels de révision des conventions nos 97 et 143»[33]. L'étude d'ensemble a fait l'objet d'une discussion lors de la 87e session (en juin 1999) de la Conférence internationale du Travail.

147.    Il est intéressant de souligner certains des grands changements que la commission d'experts a recensés dans le domaine des migrations internationales depuis l'adoption des instruments et leur effet sur la manière dont ces derniers sont appliqués:

148.    Outre les lacunes des conventions nos 97 et 143 dues à l'évolution de la pratique, une comparaison des législations nationales et des normes internationales du travail relatives aux travailleurs migrants fait apparaître un autre type de lacune dans ces instruments. Par exemple, ils ne traitent ni de l'élaboration ni de l'établissement, en consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs, d'une politique migratoire nationale. De même, des questions touchant certains aspects du contrat des travailleurs migrants, et qui sont d'une importance vitale pour leur protection, ne sont pas abordées dans les instruments existants. Il en va de même des questions touchant certains aspects du versement du salaire de ces travailleurs. En outre, la commission a recensé l'ensemble des dispositions qui ont été mentionnées par les gouvernements dans leurs rapports comme posant problème, et elle a pu constater que pratiquement toutes les dispositions des conventions, annexes et recommandations ont été citées[35]. La commission estime que certaines des difficultés ne devraient pas constituer des obstacles insurmontables à la ratification de ces conventions et, de l'avis général, il semble que les principes inscrits dans ces instruments restent valables.

149.    A la 276e session (novembre 1999) du Conseil d'administration, les représentants de 16 gouvernements et les groupes des travailleurs et des employeurs ont appuyé la proposition concernant la tenue d'un débat général pour déterminer s'il serait nécessaire d'envisager pour l'avenir un travail sur les normes[36].

3.         Autres activités de l'OIT dans le domaine
            des migrations

150.    Outre l'adoption et le suivi de l'application des normes, l'OIT a entrepris un certain nombre d'activités dans le domaine des migrations visant à améliorer la situation de millions de travailleurs migrants dans le monde entier.

a)         Coopération technique et services
            consultatifs techniques

151.    La majeure partie des activités de l'OIT dans le domaine des migrations, outre la promotion de la ratification et de l'application des normes relatives aux travailleurs migrants, consiste à offrir son aide aux divers pays pour la formulation de politiques et l'élaboration de législations en matière de migration et de gestion des flux migratoires, conformément aux dispositions des instruments de l'OIT. Le Bureau organise par ailleurs des cours de formation au profit des responsables souhaitant se familiariser avec les meilleures pratiques en matière de politique et d'administration des migrations, aux fonctions d'attachés du travail et aux méthodologies d'enquête sur les migrations, etc. L'OIT a également mis en œuvre des moyens moins formels pour résoudre ces problèmes, comme par exemple en aidant ponctuellement les Etats à résoudre des problèmes ayant fait l'objet d'une plainte ou d'une communication.

b)         Autres projets

152.    Au début des années quatre-vingt-dix, le Bureau a lancé un projet intitulé «Lutte contre la discrimination à l'encontre des travailleurs migrants et des minorités ethniques dans le monde du travail». L'objectif de ce projet était de faire diminuer les discriminations subies par les travailleurs migrants et les minorités ethniques en informant les décideurs publics, les législateurs, les employeurs, les travailleurs, les ONG et les formateurs chargés d'apprendre à lutter contre les discriminations sur la manière dont les mesures législatives liées à des activités de formation pouvaient être rendues plus efficaces, à partir d'une comparaison internationale de l'efficacité des mesures et activités entreprises dans ces domaines. Un autre projet mené en 1994-95, le «Projet interdépartemental sur les travailleurs migrants», a donné lieu à un certain nombre d'études et de publications sur une série de sujets relatifs aux migrations internationales. L'un des projets les plus importants entrepris par le Bureau au cours de ces dernières années a été un programme régional intitulé «Réseau informel sur la main-d'œuvre étrangère en Europe centrale et orientale», qui a rassemblé des décideurs publics et des législateurs des pays de la région dans un cadre informel pour mettre au point et améliorer les politiques bilatérales et multilatérales en matière de migration.

c)         Activités récentes

153.    En avril 1997, l'OIT a tenu une réunion tripartite d'experts pour étudier ses activités futures dans le domaine des migrations qui a recommandé l'adoption de deux séries de principes directeurs: l'un portant sur les mesures spéciales de protection des travailleurs migrants exerçant une activité de durée limitée et l'autre sur les mesures de protection spéciale pour les travailleurs migrants recrutés par des agents privés. Le recours à des enquêtes sur les types ou pratiques d'exploitation des travailleurs migrants était également recommandé comme moyen d'action ne relevant pas des procédures régies par la convention[37]. Depuis l'approbation par le Conseil d'administration en 1997 de la création de la base de données sur les migrations internationales de main-d'œuvre, le Bureau a recueilli des données sur l'ampleur et la nature des flux migratoires contemporains qui sont désormais accessibles par Internet[38]. L'OIT poursuit des recherches dans un certain nombre de régions du monde et publie régulièrement des ouvrages et des documents de travail[39].

4.         Autres activités connexes

154.    En 1990, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et les membres de leurs familles[40]. Cette convention, qui reconnaît les dispositions contenues dans les conventions de l'OIT et s'en inspire, vise à définir clairement les droits des travailleurs migrants indépendamment de leur statut juridique. Du fait que seuls douze Etats ont à ce jour ratifié cette convention ou y ont adhéré, elle n'est pas encore en vigueur[41]. Lorsque cela sera le cas, l'ONU créera un organe distinct pour en assurer le suivi. Il conviendrait que dans ses futurs travaux le BIT s'interroge sur la raison pour laquelle cette nouvelle convention n'a pas encore reçu un nombre suffisant de ratifications pour entrer en vigueur et prenne en compte les résultats de son analyse.

155.    Concernant la question spécifique de la libéralisation des règles régissant les flux temporaires de personnes «physiques» assurant des prestations de services précises pendant des durées limitées, on rappellera que l'Organisation mondiale du commerce a adopté l'Accord général sur le commerce des services (GATS) en avril 1994[42]. Dans cet accord, les personnes physiques sont désignées comme étant des «prestataires internationaux de services». Trois gouvernements[43] ont proposé que l'OIT approfondisse cette question.

B.        Vers une stratégie globale de l'OIT

156.    Dans ce contexte (nouvelles formes de migrations de la main-d'œuvre et état des ratifications et des projets de ratifications des conventions de l'OIT relatives aux travailleurs migrants), le Directeur général, dans son rapport à la 87e session de la Conférence internationale du Travail (juin 1999), a déclaré qu'au cours du prochain exercice biennal les activités de l'OIT «refléteront l'importance croissante des migrations de main-d'œuvre dans l'économie mondiale. L'objectif primordial devrait être d'aider à rallier une unanimité internationale […] sur la manière d'offrir une protection adéquate aux travailleurs et travailleuses migrants et à leurs familles tout en organisant de manière plus systématique et plus bénéfique le déplacement de travailleurs à la recherche d'une vie meilleure[44].» Il semble donc tout à fait opportun d'élaborer une stratégie globale. Une telle stratégie devrait avoir pour objectif d'orienter son action dans les domaines suivants:

1.         Action proposée

157.    Le Bureau note que, ainsi qu'il est ressorti des discussions à la Conférence, trois grandes lignes d'action sont possibles, à savoir:

158.    Bien que, à l'issue des discussions menées dans le cadre de l'étude d'ensemble, la tendance générale ait penché vers une révision des conventions nos 97 et 143, aucun consensus ne s'est clairement dégagé. Le Bureau propose donc d'organiser une discussion générale sur la question des travailleurs migrants. Une telle discussion pourrait contribuer à l'élaboration d'une stratégie globale de l'OIT dans ce domaine et permettrait de parvenir à un accord sur la meilleure orientation à prendre.

2.         Points pouvant faire l'objet d'une discussion

159.    Une discussion générale des questions soulevées par la mobilité croissante des travailleurs et des diverses modalités d'action que le BIT serait susceptible d'adopter pourrait s'organiser autour des points suivants:

a)    Les migrations internationales de main-d'œuvre à l'ère de la mondialisation. A l'ère de la mondialisation, comment les migrations pourraient-elles être mieux gérées pour garantir qu'elles jouent un rôle positif dans la croissance et le développement des pays d'origine et d'accueil, tout en protégeant les travailleurs migrants dans leur quête pour une meilleure vie? Quel rôle l'OIT pourrait-elle jouer dans l'émergence d'un consensus international sur la manière de gérer les flux migratoires?

b)    Pratiques les plus aptes à remédier aux migrations clandestines aux fins d'emploi. Quelles stratégies compatibles avec les principes de l'OIT et les droits fondamentaux de l'homme seraient susceptibles de freiner sensiblement les migrations clandestines?

c)     Amélioration de la protection des travailleurs migrants par la voie normative. Quelles mesures devraient être prises pour promouvoir la ratification et l'application des conventions de l'OIT relatives aux travailleurs migrants? Comment les normes internationales pourraient-elles être adaptées aux nouvelles formes de migration? En particulier, faudrait-il procéder à la révision des normes existantes?

 

6. a)    Enregistrement et déclaration
des accidents du travail
et des maladies professionnelles;

b)    Révision éventuelle de la liste
       des maladies professionnelles;
       tableau I de la convention (n
o121)
       sur les prestations en cas d'accidents
       du travail et de maladies
       professionnelles, 1964;
[45]

Résumé

La pratique internationale concernant l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles est loin d'être uniforme. L'utilisation de définitions différentes, les différences de procédures pour la collecte des données et la déclaration, de même que le manque d'experts nationaux, conduisent à des situations disparates dans les Etats Membres. Les nouvelles normes internationales permettraient, dans de meilleures conditions que les instruments et les documents existants, de mettre en place des systèmes nationaux appropriés tout comme d'améliorer et d'harmoniser à la fois la terminologie et les procédures nécessaires, en apportant la base d'une action préventive et de mesures cohérentes aux échelons national, sectoriel et de l'entreprise. Une convention contenant les principes de base complétée par une recommandation pourrait être envisagée.

L'instrument international ou les instruments internationaux pourraient prévoir l'obligation pour les autorités compétentes des Etats Membres de mettre sur pied et d'exécuter une politique nationale cohérente ainsi que des systèmes, des programmes, des infrastructures et les concepts et la terminologie nécessaires pour l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles et la conduite d'enquêtes, ce qui serait compatible avec les accords et les recommandations internationaux.

Après avoir examiné cette question à la lumière de certaines préoccupations et réserves exprimées lors de consultations et discussions antérieures, et conformément à une résolution adoptée par la 16e  Conférence internationale des statisticiens du travail (CIST) en octobre 1998, qui demandait la mise au point de normes pour les statistiques concernant les maladies professionnelles, il n'est pas proposé d'exclure ces maladies du champ d'application d'un instrument international. En effet, cette exclusion entretiendrait les lacunes des contraintes légales, le manque actuel d'informations et de sensibilisation et l'insuffisance des mesures de prévention. Il est toutefois proposé que les Etats Membres aient la possibilité d'accepter les obligations de cette convention séparément en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Pour la mise en œuvre du nouvel instrument ou des nouveaux instruments proposés, il serait approprié d'adopter une nouvelle liste des maladies professionnelles du BIT en même temps que l'élaboration de l'instrument international ou des instruments internationaux et en complément à la révision des classifications des accidents du BIT, encouragée par la 16e CIST, qui est maintenant entreprise. Deux options sont proposées pour la nouvelle liste: a) la mise à jour du tableau I révisé de la convention n121 sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, aux fins d'indemnisation, d'enregistrement et de déclaration; b) la création d'un mécanisme de mise à jour périodique de la liste des maladies professionnelles au tableau I de la convention no 121 à des fins d'indemnisation ainsi que pour l'élaboration, l'adoption et la mise à jour périodique de toute autre liste correspondante adoptée par les organes de l'OIT à des fins d'enregistrement et de déclaration.

Aperçu général

160.    Les recherches récemment menées par le Bureau, en association avec l'Organisation mondiale de la santé, montrent que, malgré les progrès réalisés dans beaucoup de domaines de sécurité, de santé et du bien-être des travailleurs, on dénombre chaque année environ 1,2 million de décès liés au travail (d'après une évaluation mondiale pour 1999) ainsi que 250 millions d'accidents et 160 millions de cas de maladie d'origine professionnelle dans le monde entier.

161.    Dans les pays en développement en particulier, l'absence d'informations concernant l'incidence des accidents du travail et des maladies professionnelles, tout comme de connaissances et de directives pour la mise en œuvre des systèmes nationaux d'enregistrement et de déclaration, comme instrument d'action préventive, gêne considérablement les efforts déployés pour éviter les pertes de vies humaines et les lésions de cette échelle et pour parvenir à des mesures de contrôle efficaces. Un tiers seulement environ des 120 Etats Membres ayant ratifié la convention (no 81) sur l'inspection du travail, 1947, incluent des statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles dans leurs rapports annuels comme l'exigent les articles 20 et 21.

162.    Les employeurs sont tenus d'enregistrer les informations concernant les accidents et les maladies qui surviennent dans leur entreprise et de mener une enquête à leur sujet. Le registre devrait au moins inclure les faits essentiels nécessaires à la déclaration, l'employeur pouvant ainsi mieux analyser les données enregistrées en vue de déterminer à la fois les causes des accidents et des maladies et les pertes qui en résultent et de mettre au point des programmes et des mesures pour leur prévention et leur contrôle. En outre, les représentants des travailleurs qui disposent de ces informations peuvent apporter une contribution à l'amélioration des conditions de travail.

163.    Les informations sur les accidents du travail et les maladies professionnelles enregistrées et conservées par l'entreprise constituent la base et déterminent la qualité de sa déclaration aux autorités compétentes qui sont principalement les organismes de sécurité sociale ou les autorités chargées de faire appliquer la législation relative à la sécurité et à la santé au travail. Les organismes de sécurité sociale exigent des informations pour dédommager les personnes victimes de lésions et leurs ayants droit. Les autorités chargées de faire respecter la législation en ont besoin pour étudier les cas individuels et déterminer quels sont les accidents et les maladies les plus fréquents et, en utilisant les statistiques accumulées, concevoir des stratégies d'application et des directives propres à faciliter l'élaboration de programmes de prévention efficaces aux échelons national, sectoriel et de l'entreprise.

164.    Malgré l'existence de résolutions concernant les statistiques des lésions professionnelles adoptées par les dixième et treizième Conférences internationales des statisticiens du travail en 1962 et 1982, qui recommandent une terminologie, des définitions et des concepts standard et qui prévoient des directives pour la classification et la présentation de statistiques, la pratique internationale est loin d'être uniforme. De nombreux Etats Membres ne sont pas encore dotés de système d'enregistrement et de déclaration. Les définitions nationales existantes des lésions professionnelles diffèrent souvent des définitions internationales standard recommandées par ces résolutions. Du fait de différences dans la portée de la législation sur les prestations de sécurité sociale et sur la sécurité et la santé au travail en raison de l'absence d'experts nationaux et du fait que certains pays n'ont pas encore introduit les arrangements nécessaires pour la collecte de données, il existe des variations nationales dans les procédures de collecte et de déclaration et dans la portée et les sources. Les données incohérentes ou non comparables empêchent les employeurs et les gouvernements de réaliser des analyses comparatives aux échelons de l'entreprise et du pays en vue d'identifier des mesures préventives et de déterminer des priorités dans leur mise en œuvre et l'utilisation économique et rationnelle des ressources. Le phénomène de sous-enregistrement est répandu et le nombre de cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles non déclarés est difficile à quantifier. Dans l'étude intitulée «Accidents at work in the European Union in 1994» (Les accidents du travail dans l'Union européenne en 1994), publiée par EUROSTAT en 1998, le pourcentage moyen de déclarations des accidents du travail entraînant plus de trois jours d'absence dans huit branches courantes d'activités de 15 Etats Membres était de 91,1 pour cent. Huit Membres seulement ont indiqué un niveau de 100 pour cent et trois des pourcentages se situant entre 41 et 56 pour cent.

165.    Plusieurs tentatives ont eu lieu pour améliorer la situation: les participants au Séminaire régional tripartite latino-américain sur l'organisation des services de santé au travail et l'enregistrement et l'analyse des accidents du travail et des maladies professionnelles ont déjà souligné en 1989 la nécessité d'harmoniser les systèmes d'enregistrement et de déclaration. La 24e assemblée générale de l'Association internationale de sécurité sociale (AISS) a adopté, en 1992, un rapport qui préconise la mise en place d'un système international harmonisé pour la notification et la compilation des statistiques des accidents. Dans l'Union européenne, les méthodologies utilisées cherchent à fournir des statistiques harmonisées sur les accidents du travail et des statistiques comparables sur les maladies professionnelles. Pendant l'adoption du Recueil de directives pratiques sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles en octobre 1994;[46], les experts ont insisté sur le fait que la collecte de données, l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles servaient à identifier et à étudier les causes d'accidents et de maladies. En outre, les experts ont reconnu l'importance et la nécessité, à des fins d'orientation, des listes de maladies professionnelles, notamment dans les pays ne disposant pas de telles listes, de même que les difficultés inhérentes à la reconnaissance des maladies professionnelles. Ils ont émis un certain nombre de réserves quant à la liste actuelle des maladies professionnelles du BIT fournie dans le tableau I de la convention (no121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, modifié en 1980 pour la dernière fois, et ont recommandé l'actualisation de cette liste. La résolution sur les statistiques des lésions professionnelles résultant des accidents du travail, adoptée par la 16e Conférence internationale des statisticiens du travail (Genève, 6-15 octobre 1998)[47], demande que chaque pays s'efforce de mettre au point un programme complet de statistiques sur la santé et la sécurité au travail, y compris les maladies professionnelles et les lésions professionnelles. L'objectif de ce programme serait de disposer d'une base statistique appropriée répondant aux besoins des différents utilisateurs (voir paragr. 194).

Aperçu des pratiques nationales

166.    Les modalités d'enregistrement des accidents au niveau de l'entreprise varient très fortement d'un cas à l'autre. Si les grandes entreprises ont tendance à établir des comptes rendus détaillés des accidents et de leurs causes, ce n'est pas la règle dans les autres. Certaines entreprises, notamment des multinationales, ont établi leur propre système d'enregistrement, parfois pour pouvoir comparer les chiffres entre leurs divers établissements. Divers systèmes d'enregistrement peuvent être utilisés dans certains secteurs de l'économie d'un même pays. Dans beaucoup de pays, l'enregistrement des accidents et des maladies au niveau de l'entreprise n'est régi par aucune disposition législative.

167.    En règle générale, seuls les accidents donnant lieu à une indemnisation ou ceux qui répondent à certains critères font l'objet de déclaration aux autorités compétentes, tandis que bon nombre d'accidents mineurs, dont la connaissance serait pourtant encore plus importante pour mettre au point des mesures de prévention, ne sont pas pris en compte. Il en résulte que la fréquence relative des accidents déclarés peut varier fortement selon les pays et selon les secteurs de l'économie d'un même pays. On relève aussi des différences considérables en ce qui concerne la déclaration des accidents dans certains secteurs de l'économie. En particulier, dans les secteurs de l'agriculture, de la construction, de la marine et des mines, les critères de déclaration ne sont pas uniformes. Les déclarations peuvent être limitées à certains types de travailleurs ou certains types d'activités économiques et d'entreprises employant plus d'un certain nombre de travailleurs, et elles sont généralement peu nombreuses dans le secteur tertiaire. Les travailleurs indépendants, les travailleurs à temps partiel, les travailleurs occasionnels et les stagiaires ou apprentis peuvent être omis du fait qu'ils n'ont pas recours aux régimes d'assurance publics. En général, les données relatives aux accidents mortels sont plus fiables que celles qui ont trait aux accidents non mortels parce que les premiers sont presque toujours déclarés. Là encore, la pratique n'est cependant pas uniforme en ce qui concerne l'interprétation du terme «mortels» aux fins de déclaration (par exemple les accidents entraînant la mort immédiate ou une lésion mortelle dans les trente jours, entre 31 et 365 jours, ou sans limite de durée).

168.    Un problème important, lorsque l'on compare les chiffres relatifs aux accidents du travail, est celui des différences dans les principales catégories d'accidents soumis à déclaration dans chaque pays, qui vont des accidents entraînant une incapacité de travail d'un nombre de jours déterminé aux accidents de toute nature, avec ou sans interruption de travail. Dans la plupart des pays, des indications doivent être fournies sur l'heure, le jour et le lieu de l'accident, le type d'accident et sa cause principale, ainsi que sur la nature et le siège de la lésion. Dans certains pays, des précisions doivent être fournies sur ce que faisait la personne au moment de l'accident. Seuls quelques pays demandent que l'on indique la profession, les qualifications et la formation de la personne victime de l'accident, depuis combien de temps cette personne occupe sa fonction et quels sont les dispositifs de sécurité ou l'équipement de protection individuelle prévus. Les critères pour la déclaration des accidents diffèrent pour les accidents de trajet et les accidents de la circulation survenus pendant le travail.

169.    L'enregistrement et la déclaration des maladies professionnelles sont encore plus compliqués. La plupart des pays ont une définition légale des maladies professionnelles qui revêt la forme d'une liste officielle de ces maladies. Dans bien des cas, la liste officielle est liée aux critères d'indemnisation. Toutefois, il y a des différences entre les méthodes de définition choisies. Certains pays ont une liste de maladies officielles, qui est parfois similaire, mais pas nécessairement identique au tableau I annexé à la convention (no121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, et modifié en 1980. D'autres Etats Membres utilisent un système dit mixte (maladies figurant sur la liste et autres maladies). Il en résulte que les statistiques nationales sur les maladies professionnelles diffèrent en ce qui concerne les maladies visées, leur définition, les critères pour reconnaître ces maladies et les catégories de travailleurs couvertes. Les maladies ayant des causes multiples et celles qui ont de longues périodes de latence posent des problèmes particuliers.

170.    Les procédures de déclaration des maladies professionnelles diffèrent considérablement de celles des accidents du travail, en ce qui concerne aussi bien les personnes chargées de faire les déclarations que les personnes qui les reçoivent. C'est l'employeur ou le médecin qui doit faire la déclaration à l'inspection du travail, ou au service compétent, ou bien le rapport doit être reçu en premier lieu par l'organisme d'assurance. Dans certains pays, il existe plusieurs méthodes d'information facultatives. Les déclarations vont toujours à l'organisme d'assurance chargé de verser les indemnités, mais il arrive que l'organisme de contrôle ne soit pas informé des cas de maladies professionnelles. D'après les études faites dans de nombreux pays, la sous-notification est très répandue. Beaucoup de pays en développement ne sont pas en mesure de recueillir et de publier des données nationales sur les maladies professionnelles en raison de l'absence soit de spécialistes nationaux soit d'équipements permettant d'établir un diagnostic de maladie professionnelle, soit des deux.

Rôle des nouveaux instruments internationaux

171.    Des systèmes nationaux uniformes de déclaration, d'enregistrement et d'évaluation des accidents du travail et des maladies professionnelles sont essentiels pour le rassemblement de données cohérentes et leur utilisation ultérieure pour l'identification et la mise en œuvre efficace de mesures préventives. Les normes internationales du travail ne traitent de l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles en tant qu'outils de prévention que de façon limitée. Elles ne prévoient pas de méthodes uniformes ni de procédures appropriées au niveau national et ne contiennent pas de directives suffisantes (voir paragr. 193). Les nouvelles normes internationales sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles pourraient instaurer des obligations plus contraignantes pour les gouvernements, et donc être plus efficaces que les impératifs existants qui sont notamment les résolutions adoptées par la Conférence internationale des statisticiens du travail (voir paragr. 194) et les dispositions générales de certaines conventions et recommandations (voir paragr. 193 et 194). En dépit de l'existence du Recueil de directives pratiques sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, il est évident que des normes internationales du travail pourraient aider à mettre en place des systèmes nationaux appropriés, à améliorer et à mieux harmoniser tant la terminologie que les procédures, en préparant le terrain à des politiques et des mesures préventives cohérentes tant à l'échelle de la nation qu'à celle du secteur et de l'entreprise. Tout en étant plus détaillé que le ou les instruments envisagés, le recueil pourrait toutefois servir de point de départ pour les élaborer.

172.    Lors de consultations antérieures avec les Etats Membres, il avait été suggéré d'exclure les maladies professionnelles du champ d'application d'un instrument international. Cette exclusion ne ferait que perpétuer la situation insatisfaisante présentée ci-dessus, notamment l'absence de normes internationales sur les prescriptions légales pour l'enregistrement et la déclaration des maladies professionnelles, les lacunes en matière d'information et de sensibilisation et l'insuffisance des mesures de prévention des maladies professionnelles dont le nombre au niveau mondial est aujourd'hui impossible à évaluer. Il convient de noter que, dans les futures activités de l'OIT, on a recommandé la mise au point de normes pour les statistiques des maladies professionnelles au paragraphe 30 de la résolution sur les statistiques des lésions professionnelles résultant des accidents du travail, adoptée par la 16e Conférence internationale des statisticiens du travail (Genève,
6-15 octobre 1998).

173.    L'instrument international ou les instruments internationaux pourraient prévoir:

Pour fournir une certaine souplesse et si cela est approprié à des fins de ratification, les Membres pourraient être autorisés à accepter séparément les obligations de la convention concernant, d'une part, les accidents du travail et, d'autre part, les maladies professionnelles comme dans le cas de la convention (no 148) sur le milieu de travail (pollution de l'air, bruit et vibrations), 1977, en ce qui concerne ces trois catégories de risques.

Solution proposée concernant la forme
des instruments relatifs aux accidents du travail
et maladies professionnelles

174.    Pour répondre aux préoccupations et réserves exprimées lors des discussions précédentes sur ce sujet, trois options peuvent être envisagées en ce qui concerne la forme des instruments proposés.

Première option

175.    L'adoption d'une convention sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles contenant des principes de base, et complétée par une recommandation. Ces instruments prévoiraient aussi la mise en place de mécanismes aux fins de la mise à jour périodique de la liste de maladies professionnelles dans le tableau I de la convention (no121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, ou de toute autre liste équivalente adoptée par les organes de l'OIT.

Deuxième option

176.    L'adoption d'un protocole à la convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, dans le but de fournir des outils pour l'application des conditions spécifiques. Cette option s'inspirerait des articles 4 et 11 de la convention et du paragraphe 15 de la recommandation (no 164) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981.

177.    Aux termes de l'article 4 de la convention, les Etats Membres doivent définir, mettre en application et réexaminer périodiquement une politique nationale cohérente en matière de sécurité, de santé des travailleurs et de milieu de travail, qui aura pour objet de prévenir les accidents et les atteintes à la santé. Pour donner effet à cette politique, l'article 11 prévoit que l'autorité ou les autorités compétentes assureront notamment les fonctions suivantes:

178.    Le protocole pourrait être adopté dans le cadre d'une procédure de simple discussion. Il ne contiendrait que des principes de base mais il pourrait être complété par une recommandation et serait ouvert à la ratification en même temps que la convention no 155 ou dès que l'Etat Membre l'aurait ratifiée[48].

Troisième option

179.    L'adoption d'une recommandation sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles contenant des principes de base et reprenant les dispositions essentielles du Recueil de directives pratiques sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles (1996). Cet instrument aurait pour objectif d'aider les Etats Membres à progresser dans ce domaine sans devoir respecter toutes les obligations que leur imposerait un instrument ratifié. En outre, une procédure de simple discussion serait peut-être possible.

180.    La révision proposée de la liste actuelle des maladies professionnelles du BIT et la révision des systèmes actuels de classification des accidents, encouragées par la 16e Conférence internationale des statisticiens du travail et actuellement en cours, pourraient se révéler essentielles à la mise en œuvre du nouvel instrument international ou des nouveaux instruments internationaux.

Teneur du nouvel instrument
ou des nouveaux instruments

181.    Le nouvel instrument ou les nouveaux instruments pourraient viser à renforcer et à coordonner les diverses activités au sein de systèmes cohérents de rassemblement d'informations sur les accidents du travail et les maladies professionnelles dans les Etats Membres. Ces systèmes pourraient englober les méthodes de déclaration et d'enregistrement au sein de l'entreprise et de déclaration à l'autorité nationale. Des systèmes d'enregistrement et de déclaration cohérents pourraient faciliter l'étude et l'analyse des causes des accidents du travail et des maladies professionnelles, ce qui pourrait favoriser la mise en œuvre, le réexamen  et l'amélioration continue des politiques de sécurité et de santé au sein de l'entreprise et à l'échelon national, en particulier en vue de mettre au point des programmes cohérents et efficaces d'actions préventives.

182.    Les aspects suivants de l'enregistrement et de la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles pourraient être abordés.

a)         Dispositions générales

183.    Les dispositions pourraient spécifier que l'autorité compétente devrait définir, mettre en œuvre et réexaminer périodiquement une politique nationale et des principes directeurs cohérents sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, et qu'elle devrait instaurer et appliquer progressivement des procédures nationales et mettre en place les modalités juridiques, institutionnelles et administratives nécessaires. Les dispositions concernant la déclaration au niveau national pourraient couvrir tous les accidents du travail mortels, tous les accidents du travail entraînant une incapacité de travail pendant une période à déterminer par l'autorité compétente et toutes les maladies professionnelles figurant sur une liste nationale ou répondant à la définition des maladies prescrites par l'autorité compétente et diagnostiquées au cours d'une période donnée. Les dispositions concernant l'enregistrement au niveau de l'entreprise pourraient être élargies de manière à couvrir également les accidents, les maladies et les événements auxquels ne s'appliquent pas les prescriptions en matière de déclaration (accidents de trajet, maladies liées au travail, événements et incidents dangereux).

b)         Mesures au niveau de l'entreprise

i)          Enregistrement

184.    Ces mesures pourraient concerner l'établissement de procédures adéquates et la répartition des responsabilités au sein de l'entreprise: le travailleur ayant à déclarer l'événement et l'employeur étant tenu d'enregistrer les accidents du travail et les cas de maladies professionnelles. Les dispositions pourraient préciser la teneur et le format des registres, le délai imparti aux employeurs pour établir les registres, la confidentialité des données médicales et personnelles et les mesures à prendre pour s'assurer la coopération des travailleurs et veiller à leur formation en matière de déclaration et d'enregistrement. Les indications à consigner dans les registres devraient comprendre au moins les renseignements qui doivent être déclarés au service compétent chargé de faire respecter la législation, à l'organisme approprié servant les prestations au titre de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles ou à tout autre organisme désigné. Des dispositions pourraient prévoir l'enregistrement d'informations complémentaires ou progressivement plus détaillées.

ii)         Utilisation des informations enregistrées

185.    Des renseignements précis sur les causes les plus fréquentes des accidents du travail et des maladies professionnelles et sur l'ampleur des lésions permettraient d'établir plus facilement un ordre de priorité dans les mesures de prévention nécessaires. Ils faciliteraient aussi l'évaluation de l'efficacité des mesures législatives et autres. Des dispositions pourraient ainsi préciser les mesures à prendre pour favoriser l'identification et l'évaluation uniformes des causes des accidents du travail et des maladies professionnelles dans chaque entreprise et, par suite, dans toutes les branches de l'activité économique ainsi qu'à l'échelle nationale, par l'utilisation des informations enregistrées.

c)         Déclaration au niveau national

i)          Dispositions générales

186.    Ces dispositions pourraient indiquer aux Etats Membres comment ils devraient établir et mettre en œuvre des procédures uniformes pour la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, et notamment les organismes auxquels la déclaration devrait être faite; elles préciseraient également les responsabilités des employeurs et des travailleurs quant au respect des procédures prévues. Les instruments envisagés pourraient également porter sur les mesures d'application.

ii)         Prescriptions en matière de déclaration

187.    Les dispositions pourraient préciser le type et la portée des informations à fournir à l'organe compétent chargé de faire respecter la législation, à l'organisme approprié servant les prestations au titre de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles ou à tout autre organisme désigné, le délai dans lequel la déclaration devra être soumise en fonction du type de lésion et les dispositions que l'entreprise devra prendre en matière de déclaration. La déclaration des accidents du travail pourrait comprendre des données sur l'entreprise où a eu lieu l'accident et sur l'employeur, sur la victime de l'accident, sur l'ampleur, la nature et le siège des lésions provoquées, sur le déroulement de l'accident, sur l'enquête en cours et les mesures prises pour empêcher qu'un tel accident se reproduise. La déclaration des maladies professionnelles pourrait comprendre des données sur l'entreprise et l'employeur, sur la personne atteinte de maladie professionnelle, sur la maladie professionnelle et les agents, procédés ou expositions qui, par leur nocivité, peuvent avoir causé cette maladie. Des dispositions pourraient prévoir que des informations progressivement plus détaillées figurent dans la déclaration.

iii)         Procédures pour l'utilisation des données déclarées

188.    L'instrument ou les instruments envisagés pourraient également proposer des moyens de promouvoir l'utilisation des données déclarées au niveau national, notamment par la création de bases de données nationales et l'établissement de statistiques fiables sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, dont on puisse s'inspirer pour établir un ordre de priorité et élaborer une politique et des programmes nationaux d'action préventive. Les instruments pourraient tenir compte du rôle qui incombe aux organismes de sécurité sociale et aux institutions responsables au niveau sectoriel selon la législation et la pratique nationales.

Solution proposée en ce qui concerne la forme
et le contenu de la liste des maladies professionnelles

189.    Comme un nombre relativement élevé de pays en développement sont dans l'impossibilité de recueillir ou de publier des données nationales sur les maladies professionnelles, faute de prescriptions légales nationales ou d'experts (absence de liste nationale ou de références internationales) ou des moyens nécessaires au diagnostic des maladies professionnelles, il convient de les aider en leur fournissant des listes mises à jour des maladies professionnelles. Afin d'améliorer la capacité de réponse rapide du Bureau et compte tenu des préoccupations et des réserves exprimées lors de discussions antérieures sur cette question, il serait également approprié que la Conférence envisage:

190.    La liste révisée faciliterait la circulation d'informations sur l'incidence des maladies liées au travail à des fins de prévention. Elle offrirait des renseignements utiles sur la surveillance de la santé des travailleurs exposés à des risques professionnels particuliers et elle aurait l'avantage de favoriser une coopération étroite entre les institutions d'assurance et les organismes d'exécution.

191.    Sur la base d'une étude des maladies qui pourraient être incorporées à bon escient dans une liste révisée des maladies professionnelles destinée à remplacer celle du tableau I annexé à la convention (no 121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, et compte tenu des pratiques actuelles et des tendances observées dans le diagnostic et l'évaluation des maladies professionnelles à des fins de réparation, la nouvelle liste envisagée pourrait inclure les rubriques supplémentaires ci-après:

Origine de la proposition

192.    La question de l'enregistrement et de la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles a été proposée au Conseil d'administration pour examen en vue de son inscription à l'ordre du jour des sessions de 1991, 1996, 1997, 1999, 2000 et 2001 de la Conférence[49]. La question de la révision de la liste des maladies professionnelles annexée à la convention (no 121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, a été proposée à l'ordre du jour de la Conférence de 1994[50].

Relation avec des instruments existants

193.    Quelque vingt conventions et recommandations encouragent la compilation de statistiques sur les lésions et les maladies professionnelles, mais quelques-unes d'entre elles seulement renvoient à l'enregistrement et à la déclaration. En application de la convention (no 81) sur l'inspection du travail, 1947, le rapport annuel publié par l'autorité centrale d'inspection doit porter sur les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles. En vertu de la recommandation (no97) sur la protection de la santé des travailleurs, 1953, la législation ou la réglementation nationales devrait exiger la déclaration des cas de maladie professionnelle reconnus ou suspectés. La convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, prévoit que l'autorité compétente devra progressivement assurer l'établissement et l'application de procédures visant la déclaration des accidents du travail et des cas de maladie professionnelle en vue de l'établissement de statistiques annuelles. La recommandation (no 164) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, dispose que les employeurs devraient être tenus d'enregistrer les données relatives à la sécurité, à la santé des travailleurs et au milieu de travail et qui pourraient inclure les données concernant tous les accidents du travail et tous les cas d'atteintes à la santé donnant lieu à déclaration. La convention (no 160) sur les statistiques du travail, 1985, et la recommandation no 170 qui l'accompagne exigent la compilation de statistiques sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Il n'y a cependant ni directive concernant leur structure ni référence à la résolution concernant les statistiques sur les lésions professionnelles qui prévoit de telles directives.

194.    La convention (no 121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, dispose que la législation doit à la fois prescrire une définition de l'accident du travail et établir une liste des maladies qui seront reconnues comme maladies professionnelles dans des conditions prescrites. La législation nationale devrait inclure une définition générale des maladies professionnelles qui soit suffisamment large pour couvrir au moins les maladies énumérées dans la version la plus récente du tableau I de ladite convention. L'actuelle version a été amendée en 1980 et nécessite une révision. En 1991, une liste révisée a été préparée et mise à jour lors d'une consultation informelle sur la révision du tableau I, organisée par le BIT. Cette liste n'a pas été approuvée officiellement. La résolution concernant les statistiques sur les lésions professionnelles, adoptée par la 10e Conférence internationale des statisticiens du travail (1962), a défini à des fins statistiques les notions de décès (accidents mortels), d'incapacité permanente et d'incapacité temporaire, et a proposé quatre classifications des accidents selon la forme de l'accident, l'agent matériel, la nature de la lésion et le siège de la lésion. Comme ces classifications doivent être mises à jour pour satisfaire aux besoins modernes et futurs, une réunion d'experts sur les statistiques du travail a eu lieu à Genève du 30 mars au 3 avril 1998;[51], avec l'objectif de discuter des principales questions liées à la mesure et à la classification des lésions professionnelles. Ses conclusions ont été prises en considération par la 16e Conférence internationale des statisticiens du travail tenue à Genève en octobre 1998. La Conférence a abouti notamment à l'adoption d'une résolution sur les statistiques des lésions professionnelles résultant des accidents du travail qui prévoit la réunion d'informations sur l'entreprise, l'établissement ou l'unité locale, la personne blessée, la lésion et l'accident, de même que ses conséquences. Elle contient en outre des classifications révisées des accidents du travail selon le type de la lésion (appendice E) et selon le siège de la lésion (appendice F). Les recommandations concernant l'action future du BIT portent notamment sur la préparation d'un manuel destiné à fournir des orientations techniques sur le contenu de la résolution et l'établissement de normes pour les statistiques des maladies professionnelles.

195.    Bien que le Recueil de directives pratiques sur l'enregistrement et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles ne soit pas un document légalement contraignant, il fournit des directives aux autorités compétentes qui leur permettent de mettre au point des systèmes nationaux pour la collecte d'informations comparables et la prévention globale des lésions et des maladies professionnelles. Tout en étant plus détaillé que l'instrument proposé ou les instruments proposés, ce recueil pourrait être utilisé toutefois comme point de départ pour la préparation du ou desdits instruments (voir ci-dessous.

Etat d'avancement des recherches
et travaux préparatoires

196.    Le Recueil de directives pratiques susmentionné a été distribué par le Bureau à l'ensemble des Etats Membres en 1997 dans le cadre d'un effort particulier visant à passer en revue l'établissement de politiques et de programmes nationaux et à obtenir des statistiques sur les accidents du travail, et en particulier sur les décès liés au travail, qui soient plus détaillées et comparables sur le plan international. Tous les Etats Membres ont été priés de fournir des données disponibles et de réfléchir aux difficultés ou aux spécificités qui les empêchent de recueillir des données nationales. Les réponses en provenance de 107 institutions et de 99 pays ont été évaluées et les résultats fournissent la base des activités futures du Bureau dans ce domaine.

197.    Sur la base de l'expérience acquise par les travaux antérieurs concernant les listes des maladies professionnelles figurant au tableau I de la convention no 121, de la mise en œuvre pratique continue du Recueil de directives pratiques sur l'enregistrement et de la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles (voir paragraphe
précédent) ainsi que des recherches déjà entreprises pour la préparation de la réunion d'experts sur les statistiques du travail (1998) et de la 16eConférence internationale des statisticiens du travail (1998) et les conclusions de ces réunions, le Bureau est prêt à fournir les travaux préparatoires nécessaires pour l'inscription de la question à l'ordre du jour de la Conférence.

 

Genève, le 9 février 2000.

 

 

Points appelant une décision:   

paragraphe 1;
paragraphe 2;
paragraphe 20.


[1] Document GB.254/16/19, paragr. 5.

[2] Article 11ter du Règlement de la Conférence.

[3] Il en est ainsi parce qu'après la discussion générale, le Conseil d'administration doit décider d'inscrire cette question pour action normative à l'ordre du jour d'une autre conférence, et que cette décision doit être prise en mars deux ans avant la Conférence à laquelle la question doit être discutée. Cela a été le cas par exemple de la convention (nº 96) sur les bureaux de placement payants (révisée), 1949, qui a été inscrite à l'ordre du jour en novembre 1992 pour une discussion générale en juin 1994. En mars-avril 1995, le Conseil d'administration a inscrit cette question à l'ordre du jour de la Conférence de 1997 pour action normative. La convention (nº 181) sur les agences d'emploi privées, 1997, a été adoptée en juin 1997, selon la procédure de simple discussion.

[4] Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 86e session (1998), vol. II, p. 33.

[5] Des études ont été commanditées dans les pays suivants: Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Brésil, Chili, Etats-Unis, France,, Inde, Iran, Italie, Hongrie, Japon, Maroc, Mexique, Nigéria, Pakistan, Pérou, Philippines, Pologne, Royaume-Uni, Fédération de Russie, Slovénie, République tchèque, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela.

[6] A Santiago, Manille, Budapest, Yaoundé et New York.

[7] Document GB.275/9, paragr. 4-8.

[8] Article 39, paragr. 1, du Règlement de la Conférence.

[9] Article 38, paragr. 1, du Règlement de la Conférence.

[10] Document GB.276/2.

[11] Document GB.274/3.

[12] Document GB.277/2/2.

[13] La commission d'experts a proposé qu'un protocole pourrait également être adopté pour permettre aux pays d'inverser la charge de la preuve dans certaines circonstances, en cas de discrimination alléguée. Cette proposition n'ayant pas été accueillie favorablement lors des débats au Conseil d'administration, elle n'a pas été retenue pour le moment.

[14] Convention (no 3) sur la protection de la maternité, 1919, art. 2; convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, art. 3; convention (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934, art. 3; convention (no 89) sur le travail de nuit (femmes) (révisée), 1948 [et Protocole, 1990], art. 3; convention (no97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, art. 6, paragr. 1 a) i); convention (n110) sur les plantations, 1958 [et Protocole, 1982], art. 46; convention (no168) sur la promotion de l'emploi et la protection contre le chômage, 1988, art. 6; convention (no 181) sur les agences d'emploi privées, 1997, art. 5 (1); recommandation (no 123) sur l'emploi des femmes ayant des responsabilités familiales, 1965, paragr. 9 (2); recommandation (no150) sur la mise en valeur des ressources humaines, 1975, paragr. 50 b) v); recommandation (no162) sur les travailleurs âgés, 1980, paragr. 3; recommandation (no166) sur le licenciement, 1982, paragr. 5 a); recommandation (no 188) sur les agences d'emploi privées, 1997, paragr. 9.

[15] Convention (no 3) sur la protection de la maternité, 1919, art. 2; convention (no 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, art. 2; convention (no 110) sur les plantations, 1958 [et Protocole, 1982], art. 2 et 46; convention (no 168) sur la promotion de l'emploi et la protection contre le chômage, 1988, art. 6; recommandation (no 48) sur les conditions de séjour des marins dans les ports, 1936, paragr. 3; recommandation (no 101) sur la formation professionnelle (agriculture), 1956, paragr. 3 (1); recommandation (no104) relative aux populations aborigènes et tribales, 1957, paragr. 35 b); recommandation (no 110) sur les plantations, 1958, paragr. 2. Il y a lieu de noter que la nationalité est un critère de base pour les normes relatives aux migrants et que, par conséquent, des dispositions visant à assurer l'égalité de chances et de traitement à leur égard et/ou une protection contre la discrimination se trouvent dans les instruments correspondants, à savoir: la convention (no48) sur la conservation des droits à pension des migrants, 1935, art. 2 et 10; la convention (no 66) sur les travailleurs migrants, 1939; la convention (no 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, art. 2; la convention (no 118) sur l'égalité de traitement (sécurité sociale), 1962, art. 3; la convention (no 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975; la convention (no157) sur la conservation des droits en matière de sécurité sociale, 1982; la recommandation (no 19) sur les statistiques des migrations, 1922; la recommandation (no 61) sur les travailleurs migrants, 1939; la recommandation (no 86) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949; la recommandation (no 100) sur la protection des travailleurs migrants (pays insuffisamment développés), 1955, paragr. 45.

[16] Convention (no 82) sur la politique sociale (territoires non métropolitains), 1947, art. 18 (1) et (2); convention (no98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, art. 1; convention (no 110) sur les plantations, 1958 [et Protocole, 1982], art. 2; convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962, art. 14 (1) et (2); recommandation (no 70) sur la politique sociale dans les territoires dépendants, 1944, paragr. 41 (3); recommandation (no 110) sur les plantations, 1958, paragr. 2; recommandation (no 115) sur le logement des travailleurs, 1961, paragr. 25. L'appartenance syndicale des travailleurs migrants est mentionnée dans la recommandation no 100, paragr. 38, la recommandation (no151) sur les travailleurs migrants, 1975, paragr. 8 (3); la recommandation (no188) sur les agences d'emploi privées, 1997, paragr. 9.

[17] Convention (no 168) sur la promotion de l'emploi et la protection contre le chômage, 1988, art. 6; convention (no 181) sur les agences d'emploi privées, 1997, art. 5 (1); recommandation (no71) sur l'emploi (transition de la guerre à la paix), 1944, paragr. 43 (3); recommandation (no 99) sur l'adaptation et la réadaptation professionnelles des invalides, 1955, paragr. 25 et 41; recommandation (no188) sur les agences d'emploi privées, 1997, paragr. 9.

[18] Convention (no 156) sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981; recommandation (no 165) sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981; recommandation (no 188) sur les agences d'emploi privées, paragr. 9.

[19] Sélection d'instruments internationaux: l'invalidité a été interprétée comme relevant de «toute autre situation», ICESCR, art. 2 (2) - Observation générale no 5 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels (E/1995/22-e/c.12/1994/20, p. 99), paragr. 2; la langue comme motif de discrimination a été clairement établie dans le droit international: voir Charte de l'ONU, art. 1, 13, 55, 76; UDHR, art. 2; ICCPR/ICESCR, art. 2; ICCPR, art. 4; la nationalité a été interprétée comme relevant de la catégorie «toute autre situation» dans le ICCPR - Comité des droits de l'homme, communication no 196/1985 (Gueye et collaborateurs c. France), paragr. 9.4, 9.5 et 10 - ICCPR, art. 2, 26. Mais voir ICESCR, art. 2 (3), qui dispose que les pays en développement peuvent déterminer dans quelle mesure des droits économiques peuvent être garantis aux non-nationaux: voir également les interprétations pertinentes du Comité des droits économiques, sociaux et culturels; et l'orientation sexuelle: voir, notamment, les cas de protocole facultatif, Comité des droits de l'homme, sous ICCPR.

[20] Il existe de nombreuses autres dispositions analogues, par exemple dans des instruments interaméricains sur les droits de l'homme (Charte de l'OEA et Protocole de Buenos Aires, Convention sur les droits de l'homme et Protocole de San Salvador); Convention européenne des droits de l'homme et divers protocoles, Charte sociale européenne et Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

[21]  Document GB.277/STM/5.

[22] Women in Informal Employment: Globalizing and Organizing (WIEGO) - association internationale d'universitaires, d'ONG et d'organisations qui s'occupent des travailleuses du secteur informel.

[23] Document GB.271/TC/4.

[24] Voir BIT: Les questions sociales et de travail relatives aux travailleurs migrants dans la construction, Réunion tripartite sur les questions sociales et de travail relatives aux travailleurs migrants dans la construction, Genève, mars 1996.

[25] Voir P. Stalker: Global Nations: The Impact of Globalization on International Migration, Cahiers des migrations internationales, no17, Genève, 1997.

[26] Les bénéfices économiques que retirent les divers acteurs sont présentés dans le document du Conseil de l'Europe: Migrations temporaires à des fins d'emploi et de formation - rapport et lignes directrices, Strasbourg, 1996, p. 42. Voir également K. Groenendijk et R. Hampsink: Temporary employment of migrants in Europe, Université catholique, Nijmegen, 1995.

[27] Ils se différencient des salariés qui, au sein d'une multinationale, se déplacent d'un pays à l'autre et sont recensés dans les catégories précédentes de travailleurs ayant une affectation spécialisée ou de travailleurs assignés à un projet particulier.

[28] Voir W.R. Bohning et R. Zegers de Beijl: L'intégration des travailleurs migrants sur le marché du travail: les politiques et leur impact, Cahiers des migrations internationales no 8E, BIT, Genève, 1995. Voir également J. Doomernik: The effectiveness of integration policies towards immigrants and their descendants in France, Germany and the Netherlands, Cahiers des migrations internationales nº 27, BIT, Genève, 1998.

[29] Voir par exemple P. Arrijn, S. Felds et A. Nayer : La discrimination à l'accès à l'emploi en Belgique en raison de l'origine étrangère, Cahiers des migrations internationales no 23E, BIT, Genève, 1998; M. Bendick, Jr.: Discrimination against racial/ethnic minorities in access to employment in the United States, Empirical findings from situation testing, Cahiers des migrations internationales no12, BIT, Genève, 1996.

[30] Pour plus de détails, voir paragraphe 32 du document «travailleurs migrants», étude d'ensemble des rapports sur la convention (nº 97) et la recommandation (nº 86) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, et sur la convention (nº 143) et la recommandation (nº 151) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975, BIT, Genève, 1999.

[31] Un certain nombre de normes de l'OIT font spécifiquement référence aux travailleurs migrants et demandent instamment aux Etats Membres de prendre en compte leurs dispositions. Il s'agit notamment de la convention (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, la convention (nº 181) sur les agences d'emploi privées, 1997, la convention (nº 157) sur la conservation des droits en matière de sécurité sociale, 1982, et la convention (nº 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989. Bien que la plupart des normes de l'OIT ne contiennent pas de dispositions traitant particulièrement des travailleurs migrants, la commission d'experts fait fréquemment référence à la situation des travailleurs migrants lorsqu'elle examine leur application. Cela l'amène à formuler de nombreux commentaires lors de l'examen de l'application des conventions maritimes. Voir paragraphe 38 de l'étude d'ensemble pour une liste non limitative de ces instruments.

[32] Voir ci-dessus.

[33] Voir document GB.267/LILS/4/2; voir également documents GB.267/9/2, paragr. 14, et GB.267/PV, p. IV/6.

[34] Voir paragr. 653 de l'étude d'ensemble.

[35] Voir paragr. 642 de l'étude d'ensemble.

[36] Algérie, Allemagne, Brésil, Etats-Unis, France, Guatemala, Inde, Italie, Mexique, Pérou, Philippines, Portugal, Slovaquie, Suisse, Soudan, Venezuela.

[37] Voir Rapport de la Réunion tripartite d'experts sur les activités futures de l'OIT dans le domaine des migrations, MEIM/1997/D.4, BIT, Genève, avril 1997.

[38] http://www.ilo.org/public/english/protection/migrant/ilmdb/index.htm.

[39] La série des Cahiers des migrations internationales du Bureau couvre un large éventail de questions relatives aux migrations allant de l'évaluation des pressions migratoires dans certaines régions à l'évaluation de l'étendue des discriminations à l'encontre des émigrants dans le monde du travail, l'efficacité des sanctions à l'égard des employeurs dans la diminution du nombre des cas d'emploi illicite de migrants sans papiers, des conséquences de l'adhésion à l'Union européenne sur les politiques en matière de migration de certains pays d'Europe de l'Est et l'impact des envois de fonds dans certains pays asiatiques d'origine. On peut également évoquer les dernières publications du BIT: Employing foreign workers: A manual on policies and procedures of special interest to middle and low-income countries, de W.R. Böhning (Genève, 1996); Sending workers abroad: A manual for low and middle-income countries, de M.I. Abella (Genève, 1997); et International migration statistics: Guidelines for improvement of data collecting systems, de R. Billsborrow, G. Hugo, A. Oberai et H. Zlonik (Genève, 1997); E. Hoffmann et S. Lawrence: Statistics on international labour migration: A review of sources and methodological issues, Projet interdépartemental sur les travailleurs migrants, BIT, Genève, 1996.

[40] Voir document GB.249/IO/3/2.

[41] En 1998, une campagne mondiale pour la ratification de la Convention sur les droits des migrants a été lancée. Pour plus de détails sur le travail des Nations Unies et des institutions spécialisées, voir paragr. 49-61 de l'étude d'ensemble.

[42] Pour le texte de cet accord, voir OMC: Résultats des négociations commerciales multilatérales du Cycle d'Uruguay, Genève, juin 1994, ou http://www.wto.org/services/gats.htm.

[43] Chili, Finlande, Suisse.

[44] Rapport du Directeur général: Un travail décent, Conférence internationale du Travail, 87session, BIT, Genève, 1999. (Le nouveau programme sur les migrations de main-d'œuvre dans l'économie mondiale.)

[45] Des contributions antérieures sur ce thème ont été soumises au Conseil d'administration en mars et en novembre 1998. Voir documents GB.271/4/1, paragr. 175-205; GB.273/2, paragr. 153-166; GB.274/3, paragr. 190-221; GB.276/2, paragr. 176-197.

[46] Documents GB.261/STM/4/14 et GB.261/8/26, paragr. 14.

[47] Document GB.273/STM/7.

[48] Trente Etats Membres (31.08.1999).

[49] Documents GB.244/2/2, paragr. 96-116; GB.259/2/2, paragr. 226-248; GB.262/2, paragr. 69-94; GB.268/2, paragr. 9-41; GB.271/4/1, paragr. 175-205; GB.273/2, paragr. 32-44, GB.274/3, paragr. 190-221 et GB.276/2, paragr. 176-197.

[50] Document GB.254/2/1, paragr. 53-64.

[51] Document GB.272/3.

Mise à jour par HK. Approuvé par NdW. Dernière mise à jour: 25 février 2000.