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GB.276/7/2
276e session
Genève, novembre 1999


SEPTIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

319e rapport du Comité de la liberté syndicale

 

Annexe I

La violence en Colombie: contexte et complexité.
Implications pour les droits fondamentaux
et le droit international humanitaire

Introduction

1.1. Le présent document a pour but d'exposer le contexte de la situation dans laquelle se développe le conflit armé interne qui déchire la Colombie et qui constitue surtout un point de référence indispensable pour comprendre les événements qui ont donné lieu à des actes de violence contre les travailleurs syndiqués du pays et qui sont à l'origine de l'intérêt que le Comité de la liberté syndicale de l'OIT a manifesté, en raison de la relation supposée de ces faits avec les conventions nos 87 et 98 de l'OIT, ratifiées par l'Etat colombien. La description et l'analyse du contexte social, politique, économique et militaire qui caractérise l'état actuel du pays cherchent à présenter une vision intégrale et plus objective des problèmes de la violence en Colombie.

1.2. Le propos essentiel du présent document est de mettre en évidence qu'il n'existe pas une politique de l'Etat visant à favoriser la violence contre les organisations et mouvements sociaux en Colombie. A cela s'ajoute la nécessité d'expliquer l'extrême complexité des phénomènes de violence dont souffre la nation colombienne. Il s'agit là d'un préliminaire indispensable pour interpréter la situation dans toute sa dimension, ainsi que les facteurs qui interviennent dans les violations des droits fondamentaux, l'identité et le rôle des auteurs de ces délits, le rôle de l'Etat colombien dans ce scénario et les réponses et actions possibles pour mettre fin à ces infractions, y compris celles qui affectent indirectement les droits d'association et de liberté syndicale des travailleurs colombiens.

1.3. L'explication et l'évaluation du cas colombien dans les termes susvisés permettront, subsidiairement, de parvenir à une série de conclusions sur la nature des actes de violence qui ont attiré l'attention de l'OIT, qui signifient un exercice englobant la genèse de ces phénomènes et qui, enfin, comportent des éléments permettant de porter un jugement sur les responsabilités auxquelles ils peuvent donner lieu. Ces conclusions, dont on trouvera les fondements dans les pages qui suivent, peuvent être résumées ainsi:

Caractéristiques de la violence en Colombie

2.1. Le pays est assailli par diverses sortes de violence, conjuguées simultanément, qui nécessitent de la part de l'Etat la constitution parallèle de divers fronts d'action. Les types de violence existants peuvent être classés comme suit, selon leur nature ou leur envergure: 1) violence résultant de la criminalité de droit commun ordinaire; 2) violence de la vie quotidienne; 3) violence d'ordre politique; 4) violence provenant du trafic de stupéfiants. Il y a donc quatre lignes principales de violence qui affectent la nation colombienne et auxquelles l'Etat doit faire face avec ses maigres ressources financières, matérielles et humaines. De plus, comme on le verra plus loin, il existe des liens entre les différentes formes de violence et les acteurs qui les protègent, lesquelles apparaissent sur des plans différents, rendant plus complexe et plus difficile la tâche de les réduire.

2.2. Dans le cadre d'une vision générale qui englobe les divers types de violence susmentionnés, il convient de considérer que le taux enregistré pour les sept principales villes du pays a été de 2 960 conflits pour 100 000 habitants, ainsi que l'a montré l'enquête nationale sur les foyers réalisée en 1997(57) . Au nombre des 11,9 pour cent de foyers affectés par des conflits, 84,6 pour cent étaient de gravité majeure, étant donné qu'il s'agissait de conflits de nature pénale, alors que 3,2 pour cent seulement des conflits étaient des conflits du travail(58) . Le dernier chiffre illustre assez les caractéristiques de la situation colombienne, car il montre que le niveau des conflits du travail est très bas, au contraire des conflits d'ordre pénal où les indicateurs des conflits sont très élevés. Ce panorama montre un environnement de travail assez tranquille, bien qu'il montre aussi des problèmes sérieux dans la nature des conflits majoritaires (pénaux) et dans la forme de les résoudre (la violence) qui entrent dans le cadre d'un conflit armé interne et d'une situation de criminalité débordante. Il y a peu de doutes maintenant sur la liaison entre les conflits de nature pénale et la violence comme phénomène explicite. Bien qu'une partie des infractions pénales ne nécessite pas le recours à la violence, la catégorie de délits les plus fréquemment commis en Colombie comporte la pratique de la violence(59) .

La situation est encore plus grave du point de vue pénal, et non dans le domaine du travail, si l'on considère que les chiffres précédents de l'enquête nationale sur les foyers correspondent à un espace urbain (sept villes principales) et non à l'espace rural, où les conditions de conflits sont principalement liées au champ du droit pénal et à la criminalité, et non aux conflits du travail étant donné l'industrialisation naissante des zones rurales colombiennes(60) .

En matière de solution des conflits qui trouvent leur origine dans le domaine du travail, le développement de l'action de tutelle (protection constitutionnelle) occupe une position spéciale en tant que mécanisme souple et efficace pour protéger les droits fondamentaux. Les statistiques de la Cour constitutionnelle en matière de solution des actions de cette nature indiquent que, pour l'année 1997, les citoyens ont eu recours à cet instrument afin de rechercher principalement la protection des droits de pétition (13 746 actions, correspondant à 26,25 pour cent du total), d'égalité (6 859 actions, correspondant à 13,10 pour cent du total), de procès équitable (6 227 actions, correspondant à 11,89 pour cent du total) et du travail (5 939 actions, correspondant à 11,34 pour cent du total). La sécurité sociale et le paiement de pensions et salaires occupent des rangs également détachés (2 515 et 1 080 actions, respectivement, correspondant à 4,8 et à 2,06 pour cent du total), alors que l'un des droits les moins invoqués est le droit d'association syndicale (393 plaintes équivalant à 0,75 pour cent du total durant l'année 1997).

Une légère amélioration a été enregistrée en 1998 en ce qui concerne le problème général de la criminalité par rapport à 1997. C'est ainsi qu'en 1998 on a enregistré 2 577 homicides de moins qu'en 1997, chiffres importants en valeur de vies humaines mais insatisfaisants étant donné que le total des homicides en Colombie a été catastrophiquement élevé en 1998 puisqu'il a atteint 26 350 homicides; les massacres, dont sont en majeure partie responsables les groupes d'autodéfense, ont enregistré une légère diminution de trois événements par rapport à 1997, mais ils restent élevés étant donné qu'on a enregistré 112 massacres en 1998; les enlèvements pour l'extorsion de fonds ont été massivement augmentés par la guérilla, puisqu'ils sont passés de 1 833 en 1997 à 2 388 en 1998; les actes de terrorisme avec usage d'explosifs enregistrés en 1998 ont atteint 1 680, en progression par rapport à 1997; les atteintes à l'intégrité physique ont été de 37 430 en 1998, ce qui représente un nombre de blessés inférieur de 5 147 par rapport à 1997(61) .

Tous les types de violence énumérés au début de ce chapitre sont représentés dans les homicides et les coups et blessures subis par la population. Les massacres sont commis, dans 70 pour cent des cas, par des groupes «d'autodéfense» d'extrême droite et, dans la majeure partie des cas restants, par des groupes de guérilleros. La délinquance de droit commun et les groupes de guérilleros se partagent les enlèvements de personnes et les vols dans les banques. Les actes de terrorisme relèvent des organisations de guérilleros et des groupes de trafiquants de drogue. Les vols ordinaires et les vols de voitures sont commis dans leur majorité par la criminalité ordinaire.

Le bilan total de la criminalité présente des chiffres particulièrement élevés qui indiquent une activité débordante de la délinquance, face à laquelle l'Etat colombien doit reconnaître les grandes difficultés qu'il affronte pour la contrôler, malgré les énormes efforts entrepris, sa volonté politique et ses grands investissements en matière de justice, de sécurité et de défense.

Depuis 1990, les homicides enregistrent une croissance alarmante. Selon les données de 1996, la Colombie détient le second indice d'homicides le plus élevé d'Amérique, très élevé en fait puisqu'il atteint un taux de 67 homicides par 100 000 habitants(62) .

La criminalité ordinaire qui couvre un large spectre d'infractions a atteint, au cours des dix dernières années, une moyenne historique, plus ou moins stable, de quelque 200 000 délits par an(63) . A part les problèmes de corruption, attentats à l'environnement, délits sexuels et autres actes punissables qui présentent des facettes et des implications nuisibles nécessitant l'attention des autorités, les délits contre la vie et l'intégrité physique des personnes sont les plus significatifs à côté des attentats contre les biens économiques.

En matière d'homicides, les 40 pour cent du total des morts violentes survenues en 1996 avaient une relation avec d'autres activités délictuelles, alors que 30 pour cent des homicides semblaient avoir pour motif un règlement de comptes, ce qui engloberait en principe 71 pour cent des homicides de la délinquance ordinaire et du trafic de drogue(64) . Selon les statistiques de la criminalité apparente, un total de 2 718 400 délits contre le patrimoine économique ont été commis entre 1958 et 1990(65) . Entre 1991 et 1996, un total de 601 541 délits contre le patrimoine économique ont été enregistrés, avec un coût estimé à 3,4 billions de pesos(66) . Entre 1958 et 1990, on a enregistré 1 111 177 cas de blessures aux personnes(67) . Entre 1991 et 1996, on a enregistré 192 070 lésions communes avec une incapacité supérieure à 30 jours pour leurs victimes, qui se sont traduites par des coûts de soins avoisinant 109 000 millions de pesos(68) .

Etant donné que la criminalité ordinaire est dirigée contre divers secteurs de la population civile sans discrimination particulière, des personnes qui occupaient des positions en vue dans diverses activités de la vie politique, sociale, économique ou du travail ont été victimes de cette criminalité. A titre d'exemple, on peut citer le cas de l'assassinat de María Arango Fonnegra (cas no 787), qui avait une longue carrière de travail en faveur du mouvement populaire colombien et des droits de l'homme et qui était connue comme militante de la gauche politique. Le cas est singulier car, en raison des liens de longue date qu'entretenait Mme Arango avec le Parti communiste, le crime fut interprété comme étant de caractère politique. Toutefois, Mme Arango a été assassinée par des délinquants de droit commun qui voulaient éviter de rembourser 85 millions de pesos qu'ils avaient escroqués à la dirigeante politique qui avait cessé toute activité politique plusieurs années avant son assassinat(69) . Les deux instigateurs, un complice et l'auteur matériel de l'homicide, furent détenus sur ordre du ministère public(70) .

On peut citer un autre exemple d'un cas similaire, à savoir l'assassinat d'Alfonso Vargas, qui était à l'époque Secrétaire général de la Confédération générale des travailleurs démocratiques (CGTD), lui aussi victime de la délinquance commune.

La violence de la vie quotidienne, distincte du crime organisé résultant de l'environnement socioculturel où elle est devenue un moyen pour résoudre les litiges, est bien présente dans les statistiques de la criminalité et ne peut être ignorée au moment de concevoir la construction d'un environnement de coexistence. Les manifestations les plus graves de ce type de violence sont les homicides, les blessures aux personnes et les morts résultant de la pratique illégale d'avortements dans des conditions inadaptées(71) . Les homicides au cours de rixes, qui peuvent être un produit typique de cette catégorie de violence, ont représenté 21 pour cent du total des homicides dans la période 1991-1996(72) .

En ce qui concerne la violence à caractère politique, les homicides, les agressions aux personnes, les massacres, les séquestrations et les extorsions de fonds sont les pratiques les plus fréquentes. Entre 1958 et 1990, les victimes de la subversion ont atteint un total de 27 304 morts, dont 3 326 appartenaient à la police nationale et aux forces militaires, alors que 23 978 étaient des civils(73) . Ainsi, ce sont les civils désarmés qui ont été les principales victimes des actions des groupes armés. Entre 1976 et 1990, quelque 687 guérilleros ont trouvé la mort au cours d'affrontements avec la force publique et 2 395 guérilleros furent capturés au cours de cette période(74) . Dans les années 1985 à 1996, le conflit armé a été assez intense avec 4 325 confrontations entre la force publique et la guérilla, 2 974 actes de sabotage et 1 126 actions de harcèlement, qui ont fait 16 625 morts: 4 552 civils, 4 400 membres des forces armées (police et armée) et 7 673 guérilleros(75) .

La guérilla colombienne représente la force insurrectionnelle qui a le plus recouru aux enlèvements dans l'histoire des groupes révolutionnaires dans le monde entier. La Colombie enregistre d'ailleurs le chiffre le plus élevé d'enlèvements dans le monde. Entre 1976 et 1990, on a enregistré 4 451 enlèvements de civils(76) . Entre 1985 et 1996, la délinquance politique a été responsable de l'enlèvement de 4 853 civils, sur un total de 6 204 enlèvements de civils(77) . Selon les chiffres du Programme présidentiel pour la défense de la liberté personnelle, 1 443 enlèvements pour extorsion de fonds ont été enregistrés en 1997 et 1 294 jusqu'au mois de septembre 1998. Sur ces chiffres, 364 enlèvements sur toute l'année 1997 et 370 enlèvements jusqu'à septembre 1998 sont imputables à la subversion. En ce qui concerne les enlèvements politiques pour extorsion de fonds, 258 actes de cette nature ont été enregistrés entre janvier et septembre 1998, attribués principalement aux forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) (48,84 pour cent) et à l'Armée de libération nationale (ELN) (35,66 pour cent). Ces chiffres n'incluent pas les membres de la force publique retenus par la subversion et dont le total dépasse 300.

Les chiffres susmentionnés concernant la criminalité n'incluent pas les données relatives au trafic de drogues illicites, qui constitue l'un des fronts supplémentaires où l'Etat colombien, pour des raisons politiques, éthiques, de coexistence interne et de responsabilité face à la communauté internationale, doit agir en utilisant principalement ses ressources humaines, financières et matérielles. Le crime organisé en Colombie est le deuxième producteur de feuilles de coca dans le monde, qui est la matière première utilisée pour la préparation de la cocaïne, bien que la Colombie détienne le record mondial de l'éradication des cultures illicites tant par arrachage manuel que par fumigation aérienne; la délinquance colombienne conserve des cultures et des activités de contrebande de marijuana (cannabis); elle possède des cultures de plus en plus étendues de coquelicot, matière nécessaire à l'élaboration de l'héroïne, le crime organisé colombien étant le principal distributeur de cocaïne au monde. De même dans ce domaine, l'Etat colombien doit consacrer une attention spéciale à la recherche et à la confiscation de l'argent illicite que ce commerce génère en quantités astronomiques, au contrôle des matières chimiques utilisées dans les procédés d'élaboration des drogues et à la criminalité secondaire dérivée de l'offre et de la demande de drogues prohibées. Il convient de signaler également les ressources et les programmes destinés au développement alternatif des zones affectées par les cultures illicites, qui constituent une priorité pour le gouvernement national.

La superficie des cultures de feuilles de coca était de 45 000 hectares (1995), alors que 5 000 hectares étaient plantés de marijuana (1995)(78) . L'industrie illégale de la drogue génère entre 2 000 et 5 000 millions de dollars par an, et le capital accumulé pourrait avoir atteint 66 000 millions de dollars au cours des dernières années d'exploitation de la production et du trafic(79) . De tels chiffres illustrent le défi gigantesque qu'affronte l'Etat colombien pour combattre un phénomène qui dépasse de plus en plus les ressources dont il dispose pour continuer sa lutte, avec l'assistance limitée de la communauté internationale. Ils portent également témoignage de la grande capacité des bandes du narcotrafic pour générer la criminalité et la violence.

En effet, le trafic de drogue est responsable d'une partie importante des homicides commis dans le pays. «Les départements les plus violents sont concentrés dans des zones reconnues comme étant sous l'influence des narcotrafiquants et dans les nouveaux départements où existent des cultures illicites(80) .» Les antécédents des bandes de trafiquants de drogues illicites dans les actes de violence relèvent d'une longue tradition qui atteignit sa plus grande expression dans la guerre narcoterroriste contre l'Etat et les agents de la société civile qui s'étaient opposés à leurs desseins(81) .

En plus de sa participation aux actes terroristes commis sans distinction contre la population civile, afin de forcer l'Etat à cesser sa persécution, et en plus des attentats commis contre les fonctionnaires de l'Etat et qui frappèrent à mort les juges, les policiers, les ministres d'Etat, etc., le narcotrafic a lancé une offensive fatale contre des éléments représentatifs de la société civile. C'est ainsi que les bandes de trafiquants de drogues ont commis des assassinats sélectifs de dirigeants politiques (dont quatre candidats à la présidence), de journalistes et de dirigeants syndicaux. Ils se sont également compromis activement dans les séquestrations de fonctionnaires de l'Etat et des membres de leurs familles, de journalistes et de dirigeants politiques. Enfin, les bandes de trafiquants apparaissent également dans l'organisation et le financement de bandes d'autodéfense, responsables de massacres contre des paysans et des travailleurs syndicalistes. En outre, il ne faut pas négliger les liens qu'entretiennent les groupes de trafiquants de drogues avec le conflit armé et la criminalité, car ils ont participé activement aux homicides, aux massacres, au terrorisme et aux séquestrations.

Pour ce qui est des caractéristiques de la population victime des actions criminelles relatées dans les paragraphes précédents, nous avons déjà dit qu'elle ne correspond pas essentiellement à des dirigeants et à des travailleurs syndicalistes, ces derniers n'étant touchés par la violence que dans la mesure où ils se voient mêlés au conflit armé interne ou tombent aux mains de la criminalité ordinaire; mais ils ne font pas l'objet d'une persécution violente en raison de leurs activités syndicales(82) .

Au contraire, la violence a affecté la totalité de la population colombienne, dans des proportions correspondant aux caractéristiques du conflit armé interne et aux modalités et types de violence commise. Dans la mesure où ce conflit est essentiellement rural, c'est la population rurale qui a été la plus agressée. Les paysans ont également été les principales victimes des massacres commis par des groupes d'autodéfense d'extrême droite. Dans le cas des massacres de travailleurs syndicalistes, comme on le verra plus loin, ces massacres ont été concentrés dans la zone d'Urabá (département d'Antioquia) où l'activité principale est l'exploitation industrielle de la banane. Les extorsions de fonds ont touché des éleveurs et des paysans qui étaient des petits et moyens propriétaires terriens. Les actes de séquestration ont touché des familles de toutes les classes sociales, spécialement en zone urbaine, et de la haute classe moyenne, ainsi que les propriétaires de grandes et moyennes superficies de terres rurales.

En 1996, 93 pour cent des victimes de délits d'homicide étaient des hommes et les 7 pour cent restants étaient des femmes; 19 pour cent des personnes assassinées avaient entre 21 et 25 ans, 18,1 pour cent étaient âgées de 26 à 30 ans; 59 pour cent des homicides ont eu lieu sur la voie publique; 50 pour cent des personnes qui sont mortes étaient sous l'effet de substances enivrantes(83) .

Les coûts sociaux, économiques et politiques des diverses catégories de violence dans le pays sont difficiles à calculer. A peine est-il possible de calculer les coûts économiques dont les chiffres représentent les énormes sacrifices de l'Etat et de la société pour contenir la violence, tempérer ses effets ou simplement en payer le prix. Dans les dépenses générées par la violence sont inclus les pertes en vies humaines utiles, celles occasionnées par le terrorisme, les émoluments payés en surcoûts de santé et de sécurité privée, les surcroîts de dépenses militaires, les montants perdus du fait des enlèvements et des extorsions de fonds, sans compter les pertes en biens matériels par suite des délits contre le patrimoine économique.

Ainsi, dans la période comprise entre 1991 et 1996, les coûts bruts du conflit armé interne ont représenté 9 pour cent du PIB, soit une somme de 6,1 billions de pesos, avec une moyenne annuelle de 1,5 pour cent du PIB. Dans ce même domaine, et dans la même période de 1991 à 1996, le pays s'est vu obligé de supporter des dépenses militaires dépassant de 3,7 billions de pesos la moyenne des dépenses militaires en Amérique latine(84) .

En plus des pertes en vies humaines et en biens matériels, la violence issue de la criminalité ordinaire a pour effet de détourner l'attention des forces de sécurité de l'Etat et de ses agences en général qui, sans cela, auraient pu consacrer leurs efforts à lutter contre d'autres formes de violence. Etant donné les dimensions de la criminalité ordinaire, décrites dans les paragraphes précédents, les ressources matérielles, humaines et financières que l'Etat colombien est obligé d'investir ou de détourner pour faire face à ce phénomène sont considérables, comme on peut l'imaginer.

Les coûts du conflit armé, les investissements nécessaires pour freiner les divers phénomènes de la criminalité ainsi que les dépenses nécessaires pour protéger la vie des personnes et des groupes les plus vulnérables vis-à-vis de la violence ont contribué à étrangler les finances publiques. Au cours des dernières années, le pays a investi plus de 1 000 millions de dollars par an rien que pour combattre le trafic de la drogue(85) .

Face au poids des dépenses que l'Etat et la société ont dû assumer, il convient, pour compléter le tableau, de donner un coup d'œil sur les quelques indicateurs économiques relatifs aux recettes de la nation, et qui doivent servir à financer les coûts générés par la violence. La nation a dû supporter un déficit élevé et permanent de sa balance commerciale, représentant 4 100 millions de dollars en 1995, 4 756 millions de dollars en 1996 et 4 790 millions de dollars en 1997(86) . Dans ce domaine, la situation est loin d'être encourageante, étant donné que les prix internationaux du café, produit traditionnel principal de la Colombie, ont enregistré une cotation très basse en 1998, au-dessous de 1,30 dollar par livre, alors que le prix du pétrole, produit sur lequel le pays avait fondé certaines espérances, a atteint un de ses cours internationaux les plus bas de son histoire, soit 10,83 dollars par baril. En outre, la croissance de l'industrie en 1998 a été égale à zéro. La dette extérieure s'élève à 31 665 millions de dollars(87) . Le déficit public en 1998 a atteint 6,6 pour cent du PIB, ce qui constitue un chiffre à haut risque pour l'ensemble de l'économie.

Les auteurs de la violence

Les auteurs de la violence criminelle en Colombie sont multiples. En plus des bandes et des agents qui sont responsables de la délinquance ordinaire, et en plus des citoyens ordinaires qui sont éventuellement impliqués dans des actes de violence, il existe des groupes structurés disposant d'un grand pouvoir économique et coercitif, qui atteignent un degré élevé de développement au sein du phénomène du crime organisé et de la délinquance politique. Le présent chapitre sera consacré à la description des caractéristiques de ces groupes. A l'intérieur de ces groupes du crime organisé et du crime politique, les organisations de guérilleros, les bandes et les groupes d'autodéfense de l'extrême droite et les groupes et les bandes associés au narcotrafic se détachent en raison de l'envergure et de l'extension des actes de violence qu'ils commettent. Nous commencerons la description par les groupes de guérilleros qui sont les organisations armées les plus anciennes d'Amérique et qui sont, par ailleurs, les seules actives à côté de deux organisations de guérilleros au Pérou et de deux autres au Mexique.

Le principal groupe armé opérant en Colombie, qui se fait appeler Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), a été fondé sous cette dénomination en 1966 bien qu'il y eût des bandes armées qui opéraient depuis le début des années cinquante(88) . Le groupe est formé en majorité d'individus d'origine paysanne. Les FARC ont suivi une filiation communiste de type orthodoxe, sympathisante des partis communistes traditionnels qui étaient connus pour leur tendance prosoviétique(89) . En général, ils sont le produit de la période historique connue en Colombie sous le nom de «La Violence», comprise entre 1946 et 1964(90) .

A l'heure actuelle, les FARC constituent une organisation politico-militaire autonome qu'on ne pourrait pas qualifier de bras armé d'un parti politique(91) . Quant à leurs objectifs, «les Forces armées révolutionnaires de Colombie ont été créées afin de lutter pour la prise du pouvoir pour le peuple, avec comme objectif de nous constituer en armée du peuple par opposition à l'armée qui est au service de la bourgeoisie et des classes exploitantes»(92) .

Dans leur structure, il existe un «secrétariat» qui constitue le pouvoir exécutif de la guérilla, suivi d'un «état-major central» chargé de la direction générale de l'organisation, qui a à sa tête Manuel Marulanda Vélez (alias «Tirofijo»)(93) . Il existe ensuite des «blocs», ayant compétence sur une région territoriale déterminée, qui regroupent divers «fronts», lesquels constituent les unités de base principales qui sont les subdivisions de l'appareil militaire. Les «blocs» sont dirigés par leurs «commandants» respectifs et un «état-major»; le même schéma est reproduit dans les «fronts»(94) . Actuellement, les FARC possèdent sept «blocs» et 66 «fronts», avec un effectif total estimé entre 7 000 et 8 000 hommes en armes. En termes généraux, l'organisation dispose d'une structure hiérarchique rigide et verticale.

A leurs débuts et durant la plus grande partie de leurs trente-trois années d'activités subversives, les guérillas des FARC se trouvaient dans des zones périphériques situées aux frontières agricoles du pays, où elles opéraient comme une force qui prétendait protéger les intérêts des petits propriétaires de terres rurales(95) , tandis qu'elles croissaient en force et en puissance. Au cours de cette période, elles ont accumulé les combattants, les armes, les ressources financières et l'expérience militaire. Elles ont démontré qu'elles possédaient une capacité guerrière avancée, de caractère offensif, qui se traduit en une nouvelle étape du conflit armé. Depuis la «Septième Conférence» tenue en 1982, elles ont établi un plan pour s'étendre vers les zones stratégiques, d'importance économique dans le secteur agricole et commercial, en raison des ressources matérielles existantes ou comme base d'accès aux régions d'importance politique, économique ou sociale. Elles ne sont absentes que de huit départements sur les trente-trois qui constituent la division politique territoriale du pays. Leur présence, à divers degrés d'intensité et d'importance, touchait en 1995 un total de 522 municipalités sur les 1 069 que compte le pays(96) .

Dans ces conditions, elles dominent certaines zones qui leur permettent d'établir des corridors de communication avec d'autres régions où elles concentrent des fronts militaires. C'est pourquoi elles disposent d'une capacité considérable pour concentrer des unités militaires importantes (environ 2 000 guérilleros), provenant de régions séparées, afin d'attaquer des cibles importantes comme les bases de l'armée nationale ou des agglomérations d'une certaine importance. Elles possèdent un armement typique pour la guerre d'infanterie, renforcé dans quelques-uns de ses fronts avec des mitrailleuses lourdes et des armes d'artillerie légère comme les mortiers.

L'Armée de libération nationale (ELN) a été créée en 1965, à l'instar des autres organisations de guérilla en Amérique latine sous l'inspiration de la révolution cubaine et de la théorie dite du «foyer» révolutionnaire(97) . «Dans les principes de son programme, l'Armée de libération nationale affirme: «L'Armée de libération nationale est née de la nécessité pour le peuple colombien de posséder un bras armé combatif et conscient, capable de lui assurer, à travers la lutte frontale contre ses ennemis, la prise du pouvoir et l'établissement d'un système social conforme au développement du pays, qui libère les masses de l'exploitation à laquelle elles ont été soumises durant toute leur histoire(98) .»

Durant plus d'une décennie, l'ELN a essayé de développer sans aucun succès son modèle d'insurrection, avec une maigre présence sur le territoire national, sans influence politique ou militaire et avec un effectif faible en hommes. Vers le milieu des années soixante-dix, elle avait été réduite à quelques petites bandes, après une offensive de l'armée nationale et suite à la mort de la plus grande partie de ses dirigeants(99) . Toutefois, après une période de survie minimale au cours de laquelle elle s'était maintenue comme un phénomène endémique avec une activité très réduite et peu importante, elle renaquit grâce aux ressources économiques obtenues de l'extorsion de fonds à des sociétés multinationales qui réalisaient des exploitations pétrolières ou des travaux de construction d'infrastructure pétrolière. Les capitaux réunis à cette époque lui permirent de financer la création de nouvelles colonnes armées, pour constituer une nouvelle base pour le développement d'activités militaires et de financement économique, qui furent suivies de l'accroissement soutenu de ses actions militaires, du nombre de ses effectifs et de sa présence territoriale.

La majeure partie des ressources nécessaires pour financer les activités militaires de l'ELN provient de l'enlèvement de personnes (nationaux ou étrangers), de l'extorsion de fonds aux entrepreneurs et autres membres de la population civile, des rendements financiers des capitaux accumulés et, dans une moindre mesure, des attaques contre des banques ou d'autres personnes(100) . Il n'existe pas de preuve qui permette de conclure que l'ELN a bénéficié de la production ou du trafic de drogues illicites(101) . Ses actions les plus nuisibles sont le dynamitage des oléoducs qui transportent le pétrole, occasionnant ainsi de graves dommages à l'économie nationale et à l'environnement(102) .

Sa direction est principalement constituée de personnes appartenant à la classe moyenne(103) . Elle est organisée en «fronts» ou «colonnes» qui opèrent avec une grande autonomie militaire et politique pour obtenir les ressources de financement, ce qui fait que la dépendance hiérarchique par rapport à son «commandement central» est faible et relative. Elle dispose de 35 «fronts» et de près de 3 000 hommes armés. Après la mort de son principal chef en 1998, le prêtre espagnol défroqué Manuel Pérez, mort de mort naturelle, c'est Nicolás Rodríguez Bautista (alias «Gabino») qui en assume la direction.

Les principales unités de l'ELN sont stationnées dans des zones où existent des ressources naturelles, et spécialement dans des régions d'exploitation pétrolière ou adjacentes aux lignes des oléoducs qui transportent le pétrole brut. Selon des chiffres remontant à 1995, elles étaient présentes dans 280 municipalités(104) .

L'Armée populaire de libération (EPL) est la troisième organisation de guérilla existant dans le pays. Il s'agit du résidu de l'ancien mouvement de guérilla du même nom fondé en 1967 par le Parti communiste marxiste léniniste (PC/ML)(105) . PC/ML s'était séparé du Parti communiste traditionnel qu'il accusait de «révisionnisme», se ralliant à ce que l'argot de la gauche appelle la «ligne prochinoise».

L'EPL regroupait des éléments de la classe moyenne parmi ses dirigeants et des paysans. Sa principale zone d'influence était la région du Nord-Est (zone limitrophe des départements de Córdova et d'Antioquia) et la région voisine d'Urabá (département d'Antioquia). Avec les réformes politiques introduites en Chine après la mort de Mao Tse Tung, le mouvement s'est dirigé vers les orientations d'Enver Hoxa en Albanie. Finalement, en 1980, l'EPL et son bras politique ont abandonné le maoïsme(106)  et, en 1984, ils ont commencé un processus de négociation avec l'Etat colombien dont le succès en 1991 se traduisit par la démobilisation des groupes de guérilleros et l'amnistie des membres ralliés au processus de paix. C'est à ce moment-là qu'a été fondé le mouvement politique légal dénommé «Espérance, paix et liberté», qui conserve le sigle EPL, et dont les membres sont en situation grave d'antagonisme avec les FARC, l'organisation qui cherche à s'emparer des anciennes zones d'influence militaire et politique de l'EPL(107) . Parallèlement, une dissidence minoritaire du groupe de guérilla reste armée et continue à se faire appeler Armée populaire de libération sous la conduite de Francisco Caraballo(108) .

Un quatrième groupe de guérilla est constitué par le Mouvement Jaime Bateman. Il s'agit là aussi d'une dissidence de l'ancien groupe d'insurgés Mouvement du 19 avril (M-19) qui a refusé de se rallier au processus de paix conclu avec cette organisation. Le M-19 était apparu en 1970, mais ce n'est qu'en 1974 qu'il a commencé ses opérations. Il regroupait des personnes de la classe moyenne, spécialement des professionnels. Le mouvement Jaime Bateman est un petit groupe opérant dans les départements de Valle et de Tolima, et dont les effectifs sont équivalents à ceux d'un des fronts des FARC. Il participe sporadiquement à des enlèvements et à des affrontements avec la force publique.

Il existe un cinquième groupe d'insurgés. Il s'agit d'une minuscule organisation terroriste qui opère sous les noms d'Organisation révolutionnaire du peuple (ORP) et de Mouvement Jorge Eliecer Gaitán (JEGA), qui a à son actif quelques enlèvements et assassinats sélectifs(109) . Il entreprend des actions par intermittence, et son principal chef est Hugo Antonio Toro Restrepo, alias «Comandante Bochica». Il n'a pas de présence dans les zones rurales, ni de «fronts» ou de colonnes armées. Il opère dans les départements de Risaralda et Quindío.

Au total, la guérilla compte environ 10 000 militants armés. Sa présence territoriale en 1995 couvrait 622 municipalités sur les 1 069 qui composent la carte de la Colombie.

Sur l'autre bord idéologique apparaissent les bandes armées d'extrême droite, aux origines très variées et disposant de différentes formes d'organisation. Les médias ont l'habitude de les appeler «groupes paramilitaires», au sens universel de ce terme, étant donné que les bandes qui se font appeler ainsi en Colombie n'ont aucun lien organique avec l'Etat. En effet, à la différence d'autres pays qui ont combattu les phénomènes d'insurrection, il n'existe pas en Colombie de forces authentiquement paramilitaires pour combattre la guérilla(110) . Les groupes d'autodéfense des paysans du Guatemala, les forces de défense civile d'El Salvador et les rondes de paysans du Pérou étaient toutes des structures officialisées ou officielles paramilitaires, armées, entraînées et commandées par les forces militaires de leurs pays respectifs pour lutter, dans le cadre d'une stratégie militaire, contre les forces des guérillas de ces pays. En Colombie, les organisations faussement qualifiées de «paramilitaires» sont des bandes armées d'extrême droite formées en marge de l'ordre légal et, pour cette raison, poursuivies par les autorités de l'Etat colombien.

S'agissant de la formation des bandes en question, on peut signaler deux caractéristiques: a) l'existence de groupes divers, nombre d'entre eux étant intermittents, avec une origine complexe; b) l'influence des trafiquants de drogues, en association avec d'autres secteurs sociaux, dans les cas les plus pertinents.

De nombreuses bandes antisubversives, dites de «propreté sociale»(111) , organisées comme milices ou s'adonnant à des activités de tueurs à gages(112)  ont opéré en Colombie. La majorité de ces groupes ont eu une existence courte, un bas niveau de structuration, un profil idéologique très faible, des discours et des pratiques d'où l'éthique était totalement absente et un environnement d'action locale assez restreint. Les groupes urbains semblaient dédiés à la lutte contre la délinquance commune, parfois alternativement ou simultanément à la réalisation de leurs propres commerces illicites. Les groupes ruraux étaient engagés, principalement, dans le combat contre la subversion et, subsidiairement, dans la lutte contre certaines formes de délinquance commune, tout en paraissant, en de nombreuses occasions, avoir des connexions avec les trafics illicites, notamment en matière de drogues.

Au nombre des groupes qui ont eu une certaine activité, on peut citer des organisations comme «Alpha 83», «Los Tiznados», «Terminator», «Muerte a Abigeos»-Maos, «El Embrión», «Pro Limpieza del Valle del Magdalena Medio», «Movimiento Anticomunista Colombiano», «Los Grillos», el «Escuadrón Machete», «Falange». Ces groupes se sont tous dissous.

Les groupes plus sophistiqués, qui sont apparus dans la première moitié des années quatre-vingt, étaient issus directement des organisations du narcotrafic dirigées par Gonzalo Rodríguez Gacha et Pablo Escobar(113) . Ils s'étaient alors alliés avec les frères Fidel et Carlos Castaño pour développer la constitution des groupes armés privés ou «d'autodéfense»(114) .

Les groupes primitifs ont été formés dans la zone du Magdalena Medio (région des départements de Boyacá, Cundinamarca, Antioquia et Santander) et dans la zone nord-orientale du département d'Antioquia, dans la région centrale du pays, où les trafiquants avaient acquis des fermes, pour réagir contre les activités d'extorsion que réalisait la guérilla contre les propriétaires de terres rurales(115) .

Les groupes d'autodéfense du Magdalena Medio sont passés par diverses étapes opérationnelles en fonction des objectifs politiques et militaires qu'ils poursuivaient. Dans la première phase, ils ont éradiqué les groupes de guérilleros de la zone du Magdalena Medio. Dans la seconde phase, ils ont mené une campagne d'extermination contre les militants de l'Union patriotique, un front politique légal de gauche fondé par le Parti communiste et les FARC (la participation politique de la guérilla, à travers des rebelles amnistiés, obéissait au processus de paix de 1984) comme représailles contre l'interférence des FARC dans le commerce du narcotrafic, avec lesquelles ils s'étaient alliés provisoirement, pour ensuite avoir avec elles des conflits sans merci(116) . Dans une troisième phase, ils ont mené des campagnes de terreur, opérant des massacres, dans les régions d'influence de l'EPL (Urabá) ou des FARC (nord-est du département d'Antioquia)(117) . Dans la phase terminale, ils étaient plus liés aux appareils de sécurité des trafiquants de drogues ou aux bandes de tueurs à gages dont ils louaient les services, ils ont participé à de nombreux homicides de personnalités (par exemple l'attentat contre le candidat du parti libéral à la présidence, Luis Carlos Galán) et à des assassinats en série de membres de la police nationale(118) . Ces groupes d'autodéfense avec un commandement hiérarchique unifié ont eu une origine régionale déterminée, mais ils ont fini par atteindre une couverture nationale(119) .

Le deuxième carré de bandes d'autodéfense, auquel ont participé certains résidus de la bande organisée dans le Magdalena Medio, avait son épicentre dans les zones rurales du département de Córdova, où s'étaient retrouvées les bandes d'autodéfense du nord-est d'Antioquia qui avaient été organisées sous la direction des frères Fidel et Carlos Castaño. Les frères Castaño, recherchés par les autorités de l'Etat colombien sous diverses charges, ont étendu rapidement leur organisation jusqu'à la région d'Urabá, dans le département d'Antioquia. A l'époque, ils ont même eu des confrontations avec la bande de Pablo Escobar contre laquelle ils ont mené une sanglante guerre privée.

Les bandes d'autodéfense poursuivent aussi une stratégie de type territorial, visant à la constitution de pouvoirs locaux, même quand elles combinent l'instrument de la violence avec l'acquisition des terres, ce qui leur donne une influence supplémentaire en termes sociaux, économiques et politiques en plus des bénéfices évidents.

Dans le cadre de l'offensive qu'elles ont menée en 1997, les bandes d'Autodéfense unies de Colombie (AUC) ont étendu leur action à des régions ayant une présence traditionnelle de la guérilla (départements de Bolívar, Chocó, Santander et Meta), livrant des combats aux guérillas de l'ELN et des FARC. Toutefois, leur tactique principale repose sur l'exécution de massacres au sein de la population civile, afin que celle-ci reste la base sociale de la guérilla ou pour l'obliger à livrer combat à cette dernière. De même, elles commettent des assassinats sélectifs d'activistes politiques, qu'elles supposent être associés à la guérilla, au nombre desquels on peut citer des défenseurs des droits de l'homme, des dirigeants et des travailleurs syndicalistes. Elles ont également enlevé des dirigeants de la guérilla et des membres de leurs familles.

Selon les chiffres remontant à 1993, les groupes d'autodéfense étaient présents dans 138 municipalités, couverture qui a dû s'élargir depuis le début de leur offensive nationale en 1997(120) . Les effectifs estimés des AUC varient entre 4 000 et 5 000 hommes(121) .

Dans le panorama des groupes armés qui opèrent en Colombie, il convient de mentionner également les escadrons des bandes de narcotrafiquants. Les trafiquants de drogues, en plus de leurs liens avec les organisations d'autodéfense, possèdent leurs propres appareils militaires et de sécurité, qu'ils utilisent pour combattre les forces de sécurité de l'Etat, éliminer les adversaires ou concurrents dans le négoce illicite, et enlever et assassiner des fonctionnaires de l'Etat ou des personnalités de la société civile qui ont adopté des mesures contraires à leurs intérêts ou adressé des critiques à leur encontre(122) . La liste est longue des candidats à la présidence, ministres d'Etat, journalistes, dirigeants syndicaux, policiers, activistes des partis politiques, magistrats de la Cour suprême de justice, juges, procureurs, hommes d'affaires, concurrents du trafic de drogues et des membres des familles des personnes susmentionnées, qui ont été assassinés. Les groupes de trafiquants ont également utilisé le terrorisme comme tactique pour arriver à leurs fins, faisant sauter des avions en plein vol, dynamitant les véhicules aux explosifs sur les voies publiques et détruisant à la bombe des bâtiments de l'Etat ou de sociétés privées.

Leurs actions visaient à défendre leurs intérêts économiques, échapper à la justice ou forcer la dérogation ou l'inapplication des mesures qui prévoient l'extradition des nationaux pour être jugés à l'étranger pour des délits de trafic de drogues.

Dans la majorité des cas, les trafiquants, au lieu de créer des groupes armés spéciaux et connus, se sont servis des énormes ressources économiques pour sous-traiter avec des bandes armées ou des escadrons de tueurs à gages dont ils louaient les services.

Une des pratiques les plus fréquentes des groupes de narcotrafiquants a été l'infiltration des institutions de l'Etat ou de la société civile par le biais d'éléments corrompus(123) .

En général, ces organisations ont utilisé leur pouvoir armé aussi bien dans la lutte contre tout ce qu'elles estimaient être communiste que pour garantir les conditions appropriées au commerce des drogues illicites(124) .

Evolution du conflit armé interne

La stratégie conçue et appliquée par la guérilla, tant en ce qui concerne les FARC que l'ELN, a consisté à augmenter rapidement et à diversifier ses ressources financières, à multiplier le nombre de ses fronts en doublant les fonds existants, et à s'ériger en pouvoirs locaux en s'infiltrant dans la vie quotidienne des hommes d'influence(125) .

Dans la poursuite de son objectif d'augmenter et diversifier ses ressources économiques, la guérilla s'est liée à divers commerces illicites qui lui permettaient d'amasser d'énormes capitaux. En général, les moyens utilisés par la guérilla pour se procurer ces ressources ont provoqué sa confrontation avec les bandes du narcotrafic.

C'est ainsi que la confrontation entre trafiquants de drogues et organisations de guérilla, en particulier les FARC, constitue l'un des aspects qui ont le plus contribué à l'intensification, à l'extension et à l'âpreté de la violence en Colombie. La première conséquence du conflit qui a éclaté entre le narcotrafic et la guérilla a été une vague d'assassinats atroces(126) . Les bandes de trafiquants commencèrent alors une série d'assassinats sélectifs contre les dirigeants et les militants de la gauche politique, et des dirigeants syndicalistes et sociaux de même filiation, conduisant ainsi le conflit vers les villes et l'étendant à la population civile.

Dans le sud du pays, où se trouvent les principales cultures illicites et où la grande partie des paysans participent à ces cultures, la guérilla des FARC a constitué une large base sociale qui la soutient et apparaît aussi en confrontation avec les forces de sécurité de l'Etat. Précisément, étant donné que les forces armées doivent s'acquitter des tâches d'éradication des cultures illicites et, en même temps, exécuter des opérations militaires contre les colonnes des FARC en vue de les neutraliser, elles rencontrent, dans le cas du dernier objectif, assez d'hostilité au sein de la population civile qui ne voit dans les détachements militaires que des forces qui prétendent les dépouiller de leurs sources de survie. Les «programmes de substitution des cultures» ont été lancés pour contrecarrer les effets négatifs du problème des cultures illicites. Toutefois, le succès de ces programmes s'est trouvé réduit, étant donné que les produits agricoles traditionnels ne bénéficient pas des prix internationaux qui sont payés pour les matières premières de la cocaïne et de l'héroïne.

Les organisations de guérilla recourent fréquemment à l'utilisation de procédés délictuels en vue d'obtenir rapidement les ressources économiques dont elles ont besoin. Bien que pour certains cela implique une perte de leurs objectifs politiques, il est certain que le recours à ces procédés est un moyen pour atteindre leurs objectifs politiques(127) .

La guérilla colombienne a rompu avec l'éthique, sous prétexte que la fin justifie les moyens, bien que la principale conséquence ait été un rapide et gigantesque enrichissement dont elle profite. «Ce qui précède a permis à la guérilla de faire progresser ses revenus de 349 000 millions en 1991 à plus d'un billion en 1996, c'est-à-dire 0,58 pour cent du PIB. Entre 1991-1996, les revenus ont atteint 3,6 billions de 1995, soit 5,3 pour cent du PIB(128) .»

«Les enlèvements, les vols et les extorsions de fonds de la part de la guérilla ont généré pour ces groupes, entre 1991 et 1996, des revenus s'élevant à 1,7 billion(129) .» Par ailleurs, des chiffres similaires illustrent un autre problème, à savoir la difficulté à convaincre les membres de la guérilla à se démobiliser, étant donné que dans les activités délictuelles qu'ils exercent ils trouvent un moyen lucratif de subsistance et un authentique style de vie, parfois le seul, quand il s'agit de personnes qui, depuis leur enfance, ont été liées à la guérilla.

L'extension des fronts des guérillas s'est accélérée depuis 1982. La capacité de feu de la guérilla a été augmentée, multipliant ainsi la violence et augmentant le nombre et la variété des secteurs sociaux civils affectés. De même, la croissance de la subversion a augmenté les exigences de la force publique qui doit se dédoubler pour faire face à un ennemi qui ne projette le combat que quand il est sûr de sa supériorité numérique et qui, en règle générale, attaque en se déplaçant jusqu'aux zones montagneuses et forestières où il est difficile de le poursuivre. Il ne faut pas perdre de vue, par ailleurs, que les forces armées doivent, en plus, assigner une grande partie de leurs troupes à la garde des ouvrages et des ressources d'infrastructure indispensables, tels que les ponts, les centrales hydroélectriques, les barrages, les routes, les pylônes électriques, les antennes de télécommunications, etc., et se voient obligées de placer leurs unités dans des positions statiques.

En ce qui concerne l'objectif stratégique de conserver des pouvoirs locaux effectifs, le recours à la violence contre tous ceux qui ne partagent pas son projet politique n'est pas la seule tactique de la guérilla mais sa tactique préférée. Cette violence, déployée pour les objectifs déjà indiqués, a été utilisée contre des organisations sociales et politiques diverses, y compris celles ayant des affinités avec d'autres organisations de guérilla; contre les autorités municipales représentées par les maires et les conseillers municipaux(130) ; contre les hommes d'affaires et les travailleurs des sociétés commerciales, industrielles ou de travaux publics; contre les propriétaires et les paysans s'occupant d'agriculture.

Dans le premier cas, les organisations de guérilla ont entrepris des actions contre les dirigeants et les travailleurs syndicalistes, en appliquant la stratégie qui a pour but d'acquérir le contrôle des organisations sociales ou éviter qu'elles ne soient influencées par des tendances politiques adverses. Cela a été patent, surtout, dans la région d'Urabá (département d'Antioquia) où les travailleurs et dirigeants de SINTRAINAGRO (s'occupant de production de bananes) ont été poursuivis systématiquement par la guérilla.

Les agressions des FARC et la dissidence de l'EPL-Caraballo contre le mouvement politique «Espérance, paix et liberté» ont une large trajectoire dans laquelle ont toujours été imbriquées les questions du contrôle territorial armé d'une région, dans ce cas Urabá, et le contrôle des organisations sociales, dans ce cas le syndicat des travailleurs de la banane et les organisations communautaires des agglomérations de la région. Le conflit, ainsi établi, remonte à la lutte entre les FARC et l'Armée populaire de libération (EPL) avant sa démobilisation et son accord politique avec l'Etat colombien en 1991.

Contrairement au cadre susvisé, et démontrant que l'évolution de la problématique dans le cas d'Urabá n'était pas directement liée aux relations entre les travailleurs et les employeurs, il faut signaler que, et c'est à peine logique en raison de la situation de violence qui existait, même quand dans certaines périodes les tensions n'étaient pas absentes, les relations entreprise/travailleurs ont été normales durant la période de trêve entre les guérillas. «En fin de compte, les accords ont été concentrés sur la rédaction et la signature de 229 conventions collectives du travail, au moment où on signalait, pour l'année en cours, un accroissement de la productivité bananière de 30 pour cent et une augmentation des exploitations proche de 15 pour cent(131) .»

Dans d'autres cas, la violence de la guérilla s'est déployée contre les travailleurs et les hommes d'affaires exploitant la palme africaine. Dans ce cas, les travailleurs ont été obligés de suspendre la production sous les menaces ou les actions de violence effectives. On peut également citer en exemple les actions terroristes contre la cimenterie Nare (située dans le département d'Antioquia) et qui ont entraîné sa destruction et la perte d'emploi pour des dizaines de travailleurs.

De même, dans certains cas, des travailleurs syndicalistes ou des dirigeants syndicaux ont été détenus sous l'accusation de «rébellion» et de «terrorisme» sur ordre du ministère public de la nation. Celui-ci, comme on l'a déjà indiqué, est un organisme juridictionnel complètement indépendant du pouvoir exécutif. Ses décisions judiciaires, prises en complète autonomie, dans le cadre des garanties des procédures légales, nécessitent l'existence d'une preuve de responsabilité pénale pour délivrer un mandat d'arrêt(132) .

Les centrales syndicales ont été claires en déclarant que les organisations syndicales sont neutres face au conflit armé interne et que les activités syndicales qu'elles déploient n'ont pas pour objet de collaborer ni de contribuer aux objectifs politiques de la guérilla, mais qu'elles répondent aux intérêts et objectifs des travailleurs.

L'offensive de la guérilla pour améliorer sa position stratégique dans les provinces a inclus également une plus grande présence et une plus grande activité dans les régions qui produisent une part importante de la richesse nationale(133) . Cette offensive s'est accompagnée d'une démonstration de force en vue de se substituer aux autorités locales officielles, comme par exemple lors des dernières élections régionales, lorsque les insurgés ont menacé de mort les candidats de 23 municipalités, rien que dans le département de Cundinamarca(134) . Entre 1995 et août 1997, la guérilla et dans une moindre mesure les bandes d'autodéfense ont assassiné deux membres du Parlement, un gouverneur, 26 maires et 141 conseillers municipaux(135) . En 1997, quelque 920 candidats aux élections ont dû renoncer sous la menace et 121 ont été enlevés(136) . Il convient de signaler que, malgré la violence, les élections se sont déroulées avec le plus fort taux de participation de l'histoire de la Colombie.

Quand elle n'a pas l'intention de remplacer lesdites autorités par d'autres schémas de pouvoir, la guérilla utilise sa force pour faire pression sur les décisions des administrations locales. Ainsi, la guérilla, toujours dans le cadre de sa stratégie de construction de bases locales du pouvoir, fait pression sur les autorités municipales des mairies situées dans ces régions pour détourner les ressources du trésor public vers des actions ou des programmes définis par la subversion elle-même. Avec cet archétype d'actions, la guérilla non seulement augmente son influence locale, mais elle apparaît devant les citoyens comme étant la bienfaitrice d'œuvres d'intérêt commun, sans compter qu'elle contribue au fractionnement de l'unité de l'organisation de l'Etat et obtient des ressources économiques supplémentaires.

En ayant à l'esprit l'objectif précis de défendre la population civile et les institutions démocratiques, l'Etat colombien, en accomplissement de ses devoirs constitutionnels et légaux, a entrepris toutes les actions possibles pour freiner la violence. Et malgré quelques succès obtenus, la force publique a dû payer un lourd tribut de sacrifices. C'est ainsi que dans une embuscade à un convoi de l'armée nationale à Puerres (département de Nariño), 31 militaires ont été tués en 1996. Le 21 décembre 1997, dans l'attaque à la base militaire de Patascoy (département de Nariño) déclenchée par les FARC, 11 soldats ont été tués et 18 autres enlevés. Dans l'attaque (1998) des FARC contre la ville de Mitú (département de Vaupés), 110 policiers et militaires ont été tués, ainsi que 10 civils, sans compter l'enlèvement de 63 policiers. Dans l'attaque (1998) des FARC contre la municipalité de Miraflores (département de Guaviare), siège de la principale base de lutte contre les stupéfiants de la police nationale, d'où étaient effectuées la majeure partie des fumigations de cultures illicites, près de 100 personnes ont été tuées, en majorité des membres de la police et de l'armée nationale, 150 ont été blessées et 129 ont été enlevées. Dans l'assaut des FARC (1998) contre la base militaire de La Uribe (département de Meta), un grand nombre de membres de la force publique ont été tués ou enlevés. Les FARC (1998) ont détruit la base militaire de Las Delicias (département du Caquetá) avec un grand nombre de pertes militaires. Sur le site d'El Billar (département du Caquetá), une embuscade a été tendue à un bataillon de l'armée nationale avec de grandes pertes de vies humaines. En 1998, plus de 500 agents de la police nationale ont été tués dans l'exercice de leur devoir. Actuellement, 226 militaires et 184 agents de police sont encore séquestrés par la guérilla.

La question des droits de l'homme revêt une importance vitale dans l'évolution et les résultats du conflit. Dans un pays qui fait face à un grave conflit armé interne, il peut arriver que des éléments de la force publique se voient impliqués dans des infractions aux droits de l'homme, malgré la réprobation qu'une telle conduite soulève de la part de l'Etat. En outre, il est clair que l'Etat colombien et ses institutions ne peuvent se consolider comme une alternative face aux groupes de guérilleros et à leur recherche de la vie facile au moyen de la criminalité qu'en développant la démocratie, en défendant l'ordre juridique, en stimulant la participation des citoyens et en renforçant les droits fondamentaux, autrement dit en se transformant en gardiens des droits de l'homme tout en poursuivant implacablement ceux qui les transgressent.

C'est pourquoi, lorsque des éléments isolés et individuels des forces de sécurité de l'Etat commettent des infractions aux droits de l'homme, ces pratiques ne sont ni acceptées ni tolérées car elles ne font pas partie de la politique officielle de l'Etat colombien, mais bien au contraire elles sont en contradiction avec ses principes et sa nature. Toutefois, ces idées ne seraient que des coquilles vides si elles ne se traduisaient en politiques claires de prévention et de répression des infractions aux droits de l'homme qui pourraient être commises par les agents de l'Etat; il en va de même pour ce qui est du comportement des effectifs de l'armée. En ce qui concerne le premier aspect, il existe une politique transparente traduite en de nombreuses mesures qui seront décrites et analysées dans les deux prochains chapitres du présent document. Pour ce qui est des fruits de cette politique, il convient de porter à son crédit les résultats obtenus dans la mesure où les infractions aux droits de l'homme de la part de la force publique ont enregistré une baisse notable(137) .

Ce qui est paradoxal dans la question des droits de l'homme, c'est le comportement contradictoire des forces de la guérilla face à ce sujet: «les groupes de guérilleros ont une vision très ambiguë de la question. Ils comprennent le respect des droits de l'homme comme une obligation de la part de l'Etat, et leurs violations de la part de la force publique sont des occasions qu'il ne faut pas rater pour les dénoncer devant l'opinion publique nationale et internationale, afin de dénier toute légitimité et tout soutien à l'Etat. Mais, par ailleurs, ils estiment que les violations des droits de l'homme qu'ils commettent eux-mêmes systématiquement et fréquemment sont pleinement justifiées, étant donné qu'ils y ont recours pour atteindre des objectifs supérieurs. C'est-à-dire que les fins nobles justifient les moyens atroces(138) .»

Dans ce contexte, la déclaration de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme sur les infractions aux droits de l'homme et au droit international humanitaire commises par les organisations des guérilleros en Colombie revêt une importance capitale(139) .

Quant aux bandes d'autodéfense, elles ne constituent pas un ennemi de moindre importance pour l'Etat colombien. Leur stratégie principale consiste à imposer des états de terreur, provoquant des déplacements forcés de la population, à travers le recours aux massacres ou la menace d'y recourir. Etant donné que dans les zones où se trouve la guérilla, la population civile doit, par convenance ou par peur, collaborer avec la guérilla, les Autodéfenses unies de Colombie (AUC), avec la volonté de retirer à la guérilla le soutien de la population, prétendent introduire une peur plus grande ou un intérêt supérieur de survie. Enfin, dans la logique des autodéfenses, toute personne suspecte d'aider les guérilleros doit être assassinée(140) . C'est pourquoi, les AUC sont un des principaux auteurs des infractions aux droits de l'homme en Colombie.

Avec ces procédés, les bandes d'autodéfense cherchent: a) à forcer la population civile à se déplacer, privant ainsi la guérilla de sources d'appui logistique et d'information; b) à obliger la guérilla à se présenter en combat ouvert, pour éviter les attaques contre des populations civiles; c) à obtenir l'appui de secteurs de la population civile à leur cause en la confrontant avec la guérilla, sous la menace d'une plus grande violence ou en la séduisant par divers moyens.

Dans le cadre de cette dynamique, les combats militaires entre les bandes d'autodéfense et les FARC se sont généralisés en 1998 dans les départements de Chocó et de Córdova, et entre l'ELN et les bandes d'autodéfense dans le sud du département de Bolívar. Dans tous les cas, c'est la population civile paysanne et indigène qui en a le plus souffert.

Prise entre deux feux, la population civile a opté pour des migrations internes en se déplaçant vers des zones non affectées par le conflit armé ou vers les villes.

Les bandes d'autodéfense ont commis également des attaques ou se sont impliquées dans des combats contre les forces armées et autres autorités de l'Etat, constituant ainsi une autre force de violence qui détourne l'attention et les ressources des unités de la force publique. A cet égard, on peut citer quelques exemples:

Au lieu-dit «La Rochela», les bandes d'autodéfense ont tendu une embuscade à une commission judiciaire, tuant tous ses membres, juges et agents de la police judiciaire. Dans le département du Meta, elles ont tendu une embuscade en octobre 1997 aux membres d'une autre commission d'enquête, assassinant 11 personnes dont des procureurs, des personnels chargés d'investigation judiciaire dépendant du ministère public, des agents du service administratif de sécurité et des officiers de l'armée nationale. Dans la municipalité de Villanueva (département de Guajira), les bandes d'autodéfense ont attaqué des effectifs de la police nationale(141) . A San Diego (département de Cesar), des combats ont eu lieu entre l'armée et un commandement des bandes d'autodéfense paysannes de Córdova et Urabá (ACCU) au cours desquels un délinquant trouva la mort et deux autres furent capturés(142) .

Plusieurs dizaines de membres des bandes d'autodéfense ont été détenus sur mandat délivré par le ministère public de la nation. En outre, l'action répressive de l'Etat contre les bandes d'autodéfense a enregistré des résultats notables, au nombre desquels il convient de citer l'arrestation de 120 membres des bandes d'autodéfense en 1998, pour un total de 248 membres qui sont toujours en prison(143) . De même, des personnes soupçonnées d'être impliquées dans l'organisation et la direction de bandes d'autodéfense, comme Victor Carranza, ont été faites prisonnières et sont actuellement poursuivies devant la justice pénale.

La connexion entre les bandes d'autodéfense et le trafic de drogues, unis dans un processus d'acquisition des terres productives, constitue un problème supplémentaire. «La problématique de ce processus est que le système d'achat et de contrôle des terres est associé à la violence effrénée des bandes de paramilitaires, qui commettent des attentats contre la population civile pour réclamer l'expulsion de la guérilla(144) .» Le problème qui en résulte est d'autant plus difficile à résoudre que la capacité économique du narcotrafic pour se doter d'effectifs militaires et de les entretenir est énorme.

L'action des bandes d'autodéfense et des groupes de narcotrafiquants est une menace supplémentaire pour l'autorité de l'Etat et l'ordre juridique national, ainsi que pour les principes essentiels de l'Etat social de droit, étant donné que les pratiques des groupes d'autodéfense constituent la négation même de cet Etat. Les bandes d'autodéfense et les groupes de narcotrafiquants proclament un projet politique qui est aussi un projet de pouvoirs régionaux, non seulement différent du projet que défend l'Etat colombien, mais aussi contraire à ce projet, et c'est pourquoi sa mise en œuvre se fait au détriment de la stabilité et de l'autorité des institutions nationales.

«Les énormes capitaux que la criminalité organisée tire de l'industrie de la drogue sont devenus la principale source de violence, de corruption et de dégradation sociale, et un grand obstacle pour le développement(145) .»

«La vérité» est l'une des principales victimes du déroulement de ce conflit. Contrôler l'information et la manipuler afin de l'accommoder à des objectifs politiques immédiats est une pratique fréquemment utilisée pour obtenir des avantages, calomnier les adversaires et couvrir ou détourner les responsabilités. Pour conforter ce qui précède, on peut citer, à titre d'exemple, divers cas retentissants:

L'assassinat d'Elsa Alvarado et Mario Calderón, employés d'une organisation non gouvernementale (ONG) qui, au nombre des diverses fonctions qu'elle assume, consacre une partie de ses efforts à veiller sur les droits de l'homme en Colombie. Dans ce cas précis, l'assassinat de MmeAlvarado et de M. Calderón a été présenté à l'opinion publique et aux médias comme un crime contre les défenseurs des droits de l'homme. En réalité, tous les deux travaillaient sur des projets relatifs à la conservation de l'environnement au sein de l'ONG qui les employait.

L'assassinat d'Eduardo Umaña Mendoza, avocat pénaliste, connu dans le pays comme activiste des droits de l'homme et défenseur en matière pénale. Sa mort fut expliquée à l'étranger, de manière concluante et indiscutable, comme étant due à sa participation en qualité d'avocat défenseur de plusieurs travailleurs de l'Union syndicale ouvrière (USO), poursuivis par le ministère public de la nation sous l'accusation d'avoir participé à des attentats terroristes. Néanmoins, aucune preuve n'a été avancée pour étayer une telle conclusion.

L'assassinat de María Arango Fonnegra, déjà évoqué, que l'on a attribué à des forces d'autodéfense de l'extrême droite, en raison des connexions de la victime avec la gauche politique et le mouvement populaire, mais qui, en réalité, était un crime de la délinquance ordinaire.

Dans le massacre de Machuca (département d'Antioquia) survenu le 18 octobre 1998, l'Armée de libération nationale (ELN) a dynamité l'oléoduc qui passe à proximité de cette agglomération, causant la mort de 72 civils ainsi que de graves brûlures à des dizaines d'autres, le combustible s'étant répandu en flammes suite à la déflagration. Le commandement de l'ELN accusa alors l'Armée nationale d'avoir mis le feu au pétrole, pour pouvoir accuser l'ELN de commettre des attentats contre la population civile. Ce n'est que quelques jours plus tard, devant la difficulté de nier sa responsabilité, que la direction de l'ELN reconnut que la déflagration et la mort des civils s'étaient produites par suite d'une «erreur de prévision» des guérilleros qui avaient commis l'attentat terroriste.

Comme cela a déjà été indiqué en plusieurs occasions, les menaces de mort et les violations des droits fondamentaux des membres d'organisations syndicales ne sont pas motivées par leur activité syndicale, mais par leur participation à des activités de militantisme politique. A titre d'exemple, plusieurs dirigeants syndicalistes font l'objet de protection dans le cadre du programme de protection de l'Union patriotique (UP), non en raison de leur qualité de syndicalistes, mais en raison de leur appartenance à l'UP ou à d'autres courants de la gauche politique. Tel est le cas de Wilson Borja, président de FENALTRASE, membre de l'UP, et de Jesús González, en charge du secrétariat des droits de l'homme de la Centrale unique des travailleurs (CUT) (qui n'est pas membre de l'UP). C'est précisément à ce programme, conçu pour protéger les membres de l'UP, et qui a servi à protéger également des partisans d'autres tendances politiques, que les individus menacés peuvent recourir. Ils sont alors escortés par des gardes du corps qui sont entraînés, armés, dotés de véhicules officiels et payés par l'Etat.

La problématique de la violence et l'évolution du conflit armé ont eu également des répercussions sur le fonctionnement des institutions, et en particulier sur l'administration de la justice, occasionnant des retards et, par suite, renforçant les possibilités d'impunité face au crime. Le taux annuel d'enregistrement moyen de nouveaux procès pénaux pour chaque juge pénal est de 442,80 procès, alors qu'en 1997 ont été introduits 402 952 procès pénaux(146) . Cela implique un rythme supérieur au taux de règlement des procès pénaux, lequel, bien qu'élevé, reste en tout cas insuffisant face à la quantité considérable de procès pénaux qui entrent dans le système, ajoutés au volume des procès accumulés des années précédentes. Il convient d'observer que le taux moyen annuel de règlement de procès terminés était de 385,35 procès par juge(147) .

La tâche d'administrer la justice, rapidement et efficacement, confiée à la magistrature a été également affectée par le recours à la violence contre les fonctionnaires judiciaires. Outre les attentats déjà mentionnés des groupes d'autodéfense, les bandes du narcotrafic et la guérilla ont également commis des assassinats contre des fonctionnaires judiciaires. Dans la période 1979 à 1991, un total de 515 fonctionnaires judiciaires ont fait l'objet d'actes de violence, dont 278 homicides(148) . En raison de la situation exposée ci-dessus, les enquêtes judiciaires dans les zones d'influence de la guérilla et des bandes d'autodéfense sont extrêmement difficiles.

En outre, dans le cadre des signes positifs qui marquent l'évolution du conflit armé interne, il convient de relever que les municipalités à forte participation aux processus démocratiques électoraux sont celles qui souffrent le moins de la violence, alors que les municipalités où sont présents des groupes armés illégaux (guérilla, autodéfense, narcotrafic) sont celles où sont enregistrés les indices de violence les plus élevés(149) . Le diagnostic est clair: on a besoin de davantage de démocratie et de participation citoyenne, et de moins d'interférence de la part de groupes armés qui prétendent s'arroger la représentation et les aspirations de la population.

En conclusion de ce chapitre, il faut signaler que, d'après les caractéristiques de la violence décrites ci-dessus, et plus spécifiquement des formes de violence utilisées par les membres de la force publique qui agissent en marge de la légalité et en association avec des groupes d'autodéfense, et de celles commises par les mêmes groupes d'autodéfense et les organisations de guérilleros, en ce qui concerne les crimes commis contre la population civile, ces formes de violence constituent des infractions au droit international humanitaire et, dans le cadre de la communauté internationale, ce sont les organismes internationaux prévus dans le droit international qui ont compétence pour en connaître. Ainsi, comme cela a déjà été exposé, la Colombie, en tant qu'Etat partie aux principaux instruments internationaux des droits de l'homme et du droit international humanitaire, répond de manière adéquate, dans le cadre de compétence des organismes créés à cet effet, qu'ils soient dérivés de normes conventionnelles ou qu'ils aient une origine non conventionnelle, aux demandes qui lui sont formulées, et présente les rapports qu'elle doit rendre en exécution de ses obligations internationales en la matière.

Activité de l'Etat pour faire face à la violence

La protection des droits de l'homme et du droit international humanitaire occupe une place prioritaire du Programme de l'Etat colombien, dont l'importance et la gravité ne sont pas cachées, et qui ne fait pas l'objet d'une simple préoccupation désarmée et passive. C'est ce que le Président de la République, Andrés Pastrana, a clairement défini dans la présentation du «Programme pour la protection des droits de l'homme» en Colombie: «l'Etat colombien reconnaît la gravité et le sérieux de la situation des droits de l'homme, c'est le Président de la République qui le dit, lui qui personnifie l'Etat et la volonté populaire». Pour cette raison également, le deuxième personnage de l'Etat colombien, le Vice-président de la République, Gustavo Bell, a été chargé de coordonner les efforts des divers organismes de l'Etat en vue de protéger les droits de l'homme, en apportant toute la collaboration nécessaire à l'Unité des droits de l'homme du ministère public de la nation. Pour les mêmes raisons, le gouvernement actuel a poursuivi le processus d'adoption de mesures visant à sauvegarder les droits fondamentaux de la population colombienne, dans le cadre d'une politique d'Etat qui avait déjà des antécédents importants.

La Constitution politique promulguée en 1991 a créé l'Office de défense du peuple, une entité autonome en termes administratifs et financiers, ayant pour fonctions la sauvegarde des droits des citoyens. L'Office de défense du peuple, par le biais de son bureau chargé de la protection des droits de l'homme, maintient une présence permanente dans les zones de conflits les plus critiques, reçoit les plaintes sur les violations des droits fondamentaux et entreprend les vérifications nécessaires en vue d'adopter les mesures politiques ou judiciaires les concernant.

L'un des objectifs principaux de la réforme constitutionnelle de 1991 a été de modifier la structure et le fonctionnement de l'administration de la justice, dans le cadre d'une politique qui avait pour principal objet l'amélioration de l'efficacité et la lutte contre l'impunité. Au nombre des modifications introduites dans la Constitution, on peut citer la création de la Cour constitutionnelle, la naissance du Conseil supérieur de la magistrature et l'organisation du ministère public de la nation, en plus de la reconnaissance de la juridiction indigène. Parallèlement, les coûts de la justice ont augmenté de 49 pour cent au cours des six années suivantes(150) .

La Constitution politique de 1991 a consacré l'action de tutelle (recours constitutionnel de protection) comme un recours judiciaire extraordinaire avec des formalités très rapides, afin de donner aux citoyens un instrument effectif pour la protection de leurs droits fondamentaux.

Un processus profond d'épuration et de restructuration de la police nationale a été entrepris depuis 1990, afin d'en exclure les membres ayant des antécédents de violation des droits de l'homme ou de corruption. C'est ainsi qu'au cours des trois dernières années 8 500 policiers en uniforme ont été licenciés dans le cadre du programme de restructuration de la police. Ces mesures ont été jugées nécessaires pour rétablir la confiance des citoyens dans la police, condition essentielle pour que les forces de police puissent accomplir leurs missions de protection des droits des citoyens. Le résultat de ce processus, mis en valeur durant plusieurs années, a été très satisfaisant et il se reflète dans divers indicateurs, comme par exemple la très sensible diminution des plaintes pour violations des droits de l'homme commises par des agents de la police, et la reconnaissance internationale réitérée à la police colombienne pour ses succès contre la criminalité. Les effectifs de la police nationale ont été augmentés au cours des trois dernières années et ils atteignent aujourd'hui 103 000 personnes, ce qui représente une force équivalente à la police des Etats-Unis, dont le nombre d'habitants est bien supérieur à celui de la Colombie.

Une des stratégies conçues pour combattre la violence réside dans l'élimination des sources économiques qui ont servi aux auteurs de ces violences pour financer leurs activités. A cette fin, la loi no 333 de 1996 a été promulguée en vue de doter les autorités d'un instrument juridique efficace pour résoudre le problème d'expropriation des biens d'origine illicite(151) . Actuellement, le ministère public traite 123 recours en déchéance de propriété de biens acquis illicitement, au nombre desquels figurent des biens saisis pour une valeur de 364 000 millions de pesos(152) .

La nation s'est engagée à fond dans le cadre de la politique conçue pour renforcer la justice afin de combattre l'impunité, de rétablir l'autorité de l'Etat, de protéger la vie, les biens et les droits fondamentaux des citoyens. La Colombie est restée le pays de la région andine ayant le plus grand nombre de magistrats, 4 800, suivie dans la région par le Venezuela qui dispose de 1 272 magistrats; la Colombie est aussi la nation disposant du nombre le plus élevé d'unités juridictionnelles de la région andine, 3 259, distançant ainsi de loin le Venezuela, le second pays, qui ne dispose que de 1 270 unités; c'est aussi l'Etat de la région andine ayant la plus grande distribution territoriale de son système judiciaire, avec 33 circonscriptions, par comparaison à 25 au Pérou, le second pays de la zone. C'est également la nation de la région andine qui investit le plus dans son système judiciaire avec 425 865 029 dollars en 1998, presque le double des investissements du pays le plus proche; c'est enfin l'Etat de la région andine qui a l'indicateur de budget judiciaire le plus élevé par tête d'habitant, à savoir 35,7 assez loin de son suivant immédiat, le Venezuela, qui dispose d'un indicateur de 10,7(153) . La Colombie a investi 1,25 pour cent du PIB dans le secteur de la justice, l'indice le plus élevé des 27 dernières années, avec les exceptions plus récentes de 1994 et 1995(154) .

L'évaluation empirique de l'action de la justice contre le crime organisé fait ressortir des progrès notables. Ainsi, entre 1992 et 1995, une étude des procès judiciaires intentés a montré le démantèlement de 120 bandes s'adonnant au crime organisé, avec l'arrestation de tous leurs membres. Dans ce chiffre figurent des bandes de délinquants de droit commun, ainsi qu'un grand nombre de groupes d'autodéfense, de milices et de bandes de tueurs à gage(155) .

Les principales bandes du pays spécialisées dans le trafic de drogues, dont certaines étaient impliquées dans le soutien et l'organisation de groupes d'autodéfense, ont été démantelées avec l'arrestation ou la mort de leurs leaders et cadres principaux. Il convient de mentionner, entre autres, les bandes de Pablo Escobar (mort), Carlos Ledher (condamné à la prison), Gonzalo Rodríguez Gacha (mort), les frères Rodríguez Orejuela (condamnés à la prison), José Santacruz (mort), Nelson Urrego (arrêté) et Reinaldo Murcia (arrêté).

Les efforts énormes déployés pour améliorer le fonctionnement de l'administration de la justice ont permis de réaliser un progrès notable dans les principaux indicateurs de gestion. En 1998, la Colombie disposait d'un juge pour 12 305 habitants(156) . Entre 1992 et 1995, 7 012 sentences ont été prononcées dans des cas de terrorisme, d'homicide, de massacre, de narcotrafic, de rébellion et d'autres infractions graves commises par le crime organisé(157) . De son côté, en 1997, la justice pénale militaire a prononcé 822 sentences à l'encontre de membres des forces armées pour infractions diverses(158) . En 1998, d'autres mesures ont été prises, comme la condamnation, par la justice pénale militaire, de deux officiers et de deux sous-officiers qui avaient participé à des actions qui avaient abouti à la mort de 13 personnes à Riofrío (département de la Valle). En outre, le gouvernement national a décidé la création du «Comité spécial de renforcement des enquêtes sur les droits de l'homme», en tant que mécanisme supplémentaire d'action contre le crime, et dont les membres appartiennent au niveau le plus élevé de l'administration publique(159) .

Le ministère public de la nation a créé l'Unité des droits de l'homme, en tant que corps spécialisé d'investigateurs ayant les qualifications les plus élevées, et dotée de toutes les ressources économiques indispensables pour son fonctionnement, dans le but de traiter des cas les plus problématiques de violence. Actuellement, l'Unité des droits de l'homme s'occupe de 864 procès et elle a obtenu l'arrestation de 259 accusés. Au nombre des personnes arrêtées et traduites en justice par le ministère public figurent 120 membres d'organisations d'autodéfense et 90 guérilleros (1998)(160) . Le nombre total des personnes détenues présumées membres d'organisations d'autodéfense s'élève à 248(161) . Au nombre des succès du ministère public, on peut citer l'arrestation et les procédures entamées contre les chefs présumés des bande d'autodéfense. Entre septembre 1997 et février 1998, les agents de la force publique ont tué 29 membres des groupes d'autodéfense(162) .

En 1998, et dans le cadre de l'ordre juridique colombien, la peine d'extradition a été rétablie, selon laquelle les auteurs de délits commis à l'étranger ne pourraient plus trouver refuge à l'intérieur des frontières nationales. Cette mesure touche les chefs des bandes de trafiquants de drogues qui figurent parmi les principaux acteurs de la violence qui secoue le pays.

Les enquêtes sur les crimes commis contre les défenseurs des droits de l'homme ont bénéficié d'une priorité spéciale de la part des autorités colombiennes. C'est ainsi que le ministère public de la nation a enregistré des résultats tangibles dans les enquêtes sur tous les cas, qui ont abouti à l'arrestation des coauteurs principaux des cinq délits, au nombre desquels il convient de citer les assassinats d'Eduardo Umaña Mendoza (détenus) et de Jesús María Valle Jaramillo (cinq détenus) auxquels il convient d'ajouter les assassinats, déjà mentionnés, de María Arango Fonegra (quatre détenus), d'Elsa Alvarado et de Mario Calderón (cinq détenus).

Des résultats importants ont été obtenus en 1998 dans le cadre de la lutte contre le crime. Un total de 6 298 personnes ont été arrêtées sous l'inculpation d'homicide, 14 281 personnes ont été appréhendées par la Commission des délits de lésions personnelles; 217 personnes séquestrées ont été libérées par la police nationale, ce qui représente le nombre le plus élevé de libérations de personnes séquestrées de l'histoire du pays; 386 séquestrateurs ont été arrêtés; des biens volés ont été récupérés pour une valeur de 555 000 millions de pesos(163) . Dans le cadre des actions entreprises contre la production et le commerce de drogues illicites, source principale de la violence dans le pays, on peut citer l'éradication d'un total de 63 140 hectares de cultures illicites de coca et de coquelicots; la saisie de 55 tonnes de cocaïne, de 39 tonnes de marihuana et de 350 kg d'héroïne et de morphine; la destruction de 190 laboratoires pour la transformation des drogues; l'arrestation de 1 364 personnes accusées de trafic de drogues; la confiscation de 1 127 tonnes de facteurs de production chimique solides et de 1 866 257 galons liquides pour la transformation des drogues(164) .

Le gouvernement national a décidé de démembrer et de dissoudre la brigade XX d'intelligence militaire de l'armée nationale, sur laquelle pesaient des soupçons pour la participation de certains de ses membres à des violations des droits de l'homme et à des activités subversives contre le gouvernement légitime(165) . Bien qu'il n'existe pas de preuves judiciaires concluantes sur les activités délictueuses des membres de la brigade susmentionnée, le gouvernement national a agi de façon drastique car il n'est pas disposé à tolérer des soupçons à l'encontre des unités des forces armées.

Pour ce qui est de la relation supposée de certains membres de la force publique avec des groupes illégaux d'autodéfense ou de «justice» privée, le gouvernement a été clair et transparent en reconnaissant qu'il s'agit là de cas isolés qui ne constituent aucune expression d'une politique de l'Etat, sans compter que les responsables sont poursuivis avec toute la rigueur de la loi. Sur cette question, qui revêt un caractère fondamental pour l'Etat colombien et pour la communauté internationale, il est essentiel de se référer au rapport de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. L'importance du jugement de l'Organisation des Nations Unies sur cette affaire réside précisément dans le fait que cette organisation internationale est compétente pour connaître des infractions aux droits de l'homme et au droit international humanitaire. Dans son chapitre de conclusion, le rapport susmentionné précise le caractère occasionnel de la conduite conjointe ou de l'implication de membres de la force publique avec des groupes de justice privée(166) .

Parallèlement, le Bureau des droits de l'homme au ministère de la Défense nationale a été créé avec mission de s'occuper de la politique de prévention dans ce domaine et de la formation d'une culture de respect des droits de l'homme au sein de l'institution militaire. Le Manuel des droits de l'homme est un texte d'étude obligatoire dans les académies militaires pour les membres des forces armées.

Le gouvernement national a décidé d'introduire une réforme du Code pénal militaire afin de donner à la justice ordinaire mandat de connaître des infractions au droit international humanitaire ou aux droits de l'homme dans lesquelles auraient pu être impliqués des militaires ou des policiers, qui seraient ainsi exclus de la compétence de la justice pénale militaire. Bien que les violations des droits de l'homme commises par des membres de la force publique n'occupent qu'un rang secondaire dans les statistiques générales(167) , la réforme de la justice pénale militaire vise à établir une transparence totale des procès pénaux intentés aux membres des forces armées, afin d'éliminer toute méfiance vis-à-vis d'un favoritisme qu'ils pourraient recevoir de la part d'autorités, elles aussi militaires(168) . C'est ainsi que la réforme promulguée sera, en grande partie, une reconnaissance au niveau des textes de loi, de la jurisprudence et des décisions judiciaires qui ont déjà été prononcées par les tribunaux en une saine interprétation de la loi et de la Constitution(169) . Dans ces arrêts, il a été indiqué que les crimes de lèse-humanité ne peuvent pas être considérés comme ayant été exécutés en tant qu'actes commis en service ou en application des attributions inhérentes à la fonction militaire afin d'être protégés par l'immunité militaire.

Outre les amendements législatifs susmentionnés, des mesures ont été prises pour modifier la législation pénale ordinaire, en vue de renforcer les instruments juridiques existants et d'incorporer pleinement les normes des droits de l'homme et du droit international humanitaire dans le système juridique pénal interne(170) . En ce sens, et sur l'initiative du ministère public de la nation, un projet intégral de code pénal a été présenté au Congrès de la République, dont la révision et l'examen avancent rapidement au Parlement.

La législation pénale en vigueur permet de sanctionner nombre d'attentats aux droits de l'homme ou au droit international humanitaire, sous diverses incriminations pénales, avec une dénomination différente dans le Code pénal(171) . Le projet introduit maintenant des délits spécifiques en vue de sanctionner spécialement et avec des peines plus élevées ces infractions ou de nouvelles infractions, organisant systématiquement les formes relatives à ce sujet et, surtout, reconnaissant expressément la pertinence des droits de l'homme et du droit international humanitaire pour le système pénal colombien. Cette primauté avait déjà été établie par la Cour constitutionnelle, quand elle a déclaré que les droits de l'homme consignés dans les traités internationaux ratifiés par l'Etat colombien étaient la règle suprême pour l'interprétation constitutionnelle de l'ordre juridique(172) .

Au nombre des réformes introduites dans le projet de Code pénal, de nouveaux délits sont prévus, comme la «disparition forcée» (art. 161)(173) , le «génocide» (art. 100), «l'apologie du génocide» (art. 101), «l'homicide sur personne protégée» (art. 135)(174) , les «lésions sur personnes protégées» (art. 136), la «torture sur personne protégée» (art. 137), «l'utilisation de moyens et méthodes de guerre illicites» (art. 138), la «perfidie» (art. 139)(175) , les «actes de terrorisme» (art. 140), les «actes de barbarie» (art. 141), les «traitements inhumains et dégradants et les expérimentations biologiques sur personne protégée» (art. 142), les «actes de discrimination raciale» (art. 143), la «prise d'otages» (art. 144), la «détention illégale et la privation d'un procès équitable» (art. 145), la «contrainte à fournir un appui guerrier» (art. 146), le «dépouillement sur le champ de bataille» (art. 147), la «négligence des moyens de secours et d'assistance humanitaire» (art. 148), les «entraves aux tâches sanitaires et humanitaires» (art. 149), la «destruction et l'appropriation de biens protégés» (art. 150), la «destruction de biens et installations à caractère sanitaire» (art. 151), la «destruction ou l'utilisation illicite de biens culturels et de lieux de culte» (art. 152), les «attaques contre les œuvres et installations qui contiennent des forces dangereuses (art. 153), les «représailles» (art. 154)(176) , la «déportation, l'expulsion, le transfert ou le déplacement forcé de populations civiles» (art. 155), les «attentats à la subsistance et la dévastation» (art. 156), le «défaut de moyens de protection de la population civile» (art. 157)(177) , le «recrutement illicite» (art. 158), l'«exaction ou les contributions arbitraires» (art. 159), la «destruction de l'environnement» (art. 160), sans compter l'aggravation de la peine prévue pour le délit de «torture» (art. 173)(178) .

En accord avec ce qui précède, le gouvernement national a accepté le 10 décembre 1998 la compétence du tribunal pénal international.

Comme on peut le constater à la lecture de ce document, le droit international humanitaire aussi bien que le droit international des droits de l'homme, leurs principes et leurs conceptions, ont orienté toute la stratégie de réduction immédiate de la violence en Colombie, comme étape préliminaire de l'humanisation du conflit, antichambre indispensable pour parvenir à des accords plus avancés qui visent à éliminer complètement le conflit armé interne. L'inclusion de normes du droit international humanitaire dans le Code pénal colombien s'inscrit dans cette orientation, et l'introduction de ce sujet s'est faite parallèlement dans l'ordre du jour des conversations avec divers groupes armés qui participent au conflit interne.

L'Etat colombien a prévu un système de protection des personnes menacées qui implique divers départements de l'Etat. La question de la protection de la vie, de l'intégrité et de la liberté des personnes en situation de risque d'infraction aux droits de l'homme constitue aussi une question cruciale pour que les droits de la population civile ne soient pas nominaux ou formels, mais garantis de manière efficace. La protection de la population et, dans son sein, des personnes ou groupes sociaux en situation de risque est exercée par divers départements de l'Etat.

En particulier, le Département administratif de sécurité (DAS) apporte une protection personnelle aux individus menacés ou qui constituent des cibles potentielles d'actions terroristes. Toutefois, l'affaire a été assez difficile à traiter, étant donné le grand nombre de personnes et groupes vulnérables qui ont été directement menacés de mort ou d'autres représailles par des bandes armées(179) , situation qui vient s'ajouter à la limitation des ressources économiques et du personnel des entités de l'Etat chargé d'assurer les services de sécurité. Cette situation a conduit à renforcer les projets spéciaux en donnant la priorité aux groupes les plus vulnérables, comme ce fut le cas pour le programme de protection des défenseurs des droits de l'homme dans le pays, pour lequel des attributions spéciales ont été accordées à l'Unité administrative spéciale des droits de l'homme au ministère de l'Intérieur, étant donné que les personnes qui se prévalent de cette qualité constituent l'un des groupes qui encourt les risques les plus élevés en Colombie(180) . Le programme de protection des diverses personnes menacées comprend, selon les études de sécurité y afférentes, la fourniture d'escortes, de véhicules, de gilets pare-balles, de cours de formation en matière de sécurité, de caméras de télévision, des coûts de déménagement vers d'autres villes, des équipements de communication, d'armes, d'aides économiques pour le soutien personnel, de l'installation d'alarmes et de portes de sécurité, etc.(181) .

L'Unité des droits de l'homme au ministère de l'Intérieur applique également un programme de protection des dirigeants politiques, au nombre desquels figurent aussi des dirigeants syndicaux. Dans ce cadre, on peut citer les programmes de protection spéciale de Nelson Berrío, dirigeant de l'Union syndicale ouvrière (USO); d'Héctor Fajardo, dirigeant de la CUT; de Tarcisio Mora, dirigeant de la Fédération colombienne des éducateurs (FECODE); de Jesús Bernal, dirigeant de SINTRACREDITARIO; de Wilson Borja, dirigeant de FENALTRASE, et de Domingo Tovar, dirigeant de la CUT(182) .

Toutefois, les mesures prises pour protéger les personnes menacées restent vaines sans la collaboration desdites personnes. Cela a été démontré de la manière la plus claire et la plus déplorable avec l'assassinat du vice-président de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), Jorge Ortega, qui, quelques jours avant sa mort, avait refusé les services de protection personnelle que l'Etat lui avait offerts(183) .

La Commission interinstitutionnelle des droits de l'homme des travailleurs, créée par les décrets nos 1413 de 1997 et 465 de 1998, constitue un autre mécanisme mis en place par l'Etat colombien pour veiller aux droits de l'homme et faire face aux phénomènes de violence. La commission regroupe des départements de l'Etat et des représentants des organisations de la société civile choisis selon des critères de participation. Sont membres de la commission: le ministre du Travail, le ministre de l'Intérieur, le ministre de la Justice, le ministre de la Défense, le Conseiller du Président de la République pour la politique sociale, le Conseiller du Président de la République pour les droits de l'homme, le Conseiller du Président de la République pour les personnes déplacées, ainsi que des représentants des organisations non gouvernementales (ONG): cinq représentants des centrales ouvrières, le président de la Conférence épiscopale, le président du Collectif d'avocats «José Alvear Restrepo», le directeur de la Commission colombienne de justice, le Procureur général de la nation et le Défenseur du peuple(184) . La commission dispose en outre d'un plan de travail conçu et exécuté conjointement par les départements de l'Etat, les organisations syndicales et les organismes non gouvernementaux des droits de l'homme qui composent la commission.

La recherche d'une sortie négociée
du conflit armé interne

Pour toutes les forces sociales et politiques de la nation, représentées au sein de l'Etat et de la société civile, l'option d'un accord politique avec les acteurs de la violence, en particulier avec les forces de la guérilla, constitue une alternative prioritaire dans la recherche de la paix. La possibilité d'arriver à un accord de paix durable, autour d'une table de négociations avec les groupes armés, signifierait la fin du conflit armé interne qui ensanglante le pays.

La fin du conflit armé interne aurait de multiples implications favorables pour un nouveau projet constructif de nation: les énormes ressources qui doivent être actuellement investies dans la sécurité et dans d'autres tâches relatives à la défense de la société et des institutions pourraient être employées à la création d'emplois et de bien-être social; une multitude de droits essentiels, qui sont une condition nécessaire pour le développement de la société, pourraient être pleinement rétablis après avoir été affectés par la dynamique du conflit interne.

La fin du conflit armé interne par la voie de la négociation politique aurait pour répercussion immédiate la réalisation d'une série de fonctions de contrôle et de fonctions de promotions, directes et indirectes, toutes positives. Dans le cadre des fonctions de contrôle, de caractère direct comme il convient de regarder cette relation avec l'éclatement et la genèse du conflit, il faut citer la cessation des actes de violence qui ont touché les droits à la vie, à la liberté personnelle, à l'intégrité physique, au libre choix du lieu de résidence de la population, etc. Dans le cadre des fonctions de contrôle, de nature indirecte car elles conservent ce lien avec le conflit armé en ce qui concerne leur déclenchement, des droits comme la liberté d'association et la liberté syndicale, la liberté d'entreprendre, etc., recouvreraient leur étendue. Au nombre des fonctions de promotions, il convient de mentionner la création d'un environnement de tranquillité et de sécurité qui attirera des investissements et générera le travail et la richesse.

Dans les domaines spécifiques liés aux droits sociaux, tels que la liberté d'association et la liberté syndicale, qui ont suscité l'intérêt de l'Organisation internationale du Travail (OIT), et qui ont été affectés indirectement par le conflit armé interne, cela veut dire que les négociations politiques avec les acteurs de la violence devront éliminer efficacement les facteurs authentiques et originaux qui ont provoqué ces effets de la violence.

La paix est donc un moyen de créer des conditions appropriées pour que la population puisse exercer entièrement la totalité de ses droits sociaux, économiques et politiques et, partant, la réalisation de ces droits constitue l'objectif fondamental poursuivi par l'Etat et la société civile. Même dans sa recherche des conditions de paix comprises comme un moyen de consolidation des droits des citoyens, l'Etat n'a pas renoncé au monopole de la force, ni aux devoirs de protection qu'il doit assurer, il trouve dans la voie de la négociation politique avec les groupes armés un instrument non seulement approprié pour la gestion de ces conditions, mais aussi un mécanisme qui peut épargner des vies, des souffrances, des biens, des ressources financières et du temps dans la solution du conflit.

La négociation politique avec les groupes armés qui se sont placés en marge de la loi n'est pas une option inconnue dans l'histoire du pays, ni irréelle en termes idéologiques ou politiques. Dans le passé le plus récent de la Colombie, l'Etat s'est engagé dans divers processus de négociation politique avec des groupes de la guérilla, qui ont eu pour effet principal une diminution de la violence et de ses conséquences négatives, parallèlement à la création de conditions de vie positives pour la population. Au nombre de ces processus de paix, des groupes de guérilleros ont été démobilisés comme le Mouvement du 19 avril (M-19) et l'Armée populaire de libération (EPL), dont quelques factions dissidentes assez minoritaires sont seules restées armées; le Courant de rénovation socialiste (CRS), le Parti révolutionnaire des travailleurs (PRT) et le groupe «Quintín Lame», dont les membres se sont incorporés intégralement dans la légalité.

Le Président de la République, Andrés Pastrana Arango, a établi et conduit personnellement une politique de paix que le pays soutient clairement, ainsi que la stratégie établie pour la mettre en vigueur. Cette politique prévoit un processus de solution politique du conflit armé fondée sur la négociation avec les mouvements insurgés, de même que l'adoption de réformes d'ordre politique, économique et social.

Au cours de la campagne présidentielle, le Président a déclaré: «Je pars du principe que la guérilla cherche une transformation des structures politiques et économiques du pays, dont les grandes lignes ont été tracées dans les programmes de réconciliation que les groupes d'insurgés ont fait connaître depuis un certain temps déjà. Ces programmes portent sur des aspects positifs que le gouvernement peut et doit aborder dans une négociation, ce qui justifie d'autant moins la guerre. La négociation non seulement mettra fin à la confrontation, mais encore elle garantira qu'à travers la concertation autour d'un nouveau projet de pays seront jetées les bases de la vraie réconciliation entre tous les Colombiens(185) .»

A cette même occasion, l'actuel Président de la République a déclaré emphatiquement que «la paix doit être le produit de la rencontre de la totalité de la société colombienne, parce que son programme définitif doit être le produit de sa participation active. En fait, la société ne réclame pas seulement la fin de la confrontation, mais elle exprime également ses points de vue sur le nouveau pays que veulent les Colombiens. Les deux expressions doivent représenter un mandat inéluctable pour les parties au conflit. Ces exigences de la société civile imposent un nouveau modèle de négociation qui ne se limite pas à l'examen des thèmes définis par les parties, mais qui implique l'élargissement d'un grand espace représentatif et pluriel afin que le programme de la paix et sa négociation soient le résultat de critères démocratiques. Dans cette perspective, les participants doivent être le gouvernement national et l'ensemble des mouvements de guérilla, disposant d'un mandat unifié et de la participation active de la société civile.»

La politique de paix du présent gouvernement est fondée sur ces convictions, et toutes les décisions qui sont adoptées, aussi bien sur le fond que sur la forme, n'ont d'autre objectif que d'aplanir ce chemin.

Pour le gouvernement national, le processus de paix qui commence et qui transcende la négociation politique avec l'insurrection, et ensuite s'élève au-dessus des conditions objectives qui sont à son origine et qui continuent à le nourrir, est un devoir inéluctable et inconditionnel de l'Etat dans son ensemble.

Pour cette raison, l'élimination de la pauvreté, l'établissement de la justice sociale et la promotion des droits de l'homme sont les composantes essentielles de la politique de paix actuelle. C'est pourquoi le Président de la République a décidé que le «plan national de développement» serait un plan pour la paix et il a entrepris de concevoir le «Plan Colombie» annoncé lors de son entrée en fonctions en tant que Président. Dans le cadre du «Plan Colombie» seront exécutés des programmes et des projets visant à la renaissance économique et sociale des zones les plus défavorisées du pays(186) .

Le «Plan Colombie» est conçu de telle manière que dans les décisions relatives aux investissements tous les Colombiens puissent participer, y compris les membres de l'insurrection, en accord avec les décisions prises par le Président de la République lorsqu'il a annoncé: «J'assume avec réalisme le fait que je vais négocier avec des forces insurgées qui ont exprimé leur volonté d'être les coprotagonistes de la reconstruction nationale.» Le «Plan Colombie» est coordonné par le Haut Commissaire pour la paix, Víctor G. Ricardo.

Le gouvernement a travaillé avec ténacité pour l'obtention des ressources qui permettront de financer le «Plan Colombie». Outre les crédits prévus dans le budget national, on a créé ce qu'on a appelé les «bons de paix», une contribution fiscale des membres de la société disposant de la plus grande capacité économique, et on est en train de mettre en place les mécanismes nécessaires pour obtenir d'autres contributions volontaires du secteur privé. En outre, une action extérieure d'envergure a été lancée par le gouvernement dans le cadre de la diplomatie pour la paix afin d'obtenir des ressources de la coopération internationale. Dans ce sens, des pays amis et la Banque multilatérale ont pris des engagements clairs et encourageants.

L'action du gouvernement a été également orientée vers l'établissement du scénario de la négociation politique avec l'insurrection. Ainsi que le Président l'a déclaré, «l'heure est venue de prendre au sérieux le programme de la guérilla, comme condition pour trancher le nœud gordien de la méfiance mutuelle». Auparavant, le chef de l'Etat avait affirmé que «lorsque l'on analyse les programmes pour la réconciliation qui ont été présentés par les mouvements insurgés, spécialement la plate-forme pour la réconciliation en dix points des FARC et celle en 12 points de l'ELN, il est facile de constater que tous les sujets qui y sont consignés sont susceptibles de négociation».

Le Président a également affirmé que «le processus doit concilier la nécessité urgente de mettre fin à la confrontation armée, avec la nécessité d'épuiser un large ordre du jour pour une paix durable, que l'ensemble de la nation, y compris les organisations d'insurgés, doit s'engager à mettre en œuvre. Dans ce sens, le premier pas doit être de vaincre les difficultés de procédure, qui sont les seules à empêcher le début du dialogue.»

Dans les conditions susvisées, l'engagement du chef de l'Etat colombien, le Président Andrés Pastrana, pour la politique de paix et de réconciliation a été total, et cette volonté a été largement reconnue par l'opinion publique(187) . De même, sa politique de paix est soutenue sans aucune restriction par toutes les forces politiques et sociales du pays, y compris les partis politiques d'opposition, les associations patronales de l'industrie et du commerce, les centrales syndicales et les organisations non gouvernementales (ONG).

Déjà quand il était candidat à la magistrature suprême, le Président Andrés Pastrana, dans un geste qui représentait son engagement ouvert et public pour la paix, a rencontré personnellement Manuel Marulanda Vélez et des membres de l'état-major des FARC pour établir les termes des dialogues de paix(188) .

Depuis août 1998, date d'entrée en fonctions du Président de la République, le gouvernement d'Andrés Pastrana, dans son désir de manifester expressément cette volonté de recherche d'un accord de paix négocié, a autorisé le dégagement de cinq municipalités du pays, avec une superficie totale de 43 000 km2, afin de constituer une «zone de détente». Cette «zone de détente», en vigueur du 7 novembre 1998 au 7 février 1999, a été créée en vue d'assurer un scénario approprié pour commencer les négociations et offrir des garanties de sécurité au chef des FARC, et elle implique le retrait de toutes les forces militaires et de la police nationale de la zone convenue.

Outre la création de la «zone de détente», le caractère politique des FARC et de l'ELN a été reconnu. De même, le Président Andrés Pastrana a approuvé la réunion de membres de la société civile et de certaines agences de l'Etat non gouvernementales avec des délégués de l'Armée de libération nationale (ELN), à Mayence (Allemagne), afin de commencer les conversations avec cette organisation de guérilleros. Il a ensuite autorisé, avec l'assentiment du Procureur général de la nation, la sortie provisoire de prison des dirigeants de l'ELN afin de tenir une réunion avec ce groupe de guérilleros, en un lieu choisi par la direction de l'organisation subversive, en vue de faire avancer le processus des dialogues(189) . Le gouvernement du Président Andrés Pastrana a même soutenu la réunion d'«une Convention nationale» en territoire colombien, organisée par l'ELN, avec la participation de représentants de l'Etat et de membres de la société civile, ces derniers ayant été choisis par l'ELN, au cours de laquelle ont eu lieu des conversations de paix. Le gouvernement a également reconnu à trois membres des FARC la qualité de représentants de cette organisation dans les dialogues de paix, après avoir obtenu la suspension des mandats d'arrêt lancés à leur encontre.

Dans le cadre de la politique de paix établie par l'Etat colombien, il est nécessaire de souligner que le gouvernement national a accepté que les dialogues de paix avec les FARC et l'ELN se déroulent sous deux conditions difficiles et généreuses qui démontrent les efforts réalisés pour avancer dans cette voie: i) la tenue des entretiens de paix sans aucune condition préalable; ii) le déroulement des dialogues de paix en plein conflit, c'est-à-dire sans que les organisations de guérilleros décrètent un cessez-le-feu ni qu'elles mettent fin aux séquestrations et autres actes délictuels.

En même temps, l'Etat colombien et les membres de la société civile qui participent aux dialogues avec les groupes de guérilleros ont recherché des formules qui diminuent les impacts du conflit armé interne en attendant que le processus de paix aboutisse à des accords permanents et stables pour conclure le processus. Le gouvernement a invité les groupes subversifs à ordonner un «cessez-le-feu» durant les festivités de Noël, initiative qui a été bien accueillie par la dissidence de l'Armée populaire de libération (EPL), Caraballo et les Autodéfenses unies de Colombie (AUC). L'Armée de libération nationale (ELN) s'est engagée à ne pas séquestrer de personnes âgées de plus 65 ans ou des personnes mineures, mais cette offre n'a été mise en œuvre que sous une forme limitée. Le gouvernement national a pu convaincre la guérilla de discuter sur la possibilité de ne pas recruter des mineurs dans les groupes armés. Le gouvernement a commencé à discuter avec les forces des guérilleros sur la non-installation de mines antipersonnel, qui font le plus grand nombre de victimes dans les rangs de la population civile. Le gouvernement a obtenu du Congrès de la République l'approbation des premières modifications législatives afin de disposer des pouvoirs légaux nécessaires pour mener à bien la négociation avec les groupes armés. Le gouvernement, conformément à l'ordre juridique, a étudié la possibilité de prendre des mesures juridiques pour négocier l'échange des policiers et des militaires enlevés par la guérilla contre la libération de guérilleros détenus, selon la demande des insurgés. De même, avec la participation de membres de la société civile, les groupes de guérilleros ont été invités à libérer les personnes qu'ils avaient enlevées; cette demande n'a pas reçu de suite de la part des guérillas, mais elle a enregistré des succès partiels, comme dans le cas de la jeune fille de 16 ans séquestrée par les FARC lorsqu'elle était venue en compagnie de sa mère payer la rançon pour la libération de son père(190) .

Etant donné la dynamique que le gouvernement national a impulsée au processus de paix, les bandes d'autodéfense elles-mêmes n'ont pas pu s'y soustraire. C'est ainsi que les Autodéfenses unies de Colombie (AUC) ont signé avec des représentants du Conseil de paix ce qu'il a été convenu d'appeler «l'accord du Nudo de Paramillo», par lequel elles ont accepté de discuter les bases d'une convention d'humanisation du conflit, tout en se déclarant disposées à tenir une «assemblée nationale de la paix»(191) . Et bien que le gouvernement national ait été circonspect et prudent par rapport aux bandes d'autodéfense ou groupes de «justice» privée, considérant que le dialogue avec eux devra s'effectuer séparément une fois que les conditions nécessaires auront été réunies, il n'y a pas de doute que ces premiers indices de l'attitude des AUC sont positifs pour l'avenir du processus de paix.

Dans l'exemple que nous venons d'exposer, le gouvernement a cherché et obtenu aussi la compréhension et le soutien internationaux, dans la perspective de doter le processus de paix de nouveaux instruments pour la construction progressive de la confiance mutuelle et de rechercher son concours public et financier pour la réalisation des objectifs définis par les parties.

La participation de la communauté internationale suppose que le processus de paix ne dépende pas uniquement et exclusivement de la volonté et des actions du gouvernement colombien, mais qu'il inclut la société civile et les groupes d'insurgés qui sont, eux aussi, maîtres de leur volonté et de leurs actions propres. Il s'agit là, en fait, d'un processus complexe qui n'est ni contrôlé ni monopolisé par le gouvernement national. En conséquence, la coopération de la communauté internationale, telle que l'a indiqué le Président de la République, doit respecter les négociations des parties au conflit, car ce sont elles qui peuvent faire de la paix une réalité, et non la communauté internationale. Les tâches concrètes de la communauté internationale, selon le progrès et la dynamique du processus de paix, sont donc multiples. Elle peut œuvrer à faciliter les rencontres et les conditions susceptibles de favoriser la négociation, dans son rôle de témoin des engagements acquis, ainsi que comme instance de vérification et de suivi de la mise en œuvre des accords conclus.

Dans ce contexte, le gouvernement national a formulé et mis en pratique la diplomatie pour la paix. Une politique étrangère fondée sur l'invitation faite à la communauté internationale pour qu'elle soutienne, sur tous les fronts, la sortie politique négociée du conflit colombien.

Le gouvernement du Président Andrés Pastrana a reçu des offres de coopération dans le processus de paix, développées avec prudence et pondération en dehors de leurs implications politiques, de la part des gouvernements, des Etats-Unis(192) , du Costa Rica(193) , de Cuba(194) , de l'Espagne(195) , du Venezuela(196) , de membres du Parlement de l'Union européenne(197) , etc., qui ont voulu que leurs démarches en faveur du processus de paix soient soumises à l'initiative du gouvernement colombien, auquel il revient de donner l'impulsion nécessaire au processus. C'est ainsi que le bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies a effectué un suivi des démarches de paix nationales, collaborant à la politique développée par le gouvernement national.

La violence engendre la violence. Le gouvernement national tient largement compte de cette leçon tirée de l'expérience en faisant face à l'existence des bandes d'autodéfense et des groupes de justice privée. Le Président a affirmé que leur existence «est une des expressions les plus perverses de la dégradation du conflit», ajoutant d'une manière tranchée et sévère: «Ces groupes vont essentiellement à l'encontre du principe du monopole des armes aux mains de l'Etat et sont un facteur gravissime de la guerre. C'est pourquoi on ne peut concevoir la paix sans que leurs armes se taisent, ce qui devra être fait selon un scénario distinct de la négociation de paix avec la guérilla, et comme une responsabilité exclusive de l'Etat.» Le Président a ajouté qu'il s'engageait à prévenir, avec tous les pouvoirs qui sont les siens et avec sa plus claire volonté politique, l'association délictueuse qui pourrait exister entre certains agents de l'Etat et les groupes paramilitaires; de même, il s'est engagé à faire procéder le plus efficacement possible à des enquêtes sur les plaintes qui seraient reçues et à faire appliquer les sanctions nécessaires contre les conduites illicites.

Le gouvernement national respecte et exige l'application stricte des normes du droit international humanitaire dans le cadre de la confrontation. Dans ce domaine, il a été et restera inflexible, dénonçant sur le plan national ainsi que sur le plan international les attaques contre les personnes qui ne participent pas aux hostilités et contre les biens civils, de même que le recours à des moyens et des méthodes de combat proscrits par l'humanité. L'Etat colombien est disposé à conclure avec les acteurs armés un accord spécial sur ce point, qui établira les mécanismes susceptibles d'assurer le contrôle du comportement et du respect des combattants face à la population civile et à ses biens.

Le respect de ces principes d'humanité sera le paramètre pour les décisions en matière de pardon et de justice; c'est dans ces principes que les peuples civilisés ont placé les limites morales des amnisties et des remises de peines. La Colombie n'agira pas différemment.

La plus grande manifestation de la politique de paix de l'Etat colombien s'est traduite par la rencontre avec les FARC le 7 janvier 1999, afin d'ouvrir les négociations avec cette organisation de guérilleros. C'est là, en présence du Président de la République, et malgré l'absence de dernière heure de Manuel Marulanda Vélez, qu'ont été installées les tables de négociation, avec la participation des FARC, en présence de représentants de la communauté internationale et de plus de 300 journalistes nationaux et internationaux.

Au cours de la réunion des négociateurs qui s'est tenue le 11 janvier 1999, ont été présentés les ordres du jour de conciliation des parties en présence, et qui ont beaucoup de points communs.

Le gouvernement national a remis un ordre du jour, qui comprend notamment les dispositions suivantes:

L'ordre du jour de réconciliation des FARC inclut les dix points suivants:

Il convient de souligner que les ordres du jour des négociations présentés ne sont que le premier point pour construire un ordre du jour conjoint de négocations, de changement et de transformations de la vie politique, sociale et économique du pays. Les conversations de paix ne sont ni une promesse ni une expectative, elles se déroulent déjà selon l'ordre du jour conjoint susmentionné.

De même, il est important de souligner que le rôle de la communauté internationale dans le processus de paix fait partie de l'ordre du jour des négociations proposé.

Le processus de paix a commencé, avec ses premiers pas, fermes et sérieux, qui dénotent la volonté illimitée de l'Etat colombien, exprimée dans l'attitude généreuse et conciliatrice du gouvernement national, sous la direction du Président Andrés Pastrana.

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Autres sources

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Cour constitutionnelle.

Procureur général de la nation.

Ministère des Finances et du Crédit public.

Ministère de l'Intérieur.

Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme.

Police nationale de Colombie.

Annexe II

Les institutions politiques en Colombie

La Colombie est un Etat de droit. Le présent chapitre a pour objet d'expliquer le fonctionnement de la Constitution politique de la Colombie et son rôle d'axe essentiel autour duquel gravite l'Etat et dont découlent ses institutions. Pour ce faire, il convient d'apporter des précisions d'ordre juridique, politique et culturel quant à la structure de l'Etat et à la pluralité des éléments sociaux qui le composent et le définissent, ce qui permettra de brosser, de façon non exhaustive, un tableau plus précis de l'Etat colombien.

Historique

Dans le contexte de l'histoire complexe et mouvementée du monde occidental, il n'y a que 188 ans que la Colombie est débarrassée du joug de l'impérialisme colonial. Dès sa naissance en tant qu'Etat indépendant et souverain, le pays a souffert du choc de forces contraires et de dissensions intestines profondes propres à la formation de toute identité nationale. A ces bouleversements le peuple colombien a constamment opposé son souhait d'instaurer une nation démocratique où se retrouvent, sous forme condensée, les plus grands acquis culturels issus des traditions politiques occidentales et intégrés avec succès aux caractéristiques socioculturelles du pays.

C'est ainsi qu'après une longue série d'essais constitutionnels qui ont servi à façonner les aspirations démocratiques du peuple et à renforcer la souveraineté de l'Etat la nation s'est consolidée en tant qu'entité politique juridiquement organisée à travers la Constitution de 1886. Les nouvelles institutions se sont fondées en pratique sur la reconnaissance et l'instauration de l'Etat de droit en tant qu'orientation dynamique du pays, qui constituait son axiome fondamental et la seule manière de concrétiser l'idéal de démocratie. De même, la séparation des pouvoirs a garanti un équilibre entre les branches des pouvoirs publics, ce qui a permis de supporter et d'assimiler les changements radicaux enregistrés au cours des cent cinq années d'existence de la Constitution, tandis que la carte politique du XIXe siècle s'assouplissait et s'adaptait aux exigences de sa modernisation.

Au nombre des caractéristiques juridiques de la Constitution, il convient de souligner les points suivants:

La Constitution de 1991

Indépendamment des qualités de la Constitution de 1886, tous les éléments constitutifs du tissu social ont compris que, pour arriver à une société plus juste, tolérante et pluraliste qui rassemble tous les secteurs de la population et permette un dialogue légitime entre les forces les plus diverses, il fallait opérer un changement de direction radical dans la Constitution politique. C'est ainsi qu'est née la Constitution de 1991, fruit de cette dialectique multilatérale.

L'avènement de la Constitution actuelle n'a aucun précédent dans l'histoire du pays. Jusqu'en 1990, les initiatives politiques issues des diverses couches de la société devaient être soumises à une formule bipartite rigide qui, dans la majorité des cas, ne satisfaisait pas aux exigences de mobilité d'une société aux multiples facettes. Ainsi, l'énergie vitale du processus constituant s'est concrétisée grâce à des protagonistes jusqu'alors effacés dans les processus constitutifs du pouvoir, de sorte que le mandat de l'Assemblée constituante a eu pour origine la participation essentielle du mouvement estudiantin, des organisations syndicales, des intellectuels indépendants de diverses idéologies, des mouvements politiques minoritaires et des factions armées dissidentes qui retrouvaient le chemin de la participation institutionnelle(198) , entre autres. Cette réalité politique nouvelle et vigoureuse qui s'est jointe aux partis classiques ainsi que le soutien direct de l'Etat ont ouvert une nouvelle voie vers un système constitutionnel, à la légitimation populaire illimitée, où la pierre angulaire du discours juridique - comme on le verra - est constituée, entre autres, par un Etat social de droit, une solide charte des garanties et droits fondamentaux, l'élargissement et le perfectionnement de la démocratie participative ainsi qu'une variété d'actions civiques précises et contraignantes destinées à défendre les droits fondamentaux.

Principes fondamentaux de l'Etat

La nature de l'Etat colombien exige impérativement que ses éléments agissent de façon harmonieuse et légitime en vue d'atteindre les objectifs sociétaux sanctionnés par la Constitution. Dès le préambule(199) , le peuple de Colombie, exerçant son pouvoir souverain, affirme que le but essentiel de la Constitution est d'«assurer à ses membres la vie, la convivialité, le travail…» ainsi que les autres valeurs fondamentales qui définissent le cadre dans lequel doit s'inscrire la politique de l'Etat.

L'Etat de droit social

L'article premier de la Constitution dispose que «la Colombie est un Etat de droit social» où, dans un dispositif constitutionnel moderne s'inspirant de la révision du modèle de l'Etat libéral, l'élément social de la production étatique est fondamental pour l'axiome de l'Etat de droit. En d'autres termes, l'Etat colombien est non seulement tenu d'agir de manière strictement conforme au droit de la nation dans chacune des manifestations de son pouvoir, mais également d'orienter son action vers la résolution des problèmes issus des réalités sociales et économiques du pays. L'Etat de droit éclaire donc l'agencement constitutionnel et consacre la primauté de l'égalité, de la démocratie participative, de la liberté et du bien-être social en tant que guides de l'intérêt collectif, en plaçant toujours son action sous le respect de la légalité.

La souveraineté

La souveraineté nationale a toujours été la clé de voûte de l'Etat colombien, mais les modifications importantes et spectaculaires du concept de l'Etat nation ont été comprises par le pouvoir politique colombien, conscient que ce concept n'est ni rigide ni immuable mais que, au contraire, pour embrasser les idéaux universels d'internationalisation, il fallait assouplir la notion de souveraineté afin de permettre l'entrée de la Colombie sur la scène mondiale, étant entendu que cet assouplissement ne saurait signifier une dégradation ou une érosion du principe d'autonomie des peuples et de liberté inscrit dans l'essence même de la liberté de l'Etat en tant qu'axe directeur de relations internationales réciproques et équitables. La Constitution permet d'harmoniser le for intérieur de la nation avec les règles de l'internationalisation, comme le montrent les quelques exemples ci-après:

L'égalité transnationale est essentielle à la constitution de la communauté internationale. Cette prémisse suppose, comme l'accepte l'Etat colombien, que l'assouplissement de la souveraineté en faveur de l'internationalisation a pour condition déterminante que l'affectation de compétences aux divers instruments internationaux est explicite, rigoureuse et exclusive et, point essentiel du contrat, elle a pour conséquence que chaque pays, comme l'affirment unanimement les spécialistes des traités internationaux, «en ratifiant une convention n'accepte d'obligations que dans la limite de ce qu'expriment objectivement les dispositions contenues dans ladite convention»(200) . Cela signifie que l'instrument international comporte la totalité des obligations exigibles de l'Etat et qu'on ne peut en dériver des éléments qui lui sont étrangers.

Décentralisation et autonomie territoriale

La Colombie est organisée sous la forme d'une république unie, ce qui ne signifie pas que son ordre politique interne soit monolithique, ou qu'il existe un monopole du pouvoir central. La tendance et la réalité consacrées par la Constitution dès l'article premier vont dans le sens d'une affirmation de l'autonomie territoriale conçue comme assise essentielle de l'évolution de la société, conformément à ses besoins et aux particularités régionales. Même si cette autonomie ne s'étend pas aux questions législatives et juridictionnelles, elle comporte les éléments indispensables à l'autogouvernement des régions et des municipalités tels que:

Garanties et droits fondamentaux

La Constitution colombienne peut donc être considérée comme le réceptacle des immenses efforts accomplis par la culture occidentale pour élaborer des chartes de droit solides et efficaces face au pouvoir jusque-là absolu de l'Etat. La Charte politique colombienne condense les droits de première, deuxième et troisième génération leur donnant ainsi un caractère impératif qui doit être défendu et promu par l'Etat. Toutefois, l'importance de ce large éventail de droits ne réside pas dans son simple énoncé mais dans les mécanismes pratiques et directs dont disposent l'individu et la collectivité pour les rendre effectifs et dans l'obligation pour l'Etat colombien de promouvoir et diffuser la culture des droits fondamentaux par le biais de toutes ses instances. A titre d'information, nous exposerons brièvement ci-après quelques-uns des droits et des libertés universels ainsi que le mécanisme de protection dont ils jouissent au plan national.

Droits. Article 11, droit à la vie. Il s'agit sans conteste du noyau essentiel autour duquel gravitent les autres droits. Article 12, droit à l'intégrité de la personne. Article 13, droit à l'égalité qui impose à l'Etat le devoir de rendre cette égalité réelle et effective et de défendre ceux qui, de fait, se trouvent dans un état d'inégalité manifeste. Article 15, droit à la protection de la vie privée (habeas data). Article 16, droit au libre dévelop-pement de la personnalité sans autre limitation que les droits d'autrui. Article 21, droit à l'honneur. Article 25, droit au travail dans des conditions dignes et justes. Article 29, droit à une procédure judiciaire et administrative régulière. Article 39, droit d'association syndicale. Article 40, droit à élire et à être élu. Article 48, droit à la sécurité sociale. Article 49, droit à la santé. Article 51, droit à un logement digne. Article 55, droit à la négociation collective. Article 56, droit de grève sauf dans les services publics essentiels. Article 67, droit à l'éducation. Article 79, droit à un milieu ambiant sain.

Libertés. Article 18, liberté de conscience. Article 19, liberté de culte. Article 20, liberté d'expression, d'enseignement, d'apprentissage et d'enseigner. Article 38, liberté d'association.

Dispositif de protection des droits

Indépendamment des actions judiciaires consacrées par la législation commune des différents codes et statuts, il existe des actions ou des recours judiciaires conçus expressément pour protéger les droits fondamentaux notamment:

Action de tutelle (protection constitutionnelle) (amparo): consacrée par l'article 86 de la Constitution, c'est par excellence le point névralgique du droit de l'individu face aux violations de ses droits fondamentaux par les pouvoirs publics. La vertu majeure de l'action de tutelle réside dans l'immense champ d'application que lui confère le système juridique, étant donné que quiconque peut réclamer devant la justice, en quelque moment et lieu que ce soit, la protection immédiate de ses droits fondamentaux lorsqu'ils sont lésés ou menacés par une action ou une omission d'une quelconque autorité publique; la décision judiciaire est immédiatement exécutoire car il s'agit d'une procédure prioritaire et sommaire (dix jours en première instance et vingt en seconde). Au sommet du contrôle de l'action de tutelle se trouve la Cour constitutionnelle qui, en tant qu'organe suprême de défense judiciaire de la Constitution, confère à cette tutelle suffisamment de pouvoirs pour faire obstacle à d'éventuels actes irresponsables de l'Etat. La résultante de la défense des droits par le biais de cette instance transcende le domaine des cas particuliers, puisqu'il s'agit du recours judiciaire le plus définitif et du principal outil pédagogique en matière de droit fondamental en Colombie. Grâce à l'amparo constitutionnel, le simple citoyen s'est familiarisé avec la teneur des droits fondamentaux, rendant ainsi plus puissant son pouvoir dans le domaine politique.

Droit de pétition. Consacré par l'article 23 de la Constitution, ce mécanisme permet à quiconque de communiquer avec l'un des organes de l'Etat de manière transparente et sanctionne l'obligation corrélative de l'Etat de satisfaire aux prescriptions, sans exception aucune, par une rapide résolution de la pétition. Ce droit est vital pour la démocratie et fait de la personne un élément de contrôle fondamental et primordial des actes de l'administration, pouvoir auquel il est expressément interdit à l'Etat de se soustraire.

Action en exécution. Il s'agit de l'action publique qui permet à toute personne d'obtenir l'exécution d'une loi ou d'un acte administratif par le biais d'une décision judiciaire pour les normes juridiques qui n'ont pas été appliquées par l'administration. C'est la prolongation du pouvoir civique d'intercéder devant l'Etat en tant que force vive et dynamique dans la sphère politique; c'est la concrétisation des idéaux classiques de la démocratie, où l'étendue du pouvoir des organes publics est déterminée par le pouvoir du citoyen.

Les actions populaires de l'article 88 de la Constitution étaient déjà pleinement en vigueur depuis l'adoption du Code civil colombien (1873); toutefois, étant donné leur importance, elles ont été consacrées de façon constitutionnelle à partir de 1991. Les actions populaires permettent de défendre les droits et intérêts collectifs «liés au patrimoine, à l'espace, à la sécurité et à la salubrité publics, à l'éthique administrative, à l'environnement, à la libre concurrence économique et à d'autres éléments analogues».

La démocratie

Pour donner une réalité aux dispositions constitutionnelles dans la vie quotidienne de la société et agir ainsi de manière décidée sur la Constitution, il importe que chaque citoyen puisse s'exprimer librement face aux institutions démocratiques et influer de façon directe sur la configuration du pouvoir et sur la prise de décisions.

Formes de démocratie participative

La Constitution de 1991 établit divers mécanismes de participation démocratique dont:

Démocratie représentative

En Colombie, les autorités ci-après sont élues au suffrage universel direct: Président de la République, Vice-président de la République, sénateurs, membres de la Chambre des représentants, gouverneurs, maires, conseillers municipaux et de district, députés des assemblées départementales, membres des conseils d'administration locaux et, le cas échéant, membres de l'Assemblée constituante.

Structure fondamentale de l'Etat
et séparation des pouvoirs

L'article 113 de la Constitution décrit dans ses grandes lignes la structure fondamentale de l'Etat colombien. «Les trois branches des pouvoirs publics sont le législatif, l'exécutif, le judiciaire. En sus des organes qui les composent, il en existe d'autres, autonomes et indépendants, chargés de mettre en œuvre les autres fonctions d'Etat. Les différents organes de l'Etat ont des fonctions distinctes mais collaborent de façon harmonieuse à la réalisation de ses fins.»

Depuis son énoncé en tant que théorie politique par John Locke et son développement ultérieur par le baron de Montesquieu, une maxime de l'Etat de droit est restée inchangée jusqu'à nos jours: «la séparation des pouvoirs a permis aux systèmes politiques de maintenir leur vigueur et leur cohérence philosophique ainsi que politique avec suffisamment de force pour comprendre et dynamiser de façon rationnelle l'évolution démocratique des sociétés».

S'il serait fastidieux de décrire dans le détail les fonctions conférées aux branches des pouvoirs publics et des organes de contrôle en Colombie, il n'en est pas moins nécessaire de connaître les caractéristiques principales qui permettent à notre système d'intégrer les principes universels de séparation et d'autonomie des pouvoirs; il est ainsi possible d'avoir une connaissance empirique de ses assises pratiques au lieu de se fonder sur des a priori spéculatifs dénués d'information suffisante.

Le bastion de la culture politique est le maintien et le respect le plus ferme des compétences conférées par la Constitution aux diverses branches du pouvoir, qui ont permis d'instaurer un équilibre de différentes manières, à savoir:

Relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Même si le système politique n'admet pas entre ses pouvoirs de relations aussi étroites que dans un système parlementaire, il ouvre suffisamment de voies de communication pour permettre entre eux une interaction harmonieuse et respectueuse de l'Etat de droit. Ainsi, la structure bicamérale du Congrès permet aussi bien une représentation pluraliste et ouverte sur les besoins des minorités et des régions qu'une réflexion interne du législateur. En tant que dépositaire direct de la volonté souveraine du peuple colombien et tribune essentielle du débat démocratique, le Congrès, de manière autonome, promulgue les lois qui, d'une façon générale, alimentent la structure juridique de l'Etat - son rôle de législateur ne pouvant être délégué ni transféré. Les relations entre le législatif et l'exécutif sont expressément décrites dans la Constitution et s'inscrivent dans le respect absolu de la séparation des pouvoirs. S'agissant de la promulgation des lois, il convient de tenir compte des points suivants: i) conformément à la séparation des pouvoirs, le gouvernement national peut présenter des projets de loi au Congrès (art. 154, 189, 200), les exposer, les promouvoir et les défendre par l'entremise des ministres dans la compétence desquels entre la question, mais il ne peut jamais, par quelque moyen institutionnel que ce soit, exiger l'approbation d'un projet ou s'arroger une quelconque faculté législative car cela porterait un coup fatal à l'équilibre des pouvoirs publics inscrit dans l'organisation politique; ii) le Président de la République, en tant que «chef de l'Etat, chef du gouvernement et autorité administrative suprême» (art. 115), a l'obligation constitutionnelle de sanctionner (art. 157 NI 4), promulguer, obéir et veiller à la stricte mise en œuvre des lois adoptées par le Congrès (art. 189, no 10). Dès lors que l'on reconnaît la dialectique par le biais de laquelle les fonctions de l'exécutif et du législatif s'imbriquent pour ce qui est du processus législatif, il est élémentaire de conclure que ces branches n'ont aucune faculté de s'arroger une quelconque fonction fixée expressément par la Constitution qui, à son tour, recueille les évolutions les plus importantes de l'Etat de droit.

Relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. L'article 230 de la Constitution est catégorique lorsqu'il dispose que «Les juges, dans leurs décisions, ne sont soumis qu'au seul empire de la loi». Il est patent que l'équilibre le plus délicat des branches des pouvoirs publics consiste à respecter les décisions judiciaires comme il se doit dans toute démocratie. Après le parcours tortueux qu'ont connu les tribunaux judiciaires dans le monde, il ressort clairement aujourd'hui que l'évolution culturelle d'un peuple se mesure au respect et à l'autonomie dont jouissent les juges de la nation en question. Dans le cadre de cet axiome fondamental de l'Etat, on peut facilement déduire que la volonté d'instaurer une juridiction exempte des avatars politiques et administratifs des autres branches des pouvoirs publics trouve sa concrétisation dans l'article 228 de la Constitution aux termes duquel «L'administration de la justice est une fonction publique. Ses décisions sont indépendantes… Son fonctionnement sera décentralisé et autonome».

Par rapport au pouvoir judiciaire, le pouvoir exécutif doit , outre le respect et l'application de ses décisions au titre de la séparation des pouvoirs, «pour ce qui a trait aux lois, prêter l'assistance nécessaire aux représentants du pouvoir judiciaire afin que leurs décisions soient rendues effectives» (art. 201, no 1). Il est donc impossible de parvenir à la conclusion exotique que le gouvernement national peut obliger les juges de la République à déformer leurs décisions judiciaires.

Relations entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. Suivant la cohérence du discours constitutionnel, le pouvoir judiciaire et le législateur agissent de manière autonome sans que leurs fonctions soient susceptibles de s'entrecroiser ou de se confondre. L'expression suprême de ce qui précède constitue un prolongement ontologique de leurs fonctions naturelles, à savoir l'application de la loi aux cas soumis au pouvoir judiciaire. Dans le cadre de ce phénomène axiologique, la Cour constitutionnelle en tant que «gardienne de l'intégrité et de la suprématie de la Constitution» doit, aux termes mêmes de la Constitution, se prononcer sur l'inconstitutionnalité éventuelle des lois promulguées par le Congrès.

Organes de contrôle

Outre les branches des pouvoirs publics, il existe d'autres organes autonomes et indépendants chargés de contrôler de l'activité de l'Etat et son incidence sur la société; les organes sont conçus de façon que le fonctionnement de l'Etat reflète fidèlement les objectifs suprêmes consacrés par la Constitution et les lois.

Le ministère public. Composé du bureau du Procureur général de la nation et du Défenseur du peuple. Il appartient au bureau du Procureur général de veiller, dans l'ensemble, à la mise en œuvre de la Constitution, des lois, des décisions de justice et des décisions administratives; de protéger les droits de la personne et d'assurer leur mise en œuvre; de défendre les intérêts de la société et des collectivités; d'exercer un contrôle suprême sur les agents qui s'acquittent de fonctions publiques et d'exercer un pouvoir disciplinaire sur tous les fonctionnaires de l'Etat. Il s'agit donc d'un élément complémentaire de l'équilibre des pouvoirs, qui concerne essentiellement la façon dont les fonctionnaires s'acquittent de leurs tâches et la défense des institutions. Les outils dont est doté cet organisme et sa complète autonomie sont garants de son efficacité et de sa place prépondérante dans le contrôle des activités de l'Etat. Quant au Défenseur du peuple, inspiré par le concept de l'Ombudsman, il a pour fonction vitale de favoriser et de faire connaître le libre exercice des droits de l'homme, ce qui consolide son pouvoir en tant que médiateur entre les instances de l'Etat et la société en vue de permettre la pleine jouissance de ces droits.

La Cour des comptes est chargée de veiller à la bonne gestion comptable de l'administration et, en général, au respect des prescriptions de la Constitution en la matière et des lois régissant la gestion des biens de la nation.

Le gouvernement espère qu'une lecture critique et attentive de la présente description des caractéristiques institutionnelles de la Colombie permettra une vision plus claire du pays.

Annexe III

Position des employeurs colombiens vis-à-vis de la plainte
présentée par les travailleurs du pays devant l'OIT
et sur la possibilité de nommer une commission
d'enquête en Colombie

Présentation

Lors de la 86e réunion de la Conférence internationale du Travail qui a eu lieu à Genève (Suisse) en juin 1998, les travailleurs de la Colombie avec l'appui des délégués travailleurs de 26 pays Membres de l'OIT se fondant sur l'article 26 de la Constitution de l'Organisation ont présenté une plainte contre le gouvernement de la Colombie dans laquelle ils allèguent une prétendue non-observance de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

Notamment, les aspects fondamentaux de la plainte peuvent être résumés ainsi:

Compte tenu de ce qui précède, les employeurs et les entrepreneurs colombiens souhaitent que les réalités du pays soient mieux comprises et ont voulu présenter leur position vis-à-vis des allégations présentées par les travailleurs.

Considérations générales sur la violence en Colombie

Dans peu de pays, comme en Colombie, on peut constater une plus grande complexité en ce qui concerne le phénomène de la violence. En effet, les racines de celle-ci, ses acteurs et ses manifestations sont aussi hétérogènes que connexes. Il est extraordinairement difficile de la décrire et presque impossible de trouver la cause ultime vis-à-vis d'un fait particulier de violence.

Les commentaires suivants - plus qu'un examen exhaustif ou intégral de ce phénomène qui abonde dans notre pays - cherchent à mettre en relief une triste réalité dont la solution a besoin de l'effort et de la compréhension de tous, notamment des organisations internationales.

Depuis le moment même de son indépendance du royaume de l'Espagne, il y a presque 180 ans, la Colombie a eu à faire face à un nombre élevé et presque permanent de conflits internes. Il suffit de dire que jusqu'à la moitié de ce siècle ils ont obéi dans une large mesure à des divergences politiques et à des phénomènes de «caudillismos» typiques d'une république jeune.

Dans ce sens, on peut affirmer que la violence dans le pays a eu une origine surtout politique, mais cela n'est pas si certain dans les moments actuels, car à cette composante politique il faut ajouter d'autres composantes ou éléments comme la corruption, le narcotrafic, la contrebande, la délinquance de droit commun.

L'action simultanée de tant d'adversaires si puissants affaiblit sans doute la capacité de réponse des organismes, des autorités étatiques, mais cela a eu des conséquences graves dans tous les segments de la société. Pour cette raison, en Colombie, nous avons tous été victimes de la violence même si ceci semble paradoxal. Pour donner une idée brève du niveau auquel est arrivée la violence dans notre pays, on doit mentionner que dans les années quatre-vingt les meurtres commis en Colombie ont commencé à croître à un rythme de 8 ou 9 pour cent annuel, ce qui a élevé le chiffre des meurtres de 9 000 en 1980 à 28 000 en 1991.

Cette spirale de la violence s'étend tant dans le tissu social que dans les institutions, y compris les institutions étatiques. Le cas de l'administration de la justice est une bonne illustration à cet égard telle qu'on peut l'apprécier dans le diagnostic réalisé par la Corporacíon Excelencia en la Justicia en juin 1997 (il s'agit d'une organisation non gouvernementale de caractère privé) et duquel on peut extraire les paragraphes suivants:

Dans ce contexte, ignorer la condition de victimes des entités et des autorités étatiques dans notre pays est une attitude insuffisante; cette condition, bien qu'elle ne justifie pas beaucoup des omissions des uns et des autres, les explique. Il est inadmissible de prétendre que ces excès constituent une politique ou une raison d'Etat de la Colombie car, même s'ils sont généraux, un observateur impartial pourra constater qu'ils sont contraires aux normes constitutionnelles et à la pensée et aux directives des autorités les plus hautes dans les domaines exécutif, législatif et juridictionnel.

Si une politique d'Etat, pour qu'elle puisse être qualifiée comme telle, a besoin du concours actif des instances les plus hautes de cet Etat, force est de conclure que l'inexistence de ce concours actif conduit à ce qu'il n'y a pas de politique d'Etat.

Le fait que, en Colombie, le respect des droits et garanties constitutionnels ne soit pas complet est une circonstance qui ne dépend pas de la volonté des instances les plus hautes et des autorités publiques, mais justement qui va contre leur volonté. Ceci est la conséquence d'une entrave à la capacité d'action de ces instances.

Réfutation de l'affirmation d'après laquelle, en Colombie,
existe une politique étatique contre la liberté syndicale

En conséquence, les employeurs et les entrepreneurs colombiens ne partagent en aucune façon les appréciations contenues dans la plainte présentée par les travailleurs colombiens selon lesquelles l'Etat conduit une politique de persécution contre le mouvement syndical; il s'agit d'une affirmation partielle et simpliste puisqu'elle méconnaît la réalité des violences en Colombie et, également, il s'agit d'une affirmation inexacte puisqu'elle n'est pas en conformité avec les déclarations de la Constitution nationale ni avec les directives et la volonté des instances les plus hautes et les autorités publiques du pays.

Par ailleurs, nous ne sommes pas non plus d'accord avec l'affirmation que le nombre élevé de morts de dirigeants syndicaux et des actes de violence contre eux (faits que nous rejetons, que nous condamnons et dont nous nous lamentons) constitue une preuve évidente d'une politique étatique contre le droit d'association des travailleurs.

Les différents facteurs qui sont à l'origine
de la violence en Colombie

Notre désaccord s'explique en premier lieu par le fait que les acteurs de la violence en Colombie sont très nombreux et que les morts et les agressions peuvent provenir de n'importe quel acteur. Si ces faits ont été commis par des militaires ou des fonctionnaires publics, ceci s'explique, comme on l'a indiqué auparavant, non pas par l'existence d'une politique étatique mais par des motifs qu'on doit attribuer uniquement et exclusivement aux auteurs de la violence.

En Colombie, les faits violents et délictueux ne proviennent pas que des militaires et/ou des fonctionnaires publics qui agissent de façon isolée, ceci est reconnu par les personnes qui ont étudié en profondeur les conflits en Colombie, de même que par les organisations internationales de défense des droits de l'homme, comme on peut le constater dans les paragraphes que nous allons transcrire de l'exposé sur «Le conflit armé et la détérioration de la liberté en Colombie» du docteur Alfredo Rangel et des rapports que Human Rights Watch a publiés dans les années 1998 et 1999:

Tous les secteurs sociaux sont frappés par la violence

La seconde raison pour laquelle nous ne sommes pas d'accord avec les affirmations des travailleurs colombiens concernant la relation qu'ils font entre le nombre d'attentats syndicaux et l'existence d'une politique étatique à leur encontre découle d'une réalité qui, bien que macabre, ne peut pas être ignorée, à savoir que tous les segments, toutes les couches de la société présentent un nombre élevé de victimes.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon les délits rapportés à la DIJIN, Police nationale, le nombre de meurtres simples et aggravés entre les années 1994 et 1998 a été de:


Mois

1994

1995

1996

1997

1998


Janvier

2 134

2 312

2 087

2 224

2 021

Février

1 997

1 943

2 002

1 999

1 833

Mars

1 906

2 105

2 085

2 192

1 920

Avril

2 082

1 915

2 056

2 098

1 807

Mai

2 335

2 091

2 267

2 262

1 851

Juin

2 285

2 128

2 300

2 096

1 679

Juillet

2 116

2 193

2 196

2 077

1 921

Août

2 191

2 131

2 279

2 205

1 971

Septembre

2 331

1 993

2 232

1 961

1 788

Octobre

2 252

2 089

2 155

1 888

1 971

Novembre

2 269

1 875

2 368

2 023

1 948

Décembre

2 535

2 439

2 435

2 188

2 423

Total

26 433

25 214

26 462

25 213

23 133


Selon la plainte présentée par les travailleurs, les actes de violence contre les syndicalistes et les dirigeants enregistrés par l'OIT dans le cas no 1787 représentent un total de 192, ces actes couvrent des assassinats, des disparitions, des menaces de mort et des détentions. Ces actes lamentables, qui ont des causes multiples et que nous condamnons et rejetons, ne dépassent pas dans les statistiques le 1 pour cent des actes de violence qui se produisent annuellement en Colombie. Les attentats que nous autres Colombiens subissons et dont nous souffrons chaque jour à cause de la violence généralisée qui existe dans le pays sont tout aussi condamnables.

En effet, en ce qui concerne les cas d'enlèvement, une organisation non gouvernementale sans but lucratif, la Fondation País Libre, qui conduit en Colombie une politique contre ces terribles crimes présente les chiffres suivants d'enlèvements, faisant une distinction entre les différents secteurs professionnels, et qui couvrent la période entre janvier et décembre 1998:


Catégories sociales

Total

Catégories sociales

Total


Indéterminées

5 576

Géologues

4

Politiques

394

Photographes

3

Commerçants

296

Industriels

3

Mineurs

131

Entrepreneurs

3

Eleveurs de bétail

110

Actionnaires

2

Ingénieurs

105

Maçons

2

Chauffeurs

63

Paysans

2

Employés

58

Charpentiers

2

Agriculteurs

52

Comptables

2

Etudiants

45

Economistes

2

Etrangers

42

Infirmières

2

Forces publiques

41

Publicistes

2

Ménagères

30

Superviseurs

2

Médecins

23

Assistantes sociales

2

Administrateurs

19

Zootechniciens

2

Enseignants

18

Indigènes

2

Journalistes

16

Professionnels

2

Gérants

15

Dentiste

1

Avocats

15

Analyste

1

Propriétaires

12

Artisan

1

Sous-traitants

10

Agent d'assurances

1

Techniciens

10

Auxiliaire

1

Transporteurs

8

Aviculteur

1

Fonctionnaires publics

8

Bactériologiste

1

Retraités

7

Biologiste

1

Musiciens

7

Gardien d'immeuble

1

Taxis

7

Contrôleur

1

Architectes

7

Courtier

1

Secrétaires

7

Ecrivain

1

Pilotes

6

Ex-maire

1

Vétérinaires

6

Chef de chantiers

1

Travailleurs du café

4

Radiologue

1

Mécaniciens

4

Prêtre

1

Constructeurs

4

Total

2 216


Des chiffres susmentionnés, par exemple, il convient de souligner qu'ils font référence aux «politiques» qui ne sont que les autorités élues par le peuple, en particulier les maires.

Evidemment, il est en soi condamnable de commettre des actes délictueux contre un syndicaliste, mais, sur l'autel de l'équité, il convient également d'étendre la censure aux autres classes de la population qui sont affectées. En d'autres termes, sans méconnaître ou atténuer la gravité des faits qui ont eu lieu contre les syndicalistes en Colombie, nous estimons que ces faits ne doivent pas être utilisés pour donner une idée inexacte et partielle de la situation dans le pays. Les actes délictueux sont aussi répréhensibles que l'est le fait de tergiverser sur ces actes.

Enfin, il est utile de mettre en avant l'incidence grave de la violence sur le développement économique de la Colombie, ce qui affecte directement la totalité du pays. Selon le document «Les coûts économiques de la criminalité et de la violence en Colombie: 1991-1996» d'Edgar Trujillo Ciro et Martha Elena Badel Rueda, publié par le Département national de la planification:

... si on additionne les coûts de la criminalité urbaine et les coûts engendrés par le conflit armé entre 1991 et 1996, les coûts bruts de la violence en Colombie s'élèvent à 17,2 billions de 1995, ce qui équivaut à 25 pour cent du PIB, avec une moyenne annuelle de 4,2 pour cent du PIB. Il convient de rappeler que les coûts bruts sont ceux qui frappent les victimes et que les coûts nets sont ceux qui sont supportés par la société dans son entier.

Le total des coûts bruts de la criminalité en Colombie, la perte des vies humaines représente 31 pour cent, les dépenses militaires 22 pour cent, les dépenses de sécurité 17 pour cent, les délits patrimoniaux 15 pour cent, les enlèvements, les vols et les extorsions 12 pour cent et, enfin, le terrorisme 2 pour cent.

Dans ce contexte colombien complexe où tous les secteurs souffrent de manière égale, il n'est pas admissible que l'un des secteurs s'arroge la condition exclusive de victimes et moins encore qu'il l'attribue à une politique d'Etat qui lui serait contraire.

En Colombie, il existe une politique d'Etat
en faveur des droits de l'homme

Au contraire de ce qu'affirment les travailleurs dans leur plainte, en Colombie il existe une politique d'Etat en faveur des droits de l'homme. Cette politique comporte des manifestations multiples et variées de sorte qu'elle ne peut pas échapper à un observateur impartial et de bonne foi.

La manifestation la plus palpable de la politique d'Etat colombienne en faveur des droits de l'homme est constituée par l'effort et l'engagement décidés de toutes les hautes autorités et des entités publiques à cet égard. A titre d'exemple, il convient de mentionner que depuis 1987 le Conseil de la présidence pour les droits de l'homme a été mis en place et dépend du Président de la République. Il a pour mission de réduire au minimum les violations des droits fondamentaux de la personne, et notamment les violations des droits à la vie, à l'intégrité de la personne, à la liberté en relation avec le conflit armé intérieur et la violence politique dont souffre le pays. Cette institution a une telle importance que le gouvernement actuel a désigné le Vice-président de la République pour la diriger en personne et directement.

Au sein du ministère de la Défense, il existe un secrétariat aux Droits de l'homme et aux Affaires politiques qui dépend directement du Bureau du ministre. En outre, des bureaux des droits de l'homme et du droit international humanitaire ont été mis en place dans les garnisons militaires et dans les unités de la police. Le rôle du secrétariat et des bureaux susmentionnés comprend, entre autres aspects, l'augmentation des normes en matière de respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire de la part des forces armées et de la police, le renforcement et l'accroissement de l'efficacité des systèmes internes de contrôle et les sanctions pour conduite attentatoires aux droits de l'homme ainsi que la consécration du respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire en tant qu'élément fondamental de la stratégie des forces armées et de la police nationale dans leur lutte contre la subversion et le narticotrafic et la délinquance.

Le bureau du Procureur général de la nation, entité chargée de l'accusation dans le système judiciaire, comporte une unité nationale des droits de l'homme et un bureau chargé des affaires internationales qui d'office ou en réponse aux dénonciations et aux plaintes sont chargés de diligenter des enquêtes sur les délits et d'accuser les prévenus d'infractions à la loi pénale devant les juges et les tribunaux compétents. Il convient de ne pas oublier que le bureau du Procureur général est une institution en Colombie qui dépend de la branche judiciaire des pouvoirs publics et non de la branche exécutive.

En ce qui concerne le bureau de l'Avocat général de la nation, l'organe de contrôle de l'administration publique, un bureau chargé des droits de l'homme a été institué dont la fonction est de rechercher les solutions et d'apporter sa médiation dans les conflits occasionnés par les violations des droits de l'homme, spécialement pour les actes de génocide, de torture, de disparition de personnes, que les membres du ministère de la Défense nationale, des forces armées et militaires et de la police, ainsi que des fonctionnaires du personnel des organismes liés à ces institutions et autres fonctionnaires et employés publics peuvent avoir provoqués dans l'exercice de leurs fonctions. Au sein de l'organe de défense du peuple, organe qui fait partie du ministère public, se trouve une direction de promotion et de divulgation des droits de l'homme qui a, entre autres fonctions, celle de faire des recommandations et des observations aux autorités et aux particuliers en cas de menaces ou de violations des droits de l'homme et de faire connaître le contenu de la Constitution politique de la Colombie, spécialement en ce qui concerne les droits fondamentaux, sociaux, économiques, culturels, collectifs et autres.

La multitude des instruments législatifs et réglementaires qui règlent les différents aspects en relation avec la paix, du droit international humanitaire avec la sanction des violations des droits de l'homme, constitue l'autre manifestation de l'existence en Colombie d'une politique d'Etat bien différente de ce que les travailleurs suggèrent dans la plainte présentée à l'OIT. A titre purement illustratif, il convient d'indiquer les instruments législatifs et réglementaires suivants:

D'autres marques de la bonne volonté des autorités publiques en la matière sont le fait que le gouvernement colombien a souscrit à l'instrument créant la Cour pénale internationale qui a été approuvé à Rome en juillet 1998, ainsi que la demande faite par le gouvernement colombien d'étendre le mandat d'une année du bureau de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme en Colombie.

Maintenant, en ce qui concerne les cas concrets de violation des droits de l'homme soulevés par les travailleurs, le décret 1413 du 27 mai 1997 a institué la Commission interinstitutionnelle pour la promotion et la protection des droits de l'homme des travailleurs. La composition de cette commission qui est mentionnée ci-dessous montre de manière patente l'engagement des hautes autorités gouvernementales en cette matière importante:

Les déclarations publiques et réitérées des hautes autorités publiques en faveur des droits de l'homme sont les suivantes en particulier:

A la suite de la réunion tenue le 16 février 1999, le Président de la République, le Vice-président, le ministre de l'Intérieur et dix délégués des ONG qui travaillent en Colombie, le vice-président, le Dr Gustavo Bell Lemus, ont annoncé que le gouvernement avait progressé dans la protection des vies des défenseurs des droits de l'homme et offert une sécurité accrue aux sièges des organisations en question. De même, ils ont signalé que, afin de renforcer le travail social accompli par les ONG et de mettre en relief l'importance que celles-ci ont dans la consolidation de la démocratie, les autorités gouvernementales leur offraient des espaces de diffusion dont elles disposaient pour une campagne en faveur du développement du respect de la vie et de la tolérance. Le ministre de l'Intérieur, de son côté, a annoncé la création d'un groupe d'élite créé immédiatement et composé de 25 spécialistes des droits de l'homme.

Le 19 janvier 1999, le Haut Commissaire pour la paix, le Dr Victor G. Ricardo, a présenté une déclaration qui contient la position du gouvernement national face aux groupes d'autodéfense de Colombie (AUC). Cette déclaration contient le paragraphe suivant:

Le 10 décembre 1998, lors de la cérémonie du 50e Anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Président de la République, après avoir expliqué que certains dans l'Etat ont trouvé le bouc émissaire qui leur permet de lancer des pierres et d'avoir à cause de lui la possibilité de se sentir innocents, a soutenu que, si l'Etat accepte de se compromettre, tous et chacun de nous en tant qu'individu, groupe syndical, communauté, collectivité, association, sommes coupables de la même manière.

Nous les employeurs et les entrepreneurs de Colombie reprenons ces dernières paroles du chef de l'Etat pour signaler que les affirmations et les plaintes légères qui, en matière de droits de l'homme, ont été lancées contre l'Etat, imprécises et inexactes qu'elles soient, ne contribuent en rien à apporter une solution à un problème extrêmement complexe. En conséquence, nous rejetons et condamnons les actes de violence dont les syndicalistes ont souffert, mais nous estimons que ces actes, en aucune manière, ne peuvent être attribués à une politique de l'Etat. La violence dont sont victimes les syndicalistes n'est pas distincte de celle dont souffrent les employeurs et les entrepreneurs et, en général, tous les Colombiens.

La législation nationale en relation
avec les conventions n
os 87 et 98 de l'OIT

En ce qui concerne le second motif de la plainte présentée par les travailleurs de Colombie contre le gouvernement, à savoir qu'il y aurait un manque de volonté de sa part d'introduire les réformes nécessaires pour harmoniser la législation interne avec les conventions nos 87 et 98 de l'OIT, les employeurs et les entrepreneurs de Colombie estiment également qu'ils ne sont pas d'accord car ils pensent qu'il s'agit d'une affirmation qui méconnaît complètement les efforts accomplis au cours des dernières dix années pour obtenir cette harmonisation. Ces efforts ont été salués par la Commission d'experts de l'OIT qui les a mentionnés avec satisfaction.

Ces efforts méritent une mention particulière en ce qui concerne l'adoption de la loi 50 de 1990 par laquelle ont été introduites plusieurs modifications à la partie du droit collectif du Code substantif du travail, précisément visant à renforcer la protection contre la discrimination antisyndicale et en faveur du droit d'association, droit qui est protégé par l'article 39 de la Constitution dans les termes suivants:

La Constitution dispose également que les conventions internationales du travail dûment ratifiées font partie de la législation interne.

Ainsi, l'affirmation selon laquelle en Colombie il existe une politique de l'Etat de répression du mouvement syndical et de désir explicite d'empêcher l'harmonisation de la législation interne avec les conventions respectives de l'OIT manque de toute justification, surtout quand, au-delà des normes constitutionnelles susmentionnées, les lois 26 de 1976 et 27 de la même année respectivement ont incorporé dans la législation interne les conventions nos 87 et 98.

Ce qui est advenu, et cela non à cause d'une politique d'Etat antisyndicale mais à cause d'un développement naturel et propre à tout processus d'harmonisation législative, c'est un déphasage dans la mesure où les changements ne s'opèrent pas de manière automatique, et ce, surtout, si les changement en question ne dépendent pas d'une seule entité étatique.

En Colombie, la structure de l'Etat comporte les trois branches des pouvoirs publics, à savoir le législatif, l'exécutif et le judiciaire, chacun ayant des attributions et une autonomie propres. En conséquence, les changements aux dispositions de la législation du travail ayant force de loi doivent être adoptées par le Congrès de la République, et ne sont pas imposées par le pouvoir exécutif, dont les attributions ne sont que de présenter et de défendre les projets de lois.

Après l'adoption de la loi no 50 de 1990, le gouvernement a élaboré et soumis au Congrès les projets de loi visant à mettre la législation interne en pleine conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le fait que les projets n'aient finalement pas été approuvés obéit à ce que l'activité du Congrès était tournée vers d'autres sujets qui, dans les circonstances actuelles de désordre public, devaient être traitées avec un e plus grande urgence.

En somme, il convient de ne pas imputer au gouvernement le manque de diligence dans la mise en œuvre des modifications attendues pour une complète adéquation de la législation interne colombienne avec les conventions nos 87 et 98 de l'OIT.

Par ailleurs, la volonté réelle de l'Etat en ce qui concerne les relations de travail et syndicales est également reflétée dans l'article 56 de la Constitution nationale qui prévoit la création d'une commission permanente composée du gouvernement, de représentants des employeurs et de représentants des travailleurs chargée du développement des bonnes relations professionnelles et de contribuer à la solution des conflits collectifs du travail ainsi que de la concertation en matière de politiques salariales et professionnelles. Cette commission qui a été constituée en application de la loi no 278 de 1996 a siégé à plusieurs reprises, délibérant sur plusieurs questions, dont l'accord sur le salaire minimum légal de 1998.

L'Organisation internationale du Travail peut porter témoignage des activités du pays en faveur de la promotion d'une nouvelle culture des relations professionnelles fondée sur la concertation et le dialogue entre les actions sociales et le sens de la justice dans un esprit de coordination économique et d'équilibre social, étant donné que plusieurs de ces activités ont bénéficié des auspices de l'OIT.

En conclusion, comme on l'a dit en ce qui concerne la violence en Colombie, on ne peut juger d'une situation générale en regardant des faits isolés et hors de contexte.

F. Décision du Conseil d'administration
à sa 274
e session (mars 1999)

214. A sa 274e session (mars 1999), le Conseil d'administration a décidé de reporter à sa 276e session (novembre 1999) la décision de la constitution d'une commission d'enquête et de la nomination de ses membres.

G. Décision du Comité de la liberté syndicale
et du Conseil d'administration
à sa réunion de juin 1999

215. A sa réunion de juin 1999, le Conseil d'administration a approuvé et adopté la décision du comité reproduite ci-dessous:

H. Nouvelle réponse du gouvernement

216. Dans ses communications concernant les cas en instance devant le comité, le gouvernement a envoyé des informations concernant certaines questions abordées dans la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT, en particulier en ce qui concerne les actes de violence (voir le document relatif au cas no 1787, paragr. 16 à 90). Dans sa communication du 12 août 1999, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale déclare qu'il attire l'attention du gouvernement sur le fait que le Comité de la liberté syndicale se soit limité, dans son 314e rapport, à présenter des conclusions et des recommandations uniquement dans les cas en instance (nos 1787, 1948, 1955, 1962, 1964 et 1973) et qu'il ne s'est pas prononcé sur la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. Comme le gouvernement l'a signalé à la sixième session du Conseil d'administration de mars 1999 «... en agissant de la sorte, le Comité de la liberté syndicale donne un témoignage de la prudence et du sérieux avec lequel il assume l'acquittement de ses fonctions mais aussi de la complexité de la question qui n'admet pas de visions simplistes ni de jugements hâtifs, et qu'au contraire il demande au Conseil, responsable constitutionnel de la décision, un examen minutieux et direct de cette vaste thématique avec une évaluation judicieuse des affirmations, des arguments, des répliques, des démentis et des précisions que mon gouvernement a fait sur les fondements de cette plainte». Par ailleurs, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a transmis une communication en date du 1er septembre 1999, reproduite ci-dessous:

217. Dans sa communication du 23 septembre 1999, le ministre du Travail indique:

218. Lors de la réunion d'adoption de son rapport, le comité a été informé qu'une communication du gouvernement a été reçue par le BIT le 11 novembre 1999. Conformément à sa pratique habituelle, le comité n'a pas pris cette communication en considération à sa présente session, en raison de la réception trop tardive de la communication en question.

I. Recommandations du comité

219. Le comité a considéré de nouveau le contenu de la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT et de la réponse que le gouvernement a fournie à cet égard. Le comité déplore qu'aucun progrès significatif n'ait été accompli dans les cas en instance et veut croire que le Conseil d'administration prendra en considération cet élément dans sa décision d'établir ou non une commission d'enquête.

Genève, le 12 novembre 1999.

Max Rood,
Président.

Points appelant une décision:


57.  République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature, Indicateurs de la justice, Santafé de Bogotá, Conseil supérieur de la magistrature, Chambre administrative, 1998, p. 96.

58.  Sur ce total, 2,9 pour cent étaient des conflits administratifs et 8,8 pour cent étaient des conflits interfamiliaux. Voir, à ce sujet, République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature. Indicateurs..., op. cit., p. 97.

59.  Ces délits sont l'homicide, les coups et blessures, la séquestration et le vol aggravé. Source: police nationale.

60.  L'agro-industrie est assez limitée et comprend l'exploitation de la banane, du palmier à huile africain, des fleurs et de la canne à sucre.

61.  Source: police nationale.

62.  Service national de planification, La paix: le défi du développement, Santafé de Bogotá, Tiers monde et Service national de planification, 1998, p. 50.

63.  Source: police nationale.

64.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 51.

65.  République de Colombie, police nationale, La criminalité..., op. cit., p. 387.

66.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 70 et 71. En outre, il convient de signaler que le taux de change du dollar des Etats-Unis était de 1 542,11 pesos pour 1 dollar à la fin de 1998.

67.  République de Colombie, police nationale, La criminalité..., op. cit., p. 386. On ne tient pas compte ici des blessures personnelles coupables.

68.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 72.

69.  Comme nous l'avons déjà signalé, le taux de change de 1 dollar des Etats-Unis était de 1 542,11 pesos colombiens au 31 décembre 1998.

70.  Rapport du ministère public de la nation du 10 décembre 1998.

71.  Il est à signaler que 23 pour cent des décès de mères en Colombie sont causés par des avortements mal pratiqués. Voir, à ce sujet, Lucero Zamudio «L'avortement en Colombie; dynamique sociodémographique et tensions socioculturelles», La justice de notre temps, Bogotá, Université externe de Colombie (sous presse), pp. 13 et 14.

72.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 51.

73.  République de Colombie, police nationale, La criminalité..., op. cit., p. 391.

74.  République de Colombie, police nationale, La criminalité..., op. cit., p. 393.

75.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 75.

76.  République de Colombie, police nationale, La criminalité..., op. cit., p. 394.

77.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 69 et 75.

78.  Nations Unies, Programme international de lutte contre la drogue, World drug report, Oxford, Oxford University, 1997, pp. 264 et 265.

79.  Francisco Thoumi, Economie politique et narcotrafic, Santafé de Bogotá, Tiers monde, première réédition, 1996, pp. 204 et 207.

80.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 52 et 53.

81.  On trouvera une relation analytique de la violence dérivée du narcotrafic dans le livre de Germán Silva García, La justice passera-t-elle? La criminalité et la justice pénale en Colombie, Santafé de Bogotá, Université externe de Colombie, 1997, pp. 319 et suiv.

82.  L'exception reste le cas d'Urabá, où les affrontements, en tout cas politiques, entre les FARC et l'EPL avaient à l'origine un caractère syndical.

83.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 50 à 52.

84.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 7, 82 et 83.

85.  Alonso Salazar. La queue du lézard, Medellín, Groupe de liaison du ministère des Communications, 1998, p. 118.

86.  CEPAL, Bilan économique de l'Amérique latine et des Caraïbes, 1997.

87.  CEPAL, Bilan..., op. cit.

88.  Sur les antécédents susmentionnés, voir Mgr Germán Guzmán; Orlando Fals Borda; Eduardo Umaña Luna. La violence en Colombie, Bogotá, Tiers monde, tome 1, 2e édition, 4e réimpression, 1963, pp. 46 et 48. Voir également Carlos Arango Z., FARC vingt ans, Bogotá, Aurora, 2e édition, 1984, pp. 61 et suiv.

89.  Au sujet de ces liens, voir par exemple Jacobo Arenas, Journal de la résistance de Marquetalia, Abejón Mono, 2e édition, 1972, p. 81, et Jacobo Arenas, Cessez-le-feu, Bogotá, Oveja Negra, 2e édition, 1985, p. 75, ainsi que Fernando Landazabal Reyes, Conflit social, Medellín, Bedout, 1982, pp. 262 et 263.

90.  «La Violence» trouve son origine dans les conflits politiques qui ont eu lieu entre les deux partis politiques traditionnels (le parti libéral et le parti conservateur) et qui ont laissé un solde estimé à 300 000 morts au cours de l'époque susvisée. Le conflit s'est acheminé vers une solution avec un accord politique de réconciliation réalisé en 1958, et connu sous le nom de «Front National» qui comportait l'amnistie pour les divers groupes qui avaient pris les armes. Toutefois, certaines bandes ont continué leurs activités jusqu'aux alentours de 1964; après cette date, seules quelques factions communistes ont continué à opérer, repoussant l'option qui leur était offerte de réintégrer la légalité. Sur la phase finale de la période de la violence, on peut consulter: Gonzalo Sánchez; Donny Meertens, Bandits, caciques et paysans, Bogotá, El Ancora, troisième édition, 1985, pp. 42, 47 et 48.

91.  Pendant des décennies, on a prêché la doctrine de la «combinaison de toutes les formes de lutte», ce qui incluait les actions réalisées dans le cadre de la légalité aussi bien que celles à caractère subversif. Toutefois, alors que les FARC représentent un pouvoir réel fondé sur les armes, les partis politiques de gauche, y compris le Parti communiste, ont obtenu au cours des dernières élections des résultats dérisoires, même s'ils leur ont permis de gagner des sièges au Parlement. Cela explique la prédominance politique des FARC et de leur modèle de révolution au moyen de la violence.

92.  Déclarations de Manuel Marulanda Vélez, dans Carlos Arango Z., FARC..., op. cit., p. 95.

93.  C'est le leader historique des FARC, qui a pris les armes depuis l'époque de «La Violence». Son principal idéologue, Jacobo Arenas, est mort de mort naturelle il y a quelques années.

94.  L'organisation de base est décrite dans Jacobo Arenas, Cessez-le-feu, op. cit., p. 95.

95.  William Ramírez Tobón, Etat, violence et démocratie, Bogotá, Tiers monde et Université nationale, 1990, pp. 59 et suiv.

96.  Jesús Antonio Bejarano et al., Colombie: insécurité, violence et réalisation économique dans les zones rurales, Bogotá, FONADE et Université externe de Colombie, 1997, p. 132.

97.  Selon cette théorie, l'Amérique latine utilise les conditions objectives appropriées pour le développement de la révolution, qui trouvaient leurs origines dans les conditions de pauvreté et de marginalisation de la population de ses pays, bien qu'elle manquait des conditions subjectives indispensables, c'est-à-dire de la formation de groupes de guérilleros qui devaient constituer les noyaux organisés, politiquement conscients, capables de promouvoir et de diriger le processus révolutionnaire. Par conséquent, il suffisait de créer un «foyer» de la guérilla pour servir de détonateur à la révolution. Dans ce sens, on peut consulter Ernesto «Che» Guevara, Œuvres complètes, Buenos Aires, Cepe, deuxième édition, 1973, p. 27. Toutefois, la recherche sociale a démontré que la subversion politique ou la criminalité en général ne se développent pas mieux ou avec une plus grande intensité dans les pays où règnent des conditions socio-économiques difficiles; au contraire, elles prospèrent dans les nations, les régions ou les localités où existe une plus grande richesse relative. Par ailleurs, l'évolution des mouvements insurrectionnels en Amérique latine a démontré l'échec de la stratégie du foyer révolutionnaire.

98.  Ulises Casas, Origine et développement du mouvement révolutionnaire colombien, Bogotá, 1980, p. 124.

99.  Au cours de l'«opération Anorí» (1974), l'armée colombienne lui fit subir de sérieuses pertes et détruisit sa structure militaire. La disparition de ses leaders eut pour cause, en partie, des purges internes au cours desquelles ses dirigeants furent exécutés (Víctor Medina Morón, Ricardo Lara Parada, Jaime Arenas), expulsés ou exilés (Fabio Vásquez Castaño); elle fut, en partie, le résultat d'affrontements armés avec les forces de l'Etat (Camilo Torres, Domingo Laín, Manuel et Antonio Vásquez Castaño).

100.  Pour la période 1991-1996, les revenus de l'ELN ont été estimés à 1 314 999 millions de pesos. Voir à ce sujet Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 78.

101.  Germán Silva García, Délit..., op. cit., p. 75.

102.  Entre 1986 et 1996, les réparations des dommages aux oléoducs du pays ont coûté à l'entreprise nationale de pétrole 592 000 millions de pesos, chiffre supérieur au budget de la justice de 1998. Voir, à ce sujet, Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 7 et 8.

103.  Fernando Landazabal Reyes, Facteurs de violence, Bogotá, Tiers monde, édition, 1981, p. 113.

104.  Jesús Antonio Bejarano et al., Colombie: insécurité..., op. cit., p. 132.

105.  Fabiola Calvo O, Dix hommes. Une armée. Une histoire, Bogotá, ECOE, 1985, p. 37.

106.  Fabiola Calvo O., ibid., p. 121.

107.  Ont été notamment assassinés des dirigeants et des travailleurs de SINTRAINAGRO, organisation syndicale de la région productrice de bananes à Urabá.

108.  Francisco Caraballo a été arrêté par la suite et il purge actuellement une peine de prison.

109.  Ce groupe s'est fait connaître avec la séquestration de Juan Carlos Gaviria, frère du Secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA) et l'attentat contre l'avocat Antonio José Cancino.

110.  La législation qui les autorisait a été déclarée inconstitutionnelle par la Cour il y a déjà plusieurs années.

111.  Les groupes de «propreté sociale», fréquemment présents dans les espaces urbains, s'étaient spécialisés dans l'assassinat des indigents, des jeunes soupçonnés d'avoir des liens avec la criminalité et des personnes ayant des antécédents pénaux. Ces groupes n'ont pas eu de présence continue, surgissant et disparaissant rapidement, sans qu'apparemment ils aient eu une structure majeure.

112.  Les milices sont un phénomène urbain, favorisées d'abord par le M-19 et ensuite par l'ELN, dans certaines villes comme partie de leur projet révolutionnaire, notamment à Medellín, vers le milieu des années quatre-vingt. Elles étaient constituées en bandes d'autodéfense contre la délinquance dans certains quartiers, en bandes de jeunes dont la principale occupation était la criminalité, ou en groupes de tueurs à gages. Les bandes de tueurs à gages, en partie issues des milices, se sont souvent converties dans les appareils militaires ou de sécurité des trafiquants de drogues. Leur activité principale consistait à commettre des assassinats contre le paiement d'une certaine somme d'argent. Leurs victimes étaient en général des juges ou des procureurs, des policiers ou des hommes politiques ennemis des trafiquants de drogues. Sur cette question, on peut consulter: Alonso Salazar J. et al., La genèse des invisibles, Santafé de Bogotá, Programme pour la paix de la Compagnie de Jésus, 1996, pp. 142 à 145.

113.  Pablo Escobar et Gonzalo Rodríguez Gacha ont été tués par la police nationale. On suppose que Fidel Castaño est mort, bien que son décès n'ait pu être confirmé.

114.  Ciro Krauthausen, Luis Fernando Sarmiento, Cocaïne..., op. cit., p. 97.

115.  On estime à plus d'un million d'hectares des meilleures terres du pays acquises par les trafiquants de drogues. Bon nombre de ces propriétés sont actuellement occupées et soumises à des procédures légales pour obtenir l'annulation des titres de propriété étant donné leur origine illicite.

116.  La guerre menée par les groupes d'autodéfense du Magdalena Medio a eu pour résultat l'assassinat de plus de 1 000 militants de l'Union patriotique, dont son candidat à la présidence Jaime Leal, qui avait été vice-président de FENALTRASE et président d'ASONAL JUDICIAL, organisation syndicale des travailleurs de l'Etat. Parmi les personnes assassinées, il y avait un nombre élevé de dirigeants et de travailleurs syndicalistes.

117.  Notamment dans la région d'Urabá, ils ont assassiné massivement des travailleurs de SINTRAINAGRO, qui travaillaient à la production de bananes.

118.  A cette époque a commencé le processus de dissolution des groupes d'autodéfense, touchés non seulement par la guerre sans merci que livraient les trafiquants de drogues contre l'Etat colombien, mais aussi par les fractures internes entre les trafiquants de drogues. Les principaux dirigeants des groupes d'autodéfense de l'époque furent assassinés lors de conflits internes ou portés disparus par la police nationale. Au sujet des assassinats de policiers, Pablo Escobar avait offert de payer une somme d'argent pour chaque agent de police assassiné et un montant supérieur pour chaque officier de police assassiné, ce qui a provoqué une vague d'exécutions.

119.  Víctor et Henry Pérez, les principaux chefs de l'appareil militaire des groupes d'autodéfense du Magdalena Medio, ont été tués dans des actions distinctes.

120.  Jesús Antonio Bejarano et al., Colombie: insécurité..., op. cit., p. 131.

121.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 79.

122.  Voir, à ce sujet, Germán Silva García, La justice passera-t-elle? op. cit., pp. 323 et suiv.

123.  Cela a conduit à l'ouverture de nombreux procès pénaux et à la condamnation de dirigeants politiques et sociaux, ainsi que d'anciens fonctionnaires de l'Etat, sous l'accusation d'enrichissement illicite et d'autres infractions associées au commerce de la drogue.

124.  Ciro Krauthausen, Luis Fernando Sarmiento, Cocaïne..., op. cit., p. 96.

125.  Jesús Antonio Bejarano et al., Colombie: insécurité..., op. cit., p. 118. Sur la diversification et l'expansion économique et la constitution de pouvoirs locaux, voir le Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 74.

126.  Ciro Krauthausen, Luis Fernando Sarmiento, Cocaïne..., op. cit., pp. 95 et 204.

127.  Sur le banditisme comme moyen et la révolution politique comme objectif, voir Germán Silva García, Délit..., op. cit., pp. 75 et 76. Egalement Alfredo Rangel Suárez, Colombie: Guerre..., op. cit., pp. 148 et suiv.

128.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 81.

129.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 81.

130.  Le maire est le chef politique d'une municipalité, élu au suffrage populaire. Les membres du conseil municipal ou assemblée municipales sont élus au suffrage populaire.

131.  William Ramírez Tobón, Urabá..., op. cit., p. 58.

132.  Le Code de procédure pénale dispose que, pour imposer la détention préventive d'un citoyen, il faut qu'il y ait une déclaration d'un témoin ou au moins un indice grave de responsabilité.

133.  Jesús Antonio Bejarano et al., Colombie: insécurité..., op. cit., p. 136.

134.  «FARC: elles interdisent les élections dans 23 municipalités», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 23 oct. 1997.

135.  «La violence s'acharne contre les politiques», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 10 août 1997.

136.  «Chiffres de la violence politique dans le pays», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 14 sept. 1997.

137.  Source: rapports du ministère public de la nation.

138.  Service national de planification, La paix..., op. cit., p. 19.

139.  Rapport de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme en Colombie. E/CN.4/1998/16, paragr. 10 et 11.

140.  A cet égard, voir les déclarations de Carlos Castaño, chef des AUC, dans lesquelles il fait la distinction entre les militants de la gauche démocratique et les militants de la gauche «qui rend service à la guerre», dans «La gauche n'est pas un objectif militaire», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 29 sept. 1997.

141.  A cet effet, voir «Nouveau cap des droits de l'homme en Colombie», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 11 déc. 1998.

142.  «Peur des paramilitaires à Media Luna», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 14 déc. 1998.

143.  Sources: ministère public de la nation et bureau du Haut Commissaire pour la paix.

144.  Alonso Salazar. La queue du lézard, op. cit., p. 111.

145.  Alonso Salazar. La queue du lézard, op. cit., p. 118.

146.  République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature, Indicateurs..., op. cit., pp. 114 et 116.

147.  République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature, Indicateurs..., op. cit., p. 127.

148.  République de Colombie, ministère de la Justice et du Droit, Crime organisé et justice, Santafé de Bogotá, ministère de la Justice et du Droit, 1995, p. 32.

149.  Service national de planification, La paix..., op. cit., pp. 42 et 43.

150.  Source: ministère des Finances et du Crédit public.

151.  République de Colombie, ministère de la Justice et du Droit, Extinction de la propriété des biens, Santafé de Bogotá, imprimerie nationale, 1996, pp. 8 et suiv.

152.  Source: ministère public de la nation.

153.  Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme; Commission andine de juristes, La justice en chiffres, Lima, Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme et Commission andine de juristes, 1998, pp. 111, 112, 115, 116 et 117.

154.  République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature, Indicateurs..., op. cit., p. 16.

155.  République de Colombie, ministère de la Justice et du Droit, Le crime..., op. cit., p. 276.

156.  République de Colombie, Conseil supérieur de la magistrature, Indicateurs..., op. cit., p. 67.

157.  République de Colombie, ministère de la Justice et du Droit, Le crime..., op. cit., p. 207.

158.  Source: ministère de la Défense.

159.  Intervention de M. le Vice-président de la République, Gustavo Bell Lemus, à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, 1998, p. 6. Voir également le décret no 2429 de 1998.

160.  Source: ministère public de la nation.

161.  Source: bureau du Haut Commissaire pour la paix.

162.  Source: document remis par le vice-ministre des Affaires étrangères à la Commission des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies, 19 mars 1998, p. 11.

163.  Source: police nationale.

164.  Source: police nationale.

165.  Un mandat d'arrêt a été lancé contre un officier du grade de colonel, pour ses liens supposés avec l'assassinat du politicien conservateur Alvaro Gómez Hurtado.

166.  Rapport de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme en Colombie, rapport E/CN.4/1998/16, paragr. 175 et 178.

167.  Selon des sources non gouvernementales, avalisées par la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, en Colombie, les actes de violence sociopolitique étaient imputables dans une proportion de 76 pour cent à des «groupes paramilitaires», ou plutôt des groupes d'autodéfense, 18,6 pour cent à la guérilla et 4,4 pour cent à la force publique. Voir à ce sujet le rapport de la Haute Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, en Colombie, rapport E/CN.4/1998/16, p. 8.

168.  «Limites à l'immunité militaire», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 11 déc. 1998.

169.  Dans ce sens, on peut citer l'arrêt C-358 de la Cour constitutionnelle du 5 août 1997.

170.  L'article 214 de la Constitution dispose que: «En tout cas, les normes du droit pénal humanitaire seront respectées». Voir à ce sujet Jorge Ortega Torres (Compilador). La Constitution politique de la Colombie, Santafé de Bogotá, Temis, 1991, p. 99. En outre, la Cour constitutionnelle a conclu: «Les règles du droit international humanitaire sont aujourd'hui - par la volonté expresse des Constituants - des normes obligatoires en elles-mêmes sans besoin d'aucune ratification préalable et promulgation de normes réglementaires. Et elles le sont 'en tout cas' comme le précise la Charte elle-même»; voir à ce sujet la Cour constitutionnelle, arrêt 574, de 1994.

171.  Par exemple, l'incrimination pénale de «torture» existait déjà, mais la notion de génocide est sanctionnée sous la dénomination d'«homicide», la disparition forcée est sanctionnée comme «séquestration», etc.

172.  Arrêt de la Cour constitutionnelle C-225, 18 mai 1995.

173.  Sa criminalisation avait été suggérée il y a déjà quelque temps par différents organes et experts internationaux, et plus récemment par le président de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies dans sa déclaration sur la Colombie (6 avril 1998).

174.  Les concepts de personnes et biens protégés du droit international humanitaire sont largement développés dans cette disposition et dans celles qui sont citées à sa suite. L'acte punissable prévoit: «Le combattant qui, au cours d'un conflit armé, cause la mort d'une personne protégée selon les conventions internationales sur le droit humanitaire ratifiées par la Colombie encourt une peine d'emprisonnement de (...). Voir République de Colombie. Gaceta del Congreso, Santafé de Bogotá, no 139, imprimerie nationale, 6 août 1998, p. 29.

175.  «Le combattant qui, au cours d'un conflit armé et en vue de nuire à son adversaire ou de l'attaquer, simule la condition de personne protégée ou utilise indûment les signes de protection comme la Croix-Rouge ou le Croissant-Rouge (...) encourt pour cette conduite uniquement une peine d'emprisonnement de (...). Voir, à ce sujet, République de Colombie. Gaceta..., op. cit., p. 29.

176.  «Le combattant qui, au cours d'un conflit armé, procède à des représailles ou à des actes d'hostilité sur des personnes ou des biens protégés encourt une peine d'emprisonnement (...). République de Colombie. Gaceta..., op. cit., p. 30.

177.  «Quiconque au cours d'un conflit armé, et ayant l'obligation de le faire, omet l'adoption de moyens pour la protection de la population civile encourt une peine d'emprisonnement de (...). République de Colombie. Gaceta..., op. cit., p. 30.

178.  Pour les détails sur les articles du projet, voir République de Colombie, Gaceta..., op. cit., pp. 27, 29, 30, 31 et 32.

179.  A ce sujet, on peut mentionner les déclarations fréquentes de chefs de la guérilla dans lesquelles ils déclarent «objectifs militaires» les personnes de la population civile ou des fonctionnaires de l'Etat, comme les maires élus au suffrage universel ou les employés du Registre national de l'état civil chargés de diriger et de superviser les processus électoraux démocratiques. En outre, les bandes d'autodéfense ou les bandes armées d'extrême droite établissent et publient régulièrement de longues «listes noires» de personnes menacées d'assassinat. A cela il convient d'ajouter le grand nombre de personnes qui doivent être protégées contre de possibles attentats de la part de groupes de narcotrafiquants qui, tout au long de l'histoire récente de la Colombie, ont démontré que l'assassinat individuel et même les massacres sont une de leurs tactiques favorites pour faire face à l'action de l'Etat et de la société civile.

180.  «Mea culpa...», op. cit., El Tiempo, 11 déc. 1998.

181.  Source: ministère de l'Intérieur.

182.  Source: ministère de l'Intérieur.

183.  «Jorge Ortega a refusé les escortes», a assuré le ministre de l'Intérieur, dans El Tiempo, Santafé de Bogotá, 22 oct. 1998. En effet, le 6 octobre 1998, deux agents du Département administratif de sécurité (DAS) avaient été proposés au dirigeant syndical pour le protéger, après étude de ses risques de sécurité, mais ils furent refusés par Ortega qui désirait désigner son escorte parmi les personnes bénéficiant de sa confiance. La position adoptée par Ortega fait partie du programme de protection du ministère de l'Intérieur, mais elle supposait le temps nécessaire pour entraîner les escortes qu'il avait choisies, sans compter les crédits nécessaires pour les armer et les doter de véhicules.

184.  Décret no 1413 de 1997, art. 12.

185.  Les citations des interventions du Président de la République, Andrés Pastrana, ont été fournies par le bureau du Haut Commissaire pour la paix.

186.  «Pastrana a lancé le 'Plan Colombie'», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 20 déc. 1998.

187.  Voir, par exemple, Sergio Ocampo Madrid, «Pastrana ou l'audace pour la paix», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 27 déc. 1998.

188.  Un acte sans précédent dans l'histoire de la Colombie.

189.  «Le gouvernement avalise des rencontres entre l'ELN et la société civile», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 7 oct. 1998.

190.  «Lina María libérée hier soir», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 19 déc. 1998.

191.  «Les AUC convoqueront une assemblée nationale de la paix», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 11 déc. 1998.

192.  Les Etats-Unis ont assumé la coopération dans le processus de paix comme une de leurs priorités, étant donné que la solution du conflit armé en Colombie a des implications importantes dans divers domaines, comme par exemple le trafic des stupéfiants.

193.  A facilité l'organisation, sur son territoire, de réunions avec la guérilla.

194.  Juan Carlos Iragorri, «Fidel Castro, prêt pour faciliter la paix», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 18 oct. 1998. Voir aussi «Pastrana demandera à Cuba d'être garant», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 28 déc. 1998.

195.  «Soutien ibéro-américain général au processus de paix», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 16 oct. 1998.

196.  «Chávez envoie un message de paix aux FARC», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 19 déc. 1998.

197.  «Ils n'ont plus d'autre option que la paix», El Tiempo, Santafé de Bogotá, 28 déc. 1998.

198.  Des soixante-dix délégués élus démocratiquement à l'Assemblée constituante, 19 appartenaient au mouvement politique M-19 qui a reçu le plus fort appui électoral lors du scrutin.

199.  Il convient de signaler qu'à la différence du préambule de diverses Constitutions celui de la Colombie est juridiquement contraignant et n'exprime pas simplement un ensemble de bonnes intentions de la Charte politique.

200.  Barroso Figueroa, José: «Derecho Internacional del Trabajo» (ed. Porrúa, Mexico, 1987).


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