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GB.276/7/2
276e session
Genève, novembre 1999


SEPTIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

319e rapport du Comité de la liberté syndicale

Table des matières

I. Introduction

II. Cas examinés par le Comité de la liberté syndicale

Cas no 1787 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas nos 1948 et 1955 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas no 1962 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas no 1964 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas no 1973 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandation du comité

Cas no 2015 (Colombie): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

III. Plainte concernant la non-application par la Colombie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée par plusieurs délégués à la 86e session (1998) de la Conférence au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT 202-219

A. Introduction

B. Texte de la plainte présentée au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT

C. Décisions adoptées par le Conseil d'administration à sa 273e session (novembre 1998)

D. Réponse du gouvernement

E. Texte des annexes aux observations faites par le gouvernement

F. Décision du Conseil d'administration à sa 274e session (mars 1999)

G. Décision du Comité de la liberté syndicale et du Conseil d'administration à sa réunion de juin 1999

H. Nouvelle réponse du gouvernement

I. Recommandations du comité


I. Introduction

1. Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail à Genève les 4, 5 et 12 novembre 1999, sous la présidence de M. le professeur Max Rood.

Cas en instance

2. Le comité est saisi de différentes plaintes en violation de la liberté syndicale en Colombie déposées par diverses organisations syndicales (cas nos 1787, 1948, 1955, 1962, 1964, 1973, 2015, 2046 et 2051) - ces trois derniers cas ayant été présentés postérieurement au dernier examen quant au fond des cas relatifs à la Colombie par le comité en mars 1999 -, et d'une plainte concernant la non-application par la Colombie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée par plusieurs délégués à la 86e session (1998) de la Conférence au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. A sa réunion de mars 1999, le comité a déjà examiné les cas nos 1787, 1948, 1955, 1962, 1964, 1973. [Voir 314e rapport, paragr. 1 à 128, présentant des conclusions intérimaires.]

3. Conformément à la décision adoptée par le Conseil d'administration à sa 273e session (novembre 1998) et à sa 274e session (mars 1999), le comité examine et soumet à l'approbation du Conseil un rapport sur les cas en instance (à l'exception des cas nos 2046 pour lequel il vient de recevoir une réponse partielle et 2051 pour lequel le gouvernement n'a pas encore envoyé ses observations) et sur la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution.

Suites données aux recommandations du comité
et du Conseil d'administration

4. Dans le cas no 1925 qui a fait l'objet d'un rapport définitif du comité [voir 309e rapport, paragr. 106 à 119], le gouvernement a déclaré, dans une communication du 27 septembre 1999, accepter que des informations fournies par l'entreprise AVIANCA soient considérées comme partie de sa réponse. En outre, l'organisation plaignante, le Syndicat national des travailleurs d'AVIANCA, a transmis récemment de nouvelles informations au comité. Il demande au gouvernement de fournir ses observations sur cette dernière communication du plaignant et examinera l'ensemble du dossier dans le cadre des suites données à ses recommandations lorsqu'il disposera ainsi de tous les éléments du dossier.

II. Cas examinés par le Comité de la liberté syndicale

Cas no 1787

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
- la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
- la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
- la Fédération syndicale mondiale (FSM)
- la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT)
- la Confédération générale
des travailleurs démocratiques (CGTD)
- la Centrale des travailleurs de Colombie (CTC) et
- l'Association syndicale des fonctionnaires du ministère
de la Défense, des Forces armées, de la Police nationale
et ses entités connexes (ASODEFENSA)

Allégations: assassinats et autres actes de violence
contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes,
et licenciements antisyndicaux

5. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de mars 1999. [Voir 314e rapport, paragr. 4 à 41.] La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a envoyé de nouvelles allégations par des communications des 28 avril, 29 juillet, 9 et 11 août et 3 septembre 1999. La Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) a envoyé de nouvelles allégations par des communications des 27 avril, 27 juillet, 10 juin et 31 août 1999. La Fédération syndicale mondiale (FSM) a envoyé des informations complémentaires le 9 juin 1999. La Confédération mondiale du travail a envoyé des communications les 17 février et 2 mars 1999 à l'appui des précédentes communications de la CLAT. La Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), la Confédération générale des travailleurs démocratiques (CGTD) et la Centrale des travailleurs de Colombie (CTC) ont envoyé une communication conjointe le 9 avril 1999. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 4 et 23 mars, 2 juin, 12 août et 23 septembre 1999. Lors de la réunion d'adoption de son rapport, le comité a été informé qu'une communication du gouvernement a été reçue par le BIT le 11 novembre 1999. Conformément à sa pratique habituelle, le comité n'a pas pris cette communication en considération à sa présente session, en raison de la réception trop tardive de la communication en question.

6. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

7. Lors de l'examen antérieur du cas, le comité a examiné les allégations en instance relatives à des assassinats et autres actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, ainsi qu'à des licenciements antisyndicaux. Le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 314e rapport, paragr. 41]:

B. Nouvelles allégations et informations complémentaires

Situation générale

8. Les centrales syndicales de Colombie (CUT, CGTD, CTC) dans une communication en date du 9 avril 1999 déclarent que les violations des droits de l'homme et du travailleur ne cessent de s'aggraver depuis quelques mois. A l'appui de cette affirmation, elles allèguent les faits suivants:

9. Enfin, les centrales syndicales affirment qu'il n'existe en Colombie aucun processus de paix et qu'on peut tout juste parler d'un dialogue qui s'amorce, non sans grandes difficultés, entre le gouvernement et la guérilla.

Allégations spécifiques

10. Concrètement, la Confédération internationale des syndicats libres, dans des communications des 28 avril, 29 juillet, 9 et 11 août 1999, la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), dans des communications des 27 avril, 27 juillet et 10 juin 1999, et la Fédération syndicale mondiale (FSM), dans une communication du 9 juin 1999, allèguent ce qui suit.

Homicides de dirigeants syndicaux
et de syndicalistes

11. Les plaignants dénoncent les homicides suivants:

Tentatives d'homicide

12. Les plaignants dénoncent les tentatives d'homicide suivantes:

Menaces de mort

13. Les plaignants dénoncent les menaces de mort proférées à l'encontre des personnes suivantes:

Disparitions

14. Les plaignants dénoncent la disparition des personnes suivantes:

Détentions

Privation illégitime de liberté

Persécutions

Actes antisyndicaux

15. La CISL a été informée par son affiliée, la Fédération graphique internationale, elle-même informée par son affiliée en Colombie, FENALGRAP, des violations continues et flagrantes de leurs droits dont font l'objet les dirigeants syndicaux et les travailleurs de l'entreprise Brinks de Colombie. Ces violations se traduisent de diverses manières: décision unilatérale de faire passer la semaine de travail de 40 à 48 heures, ce qui est contraire aux dispositions du règlement intérieur de l'entreprise; violation de la convention collective en ce qui concerne l'avancement, les remplacements, le recrutement, les dossiers et les sanctions, etc. Les plaignants dénoncent aussi le recours à certaines méthodes coercitives: des travailleurs sociaux se rendent au domicile des travailleurs, procèdent à une fouille et affirment que les travailleurs qui refuseront d'accepter l'allongement de la journée de travail perdront certaines prérogatives prévues par la convention collective, voire leur poste; le refus des comités directeurs d'accepter l'allongement de la journée de travail n'a pas plu à la direction de l'entreprise, et les dirigeants syndicaux ont été insultés et menacés de mort au téléphone. Jhon Walter, président du syndicat, Alex, le trésorier, et Rafael Romero, membre du comité directeur, ont ainsi été insultés au téléphone. Par ailleurs, les travailleurs sont surveillés et pris en photo depuis des automobiles.

C. Réponse du gouvernement

16. S'agissant de quelques-unes des recommandations du Comité de la liberté syndicale se rapportant expressément au présent cas, le gouvernement affirme, dans sa communication du 12 août 1999, qu'il est nécessaire d'indiquer qu'elles sont directement liées au phénomène de la violence dont souffre la Colombie, et qu'il n'observe aucune évolution dans la position du comité bien qu'il lui ait envoyé un rapport détaillé sur la violence en Colombie, dans lequel sont décrites nombre des activités menées par l'Etat pour lutter contre ce phénomène et contre l'impunité. Le gouvernement ajoute qu'il serait très reconnaissant au Comité de la liberté syndicale de bien vouloir, avant de formuler ses conclusions et recommandations sur le présent cas, examiner attentivement et prendre en considération les informations qu'il lui a soumises en janvier 1999 et qui montrent de manière concrète que l'Etat colombien est soucieux de lutter contre le phénomène de la violence et l'impunité.

Situation générale

17. Le gouvernement tient à rappeler que, contrairement à ce qu'affirment les centrales syndicales, existe en Colombie un processus de paix que conduit le Président de la République, M. Andrés Pastrana Arango, et qui vise à apporter une solution politique au conflit avec la principale force de la guérilla opérant dans le pays. Il s'étonne que les dirigeants syndicaux puissent méconnaître ce processus et estime qu'il est vain et dangereux de vouloir en réduire la portée. Il considère qu'il suffit d'examiner attentivement la réalité colombienne pour se convaincre que la violence aveugle dans le pays n'est pas dirigée spécifiquement contre les syndicats mais touche indistinctement tous les secteurs de la société. Le triste bilan statistique de la tragédie montre qu'il y a des victimes parmi les chefs d'entreprise, les paysans, les citoyens ordinaires, les communautés religieuses et, il convient de le souligner, parmi les fonctionnaires et les juges qui s'efforcent avec héroïsme, souvent au péril de leur vie, de faire respecter le droit dans la société colombienne. Ces faits tiennent à la situation de violence généralisée, qui est elle-même due aux agressions dont est victime la société colombienne, agressions qui sont multiples, diverses et, dans une certaine mesure, antagoniques: la subversion, le crime lié au trafic de stupéfiants, les groupes paramilitaires et la criminalité ordinaire. C'est pourquoi le gouvernement est convaincu que seule la restauration de la paix politique, grâce à l'élimination de la principale source de violence, permettra de créer les conditions propices au respect effectif des droits fondamentaux et, partant, au respect permanent des droits syndicaux.

18. Le gouvernement ajoute que la communauté nationale et la communauté internationale s'accordent à reconnaître l'importance capitale que revêt ce processus et ont salué le courage avec lequel le gouvernement s'en occupe. Le gouvernement énumère les mécanismes mis en place et les mesures prises pour entraver les activités des soi-disant groupes d'autodéfense et des forces de la guérilla et lutter contre l'impunité.

I. Lutte contre les groupes d'autodéfense

19. Le gouvernement indique que la politique nationale de lutte contre les groupes d'autodéfense est menée au nom de l'intérêt supérieur de l'Etat. Cette lutte comprend deux volets qui sont complémentaires: il s'agit, d'une part, de lutter de manière directe et efficace contre les agissements de ces groupes et, d'autre part, de prendre des mesures de caractère dissuasif visant à supprimer les facteurs qui facilitent l'apparition et le développement de tels groupes. Les mesures visant directement les groupes d'autodéfense sont notamment les suivantes:

Succès enregistrés dans la lutte contre
les groupes d'autodéfense

20. D'après le rapport du Haut Commissaire pour la paix, les résultats suivants ont été enregistrés:

II. Processus de paix avec les FARC-EP

21. Le gouvernement indique que les éléments importants de ce processus sont les suivants:

III. Processus de paix avec l'ELN

22. Le gouvernement a également conclu des accords avec l'Armée de libération nationale (ELN). Par sa décision no 83 du 9 octobre 1998, il a déclaré ouvert le dialogue avec cette organisation, dont il a reconnu le caractère politique.

Un processus de paix semé d'embûches

23. Dans sa communication du 23 septembre 1999, le gouvernement envoie des informations supplémentaires sur le processus de paix et sur les difficultés rencontrées pour le mener à bien ainsi que des informations sur les nouveaux éléments de la politique menée par l'Etat en vue d'instaurer la paix en Colombie.

24. Le gouvernement n'étant pas parvenu à persuader les groupes de la guérilla de cesser le feu (trêve) en vue d'engager et de poursuivre les négociations de paix, ainsi qu'il était indiqué dans le rapport du gouvernement du 30 juillet, on n'a pas eu d'autre choix que d'engager ce processus en plein conflit armé.

25. On avait pourtant espéré qu'une fois élaboré le programme commun la guérilla (les forces armées révolutionnaires de Colombie - FARC) manifesterait par certains signes sa volonté de paix. Or, pour renforcer son pouvoir de négociation, elle a décidé de faire étalage de sa force et a multiplié les attaques contre de petites villes dans diverses provinces du pays, semant la destruction et la mort sur son passage. Elle a pris pour cibles les casernes de la police et les banques et a fini par détruire les maisons d'habitation et par assassiner des centaines de civils. Les images effroyables qu'ont montrées les médias auraient fort bien pu être prises après un tremblement de terre. Dans les localités prises par la guérilla où des affrontements entre celle-ci et les forces armées de Colombie ont eu lieu, la subversion a enregistré des centaines de morts, y compris des enfants guérilleros qui participaient au combat.

26. De son côté, l'Armée de libération nationale (ELN) a mis au point sa propre tactique, qui consiste à enlever des civils en grand nombre. Ces enlèvements de grande ampleur, dont on a cru au début qu'ils servaient un objectif politique, à savoir améliorer la position de ce groupe à la table de négociations, ont plongé la communauté nationale et la communauté internationale dans l'étonnement et la stupeur. Ce fut notamment le cas lors de l'enlèvement des dizaines de passagers de l'avion d'Avianca et de l'enlèvement de plus d'une centaine de personnes qui assistaient à la messe dans une église catholique de la ville de Cali (qui compte 2 millions d'habitants). Toutes ces personnes ont été emmenées dans les campements dont dispose l'ELN dans les forêts de Colombie. Un passager de l'avion est mort en captivité et une des personnes qui assistaient à la messe a été assassinée pour avoir résisté au moment de l'enlèvement.

27. A la suite de ces événements, le bureau en Colombie du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a publié le communiqué suivant:

28. Les quelques personnes qui ont été libérées portaient des messages de caractère politique destinés au gouvernement et posant des conditions au lancement du processus de paix. Plus grave et inacceptable, la libération des autres otages était subordonnée au paiement d'une rançon colossale, ce qui a contraint le gouvernement à suspendre tout dialogue avec l'ENL.

29. Le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a de nouveau exprimé sa préoccupation:

Les enlèvements en Colombie

30. D'après le dernier rapport du Programme présidentiel pour la défense de la liberté individuelle, qui contient une analyse statistique du phénomène des enlèvements au cours des quatre dernières années, ce délit progresse de manière alarmante: en 1996, 947 enlèvements avec demande de rançon ont été signalés. Au 31 juillet de cette année (en sept mois seulement) on en a déjà enregistré 1 100. Du 1er janvier 1996 au 6 septembre 1999, 6 957 personnes ont été enlevées; 1 854 sont toujours prisonnières. En moyenne, huit personnes sont enlevées chaque jour. A sa grande honte, la Colombie enregistre à elle seule 45 pour cent de tous les enlèvements commis dans le monde entier.

31. Les FARC sont le groupe subversif qui a enlevé le plus de personnes: 224 civils et 488 soldats et policiers, soit un total de 712 personnes. L'ELN et les groupes d'autodéfense retiennent en captivité respectivement 280 et 42 personnes. Personne n'est à l'abri de ces pratiques, pas même la hiérarchie de l'Eglise catholique qui occupe une place prépondérante en Colombie. Actuellement, l'évêque de Tibú (localité du nord du pays), Mgr José de Jesús Quintero, se trouve entre les mains de l'Armée populaire de libération (EPL).

32. Plusieurs travailleurs sont prisonniers de la guérilla, notamment deux citoyens espagnols venus travailler en Colombie. A ce propos, les centrales syndicales du pays ont lancé un appel dont le texte a été publié dans El Tiempo, principal quotidien du pays, et qui est reproduit ci-après:

Les groupes d'autodéfense s'attaquent à la population civile

33. Comme si les événements susmentionnés ne suffisaient pas, les groupes d'autodéfense (Autodéfenses unies de Colombie - AUC) se sont livrés à des actions criminelles dans diverses régions du pays où la guérilla serait, selon ces groupes, présente ou influente. Les AUC ont assassiné des dizaines d'humbles villageois et paysans, obligeant les survivants à fuir par centaines. Aujourd'hui, les grands centres urbains ne sont plus épargnés par cette vague criminelle. Les groupes d'autodéfense y commettent des assassinats sélectifs et profèrent des menaces de mort à l'encontre de personnes et de groupes sociaux.

34. Rien ne semble devoir échapper à leur bras fatidique. Plusieurs universités publiques du pays sont aujourd'hui le théâtre de leurs actes criminels. La situation est d'autant plus grave que leurs tracts menaçants proviennent du sein même des universités (ils sont rédigés par des sympathisants ou des militants des AUC qui ont, semble-t-il, accès aux dossiers personnels des étudiants, des professeurs et du personnel administratif). Ils arguent de la prétendue présence de guérilleros ou de sympathisants de ces derniers dans les universités pour justifier leurs activités délictuelles.

35. Vu la gravité de la situation, le gouvernement prend actuellement, en collaboration avec les autorités locales et universitaires, des mesures pour assurer la protection de la communauté universitaire, le retour à une vie universitaire normale, le démantèlement des groupes d'autodéfense qui agissent à l'intérieur des universités et le châtiment des coupables.

36. Cela étant, c'est avec indignation qu'on a enregistré récemment l'assassinat des personnes suivantes: Hernán Henao, professeur, et Gustavo Marulanda, dirigeant étudiant, de l'Université d'Antioquia; Darío Betancurt, professeur à l'Université pédagogique nationale, et Jesús Antonio Bejarano, professeur à l'Université nationale. Ce dernier a été assassiné le 15 du présent mois alors qu'il entrait à la faculté d'économie pour y donner un cours. M. Bejarano avait été conseiller pour la paix auprès du gouvernement de César Gaviria de 1990 à 1994 et président d'une association patronale, la Société des agriculteurs de Colombie (SAC). On soupçonne les FARC, qui l'avaient déclaré «objectif militaire», de l'avoir assassiné.

37. Le 13 août, Jaime Garzón, un journaliste et humoriste qui travaillait pour la télévision et la radio et qui était connu dans tout le pays, a été assassiné. Il menait une action humanitaire en faveur des personnes enlevées par la guérilla et œuvrait pour le développement du processus de paix. En principe, ce crime est attribué aux groupes d'autodéfense. Le gouvernement a offert une très forte récompense à quiconque fournira des informations sur les assassins de Garzón et de Bejarano.

38. Par ailleurs, les groupes d'autodéfense distribuent des tracts menaçants dans les petites villes où ils considèrent que la guérilla est présente. A titre d'illustration, on trouvera ci-dessous le texte de deux tracts qui ont été distribués à Yumbo (localité située à une douzaine de kilomètres de Cali):

39. Le gouvernement explique que le «M19» (Mouvement du 19 avril) est une organisation de la guérilla dont les membres ont déposé les armes et ont réintégré la vie civile en 1990. Le maire de Yumbo était l'un des dirigeants de ce mouvement. «Jaime Bateman» est un groupe de dissidents du M19 qui a repris les armes et qui a revendiqué le nom du grand dirigeant du M19 décédé dans un accident d'avion. L'«UP» (Union patriotique) est une organisation politique qui a été créée en 1985 sur proposition des FARC pendant la trêve qui avait été instaurée pour négocier avec le gouvernement de l'époque. La majorité de ses membres étaient des militants du Parti communiste.

40. De même, à la veille de la grève nationale des 31 août et du 1er septembre 1999, les groupes d'autodéfense ont envoyé un tract menaçant aux organisateurs du mouvement, qui l'ont rendu public:

41. Il convient d'indiquer qu'ayant appris qu'une grève civique nationale allait être organisée, le gouvernement a invité les dirigeants syndicaux à formuler leurs revendications par le biais des mécanismes de dialogue social et par la concertation. Mais les organisateurs n'ont pas donné suite à cette offre de dialogue et ont déclaré que le mouvement était irréversible mais qu'il se déroulerait pacifiquement. Le gouvernement a alors donné des instructions à la force publique afin qu'elle fasse preuve de modération mais agisse avec fermeté si des actes de violence étaient commis, conformément à l'obligation qui lui incombe de protéger la vie, l'honneur et les biens des citoyens. Malheureusement, les organisateurs ont été débordés, en particulier dans les quartiers périphériques des grandes villes, principalement à Santa Fe de Bogotá où des actes de provocation et de violence ont été commis: jets de pierres, obstruction de rues et pillages de locaux commerciaux et de camions. Au cours de ces événements, une fillette de 10 ans a malheureusement été tuée par une balle tirée par un commerçant qui essayait d'empêcher le pillage de son magasin.

42. La grève une fois terminée, le gouvernement et les organisateurs de la grève ont décidé de créer 12 tables rondes sur leurs revendications. Les négociations devraient être achevées dans les premiers jours du mois d'octobre.

43. Parmi les «raisons et objectifs de la grève», il convient de souligner la prise de position en faveur du processus de paix, qui correspond à la position du gouvernement, à savoir: «La mise en route et le renforcement d'un véritable processus de paix fondé sur la justice sociale constituent un processus irréversible pour les travailleurs. Nous réaffirmons notre volonté de parvenir à une solution politique du conflit armé et notre opposition à toutes les formes de violence, enlèvements, massacres, disparitions forcées, attentats, génocides, et nous demandons aux parties en guerre de respecter la population civile et les normes du droit international humanitaire.»

La Colombie réagit

44. Un fait d'une grande importance mérite d'être signalé, à savoir la réponse que donne actuellement le peuple colombien aux auteurs des enlèvements et des violences: des manifestations de grande ampleur dans toutes les villes du pays, les débats et campagnes de sensibilisation sont désormais chose courante en Colombie.

45. Cette réaction a également encouragé la communauté internationale à témoigner sa solidarité au peuple colombien de multiples manières.

Le gouvernement réaffirme sa volonté de paix

46. Malgré la vague de violence déclenchée par les guérillas et par les groupes d'autodéfense, le gouvernement insiste sur la nécessité d'entamer, dans les plus brefs délais, les négociations prévues par le calendrier commun établi et approuvé avec les FARC le 6 mai dernier. Le gouvernement a même renoncé à insister auprès de la guérilla pour qu'une commission de vérification soit constituée dans la zone de tension afin d'empêcher que l'on continue d'y assassiner et d'y maltraiter des civils. Les FARC ont nié qu'il en avait été décidé ainsi comme préalable à l'ouverture et au déroulement des négociations. De plus, les FARC exigent à présent que l'ouverture des négociations soit précédée par l'adoption d'une loi d'échange permanent des soldats et policiers qui se trouvent en leur pouvoir contre les guérilleros détenus dans les prisons de l'Etat.

47. Néanmoins, le gouvernement réaffirme sa volonté de parvenir à une issue politique du conflit armé pour mettre fin aux affrontements fratricides entre Colombiens et pour orienter tous les efforts de l'Etat vers la croissance économique équitable, c'est-à-dire accompagnée de la justice sociale. Il ne s'agit pas d'une simple formule rhétorique: de fait, le plan de développement dénommé «Changement pour construire la paix» comprend, outre les programmes sociaux et les dépenses permettant le fonctionnement des institutions nécessaires au développement du pays, un programme à grande échelle baptisé «Plan Colombie».

48. Le Plan Colombie prévoit des mesures axées en priorité sur les régions où la violence a atteint un niveau critique et est associée à des facteurs tels que des déplacements forcés de populations et l'existence de cultures illicites. A cet égard, il convient de construire une politique d'Etat plutôt qu'une politique de gouvernement, afin de garantir la continuité de cette politique et, au lieu de se soumettre aux aléas du conflit armé et des négociations, les dépasser de manière à pouvoir progresser dans la création de conditions structurelles plus favorables à la paix.

49. Il faut admettre que la violence, en Colombie, est profondément enracinée dans l'exclusion économique et politique et le contexte d'inégalité et de pauvreté dans lesquels fonctionne la démocratie; en outre, la dynamique de la violence est renforcée par la présence de cultures illicites; les investissements, aussi bien publics que privés, doivent contribuer à créer les conditions permettant de construire la paix et de renforcer la démocratie, dont la faiblesse est révélée par les diverses manifestations de la violence. La politique d'investissements ainsi qu'un cadre institutionnel adéquat doivent donc aider à satisfaire les impératifs présents et futurs du rétablissement de la paix, et non se limiter à résoudre le conflit qui oppose les guérillas et l'Etat.

50. La violence et le conflit armé touchent l'ensemble du pays, mais leurs effets sont plus graves dans certaines zones (où ils atteignent principalement certaines parties de la population), dans lesquelles se conjuguent les facteurs objectifs du conflit. Quant aux facteurs subjectifs, il s'agit du manque de possibilités réelles de progrès pour de larges segments de la population et de l'inégale répartition géographique du capital humain et social, facteurs directement associés à l'insuffisante cohésion sociale, à la légitimité réduite des institutions, à la faiblesse des autorités constituées et à l'absence de l'Etat.

51. Le gouvernement a conçu le Plan Colombie, autour duquel s'articulent les différents éléments de la politique de paix, en fonction de chaque type de conflit et des caractéristiques propres aux régions concernées. Le Plan est axé sur cinq domaines d'action: la production, les infrastructures, l'aide humanitaire, les institutions et l'environnement. De plus, le Plan sera amplifié par des mesures et des investissements qui seront mis en œuvre sur plusieurs fronts: politiques sectorielles sous forme d'actions prioritaires à court, moyen et long terme, destinées à promouvoir le secteur de l'agriculture et de la pêche; renforcement de la société civile; développement des infrastructures; restauration de la justice et rétablissement de la sécurité.

52. Le Plan Colombie sera financé et mis en œuvre au moyen de mécanismes efficaces, novateurs et participatifs, par le biais d'investissements dont le montant s'élève à 7,5 milliards de dollars et qui seront répartis sur les trois prochaines années. L'Etat allouera 4 milliards de dollars au financement du Plan. Les 3,5 milliards restants proviendront de la coopération internationale et du secteur privé.

Progrès de l'autorité et de l'action judiciaire de l'Etat

53. Le gouvernement a confié au Vice-président de la République, M. Gustavo Bell Lemus, en sa qualité de Haut Commissaire aux droits de l'homme, la coordination des multiples efforts et activités déployés par différents organes de l'Etat pour garantir, protéger et défendre les droits fondamentaux. Un vaste travail de concertation est en cours pour élaborer une politique d'Etat en matière de droits de l'homme et de droit humanitaire international, qui garantisse l'homogénéité des critères et la portée des engagements pris par l'ensemble des institutions compétentes, et qui est destinée à se conjuguer avec les efforts entrepris au sein de la société civile.

54. Le bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme a créé l'Observatoire des droits de l'homme et du droit humanitaire international, dont proviennent les informations suivantes:

55. Aux fins de mise en œuvre de l'action de prévention et de protection des droits de l'homme des membres des organisations non gouvernementales (ONG) et des organisations sociales, la présidence de la République a émis récemment la «directive présidentielle» suivante:

Stratégies et activités de promotion et de protection

56. Par ailleurs, ces prochains jours, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, qui coordonne l'action de la Commission interinstitutionnelle pour la protection et la promotion des droits de l'homme des travailleurs, proposera aux membres de cette commission, et soumettra à leur approbation, les «stratégies et activités de promotion et de protection des droits de l'homme des travailleurs», formulées comme suit:

57. Pour le reste, le gouvernement fait savoir ce qui suit:

Meurtres

58. En attendant les informations du ministère public, on trouvera ci-après, pour les cas suivants, les renseignements que le gouvernement a obtenus auprès d'autres sources:

59. En ce qui concerne les huit cas d'assassinats pour lesquels le ministère public avait ordonné de suspendre l'enquête (Ernesto Emilio Fernández Pezter, dirigeant de ADUCESAR, assassiné dans la municipalité de Pailitas (Cesar) le 20 novembre 1995 par des tueurs à gages présumés; Libardo Antonio Acevedo, président de FESTRALVA (CTC), Tuluá (Valle), assassiné le 7 juillet 1996; Magaly Peñaranda, membre du SINTRAMUNICIPIO, Ocaña (Santander), assassinée le 27 juillet 1997; David Quintero Uribe, président du SINTRACUACESAR, Aguachica (Cesar), assassiné le 7 août 1997; Aurelio Arbeláez, membre du SINTRAFRONTMINES, Segovia (Antioquia), assassiné le 4 mars 1997; José Guillermo Asprilla Torres, membre du SINTRAINAGRO, Apartadó, assassiné le 23 juillet 1997; Carlos Arturo Moreno López, dirigeant du comité des travailleurs de finca, assassiné à Apartadó (Urabá), apparemment par des «commandos populaires», le 7 juillet 1995; Luis Abel Villa León, membre du SINTRAMINEROS de l'Antioquia, assassiné à Amagá (Antioquia) le 21 juillet 1997), le gouvernement fait savoir que le Code pénal colombien prévoit que si, au bout de six mois, de nouveaux éléments permettant de faire progresser une enquête n'ont pas été trouvés, le dossier est classé jusqu'à ce que soient apportés de nouveaux indices ou de nouvelles preuves qui autorisent sa réouverture. On ne doit donc pas interpréter la suspension de l'enquête comme un abandon de l'affaire, ce qui équivaudrait à l'impunité.

Tentatives d'homicide

60. En ce qui concerne les tentatives d'homicide, le gouvernement indique que:

61. A cet égard, la police métropolitaine de Santiago de Cali, Unité de police judiciaire et d'enquête, a fait parvenir le rapport suivant:

62. Il convient de noter que, dans la déclaration ci-dessus, il est affirmé que M. Jesús González est arrivé sur les lieux après les faits. De même, ses autres gardes du corps sont arrivés en même temps que lui.

De son côté, le Département administratif de sécurité (DAS), section du Valle, présente la version suivante des faits:

63. Enfin, le gouvernement estime important d'informer le Comité de la liberté syndicale qu'à la demande de M. González Luna il a financé les frais de déménagement de sa famille de Cali à Bogotá, puis le départ de celle-ci pour l'étranger.

64. En outre, le gouvernement signale que les enquêtes relatives aux tentatives d'assassinat suivantes sont actuellement en cours:

Persécution

65. Les organisations plaignantes ont allégué que M. Oscar Amaury Ardila Guevara est victime des institutions militaires, qui l'ont fiché «en tant que membre d'une organisation subversive». Lorsque le gouvernement national a été informé de cette situation, il a pris les mesures de rectification pertinentes. M. Ardila faisant partie du personnel de la centrale hydroélectrique du Tolima, établie à Ibagué, le gouvernement a contribué à ce que la direction de l'entreprise maintienne son permis permanent ainsi que la bourse lui permettant de faire ses études universitaires à Bogotá. Le comité d'évaluation et de protection des personnes en situation de risque, coordonné par le ministère de l'Intérieur, a été attentif au sort de M. Ardila. En particulier, il n'a été demandé pour lui aucune autre protection que la possibilité de résider à Bogotá et d'y poursuivre ses études. Lorsque l'intéressé doit se rendre à Ibagué, on organise avec lui un système de protection.

Menaces

66. Le gouvernement indique que, sur la base des informations fournies par l'Office du Procureur général de la nation, des enquêtes sont actuellement en cours concernant les dirigeants et militants syndicaux suivants:

Protection des personnes menacées

67. Le gouvernement souligne qu'il a renforcé le programme de protection des personnes menacées, coordonné par le ministère de l'Intérieur, au moyen d'une dotation budgétaire équivalant à 5,5 millions de dollars des Etats-Unis. Ce programme bénéficie également aux dirigeants syndicaux qui ont été menacés.

68. Le gouvernement a envoyé une liste des dirigeants syndicaux bénéficiant d'une protection:

69. Le gouvernement précise également que les mécanismes de protection prévus par le programme du ministère de l'Intérieur sont fonction du risque encouru par le dirigeant syndical concerné, à partir d'une étude technique réalisée par les organismes de sécurité de l'Etat. Le gouvernement fournit la liste des dirigeants et des sièges syndicaux pour lesquels une étude des risques a été effectuée.

Arrestations

70. Le gouvernement communique les renseignements suivants sur des syndicalistes détenus, parmi lesquels plusieurs membres de l'USO (syndicat d'ECOPETROL), qui faisaient l'objet de poursuites judiciaires pour «rébellion, terrorisme et association de malfaiteurs». Il s'agit des personnes suivantes: Edgar Riaño Rojas, Marcelino Buitrago, Felipe Mendoza, Monerje Sánchez, Guillermo Cárdenas, Rafael Estupiñan, Hernán Vallejo, Leonardo Mosquera et Fabio Liévano.

71. Ces personnes ont été remises en liberté le 29 juillet 1999, ainsi que d'autres personnes appartenant au même syndicat, qui se trouvaient en détention pour les mêmes raisons: Jorge Estupiñan, Reinel Sánchez, Alvaro Solano, Francisco Cadena, Leonardo Díaz et Constantino Carrillo.

72. En ce qui concerne la prétendue arrestation de Luis David Rodríguez Pérez, on a pu établir, une fois effectuées les vérifications pertinentes, que le syndicat lui-même (SINTRADIN) n'a pas connaissance de cette prétendue arrestation et ne l'a encore moins signalée.

73. En ce qui concerne MM. Elder Fernández et Gustavo Minorta, qui ont été mentionnés comme membres supposés du syndicat ECOPETROL (USO), arrêtés en décembre 1996, les vérifications pertinentes ont été effectuées auprès de l'USO et d'ECOPETROL. Ces organisations ont déclaré ne pas connaître ces personnes et encore moins avoir signalé leur prétendue arrestation.

Actes antisyndicaux

74. En ce qui concerne les actes antisyndicaux commis dans les banques Andino, Citibank, Sudameris et Anglo Colombiano, le gouvernement a estimé nécessaire d'entendre les dirigeants syndicaux pour que ceux-ci puissent préciser le contenu de leurs plaintes. Cités par écrit à deux reprises, ils n'ont pas répondu aux convocations.

Licenciements

75. En ce qui concerne les procédures judiciaires en attente d'une sentence du tribunal, concernant trois licenciements survenus dans l'entreprise TEXTILIA Ltda., le gouvernement communique ce qui suit.

76. Pour ce qui est de la procédure judiciaire engagée par M. Arnulfo Cruz Mora, le jugement rendu en deuxième instance confirme que l'entreprise défenderesse est déchargée de toutes les accusations portées par M. Cruz Mora.

77. Pour les deux autres cas en instance, selon les informations reçues du tribunal du travail 14 du secteur de Santa Fe de Bogotá, dont le demandeur est M. Germán Bulla, la procédure se trouve à l'étape de l'établissement des preuves; quant à M. Darío Ramírez, la procédure relève du tribunal du travail no 16 du secteur de Santa Fe de Bogotá, et elle a été annulée dès la première audience pour vice de forme.

Déclarations finales

78. Dans sa communication du 23 septembre 1999, le gouvernement, par la voix de la ministre du Travail et de la Sécurité sociale, affirme ce qui suit en guise de déclaration finale.

79. L'ensemble des documents et annexes communiqués à l'OIT pour être étudiés et analysés par le Comité de la liberté syndicale, ainsi que les interventions effectuées à la Conférence internationale du Travail et aux réunions du Conseil d'administration du Bureau international du Travail par mes prédécesseurs à la tête du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, ne constituent pas seulement un ample exposé étendu de la réalité colombienne, mais font foi, en outre, de notre responsabilité et de notre grand intérêt pour faire éclater la vérité, pour douloureuse qu'elle soit, devant la communauté internationale.

80. Au cours d'une récente conférence, M. Robert Kogod Goldman, membre de la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH), organisme qui suit de près l'actualité colombienne, a déclaré qu'«il est clair que le gouvernement colombien, pour des raisons liées au conflit armé et au processus de paix, n'a plus le contrôle effectif de certaines parties du territoire national et de la population». Cependant, la commission a fait clairement entendre qu'elle ne plaçait pas sur pied d'égalité l'Etat et les groupes armés dissidents. L'Etat dispose d'un statut particulier en droit international, qui implique certains droits et obligations. Par exemple, en tant que partie à la Convention américaine et à d'autres traités concernant les droits de l'homme, l'Etat colombien a assumé librement la responsabilité et le devoir fondamentaux de respecter et de garantir, pour toutes les personnes placées sous sa compétence, les droits de l'homme que ces instruments protègent. Ce devoir et cette responsabilité, l'Etat ne peut y renoncer en cas de conflit civil ou de toute autre situation d'urgence. Le fait que les normes du droit humanitaire lient également l'Etat et les groupes armés dissidents ne peut en aucune manière modifier le statut des parties en conflit et, par conséquent, ne peut être interprété comme une légitimation de la cause au nom de laquelle les groupes dissidents ont pris les armes, et moins encore comme une reconnaissance de leur belligérance. Ce fait signifie seulement que les parties en conflit ont la même obligation de respecter les restrictions et interdictions applicables à la conduite des opérations.

81. La CIDH a relevé que, parmi les Etats membres de l'OEA, la Colombie est de ceux qui ont affirmé le plus clairement leur attachement au droit humanitaire international. De même, peu d'Etats ont essayé, autant que l'a fait l'Etat colombien, de faire pleinement connaître, avec l'appui inestimable du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), les préceptes fondamentaux du droit humanitaire international auprès de ses forces de sécurité, des autres parties en conflit et des citoyens en général. Le gouvernement colombien et de nombreux secteurs de la société civile considèrent que le respect des règles fondamentales du droit humanitaire est indispensable pour «humaniser» le conflit et pour contribuer de la sorte à créer les conditions propices à des négociations entre les parties et à l'éventuel rétablissement de la paix.

82. «... Le phénomène du déplacement de populations constitue peut-être l'incidence la plus tragique et la plus cruelle du conflit colombien, qui a touché une partie de la population civile au cours de ces dernières années. Aujourd'hui en Colombie, le problème du déplacement forcé a atteint une ampleur qui autorise à parler de catastrophe humanitaire. Les chiffres résultant des différentes études concernant les déplacements de population se situent entre 700 000 et 1 200 000 personnes. Dans tous les cas, ces chiffres indiquent un nombre de personnes déplacées supérieur à celui du récent conflit du Kosovo.»

83. Le gouvernement doit se soumettre au jugement porté par les organes de contrôle de l'OIT sur les multiples manifestations de violence que subit la Colombie. Il le fait avec l'assurance et la certitude, comme l'a affirmé M. Hernando Yepes, qu'aucune de ces manifestations de violence «n'est imputable à la politique de l'Etat ou à l'action de ses organes et de ses agents responsables. C'est pourquoi si, occasionnellement et à titre exceptionnel, certaines personnes au service de l'Etat se sont associées, à un moment ou à un autre, à des comportements entraînant une violation des droits de l'homme, se détournant ainsi de leurs obligations et contrevenant au devoir permanent de ceux qui ont pour mission d'orienter l'activité des agents de la collectivité, leur félonie s'est immanquablement attirée la réprobation énergique de la société et l'implacable réaction de l'Etat en vue de leur châtiment.»

84. La première des responsabilités du gouvernement concerne les quarante millions de Colombiens, car ce sont eux qui souffrent directement des atrocités commises par une minorité d'individus armés de manière illégitime et disposant d'un grand pouvoir de déstabilisation, pour qui la barbarie sert l'appât du lucre, en fonction de leurs objectifs politiques. Les Colombiens se sont clairement ralliés à la démocratie, ils croient en leurs institutions et, pour cette raison, se mobilisent pour leur défense. Les institutions démocratiques émanent de la volonté du peuple et le gouvernement fait honneur à cette volonté, expression de la souveraineté populaire. En résumé, la Colombie est un Etat social de droit, dont les gouvernants respectent et s'attachent à garantir les droits fondamentaux des citoyens et la totalité des institutions fondamentales.

85. Faisant partie de l'Assemblée générale des Nations Unies, étant fondateur de l'OIT, la Colombie respecte le droit international et les principes de fraternité et de solidarité entre les peuples. C'est ce qu'ont reconnu tous les gouvernements qui, en ces heures difficiles, tendent la main à la Colombie et réclament de l'aide pour son combat pour la paix.

86. Le gouvernement fait de la défense de la Colombie auprès des organes de l'OIT une affaire de principe, car les prémisses sur lesquelles se fonde l'attribution des responsabilités reposent sur une appréciation erronée de la réalité. En effet, la criminalité dont souffrent tous les Colombiens, sans aucune distinction, est associée à une prétendue violation des conventions nos 87 et 98 de l'OIT. En Colombie, malgré le développement encore modeste de la production et malgré les crises cycliques que subit l'économie nationale, les droits collectifs des travailleurs sont respectés et appliqués. Il est révélateur que les organisations syndicales qui souffrent de la violence en raison de leur situation dans les zones de forte intensité du conflit peuvent exercer normalement leurs activités de revendication. De plus, les syndicats du secteur public représentent 70 pour cent des travailleurs syndiqués, et ce sont précisément eux qui dénoncent le plus l'absence d'espace qui leur est accordé. Les grèves nationales qui ont eu lieu en Colombie, comme on peut aisément le constater, ont été conduites et animées par les syndicats du secteur public.

87. Le conflit armé a coûté la vie à plus de 30 000 personnes au cours de ces dix dernières années. Environ 700 de ces personnes étaient affiliées à des syndicats et environ 190 étaient des dirigeants syndicaux. Ces chiffres sont effarants et suscitent honte et indignation, mais ils sont loin d'atteindre ceux des statistiques reçues par les organisations internationales: on n'hésite pas à affirmer, dans nombre de documents et auprès de diverses enceintes, que les syndicalistes assassinés durant la période susmentionnée sont au nombre de 2 000, dont 1 083 au cours des huit dernières années, parmi lesquels, selon ce qu'il ressort de certains documents transmis par l'OIT, 865 étaient des dirigeants syndicaux. Pour la même période (1991-1998), la banque de données du Groupe consultatif aux droits de l'homme du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, banque qui, il faut le signaler, est l'une des plus complètes du pays, enregistre 627 assassinats, dont 180 commis sur des dirigeants syndicaux.

88. Le bulletin Cuaderno de Derechos Humanos (Cahier des droits de l'homme) de l'Ecole nationale des syndicats, source d'informations de l'OIT et d'autres organisations internationales, fait état de 39 assassinats de dirigeants syndicaux en 1997 (bulletin no 5, p. 33). Vérification faite auprès du Registre des syndicats et des syndicats eux-mêmes, on a pu constater que seules 15 de ces personnes étaient des dirigeants syndicaux, les 24 autres ne l'étant pas. On remarquera que la différence est de taille. Qui plus est, le bulletin en question désigne une personne non identifiée au titre de dirigeant syndical.

89. Quel que soit le nombre de militants et de dirigeants syndicaux assassinés, ces meurtres ne peuvent manquer de susciter le rejet, mais le fait de manier des chiffres considérables (2 000 assassinats) sans indiquer le nom des victimes produit chez le lecteur ou l'auditeur un sentiment de scandale et de consternation et, ce qui est plus grave, ceux qui reçoivent l'information n'ont d'autre choix que d'y croire. A elle seule, cette manipulation des chiffres est lourde de conséquences: il y a peu, deux lettres ont été adressées au Président de la République, l'une et l'autre datées du 20 août 1999. La première, qui provient de l'organisation syndicale PACE (Paper, Allied-Industrial, Chemical & Energy Workers International Union), fait mention de 3 000 assassinats de syndicalistes durant ces dix dernières années. La seconde, adressée par le Sindicato dos Trabalhadores na Industria da Extração de Minerais nao Metálicos de Minaco-GO, filiale brésilienne de la CUT, parle de 3 000 meurtres de dirigeants syndicaux commis par la police.

90. Le gouvernement demande au Comité de la liberté syndicale de reproduire le présent rapport in extenso pour tous les membres du Conseil d'administration du BIT.

D. Conclusions du comité

91. Le comité rappelle que les allégations exposées par les organisations plaignantes dans le présent cas se réfèrent à des actes de violence d'une extrême gravité contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes(plus d'une centaine d'homicides, tentatives d'homicide, disparitions, agressions physiques, menaces de mort) ainsi qu'à des actes de discrimination antisyndicale. Le comité exprime une fois de plus sa très vive préoccupation devant ces faits, en particulier ceux qui se soldent par la privation de la vie, condition première de tout droit.

92. En ce qui concerne la situation générale en Colombie, le comité prend note des affirmations des organisations plaignantes selon lesquelles les atteintes aux droits de l'homme et du travailleur ne font que s'aggraver depuis quelques mois et il n'existe pas dans ce pays de processus de paix, mais tout juste un dialogue qui s'amorce, non sans difficultés, entre le gouvernement et la guérilla. Pour ce qui est des droits des travailleurs, le comité note que, selon les allégations des organisations, le gouvernement prépare une nouvelle réforme de flexibilisation du travail sans tenir compte des points de vue des travailleurs ou des solutions de remplacement qu'ils pourraient proposer. Ces organisations allèguent également, sans signaler de motifs antisyndicaux, des licenciements massifs dans l'administration, tant au niveau central qu'au niveau local, des retards de paiement des salaires et des prestations sociales qui, dans certains cas, remontent à douze mois.

93. Le comité note que le gouvernement souligne, face aux affirmations des plaignants sur l'inexistence d'un processus de paix, qu'un tel processus est en cours dans les faits vers une solution politique au conflit avec la principale force de guérilla opérant sur la scène nationale, les FARC, et il affirme qu'un compromis avec l'ELN a été adopté et il estime que les assassinats et autres violations fondamentales mentionnés ne visent pas de façon sélective le mouvement syndical. Le comité observe que, selon le gouvernement, les communautés nationale et internationale ont reconnu l'importance de ce processus et ont applaudi et appuyé le courage avec lequel le gouvernement poursuit cette tâche. Il prend note des divers mécanismes et mesures utilisés pour lutter contre la violence, énumérés par le gouvernement: 1) combat contre les groupes d'autodéfense: centre de coordination de la lutte contre ces groupes, appui au Procureur général de la nation, système d'alerte rapide, accords humanitaires; 2) processus de paix avec les FARC-EP, établissement du Programme commun de changement pour une nouvelle Colombie; 3) processus de paix avec l'ELN et résolution déclarant ouvert le dialogue et reconnaissant le caractère politique de cette organisation.

94. Le comité note que le gouvernement souligne le nombre considérable de difficultés auxquelles il est confronté pour mener à bien ce processus: coups de force des FARC qui, dans le cadre d'un déploiement tactique visant à améliorer leur pouvoir de négociation, ont repris avec une violence redoublée leurs attaques contre des petites villes du pays, semant la mort et la destruction; tactique de l'ELN consistant à opérer des enlèvements collectifs de civils; actes qui, selon le gouvernement, ont été condamnés à plusieurs reprises par la Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l'homme; actes criminels perpétrés par les AUC (autodéfenses unies de Colombie) dans diverses régions du pays, en la présence ou avec l'influence présumée de la guérilla, se soldant par l'assassinat de dizaines d'humbles paysans et villageois et le déplacement forcé de centaines d'autres, cette vague de violence criminelle n'épargnant pas les grands centres urbains où des assassinats collectifs ont eu lieu et où des personnes et groupes sociaux ont fait l'objet de menaces de mort, la violence et le conflit armé qui affecte le pays tout entier, mais leurs conséquences étant plus graves en certains endroits (affectant principalement un secteur particulier de la population) où les facteurs objectifs du conflit s'entrecroisent; pour des raisons liées au conflit armé et au processus de paix, le gouvernement ne contrôle plus certaines parties du territoire et de la population; en conséquence du conflit en Colombie, les déplacements internes de population affectent de 700 000 à 1 200 000 personnes. Le comité note que, malgré tout, le gouvernement réitère sa volonté de trouver une issue qui permette de mettre fin au combat fratricide entre Colombiens et d'axer tous les efforts de l'Etat sur la croissance économique dans l'équité, c'est-à-dire accompagnée de justice sociale. Le comité note les observations du gouvernement sur le «Plan Colombie» qui tente d'éradiquer la violence dans ses causes les plus fondamentales et qui vise à progresser dans l'élaboration de conditions structurelles plus favorables à l'obtention de la paix. Le comité prend note de la politique du gouvernement en faveur de mesures préventives et de protection des droits de l'homme des membres des organisations non gouvernementales (ONG) et des organisations sociales. Le comité note que le gouvernement affirme qu'aucune des nombreuses manifestations de violence dont souffre la Colombie n'est imputable à la politique de l'Etat ou n'est le fait de ses organes ou de ses agents et que, quand de manière occasionnelle et exceptionnelle ces derniers ont été associés à des conduites attentatoires aux droits de l'homme, l'Etat a pris des sanctions; ainsi notamment, dans la lutte contre les groupes d'autodéfense, d'après le rapport du Haut Commissaire pour la paix, 82 personnes liées à la force publique ont été arrêtées. Le gouvernement indique que, d'après les informations provenant du bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme, la plus grande partie des atteintes aux droits de l'homme sont dues aux groupes d'autodéfense, puis aux membres des forces armées et de la subversion. Le comité prend note des tracts d'intimidation transcrits par le gouvernement dans son rapport où les groupes d'autodéfense menacent les syndicalistes et les dirigeants syndicaux ainsi que des données fournies par le Haut Commissaire pour la paix sur les condamnations, détentions et procès contre les membres des groupes d'autodéfense. Enfin, le comité note que le gouvernement signale que le conflit armé a provoqué 30 000 morts au cours des dix dernières années, dont 700 liées aux syndicalistes et à peu près 190 dirigeants syndicaux, et qu'il prétend que ces chiffres sont très loin des données statistiques communiquées par les organisations plaignantes.

95. Cependant, le comité déplore d'avoir à constater que depuis le dernier examen du cas, en mars 1999, de nouveaux actes de discrimination syndicale et de violence ont été perpétrés contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes (13 homicides, trois atteintes à l'intégrité physique, disparitions, menaces de mort). Par ailleurs, le comité déplore profondément qu'aucune des enquêtes en cours n'ait permis d'identifier les coupables, ce qui confirme qu'il existe en Colombie un climat d'impunité favorisant la violence et que quiconque y exerce une fonction syndicale met en péril son intégrité physique. Le comité regrette que le gouvernement n'ait envoyé des observations que sur une partie des allégations, et qu'il soit resté silencieux sur l'immense majorité des demandes d'information formulées antérieurement.

96. Le comité rappelle une fois de plus que «l'assassinat ou les lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux ou à des syndicalistes exigent l'ouverture d'enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d'empêcher que de tels faits se reproduisent», et que «l'absence de jugement contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 51 et 55.]

97. Dans ces conditions, observant que la situation continue d'être préoccupante, le comité demande instamment au gouvernement de prendre immédiatement des mesures pour déterminer les responsabilités, juger et sanctionner les coupables et empêcher que des dirigeants syndicaux et des syndicalistes ne soient à nouveau la cible d'actes de violence et d'actes antisyndicaux.

Actes de violence à propos desquels le comité,
à sa session de mars 1999, avait demandé
à être informé des enquêtes en cours

98. En ce qui concerne les allégations à propos desquelles le gouvernement a signalé à la session de mars 1999 du comité, ou précédemment, que des enquêtes et procédures judiciaires sont en cours, le comité déplore de constater que le gouvernement n'a pas envoyé de nouvelles informations sur l'évolution des procédures concernant les personnes mentionnées dans les paragraphes suivants, et il lui demande instamment de le faire au plus vite.

Homicides

99. 1) Antonio Moreno Asprilla (12 août 1995); 2) Manual Ballesta (13 août 1995); 3) Francisco Mosquera Córdoba (février 1996); 4) Carlos Arroyo de Arco (février 1996); 5) Francisco Antonio Usuga (22 mars 1996); 6) Pedro Luis Bermúdez Jaramillo (6 juin 1995); 7) Armando Umanes Petro (23 mai 1996); 8) William Gustavo Jaimes Torres (28 août 1995); 9) Jaime Eliacer Ojeda; 10) Alfonso Noguera Cano; 11) Alvaro Hoyos Pabón (12 décembre 1995); 12) Néstor Eduardo Galíndez Rodríguez (4 mars 1997); 13) Erieleth Barón Daza (3 mai 1997); 14) Jhon Fredy Arboleda Aguirre; 15) William Alonso Suárez Gil; 16) Eladio de Jesús Chaverra Rodríguez; 17) Luis Carlos Muñoz (7 mai 1997); 18) Nazareno de Jesús Rivera García (12 mars 1997); 19) Héctor Gómez (22 mars 1997); 20) Gilberto Casas Arboleda; 21) Norberto Casas Arboleda; 22) Alcides de Jesús Palacios Casas (11 février 1997); 23) Argiro de Jesús Betancur Espinosa (11 février 1997); 24) José Isidoro Leyton (25 mars 1997); 25) Eduardo Enrique Ramos Montiel (14 juillet 1997); 26) Libardo Cuéllar Navia (23 juillet 1997); 27) Wenceslao Varela Torrecilla (29 juillet 1997); 28) Abraham Figueroa Bolaños (25 juillet 1997); 29) Edgar Camacho Bolaños (25 juillet 1997); 30) Félix Avilés Arroyo (1er décembre 1997); 31) Juan Camacho Herrera (25 avril 1997); 32) Luis Orlando Camaño Galvis (20 juillet 1997); 33) Hernando Cuadros Mendoza (1994); 34) Freddy Francisco Fuentes Paternina (18 juillet 1997); 35) Víctor Julio Garzón (7 mars 1997); 36) Isidro Segundo Gil Gil (9 décembre 1996); 37) José Silvio Gómez (1er avril 1996); 38) Enoc Mendoza Riasco (7 avril 1997); 39) Luis Orlando Quiceno López (16 juillet 1997); 40) Arnold Enrique Sánchez Maza (13 juillet 1997); 41) Camilo Suárez Ariza (21 juillet 1997); 42) Mauricio Tapias Llerena (21 juillet 1997); 43) Atilio José Vásquez (juillet 1997); 44) Odulfo Zambrano López (27 octobre 1997); 45) Alvaro José Taborda Alvarez (8 janvier 1997) (signalé comme disparu dans les allégations); 46) Elkin Clavijo (30 novembre 1997); 47) Alfonso Niño (30 novembre 1997); 48) Luis Emilio Puerta Orrego (22 novembre 1997); 49) Fabio Humberto Burbano Córdoba (12 janvier 1998); 50) Osfanol Torres Cárdenas (31 janvier 1998); 51) Fernando Triana (31 janvier 1998); 52) Francisco Hurtado Cabezas (12 février 1998); 53) Misael Díaz Ursola (26 mai 1998); 54) Sabas Domingo Socadegui Paredes (3 juin 1997); 55) Jesús Arley Escobar Posada (18 juillet 1997); 56) José Raúl Giraldo Hernández (25 novembre 1997); 57) Bernardo Orrego Orrego (6 mars 1997); 58) José Eduardo Umaña Mendoza (18 avril 1998).

Disparus

100. 1) Rodrigo Rodriguez Sierra (16 février 1995); 2) Ramón Osorio Beltrán (15 avril 1997); 3) Alexander Cardona (14 juillet 1998); 4) Mario Jiménez (27 juillet 1998).

Actes de violence restés en instance à la session
de mars 1999 du comité au sujet desquels
le gouvernement envoie des informations

101. A propos des allégations restées en instance lors de l'examen de ce cas en mars 1999, le comité note que, selon le gouvernement, des enquêtes judiciaires ont été ouvertes dans les affaires ci-après: homicides - José Vicente Rincón (assassiné le 7 janvier 1998 à Barrancabermeja); Jorge Boada Palencia (assassiné le 18 avril 1998); Jorge Duarte Chávez (assassiné le 9 mai 1998 à Barrancabermeja); Carlos Rodríguez Márquez (10 mai 1998); Arcángel Rubio Ramírez Giraldo; Orfa Ligia Mejía (7 octobre 1998); Macario Herrera Villota; Víctor Eloy Mieles Ospino et Rosa Ramírez. Tentatives d'homicide - Virgilio Ochoa Pérez; Eugeniano Sánchez; Benito Rueda Villamizar. Le comité exprime sa profonde préoccupation et son indignation devant ces actes et demande au gouvernement de le tenir informé de toute urgence de l'issue des enquêtes et procédures judiciaires en cours.

102. Quant aux atteintes à l'intégrité physique dont auraient été victimes les dirigeants syndicaux Tarcisio Mora, Jesús Antonio Gonzales Luna et José Domingo Rovar Arrieta, le comité prend note des objections formulées par le gouvernement qui réfute, dans les trois cas, l'existence des actes allégués en présentant à l'appui de ces déclarations des procès-verbaux de la police.

Récents actes de violence à propos desquels
le gouvernement attend des informations

103. En ce qui concerne les allégations d'homicide de dirigeants syndicaux et de syndicalistes à propos desquelles le gouvernement dit attendre des informations détaillées du Procureur général (Oscar Artunduaga Núñez, Jesús Orlando Arévalo, Moisés Canedo Estrada, Gladys Pulido Monroy, Oscar David Blandón Gonzales, Oswaldo Rojas, Julio Alfonso Poveda, Pedro Alejandrino Melchor Tapasco, Manuel Avila Ruíz), le comité note qu'en ce qui concerne Jesús Orlando Arvéalo, Julio Alfonso Poveda, Víctor Eloy Mieles Ospino et Rosa Ramírez le gouvernement écarte tout lien entre l'assassinat et l'activité syndicale de ces personnes. Pour permettre au comité de se prononcer sur cet aspect du cas, il prie instamment le gouvernement de s'assurer dans les plus brefs délais que des enquêtes soient ouvertes et de le tenir informé à ce sujet.

Actes de violence ayant fait l'objet
d'une suspension d'enquête

104. En ce qui concerne les huit cas dans lesquels le ministère public a ordonné que l'enquête soit suspendue (Ernesto Emilio Fernández Pezter (20 novembre 1995); Libardo Antonio Acevedo (7 juillet 1996); Magaly Peñaranda (27 juillet 1997); David Quintero Uribe (7 août 1997); Aurelio Arbeláez (4 mars 1997); José Guillermo Asprilla Torres (23 juillet 1997); Carlos Arturo Moreno López (7 juillet 1995); Luis Abel Villa León (21 juillet 1997)), le comité note que d'après le Code pénal colombien, cité par le gouvernement, si à l'issue de six mois aucun élément nouveau permettant de faire la lumière sur les faits n'est présenté, le dossier est classé jusqu'à ce que surgissent de nouveaux indices ou des preuves qui justifient la réouverture de l'affaire; la suspension de l'enquête ne doit donc pas être interprétée comme un classement de l'affaire, qui serait synonyme d'impunité.

Allégations de menaces

105. Le comité note avec intérêt que le gouvernement affirme qu'il a renforcé le programme de protection des personnes menacées coordonné par le ministre de l'Intérieur, qu'un nombre plus important de dirigeants syndicaux bénéficient d'une protection et que des études de risques auxquels sont exposés les personnes et les sièges syndicaux ont été réalisées. Concrètement, le comité note que les syndicalistes suivants bénéficient de mesures de protection: Hernando Hernández Pardo, président de l'USO; Gabriel Alvis, vice-président de l'USO; César Carrillo, trésorier de l'USO; Jorge Gamboa, conseiller juridique de l'USO; María Clara Baquero, présidente de ASODEFENSA; Jesús A. Gonzàlez Luna, directeur du Département des droits de l'homme de la CUT; Luis Eduardo Garzón, président de la CUT; Wilson Borja Díaz, président de FENALTRASE; Jesús Bernal Amorocho, président de SINTRACREDITARIO; Rafael Baldovino Pérez, président de SITTELECOM; Tarcisio Mora Godoy, président de la FECODE; Héctor Fajardo Abril, secrétaire général de la CUT; Percy Oyola Paloma, président d'UTRADEC; Jorge Mario Vergara, trésorier de SITTELECOM; Nelson Berrio, Assemblée pour la paix de l'USO; Domingo Tovar Arrieta, vice-président de la CUT; Apecides Alvis Fernández, président de la CTC; Julio Roberto Gómez, secrétaire général de la CGTD; Carlos Cely, président de ATT; Yuli González Villadiego, dirigeant de UNEB; Francisco Ramírez Cuéllar, président de SINTRAMINERCOL; Rangel Ramos, président du Syndicat du département d'Antioquia. Par ailleurs, le comité note que des enquêtes ont été ouvertes en ce qui concerne les menaces de mort proférées à l'encontre des syndicalistes Alexander López M.; Robinson Emilio Masso Arias; Luis Eduardo Garzón et Héctor Fajardo Abril; Hernando Fernández. Le comité exhorte le gouvernement à continuer de prendre des mesures de protection des syndicalistes et sièges de syndicats exposés à des risques et de le tenir informé de toute nouvelle mesure adoptée à ce sujet.

106. En ce qui concerne les récentes allégations de menaces de mort dont ont été victimes Pablo Emilio Calvo, vice-président du Syndicat des travailleurs de la commune de Cartago; les membres de la Commission colombienne de juristes et le Collectif d'avocats José Alvear; José Aníbal Quiroga, vice-président du comité national de l'entreprise Brinks ainsi que les dirigeants faisant partie du Commando national unitaire qui ont appelé à la grève nationale du 31 août 1999, le comité déplore de constater que le gouvernement n'a pas envoyé ses observations à ce sujet et le prie instamment de prendre des mesures immédiates en vue d'assurer la protection des personnes menacées et d'effectuer des enquêtes pour identifier les auteurs de ces actes.

107. Enfin, le comité observe que le gouvernement n'a pas envoyé d'informations sur l'issue des enquêtes relatives aux menaces de mort proférées à l'encontre de certains syndicalistes: 1) Aguirre Restrepo Oscar; 2) Arango Alvaro Alberto; 3) Barrio Castaño Horacio; 4) Cadavid Martha Cecilia; 5) Franco Jorge Humberto; 6) Giraldo Héctor de Jesús; 7) Gutiérrez Jairo Humberto; 8) Jaramillo Carlos Hugo; 9) Jaramillo Galeano José Luis; 10) Ramos Zapata Rangel; 11) Restrepo Luis Norberto; 12) Jorge Sliecer Marín Trujillo; 13) Víctor Ramírez. Le comité demande au gouvernement de lui envoyer des informations sur l'évolution et le résultat de ces enquêtes.

Allégations de détentions

108. A sa session de mars 1999, le comité a examiné un nombre important d'allégations relatives à des détentions. En ce qui concerne la détention de MM. Edgar Riaño Rojas, Marcelino Buitrago, Felipe Mendoza, Monerje Sánchez, Guillermo Cárdenas, Rafaél Estupiñan, Hernán Vallejo, Leonardo Morquera et Fabio Liévano, Jorge Estupiñan, Reinel Sánchez, Alvaro Solano, Francisco Cadena, Leonardo Diaz, Constantino Carrillo, Luis David Rodríguez Pérez, Elder Fernandez et Gustavo Minorta, le comité note que, selon le gouvernement: 1) MM. Edgar Riaño Rojas, Marcelino Buitrago, Felipe Mendoza, Monerje Sánchez, Guillermo Cárdenas, Rafaél Estupiñan, Hernán Vallejo, Leonardo Morquera y Fabio Liévano, Jorge Estupiñan, Reinel Sánchez, Alvaro Solano, Francisco Cadena, Leonardo Diaz et Constantino Carrillo qui étaient poursuivis pour «rébellion, terrorisme et association de malfaiteurs» ont été remis en liberté le 29 juillet 1999; 2) il a pu être établi que le syndicat (SINTRADIN) ni ne connaît ni n'a fait état de la détention présumée de Luis David Rodríguez Pérez; 3) en ce qui concerne MM. Elder Fernandez et Gustavo Minorta, les syndicats dont ils étaient censés être membres (USO et ECOPETROL) ont indiqué qu'ils ne les connaissent pas et qu'ils n'ont jamais dénoncé leur détention présumée; 4) M. Luis Rodrigo Carreño n'est pas détenu. En ce qui concerne Luis David Rodríguez Pérez, Elder Fernandez et Gustavo Minorta, le comité demande à nouveau au gouvernement de l'informer des résultats des enquêtes ouvertes au sujet de leur détention.

Allégations de persécutions

109. En ce qui concerne l'allégation présentée par la CISL, selon laquelle M. Amaury Ardila Guevara est victime des institutions militaires qui l'ont fiché dans les installations militaires comme «membre d'une organisation subversive», le comité note que le gouvernement déclare qu'il a pris les mesures correctrices pertinentes et que le Comité d'évaluation et de protection des personnes exposées à des risques, coordonné par le ministre de l'Intérieur, se préoccupe du sort de M. Ardila.

Allégations à propos desquelles le gouvernement
n'a pas envoyé d'observations

110. En ce qui concerne les nouvelles allégations présentées par les organisations plaignantes relatives à des homicides et tentatives d'homicide, à des disparitions, des détentions, des persécutions et à la privation illégitime de liberté (voir annexe), le comité déplore d'observer que le gouvernement n'a pas envoyé d'observations. Il déplore aussi que celui-ci n'ait pas envoyé d'observations sur les nombreuses allégations en instance concernant l'assassinat, la disparition de syndicalistes et de dirigeants syndicaux, et des menaces de mort proférées à leur encontre. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de communiquer sans délai ses observations sur la totalité des allégations qui figurent en annexe et de prendre des mesures urgentes pour ouvrir des enquêtes, en vue de faire la lumière sur ces affaires, d'identifier et de condamner les coupables, et de le tenir informé de toute évolution dans ce sens.

Actes de discrimination antisyndicale

111. En ce qui concerne les allégations relatives à des actes antisyndicaux commis par les banques Andino, Citibank, Sudameris et Anglo Colombiano, le comité observe qu'il ressort des informations envoyées par le gouvernement que, dans le cas de la banque Anglo Colombiano, l'Association colombienne des employés de banque a demandé le 31 mai 1999 à l'inspection du travail de classer l'affaire vu que la banque avait donné une réponse positive. Le comité observe par ailleurs qu'en ce qui concerne les autres cas le gouvernement juge important de demander aux dirigeants syndicaux de préciser leur plainte et indique que ceux-ci n'ont pas répondu aux convocations écrites qu'ils ont reçues par deux fois. Dans ces conditions, le comité invite les organisations plaignantes à expliquer les raisons pour lesquelles elles n'ont pas répondu aux convocations du gouvernement.

112. Le comité prend note des nouvelles allégations relatives à des violations des droits syndicaux et sociaux dont seraient victimes les dirigeants syndicaux et travailleurs de l'entreprise Brinks de Colombie, concrètement l'allongement de la journée de travail, ce qui va à l'encontre du règlement intérieur de l'entreprise, le non-respect de la convention collective sur divers points, l'utilisation de méthodes coercitives pour amener les travailleurs à accepter l'allongement de la journée de travail, des insultes et menaces de mort proférées au téléphone à l'encontre de dirigeants syndicaux dans la même intention. A cet égard, observant que les allégations en question portent sur une période récente, le comité demande au gouvernement de lui envoyer de toute urgence ses observations.

113. En ce qui concerne les affaires en attente de jugement auprès du tribunal concernant trois licenciements intervenus à TEXTILIA Ltda., le comité note que, selon le gouvernement: 1) un jugement en seconde instance a été rendu contre M. Anulfo Cruz Mora confirmant l'acquittement de l'entreprise; 2) la procédure engagée par M. Germán Bulla en est au stade probatoire; 3) la procédure engagée par M. Darío Ramírez a été frappée de nullité pour irrégularités. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue des actions intentées par MM. Germán Bulla et Darío Ramírez.

Perquisitions au siège syndical, mise sur table d'écoute,
surveillance de syndicalistes

114. Le comité observe avec regret que le gouvernement n'a pas envoyé d'observations sur le fond des allégations suivantes relatives à des perquisitions au siège syndical, à la mise sur table d'écoute et à la surveillance de syndicalistes:

115. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de communiquer sans délai ses observations, de faire de toute urgence le nécessaire pour que soient effectuées des enquêtes et de le tenir informé de toute évolution à ce sujet.

Recommandations du comité

116. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Annexe

Allégations relatives à des actes de violence au sujet desquelles
le gouvernement n'a pas envoyé d'informations ou a envoyé
des informations insuffisantes qui ne permettent pas
d'établir si une enquête est en cours

Homicides

1) Manuel Francisco Giraldo, membre du comité exécutif du Syndicat national des travailleurs de l'industrie agricole (SINTRAINAGRO), le 22 mars 1995.

2) Vingt-trois travailleurs affiliés au SINTRAINAGRO, le 29 août 1995.

3) Alvaro David, membre du comité des travailleurs de l'exploitation «Los Planes», affilié à SINTRAINAGRO, le 22 mars 1996.

4) Eduardo Ramos, dirigeant syndical de l'exploitation «El Chispero» d'Apartadó, Urabá, Antioquia, le 14 juillet 1997.

5) Marcos Pérez González, affilié au Syndicat de l'électricité de Colombie (SINTRELECOL), le 10 octobre 1998.

6) Jorge Ortega García, vice-président de la CUT, le 20 octobre 1998 (M. Ortega García avait présenté de nouvelles allégations relatives à cette plainte quelques heures avant son assassinat).

7) Hortensia Alfaro Banderas, vice-présidente de SIDESC, le 24 octobre 1998, dans la commune de Manure, département del Cesar.

8) Jairo Cruz, président du Syndicat des travailleurs de Proaceites, le 26 octobre 1998, dans la commune de San Alberto, département del Cesar.

9) Le 12 février 1999, les éducateurs Luis Peroza et Numael Vergel ont été assassinés à San Diego, département del Cesar, après avoir été enlevés et torturés par des groupes armés non identifiés. Ils étaient affiliés à l'Association des éducateurs del Cesar (ADUCESAR).

10) Gilberto Tovar Escudero, dirigeant du Syndicat des travailleurs municipaux de Cartago, département del Valle, a été assassiné le 15 février 1999.

11) Le dirigeant syndical Albeiro de Jesús Arce Velazquez, qui avait disparu le 19 mars, a été retrouvé mort le 22 mars dans le fleuve Cauca, à la périphérie de la commune de La Virginia, Risaralda.

12) Ricaurte Pérez Rengifo de Medellín a été enlevé de l'école où il enseignait le 20 février et a été retrouvé mort à la périphérie de la ville le 25 de ce mois.

13) L'éducateur Antonio Cerón Olarte del Hulla a été assassiné.

Tentatives d'homicide

1) Gilberto Correño, dirigeant de l'Union syndicale ouvrière (USO), le 7 décembre 1996.

2) César Blanco Moreno, président du sous-comité exécutif de l'Union syndicale ouvrière (USO), le 11 mai 1998.

3) Trois membres du comité directeur national du Syndicat des travailleurs de l'Institut de sécurité sociale ont été victimes d'une agression à Barranquilla le 5 avril 1999, à 23 heures. Il s'agit de MM. Fernando Morales, qui est aussi dirigeant de la CUT, Alberto Pardo et Esaú Moreno.

Agressions physiques et répression policière

1) Répression policière à l'encontre des travailleurs des entreprises publiques de Cartagena au cours d'une manifestation pacifique le 29 juin 1999 (le gouvernement signale que le fait n'a pas été dénoncé aux autorités colombiennes).

2) César Castaño, Luis Cruz et Janeth Leguizamon, syndicalistes qui participaient à une journée d'information organisée par l'Association nationale des transitaires (ANDAT) le 6 janvier 1997, ont été pris à partie et blessés par la force publique.

3) Mario Vergara et Heberto López, dirigeants syndicaux de SITTELECOM, ont été roués de coups par la force publique.

4) La police a violemment agressé les travailleurs de SITTELECOM le 13 octobre 1998, blessant plusieurs d'entre eux.

5) Le 20 octobre 1998, à Bogotá, sur la septième avenue, entre les rues nos 24 et 27, la police anti-émeute a attaqué des travailleurs qui commençaient une manifestation pacifique en direction de la place Bolívar et, le 22 octobre 1998, la police a agressé des manifestants venus du pays tout entier qui arrivaient sur la place Bolívar.

Disparitions

1) Jairo Navarro, syndicaliste (le 6 juin 1995).

2) Rami Vaca, dirigeant syndical d'ECOPETROL (le 27 octobre 1997).

3) Misael Pinzón Granados, affilié à SINTRAINAGRO, enlevé vraisemblablement par des paramilitaires dans la municipalité de Puerto Wilches, Santander, le 7 décembre 1997. Conformément aux informations du DAS, il a été établi que l'épouse du disparu a présenté un recours en habeas corpus devant les autorités judiciaires, l'affaire ayant été classée faute de preuves pour engager des poursuites.

4) Justiniano Herrera Escobar, travailleur municipal d'Antioquia et ancien salarié de Shellmar de Colombie, a disparu depuis le 30 janvier 1999.

Menaces de mort

1) Bertina Calderón (vice-présidente de la CUT).

2) Les membres du conseil exécutif de la Fédération syndicale unitaire de l'industrie agricole (FENSUAGRO).

3) Menaces proférées à l'encontre de Pedro Barón, président de la section de Tolima de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), par des membres des forces de sécurité à partir de sa participation à une grève de protestation le 19 juillet 1995.

4) Les membres du conseil exécutif du Syndicat des travailleurs de Titán SA, municipalité de Yumbo, ont été menacés de mort par un groupe paramilitaire dénommé «Colombia sin guerrilla» (COLSINGUER) le 26 octobre 1995 et le 17 mai 1996.

5) Les membres du conseil exécutif de l'Association des agriculteurs et mineurs du sud de Bolívar (MM. Justo Pastor Quiroz, secrétaire, Roque León Salgado, trésorier, Bersaly Hurtado, conseiller).

6) Des membres du comité exécutif national de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), MM. Jesús Antonio González Luna, directeur du Département des droits de l'homme; Domingo Rafael Tovar Arrieta, directeur du département de l'organisation.

7) MM. Oscar Arturo Orozco, Hernán de Jesús Ortiz, Wilson García Quiceno, Henry Ocampo, Sergio Díaz et Fernando Cardona.

8) Jairo Antonio Cardona Mejía, président du Syndicat des travailleurs municipaux de Cartago. Les autres dirigeants menacés sont: Albeiro Forero, Gilberto Tovar, Hernando Montoya, Marino Moreno et Gilberto Nieto Patiño, conseiller municipal.

9) Le 27 mars 1998, Mme María Clara Vaquero Sarmiento, présidente de l'Association syndicale des fonctionnaires du ministère de la Défense, des Forces armées, de la Police nationale et entités connexes.

10) Pablo Emilio Calvo, vice-président du Syndicat des travailleurs municipaux de Cartago, a été menacé de mort dans un tract.

11) Des personnes liées à l'action du mouvement syndical - Commission colombienne de juristes et le Collectif d'avocats José Alvear - ont été menacées.

12) José Aníbal Quiroga, vice-président du comité national de l'entreprise Brinks, a été menacé de mort au téléphone et incité à abandonner son activité syndicale. Son père aussi a fait l'objet de menaces.

Détentions

Privation illégitime de liberté

Cas nos 1948 et 1955

Rapport intérimaire

Plaintes contre le gouvernement de la Colombie
présentées par
- la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et
- le Syndicat des travailleurs de l'entreprise de télécommunications de
Santafé de Bogotá (SINTRATELEFONOS)

Allégations: actes de discrimination antisyndicale

117. Le comité a examiné ces cas pour la dernière fois à sa session de mars 1999. [Voir 314e rapport, paragr. 42 et 77.] Le Syndicat des travailleurs de l'entreprise de télécommunications de Santafé de Bogotá (SINTRATELEFONOS) a présenté de nouvelles allégations dans une communication datée du 4 juin 1999.

118. Le gouvernement a envoyé ses observations sur ces cas dans des communications datées du 12 août et du 15 septembre 1999.

119. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

120. Lors de l'examen antérieur du cas, le comité a, à propos des allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale, formulé les recommandations suivantes [voir 314e rapport, paragr. 77, alinéas a), b), d) et e)]:

B. Nouvelles allégations

121. Dans sa communication du 4 juin 1999, le Syndicat des travailleurs de l'entreprise de télécommunications de Santafé de Bogotá (SINTRATELEFONOS) indique que le gouvernement n'a pas appliqué la recommandation qu'avait formulée le comité à sa session de mars 1999 et dans laquelle il le priait de prendre les mesures en vue de favoriser la réintégration des 23 syndicalistes de SINTRATELEFONOS licenciés par l'entreprise ETB en novembre 1997. En outre, l'organisation plaignante affirme que, le 27 janvier et le 10 mars 1999, 11 autres syndicalistes ont été licenciés par l'entreprise ETB (cinq travailleurs de la Central Engativá et six travailleurs de la zone commerciale). Enfin, l'organisation plaignante indique que l'autorité judiciaire compétente (la Fiscalía General de la Nacíon) a mis un terme aux poursuites pénales engagées contre les dirigeants syndicaux, M. Víctor Manuel Bautista Ramírez et Mme Sandra Patricia Cordero Tovar, pour violence envers un employé en prononçant un non-lieu en date du 20 novembre 1998.

C. Réponse du gouvernement

122. Dans ses communications du 12 août et du 15 septembre 1999, le gouvernement indique, à propos de la demande du comité tendant à ce que soient prises des mesures en vue de favoriser la réintégration des 23 syndicalistes de SINTRATELEFONOS lienciés par l'entreprise ETB en novembre 1997, que, comme il l'a déclaré dans sa communication du 15 janvier 1999, les travailleurs concernés peuvent saisir le tribunal du travail, qui a été institué pour entendre, d'une manière générale, des conflits de droit qui découlent directement ou indirectement du contrat de travail et, en particulier, des questions relatives à l'immunité syndicale des agents de la fonction publique, des travailleurs officiels et des autres catégories de travailleurs. Ainsi, les travailleurs jouissant de l'immunité syndicale qui ont été licenciés sans que la justice ne se soit d'abord prononcée sur les motifs du lienciement peuvent engager une action visant à leur réintégration et obtenir par conséquent le paiement des salaires qui leur seraient dus. En vertu de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire qui caractérise un Etat de droit, le gouvernement de la Colombie ne pourrait guère favoriser la réintégration de travailleurs; afin de garantir le respect de leurs droits, les travailleurs concernés ont la possibilité de saisir le tribunal du travail et, en tant que mesure provisoire, d'introduire une action auprès des juges de tutelle. Les travailleurs licenciés par l'entreprise de télécommunications de Bogotá ont utilisé les moyens de recours prévus par la législation colombienne; néanmoins, sans attendre les résultats des actions engagées auprès des juges du travail et des juges de tutelle, ils ont présenté une plainte pour les mêmes faits à l'Organisation internationale du Travail.

123. Le gouvernement déclare que, bien que la compétence du Comité de la liberté syndicale pour examiner les allégations ne dépende pas de l'épuisement des procédures nationales de recours, cela représente néanmoins un fait dont le comité doit tenir compte quand il décide d'examiner le fond d'une question, comme le déclare le BIT lui-même aux paragraphes 31, 32 et 33, pp. 135-136, de la publication Droit syndical de l'OIT: normes et procédures (Bureau international du Travail, Genève, 1996). Tel est le cas pour l'entreprise de téléphones de Bogotá: en date du 15 janvier 1999, le comité a été informé que la législation nationale prévoit, dans de telles circonstances, la possibilité de saisir des tribunaux indépendants, en l'occurrence le tribunal du travail, et d'introduire, en tant que mesure provisoire, une action auprès des juges de tutelle. Les travailleurs licenciés par l'entreprise de téléphones de Bogotá ont donc porté l'affaire devant le tribunal du travail et devant des juges de tutelle, qui ont déjà pris une décision dans certains cas. Le gouvernement affirme que, dans la majorité de ces cas, les résultats ont été favorables aux travailleurs. Le gouvernement indique par ailleurs les noms de 15 travailleurs dont la réintégration a été ordonnée par les autorités judiciaires; de même, il communique les noms d'autres travailleurs dont les procédures judiciaires sont encore en instance.

124. Quant au licenciement de membres de SINTRAELECOL travaillant dans l'entreprise d'énergie de Cundinamarca (14), l'entreprise EPSA de Cali (13) et l'entreprise d'énergie de Bogotá (1), le gouvernement indique que l'entreprise EPSA située à Cali a ordonné la fermeture d'unités de production d'énergie thermique jugées non rentables et a proposé aux travailleurs un plan de départ volontaire à la retraite assorti d'une compensation financière. Il ajoute que quelques travailleurs n'ont pas accepté ce plan et ont été licenciés conformément à la législation du travail qui autorise le licenciement d'un certain pourcentage de travailleurs sans justification et moyennant le paiement d'une indemnité. C'est ainsi qu'il a été procédé aux 13 licenciements que mentionne l'organisation plaignante. Le gouvernement indique que l'organisation syndicale SINTRAELECOL a organisé des journées de protestation dans d'autres entreprises du secteur pour protester contre les licenciements susmentionnés dans l'entreprise EPSA. S'agissant de l'entreprise d'énergie de Cundinamarca, les arrêts de travail dus aux journées de protestation ont été déclarés illégaux au motif qu'aucun processus de négociation collective n'était en cours et qu'il s'agissait en outre d'un service public essentiel (loi 142/93), en vertu de quoi l'entreprise a licencié 14 travailleurs. Le gouvernement déclare que la faculté de licencier un des travailleurs de l'entreprise d'énergie de Bogotá est fondée sur l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire et qu'il s'agit d'une entreprise qui, à l'époque, comptait plus de 4 000 employés. En ce qui concerne le licenciement de MM. Elías Quintana et Carlos Socha, le gouvernement précise qu'il a demandé à l'entreprise ETB des informations à ce sujet, mais que cette entreprise a déclaré avoir besoin d'informations supplémentaires pour identifier ces travailleurs sur la liste du personnel.

125. Quant à l'allégation relative au licenciement, le 27 janvier 1999, de 5 syndicalistes par la Central Engativá de l'entreprise ETB, le gouvernement déclare qu'en ce qui concerne les travailleurs Gladys Pérez et Jorge Alejandro Sánchez, l'entreprise de téléphones de Bogotá a décidé unilatéralement de résilier le contrat de travail, conformément à ce que prévoit la clause 19.a , alinéa c), de la convention collective de travail en vigueur à ce moment et l'article 6 de la loi 50 de 1990. (Clause 19.a , alinéa c), de la convention collective sur la stabilité du travail: «...Au cas où les contrats de travail seraient résiliés unilatéralement sans juste motif établi par l'entreprise, cette dernière devra payer au travailleur une compensation financière comme suit: 1. Quarante-cinq (45) jours de salaire quand le travailleur n'a pas une durée de service supérieure à un (1) an. 2. Si le travailleur a plus d'une (1) année de service continu et moins de cinq (5) ans, il recevra vingt (20) jours de salaire en plus des quarante-cinq (45) jours de base prévus à l'alinéa 1 pour chacune des années de service subséquentes, et proportionnellement par fraction ...»; article 6 de la loi 50 de 1990 sur la résiliation unilatérale d'un contrat sans juste motif: «Tout contrat comprendra la clause résolutoire pour non-respect des conditions convenues, prévoyant le paiement par la partie responsable d'une compensation financière pour les préjudices causés. Cette indemnisation devra compenser le manque à gagner et réparer les torts causés.» Le gouvernement s'élève contre le comportement de SINTRATELEFONOS qui a voulu que ces faits soient considérés comme des violations de la liberté syndicale, du libre exercice des droits syndicaux et du droit à la négociation collective, alors qu'elle méconnaît de toute évidence, et ne les mentionne pas, les clauses de la convention qu'elle a acceptées. Il est clair que l'entreprise ETB a licencié ses travailleurs en tenant compte des normes légales en vigueur, qui l'obligeaient à indemniser les travailleurs pour les préjudices subis. Le gouvernement ajoute que, si un travailleur est en désaccord avec l'indemnisation qui lui a été versée ou avec la façon dont le contrat de travail a été résilié, il dispose de mécanismes judiciaires pour faire valoir les droits qu'il considère comme violés.

126. En ce qui concerne l'allégation relative au licenciement, le 10 mai 1999, de 6 travailleurs de la zone commerciale de l'entreprise ETB, le gouvernement déclare que, si les travailleurs ne sont pas d'accord avec les clauses invoquées pour leur licenciement, ils disposent des moyens de recours nécessaires pour se pourvoir devant le tribunal du travail.

127. S'agissant de l'allégation selon laquelle près de 800 travailleurs feraient l'objet d'accusations et d'enquêtes de la part d'organismes publics ou de l'entreprise ETB, le gouvernement indique que l'entreprise a fait savoir que le Bureau anticorruption a engagé une procédure portant le no 069-97 et visant près de 500 travailleurs qui auraient procédé à des arrêts de travail en des jours différents. D'après le gouvernement, la procédure en question est régie par la loi no 200 de 1995 relative au Code disciplinaire unique et est actuellement au stade de l'instruction. Le gouvernement ajoute que la loi no 200 de 1995 établit le régime disciplinaire applicable à tous les employés et travailleurs de l'Etat. Ladite loi a chargé du contrôle disciplinaire des organismes tels que le bureau du Procureur général de la nation, les procureurs (personerías) et les bureaux de contrôle disciplinaire interne. En ce qui concerne ces derniers bureaux, elle a ordonné la création de bureaux du plus haut niveau, au sein de chaque entité ou organisme de l'Etat, qui seront chargés de connaître en première instance des procédures disciplinaires qui seront engagées contre les travailleurs de leur entité. Conformément à la loi précitée, l'entreprise de télécommunications de Santafé de Bogotá DC a créé en 1997 le Bureau anticorruption, qui assume, entre autres fonctions, celles prévues par la loi no 200 de 1995. L'existence de ce bureau ne limite toutefois pas le pouvoir disciplinaire qu'exercent les autres organismes de contrôle disciplinaire (bureau du Procureur général et procureur de district (personería distrital) car ces organismes exercent respectivement ce que l'on appelle le contrôle prévalant et le contrôle préférentiel.

128. Selon le gouvernement, ce qui précède explique la raison pour laquelle des procédures disciplinaires ont pu être engagées contre les travailleurs de l'entreprise de téléphones de Bogotá tant par le Bureau anticorruption que par divers organismes de contrôle disciplinaire, sous réserve que les procédures ne portent jamais sur les même faits, c'est-à-dire que plusieurs procédures peuvent avoir été engagées contre le même fonctionnaire par n'importe lequel des trois organismes, mais pour des comportements différents. Enfin, le bureau du Procureur général et celui du procureur de district, en exerçant le contrôle prévalant ou préférentiel, peuvent connaître des procédures disciplinaires qui ont été engagées par le Bureau anticorruption, qui doit alors transmettre les procédures en l'état car il n'est plus compétent pour l'affaire en question. La procédure engagée ne constitue en aucun moment une accusation du Bureau anticorruption contre un fonctionnaire de l'entreprise, mais simplement l'exécution d'un ordre donné par une autorité administrative. Néanmoins, l'inspecteur du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale - l'inspecteur du travail -, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire que lui confère la loi, ordonnera l'ouverture d'une enquête sur les procédures disciplinaires en cours pour déterminer si effectivement des représailles antisyndicales sont exercées par cette voie.

129. Enfin, s'agissant des poursuites pénales engagées contre les dirigeants syndicaux, M. Víctor Manuel Bautista Ramírez et Mme Patricia Cordero Tovar, le gouvernement indique que le bureau d'instruction no 209, spécialisé dans les infractions contre l'administration publique et la justice, a déclaré l'instruction close le 12 janvier 1999.

C. Conclusions du comité

130. Le comité observe que les allégations qui étaient en suspens lorsqu'il a examiné ce cas à sa session de mars 1999 concernent le licenciement de 28 travailleurs affiliés au syndicat SINTRAELECOL (14 appartenant à l'entreprise d'énergie de Cundinamarca, 13 à l'entreprise EPSA de Cali et un à l'entreprise d'énergie de Bogotá), les licenciements des travailleurs, MM. Elías Quintana et Carlos Socha, de l'entreprise de télécommunications de Santafé de Bogotá (ETB) et les accusations et enquêtes d'organismes publics ou de l'entreprise ETB visant près de 800 travailleurs. En outre, le comité avait prié le gouvernement de l'informer de toute décision qui serait prise à propos de la plainte pénale qui avait été déposée contre les dirigeants syndicaux, M. Víctor Manuel Bautista Ramírez et Mme Patricia Cordero Tovar. De même, le comité constate que l'organisation plaignante SINTRATELEFONOS, d'une part, indique que le gouvernement n'a pas appliqué la recommandation qu'il avait formulée à sa session de mars 1999 et dans laquelle il le priait de prendre les mesures en vue de favoriser la réintégration des 23 syndicalistes de SINTRATELEFONOS licenciés en novembre 1997 par l'entreprise ETB et, d'autre part, affirme que cette entreprise a licencié 11 autres syndicalistes affiliés à SINTRATELEFONOS en janvier et mars 1999.

131. S'agissant des allégations relatives au lienciement par l'entreprise d'énergie de Cundinamarca, l'entreprise EPSA de Cali et l'entreprise d'énergie de Bogotá de personnes affiliées à l'organisation syndicale SINTRAELECOL et au licenciement de deux dirigeants syndicaux par l'entreprise ETB, le comité prend note des observations ci-après formulées par le gouvernement: 1) les 13 travailleurs de l'entreprise EPSA située à Cali ont été licenciés, conformément à la législation du travail qui autorise le licenciement d'un certain pourcentage de travailleurs sans justification et moyennant le paiement d'une indemnité, parce que ces travailleurs n'ont pas accepté le plan de départ volontaire à la retraite mis en place par l'entreprise à la suite de la fermeture d'unités de production d'énergie thermique jugées non rentables; 2) les 14 travailleurs de l'entreprise d'énergie de Cundinamarca ont été licenciés après que l'organisation syndicale SINTRAELECOL eut organisé, dans des entreprises du secteur, des journées de protestation qui ont été déclarées illégales parce que aucune négociation collective n'était en cours et parce qu'il s'agissait d'un service public essentiel; 3) le licenciement d'un travailleur de l'entreprise d'énergie de Bogotá a été arbitraire et a eu lieu dans une entreprise qui comptait à l'époque plus de 4 000 travailleurs; et 4) l'entreprise ETB indique qu'elle a besoin de plus de données pour identifier les dirigeants syndicaux, MM. Elías Quintana et Carlos Socha, sur la liste de son personnel. A cet égard, le comité déplore que le gouvernement ne lui ait pas communiqué des informations détaillées qui lui auraient permis de déterminer si les travailleurs en question avaient été licenciés parce qu'ils appartenaient à un syndicat ou parce qu'ils avaient mené des activités syndicales légitimes. Dans ces conditions, afin de pouvoir formuler ses conclusions en tenant compte de tous les éléments, le comité prie instamment le gouvernement de lui communiquer des informations sur: i) le nombre total de travailleurs affiliés et de travailleurs non affiliés à l'organisation SINTRAELECOL qui ont été licenciés par l'entreprise EPSA située à Cali après avoir refusé le plan de départ volontaire à la retraite; ii) la durée et les caractéristiques des journées de protestation (par exemple, interruption totale des services, arrêts de travail partiels, refus de s'occuper du public, etc.) organisées par le SINTRAELECOL ainsi que le nom de l'organe qui a déclaré illégales ces journées et qui est donc à l'origine du licenciement de travailleurs de l'entreprise d'énergie de Cundinamarca; et iii) les motifs du licenciement par l'entreprise d'énergie de Bogotá d'une personne affiliée à l'organisation SINTRAELECOL et du licenciement, par l'entreprise ETB, des dirigeants syndicaux (protégés par l'immunité syndicale d'après l'organisation plaignante) MM. Elías Quintana et Carlos Socha. Le comité prie le gouvernement de lui envoyer ces informations sans retard.

132. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle le gouvernement n'a pas appliqué la recommandation qu'avait formulée le comité lors de son examen antérieur du cas en mars 1999 et dans laquelle il demandait que soient prises des mesures en vue de favoriser la réintégration des 23 syndicalistes licenciés en novembre 1997 par l'entreprise ETB, le comité prend note de l'information communiquée par le gouvernement selon laquelle les autorités judiciaires ont ordonné la réintégration de 15 des 23 travailleurs licenciés et les procédures judiciaires concernant les autres travailleurs sont encore en instance. A cet égard, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que les 15 travailleurs mentionnés soient effectivement réintégrés dans leur poste de travail et exprime l'espoir que les autres travailleurs seront réintégrés dans un proche avenir.

133. Quant aux nouvelles allégations présentées par l'organisation plaignante SINTRATELEFONOS, selon lesquelles 11 autres personnes affiliées à ce syndicat (5 travailleurs de la Central Engativá et 6 travailleurs de la zone commerciale) auraient été licenciées par l'entreprise ETB en janvier et mars 1999, le comité constate que le gouvernement déclare ce qui suit: 1) au sujet du licenciement des travailleurs de la Central Engativá, l'entreprise ETB a décidé unilatéralement de résilier le contrat de travail de Mme Gladys Pérez et de M. Jorge Alejandro Sánchez, conformément à ce que prévoit la clause 19 de la convention collective de travail en vigueur (d'après le gouvernement, la convention collective prévoit la possibilité de licencier des travailleurs sans juste motif en leur payant une indemnisation) et les dispositions de l'article 6 de la loi 50 de 1990 (relatives au paiement d'une indemnisation par la partie qui ne respecte pas le contrat de travail), en versant aux deux dirigeants l'indemnisation qui leur était due; et 2) en ce qui concerne les travailleurs de la zone commerciale qui ont été licenciés, le gouvernement indique que, si les travailleurs sont en désaccord avec les clauses invoquées pour le licenciement (l'organisation plaignante déclare qu'ils auraient été licenciés pour des problèmes de faible productivité), ils disposent des moyens nécessaires pour saisir le tribunal du travail et faire valoir leurs droits. A cet égard, le comité regrette que le gouvernement se soit limité à communiquer des informations de caractère général qui ne permettent pas de déterminer si les licenciements en question sont liés à des motifs de nature antisyndicale, indépendamment du fait que la convention collective permet ou non le licenciement sans juste motif et que la législation offre la possibilité de recourir devant les tribunaux. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin d'ouvrir une enquête à ce sujet et, s'il s'avérait que les travailleurs en question ont été licenciés en raison de leur appartenance à une organisation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, de veiller à ce que ces travailleurs soient immédiatement réintégrés dans leur poste de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

134. S'agissant des plaintes pénales pour violence envers un employé déposées contre les dirigeants syndicaux, M. Víctor Manuel Bautista Ramírez et Mme Patricia Cordero Tovar, le comité prend note des informations communiquées par l'organisation plaignante SINTRATELEFONOS et par le gouvernement, selon lesquelles l'autorité judiciaire compétente (la Fiscalía General de la Nacíon) a décrété qu'il n'avait pas lieu de poursuivre l'instruction contre les dirigeants syndicaux susmentionnés et a classé l'affaire sans suite.

135. Quant à l'allégation selon laquelle près de 800 travailleurs feraient l'objet d'accusations ou d'enquêtes d'organismes publics ou de l'entreprise ETB, le comité prend note de l'information que lui a communiquée le gouvernement, à savoir que le Bureau anticorruption a engagé une procédure, qui se trouve au stade de l'instruction, concernant les arrêts de travail auxquels auraient procédé 500 travailleurs et que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire que lui confère la loi, ordonnera l'ouverture d'une enquête sur les procédures disciplinaires en cours pour déterminer si des représailles antisyndicales sont effectivement exercées par cette voie. De même, le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de l'enquête que le ministère a l'intention d'ouvrir pour déterminer si une campagne antisyndicale existe au sein de l'entreprise ETB à cet égard.

Recommandations du comité

136. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Cas no 1962

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
- la Centrale unitaire des travailleurs (CUT),
- la Confédération générale des travailleurs démocrates (CGTD), et
- le Syndicat des travailleurs officiels et des fonctionnaires
du ministère des Travaux publics, des Transports
et des Districts responsables des routes nationales
(SINTRAMINOBRAS)

Allégations: licenciements contraires à une convention collective
dans un contexte de restructuration

137. Le comité a examiné pour la dernière fois le cas no 1962 à sa session de mars 1999. [Voir 314e rapport, paragr. 78 à 96.]

138. La CUT a envoyé des informations complémentaires en 1998 dans sa communication du 10 novembre et, en 1999, dans celles des 17 mars, 4 août, 25 et 29 juin, 15 juillet et 3 septembre. La CGTD a fait parvenir de nouvelles informations dans ses communications des 17 mars, 20 avril et 18 mai 1999. Le syndicat SINTRAMINOBRAS a présenté de nouvelles allégations dans une communication du 14 avril 1999.

139. Le gouvernement a envoyé ses observations dans ses communications des 12 août et 3 septembre 1999.

140. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

141. Lors de l'examen antérieur du cas portant sur les allégations relatives à des licenciements contraires à une convention collective dans un contexte de restructuration, le comité avait formulé les recommandations suivantes:

B. Nouvelles allégations

142. La CUT, dans une communication du 10 novembre 1998, allègue que ce qui semblait n'être qu'un fait isolé au plan national - le refus prononcé par le tribunal du travail de réintégrer les travailleurs licenciés au motif d'un licenciement injuste et illégal - est désormais appliqué à tous les travailleurs syndiqués licenciés ayant demandé leur réintégration. La CUT mentionne en particulier le principe invoqué par la Cour suprême de justice selon lequel «si un employeur, au mépris de la loi, effectue un lock-out partiel ou total d'une entreprise qui provoque la cessation de contrats de travail, il est juridiquement inadmissible de prétendre être réintégré en vertu de la loi, d'un accord collectif ou d'une convention collective» (arrêt du 2 décembre 1997, Rad. 10.157, Alvaro Vargas Gutiérrez et autres contre la municipalité de Neiva). La CUT ajoute que dans cette situation les travailleurs qui bénéficient, au titre d'une convention, du droit à être réintégrés ne jouissent en fait d'aucune garantie puisqu'il suffit à l'employeur de violer la loi et de fermer son entreprise pour que la convention soit dénuée d'effet juridique. Elle cite comme exemple deux arrêts de la Chambre sociale de la cour de cassation qui corroborent cette thèse: l'arrêt du 30 avril 1998 dans le procès no 10.425 et l'arrêt du 17 juillet 1998 dans le procès no 10.779.

143. Par ailleurs, dans les communications du 17 mars et du 20 avril 1999, la CUT et la CGTD informent, respectivement, qu'en février et mars 1999 la chambre disciplinaire du Conseil de la magistrature du département de Huila a prononcé deux arrêts ordonnant au Tribunal supérieur de Neiva, section du droit du travail, de réviser leur sentence pour les affaires présentées par les dirigeants syndicaux des municipalités de Neiva et Pitalito au motif de vices de forme patents. La CGTD estime donc que les travailleurs licenciés seront peut-être réintégrés. Toutefois, l'arrêt concernant la municipalité de Pitalito a fait l'objet d'un recours en appel de la part des magistrats visés et de la municipalité.

144. Par la suite, la CGTD, dans une communication du 18 mai 1999, fait également savoir que le Conseil supérieur de la magistrature de Colombie a ordonné au Tribunal supérieur de Neiva de réviser son arrêt dans les quarante-huit heures en tenant compte du principe de «la situation la plus favorable aux travailleurs en cas de doute», consacré par l'article 53 de la Constitution, ce qui pourrait entraîner la réintégration des travailleurs de la municipalité de Pitalito. Elle allègue que cette décision permet de conclure que l'administration municipale et certains juges ont effectivement violé de façon flagrante les normes du travail.

145. Le syndicat SINTRAMINOBRAS, dans sa communication du 14 avril 1999, allègue que MM. Hernando Oviedo Polo, Fernando Leyva Zuleta et Omar Muñoz Cabrera, membres du comité exécutif du Syndicat des travailleurs officiels et des fonctionnaires des ministères des Travaux publics, des Transports et des Districts responsables des routes nationales (SINTRAMINOBRAS), ont été licenciés fin décembre 1994 sans que le ministère des Transports n'ait obtenu l'autorisation préalable prescrite par les articles 405 à 411 du Code du travail. Les intéressés ont saisi le tribunal du travail d'une demande de réintégration, qui a reconnu qu'ils étaient couverts par le droit syndical. La chambre civile chargée des questions relatives au travail a également reconnu ce fait; toutefois, elle a également statué que les licenciements avaient eu lieu en vertu d'un mandat constitutionnel et sur ordre du ministère de la Justice, et que de ce fait aucune autorisation judiciaire n'était requise. Il est également allégué que les dirigeants syndicaux d'autres villes (Barranquilla, Neiva, Santafé de Bogotá), licenciés dans des circonstances analogues, ont été réintégrés.

146. La CUT allègue que MM. Oscar de Jesús Martínez Quintero, Alvaro Rojas Tovar, Hernando Cortes Yate, Isauro Lasso Vargas et Ascencio Gutierrez Chala, membres du Syndicat des travailleurs officiels et des agents de l'HIMAT, licenciés injustement et illégalement en août 1993 par l'Institut colombien d'hydrologie, de météorologie et d'aménagement des terres, INAT, anciennement HIMAT, ont reçu une indemnité dont le montant ne correspond pas à celui fixé par la loi. Plus particulièrement, il n'a pas été tenu compte du fait que le changement de directeur ne met pas fin au contrat de travail de sorte que, pour calculer l'indemnité, on n'a pas retenu la période travaillée pour INCORA, organisme remplacé par l'HIMAT. En outre, les heures supplémentaires sont impayées.

C. Réponse du gouvernement

147. Le gouvernement indique à nouveau qu'il a toujours cherché la concertation avec les partenaires sociaux en matière de politiques et de processus de restructuration de l'Etat, et ce à tous les niveaux de l'administration. Il cite, à titre d'exemples, les programmes élaborés en vue de donner une mobilité professionnelle aux travailleurs mis à pied en les formant à l'emploi d'équipement, à une profession ou à des technologies qui leur permettent de trouver rapidement un travail digne. Il ajoute que l'Etat a libéré et libère encore des crédits importants tendant à faciliter le choix d'une activité indépendante. En outre, il affirme que la concertation en matière de politiques du travail est consacrée par la Constitution et la loi (art. 56 et loi 278/96). Le gouvernement précise aussi que le Président de la République a fait publier en mars 1999 la circulaire no 02 qui fait droit à la recommandation du comité relative à la concertation des parties intéressées en cas de restructuration de l'Etat.

148. S'agissant de l'allégation de non-respect de la convention collective par la municipalité de Neiva, le gouvernement explique que les travailleurs licenciés en raison de la restructuration du secrétariat des travaux publics de cette municipalité ont porté plainte pour violation de la convention collective car, selon eux, il y avait infraction à la disposition leur garantissant une stabilité totale de l'emploi. Au ministère du Travail, la Division chargée de l'inspection et de la surveillance de la Direction régionale du travail et de la sécurité sociale du département de Huila a imposé en première instance une amende à la municipalité pour violation de la clause no 3 de la convention. Cette décision a été confirmée par le ministère du Travail en seconde instance. Ces deux décisions ont été confirmées une dernière fois à la suite d'un troisième recours, par la voie administrative, les sanctions imposées par le gouvernement à la municipalité de Neiva sont donc devenues fermes.

149. En ce qui concerne les allégations de licenciements de dirigeants de l'HIMAT, devenu INAT, le gouvernement informe qu'ils ont eu lieu en vertu d'une disposition transitoire de la Constitution nationale (article 20), qui prescrivait de «supprimer, fusionner ou restructurer les organismes du pouvoir exécutif, les établissements publics et les sociétés à économie mixte d'intérêt national» afin de les mettre en harmonie avec la nouvelle Constitution. Sur la base de cette disposition, le gouvernement a adopté les décrets 2135/92 et 1598/93 ratifiés par le conseil de direction de l'HIMAT dans l'accord no 53 de 1993 en éliminant de la liste du personnel les fonctions objet du litige. Le gouvernement affirme que l'institut a été restructuré en fonction des normes légales et constitutionnelles en vigueur à l'époque des faits. Il ajoute que les travailleurs Hernando Bonilla Buendía, Jesús Antonin Mejía Díaz et José Antonio Alarcón ont reçu des dédommagements de nature pécuniaire à la suite d'un jugement prononcé en septembre 1998; toutefois le tribunal a estimé les licenciements légaux mais sans juste motif. De ce fait, il n'a pas ordonné leur réintégration mais il a ordonné le versement d'indemnités et même d'une pension de retraite comme sanction à l'encontre de l'employeur. Par ailleurs, le gouvernement envoie diverses informations sur l'état des procès intentés contre l'INA par MM. Hernando Bonilla et autres, Ascencio Gutierrez Chala et autres, Cesar Augusto Ramirez et autres, Fernando Gonzales Grande et autres.

D. Conclusions du comité

150. Le comité constate que les allégations des organisations plaignantes concernent des licenciements de travailleurs ou de dirigeants syndicaux de la municipalité de Neiva, de la municipalité de Pitalito, de l'Institut d'hydrologie, de météorologie et d'aménagement des terres (section de Neiva) et du ministère des Travaux publics, des Transports et des Districts responsables des routes nationales.

151. En ce qui concerne la suppression du Secrétariat des travaux publics de la municipalité de Neiva qui a entraîné le licenciement de 155 travailleurs, le comité fait remarquer que, dans ses recommandations antérieures relatives à ces allégations, il avait rappelé au gouvernement «l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels les gouvernements devraient consulter les organisations syndicales en vue d'examiner les conséquences des programmes de restructuration sur l'emploi et les conditions de travail des salariés». A ce sujet, le comité prend note de la circulaire no 02 de mars 1999 émanant de la présidence de la République de Colombie et tout particulièrement de la disposition qui dispose que les processus de restructuration de l'Etat devront être amples et que toute personne ayant un intérêt pour cette question devra y participer, ce qui vaut particulièrement pour les syndicats de travailleurs. Le comité prie le gouvernement de veiller à l'application de cette circulaire pour qu'aient effectivement lieu des consultations avec les organisations syndicales quant aux conséquences des restructurations sur l'emploi et les conditions de travail.

152. S'agissant de l'allégation de non-respect par la municipalité de Neiva de la clause de stabilité du travail figurant dans la convention collective et du licenciement consécutif des 155 travailleurs mentionnés au paragraphe précédent, le comité note que le gouvernement indique que le ministère du Travail - Division de l'inspection et de la surveillance de la Direction régionale du travail et de la sécurité sociale du département de Huila - a statué dans toutes les instances à la culpabilité de la municipalité et lui a infligé une amende. Le comité observe que selon les allégations antérieures de la CUT [voir 314e rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 81] la Cour d'appel avait déclaré qu'il n'était pas légalement possible de réintégrer ces travailleurs compte tenu du droit de l'administration de procéder à des restructurations, mais que la municipalité défenderesse n'était pas dispensée du versement d'indemnités de licenciement; toutefois, ces indemnités n'ont pas été versées, aucune demande n'ayant été présentée en ce sens. Le comité estime qu'il y a eu violation de la convention collective qui garantit la stabilité du travail des travailleurs syndiqués, ce qui constitue une violation des principes de la liberté syndicale. Dans ces cole comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient effectivement réintégrés dans l'administration publique en question les 155 travailleurs licenciés sans perte de salaire. Si cela n'est pas possible dans la pratique, étant donné le laps de temps écoulé depuis ces licenciements, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin que les travailleurs soient totalement indemnisés sans tarder.

153. En ce qui concerne les allégations de licenciements sans préavis légal de dirigeants syndicaux de l'HIMAT, devenu INAT (Alberto Medina Medina, José Antonio Alarcón, José Antonio Méjía Díaz, Alvaro Cabrera Achury, Hernando Bonilla Buendía), le comité note que le gouvernement indique que ces licenciements ont eu lieu en vertu d'une disposition transitoire de la Constitution nationale (article 20 transitoire), qui lui a ordonné «de supprimer, fusionner et restructurer les organismes du pouvoir exécutif, les établissements publics et les sociétés d'économie mixte d'importance nationale», et que l'institut a été restructuré en vertu de normes légales et constitutionnelles en vigueur à l'époque des faits. Le comité prend note du jugement envoyé par le gouvernement où, en première instance, la troisième chambre du tribunal du travail de la juridiction de Neiva, Huila, a estimé ces licenciements légaux mais sans juste motif, raison pour laquelle il n'y a pas eu réintégration mais indemnisation. Le comité rappelle que, dans un cas où le gouvernement avait estimé que le licenciement de neuf dirigeants syndicaux avait eu lieu dans le cadre de programmes de restructuration de l'Etat, il avait souligné «l'importance qu'il attache à la priorité accordée au maintien dans l'emploi des représentants des travailleurs en cas de réduction du personnel afin de garantir la protection effective de ces dirigeants». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 961.] Dans ces conditions, le comité prie instamment le gouvernement de prendre des mesures en vue de réintégrer les dirigeants syndicaux licenciés et, au cas où cela ne serait pas possible dans la pratique étant donné le laps de temps écoulé depuis les licenciements, de s'assurer qu'ils soient totalement indemnisés sans tarder.

154. Pour ce qui est des nouvelles allégations relatives à l'insuffisance de l'indemnité versée par l'INAT, anciennement HIMAT, à MM. Oscar de Jesús Martínez Quintero, Alvaro Rojas Tovar, Hernando Cortes Yate, Isauro Lasso Vargas, Ascencio Gutierrez Chala, membres du Syndicat des travailleurs officiels et des agents de l'HIMAT, licenciés en 1993 par l'Institut colombien d'hydrologie, de météorologie et d'aménagement des terres (HIMAT), le comité constate que les renseignements fournis par les plaignants ne contiennent pas d'éléments permettant d'affirmer que cette question est liée à l'exercice de droits syndicaux. Dans ces conditions, il n'appartient pas au comité de se prononcer sur ces allégations.

155. Quant à la sentence, critiquée par le plaignant, qui refuse de réintégrer des dirigeants syndicaux du syndicat SINTRAMINOBRAS (Hernando Oviedo Polo, Fernando Leyva Zuleta et Omar Muoz Cabrera), licenciés fin octobre 1994 sans l'autorisation judiciaire prévue par la loi, le comité constate que le gouvernement n'a pas envoyé d'observations à ce sujet. Le comité invite instamment le gouvernement à répondre sans délai à cette allégation et à lui communiquer le texte des sentences prononcées à ce sujet.

Recommandations du comité

156. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Cas no 1964

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par le Syndicat des travailleurs de
l'industrie du verre et des matériaux analogues de Colombie (SINTRAVIDRICOL)

Allégations: ingérence et discrimination antisyndicales,
actes d'intimidation et non-respect de certaines clauses
de conventions collectives

157. Le comité a examiné ce cas à sa réunion de mars 1999 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 314e rapport, paragr. 97 à 113, approuvé par le Conseil d'administration à sa 274e session (mars 1999).]

158. Par la suite, le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations par des communications en date des 12 août et 3 septembre 1999. Dans une communication récente, en date du 2 octobre 1999, l'organisation plaignante a présenté de nouvelles allégations et certaines informations.

159. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

160. A sa réunion de mars 1999, lorsque le comité a examiné le présent cas, sont restées en instance plusieurs allégations d'ingérence et de discrimination antisyndicales, ainsi que le non-respect de certains clauses d'une convention collective par l'entreprise de cristallerie CONALVIDRIOS S.A. Concrètement, l'organisation plaignante avait allégué les faits suivants [voir 314e rapport, paragr. 100 à 102]:

161. Le comité a pris note des déclarations du gouvernement qui fait observer que l'organisation plaignante n'avait pas porté à la connaissance des autorités certaines de ces questions et que la législation prévoit des mécanismes et des recours administratifs et judiciaires en cas de violation de ses dispositions, y compris la possibilité pour les travailleurs licenciés, en dépit de leur immunité syndicale, d'intégrer un recours afin d'être réintégrés dans leur ancien emploi. De même, le gouvernement a précisé que le fait qu'un directeur de l'entreprise mentionnée ait antérieurement occupé une fonction au ministère du Travail n'est ni illégal ni contestable, bien que, après avoir eu connaissance de la plainte, les autorités aient porté ces allégations à l'attention de l'organe compétent. Le gouvernement a également fait savoir que la plainte concernant les droits de l'homme fera l'objet d'une enquête de la part du Bureau interinstitutionnel des droits de l'homme du ministère du Travail. [Voir 314e rapport, paragr. 111.]

162. Le comité a formulé la recommandation suivante [voir 314e rapport, paragr. 113]:

B. Réponse du gouvernement

163. Dans sa communication en date du 12 août 1999, le gouvernement indique qu'il réitère ces commentaires transmis au comité le 15 janvier 1999, car sur les faits précis contenus dans la plainte du SINTRAVIDRICOL, celui-ci ne s'est pas adressé aux bureaux du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Dans ces conditions, les informations envoyées par le gouvernement ne sont pas générales puisqu'elles se réfèrent à des faits graves connus du gouvernement lui-même. Le syndicat SINTRAVIDRICOL n'ayant toujours pas fait parvenir les informations qu'il a envoyées au comité, le gouvernement a demandé l'ouverture d'une enquête à ce sujet. Il signale cependant, en ce qui concerne les licenciements que, du fait de la séparation des trois pouvoirs, la question relève de la justice ordinaire du travail si une plainte est déposée et, en ce qui concerne les éléments de nature pénale, le procureur et le tribunal correctionnel sont seuls compétents.

164. Dans sa communication en date du 3 septembre 1999, le gouvernement réaffirme comme il l'a dit le 15 janvier 1999 qu'il a ordonné l'ouverture d'une enquête sur les faits dénoncés devant l'OIT, puisque ces derniers n'ont pas été portés à la connaissance du ministère du Travail. A cet égard, le gouvernement souhaite faire référence au rapport déposé le 9 août 1999 par le chef de la division de l'inspection et de la surveillance de la circonscription régionale du travail de Bogotá et de Cundinamarca dans lequel on peut lire: «Le 6 juillet 1999, un rapport a été envoyé à la direction technique du travail indiquant que la plainte déposée par le SINTRAVIDRICOL au Comité de la liberté syndicale de l'OIT a été classé à la demande de M. Argelio Vargas Rodríguez, représentant légal du syndicat». Le gouvernement estime que, l'organisation plaignante ayant renoncé à son action, le Comité de la liberté syndicale devrait considérer le présent cas comme terminé.

C. Nouvelles informations et allégations
de l'organisation plaignante

165. Dans sa communication en date du 2 octobre 1999, l'organisation plaignante présente de nouvelles allégations. Elle indique également qu'elle renonce à la plainte uniquement en ce qui concerne les aspects relatifs aux aides économiques et aux cotisation syndicales par affilié.

D. Conclusions du comité

166. Le comité note que l'organisation plaignante nie avoir renoncé à la plainte dans sa totalité et que son renoncement a trait uniquement aux aspects portant sur les aides économiques et les cotisations syndicales par affilié.

167. Dans ces conditions, notant que les autorités ont classé l'enquête ouverte du fait du présent cas sur la base d'une information erronée selon laquelle l'organisation plaignante aurait renoncé à sa plainte en totalité, le comité réitère sa demande de faire en sorte qu'une enquête détaillée soit menée au sujet de chacune des allégations formulées par l'organisation plaignante (sauf en ce qui concerne les aides économiques et les cotisations syndicales par affilié) et de l'en tenir informé sans délai.

168. Par ailleurs, le comité prie le gouvernement de lui faire parvenir sans délai ses observations sur les récentes nouvelles allégations contenues dans la communication de l'organisation plaignante en date du 2 octobre 1999.

Recommandations du comité

169. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver le présent rapport et en particulier les recommandations suivantes:

Cas no 1973

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
l'Association des cadres et techniciens
des entreprises de l'industrie du pétrole de Colombie (ADECO)

Allégations: favoritisme à l'égard d'une organisation
syndicale, violation du droit de négociation collective,
discrimination à l'encontre des membres d'une organisation,
ingérence patronale et pratiques antisyndicales

170. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de mars 1999. [Voir 314e rapport, paragr. 114 à 127.] Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées des 12 août et 3 septembre 1999.

171. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

172. Le comité observe que, dans le cadre du présent cas, l'organisation plaignante, l'Association des cadres et techniciens des entreprises de l'industrie du pétrole de Colombie (ADECO), avait allégué qu'au cours du processus de négociation collective le syndicat dénommé Union syndicale ouvrière (USO) et l'entreprise colombienne du pétrole (ECOPETROL) l'avaient exclue et avaient conclu une convention collective (dont elle contestait la légalité) qui s'appliquait également à ses affiliés, alors que l'effectif de l'autre syndicat (l'USO) n'était pas supérieur à 50 pour cent des travailleurs de l'entreprise (condition légale pour négocier au nom de tous les travailleurs). Selon l'organisation plaignante, il en était résulté que: 1) les affiliés de l'ADECO auraient perdu les droits acquis dont ils jouissaient en vertu d'un accord conclu par la direction d'ECOPETROL en 1997 (accord dont l'ADECO revendique la validité); 2) ils auraient fait l'objet d'une discrimination par rapport aux droits et prestations des autres travailleurs; 3) l'ADECO aurait perdu des garanties syndicales comme l'immunité syndicale, les congés syndicaux, etc.; enfin 4) ses affiliés auraient été obligés de payer des cotisations à l'USO. Par ailleurs, l'organisation plaignante avait fait observer que le ministère du Travail n'avait pas procédé au recensement syndical que l'ADECO avait demandé afin de déterminer la représentativité des deux syndicats opérant dans l'entreprise, et avait souligné que l'USO n'avait pas respecté un accord conclu avec l'ADECO qui garantissait à celle-ci non seulement la présentation conjointe d'un cahier de revendications lors des négociations, mais aussi la présence d'un négociateur de l'ADECO lors des négociations. Enfin, l'ADECO avait allégué qu'à l'époque où la convention collective avait été signée des représentants de l'entreprise auraient fait pression sur les travailleurs pour les amener à démissionner de leur organisation, ce qui avait entraîné des démissions massives de la part de ses affiliés. Dans ces conditions, le comité avait pris note du fait que: i) le gouvernement avait déclaré que le fonctionnaire compétent avait reçu instruction d'ouvrir immédiatement une enquête au sujet des allégations car l'organisation plaignante n'avait pas formulé de plainte auprès du ministère du Travail au sujet de plusieurs questions qu'elle soulevait dans le présent cas, et ii) l'ADECO s'était désistée le 8 octobre 1998 devant l'autorité compétente de sa demande de recensement syndical à ECOPETROL.

173. A cet égard, à sa session de mars 1999, le comité avait présenté les recommandations suivantes [voir 314e rapport, paragr. 128]:

B. Réponse du gouvernement

174. Dans ses communications en date des 12 août et 3 septembre 1999, le gouvernement déclare que la plupart des points qui font l'objet des allégations soumises au comité ont été étudiés et réglés dans la décision no 002967 du 9 décembre 1997 adoptée par le chef du Service de l'inspection et de la surveillance relevant de la Direction générale du travail et de la sécurité sociale de Santa Fe de Bogotá DC et Cundinamarca, ce qui fait apparaître l'importance du travail administratif effectué, et par conséquent toute l'attention que le gouvernement a accordée au cas en instance. Enfin, le gouvernement indique que la décision en question fait état de ce que l'organisation syndicale ADECO n'a soumis au Service de l'inspection et de la surveillance aucune plainte contre ECOPETROL ou contre l'organisation syndicale USO, qui aurait pu donner lieu à l'ouverture d'une enquête administrative du travail. Les allégations de non-conformité soumises à ce service par ledit syndicat ont été dûment traitées et réglées de manière entièrement conforme à la loi par l'autorité compétente en la matière.

C. Conclusions du comité

175. Le comité observe que, lors de son examen antérieur du cas, il avait prié le gouvernement de lui communiquer sans retard les résultats de l'enquête qui, selon le gouvernement, avait été ouverte au sujet des différents aspects de ce cas et qui devait couvrir toutes les allégations présentées par l'organisation plaignante (à savoir qu'au cours de la négociation collective le syndicat USO et l'entreprise ECOPETROL avaient exclu l'ADECO et conclu une convention collective dont il aurait résulté que: 1) les membres de l'ADECO auraient perdu les droits acquis dont ils jouissaient en vertu d'un accord conclu par l'administration d'ECOPETROL en 1997 - dont l'ADECO revendique la validité; 2) les membres de l'ADECO auraient fait l'objet d'une discrimination par rapport aux droits et prestations des autres travailleurs; 3) l'ADECO aurait perdu des garanties syndicales comme l'immunité syndicale, les congés syndicaux, etc.; 4) ses affiliés auraient été obligés de payer des cotisations à l'USO; enfin 5) à l'époque où la convention collective avait été signée, des représentants de l'entreprise auraient fait pression sur les travailleurs pour les amener à démissionner de leur organisation, ce qui avait entraîné des démissions massives de la part de ses affiliés).

176. A cet égard, le comité prend note du fait que, selon le gouvernement: 1) la plupart des allégations ont été étudiées et réglées par la décision no 002967 du 9 décembre 1997 adoptée par le chef du Service de l'inspection et de la surveillance de la Direction générale du travail et de la sécurité sociale de Santa Fe de Bogotá et Cundinamarca; et 2) cette décision fait apparaître que l'organisation syndicale ADECO n'a présenté contre l'entreprise ou contre l'organisation syndicale USO aucune plainte pouvant donner lieu à l'ouverture d'une enquête administrative, étant donné que les allégations de non-conformité présentées par l'ADECO ont été dûment traitées et réglées conformément à la loi.

177. Le comité constate avec un vif regret que les informations communiquées par le gouvernement ne comportent pas le texte des décisions administratives adoptées et qu'elles ne font pas apparaître que l'enquête ouverte par les autorités administratives a couvert toutes les allégations présentées par l'organisation plaignante. En tout état de cause, le comité relève que le gouvernement n'a pas non plus donné de précisions au sujet des résultats de l'enquête relative aux actes de discrimination dont auraient été victimes l'organisation syndicale ADECO et ses affiliés. Dans ces conditions, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre des mesures immédiates afin qu'une enquête soit ouverte au sujet de tous les faits allégués et de lui communiquer, sur la base des informations obtenues, des observations détaillées à cet égard ainsi que le texte de toutes les décisions administratives adoptées à ce jour.

178. Enfin, en ce qui concerne l'allégation selon laquelle le ministère du Travail n'aurait pas procédé au recensement syndical que l'ADECO avait demandé afin de déterminer la représentativité des deux syndicats opérant dans l'entreprise, le comité rappelle que, lors de sa session de mars 1999, il avait prié l'organisation plaignante de fournir des éclaircissements sur le désistement de sa demande de recensement syndical. A cet égard, ayant observé que l'organisation plaignante n'a pas communiqué les informations demandées, le comité ne poursuivra pas l'examen de cette allégation.

Recommandation du comité

179. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:

Cas no 2015

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement de la Colombie
présentée par
l'Association des agents publics du système de santé
des forces armées et de la police nationale (ASEMIL)

Allégations: non-respect d'une convention collective
- refus de reconnaître les statuts d'un syndicat
- suspension de la retenue à la source des cotisations syndicales
- agression contre des syndicalistes
- licenciements de dirigeants syndicaux
- réduction abusive du salaire pour jours de grève
- refus de négocier

180. La présente plainte figure dans une communication de l'Association des agents publics du système de santé des forces armées et de la police nationale (ASEMIL), datée du 23 février 1999. L'ASEMIL a envoyé des informations complémentaires par une communication datée du 16 avril 1999.

181. Le gouvernement a envoyé des observations partielles par une communication datée du 15 septembre 1999.

182. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

183. Dans sa communication du 23 février 1999, l'Association des agents publics du système de santé des forces armées et de la police nationale (ASEMIL) précise qu'elle regroupe les travailleurs du système de santé des forces armées et de la police nationale. Elle ajoute que, le 7 mai 1997, le ministère de la Défense et les représentants de l'ASEMIL ont signé un accord contenant des dispositions sur la stabilité, l'absence de représailles, les salaires, le droit d'association et prévoyant la création d'une commission de suivi de cet accord. La plupart des dispositions de cet accord n'ont pas été respectées par les représentants du gouvernement: non-alignement des salaires, atteintes au droit d'association et refus de congés syndicaux.

184. L'organisation plaignante indique que, le 20 avril 1998, le vice-ministre de la Défense de l'époque a annoncé le licenciement de la direction du syndicat et, autre acte d'ingérence, a décidé de ne pas reconnaître les nouveaux statuts de l'association (le ministère du Travail a désapprouvé cette décision) et a cessé de retenir à la source les cotisations syndicales des membres, plaçant ainsi l'organisation dans une situation économique difficile. Selon l'ASEMIL, l'administration a recommencé à retenir les cotisations sur les salaires mais décline toute responsabilité quant aux sommes qui n'ont pas été retenues.

185. Par ailleurs, l'organisation plaignante affirme qu'en raison du non-respect de l'accord susmentionné et de la réduction des salaires elle a organisé, à partir du début du mois d'avril 1998, une série d'actions de protestation au niveau national et a notamment adressé des communications à diverses autorités, ce qui a entraîné un harcèlement incessant des syndicalistes et des dirigeants syndicaux: les lieux de travail ont été militarisés à partir du 1er avril; les personnes qui avaient participé aux manifestations ont été la cible d'agressions verbales; les syndicalistes ont été menacés de procédures disciplinaires pour leur activité syndicale légitime; on a distribué et affiché publiquement des écrits anonymes qui diffamaient les militants syndicaux et appelaient l'opinion publique à s'en prendre à eux, indiquant l'adresse de leur résidence et de leur cabinet de consultation, données auxquelles seules l'administration des hôpitaux et la police ont accès. Cette action a revêtu un caractère particulièrement grave à Cartagène.

186. Concrètement, l'ASEMIL affirme que les 20 et 21 mai une protestation nationale a été organisée, qui a revêtu une importance particulière à l'hôpital naval de Cartagène et à l'hôpital militaire central de Bogota. Le gouvernement a réagi immédiatement en envoyant des soldats en armes dans ces établissements (y compris dans les salles d'opérations), et les gaz lacrymogènes ont été utilisés de façon aveugle, ce dont ont souffert non seulement les manifestants mais aussi les patients hospitalisés. L'ASEMIL souligne que le mouvement n'a eu aucune incidence sur le fonctionnement des services essentiels et s'est limité aux activités strictement administratives et aux services de santé dans lesquels la vie ou l'intégrité physique des patients n'était aucunement en jeu.

187. D'après l'organisation plaignante, le Directeur de l'hôpital militaire central a demandé au ministère du Travail de déclarer illégale l'action du syndicat qu'il a qualifiée de «grève ou arrêt de travail», de l'autoriser à licencier les travailleurs ayant participé au mouvement et à retirer l'immunité syndicale aux personnes qui en bénéficiaient et de lui laisser toute latitude pour «déplacer toutes les personnes qui continueraient à faire grève pour quelque motif que ce soit». La direction de l'hôpital naval de Cartagène a formulé les mêmes demandes.

188. L'ASEMIL indique que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a, par ses décisions 1293 et 1320 de 1998, déclaré illégales les grèves organisées à l'hôpital militaire central et à l'hôpital naval de Cartagène mais n'a pas accédé aux autres demandes, c'est-à-dire n'a pas autorisé les licenciements. D'après l'organisation plaignante, le ministère n'a pas pris les décisions susmentionnées dans le respect des formes régulières et n'a pas tenu compte des procès-verbaux qu'avaient dressés ses propres inspecteurs et d'où il ressort que les services essentiels, notamment le service des urgences, et les services de cardiologie et d'oncologie ont fonctionné normalement. Il n'a pas non plus tenu compte du fait que l'armée a empêché les travailleurs d'accéder à certains services.

189. L'organisation plaignante ajoute que, durant les activités syndicales qui ont été menées les 20 et 21 mai et qui se sont poursuivies les jours et les semaines suivants, d'autres faits graves se sont produits, qui sont résumés ci-après: i) la militarisation des lieux de travail a été maintenue; les soldats en armes ont, par leur présence, perturbé la tranquillité des patients ainsi que le travail des personnes qui s'occupaient des services essentiels; ii) le 22 mai au matin, des soldats de l'infanterie de marine ont détruit des affiches faisant allusion au mouvement de protestation (mené dans les bâtiments de l'hôpital militaire central) et ont agressé verbalement et physiquement quelques syndicalistes; et iii) des syndicalistes qui se trouvaient sous une tente aux abords de l'hôpital militaire central ainsi que ceux qui ont organisé des défilés de protestation dans l'enceinte de l'hôpital ont été l'objet de harcèlement. La police militaire et les autres forces qui participaient à ces actions de harcèlement ont utilisé aveuglément des canons à eau, des matraques et des gaz lacrymogènes non seulement contre les syndicalistes mais aussi contre les visiteurs, et ce sans la moindre considération pour les patients, qui ont eu à souffrir de cette attitude. Au cours de ces actions, les syndicalistes suivants ont été blessés: Gloria Arias Arias, Angela Rocío Ramírez, José Noé Montenegro Sánchez, Ofelia González Pulido, Luz Mary Tusso Beltrán et Luz Casteñeda Orjuela. Au total, 42 syndicalistes ont été blessés avec pour conséquence un total de 100 jours d'arrêt pour incapacité de travail.

190. L'organisation plaignante affirme par ailleurs que tous les membres du comité directeur de l'ASEMIL ont été licenciés et se sont vu interdire l'accès aux bâtiments afin de les isoler des membres de base. (L'organisation plaignante donne les noms et les fonctions des dirigeants syndicaux.)

191. Enfin, l'organisation plaignante indique qu'en licenciant des dirigeants syndicaux et des syndicalistes le gouvernement a violé les conventions nos 87 et 98 de l'OIT et 1) que les décisions par lesquelles le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a déclaré illégal le mouvement de protestation sont à l'origine du licenciement des membres de l'ASEMIL; 2) qu'à l'hôpital naval de Cartagène on a retiré un mois de salaire à plus de 60 syndicalistes bien que, comme l'indique le ministère du Travail dans sa décision, il n'y a eu que deux jours de grève; 3) qu'à l'hôpital militaire central on a procédé à des retenues sur salaire pour près de 200 syndicalistes, dont certains ont perdu jusqu'à une semaine de salaire, une telle mesure étant incompatible avec la décision du ministère; 4) que de nombreux syndicalistes touchés par ces mesures n'avaient pas pris part à la grève précisément parce qu'ils travaillaient dans des services essentiels; et 5) que les actes d'ingérence décrits plus haut, ainsi que les pressions et les menaces ont amené de nombreuses personnes à démissionner du syndicat.

192. Dans sa communication du 16 avril 1999, l'ASEMIL affirme que le ministre de la Défense nationale continue de refuser d'engager des négociations sur les revendications du personnel des 144 dispensaires du pays, qui comptent plus de 1 000 travailleurs représentés par l'ASEMIL, au motif qu'il n'y est pas tenu vu qu'il s'agit d'agents publics. Or la convention no 98 de l'OIT et la loi no 411 de 1997 portant approbation de la convention no 151 de l'OIT disposent expressément que cette catégorie de travailleurs est titulaire du droit à la négociation.

193. S'agissant du licenciement des 14 membres du comité directeur national et du sous-comité de Cartagène, l'ASEMIL indique que la Cour constitutionnelle a retenu trois des 14 recours qu'elle avait formés et, comme on pouvait s'y attendre, s'est prononcée en faveur des travailleurs et a ordonné leur réintégration immédiate. Or le ministre de la Défense nationale et le directeur de l'hôpital militaire central ont refusé d'envisager la réintégration des dirigeants syndicaux restants, ajoutant ainsi la violation du droit fondamental à l'égalité aux nombreux actes arbitraires déjà commis.

194. L'organisation plaignante affirme aussi qu'elle a été déclarée «objectif militaire» par des groupes armés et qu'à ce jour aucune mesure efficace n'a été prise pour protéger les personnes menacées. L'ASEMIL ajoute que, le 22 février 1999, Mme María Clara Baquero, présidente de ASODEFENSA, une organisation syndicale d'industrie au sein du ministère de la Défense, a été victime d'un attentat au cours duquel elle a été blessée. (Cette allégation est examinée dans le cadre d'une autre plainte contre le gouvernement de la Colombie - cas no 1787.)

B. Réponse du gouvernement

195. Dans une communication datée du 15 septembre 1999, le gouvernement déclare que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a, par sa décision no 000076 du 22 janvier 1999, décidé de ne pas se prononcer sur la prétendue violation de l'article 400 du Code du travail (concernant la retenue à la source des cotisations syndicales), et de laisser aux parties toute liberté pour saisir la justice ordinaire. Conformément à l'arrêté du 26 juillet 1999, la décision susmentionnée est devenue exécutoire. Par conséquent, les droits syndicaux en question relèvent exclusivement de la justice.

196. S'agissant des cotisations syndicales, la résolution no 000076 du 22 janvier 1999 dispose ce qui suit: a) s'abstenir de statuer sur les accusations formulées par l'ASEMIL à l'encontre du ministère de la Défense nationale, sous-système de santé des forces militaires et de l'hôpital militaire central, parce que, l'Institut national de la santé ayant disparu, il n'a pas été possible de déterminer si l'obligation incombait désormais au sous-système de santé des forces militaires, attendu que la réforme des statuts de l'ASEMIL a été notifiée en mars 1998; b) les entités citées n'ont pas porté atteinte au droit d'association en exigeant des dirigeants de l'ASEMIL qu'ils respectent leurs règlements pour accéder à leur installation. Le 25 février 1999, cette décision est devenue exécutoire; c) pour ce qui est du non-respect de l'obligation d'aligner les salaires, la plainte a été transmise à l'hôpital central qui déclare que cette obligation a bien été respectée, mais qu'il n'a pas été possible d'appliquer cette mesure aux personnes travaillant dans les services d'appui et les services généraux, dont on ne peut situer les fonctions conformément aux critères figurant dans le décret no 194 du 30 janvier 1997, et d) s'agissant du refus de négocier, au moyen de la décision no 2942 du 21 décembre 1998, il a été déclaré qu'il n'y a pas eu refus de négocier, décision qui a été confirmée par la décision no 001011 du 10 mai 1999.

197. En conclusion, le gouvernement affirme que tous les problèmes signalés par l'organisation syndicale ont été résolus conformément à la législation du travail colombienne, sauf le problème de l'alignement des salaires à propos duquel aucune décision n'a encore été prise. Le prochain rapport ne devrait donc traiter que de ce dernier problème.

C. Conclusions du comité

198. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante affirme qu'à partir du mois d'avril 1998 elle a lancé un mouvement de protestation au niveau national à cause du non-respect d'une convention collective et de la réduction des salaires, ce qui a entraîné un harcèlement continu de ses dirigeants et de ses membres. Concrètement, l'organisation plaignante affirme: 1) que le ministère de la Défense n'a pas respecté la convention qu'il a signée avec l'ASEMIL le 7 mai 1997 et qui contient des dispositions sur la stabilité de l'emploi, l'absence de représailles, les salaires, etc.; 2) que le ministère de la Défense a refusé de reconnaître les nouveaux statuts de l'ASEMIL (l'organisation plaignante précise que le ministère du Travail a désapprouvé cette décision); 3) que la retenue des cotisations syndicales sur le salaire a été temporairement suspendue; 4) que l'hôpital naval de Cartagène et l'hôpital militaire central de Bogota ont été occupés par des soldats en armes pendant les journées nationales de protestation des 20 et 21 mai 1998; 5) que des affiches se rapportant au mouvement de protestation à l'hôpital militaire central de Bogota ont été détruites, que des syndicalistes ont été molestés et que 42 d'entre eux ont été blessés à la suite de ces agressions (l'organisation plaignante communique les noms de six d'entre eux, donne le détail des blessures infligées et le degré d'incapacité qui en est résulté); 6) que les membres du comité directeur de l'organisation plaignante (celle-ci communique les noms et les fonctions de 14 dirigeants syndicaux) ont été licenciés après que les grèves organisées à l'hôpital militaire central et à l'hôpital naval de Cartagène eurent été déclarées illégales (la Cour constitutionnelle a ordonné la réintégration de trois dirigeants licenciés); 7) que l'employeur a retenu un mois de salaire à plus de 60 syndicalistes à l'hôpital naval de Cartagène et une semaine de salaire à près de 200 syndicalistes à l'hôpital militaire central, alors que le mouvement de grève n'avait duré que deux jours, et 8) que les autorités du ministère de la Défense refusent d'engager des négociations sur les revendications des personnes qui travaillent dans les dispensaires du pays et qui sont plus d'un millier.

199. En ce qui concerne l'allégation relative à la suspension de la retenue à la source des cotisations syndicales, le comité note que le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a décidé de ne pas se prononcer sur la prétendue violation des dispositions de l'article 400 du Code du travail relatif à la retenue des cotisations syndicales, étant donné que, l'Institut national de la santé ayant disparu, il n'a pas été possible de déterminer si l'obligation incombait désormais au sous-système de santé des forces armées et qu'il a été laissé aux parties toute latitude pour saisir la justice. A cet égard, le comité note que les cotisations syndicales des membres de l'organisation plaignante sont de nouveau retenues à la source et demande au gouvernement de prendre des mesures pour qu'à l'avenir l'employeur ne décide pas unilatéralement de suspendre la retenue des cotisations syndicales des personnes affiliées à l'ASEMIL.

200. Enfin, le comité note que le gouvernement mentionne une décision ministérielle dans laquelle il est affirmé qu'il n'y a pas eu refus de négocier. Dans ce contexte, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas communiqué ses observations sur les autres allégations présentées et que, lorsqu'il l'a fait, les observations ne sont pas assez précises (par exemple, le gouvernement n'a pas joint à ses réponses le texte des décisions qu'il mentionne et ne précise pas à quelle allégation concrète se rapporte chacune de ses réponses). Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement d'envoyer sans délai ses observations sur la totalité des allégations auxquelles il n'a pas répondu.

Recommandations du comité

201. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 January 2000.