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GB.276/7/2
276e session
Genève, novembre 1999


SEPTIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

319e rapport du Comité de la liberté syndicale

 

III. Plainte concernant la non-application par la Colombie
de la convention (n
o 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, et de la convention (n
o 98) sur le droit
d'organisation et de négociation collective, 1949,
présentée par plusieurs délégués à la 86
e session (1998)
de la Conférence au titre de l'article 26
de la Constitution de l'OIT

A. Introduction

202. Lors de la 86e session de la Conférence, le Directeur général a reçu une communication datée du 17 juin 1998, signée par M. W. Brett, délégué des travailleurs du Royaume-Uni et Président du groupe des travailleurs, présentée en son nom propre et au nom des délégués des travailleurs ci-après désignés: M. C. Agyei (Ghana), M. A. Alvis Fernández (Colombie), M. K. Ahmed (Pakistan), M. L. Basnet (Népal), M. M. Blondel (France), M. U. Edström (Suède), Mme U. Engelen-Kefer (Allemagne), M. R. Falbr (République tchèque), M. S. Ito (Japon), M. Y. Kara (Israël), M. I. Mayaki (Niger), M. J. Miranda de Oliveira (Brésil), M. B. Mpangala (République-Unie de Tanzanie), Mme P. O'Donovan (Irlande), M. J.C. Parrot (Canada), M. W. Peirens (Belgique), M. F. Ramírez León (Venezuela), M. Z. Rampak (Malaisie), M. I. Sahbani (Tunisie), M. A. Sánchez Madariaga (Mexique), M. M. Shmakov (Fédération de Russie), M. G. Sibanda (Zimbabwe), M. L. Trotman (Barbade), M. T. Wojcik (Pologne) et M. J. Zellhoefer (Etats-Unis), par laquelle ils déposaient, au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT, une plainte contre le gouvernement de la Colombie pour n'avoir pas adopté les mesures propres à assurer d'une manière satisfaisante l'exécution de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Le texte de ladite communication et des documents qui l'accompagnent est reproduit en annexe. A sa 272e session, le Conseil d'administration a été informé par le Directeur général de la réception de cette plainte.

203. L'article 26 de la Constitution de l'OIT dispose que:

204. La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ont été ratifiées par la Colombie le 16 novembre 1976 et sont par conséquent entrées en vigueur pour ce pays à partir du 16 novembre 1977. A la date du dépôt de leur plainte, tous les plaignants étaient délégués des travailleurs de leur pays respectif à la 86e session de la Conférence. Ils étaient par conséquent habilités, en vertu du paragraphe 4 de l'article 26 de la Constitution, à déposer une plainte contre la Colombie si, à leur avis, le gouvernement de ce pays n'avait pas adopté des mesures propres à assurer d'une manière satisfaisante l'exécution desdites conventions.

205. Les plaignants ont demandé que leur plainte soit renvoyée devant une commission d'enquête, conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l'article 26 de la Constitution. Il appartient au Conseil d'administration de se prononcer sur cette demande.

B. Texte de la plainte présentée au titre de l'article 26
de la Constitution de l'OIT

206. On trouvera ci-après le texte de la plainte et des annexes qui en font partie.

(Traduction)

Genève, le 17 juin 1998

W. Brett,
Président du groupe des travailleurs,
86e session de la Conférence internationale du Travail.

M. Michel Hansenne
Directeur général du Bureau international du Travail
Genève

Genève, le 12 juin 1998

Monsieur le Directeur général,

Nous, soussignés, délégués des travailleurs à la 86e session de la Conférence internationale du Travail, avons l'honneur de déposer, au titre de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, une plainte contre le gouvernement de la Colombie pour ne pas avoir adopté les mesures propres à assurer d'une manière satisfaisante l'exécution de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

La Colombie est Membre de l'OIT depuis 1919 et, partant, a depuis cette date l'obligation de respecter les dispositions de la Constitution de l'Organisation. Elle est en outre partie aux conventions nos 87 et 98 qu'elle a ratifiées en 1976.

La plainte repose sur les faits suivants:

PREMIÈREMENT: pour ce qui a trait à la convention no 87 de l'OIT
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical

Les cas portés devant le Comité de la liberté syndicale

Depuis 1988 jusqu'à ce jour, le Comité de la liberté syndicale a été saisi de 26 cas alléguant des violations de la convention no 87. Certains cas comportent également des violations de la convention no 98.

Parmi les violations de la liberté syndicale portées à la connaissance du comité, nombreux sont les cas où celles-ci prennent la forme de violences perpétrées à l'encontre de syndicalistes qui ont porté atteinte à leur vie, à leur intégrité, à leur liberté et à leur droit de ne pas être déplacés.

En 1987, le comité a examiné le cas no 1343 et, dans ses conclusions, il a fait observer au gouvernement de la Colombie que les droits syndicaux ne pouvaient s'exercer normalement que dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et «... dans un climat exempt de violence, de pressions, de craintes et de menaces de tous ordres»(1) .

Des allégations de violences à l'encontre de syndicalistes ont également été formulées dans les cas nos 1434, 1477, 1761 et 1787.

En 1989, dans son 265e rapport, le comité a signalé que «...sans aucun doute, il se trouvait là devant l'un des cas les plus graves qui lui eût été soumis en ce qui concerne le respect du droit à la vie ... et que la situation dramatique de violence à laquelle était confrontée la Colombie empêchait le plein exercice d'activités syndicales».

La violence en Colombie s'est traduite, pour la seule année 1997, par la mort de 156 syndicalistes et dirigeants syndicaux, par la disparition forcée de dix autres, par le déplacement forcé de 342 militants et dirigeants syndicaux, par l'emprisonnement de neuf autres ainsi que par neuf attentats à leur vie. Les premiers mois de l'année 1998 offre un panorama non moins désolant: le 27 février, à Medellín, Jesús María Valle Jaramillo, président du Comité des droits de l'homme de cette ville, bien connu pour avoir défendu des militants et des dirigeants syndicaux, a été assassiné dans son étude d'avocat; le 18 avril, le juriste Eduardo Umaña Mendoza, qui avait assuré la défense de plusieurs syndicalistes du Syndicat ouvrier actuellement poursuivis par la justice dite sans visage, a été à son tour assassiné à son domicile de Bogota. Deux jours plus tôt, María Arango, ancienne militante, avait elle aussi été assassinée chez elle par des tueurs à gages; au cours des trois derniers mois, plus de dix massacres ont été perpétrés, et dans la plupart des cas, les victimes étaient des travailleurs agricoles.

Le Comité de la liberté syndicale, dans son 309e rapport correspondant à la première réunion de l'année en cours, a souligné que le cas de la Colombie (no 1787) était, en matière de liberté syndicale, l'un des trois cas les plus graves dans le monde.

Tout ce qui précède démontre que le gouvernement de la Colombie n'a en pratique pris aucune des mesures nécessaires et appropriées pour garantir le libre exercice du droit d'organisation et a laissé se perpétuer en toute impunité les crimes commis contre les syndicalistes et les dirigeants syndicaux, et que les menaces, les déplacement forcés, les assassinats, les disparitions et les autres violations dont ils font l'objet ont continué, rendant impossible le libre exercice du droit d'association. Ce faisant, le gouvernement de la Colombie a failli à son devoir de protéger et de garantir les droits syndicaux.

Les observations de la Commission d'experts pour
l'application des conventions et recommandations

De même, depuis plus de dix ans maintenant, la commission d'experts se préoccupe de l'application de la convention no 87 et a formulé à maintes reprises des observations et des demandes directes visant à obtenir du gouvernement colombien qu'il mette la législation nationale de son pays en conformité avec cet instrument.

En 1987, la commission d'experts a fait savoir qu'elle «saurait gré au gouvernement colombien d'indiquer dans son prochain rapport les mesures qu'il pourrait prendre pour mettre sa législation en conformité avec la convention, à la lumière des commentaires formulés».

En 1989, la commission d'experts a estimé que «la législation [colombienne] viole les dispositions de la convention sur de nombreux points».

En 1990, la commission a pris note «des assurances données par le gouvernement dans son dernier rapport concernant la création d'une commission spéciale chargée d'examiner l'ensemble de la législation du travail actuellement dépassée à la lumière de ses commentaires afin d'harmoniser la législation avec les conventions de l'OIT»(2) .

En 1991 et 1992, les travailleurs et la commission d'experts se sont félicités de la promulgation de la nouvelle Constitution de la République de Colombie qui prévoit, à son article 53, l'incorporation dans le droit interne des conventions du travail dûment ratifiées et qui établit, à son article 93, la primauté des instruments de droit international - non susceptibles de limitation ou de suspension dans les situations d'exception - sur le droit interne. L'espoir qu'avait fait naître cette nouvelle Constitution s'est évanoui devant la réalité puisque le gouvernement n'a pas pris les mesures nécessaires pour adapter la législation colombienne aux conventions.

L'absence de conformité législative entre le droit national et le droit international se maintient en Colombie en dépit du mandat constitutionnel. Les projets de loi que le gouvernement a élaborés - avec le concours notamment de missions techniques de l'OIT - ont parfois été abandonnés en cours de processus législatif, sans que le gouvernement ait usé des instruments prévus par la Constitution colombienne pour les promouvoir. D'autres projets de loi n'ont pas même été soumis au Congrès, sept ans après l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution; c'est le cas par exemple du projet de loi portant définition des services essentiels en relation avec le droit de grève.

Dans le rapport qu'elle a soumis à la Conférence, à sa 86e session, la commission d'experts prend note de ce qui s'est passé avec le projet de réforme du Code substantif du travail qui avait été préparé par la mission de contacts directs du BIT en 1996 et souligne «... avec insistance la nécessité de modifier ou supprimer, dans les plus brefs délais, les dispositions mentionnées du Code substantif du travail afin de mettre la législation en conformité avec la convention»(3) .

Comme on peut le constater, il est facile de conclure à une violation systématique de la convention no 87 de l'OIT.

DEUXIÈMEMENT: pour ce qui a trait à la convention no 98
sur le droit d'organisation et de négociation collective

Les cas portés devant le Comité de la liberté syndicale

Comme il a été signalé dans la première partie, sur les vingt-six cas examinés depuis 1987 par le comité, nombreux sont ceux qui font état de violations de la convention no 87, et c'est la raison pour laquelle nous nous bornerons à faire référence à deux cas parmi les plus récemment traités. Il s'agit du cas no 1916 et du cas no 1925. Dans le premier d'entre eux, le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire réintégrer à leurs postes de travail les 209 travailleurs licenciés pour avoir participé à une grève dans une entreprise publique de caractère municipal, et lui demande aussi de prendre des mesures pour qu'à l'avenir ce soit un organe indépendant et non l'autorité administrative qui se prononce sur la légalité des grèves. Bien qu'il ait eu connaissance de cette décision depuis le début du mois de mars de l'année en cours, le gouvernement s'est néanmoins abstenu de prendre les dispositions nécessaires pour lui donner effet, prenant prétexte de l'autonomie des municipalités.

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement ignore des recommandations de cette nature, ainsi que la commission d'enquête pourra le démontrer aisément.

Dans le cas no 1925, le gouvernement a adopté la même attitude: il n'a rien fait pour donner suite aux recommandations du comité. Les «statuts particuliers applicables aux travailleurs non syndiqués» qui offriraient de meilleures conditions aux travailleurs non couverts par une convention collective, sont un des moyens utilisés en Colombie pour détruire de nombreuses organisations syndicales. Il est du devoir du gouvernement de procéder aux modifications légales nécessaires pour empêcher de tels comportements. De même, il se doit de prendre les mesures administratives nécessaires pour sanctionner les employeurs qui portent atteinte au droit de négociation collective.

Les deux cas qui précèdent démontrent clairement que le gouvernement colombien ne s'acquitte nullement de son obligation de protéger et de garantir les droits à la liberté syndicale et à la négociation collective.

Les observations de la commission d'experts

Ainsi qu'il ressort du dernier rapport préparé par la commission d'experts en vue de la 86e session de la Conférence, la commission se préoccupe «depuis plusieurs années» des disparités qui existent entre le droit interne et la convention no 98 et insiste sur la nécessité de procéder aux adaptations nécessaires. Les points sur lesquels elle revient le plus fréquemment dans ses observations et ses demandes directes sont le droit à la négociation collective des agents de l'Etat, le droit des fédérations et des confédérations syndicales de négocier collectivement, de décider une grève et le droit de grève dans les services publics qui ne peuvent être qualifiés d'essentiels au sens strict du terme.

En dépit des efforts incessants déployés par la commission d'experts pour obtenir du gouvernement colombien qu'il respecte la convention et procède aux réformes nécessaires, la même situation prévaut aujourd'hui qu'il y a dix ans. Le gouvernement ne s'acquitte en aucune manière de l'obligation qu'il a contractée de respecter la convention no 98.

TROISIÈMEMENT: les débats à la Conférence

Sans vouloir s'appesantir trop longuement sur la question, il convient de rappeler de quelle manière, depuis plus de dix ans, la Commission de l'application des normes de la Conférence invite le gouvernement de la Colombie à discuter des difficultés rencontrées dans l'application des conventions nos 87 et 98 et lui a consacré un paragraphe spécial à deux reprises, la plus récente remontant à 1990. En dépit de tous leurs efforts, la Conférence et la commission d'experts ne sont pas parvenues à obtenir des gouvernements successifs qu'ils fassent droit aux requêtes de la communauté internationale dans les domaines visés par la présente plainte.

Pour témoigner de la volonté de l'OIT de contribuer à l'amélioration de la situation en matière de liberté syndicale, on notera que trois missions de contacts directs ont été organisées au cours des dix dernières années, lesquelles ont obtenu de la part du gouvernement des engagements qu'il n'a jamais pleinement honorés.

Fondement juridique et objet de la demande

Les soussignés déclarent que la présente plainte se fonde sur le paragraphe 4 de l'article 26 de la Constitution et qu'ils agissent en qualité de délégués à la 86e session de la Conférence.

Pour ce qui est du gouvernement de la Colombie qui ignore les recommandations du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT et de la commission d'experts, ils demandent que la présente plainte soit étudiée par une commission d'enquête qui rendra son rapport dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. Ils demandent en outre que les questions pendantes devant le Comité de la liberté syndicale et la commission d'experts soient également traitées par la commission d'enquête.

En annexe, figure le rapport présenté par les travailleurs colombiens à la 86e session de la Conférence internationale du Travail qui doit être considéré comme partie intégrante de la plainte.

[Cette annexe est reproduite ci-dessous.]

Rapport des centrales syndicales à la 86e session de la Conférence
internationale du Travail (envoyé en annexe à la plainte
présentée au titre de l'article 26 de la Constitution)

Introduction

La délégation syndicale de la Colombie à la 86e session de la Conférence internationale du Travail, qui se composait de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), de la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC) et de la Confédération générale des travailleurs démocrates (CGTD), a décidé de saisir la Conférence internationale du Travail, en cours de session, d'un rapport consacré à l'exercice des droits à la liberté syndicale en Colombie, afin de démontrer l'absence de volonté politique de l'Etat colombien et la démission des gouvernements successifs face aux obligations contractées par la Colombie, en sa qualité de Membre de l'Organisation internationale du Travail et d'Etat partie aux conventions nos 87 et 98. Depuis de longues années, les organes de contrôle de l'Organisation demandent au gouvernement des mesures concrètes, et les représentants gouvernementaux à la Conférence ont réitéré l'engagement de leur gouvernement d'agir en conséquence, or cet engagement est resté lettre morte.

Une des questions fondamentales abordées dans ce rapport est celle de l'impunité dont jouissent des personnes qui se rendent coupables de violations à l'égard des droits des syndicalistes et des dirigeants syndicaux. Les actes de violence perpétrés à l'encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes doivent sans nul doute être considérés comme le principal obstacle à la liberté syndicale en Colombie, violence aggravée par une impunité de plus en plus flagrante et l'absence de toute volonté politique d'y mettre un terme.

En 1997, le mouvement syndical colombien a commémoré tristement dix années de calvaire. L'année 1987 a marqué le début d'une escalade d'assassinats, de disparitions, de tortures et de persécutions perpétrés à l'encontre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux. C'est à ces tristes pratiques que la Colombie doit le titre de pays le plus dangereux en ce qui concerne l'exercice des droits fondamentaux à la liberté syndicale et à la négociation collective.

Ce sont des agents de l'Etat, des paramilitaires et la guérilla qui sont responsables des actes de violence commis à l'encontre du syndicalisme. Aujourd'hui, en 1998, on constate que la situation, loin de s'être améliorée, s'est gravement détériorée.

L'intolérance des acteurs d'un long conflit armé porte atteinte à la société dans son ensemble. Le simple exercice du droit de diriger une organisation de travailleurs ou de devenir militant syndical est considéré comme subversif par certains serviteurs de l'Etat ou paramilitaires qui voient dans le syndicalisme un allié de l'insurrection, d'autant plus que certaines forces de la guérilla poursuivent d'anciens sympathisants qui ont opté pour des tendances politiques différentes, parce qu'ils les considèrent comme des «traîtres».

Il en ressort que, pour être complexe, le panorama n'en est pas moins clair. Il ne fait aucun doute, à nos yeux, que si la volonté politique existait, il serait aisé d'identifier les «cerveaux» qui sont à l'origine des crimes dénoncés au cours de ces années devant les organes de contrôle de l'Organisation internationale du Travail et devant la Conférence internationale du Travail, instance suprême de l'Organisation.

Certains des délégués qui se trouvent aujourd'hui dans cette enceinte ont été la cible de menaces pour avoir simplement exercé une activité syndicale. Nous revendiquons notre droit de rendre compte de la situation, en tant que témoins directs de la réalité que vit la Colombie dans ce domaine.

L'autre point sur lequel insiste le rapport concerne la façon dont les gouvernements de la Colombie ont fait la sourde oreille aux demandes formulées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recomman-dations en vue d'adapter le droit interne et la pratique nationale aux grands principes établis par les conventions nos 87 et 98.

La Colombie: sa situation géographique et ses caractéristiques

La Colombie est située à l'extrémité nord-ouest de l'Amérique du Sud: les pays limitrophes sont le Venezuela, le Brésil, le Pérou, l'Equateur et le Panama. Elle est bordée au nord, par l'océan Atlantique et à l'ouest, par l'océan Pacifique. Aux termes de la Constitution adoptée en 1991, la Colombie est un Etat social de droit organisé sous la forme d'une République unitaire(4) . Les pouvoirs publics se trouvent répartis en trois branches: le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif.

Avec une superficie de 1 141 748 km2, la Colombie compte une population de près de 35 millions d'habitants. Le taux de syndicalisation y est inférieur à 8 pour cent de la population active.

Ainsi que nous l'avons déjà fait observer au cours de l'année passée, le fait que le rapport des centrales syndicales se concentre sur la liberté syndicale ne signifie pas que le gouvernement colombien applique pleinement les autres conventions qu'il a ratifiées. Nous avons décidé d'insister sur les violations de la liberté syndicale parce que si l'exercice de ce droit n'est pas garanti, nous sommes convaincus que les autres droits des travailleurs ne peuvent être pleinement défendus par leurs représentants.

Au cours de la dernière décennie, en Colombie, il a été fait usage de la violence pour poursuivre les syndicalistes et les dirigeants syndicaux en raison de leurs activités, comme l'ont déjà constaté les organes de contrôle de l'OIT et d'autres organismes de la communauté internationale. La législation du travail colombienne, adoptée avant la promulgation de la nouvelle Constitution de 1991, est restrictive en ce qui concerne l'exercice des droits accordés à la population, et le système judiciaire n'est pas adapté pour remédier à l'impunité dont jouit quiconque se livre à des actes de violence contre ceux qui exercent leurs droits syndicaux et contre la population en général.

Un rapport différent: la situation des dirigeants syndicaux
et des syndicalistes continue de se dégrader
et le gouvernement reste impassible

Le rapport que nous présentons aujourd'hui diffère de ceux que les centrales syndicales avaient porté à l'attention de la Conférence internationale du Travail, lors de ses dernières sessions, en ce qu'il s'abstient de présenter une description détaillée des événements survenus depuis la dernière session. Il ne nous paraît pas utile de reprendre le récit détaillé des tragiques événements qui, en Colombie, entravent le plein exercice de la liberté syndicale, car une telle démarche n'a plus de sens lorsque l'Etat colombien, par delà le gouvernement en place, ne manifeste aucun désir de surmonter les divergences qui existent entre la pratique et les obligations qu'il a contractées au niveau international dans ce domaine, ni aucune volonté d'adapter le droit interne aux grands principes consacrés par les conventions nos 87 et 98, en dépit des demandes instantes de l'OIT et de la communauté internationale en général.

Il n'est nullement exagéré d'affirmer que les représentants du gouvernement colombien se sont appliqués pendant plus de dix ans à tromper la communauté internationale, en prenant des engagements qu'ils n'ont ensuite pas honorés et en réitérant année après année leurs promesses jamais tenues.

Cette année, nous souhaitons attirer l'attention de la Conférence internationale du Travail sur les aspects les plus graves de la situation complexe que nous dénonçons en ce qui concerne la violation de la liberté syndicale en Colombie. Il s'agit:

A cet effet, nous nous efforcerons de récapituler les demandes et les initiatives prises par l'OIT au cours des dix dernières années, et nous montrerons en parallèle quelles ont été les mesures prises par le gouvernement colombien.

Colombie: une longue histoire d'impunité et d'outrage à l'OIT

Depuis 1987, plus de 2 000 syndicalistes et dirigeants syndicaux sont morts assassinés. Au cours de la seule année 1997, 156 d'entre eux ont été assassinés, neuf ont été victimes d'attentats, neuf ont été emprisonnés, 342 ont fait l'objet de déplacements forcés, dix ont disparu, et des cas de tortures ont été signalés(5) .

Pour préparer ce rapport, nous avons procédé à une révision de tous les cas déjà examinés par le Comité de la liberté syndicale ainsi que des observations formulées par la commission d'experts depuis 1987, en nous basant sur les documents officiels de l'OIT.

1987: Le Comité de la liberté syndicale demande
que les criminels soient châtiés

En 1987 déjà, lors de l'examen du cas no 1344, le comité avait formulé ses conclusions, en tenant compte des observations du gouvernement selon lesquelles des procédures pénales avaient été engagées et, dans certains cas, «le classement provisoire du dossier avait été ordonné», faute d'avoir pu identifier les coupables. Le comité avait alors exprimé «... l'espoir que les enquêtes permettraient d'identifier les responsables et de châtier les coupables». Il s'était référé aux conclusions générales formulées lors d'un examen antérieur du cas [voir 246e rapport, cas no 1343, paragr. 408] lors duquel il avait estimé qu'il convenait «d'adopter toutes les mesures adéquates pour garantir que ... les droits syndicaux puissent s'exercer normalement, dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et dans un climat exempt de violence, de pressions, de craintes et de menaces de tous ordres»(6) . Dans son 248e rapport, le comité avait également formulé le souhait «que les enquêtes permettraient d'identifier les responsables, de châtier les coupables et de retrouver les disparus» et, lors de l'examen du cas no 1376, il avait déploré profondément la mort d'un syndicaliste et la disparition de deux autres, et prié le gouvernement de l'informer de l'évolution des enquêtes en cours.

En Colombie, cela fait longtemps déjà - plus de dix ans en fait - que les conditions nécessaires à l'exercice de la liberté syndicale ne sont pas réunies. Les droits civils et politiques tels que le droit à la vie, à l'intégrité ainsi qu'à la liberté individuelle de la population colombienne et en particulier des syndicalistes et des dirigeants syndicaux sont impunément violés. L'exercice du droit légitime de constituer des syndicats et de participer activement à leurs activités ainsi que le droit à la négociation collective servent de prétexte à de mystérieux tueurs à gages pour s'attaquer à la vie de ceux qui les exercent ou à leur liberté individuelle.

1989: La mission Cahier et le Comité de la liberté syndicale
réclament le démantèlement des groupes paramilitaires

Dans son 259e rapport, le comité, dans ses conclusions sur le cas no 1434, déclarait:

A cette occasion, le comité, faisant sien le rapport de la mission Cahier, avait insisté sur la nécessité «d'adopter des mesures énergiques pour démanteler les groupes paramilitaires et de renforcer de manière radicale en personnel et en moyens le pouvoir judiciaire»(7) . Le rapport Cahier, annexé à l'examen du cas cité, contient les observations suivantes: «le reproche principal adressé au gouvernement réside dans son inaction. Les autorités ont, à plusieurs reprises, indiqué publiquement leur attachement à la paix et leur désir de faire respecter la légalité. Mais cela ne semble pas se traduire dans des actions aboutissant à des résultats convaincants». Par ailleurs, «en ce qui concerne la justice, les syndicats ont souligné à plusieurs reprises que les enquêtes n'aboutissent pas et qu'il n'y a pas de poursuites contre les auteurs des crimes. Toutes les personnes rencontrées ont insisté sur l'impunité dont jouissent les assassins. Cette impunité mène à un surcroît de violence»(8) .

On constate en effet que, depuis lors, la violence s'est considérablement développée en Colombie et que le nombre de victimes, syndicalistes ou dirigeants syndicaux, n'a cessé d'augmenter.

Colombie: un des cas les plus graves de violation du droit à la vie.
Le comité exprime sa déception devant l'inaction du gouvernement

Lors de l'examen du cas no 1477, le comité faisait observer toujours en 1989, dans son 265e rapport, qu'il «...se trouvait là devant l'un des cas les plus graves qui lui eût été soumis en ce qui concerne le respect du droit à la vie ... et que la situation dramatique de violence à laquelle était confrontée la Colombie empêchait le plein exercice d'activités syndicales».

En l'occurrence, le comité exprimait «... sa déception, [réitérait] les conclusions et recommandations qu'il avait formulées à sa réunion de novembre 1988 et se [voyait] obligé de conclure à sa présente session que le gouvernement n'[avait] pas encore adopté toutes les mesures nécessaires et appropriées qui lui avaient été demandées pour garantir aux militants et aux dirigeants syndicaux le droit à la vie qui est la condition première de l'exercice des droits consacrés dans la convention no 87»(9) .

Dix ans se sont écoulés et aucun des gouvernements qui ont été en charge du pays depuis lors n'a pris les mesures nécessaires pour protéger la vie des syndicalistes, des dirigeants syndicaux et des militants; quant aux groupes paramilitaires dont le comité réclame depuis 1989 la surveillance et le démantèlement, ils ont consolidé leur position et se sont développés, notamment dans les zones qui se caractérisent par la présence d'importantes forces militaires, et ils ont étendu leur occupation territoriale à la plus grande partie du pays.

Nécessité de prendre des mesures en vue de supprimer
l'action des groupes paramilitaires, d'identifier
et de châtier les assassins de syndicalistes
et de prévenir la répétition d'actes de violence
à l'encontre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux

L'action menée par le Comité de la liberté syndicale contre l'impunité en Colombie a été à la fois pertinente, persévérante, récurrente et énergique. Le gouvernement, fidèle à son attitude traditionnelle, a continué à faire état des mesures qu'il avait prises, mais, en fait, n'a nullement manifesté de volonté politique de mettre un terme à la grave impunité dont jouissent les assassins de syndicalistes et de dirigeants syndicaux et, plutôt que de combattre les groupes paramilitaires, leur a permis de se développer au point qu'aujourd'hui leur projet criminel s'étend à la plus grande partie du territoire national.

Lors de sa troisième réunion de 1990, le comité a repris l'examen de la situation de violence et d'impunité en Colombie sur la base de l'étude qu'il avait faite des cas nos 1434 et 1477, et dans son 275e rapport, il a formulé les recommandations ci-après:

A cette même occasion, le comité a également constaté avec préoccupation que, selon les informations fournies par le gouvernement colombien lui-même, «les enquêtes judiciaires engagées depuis 1986 ont permis, en de rares exceptions seulement, d'identifier ou de condamner les coupables présumés des assassinats et enlèvements»(11) .

Lorsqu'il a examiné les cas nos 1434 et 1477 à sa première réunion de 1993, le comité s'est déclaré préoccupé par la situation difficile à laquelle se trouvait confrontée la Colombie et a déploré «profondément, une fois de plus, la gravité des allégations relatives à la mort et à la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes». A cette occasion, il a prié «instamment le gouvernement de lui indiquer si des enquêtes judiciaires [avaient] été ouvertes en vue d'établir les faits, de poursuivre et de condamner les coupables afin d'éviter que de tels faits ne se reproduisent»(12) .

En 1994, lors de l'examen du cas no 1686 relatif à une plainte déposée contre le gouvernement de la Colombie, le comité, dans son 294e rapport (paragr. 296), a déclaré «qu'en ce qui concerne les allégations relatives à l'assassinat de dirigeants et de militants syndicaux, le comité exprime sa profonde préoccupation devant la gravité de ces faits, qu'il déplore et désavoue». Il a rappelé que «les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes, et qu'il appartient au gouvernement d'assurer le respect de ce principe. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1985, troisième édition, paragr. 70.]

En 1995, à nouveau, le comité a procédé à l'examen du cas no 1761 et du cas no 1787 et, ainsi qu'il est indiqué dans son 297e rapport, il a prié instamment le gouvernement «de faire procéder immédiatement à des enquêtes judiciaires afin d'éclaircir pleinement les faits allégués [les crimes commis à l'encontre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux], de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables des assassinats des dirigeants syndicaux...» mentionnés dans le cadre de la plainte(13) .

Le comité a rappelé au gouvernement colombien qu'«il appartient aux gouvernements de garantir le respect» du principe selon lequel «les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes».

A cette occasion, le comité a constaté que «dans des cas antérieurs, les enquêtes judiciaires n'avaient pas permis d'identifier les coupables d'actes de violence similaires à ceux qui étaient allégués» et a formulé l'espoir que dans le présent cas «les faits [seraient] éclaircis et les coupables [seraient] sanctionnés»; il a rappelé à cet égard au gouvernement que «l'absence de jugement contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité...» [voir 292e rapport, cas nos 1434 et 1477 (Colombie), paragr. 255](14) .

Le gouvernement colombien: entre l'indifférence et l'inaction.
L'impunité persiste

Le comité a été saisi à nouveau d'un cas faisant état, en Colombie, de violences perpétrées à l'encontre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux au cours des années 1997 et 1998. En 1997, au paragraphe 294, alinéas b) et c) de son 306e rapport, il formulait les recommandations suivantes:

L'indifférence du gouvernement colombien a amené le comité à appeler l'attention du Conseil d'administration du Bureau international du Travail sur le cas de la Colombie (en particulier sur le cas no 1787) qu'il considère comme l'un des trois cas les plus graves dans le monde en matière de liberté syndicale, avec ceux du Nigéria et du Soudan(16) .

Le comité a pris acte des communications adressées par le gouvernement le 29 mai et le 24 juillet 1997, et a formulé les conclusions suivantes: «en premier lieu, avant d'analyser les allégations et les observations communiquées par le gouvernement, le comité souhaite à nouveau faire part de sa profonde préoccupation concernant les allégations qui se réfèrent en grande partie à des assassinats, disparitions, agressions physiques, arrestations et menaces de mort contre des dirigeants syndicaux, des syndicalistes et leurs proches, ainsi qu'à des perquisitions au siège de syndicats et au domicile de syndicalistes. A cet égard, le comité constate avec une profonde consternation que les organisations plaignantes ont présenté des allégations sur des actes de violence commis contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes quasiment tout au long de l'année 1997. Le comité déplore que, malgré la gravité de la situation, le gouvernement ne réponde qu'à un nombre très limité d'allégations. Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour remédier à cette situation(17) .»

Un peu plus loin, aux paragraphes 84, 85 et 86 de son rapport, le comité a insisté à nouveau sur la grave situation d'impunité et a demandé au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour y remédier. Il a formulé à cet égard les conclusions suivantes:

Des paragraphes ci-dessus reproduits, qui correspondent au dernier examen du cas no 1787 par le comité, il ressort que le gouvernement a contribué par son indifférence et son inaction à aggraver le climat d'impunité qui règne en Colombie. Aujourd'hui, dans ce pays, l'exercice de l'activité syndicale est devenu particulièrement dangereux pour la vie et l'intégrité de la personne, en dépit de la Constitution politique en vigueur qui reconnaît et garantit le droit à la liberté syndicale.

Bilan de l'année écoulée: les faits confirment
les conclusions du comité

Pour résumer en quelques mots ce qui s'est passé au cours de la dernière année, il convient d'évoquer tout d'abord un fait récent. Le samedi 18 avril dernier, a été assassiné à son domicile l'avocat Eduardo Umaña Mendoza qui ne s'était pas contenté d'être un éminent défenseur des prisonniers politiques, mais avait également dédié sa vie professionnelle à la cause des droits de l'homme et défendait, au moment de son assassinat, des militants du Syndicat ouvrier poursuivis par la justice dite sans visage. Au cours de l'année écoulée, il avait réussi à démontrer que certaines procédures avaient été engagées sur la base de faux témoignages émanant de personnes qui, profitant de la garantie d'anonymat, avaient fait plusieurs dépositions pour donner à croire qu'il s'agissait de personnes différentes. Le caractère particulièrement lâche de cet assassinat démontre l'existence chez les criminels d'un niveau d'organisation et de décisions qui a suscité dans le pays une grande terreur.

Deux jours auparavant l'assassinat de l'avocat Umaña, María Arango, ancienne militante qui s'était retirée depuis plusieurs années de toute activité syndicale, avait été assassinée, chez elle, à Bogotá. Le 27 février, Jesús María Valle Jaramillo, président du Comité des droits de l'homme de Medellín et personnalité connue pour avoir défendu les prisonniers politiques et les militants dans sa région, a également été assassiné dans son étude.

Au cours des quatre derniers mois, on recense plus de dix massacres, dont la plupart ont été perpétrés à l'encontre de travailleurs agricoles. Le 16 mai dernier, douze personnes ont été massacrées dans la zone urbaine de la localité pétrolière de Barrancabermeja et 34 autres personnes ont disparu au cours de la même offensive organisée par des groupes paramilitaires. Ces tragiques événements ont été à l'origine de la grève déclenchée par les travailleurs du secteur pétrolier dans le cadre d'une grève civique appuyée par toute la population de Barrancabermeja.

On trouvera au chapitre III du présent rapport un bref résumé des violations des droits de l'homme perpétrées à l'encontre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux en 1997.

Divergences entre le droit national
et les conventions nos 87 et 98

Le Code substantif du travail a été promulgué en 1950. Sa teneur initiale démontre que ses rédacteurs avaient une conception particulièrement restrictive des droits syndicaux. Par exemple, les dispositions relatives à l'immunité syndicale et le droit de négocier collectivement ne s'appliquent pas aux «employés publics» qui, du seul fait qu'ils sont employés par l'Etat et quel que soit le niveau de leurs responsabilités dans l'administration publique, voient leurs syndicats privés du droit de participer aux activités politiques; les fédérations et confédérations n'ont pas le droit de convoquer ou de déclencher une grève et la grève est interdite dans les «services publics», au sens large du terme. Les rédacteurs du Code ont fait en sorte que cette législation confère aux autorités administratives des pouvoirs d'intervention trop étendus dans la constitution et les activités des syndicats.

Cette conception restrictive qui caractérisait les premiers rédacteurs s'est encore accentuée pendant les années du gouvernement militaire (1953-1957) qui, en application des pouvoirs que lui conférait l'état d'urgence ou l'état exception, a introduit de nombreuses modifications dans la législation syndicale, et notamment l'octroi à l'autorité administrative (ministère du Travail) qui correspondait auparavant aux juges du travail, du pouvoir de se prononcer sur la légalité des grèves. La Colombie a vécu ainsi plus de quarante ans sous l'état de siège ou d'urgence, et les gouvernements civils qui ont succédé à la dictature ont opté pour la méthode qui consistait à introduire dans le Code des modifications permettant l'exercice de pouvoirs exceptionnels. Toute cette réglementation promulguée à des fins transitoires a ensuite été adoptée, sans grand débat démocratique, en tant que législation permanente.

En 1991, la nouvelle Constitution politique avait pour objet de corriger les contradictions entre le droit interne et les conventions internationales du travail. C'est la raison pour laquelle elle dispose, à son article 53(18) , que les conventions internationales du travail dûment ratifiées font partie du droit interne.

La logique aurait voulu que les dispositions de droit interne qui étaient contraires aux conventions ratifiées par la Colombie soient abrogées ou, mieux encore, subrogées par le mandat constitutionnel précité. Mais ce n'est pas ainsi que l'entendait l'Etat. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a conservé les dispositions du Code comme normes de référence; ce qui explique que les juges de la République appliquent des dispositions contraires aux conventions, et que les employeurs se recommandent de nombreuses lois et décrets contraires à la réglementation internationale.

a) La Commission d'experts pour l'application
des conventions et recommandations

Cela fait maintenant plus de dix ans que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations du Bureau international du Travail a pris connaissance des divergences qui existent entre la législation et la pratique nationales en Colombie, d'une part, et les conventions nos 87 et 98, d'autre part, et qu'elle formule à l'attention du gouvernement colombien des observations et des demandes directes auxquelles aucun des trois gouvernements qui se sont succédé entre 1987 et 1998 n'a prêté attention.

Les demandes de la commission d'experts en 1987

Pour suivre la même démarche que celle que nous avons adoptée dans la première partie, nous procéderons à une révision des principales observations formulées par la commission d'experts du Bureau international du travail depuis 1987, afin de montrer comment les autorités colombiennes responsables de leur mise en œuvre les ont ignorées.

En 1987, la commission d'experts a formulé des observations qui portaient essentiellement sur les différents aspects du droit national qui se traduisent par une intervention dans l'administration interne des syndicats et qui entravent le droit des syndicats à promouvoir et défendre les intérêts des travailleurs, en faisant valoir que de telles dispositions sont contraires à la convention no 87.

En ce qui concerne l'intervention dans l'administration interne des syndicats, la commission, dans son observation de 1987, déclarait que «les questions soulevées portent sur les points suivants:». Elle se référait ensuite aux dispositions du Code du travail et autres normes complémentaires qui permettent notamment au ministère du Travail d'approuver ou de désapprouver les modifications proposées aux statuts des syndicats, ainsi qu'aux dispositions qui autorisent le contrôle de la gestion interne des syndicats par des fonctionnaires, la réglementation stricte des réunions syndicales, la présence des fonctionnaires aux assemblées générales réunies pour voter une déclaration de grève, et évoquait les dispositions qui prévoient l'obligation d'être Colombien pour être élu dirigeant syndical, la soumission de l'élection des dirigeants syndicaux à l'approbation du ministère du Travail, la suspension, avec privation de leur droit d'association, des dirigeants qui auraient été à l'origine de la dissolution de leur syndicat, etc.

En guise de conclusion sur ce point et après avoir pris note du rapport du gouvernement qui se concentrait sur la teneur des articles 485 et 486 du Code du travail, «la commission déclarait «que cet article 486 confère aux fonctionnaires publics des pouvoirs d'intervention trop étendus dans les affaires syndicales, contrairement à l'article 3, paragraphe 2, de la convention, selon lequel les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter les droits reconnus par cette dernière», et tenait ensuite à renouveler les commentaires qu'elle [avait] émis sur les autres dispositions déjà mentionnées auxquelles le gouvernement ne s'était pas référé».

Pour ce qui est des limitations imposées aux syndicats dans la promotion et la défense des intérêts des travailleurs, la commission a désiré «rappeler les points suivants sur lesquels elle avait formulé des commentaires et que le rapport du gouvernement ne [mentionnait] pas:», avant de signaler à l'attention du gouvernement les points suivants: l'interdiction faite aux syndicats de tenir des réunions sur des questions politiques, l'interdiction de la grève aux fédérations et confédérations, l'interdiction de la grève dans des services publics qui ne sont pas essentiels, le pouvoir conféré au Président de la République de faire cesser une grève qui affecte les intérêts de l'économie nationale et de convoquer un tribunal d'arbitrage, le licenciement automatique des dirigeants syndicaux qui sont intervenus dans une grève illégale ou qui y ont participé.

En guise de conclusion, la commission déclarait qu'elle «saurait gré au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures qu'il pourrait prendre pour mettre sa législation en conformité avec la convention, à la lumière des commentaires»(19)  qu'elle venait de formuler.

Comme on peut le constater à la lecture de l'observation qui précède, la commission d'experts s'était déjà penchée sur ces questions avant 1987.

Observations de la commission d'experts entre 1989 et 1991

Compte tenu de la promulgation en 1991 de la nouvelle Constitution politique, nous résumerons les observations de la commission d'experts formulées entre 1989 et 1991, étant entendu qu'en 1988 la commission n'a pas formulé de commentaires à l'égard de la Colombie en ce qui concerne les conventions nos 87 et 98.

En 1989, la commission d'experts a pris note non seulement du rapport du gouvernement, mais également des commentaires présentés par la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), de la réponse du gouvernement à ces commentaires ainsi que du 259e rapport du Comité de la liberté syndicale.

A cette occasion, la commission d'experts s'est associée au rapport du Comité de la liberté syndicale. En ce qui concerne les assassinats et le climat de violence en Colombie, la commission a déclaré s'en remettre «aux conclusions de ce comité». A l'instar du Comité de la liberté syndicale, elle s'est déclarée «vivement préoccupée par la situation tragique de violence qu'affronte la Colombie et qui, de manière générale, rend impossible les conditions normales d'existence de la population et empêche le plein exercice des activités syndicales»(20) .

La seconde partie des observations est présentée sous le titre «Dispositions législatives contestées par la commission dans des commentaires antérieurs»(21) , les questions qui y sont soulevées portent sur les deux groupes de normes visées dans l'observation de la commission d'experts de 1987, autant dire qu'ils reprennent les questions évoquées à cette occasion.

En 1989, la commission d'experts concluait ses observations en soulignant que: «la législation viole les dispositions de la convention sur de nombreux points» et priait «le gouvernement d'envisager une réforme en profondeur de la législation syndicale en vigueur, en vue de la mettre en conformité avec les exigences de la convention, et de lui indiquer toute mesure adoptée à cet effet»(22) .

Au cours de la même année, la commission d'experts s'est également préoccupée de l'application de la convention no 98 et a formulé en substance les observations suivantes: «la commission ... prie le gouvernement de prendre les mesures voulues pour modifier la législation (art. 414 et 416 du Code du travail) afin de conférer aux «agents publics» qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat les garanties prévues par la convention, lesquelles comportent le droit de négocier des conventions collectives et une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale»(23) .

En 1990, la commission d'experts a entrepris d'examiner in extenso l'application de la convention no 87 en ayant recours à la formule suivante: «... la commission rappelle les divergences existant entre la législation nationale et la convention:». Elle a ensuite rappelé l'ensemble des points évoqués plus haut, y compris l'exigence de 75 pour cent de membres colombiens pour former un syndicat qui constitue une violation de la convention no 87.

A cette occasion, la commission d'experts a pris note «des assurances données par le gouvernement dans son dernier rapport concernant la création d'une commission spéciale chargée d'examiner l'ensemble de la législation du travail actuellement dépassée à la lumière de ses commentaires afin d'harmoniser la législation avec les conventions de l'OIT», et elle a conclu ses observations en exprimant l'espoir que «la révision législative annoncée permettrait d'aboutir à des résultats concrets sur l'ensemble des points soulevés»(24) .

En 1991(25) , la commission d'experts a noté avec satisfaction que la loi no 50 de 1990 avait apporté «certaines améliorations par rapport aux dispositions antérieures en matière de liberté syndicale et de négociation collective», et elle en a dressé la liste. La commission regrettait cependant «que la loi no 50 ait omis de tenir compte de certains commentaires qui avaient été formulés depuis plusieurs années sur les dispositions de la législation incompatibles avec la convention». Suivait un récapitulatif de toutes les observations formulées lors des années antérieures avec l'adjonction d'un nouveau point qui, aux yeux de la commission, entrait fortement en conflit avec la convention et qui avait été utilisé en Colombie pour réprimer l'action revendicative, à savoir «l'interdiction de la grève lorsqu'elle se propose d'exiger des autorités l'exécution d'un acte qui relève de leur pouvoir de décision».

A cette occasion, la commission a cependant tenu à souligner «qu'il demeurait encore de nombreuses dispositions qui n'étaient pas compatibles avec la convention» et a invité le gouvernement «à prendre dès que possible les mesures nécessaires pour mettre la législation et la pratique en pleine conformité avec la convention».

En ce qui concerne la convention no 98, la commission d'experts a rappelé l'importance du droit de négociation collective et la nécessité d'assurer une protection aux agents publics.

Depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution politique de Colombie
jusqu'en 1997: six années de divergence entre la législation et la pratique
nationales et les conventions relatives à la liberté syndicale

En 1992(26) , la commission a pris note du rapport du gouvernement, des débats qui s'étaient déroulés à la Commission de la Conférence en 1991 et du rapport de la mission de contacts directs qui s'était rendue en Colombie du 16 au 20 septembre 1991. Elle a également pris acte avec intérêt des dispositions de la nouvelle Constitution et de l'abrogation de certaines dispositions légales, qui étaient contraires à la convention no 87.

La commission a néanmoins tenu à souligner la persistance de nombreuses dispositions de la législation incompatibles avec la convention. Elle a ensuite dressé la liste habituelle des points qui entravaient l'application de la convention no 87 parmi lesquels figuraient: l'obligation selon laquelle un syndicat doit être constitué pour les deux tiers de Colombiens, le contrôle de la gestion interne des syndicats et des réunions syndicales par des fonctionnaires, la présence des autorités dans les assemblées générales réunies pour voter sur le déclenchement d'une grève, l'interdiction de la grève aux fédérations et confédérations, l'interdiction de la grève dans des services qui ne sont pas essentiels, la possibilité de licencier les dirigeants syndicaux qui sont intervenus dans une grève illégale ou qui y ont participé.

Elle a ensuite exhorté le gouvernement à continuer de prendre des mesures pour mettre sa législation en conformité avec les exigences de la convention.

En ce qui concerne l'application de la convention no 98, le point central demeurait en 1992 la négociation collective des agents publics et la protection prévue par le Code du travail contre des actes de discrimination antisyndicale dans le secteur public.

L'année suivante, c'est-à-dire en 1993(27) , la commission d'experts a rappelé que, l'année précédente, elle «avait pris note de certains progrès constatés dans la législation» mais avait signalé «la persistance de certaines dispositions non conformes à la convention» et, rappelant les dispositions énumérées au cours des années antérieures qui restent en vigueur en dépit de la Constitution politique adoptée en 1991, elle a réitéré sa demande au gouvernement afin qu'il continue à prendre des mesures propres à aligner sa législation sur la convention.

En 1994(28) , la commission d'experts n'a formulé d'observation en matière de liberté syndicale à l'intention de la Colombie que sur l'application de la convention no 98, en insistant sur le droit à la négociation collective des agents publics qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat et sur la nécessité de prendre des mesures de protection contre les actes de persécution. Elle a demandé au gouvernement de la tenir informée dans son prochain rapport «des changements intervenus dans la législation à cet égard».

Au cours des années 1995 et 1996, la commission d'experts a formulé de nouvelles observations sur les divergences entre la législation et les conventions nos 87 et 98. En 1995(29) , la commission s'est concentrée sur la convention no 87 et, rappelant les observations qu'elle avait formulées depuis 1987, a exprimé «à nouveau l'espoir que la Commission tripartite permanente prévue par la Constitution nationale serait constituée dans un proche avenir» et a prié «le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que, dans le cadre de la modification de la législation du travail qu'entreprendra la commission susmentionnée, l'ensemble des commentaires [que la commission d'experts] formule depuis de nombreuses années soit pris en considération». En 1996(30) , la commission a formulé des observations au sujet de la convention no 98 et a insisté à nouveau sur le droit des employés publics de négocier collectivement leurs conditions d'emploi.

L'année dernière, après avoir rappelé ses précédents commentaires(31) , la commission d'experts a noté avec intérêt que le gouvernement avait indiqué «qu'un projet de loi a été élaboré, dans lequel il avait été prévu d'abroger ou de modifier plusieurs dispositions du Code substantif du travail critiqué par la commission, et que les représentants du ministère du Travail s'étaient engagés à soumettre ce projet au Congrès de la République pendant l'actuelle session parlementaire».

En ce qui concerne la convention no 98, la commission a rappelé le droit à la négociation collective des agents publics qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat. La commission a exprimé l'espoir «que le Congrès [adopterait], dans les meilleurs délais, la loi en question, de manière à mettre la législation en conformité avec la convention».

Comment les projets de loi présentés par le gouvernement
en vue d'adapter la législation aux conventions relatives
à la liberté syndicale ont été abandonnés

Dans le rapport présenté à la 86e session de la Conférence, la commission d'experts a rappelé que, dans sa précédente observation, elle avait noté que le gouvernement avait élaboré un projet de loi avec le concours de la mission du BIT sur la liberté syndicale qui s'était rendue en Colombie en 1996 et a indiqué les dispositions que ce projet de loi se proposait d'abroger ou de modifier. Elle a également rappelé que le gouvernement avait élaboré un projet de loi qui visait à définir la notion de «services publics essentiels» et à réglementer l'exercice du droit de grève dans ces services et comportait d'autres dispositions tendant au règlement pacifique des conflits collectifs du travail en vue d'adapter la législation aux normes internationales.

A cette occasion, elle a formulé l'observation suivante: «La commission note que le gouvernement indique que le Congrès de la République a décidé d'écarter ce projet de loi et qu'en conséquence le ministère du Travail étudie la possibilité de soumettre au Congrès le Statut du travail auquel se réfère l'article 53 de la Constitution en incluant dans ce texte les amendements contenus dans le projet qui a été écarté. La commission souligne donc avec insistance la nécessité de modifier ou supprimer, dans les plus brefs délais, les dispositions susmentionnées du Code substantif du travail afin de mettre la législation en conformité avec la convention.(32) »

En ce qui concerne le projet relatif aux «services essentiels», la commission a fait observer «que le gouvernement n'avait pas indiqué dans son rapport si cet avant-projet de loi avait été élaboré pour être soumis au Congrès de la République». On en déduira aisément que le gouvernement a gardé le silence sur ce projet qui, en fait, n'a jamais été réellement présenté au Congrès.

Pour ce qui est de la convention no 98, la commission a rappelé «qu'elle insiste depuis plusieurs années sur la nécessité de faire en sorte que les employés du secteur public non commis à l'administration de l'Etat jouissent du droit de négociation collective et qu'elle avait noté, dans son observation antérieure, qu'un projet de loi garantissant ce droit avait été présenté au Congrès de la République», et elle a constaté avec regret que «selon l'information communiquée par le gouvernement, le Congrès de la République avait décidé de classer le projet de loi en question»(33) .

La commission a exprimé «l'espoir que le gouvernement prendrait des mesures au plus tôt pour mettre la législation en conformité avec la convention».

Elle a en outre rappelé que, dans le passé, elle avait demandé au gouvernement de lui fournir des informations sur l'obligation faite aux syndicats de secteur ou aux syndicats professionnels de regrouper plus de 50 pour cent des travailleurs de l'entreprise pour pouvoir négocier collectivement et sur le droit de négociation collective des fédérations et confédérations. Elle a fait observer que le gouvernement n'avait pas répondu à ses observations et l'a prié de prendre des mesures afin que les organisations ne soient pas tenues de regrouper plus de 50 pour cent des travailleurs de l'entreprise pour pouvoir négocier collectivement.

La Conférence internationale du Travail de 1997
Colombie: promesses non tenues

Nous pourrions procéder à nouveau à une récapitulation minutieuse des débats tenus à la Commission de l'application des normes de la Conférence au cours des dix dernières années afin de montrer les défaillances de la Colombie à l'égard de l'application des conventions nos 87 et 98 relatives à la liberté syndicale. Nous nous bornerons cependant à faire état de la discussion tenue, l'année dernière, lors de la 85e session de la Conférence.

Un représentant gouvernemental, s'exprimant au sujet du projet de loi élaboré avec le concours de la mission qui s'était rendue dans le pays en 1996, avait déclaré: «Ce projet de loi ne constitue pas une proposition isolée de la part du gouvernement et encore moins un artifice par lequel il voudrait se sortir d'un mauvais pas. Au contraire, il s'inscrit dans le cadre d'une politique gouvernementale axée sur la promotion et le respect des droits de l'homme, domaine dans lequel le contenu des conventions internationales du travail auxquelles la Colombie est en train de donner effet revêt une signification particulière(34) .»

Se référant également à la question de la qualification au pénal de l'action revendicative, l'orateur avait indiqué qu'une commission avait été constituée pour examiner la révision des dispositions pénales et la levée éventuelle du secret de l'instruction dans le cadre des procédures pénales visant des travailleurs. Il avait également évoqué un projet de loi sur la négociation collective et les accords collectifs dans le secteur public, élaboré en concertation avec les partenaires sociaux pour les dix-huit articles du texte.

Tous les projets mentionnés par le représentant gouvernemental de la Colombie ont été classés par le Congrès de la République. Le gouvernement, au lieu de se servir des instruments constitutionnels pour exhorter le Congrès à examiner et approuver les projets, les a simplement abandonnés sans leur accorder l'intérêt qu'il avait prétendu leur porter au cours de la discussion tenue au sein de la Commission de l'application des normes de la Conférence.

Par ailleurs, une année s'est écoulée avant que le Congrès de la République soit saisi du projet de loi relatif aux services essentiels et au droit de grève.

Enfin, on ne saurait nier qu'il existe une commission chargée de la révision des normes qui répriment l'action revendicative. Or dans cette commission, après onze mois de travail, les centrales syndicales et les organisations non gouvernementales chargées de la défense des droits de l'homme ont quitté la table de négociation, en guise de protestation contre les représentants du gouvernement qui tentaient de réduire à néant tous les progrès accomplis et les accords passés. Cela s'est passé au mois de mars, et le gouvernement n'a rien tenté pour reconnaître le travail accompli jusqu'alors ni pour s'expliquer avec le mouvement syndical sur les divergences mentionnées par écrit.

Les multiples efforts déployés par l'OIT

Il convient de signaler qu'en plus des activités menées par les organes de contrôle de l'OIT que nous avons résumées dans le présent rapport, le Bureau international du Travail a déployé d'immenses efforts en vue d'aider les gouvernements successifs de la Colombie à adapter la législation aux conventions internationales du travail et, partant, à s'acquitter du mandat prévu à l'article 53 de la Constitution politique.

C'est ainsi que, lors des dix dernières années, plusieurs missions de contacts directs portant sur la liberté syndicale se sont rendues en Colombie:

Les organes de contrôle ont dûment rendu compte des rapports de ces missions.

En outre, le bureau régional de Lima s'est toujours tenu à la disposition du gouvernement colombien pour lui fournir des services consultatifs.

Conclusions

A la lumière de ce qui précède et en guise de conclusion, nous pouvons résumer la situation comme suit:

C. Décisions adoptées par le Conseil d'administration
à sa 273
e session (novembre 1998)

207. A sa 273e session (novembre 1998), le conseil d'administration a estimé qu'il serait incompatible avec le caractère judiciaire de la procédure prévue à l'article 26 et aux articles suivants de la Constitution qu'une discussion ait lieu, au Conseil d'administration, sur le fond d'une plainte, alors que le Conseil est saisi d'une demande visant à renvoyer ladite plainte devant une commission d'enquête et qu'il ne dispose ni des observations du gouvernement contre lequel cette plainte est dirigée ni de l'appréciation objective de ces observations par un organisme indépendant.

208. Le Conseil d'administration a observé que le Comité de la liberté syndicale a examiné plusieurs plaintes en violation des droits syndicaux en Colombie qui avaient été présentées par des organisations de travailleurs. Pour certains cas, le Conseil d'administration a déjà approuvé les conclusions intérimaires formulées par le comité. Pour d'autres, le comité a décidé d'ajourner l'examen dans l'attente des observations du gouvernement. Il a également été rappelé que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a récemment formulé à l'intention du gouvernement de la Colombie des commentaires qui ont trait à l'application des conventions visées dans la plainte actuellement déposée au titre de l'article 26 de la Constitution et qu'en 1998 la Commission de l'application des normes de la Conférence a discuté de certains aspects de l'application, en droit et en pratique, de la convention no 87.

209. Le Conseil d'administration a rappelé qu'il est déjà convenu (154e rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 33) que, dans des cas similaires au présent cas, où plusieurs plaignants ont eu recours à des procédures différentes établies par l'Organisation en matière d'application des conventions et de protection de la liberté syndicale, il serait souhaitable de coordonner ces procédures et de tenir compte du mandat confié au comité pour l'examen de plaintes relatives à cette matière. Dans le cas présent, le Conseil d'administration a constaté que la plainte déposée par certains délégués à la Conférence au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT portait pour une grande part sur des questions dont le comité était déjà saisi dans le cadre de la procédure spéciale en matière de liberté syndicale et il a estimé que, afin de pouvoir se prononcer sur les mesures à prendre à l'égard de la plainte présentée en vertu de l'article 26, il serait utile que le Conseil d'administration dispose des recommandations formulées par le comité au sujet des cas en instance et de cette dernière plainte.

210. En conséquence, le Conseil d'administration a décidé, à sa session de novembre 1998:

211. Le Conseil d'administration a estimé par ailleurs qu'au cas où une commission d'enquête serait instituée, ses membres devraient être désignés selon les mêmes critères et siéger dans les mêmes conditions que les membres des commissions antérieurement formées en vertu de l'article 26 de la Constitution. Ils siégeraient à titre individuel et personnel, seraient choisis pour leur impartialité, leur intégrité et la considération dont ils jouissent, et ils s'engageraient par une déclaration solennelle à exercer leurs fonctions et attributions «en tout honneur et dévouement, en pleine et parfaite impartialité, et en toute conscience». Une déclaration solennelle exprimée en ces termes correspondrait à l'engagement que doivent prendre les juges de la Cour internationale de Justice. Le bureau du Conseil doit présenter en temps opportun des propositions concernant les autres dispositions à prendre en la matière.

D. Réponse du gouvernement

212. Dans sa communication du 15 janvier 1999, signée par Son Excellence Camilo Reyes Rodríguez, Ambassadeur et Représentant permanent de la Colombie auprès de l'Office des Nations Unies et des organisations internationales à Genève, le gouvernement a présenté les observations et les informations demandées par le Conseil d'administration. Ci-dessous, on trouvera reproduites in extenso les observations du gouvernement sur la plainte relative au respect par la Colombie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée par plusieurs délégués à la 86e session de la Conférence (1998), au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.

Antécédents

Contenu et portée de la plainte

La plainte présentée par des délégués des travailleurs lors de la 86e session de la Conférence internationale du Travail se fonde, d'une part, sur les cas en instance devant le Comité de la liberté syndicale et, de l'autre, sur les observations formulées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations «… contre le gouvernement de la Colombie pour ne pas avoir adopté les mesures propres à assurer de manière satisfaisante l'exécution de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949»(35) .

La plainte s'articule autour de l'idée que l'Etat colombien persécute le mouvement syndical et cherche à le faire disparaître. Au dire des travailleurs, cette intention de l'Etat se traduit par une politique présentant deux aspects: le premier consiste à persécuter des travailleurs et des dirigeants syndicaux et à les éliminer physiquement en raison de leurs activités: «Au cours de la dernière décennie, en Colombie, - est-il dit dans la plainte - il a été fait usage de la violence pour poursuivre les syndicalistes et les dirigeants syndicaux en raison de leurs activités(36) .» Un peu plus loin dans le texte, les travailleurs affirment: «Ce sont des agents de l'Etat, des paramilitaires et la guérilla qui sont responsables des actes de violence commis à l'encontre du syndicalisme(37) .»

Dans le même esprit, il est dit que l'impunité servirait la continuation de la politique d'extermination physique: «Le gouvernement n'a fait preuve d'aucune volonté politique réelle pour encourager l'identification des criminels, engager des poursuites contre eux, les juger et les châtier(38) .» «Les actes de violence perpétrés à l'encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes doivent sans nul doute être considérés comme le principal obstacle à la liberté syndicale en Colombie, violence aggravée par une impunité de plus en plus flagrante et l'absence de toute volonté politique d'y mettre un terme(39) .»

Le deuxième aspect de la politique macabre qui est imputée au gouvernement correspondrait à un prétendu manque de volonté politique s'agissant d'harmoniser la législation nationale avec le contenu des conventions internationales du travail ratifiées par le pays, notamment des conventions nos 87 et 98: «L'autre point sur lequel insiste le rapport concerne la façon dont les gouvernements de la Colombie ont fait la sourde oreille aux demandes formulées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en vue d'adapter le droit interne et la pratique nationale aux grands principes consacrés par les conventions nos 87 et 98(40) .» «Cette année, nous souhaitons attirer l'attention de la Conférence internationale du Travail sur les aspects les plus graves de la situation complexe que nous dénonçons en ce qui concerne la violation de la liberté syndicale en Colombie. Il s'agit … b) deuxièmement, de l'absence de toute volonté politique d'adapter la législation aux principes énoncés dans les conventions nos 87 et 98(41) .» L'attitude politique ne viserait donc plus à la disparition physique des personnes mais à celle du mouvement syndical en général, par l'application de normes qui seraient contraires aux conventions considérées et qui auraient pour effet principal d'empêcher leur action.

Fondement juridique et objet de la demande

« … nous demandons que la présente plainte soit étudiée par une commission d'enquête qui rendra son rapport dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 26 de la Constitution de l'OIT…»(42) .

Contenu et portée des déclarations du gouvernement
de la République de Colombie

Le gouvernement de la République de Colombie formule tout d'abord la déclaration suivante:

Pour répondre aux allégations relatives à la mort de travailleurs et de dirigeants syndicaux, le gouvernement déclare:

Il n'y a pas en Colombie de politique gouvernementale de persécution visant les travailleurs, les dirigeants syndicaux ou le mouvement syndical. Etant donné la structure de l'Etat colombien, ses institutions et les mécanismes de contrôle de la puissance publique, l'Etat ne peut en aucun cas prononcer ou exécuter des mesures visant la répression des droits syndicaux des citoyens. Les actes de violence contre des travailleurs et des dirigeants syndicaux sont dus au climat de violence complexe qui règne dans le pays. L'Etat a pris des mesures significatives dans les domaines qui sont à l'origine de cette violence. Il ne prétend pas ignorer la violence qui sévit dans le pays. Au contraire, l'ensemble des mesures adoptées par l'Etat, et notamment par le gouvernement actuel, en relation avec le processus de paix visent à élargir les espaces de concertation et de dialogue pour faire régner la paix et permettre la cohabitation pacifique des Colombiens, parmi lesquels il faut bien entendu compter les travailleurs et les dirigeants syndicaux(43) .

Le processus de paix dans lequel s'est engagé le gouvernement de la Colombie est une preuve irréfutable de la politique que l'Etat mène sans relâche pour parvenir à la coexistence pacifique, dont l'avènement est très attendu par les Colombiens. La paix, que l'on cherche à construire avec tant d'énergie, permettrait sans aucun doute d'avancer réellement vers le plein respect des droits de l'homme. En effet, elle ferait disparaître l'une des causes des violations de ces droits, l'une d'entre elles seulement mais la principale. La nature de cette politique gouvernementale apparaît clairement dans les différents processus de paix menés dans le passé, qui ont abouti à la réintégration dans la vie civile de nombreux mouvements insurgés. Le gouvernement décrit cet aspect à l'annexe I.

Les plaignants adoptent dans leur demande un point de vue qui ne prend pas en compte tous les éléments nécessaires pour expliquer la complexité du problème. Ils attribuent la responsabilité de la violence à l'Etat colombien et lui demandent de cesser tous les actes de violence affectant la population. Les diagnostics et les solutions proposées par voie de conséquence ne sont pas pertinents. Nous sommes convaincus que le Comité de la liberté syndicale et le Conseil d'administration sauront tenir compte de la complexité du problème de la violence et qu'ils seront sensibles aux déclarations du gouvernement à ce sujet.

S'agissant des divergences entre la législation nationale et les conventions internationales du travail, les conventions nos 87 et 98 notamment, qui sont au cœur de la plainte, le gouvernement déclare que, dans le passé comme dans le présent, il s'applique à respecter la Constitution de l'Organisation internationale du Travail et les conventions internationales ratifiées par le pays. Bien entendu, le gouvernement respecte également les demandes des organes de contrôle, à la condition qu'elles soient compatibles avec le texte des conventions et la structure politique et juridique de l'Etat colombien.

En effet, la Colombie a cherché à œuvrer dans ce sens en tout temps, non parce que les gouvernements successifs l'ont voulu ainsi, mais parce que la structure politique, institutionnelle et juridique du pays oblige l'Etat à promouvoir et à respecter les droits et les libertés des citoyens.

La loi no 50 de 1990 est celle qui a entraîné les progrès les plus significatifs dans la législation colombienne. Dans son étude d'ensemble de 1994, la commission d'experts a reconnu l'importance des résultats obtenus en citant la Colombie à plusieurs reprises comme faisant partie des rares «cas de progrès» dans le monde en ce qui concerne le respect des conventions nos 87 et 98.

Allégations relatives à la mort de travailleurs
et de dirigeants syndicaux

Affirmations des plaignants

Les citations suivantes sont tirées de la plainte. Elles en donnent un résumé fidèle:

«Au cours de la dernière décennie, en Colombie, il a été fait usage de la violence pour poursuivre les syndicalistes et les dirigeants syndicaux en raison de leurs activités…(44) .»

«Ce sont des agents de l'Etat, des paramilitaires et la guérilla qui sont responsables des actes de violence commis à l'encontre du syndicalisme(45) .»

«… une des questions fondamentales abordées dans ce rapport est celle de l'impunité dont jouissent des personnes qui se rendent coupables de violations à l'égard des droits des syndicalistes et des dirigeants syndicaux. Les actes de violence perpétrés à l'encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes doivent sans nul doute être considérés comme le principal obstacle à la liberté syndicale en Colombie, violence aggravée par une impunité de plus en plus flagrante et l'absence de toute volonté politique d'y mettre un terme…(46) .»

«... L'intolérance des acteurs d'un long conflit armé porte atteinte à la société dans son ensemble…(47) .»

«... Les droits civils et politiques tels que le droit à la vie, à l'intégrité ainsi qu'à la liberté individuelle de la population colombienne et en particulier des syndicalistes sont impunément violés…(48) .»

Déclaration du gouvernement

Le gouvernement a rappelé que la violence en Colombie est un problème complexe qui peut s'expliquer par un certain nombre de facteurs exposés dans les conclusions ci-dessous. Il faut analyser et expliquer ces conclusions dans le détail et les replacer dans le contexte politique, social, économique et militaire qui est le leur. Elles reposent sur des données fournies par les statistiques nationales disponibles dans ce domaine.

Pour conclure cette partie, le gouvernement souhaite rappeler les déclarations suivantes extraites du rapport de la mission de contacts directs de l'OIT qui s'est rendue en Colombie en 1996:

«Une violence aussi continue dans le temps et aussi répandue sur le territoire doit avoir des racines profondes et étendues dans la société qui en souffre. Mais une violence aussi fluctuante et aussi diversifiée selon les époques et les zones géographiques doit aussi dépendre de facteurs changeants et différents dans le temps et sur le terrain. La violence colombienne est une et multiple, elle est à la fois une violence et des violences. En fin de compte, les facteurs ou les «causes» de la violence sont à la fois uniques et multiples, tout comme sont uniques et multiples les thérapies nécessaires pour les éliminer.»

Allégations relatives aux divergences juridiques
entre le droit interne et les conventions n
os 87 et 98

Affirmations des plaignants

Les citations suivantes sont tirées de la plainte. Elles en donnent un résumé fidèle:

«… les gouvernements de la Colombie ont fait la sourde oreille aux demandes formulées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en vue d'adapter le droit interne et la pratique nationale aux grands principes consacrés par les conventions nos 87 et 98(49) .»

«... En dépit des efforts incessants déployés par la commission d'experts pour obtenir du gouvernement colombien qu'il respecte la convention et procède aux réformes nécessaires, nous nous trouvons aujourd'hui dans la même situation qu'il y a dix ans ...(50) .»

Déclaration du gouvernement

En 1976, la Colombie a ratifié les conventions nos 87 et 98, confirmant ainsi son attitude vis-à-vis des normes internationales de l'OIT.

La ratification d'une convention repose sur deux postulats. Le premier est que le processus d'harmonisation législative peut prendre du temps, étant donné que les institutions doivent pouvoir assimiler les modifications apportées, s'adapter en conséquence et garantir de la sorte leur pérennité. Cette règle se vérifie tout particulièrement pour les institutions relatives au travail et aux affaires sociales, qui sont très sensibles au changement.

Le deuxième de ces postulats est que les engagements contractés par la ratification de l'instrument sont contenus dans le texte lui-même.

Avec le premier de ces postulats, l'exécutif et la communauté internationale reconnaissent que le droit se transforme de manière permanente et continue et que ces transformations prennent du temps, non par manque de volonté politique du législateur ou du pouvoir exécutif, une idée qu'il est relativement facile de présenter et de vendre, mais par la nature même du droit en tant que science.

L'article 19, alinéa 5 d), de la Constitution de l'OIT prend en compte ce point de vue, c'est-à-dire le fait que les processus d'adaptation prennent du temps, que les transformations visées ne peuvent pas se produire dans une période de temps limitée, suffisant à la réalisation de la totalité des adaptations nécessaires et débouchant sur la fixation du droit. L'activité des organes de contrôle est significative à ce propos, celle de la commission d'experts notamment. En effet, il apparaît que le nombre de pays faisant l'objet d'un commentaire de la part de la commission à propos de l'application des conventions nos 87 et 98 a connu une augmentation disproportionnée. En effet, cette augmentation est de 260 pour cent pour la convention no 87 et de 755 pour cent pour la convention no 98. Elle ne peut pas s'expliquer par une augmentation équivalente du nombre des ratifications sur la même période, puisque ce chiffre est de 65 pour cent seulement pour la convention no 87 et de 69 pour cent pour la convention no 98.

Il ressort de ces éléments que les divergences entre la législation interne d'un pays et les conventions ne suffisent pas à prouver que l'Etat mène une politique visant à la répression du mouvement syndical, comme le laissent entendre les plaignants. S'il en était ainsi, les soupçons pèseraient sur tous les membres qui sont cités dans la partie III des rapports de la commission d'experts, notamment sur ceux qui font l'objet d'un commentaire au sujet de l'application des conventions nos 87 et 98. L'efficacité de la coopération internationale de l'Organisation serait-elle aussi mise en doute. Il est encore plus téméraire de formuler une telle conclusion dans le cas d'un pays comme la Colombie, qui est reconnu par l'Organisation elle-même comme un «cas de progrès» en raison des résultats qu'il a obtenus dans le processus de mise en conformité de sa législation.

Cela dit, la politique colombienne qui consiste à se soumettre à l'autorité de l'OIT apparaît dans les trois aspects suivants: a) progrès réalisés par l'adoption, depuis dix ans, de textes de loi visant à harmoniser le droit national avec les conventions nos 87 et 98; b) efforts déployés par le pouvoir exécutif pour que le législateur approuve les projets de loi élaborés dans le but de favoriser le processus d'harmonisation législative; c) volonté du gouvernement actuel de présenter au Congrès de la République un projet de loi allant dans le même sens.

Progrès réalisés par l'adoption de normes visant à surmonter les divergences
entre la législation nationale et les conventions n
os 87 et 98,
et notamment pour l'adoption de la loi n
o 50 de 1990

Dans son étude d'ensemble sur la liberté syndicale de 1994, la commission d'experts a pris note des progrès réalisés avec la loi no 50 de 1990, et elle cite la Colombie comme l'un des principaux cas de progrès dans le monde pour la décennie 1983-1993 s'agissant de l'application des conventions nos 87 et 98. Les observations de la commission permettent d'affirmer que la Colombie a réalisé des progrès significatifs dans le processus de mise en conformité avec la législation internationale du travail, et que ces résultats sont l'expression tangible d'une politique gouvernementale reposant sur la reconnaissance et le respect des libertés syndicales. En d'autres termes, il est évident que la Colombie a respecté ses engagements en adoptant des mesures tendant à mettre en application les dispositions de ces conventions, comme il apparaît ci-dessous.

A de nombreuses reprises, la commission d'experts a noté les progrès accomplis par la Colombie. Les plaignants semblent ne pas avoir lu les passages suivants avec suffisamment d'attention quand ils ont élaboré et rédigé leur plainte:

1) «la commission a noté avec satisfaction l'abrogation des dispositions exigeant l'approbation ministérielle des modifications aux statuts des syndicats de base et des fédérations et confédérations» (p. 52, paragr. 111); 2) «la commission a noté avec satisfaction que les dispositions qui soumettaient l'élection des dirigeants syndicaux à l'approbation des autorités administratives ont été abrogées» (p. 53, paragr. 115); 3) «la commission a noté avec satisfaction l'abrogation des dispositions qui réglementaient de façon trop stricte les réunions syndicales» (p. 59, paragr. 128); 4) «la commission a noté avec satisfaction l'abrogation de l'article 379 a) du Code du travail qui interdisait aux syndicats d'intervenir dans les questions politiques» (p. 60, paragr. 130); 5) «la commission a noté avec satisfaction que l'article 39 de la loi no 50 de 1990 a augmenté le montant des sanctions applicables en cas d'atteinte au droit d'association» (p. 106, paragr. 222); 6) «des progrès significatifs ont également été réalisés dans d'autres domaines: … constitution d'organisations sans autorisation préalable; droit des organisations … d'organiser librement leur gestion et leurs réunions», la Colombie étant citée pour ces deux aspects (p. 130, paragr. 268). Il convient également de souligner cette remarque portant sur la convention no 98: «Ces cas de progrès concernent essentiellement des mesures renforçant la protection contre la discrimination antisyndicale», la Colombie étant citée en exemple sous cet aspect (p. 133, paragr. 278); (les soulignements sont ajoutés).

Le gouvernement de Colombie s'étonne vivement de l'insistance avec laquelle les plaignants mettent en relief la nécessité de réformer la législation interne sur les aspects soulignés dans le paragraphe ci-dessus, qui ont pourtant été modifiés en 1991, comme l'a noté la commission d'experts.

Outre les réformes susmentionnées, d'autres modifications ont été introduites par la loi no 50 de 1990: reconnaissance automatique de la personnalité juridique aux syndicats (art. 364 du Code du travail et art. 39 de la Constitution politique) et suppression de la possibilité de la suspendre ou de la retirer par la voie administrative, cette décision ne pouvant résulter que d'une procédure judiciaire (art. 380, no 2, du Code du travail et art. 39 de la Constitution politique); suppression de la restriction du droit d'organisation pour les cadres des entreprises et extension de la garantie de l'immunité syndicale (art. 406 du Code du travail); possibilité de créer des syndicats mixtes regroupant des agents publics et des travailleurs officiels (art. 414 du Code du travail); abrogation des règles régissant la comptabilité syndicale (ancien article 397 du Code du travail) qui obligeaient les syndicats à remettre des rapports sur la gestion de leurs fonds (ancien article 427 du Code du travail).

De même, et pour garantir la liberté de négociation, d'autres modifications importantes ont été effectuées. Elles ont consisté à annuler l'étape de médiation qui rendait obligatoire l'intervention du ministère du Travail au cours du processus d'autodésignation des représentants parties, à prolonger l'étape des pourparlers directs (art. 414 du Code du travail) et à autoriser la présence, à la table de négociations, de jusqu'à deux conseillers pour les fédérations et les confédérations (art. 434, paragr. 2, du Code du travail). Tels sont quelques-uns seulement des aménagements qui montrent que l'Etat colombien a la volonté d'étendre et de garantir la liberté syndicale conformément à l'esprit des conventions.

S'agissant du renforcement du droit de négociation, il est important de souligner la règle qui interdit l'existence d'accords collectifs dans les entreprises où le syndicat regroupe plus d'un tiers des travailleurs (art. 70 de la loi no 50 de 1990).

Il convient de souligner que l'article 39 de la Constitution politique prévoit la protection spéciale de l'immunité syndicale et qu'elle renforce encore le droit de négociation en disposant que les travailleurs qui auraient signé une pétition «… ne pourront pas être licenciés sans juste motif dans la période comprise entre la date où la pétition est présentée et celle où les étapes prévues par la loi pour le règlement du conflit parviennent à leur terme», pour reprendre l'interprétation de l'article 25 du décret no 2351 (1965) formulée par la Chambre du travail de la Haute Cour suprême de justice dans son arrêt du 5 octobre 1998.

Entre autres choses, l'institution juridique de l'immunité syndicale empêche qu'une politique de répression ne soit exercée à l'encontre du mouvement syndical.

Les plaignants commentent également en ces termes un projet sur les «services essentiels»: «On en déduira aisément que le gouvernement a gardé le silence sur ce projet qui, en fait, n'a jamais été réellement présenté au Congrès(51) .» Il est inadmissible que les travailleurs ne connaissent pas l'existence des nombreuses lois qui ont été adoptées pour définir et réglementer les services essentiels, à savoir des lois no 31 de 1992, no 100 de 1993, no 142 de 1994 et no 270 de 1996 notamment. La jurisprudence de la Cour constitutionnelle coïncide avec la définition retenue par la commission d'experts, comme il apparaît dans la décision du 27 octobre 1994, où il est dit: «un service public a un caractère essentiel quand les activités qu'il implique contribuent de manière directe à la protection des biens, des intérêts et des valeurs nécessaires pour assurer le respect, la protection, l'exercice et l'existence effective des droits et des libertés fondamentales».

Par ailleurs, comme il l'exposera dans un prochain rapport sur la convention no 98, le gouvernement tient à informer le comité de la promulgation du décret no 801 de 1998 qui dispose que, dans le cas de syndicat réunissant moins de la moitié des travailleurs de l'entreprise, la décision d'avoir recours à des tribunaux d'arbitrage «sera prise à la majorité absolue des travailleurs de l'entreprise qui sont affiliés à ce syndicat ou à d'autres…» (art. (2)).

Nous rappelons que la nature et l'importance de ces mesures ont été soulignées par la commission d'experts dans son étude de 1994 où elle affirme:

«Ces cas de progrès concernent essentiellement des mesures renforçant la protection contre la discrimination antisyndicale.» Comment peut-on conclure à l'existence d'une politique d'extermination du mouvement syndical et de ses dirigeants alors qu'une telle évolution est constatée? Comment même peut-on affirmer que l'Etat colombien est indifférent aux principes énoncés dans les conventions nos 87 et 98?

Nous nous permettons de souligner les mérites particuliers de la Colombie: dans le cas de la convention no 87, seuls 41 pays sont cités comme des cas de progrès dans l'étude de la commission d'experts. Dans le cas de la convention no 98, ce chiffre est encore inférieur: seuls 18 pays sont cités.

Efforts du gouvernement colombien pour faire approuver par le pouvoir
législatif les projets de loi qui lui sont soumis dans le but de favoriser
les processus de mise en conformité de la législation

La volonté de l'Etat de se soumettre aux normes de l'OIT apparaît également dans les efforts menés à bien par le gouvernement pour obtenir du Congrès national l'approbation des projets de loi qu'il lui soumet pour s'acquitter de son engagement. Afin d'éviter des jugements hâtifs, qui pourraient déboucher sur des conclusions erronées, il faut rappeler que ces efforts connaissent certaines limites du fait de la structure de l'Etat, qui se caractérise par la séparation des trois pouvoirs. Le pouvoir législatif peut donc légitimement approuver ou ne pas approuver les projets de loi.

Dans ce domaine, l'engagement du gouvernement consiste à élaborer des projets - avec l'assistance technique que l'OIT prête à la Colombie -, à les soumettre au Congrès de la République, et, pour les ministres, à se rendre aux invitations adressées par les commissions du Congrès et à exposer devant elles, en ces occasions, la portée, la nature et l'importance de ces projets.

Il est donc faux d'utiliser des expressions telles que «sans que le gouvernement ait usé des instruments prévus par la Constitution colombienne pour les promouvoir»(52)  et «comme on peut le constater, il est facile de conclure à une violation systématique de la convention no 87 de l'OIT»(53) .

Volonté politique du gouvernement actuel de soumettre au Congrès
de la République un projet de loi destiné à faire progresser les processus
de mise en conformité de la législation

Afin de poursuivre la politique gouvernementale de soumission aux normes de l'OIT et à la politique également de l'Etat qui consiste à promouvoir les droits et les libertés syndicales, le gouvernement du Président Andrés Pastrana soumettra au Congrès de la République, dès la première occasion prévue par la Constitution, le projet de loi évoqué ci-dessous.

Le gouvernement tient à souligner à ce propos que la Colombie fait figure d'exception dans le monde depuis que le pays a intégré dans sa Constitution politique, à l'article 53, une disposition aux termes de laquelle «les conventions internationales du travail dûment ratifiées font partie de la législation interne».

Il est donc juridiquement clair, conformément à cet article, que les conventions de l'OIT sont intégrées dans la législation et que les individus peuvent revendiquer leur application immédiate même en l'absence d'une loi ou d'un décret allant dans ce sens. Ils peuvent également faire valoir la nullité juridique de normes qui seraient contraires à ces conventions devant les juges ou les autorités administratives chargés de trancher un litige ou de répondre à une demande qui mettrait ces normes en jeu. Cependant, il est vrai également que le pouvoir exécutif, qui s'efforce de respecter les normes de l'OIT, a tenu compte de la position de la commission d'experts, qui avait recommandé d'harmoniser de manière explicite et formelle la législation nationale avec les conventions, en abrogeant ou en amendant expressément les textes qui leur seraient contraires, afin d'avancer sur le chemin de la justice sociale.

C'est pour cette dernière raison que le gouvernement a élaboré un projet de loi, déjà mentionné plus haut, qui vise à entériner de manière explicite les recommandations de la commission d'experts qui n'auraient pas encore été prises en compte dans les textes du Code du travail.

Conclusions

Le gouvernement de la Colombie ne comprend pas la profonde contradiction qui sous-tend la plainte présentée par les délégués des travailleurs. Les plaignants affirment que la politique consistant à persécuter le mouvement syndical serait apparue puis se serait aggravée au cours des dix dernières années: «Au cours de la dernière décennie, en Colombie, il a été fait usage de la violence pour poursuivre les syndicalistes et les dirigeants syndicaux en raison de leurs activités(54) .» Qui lit attentivement le texte de la plainte ne peut que se demander pourquoi c'est précisément au cours des dix dernières années qu'ont été réalisés les progrès les plus considérables en matière d'harmonisation législative, comme le reconnaissent les plaignants, quoique sans enthousiasme, quand ils se réfèrent aux progrès constatés par la commission d'experts à propos de la loi no 50 de 1990.

En effet, en 1990, le Congrès de la République approuvait la loi no 50, dans une période de violences comptant parmi les pires que la Colombie ait jamais connues, et sur l'initiative du pouvoir exécutif. Cette loi a profondément modifié la législation antérieure et elle a tenu compte de plusieurs observations formulées par la commission d'experts.

Etant donné ce qui précède, on ne peut que constater la fausseté des affirmations suivantes qui concluent les paragraphes consacrés par les travailleurs aux prétendues violations des conventions nos 87 et 98: «Comme on peut le constater, il est facile de conclure à une violation systématique de la convention no 87 de l'OIT(55) .» «En dépit des efforts incessants déployés par la commission d'experts pour obtenir du gouvernement colombien qu'il respecte la convention et procède aux réformes nécessaires, nous nous trouvons aujourd'hui dans la même situation qu'il y a dix ans. Le gouvernement ne s'acquitte en aucune manière de l'obligation qu'il a contractée de respecter la convention no 98(56) .»

E. Texte des annexes aux observations
faites par le gouvernement

213. On trouvera ci-après le texte des annexes soumises par le gouvernement:


1.  Voir 251e rapport du Comité de la liberté syndicale, Bulletin officiel, vol. LXX, 1987, série B, no 2, pp. 90-96, paragr. 323-333, et 246e rapport, Bulletin officiel, vol. LXIX, 1986, série B, no 3.

2.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 77e session, 1990.

3.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 1A), Conférence internationale du Travail, 86e session, 1998, pp. 183-184.

4.  Constitution politique: «Article 1.La Colombie est un Etat social de droit organisé sous la forme d'une République unitaire, décentralisée, démocratique, composée d'entités territoriales autonomes, attachée aux principes de la participation et du pluralisme, fondée sur le respect de la dignité humaine, sur le travail et sur la solidarité des personnes ainsi que sur la primauté de l'intérêt général».

5.  Source: Escuela Nacional Sindical. «Los derechos humanos de los trabajadores en 1997». Cuaderno de Derechos Humanos, núm. 5, ENS, Medellín, 1998. Voir l'encadré no 2, p. 27. Selon la même source, entre 1991, date à laquelle a été promulguée la nouvelle Constitution politique de la République de Colombie, et 1997, 1 083 travailleurs ont été assassinés dont 865 étaient des dirigeants syndicaux.

6.  Pour le 251e rapport, voir Bulletin officiel, vol. LXX, 1987, série B, no 2, pp. 90-96, paragr. 323-333. Pour le 246e rapport, voir Bulletin officiel, vol. LXIX, 1986, série B, no 3.

7.  Voir Bulletin officiel, vol. LXXI, 1988, série B, no 3, pp. 258 et suiv., paragr. 653 à 655.

8.  Voir le rapport du Professeur Philippe Cahier sur la mission effectuée en Colombie du 31 août au 7 septembre 1988, Bulletin officiel, vol. LXXI, 1988, série B, no 3, pp. 270 et suiv., annexé au 259e rapport du Comité de la liberté syndicale.

9.  Voir 265e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXII, 1989, série B, no 2, pp. 159-160, paragr. 491 et 493.

10.  Voir 275e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXIII, 1990, série B, no 3, paragr. 203.

11.  Voir 275e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXIII, 1990, série B, no 3, paragr. 203.

12.  Voir le 286e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXVII, 1993, série B, no 1, paragr. 359.

13.  Voir le 297e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXVIII, 1995, série B, no 1, paragr. 464 et 483.

14.  Voir le 297e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXVIII, 1995, série B, no 1, paragr. 477 et 478.

15.  Voir 306e rapport, Bulletin officiel, vol. LXXX, 1997, série B, no 1, paragr. 294.

16.  Voir le paragraphe 9 du 309e rapport, approuvé par le Conseil d'administration en mars 1998.

17.  Voir le paragraphe 82 du 309e rapport.

18.  Constitution politique, art. 53, paragr. 4: «Les conventions internationales du travail dûment ratifiées font partie de la législation interne».

19.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. Rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 73e session, 1987. Toutes les citations dans ce chapitre sont extraites de l'ouvrage mentionné, pp. 172 à 174.

20.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. Rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 76e session, 1989, p. 155.

21.  Op. cit., p. 157.

22.  Op. cit., p. 158.

23.  Op. cit., p. 280.

24.  Pour les observations formulées en 1990, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 77e session, 1990.

25.  Pour les observations formulées en 1991, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 78e session, 1991.

26.  Pour les observations formulées en 1992, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 79e session, 1992.

27.  Pour les observations formulées en 1993, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 80e session, 1993.

28.  Pour les observations formulées en 1994, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 81e session, 1994.

29.  Pour les observations formulées en 1995, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 82e session, 1995.

30.  Pour les observations formulées en 1996, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 4A), Conférence internationale du Travail, 83e session, 1996.

31.  Pour les observations formulées en 1997, voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 1A), Conférence internationale du Travail, 85e session, 1997.

32.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 1A), Conférence internationale du Travail, 86e session, 1998, pp. 183 et 184.

33.  Voir le rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport général et observations concernant certains pays. Rapport III (Partie 1A), Conférence internationale du Travail, 86e session, 1998, pp. 245 et 246.

34.  Voir Conférence internationale du Travail, 85e session, Compte rendu provisoire, p. 19/87.

35.  Document GB.273/15/2, 273e session, Genève, nov. 1998.

36.  Op. cit., p. 16.

37.  Op. cit., p. 14.

38.  Op. cit., p. 45.

39.  Op. cit., p. 14.

40.  Op. cit., p. 15.

41.  Op. cit., pp. 17-18.

42.  Op. cit., p. 13.

43.  Le document figurant en annexe «La violence en Colombie: contexte et complexité, implications pour les droits fondamentaux et le droit international humanitaire» (dorénavant cité comme annexe I), expose les caractéristiques du phénomène de la violence en Colombie.

44.  Op. cit., p. 16.

45.  Op. cit., p. 14.

46.  Op. cit., p. 14.

47.  Op. cit., p. 14.

48.  Op. cit., p. 19.

49.  Op. cit., p. 15.

50.  Op. cit., p. 12.

51.  Op. cit., p. 40.

52.  Op. cit., p. 9.

53.  Op. cit., p. 10.

54.  Op. cit., p. 16.

55.  Op. cit., p. 10.

56.  Op. cit., p. 12.


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